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AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Accouchement inopiné à domicile

P Rozenberg

Q ue faire quand, appelé parfois pour une douleur abdominale, vous faites face à une femme en travail ?

© Elsevier, Paris.


S’il s’agit d’une primipare, la séquence des dans une fosse iliaque en cas de présentation
Introduction événements est suffisamment lente, en dehors de transverse imposant la césarienne si les membranes
toute situation pathologique, pour discuter le sont rompues ou si la patiente est en travail. Dans
transfert en centre spécialisé (par exemple, le délai tous les cas, le diagnostic de présentation sera
L’accouchement inopiné survient en général dans moyen entre la dilatation complète et le effectué en dehors des contractions.
deux circonstances, au pronostic très différent. dégagement est d’environ 1 heure). Elle précisera également la fréquence et la durée
Le plus souvent, il s’agit d’une grande multipare, des contractions utérines (dureté du muscle utérin au
dont la souplesse du col est telle qu’il lui suffit de Antécédents obstétricaux
travers de la paroi abdominale).
quelques contractions utérines pour accoucher très Ce sont les césariennes (nombre et motif),
rapidement. L’assistance médicale se limite alors l’accouchement prématuré ou rapide, le placenta Auscultation cardiaque fœtale
presque simplement à une expectative prudente prævia, la présentation du siège, l’hémorragie de la
Elle s’effectue à l’aide du stéthoscope de Pinard, à
jusqu’à l’expulsion et l’équipe médicale s’attellera délivrance et toute pathologie potentiellement
la recherche les bruits du cœur : un peu au-dessous
surtout à donner les premiers soins à un nouveau-né récurrente.
de l’ombilic maternel si le fœtus est en présentation
bien portant. Terme de cette grossesse céphalique, un peu au-dessus de l’ombilic si le fœtus
Parfois, en revanche, le contexte est dramatique, Si celui-ci est connu : l’accouchement est dit à est en présentation du siège.
car l’accouchement est le terme soudain d’une terme s’il survient à partir de 37 semaines Dans tous les cas, le stéthoscope devra être placé
grossesse à risque : menace d’accouchement d’aménorrhée (SA), c’est-à-dire 8 mois révolus. du côté du dos fœtal. Le rythme cardiaque est
prématuré, grossesse gémellaire, placenta prævia, Avant, il s’agit d’un accouchement prématuré dont la normal si la fréquence est comprise entre 120 et 160
hématome rétroplacentaire. La pathologie, qui survenue, en dehors d’un milieu obstétricopédia- battements par minute (Bpm). Au-delà de 160 Bpm,
menace déjà lourdement le fœtus et parfois la mère, trique, grève souvent le pronostic néonatal. la tachycardie doit faire évoquer de première
est alors considérablement grevée par l’accou- intention une infection fœtale. En deçà de 120 Bpm,
chement à domicile. Le but de l’équipe médicale est Pathologies associées
voire de 100 Bpm, il s’agit d’une souffrance fœtale
alors de tenter (tant bien que mal), dans des Une pathologie éventuelle concernant la aiguë imposant un accouchement rapide.
conditions d’exception, de réduire ce handicap par grossesse en cours est-elle connue ? Il peut s’agir
des gestes simples, précis et opportunément d’un utérus cicatriciel ou d’un accouchement Toucher vaginal
salvateurs. prématuré, d’une grossesse multiple, d’un placenta
Il fournit des renseignements capitaux.
prævia responsable d’hémorragie, d’une
hypertension artérielle ou d’un diabète dont On apprécie d’abord le degré d’effacement et de


l’accouchement inopiné peut être le témoin d’une dilatation du col utérin. Chez la primipare,
Examen de la parturiente décompensation (pré-éclampsie, acidocétose), l’effacement précède la dilatation du col. Chez la
nécessitant des soins de réanimation maternelle multipare, ces deux phénomènes se produisent
particuliers, d’une fièvre évoquant une listériose ou simultanément. Avant tout début de travail, le col est
‚ Interrogatoire une pyélonéphrite. long d’environ 3 cm. Effacé, on ne perçoit plus qu’un
anneau très fin plus ou moins dilaté. La dilatation est
Dés l’arrivée au domicile, le premier temps est On complétera cet interrogatoire par la recherche
d’abord exprimée en doigts, tant qu’il persiste une
l’interrogatoire, à moins que la présentation ne soit à de documents d’autant plus utiles que la patiente ne
certaine épaisseur de col (par exemple, col court
la vulve, imposant l’action avant la réflexion. On parle pas la langue française : carnet de maternité et
perméable à deux doigts), puis en centimètres
précisera divers éléments. échographies donnant des renseignements capitaux
lorsque ce dernier est effacé. Le degré de dilatation
concernant la présentation et l’insertion du placenta
s’apprécie en écartant les deuxième et troisième
Délai écoulé depuis le début des contractions si l’examen est récent, et le terme de la grossesse.
utérines et intensité de celles-ci doigts dans l’aire de dilatation (par exemple,
‚ Examen obstétrical dilatation de 5 cm). Lorsque la dilatation est plus
Des contractions très douloureuses (la douleur avancée, elle est évaluée sur le bourrelet de col
Inspection de la vulve
étant perçue dans les lombes ou l’abdomen), restant (par exemple à 9 cm). La dilatation étant
régulières, rapprochées (toutes les 1 à 2 minutes), Elle recherche un éventuel écoulement liquidien :
complète (à 10 cm), on ne perçoit plus du tout de col
doivent faire redouter un accouchement imminent, clair (liquide amniotique), teinté (liquide méconial
et le segment inférieur de l’utérus est en continuité
surtout si ces douleurs sont associées à une envie de devant faire redouter une souffrance fœtale),
avec les parois vaginales, formant ainsi un défilé
pousser ou « d’aller à la selle ». sanglant (évoquant un placenta prævia, voire un
continu.
hématome rétroplacentaire).
© Elsevier, Paris

On recherche ensuite une éventuelle poche des


Parité Palpation eaux (qui est constituée par les membranes
Si la patiente est une grande multipare, Elle précisera le côté du dos, la présentation : pôle ovulaires perçues dans l’aire de dilatation). Sa
l’accouchement est probablement imminent, mais dur sus-pubien en cas de présentation céphalique, perception peut être difficile en dehors des
devrait se dérouler simplement. ou fundique en cas de présentation podalique, ou contractions. C’est pourquoi il faut examiner la

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patiente pendant une contraction. Si les membranes


sont intactes, on perçoit alors facilement une poche Tableau I. – Critères influençant les possibilités de transfert.
bombante et sous tension devant la présentation.
Accouchement à domicile Transfert
On confirme la variété de présentation. La
présentation céphalique (essentiellement du Parité Multipare Primipare
sommet) est la plus fréquente et est perçue sous
Terme ≥ 36 SA < 36 SA
forme d’un pôle dur et régulièrement arrondi. On
sent facilement les sutures et typiquement la petite Contractilité Régulière et douloureuse (≥ 4/10 min) Irrégulière et hypocinétique (< 4/10 min)
fontanelle (sous forme d’un triangle), sauf s’il existe Dilatation du col > 8 cm ≤ 8 cm
une bosse sérosanguine importante (apparaissant
après rupture des membranes). Présentation Céphalique Siège
En cas de présentation du siège, le pôle est Engagement + -
typiquement plus mou et irrégulier. La perception
des pieds témoigne d’un siège complet. Délai du transfert ≥ 1 heure < 1 heure
On précise également la hauteur de la
SA : semaines d’aménorrhée.
présentation, en sachant que chez la primipare, la
présentation est typiquement basse dès le début du
travail alors que chez la multipare, la présentation ne Tableau II. – Cas particuliers.
descend qu’en fin de dilatation. On décrit
Présentation transverse Transfert
classiquement trois niveaux de présentation :
– présentation haute, lorsqu’elle est facilement Procidence du cordon Dilatation complète : accouchement immédiat
refoulable par le toucher vaginal ; Sinon : transfert d’urgence (service receveur averti)
– présentation fixée, lorsqu ’elle ne peut plus être
Placenta prævia hémorragique Proscrire le toucher vaginal intracervical
mobilisée ; Recouvrant : transfert d’urgence
– présentation engagée, reconnue sur le signe de Non recouvrant : rupture des membranes
Farabeuf (les deuxième et troisième doigts de
l’examinateur, se dirigeant vers le sacrum l’un Éclampsie Anticonvulsivants puis transfert
au-dessus de l’autre, ne peuvent plus être introduits Grossesse gémellaire Accouchement à domicile de J2 si J1 est né
entre la présentation et le plancher pelvien) et
témoignant habituellement d’un accouchement
imminent. – l’importance des contractions utérines : des – accouchement gémellaire, souvent prématuré,
Enfin, le toucher vaginal vérifie l’absence de contractions utérines fréquentes, régulières et imposant l’accouchement du deuxième jumeau à
cordon ombilical au-devant de la présentation. Sa douloureuses, témoignent que la patiente est en domicile si le premier vient à naître inopinément
présence témoignerait d’une procidence du cordon, phase active du travail ; (tableau II).
grave car menaçant à très court terme le pronostic – le degré de dilatation du col utérin : en
vital du fœtus. Son diagnostic repose sur la moyenne, le délai d’accouchement, quand la ‚ Si le transfert est possible
perception, dans le vagin (voire à l’inspection de la dilatation est de 5 cm, peut être estimé à 3 heures Il faut d’abord prévenir la maternité d’accueil.
vulve), d’un cordon mou et typiquement battant et pour la primipare et à 1 heure pour la multipare. Ceci est d’autant plus indispensable qu’il existe une
impose un accouchement d’urgence si la dilatation Au total, il est des cas où l’imminence de complication (procidence du cordon, hématome
est complète. À défaut, le transfert en milieu l’accouchement est évidente : primipare à dilatation rétroplacentaire, éclampsie, placenta prævia
obstétrical doit être particulièrement rapide (on complète, multipare dont la dilatation est supérieure hémorragique...). L’équipe médicale receveuse peut
considère qu’au-delà d’une demi-heure, le pronostic à 8 cm, présentation engagée, voire ampliant le alors prendre les mesures adéquates qui réduiront
est catastrophique). périnée et donnant envie de pousser. Ailleurs, le les délais d’intervention (préparation du bloc
délai d’accouchement peut être plus difficile à opératoire, commande de culots sanguins, appel des
‚ Examen général
appréhender. Mais dans tous les cas, si ce délai anesthésistes et des pédiatres...).
Il se résume à la prise du pouls et de la tension Il faut ensuite transférer la patiente en position
prévisible est estimé à moins de 1 heure, il est
artérielle et à la recherche d’œdèmes. couchée, au mieux en décubitus latéral gauche,
prudent de se préparer à faire l’accouchement à
domicile, après avoir prévenu le samu. afin d’éviter le syndrome de compression cave

■ ■ Délai nécessaire au transfert vers la maternité durant le transfert.


Conduite à tenir la plus proche. Enfin, il faut mettre en place une voie veineuse
Ces paramètres doivent être pondérés en (voire deux en cas de complications) afin de perfuser
fonction de la survenue éventuelle de du Ringer Lactatet, du sérum glucosé ou des
‚ Critères permettant de juger macromolécules (selon les cas).
de la possibilité de transfert complications :
– présentation transverse à membranes ‚ Si l’accouchement à domicile
Ces critères sont présentés dans le tableau I.
rompues, imposant le transfert vers un centre est inéluctable
■ Délai prévisible de l’accouchement : ce
spécialisé, quel que soit le degré de dilatation du col,
paramètre peut être appréhender en évaluant :
l’accouchement par les voies naturelles étant En cas de présentation du sommet
– la parité : la femme accouche d’autant plus vite
impossible ; Typiquement, cet accouchement inopiné
que sa parité est grande ;
– la durée du travail écoulé : le travail dure en – placenta prævia hémorragique, pouvant concerne la grande multipare, mais parfois, il s’agit
moyenne 10 heures pour la primipare, 5 heures justifier la rupture des membranes avant tout de l’aboutissement d’une menace d’accouchement
pour la multipare ; transfert ; prématuré, survenant alors aussi bien chez la
– hématome rétroplacentaire, éclampsie, devant primipare que chez la multipare. Après avoir
orienter le transfert vers une structure comportant, recouvert un lit d’un drap propre, on installe la
Le problème essentiel à résoudre, au outre une maternité, un service de réanimation ; parturiente de sorte que ses pieds et ses fesses se
terme de ce bilan clinique, est de – accouchement prématuré, imposant le transfert retrouvent au bord du lit. On pose une perfusion de
savoir si la patiente peut être vers une structure comportant également un centre Ringer Lactatet ou de sérum glucosé à 5 %. Ensuite,
transférée sans grand risque vers une de néonatalogie ; on rase et on désinfecte la vulve à l’aide de
maternité, ou si l’accouchement doit – procidence du cordon, imposant l’accou- Bétadinet, et après avoir enfilé une paire de gants
être effectué à domicile. chement immédiat s’il est possible ou le transfert stériles, on réalise un sondage vésical. Enfin, on
urgentissime vers la maternité la plus proche ; prépare sur une table avoisinante recouverte d’un

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Accouchement inopiné à domicile - 3-1400

champ stérile (ou d’un drap propre), le matériel effort expulsif. Elle part de la fourchette et se dirige à appliquée sur l’occiput, exerçant une contre-pression
nécessaire à l’accouchement : ciseaux droits, pinces 45° vers la droite de la patiente. Un premier coup de et freinant le dégagement de la tête fœtale, d’autant
de Kocher, clamps de Barr, compresses stériles. Une ciseaux sectionne la peau et le vagin, tandis qu’un plus que dans ce contexte d’affolement général, la
autre table sera préparée pour recevoir et effectuer deuxième coup, dans l’incision précédente, coopération maternelle est rarement acquise.
les premiers soins au nouveau-né. sectionne le muscle (faisceau puborectal du releveur
de l’anus). En cas de présentation du siège
Le plus souvent, les membranes se sont
spontanément rompues. À défaut, il faut rompre la Dès lors, la résistance périnéale s’effondrant, la Cette situation est, bien sûr, plus inquiétante,
poche des eaux. Pour cela, il suffit, au cours d’une tête tend à se dégager d’elle-même. Elle sera retenue d’autant que la présentation du siège s’observe
contraction utérine (qui fait bomber la poche des par la main gauche de l’opérateur, qui exercera une fréquemment en cas d’accouchement prématuré
eaux), de percer les membranes à l’aide des mors contre-pression contrôlant totalement le (surtout avant 32 à 34 SA), le fœtus n’ayant pas
d’une demi-pince de Kocher tenue d’une main et dégagement. La main droite de l’opérateur, munie encore effectué sa mutation spontanée (en
introduite dans le vagin entre deux doigts guides de d’une compresse, ira chercher le menton fœtal, présentation céphalique).
l’autre main. Toutefois il faut au préalable vérifier qu’elle accrochera au travers du périnée. Il est En pratique, il faut tout d’abord vérifier l’absence
l’absence de procubitus du cordon (c’est-à-dire de impératif de demander à la patiente de ne plus d’arguments contre-indiquant la voie basse et
cordon situé au-devant de la présentation, car la pousser, afin d’éviter un dégagement brutal. Celui-ci imposant, si possible, le transfert en milieu
rupture des membranes conduirait inéluctablement sera entièrement contrôlé par l’opérateur : la main spécialisé :
à la procidence). Un écoulement de liquide clair est droite fait remonter le menton, tandis que la main – césarienne déjà programmée du fait d’un
rassurant, alors qu’un liquide teinté méconial doit gauche freine le dégagement. Le front, le nez, puis le bassin incompatible avec un accouchement naturel
faire craindre une souffrance fœtale. menton du fœtus se dégagent progressivement de en cas de siège ;
Le toucher vaginal vérifie la dilatation complète et la vulve. La tête a alors achevé son dégagement. – utérus cicatriciel : antécédent de césarienne,
précise la hauteur de la présentation. La tête est Il faut ensuite effectuer le mouvement de surtout si l’indication était une présentation du siège ;
souvent déjà sur le périnée, sinon la rupture des restitution : le nez fœtal, qui est orienté vers le bas, – macrosomie fœtale à terme, diagnostiquée sur
membranes entraîne la descente de la présentation doit effectuer une rotation de 180° afin que le fœtus une hauteur utérine importante et/ou une
sur le périnée. Dés lors, la patiente pousse regarde en haut. Le sens de rotation dépend du côté échographie récente ;
d’elle-même, tant l’envie est intense. De toutes du dos : si le dos est à gauche, ce mouvement de – placenta prævia, pourvoyeur de présentation
façons, il faut guider les efforts expulsifs : rotation s’effectuera dans le sens des aiguilles d’une podalique.
– en demandant à la patiente de saisir ses montre ; s’il est à droite, il sera réalisé dans le sens En outre, chez la primipare, le siège descend du
jambes au-dessous des genoux, tout en fléchissant trigonométrique. Si l’opérateur ignore le côté du dos, détroit supérieur au périnée en environ 30 à 60
les cuisses sur l’abdomen (position genu-pectorale), il suffit de lâcher la tête fœtale pour observer son minutes, et ne se dégage pas, en général, sans
ce qui a pour effet d’ouvrir le détroit inférieur mouvement spontané : elle amorce toujours son efforts expulsifs efficaces. On peut donc, en cas de
(mouvement de nutation) et donc de faciliter le mouvement de restitution, indiquant donc le sens de contre-indication évidente à la voie basse, gagner
dégagement ; rotation. Ce mouvement de restitution a pour but encore quelques minutes précieuses (pour assurer le
– en essayant de bien coordonner les efforts d’aligner les épaules dans un plan vertical, afin de transfert) en demandant à la patiente de ne surtout
expulsifs aux contractions utérines (la patiente faciliter leur dégagement. pas pousser.
pousse en fait spontanément lors des contractions le Parfois, on constate une circulaire du cordon En revanche, si le siège distend déjà le périnée
plus souvent, la tête appuyant et ampliant le autour du cou fœtal. S’il est lâche, il suffit de lui faire chez la primipare, ou s’il s’agit d’une multipare à
périnée). franchir la tête du fœtus afin de le lever. Sinon, il faut dilatation complète ou presque, l’accouchement à
Chaque effort expulsif débute par une expiration sectionner le cordon entre deux pinces de Kocher, domicile devient la situation la moins dangereuse.
forcée, suivie d’une inspiration profonde. La patiente puis le dérouler. Après avoir installé la patiente comme
pousse alors, glotte fermée (c’est-à-dire en apnée On termine l’accouchement par le dégagement précédemment, il faut diriger la période d’expulsion,
inspiratoire), le menton collé au thorax. Lorsque la des épaules : la tête fœtale est saisie à la base du afin qu’elle soit aussi brève que possible.
patiente est au bout de son effort, elle expire, puis cou, les deuxième et troisième doigts de chaque Pour en réduire la durée, il est important :
répète cette séquence deux à trois fois au cours de la main, placés en fourche, prennent appui sur les – que les efforts de poussée de la femme soient
contraction. Entre les contractions, la patiente doit se branches du maxillaire inférieur et les mastoïdes. La énergiques : la participation active de la parturiente
reposer et récupérer. tête fœtale est alors abaissée vers le bas, en même est indispensable au bon déroulement de
Sous l’effet des efforts expulsifs, le périnée temps qu’on demande à la patiente de pousser à l’accouchement ;
postérieur se tend, l’orifice anal devient béant et peut nouveau. L’épaule antérieure apparaît sous la – que les résistances périnéales soient réduites,
s’accompagner de l’émission de selles (si le rectum symphyse pubienne, puis devant elle. On dégage d’où l’absolue nécessité d’une large épisiotomie
est plein). Entre les contractions, la présentation alors l’épaule postérieure en continuant la traction, préventive.
remonte un peu. mais en changeant de direction : il faut tirer vers le Durant le dégagement, un principe essentiel ne
Puis le périnée antérieur se distend à son tour : la haut, l’épaule postérieure apparaît au niveau de la doit jamais être transgressé, sauf déroulement
distance anovulvaire s’accroît, l’orifice vulvaire se fourchette vulvaire. Cette étape du dégagement doit pathologique de l’accouchement : l’expulsion du
dilate progressivement en même temps qu’apparaît, être prudente, sous contrôle de la vue, le risque de fœtus ne doit résulter que des seules forces des
à chaque poussée, une partie de plus en plus grande déchirure périnéale étant là aussi très important. contractions utérines et des efforts de poussée de la
de l’occiput fœtal. Le périnée bombe, la peau Les épaules dégagées, l’accouchement est pour patiente, le dégagement idéal étant entièrement
s’amincit et devient blanche, notamment à la ainsi dire terminé. Il suffit de continuer, sans forcer, la spontané (c’est la classique méthode de Vermelin). Il
fourchette (commissure postérieure de la vulve). Il ne traction qui assure le dégagement de tout le reste du ne faut donc jamais toucher au fœtus durant
faut pas hésiter alors à pratiquer une épisiotomie, corps fœtal. l’expulsion, si elle se déroule simplement. C’est à
surtout si la patiente est primipare et l’opérateur peu L’enfant est alors posé sur un champ stérile (ou au cette condition impérative que peuvent être évités
expérimenté en matière d’accouchement. Celle-ci est moins un drap propre) installé préalablement sur le bien des accidents.
toujours facile à réaliser, alors qu’une déchirure ventre maternel. L’accouchement est achevé par la Il faut respecter les alternances de repos et de
vulvopérinéale peut provoquer des délabrements section, après clampage (entre deux pinces de contractions. Cette période dure environ 20 minutes.
importants, hémorragiques et difficiles à traiter. Kocher), du cordon ombilical. En cas de siège complet, un pied apparaît à la
L’épisiotomie doit être médiolatérale : les deuxième En conclusion, cet accouchement inopiné, vulve, puis l’autre. Ensuite, les deux membres
et troisième doigts de la main gauche sont introduits survenant souvent chez une grande multipare, se inférieures se dégagent. Le siège, à son tour, est
entre le périnée et la présentation. L’incision est déroule généralement très rapidement et expulsé.
pratiquée à l’aide de ciseaux droits, tenus dans la simplement. Dans ce cas, l’attention de l’opérateur se En cas de siège décomplété, le siège se dégage en
main droite. Une lame est placée entre le périnée et portera surtout sur la protection du périnée premier, suivi des deux membres inférieurs, en
les doigts intravaginaux de la main gauche, l’autre maternel. C’est rappeler l’importance d’une attelle le long du ventre fœtal.
lame restant en dehors de la vulve. L’incision est épisiotomie préventive, effectuée au moindre doute Dans les deux cas, l’épisiotomie est réalisée au
pratiquée au moment d’une contraction ou d’un quant au risque de déchirure périnéale, de la main moment où le périnée est le plus amplié. Le tronc

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Cette situation se rencontre presque toujours en


Tableau III. – Principes de l’accouchement selon la présentation. cas de grande ou petite extraction. Il faut réaliser
alors une manœuvre de Champetier de Ribes : en
Présentation du sommet Présentation du siège
même temps qu’un aide fait de l’expression
Sondage Sondage fundique afin de favoriser la flexion et la descente de
Efforts expulsifs Efforts expulsifs ++ la tête fœtale, l’opérateur va chercher la bouche du
fœtus (la hauteur de la tête rend cette manœuvre
± Épisiotomie Épisiotomie ++ pénible), y introduit l’index et le médius afin de
Dégagement contrôlé de la tête (contre-pression) Dégagement spontané fléchir et d’orienter la tête dans un diamètre oblique,
permettant ainsi son engagement. Puis, en tirant très
Mouvement de restitution Rotation dos en avant en bas, on réalise l’engagement marqué par un
Dégagement de l’épaule antérieure ± Manœuvre de Bracht ressaut. On termine enfin par une manœuvre de
(par abaissement) Mauriceau.
Dégagement de l’épaule postérieure Relèvement des bras → manœuvre de Lovset Relèvement des bras
(par relèvement)
Lorsque le dégagement s’arrête à l’ombilic,
Dégagement du reste du corps (traction douce) Rétention de tête dernière → manœuvre l’attitude classique est alors la petite extraction.
de Mauriceau Cependant, elle est aussi dangereuse ou presque
Délivrance dirigée (1 ampoule de Méthergint IM Délivrance dirigée (1 ampoule de Méthergint IM que la grande extraction. Il ne faut donc l’exécuter
après l’expulsion du nouveau-né) après l’expulsion du nouveau-né) que contraint par la nécessité, pas trop tard
cependant pour ne pas extraire un enfant moribond.
C’est ce juste milieu qui est difficile à trouver.
apparaît et le dos tourne en avant. Cette rotation en le plus souvent dans un diamètre oblique (droit ou
avant est indispensable et doit être contrôlée de gauche), parfois dans un diamètre sagittal (l’occiput On débute la petite extraction par l’engagement
façon très attentive, car toute rotation du dos en est alors derrière la symphyse pubienne). Les des épaules et le dégagement des bras. Elle est
arrière conduirait à une dystocie mécanique quasi deuxième et troisième doigts sont alors introduits réalisée au mieux par la manœuvre de Lovset. Elle
irréductible, condamnant l’enfant à une mort dans la bouche, jusqu’à la base de la langue, tandis consiste en une double rotation axiale du tronc du
certaine par asphyxie en quelques minutes. que les deuxième et troisième doigts de la main fœtus : l’opérateur saisit l’enfant à l’aide d’un champ,
L’expulsion complète du thorax, des membres restée libre peuvent être placés en « fourche », de en posant ses mains sur les hanches du fœtus, les
supérieurs accolés au tronc et de la tête doit survenir chaque côté du cou du fœtus, ou mieux, en bretelle pouces étant au niveau des articulations
dans les 5 minutes suivantes. sur ses épaules. En aucun cas cette main ne doit sacro-iliaques. Le premier temps consiste à tourner le
Le fœtus achève son dégagement sous l’effet de servir à tirer sur le fœtus : elle doit seulement fœtus, le dos du côté qui était le sien avant
son propre poids, le corps fœtal étant dans le vide l’accompagner. La main intravaginale doit, dès lors, l’engagement et ce, jusqu’à ce qu’il soit orienté
(les fesses de la mère sont au bord du lit et obéir à trois impératifs : latéralement et un peu en arrière. Le but est, en effet,
l’opérateur attend, avec un champ dans les mains – tenter de fléchir la tête fœtale en appuyant sur d’engager l’épaule postérieure sous le promontoire
placées juste au-dessous de l’enfant, prêt à la base de la langue ; et il faut donc aller un peu plus loin que le milieu
l’accueillir). – tourner la tête, si celle-ci est dans un axe pour que le bras relevé se trouve au-delà du
Durant cette courte période, le fœtus peut oblique, menton en arrière, occiput en avant ; promontoire.
effectuer quelques inspirations (trois à quatre en – dégager la tête ainsi fléchie et orientée en la On réalise ensuite une rotation d’arrière en avant
moyenne). La surveillance doit être très vigilante, afin faisant descendre puis pivoter autour du bord de 180° du dos du fœtus (qui ne doit jamais regarder
d’intervenir si l’expulsion tarde à se faire ou si le inférieur de la symphyse, dès que l’occiput fœtal est vers l’arrière), de sorte que l’épaule postérieure
nombre des inspirations devient trop important.
en contact de cette dernière. devienne l’épaule antérieure. Cette épaule, décrivant
Certains pratiquent systématiquement une
Une expression abdominale sus-pubienne, un pas de spire, s’engage ainsi au travers du détroit
manœuvre de Bracht pour aider le dégagement de
effectuée par un aide, viendra faciliter ces supérieur, puis utilise l’excavation pour descendre.
la tête dernière : au moment où l’occiput fœtal vient
manœuvres ; elle n’est pas dangereuse si elle est L’épaule ainsi engagée, le bras correspondant se
s’appliquer sur la symphyse pubienne (le cou de
modérée et bien placée. dégage parfois spontanément en « tombant » tout
l’enfant est donc déjà partiellement dégagé), on saisit
le siège en appliquant les pouces (au travers du On relève donc progressivement la traction vers seul. Sinon, l’opérateur peut faciliter ce dégagement :
champ) sur les cuisses et les autres doigts sur les le haut, permettant ainsi à la nuque de l’enfant de il glisse sa main (gauche pour l’épaule gauche, droite
fesses puis, sans aucune traction, on accompagne le tourner autour du pubis, en le prenant comme point pour l’épaule droite) le long du dos du fœtus,
renversement progressif de l’enfant qui vient d’appui : le menton puis le nez se dégagent, suivis contourne l’épaule, puis, en poussant l’humérus
appliquer son dos sur le ventre maternel. Cette des bosses frontales. Il faut être d’autant plus fœtal sur toute sa longueur par l’index et le médius
manœuvre a pour but de rendre plus rapide le prudent et doux que le risque périnéal est alors (ce qui ne risque pas de le fracturer), il abaisse le bras
dégagement. Elle agit en forçant la déflexion de la maximal, malgré l’épisiotomie (il faut toujours être qui, dans son mouvement, balaie toute la face du
tête fœtale. Elle ne doit en aucun cas être poursuivie prêt à résister à une poussée intempestive qui fœtus puis se dégage hors de la vulve.
si une résistance apparaît (tableau III). projetterait alors brusquement la tête dehors).
On engage ensuite la deuxième épaule en
Pendant que la tête pivote, le corps du fœtus suit
¶ Difficultés réalisant la manœuvre dans le sens inverse.
bien sûr le mouvement, et lorsque le front se
Malheureusement, dans certains cas, des dégage, son dos se trouve à peu près sur le ventre Les bras étant ainsi dégagés, on est revenu au
difficultés apparaissent. de sa mère. problème du dégagement (mais parfois aussi de
Rétention de tête dernière Exceptionnellement, la tête est retenue au-dessus l’engagement) de la tête dernière, dont les
On appelle ainsi les situations où tout le reste du du détroit supérieur. Cette dystocie relève de deux manœuvres nécessaires ont déjà été vues.
corps est dégagé mais où la tête ne suit pas, mécanismes : Une forme mineure de cette dystocie est
spontanément ou par simple manœuvre de Bracht. – soit la tête est retenue car ses dimensions sont représentée par l’arrêt de dégagement des épaules
Il faut tout d’abord introduire la main dans le supérieures à celles du détroit supérieur : cette au niveau du périnée (malgré l’épisiotomie). Dans
vagin et rechercher ce qui empêche le dégagement. situation est malheureusement irréductible par les ces cas, les creux axillaires apparaissent sous la
Le plus souvent, la tête arrêtée dans l’excavation voies naturelles ; symphyse, témoignant de l’engagement des
n’est retenue que par le périnée. Il faut réaliser alors – soit la tête est retenue car elle est plus ou moins épaules. La manœuvre de Lovset n’est pas
une manœuvre de Mauriceau : on place le fœtus à défléchie ou mal orientée, ses dimensions étant indispensable. On peut abaisser directement les bras
cheval sur l’avant-bras de la main glissée dans le inférieures aux diamètres du détroit du détroit (les doigts de l’opérateur étant placés en attelle le
vagin. Celle-ci recherche la bouche du fœtus, qui est supérieur. long de l’humérus), tel que cela vient d’être décrit.

4
Accouchement inopiné à domicile - 3-1400

Rotation du dos en arrière


Tableau IV. – Score d’Apgar.
L’interventionnisme est là encore indispensable et
vital. Il faut saisir le fœtus au niveau de ses hanches, Fréquence cardiaque ≥ 100 : 2
et ramener le dos en avant. On est alors ramené à la Entre 80 et 100 : 1
situation précédente, c’est-à-dire qu’il faut réaliser < 80 : 0
une manœuvre de Lovset, puis une manœuvre de
Respiration Cri vigoureux : 2
Mauriceau, afin de terminer le dégagement.
Hypoventilation, cri faible : 1
Absente : 0
Conduire à tenir dans les situations à haut
risque Tonus Bonne flexion : 2
Légère flexion des extrémités : 1
¶ En cas de présentation transverse Flasque : 0
Si la parturiente est en travail ou si les membranes
sont rompues, toute tentative de version est illusoire.
Réactivité Activité spontanée : 2
Réaction à la stimulation : 1
Il faut vérifier l’absence de procidence du cordon Pas de réponse aux stimuli : 0
(plus fréquente dans ces variétés de présentation), et
transférer la patiente afin d’effectuer une césarienne. Coloration des téguments Corps rose : 2
Extrémités cyanosées : 1
¶ En cas de procidence du cordon Cyanose ou pâleur généralisée : 0
Si la dilatation est complète et la présentation
engagée, il faut faire pousser la parturiente afin
qu’elle accouche immédiatement. Sinon, le transfert ¶ En cas d’accouchement prématuré Score d’Apgar compris entre 3 et 6
en centre spécialisé est particulièrement urgent. Il L’épisiotomie est indispensable, le plus souvent,
Il faut, après désobstruction des voies aériennes,
faut éviter de toucher le cordon, ce qui pourrait pour réduire les résistances périnéales et permettre
effectuer une ventilation au masque apportant de
entraîner des arrêts cardiaques réflexes. un accouchement rapide et le moins traumatique
l’oxygène pur à une fréquence de 60 insufflations
possible. Les présentations du siège sont plus
¶ En cas de placenta prævia très hémorragique par minute.
fréquentes.
Avant d’agir, il faut tenter de préciser le type de Si l’évolution n’est pas rapidement favorable, il
placenta : c’est dire l’importance du contrôle des ¶ En cas d’accouchement gémellaire faut entreprendre une réanimation intensive.
documents échographiques récents disponibles ou, Après l’accouchement de J1, il faut penser à
à défaut, du toucher vaginal extracervical : contrôler la verticalité de J2, voire le verticaliser s’il Score d’Apgar inférieur à 3
– une présentation appliquée sur segment est en transverse, avant de rompre les membranes.
C’est l’état de mort apparente. Il faut :
inférieur élimine un placenta recouvrant ; L’accouchement de J2 ne doit pas excéder un
délai de 15 minutes après la naissance de J1. – d’abord réaliser une aspiration trachéale sous
– une présentation haute, en revanche, fait laryngoscope, puis mettre en place, toujours sous
redouter un placenta recouvrant. Au-delà, le pronostic fœtal est statistiquement grevé.
Il est en règle très facile, même si J2 est en siège. Il contrôle laryngoscopique, une sonde d’intubation
Si le placenta est recouvrant, seul le transfert nasotrachéale. On vérifie, par l’auscultation, la
s’agit souvent d’accouchements prématurés.
d’extrême urgence vers la maternité la plus proche, symétrie ventilatoire et on fixe la sonde sur le nez
après mise en place d’une perfusion de par un petit adhésif ;


macromolécules, peut sauver la patiente et son – ventiler en oxygène pur après avoir placé un
enfant. Conduite à tenir après ballon à l’extrémité de la sonde d’intubation ;
Si le placenta n’est pas recouvrant, il faut rompre la naissance de l’enfant
– effectuer un massage cardiaque externe, à une
les membranes à l’aide d’une demi-pince de Kocher, fréquence de 120 Bpm.
ce qui arrête ou du moins réduit l’abondance de En cas d’amélioration rapide, l’enfant sera extubé
‚ Soins d’urgence au nouveau-né
l’hémorragie. après une dizaine de minutes. Sinon, il faut
Ceux-ci dépendent directement du score d’Apgar,
¶ En cas d’éclampsie administrer de l’adrénaline par la sonde d’intubation
qui doit être évalué dès la naissance (tableau IV). Ce
Il faut utiliser des anticonvulsivants par voie trachéale.
score, chiffré sur dix points, comporte l’étude de cinq
intraveineuse ou intramusculaire, mettre en place Si malgré cela l’évolution n’est pas rapidement
paramètres, cotés chacun de 0 à 2 : la fréquence
une voie veineuse, et transférer d’urgence la patiente favorable, doit se poser le problème de l’arrêt des
cardiaque, la respiration, le tonus, les réflexes, la
dans un centre spécialisé comportant, outre une manœuvres de réanimation (tableau V).
coloration des téguments.
maternité, une unité de soins intensifs pour la mère
et, si possible pour l’enfant, compte tenu des risques Score d’Apgar supérieur ou égal à 7 ‚ Surveillance de la délivrance
vitaux majeurs (état de mal, coagulation Deux remarques doivent préalablement être
C’est la situation habituelle, l’accouchement étant
intravasculaire disséminée...). L’utilisation faites.
rapide parce que simple et atraumatique.
d’antihypertenseurs est inutile en urgence, sauf en
On réalise une désobstruction des voies aériennes Tout d’abord, il est prudent de hâter la délivrance
cas d’hypertension très sévère (supérieure à 18/10),
supérieures : l’enfant étant placé en déclive (sur un et de réduire les saignements en effectuant une
d’autant plus qu’elle peut être dangereuse pour
oreiller par exemple), on aspire l’oropharynx et les délivrance dirigée. Celle-ci consiste en l’injection
l’enfant (bas débit utéroplacentaire).
deux fosses nasales à l’aide d’une sonde souple et intramusculaire, au dégagement des épaules (ou à
¶ En cas d’hématome rétroplacentaire stérile (n°6 ou n°8), geste d’autant plus important que défaut, si l’on est seul, immédiatement après la
Il faut mettre en place une voie veineuse et passer l’enfant est né dans un liquide teinté (afin d’éviter naissance de l’enfant), d’une ampoule de
des macromolécules, la femme étant souvent en l’inhalation méconiale). Syntocinont (mais celui-ci doit être conservé au frais
état de choc. Puis, un clamp de Barr est posé à proximité de pour ne pas être inactivé et pose donc des
Il faut également rompre les membranes si l’ombilic et le cordon est coupé un peu au-delà de problèmes de stockage), ou de Méthergint
l’enfant est vivant (seul l’accouchement imminent celui-ci, à l’aide d’une lame de bistouri stérile. Le (contre-indiqué en cas d’hypertension artérielle
peut le sauver). À l’arrivée en maternité, si la patiente cordon est protégé par une compresse stérile importante).
n’a pas accouché et selon le degré de dilatation du recouverte d’un bandage. Ensuite, la délivrance ne doit pas retarder le
col et l’état de l’enfant, on terminera l’accouchement Enfin, il faut prévenir, d’une part l’hypothermie en transfert en maternité. En effet celle-ci survient en
par les voies naturelles (femme sur le point séchant l’enfant puis en l’enveloppant dans une moyenne dans la demi-heure suivant la naissance
d’accoucher, enfant mort) ou par césarienne (enfant couverture et d’autre part, l’hypoglycémie en de l’enfant (un quart d’heure en cas de délivrance
vivant avec souffrance fœtale aiguë). Si l’enfant est donnant au nouveau-né un biberon de sérum dirigée). Elle ne sera réalisée à domicile que si elle
mort, la rupture des membranes est moins urgente. glucosé à 10 %. survient naturellement, ou si elle est hémorragique.

5
3-1400 - Accouchement inopiné à domicile

l’autre main empaume le fond utérin. Du bout des


Tableau V. – Prise en charge néonatale. doigts ou du bord des doigts, « en coupe-papier », la
main s’insinue progressivement entre la paroi
Score d’Apgar ≥ 7 Désobstruction des voies aériennes
Clampage du cordon utérine et le placenta. Il est préférable de chercher le
Couverture chaude plan de clivage le plus distal par rapport au col
Biberon sucré utérin, de façon à décoller le placenta de loin en
proche, et de le ramener doucement dans la main,
Score d’Apgar ≥ 3 et < 7 Désobstruction des voies aériennes
afin de décoller également les membranes au fur et
Ventilation au masque en O2 pur
à mesure de la descente du placenta.
Score d’Apgar < 3 Aspiration trachéale sous laryngoscope
Intubation nasotrachéale (± adrénaline) Il est prudent de terminer l’opération par
Ventilation en O2 pur l’injection intramurale de Syntocinont (10 U) et
Massage cardiaque éventuellement par un fl a s h intraveineux
d’antibiotique (ampicilline ou céphalosporine).

Délivrance naturelle et complète de tout le placenta. Il n’y a malheureusement pas Dans d’autres cas, il existe une rétention
d’autre choix que d’effectuer une délivrance placentaire partielle, diagnostiquée après examen
La surveillance maternelle sera attentive : pouls,
artificielle, car l’hémorragie serait incoercible en du placenta, ou du fait d’une hémorragie. Dans ces
tension artérielle, saignements, signes de délivrance
l’absence de ce geste salvateur. Les conditions de deux cas, il faut faire une révision utérine (même en
(ascension du globe utérin en sus-ombilical,
réalisation sont dramatiques : absence d’asepsie et l’absence d’hémorragie immédiate, celle-ci pouvant
allongement de la portion extériorisée du cordon,
d’analgésie. survenir secondairement).
petit écoulement sanglant, absence d’ascension du
cordon ombilical lors de la pression sus- La révision utérine est réalisée dans les mêmes
Elle est réalisée avec célérité mais sans brutalité, et
symphysaire, placenta perçu dans le vagin lors du conditions d’asepsie que la délivrance artificielle. La
avec le plus de précautions d’asepsie possible :
toucher vaginal). main directrice, ou seulement deux ou trois doigts si
lavage des mains, gants stériles lubrifiés par un
La délivrance pourra alors être aidée par une le globe utérin est déjà formé, passe le col utérin,
antiseptique doux, toilette vulvaire avec antiseptique
petite expression sur le fond utérin. tandis que l’autre main abaisse le fond de l’utérus.
(type Bétadinet), champs stériles.
On vérifiera enfin, par un examen soigneux, que L’exploration digitale est minutieuse, raclant
le délivre est complet (placenta et membranes). Le geste, par lui-même, est en général assez doucement de la pulpe du doigt les parois, les bords
facile : la main directrice passe la vulve « en main et les cornes. On terminera par l’injection
Délivrance hémorragique ou incomplète d’accoucheur » (le pouce en adduction et les autres intramurale d’ocytociques (afin de renforcer le
Parfois, le placenta n’est que partiellement fléchis pour former un cône), et remonte le long du globe utérin de sécurité) et éventuellement
décollé, ce qui entraîne une hémorragie sur rétention cordon ombilical dans la cavité utérine, tandis que l’injection intraveineuse d’antibiotiques.

Patrick Rozenberg : Praticien hospitalier,


service de gynécologie-obstétrique, hôpital de Poissy, 10, rue du Champ-Gaillard, 78303 Poissy, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : P Rozenberg. Accouchement inopiné à domicile.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1400, 1998, 6 p

6
¶ 3-1362

Assistance médicale à la procréation :


principaux aspects biologiques, médicaux
et éthiques
P. Granet

L’assistance médicale à la procréation est nécessaire essentiellement lors de la prise en charge des
infertilités conjugales sévères, mais aussi au cours de l’infection par le virus de l’immunodéficience
humaine pour éviter les rapports non protégés, en cas de risque de transmission d’anomalie héréditaire
sévère par l’un des parents, ou à titre préventif avant des traitements stérilisants. Son cadre est
actuellement défini légalement. Ses deux principales techniques sont l’insémination artificielle et la
fécondation in vitro. Elles comportent des risques médicaux féminins et fœtopédiatriques en cours
d’évaluation, et soulèvent des questions éthiques nombreuses dont la prise en compte est indispensable
parallèlement aux développements des progrès techniques.
© 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Assistance médicale à la procréation (AMP) ; Insémination artificielle ; Fécondation in vitro ;
ICSI (« intracytoplasmic sperm injection ») ; Clonage reproductif ; Infertilité ; Stérilité ;
CECOS (centre d’étude et de conservation de sperme) ; Éthique biomédicale ; Stimulation ovarienne ;
Congélation gamétique ; Don de gamète ; Syndrome d’hyperstimulation ovarienne

Plan ■ Introduction
¶ Introduction 1
L’assistance médicale à la procréation (AMP) est une techni-
que médicale déjà ancienne puisque les premières inséminations
¶ Quand proposer une assistance médicale à la procréation ? 1 artificielles recensées remontent au tout début du XIXe siècle. La
¶ À qui proposer une assistance médicale à la procréation ? 2 création des premières banques de sperme congelé dans les
Critères physiologiques 2 années 1970 puis la naissance du premier enfant conçu par
Critères psychologiques 2 fécondation in vitro (FIV) en 1978 la font entrer dans une
Aspects légaux et réglementaires 2 nouvelle ère. Touchant à la transmission de la vie humaine et
par conséquent à des valeurs fondamentales pour notre société,
¶ Techniques 2
ces techniques posent non seulement des questions d’ordre
Insémination artificielle 2 médical et biologique, mais aussi d’ordre psychologique, moral,
Fécondation in vitro et « intracytoplasmic sperm injection » (ICSI) 3 philosophique et politique. Parentalités difficiles et nouvelles
Techniques de congélation 4 formes de parentalité liées aux dons de gamètes et d’embryons,
¶ Dons de gamètes 4 question des origines, statut de l’embryon humain, clonage,
Don de sperme 4 utilisation à des fins thérapeutiques de cellules embryonnaires
Don d’ovocytes 5 constituent des thèmes centraux de la réflexion éthique biomé-
Accueil de l’embryon 5 dicale contemporaine.
¶ Évaluation des résultats 5
Inséminations 5 ■ Quand proposer une assistance
Fécondation in vitro standard et « intracytoplasmic sperm
injection » 5 médicale à la procréation ?
¶ Techniques émergentes 5 Quelle que soit la technique envisagée, l’AMP comprend
Maturation ovocytaire in vitro 5 toujours une étape biologique impliquant un recueil de gamè-
Maturation spermatique in vitro 5 tes, spermatozoïdes, ovocytes ou les deux. Son indication fait
Transfert cytoplasmique 6 suite, le plus souvent, à un diagnostic médical indiquant que la
Clonage reproductif 6 rencontre fécondante des spermatozoïdes et de l’ovule ne peut
Utilisation de cellules souches embryonnaires à visée thérapeutique 6 se faire normalement. Il s’agit donc généralement d’infertilités
¶ Risques de l’assistance médicale à la procréation 6 conjugales sévères. Plus rarement, l’AMP peut être indiquée
Risques médicaux féminins 6
pour éviter les rapports sexuels non protégés lorsque l’homme
est infecté par le virus du syndrome de l’immunodéficience
Risques fœtaux et pédiatriques 6
acquise (sida), ou lorsqu’un des membres du couple est trans-
Risques éthiques 6
metteur d’une anomalie héréditaire particulièrement sévère.
Enfin, elle peut être proposée à titre préventif avant des
traitements potentiellement stérilisants (chimiothérapie,

Traité de Médecine Akos 1


3-1362 ¶ Assistance médicale à la procréation : principaux aspects biologiques, médicaux et éthiques

radiothérapie, castration) ; dans ce cadre, l’autoconservation de Aspects légaux et réglementaires


spermatozoïdes est de pratique courante tandis que la congéla-
tion d’ovocytes ou la cryopréservation de tissus ovariens sont à .
Le cadre légal de l’AMP est actuellement défini par la loi (Loi
un stade d’expérimentation avancé mais encore en cours n° 2004-800 du 6 août 2004) relative au don et à l’utilisation
d’évaluation. des éléments et produits du corps humain, à l’AMP et au
Dans la situation la plus habituelle, qui est celle de l’infertilité diagnostic prénatal. Concernant les couples, cette loi précise les
conjugale, l’AMP, quel qu’en soit le type, est une procédure à conditions conjugales à respecter : être mariés ou pouvoir
proposer en dernière intention, lorsque aucune autre approche apporter la preuve d’au moins 2 ans de vie en commun.
n’est possible ou quand tous les traitements antérieurs envisa- Concernant ce dernier point, il peut être pondéré lorsque l’âge
geables ont échoué. féminin s’élève. Par ailleurs, le texte ne donne pas de limite
Les principales indications sont : d’âge précise pour accepter la prise en charge, et utilise simple-
• l’impossibilité ou l’échec de la chirurgie tubaire en cas ment l’expression « le couple doit être en âge de procréer », ce
d’obstruction des trompes ; qui a pour but d’éliminer la possibilité d’AMP chez les femmes
• les infertilités masculines sévères ; physiologiquement ménopausées au-delà de 45 ans. En revan-
• les hypofertilités féminines ayant résisté à des traitements che, il n’y a aucune référence biologique utile pour définir l’âge
médicaux et/ou chirurgicaux bien conduits, sur une période .
masculin maximal pour procréer !
suffisamment longue ; Le texte de loi complété par un guide des bonnes pratiques
• les infertilités inexpliquées ayant également résisté à tous les (Arrêté du 12 janvier 1999) et de divers arrêtés précise égale-
traitements et à l’épreuve du temps. ment les indications du type d’AMP à proposer en fonction de
critères essentiellement biologiques (paramètres spermatiques). Il
précise également les conditions de sécurité sanitaire devant être
■ À qui proposer une assistance remplies ; en particulier, la nécessité de pratiquer annuellement
des contrôles sérologiques concernant le virus de l’immunodé-
médicale à la procréation ? ficience humaine (VIH), les hépatites B et C et la syphilis.
En cas de séropositivité concernant le VIH et les hépatites, un
Lorsqu’il existe une indication clinique bien posée, les arrêté précise l’obligation pour les laboratoires d’avoir une
conditions d’acceptation de prise en charge d’un couple structure spécifique pour le traitement isolé des gamètes et des
dépendront de différents critères physiologiques, psychologi- embryons. Le nombre de centres ayant actuellement la possibi-
ques, et légaux. lité de prendre en charge ces couples est de fait très limité.
Enfin, les textes législatifs précisent les conditions d’autorisa-
Critères physiologiques tion des centres pour la pratique de l’AMP et d’agréments pour
les praticiens concernés, cliniciens et biologistes.
Il s’agit essentiellement de critères permettant d’apprécier le La loi relative à la bioéthique a prévu la création de l’Agence
potentiel de fertilité féminin. L’âge est bien entendu l’indicateur de biomédecine qui se substitue à l’Établissement français des
essentiel, inversement proportionnel à la fertilité. Statistique- greffes, et a un champ de compétences comprenant la greffe, la
ment, la fertilité féminine spontanée diminue de 50 % entre médecine de reproduction, ainsi que la génétique. Elle est
35 et 42 ans, en raison d’une diminution de la réserve opérationnelle depuis mai 2005.
folliculaire. L’agence est chargée d’assurer trois missions principales :
La date de naissance n’est cependant pas un élément suffisant • l’expertise et la veille scientifique ;
pour accepter ou récuser un couple ; il est des femmes plus • la délivrance d’autorisations et d’avis concernant les structu-
âgées conservant une bonne fonction ovarienne et des femmes res et praticiens exerçant des activités relevant de sa compé-
jeunes pouvant avoir un déficit important de l’ovulation. tence ;
Outre les données d’un interrogatoire bien mené, des critères • l’évaluation et le contrôle des activités.
objectifs sont nécessaires ; [1] il s’agit essentiellement de dosages
hormonaux réalisés au troisième jour du cycle :
• le dosage d’estradiol : considéré comme insuffisant s’il est ■ Techniques
inférieur à 20 pg/ml ;
• le dosage de la follicle stimulating hormone (FSH) plasmatique : Les deux principales techniques d’AMP sont :
un taux supérieur à 12 mUI/ml est péjoratif ; • l’insémination artificielle ;
• le dosage de l’inhibine B : également péjoratif lorsque son • la FIV.
taux est inférieur à 30 pg/ml ;
• le dosage de l’hormone antimullérienne est encore en cours Insémination artificielle
d’évaluation. [2]
Le comptage échographique des follicules antraux vers le Elle concerne toutes les techniques où le sperme, après avoir
troisième jour du cycle est également un élément pronostique été recueilli et éventuellement congelé, est déposé dans les voies
fiable ; les patientes ayant moins de quatre follicules antraux génitales féminines. La localisation anatomique de l’insémina-
ont un pronostic très réservé de réponse favorable à la tion peut être vaginale, cervicale ou intra-utérine. Le sperme
stimulation. [3] peut être frais ou congelé et dans les deux cas utilisé avec ou
Certaines équipes proposent des épreuves dynamiques, les sans préparation par lavage et centrifugation. Cette préparation
tests de réserve ovarienne. Ils sont parfois assez décevants, car est indispensable en cas d’insémination intra-utérine afin
inconstamment corrélés à la réponse réelle aux traitements. d’éliminer le plasma séminal, riche en prostaglandines, pouvant
entraîner de violentes douleurs par contractions utérines, voire
même un état de choc réactionnel. Les différents types d’insé-
Critères psychologiques mination artificielle sont les suivants.
Dans un domaine où l’investissement émotionnel est cons-
tant et va être confronté à des traitements en général longs et Insémination intravaginale
lourds, un entretien psychologique approfondi suivi d’un Elle consiste à déposer le sperme au fond du vagin à l’aide
accompagnement éventuel est un préalable utile avant de d’une seringue. D’indication exceptionnelle, elle est surtout
s’engager dans le processus clinique. Cet entretien est obliga- proposée dans le cadre d’auto-inséminations à domicile par le
toire dans le cadre des dons de gamètes ou d’embryons, couple lui-même en cas d’impossibilité d’éjaculation coïtale. Elle
souhaitable ou en tout cas à proposer pour les autres types peut être proposée, par exemple, pour des patients paraplégi-
d’AMP. Son but n’est pas de récuser des patients mais de les ques arrivant à provoquer une éjaculation avec des traitements
aider dans leur prise de décision tout en leur proposant un médicaux ou à l’aide d’un vibromasseur et également en cas de
espace de parole qui leur sera ouvert tout au long de leur prise difficultés sexuelles psychogènes, sous réserve d’un suivi et d’un
en charge. [4] accord psychologique.

2 Traité de Médecine Akos


Assistance médicale à la procréation : principaux aspects biologiques, médicaux et éthiques ¶ 3-1362

Insémination intracervicale Tableau 1.


Indications des fécondations in vitro et intracytoplasmic sperm injection
Le sperme est déposé dans l’endocol, en général sans prépa- (bilan FIVNAT 2000).
ration préalable, à la période ovulatoire, lorsque la glaire
cervicale est d’abondance et de qualité optimales. Après l’insé- Indications tubaires Isolées 5 915
mination, une cupule cervicale est placée sur le col, elle sera Avec indication masculine 5 115
enlevée par la patiente 5 à 6 heures plus tard. Avec indication de don 51
Sa principale indication concerne les hypospermies et de sperme
oligoasthéno-zoospermies relativement modérées à test de Indications masculines Isolées 15 113
Huhner négatif avec test de pénétration croisée dans la glaire in Avec sperme de donneur 660
vitro positif. En cas d’oligoasthéno-zoospermie relative, en Autres indications Endométriose 1 321
raison d’un volume important de l’éjaculat, le recueil de sperme Infertilité inexpliquée 7 218
peut être fractionné et sa première fraction, habituellement la Divers 1 916
plus riche, être seule inséminée.
Cette technique est également souvent utilisée lors des
inséminations avec sperme congelé de donneurs (IAD).
Modalités de stimulation ovarienne
Insémination intra-utérine en fécondation in vitro
C’est la technique d’insémination actuellement la plus Le principe général est d’obtenir une hyperstimulation
utilisée. Elle consiste à déposer environ 0,2 ml de milieu de ovarienne contrôlée tout en évitant une ovulation spontanée
culture contenant une sélection de spermatozoïdes concentrés à qui empêcherait la récupération d’ovocytes lors de la ponction.
proximité du fond utérin après franchissement du col par un fin La stimulation est réalisée avec des hMG ou de la FSH à des
cathéter souple. Cette technique, indolore, se fait en consulta- doses 2 à 4 fois supérieures à celles utilisées pour des stimula-
tion. La patiente reste ensuite allongée pendant une quinzaine tions monofolliculaires. En principe 150 ou 225 UI de gonado-
de minutes, puis peut reprendre son activité habituelle. trophines sont injectées quotidiennement à partir du début du
cycle jusqu’au déclenchement de l’ovulation.
Stimulation de l’ovulation pour les inséminations L’inhibition de l’ovulation est obtenue par l’injection d’un
Elle n’est pas obligatoire et les inséminations peuvent être agoniste ou d’un antagoniste de la gonadotrophin-releasing
réalisées en cycle spontané. Cependant, l’utilisation d’une hormone (Gn-RH). On parle de protocole long lorsqu’un agoniste
stimulation hormonale multiplie les chances de grossesse par 2 est injecté, soit en milieu de phase lutéale du cycle précédant
(avec le citrate de clomifène) et par 3 (avec les human menopau- la FIV, soit le premier jour de ce cycle. Au terme d’une quin-
sal gonadotropin [hMG] ou les FSH). [5] Pour cette raison, la zaine de jours d’exposition à l’agoniste, on vérifie, par un
plupart des tentatives sont réalisées avec une stimulation sous dosage hormonal d’estradiol et une échographie, que l’ovaire est
réserve d’en avoir éliminé les contre-indications (cardiovasculai- bien au repos avant de débuter la stimulation.
res, antécédents tumoraux en particulier) et de les pratiquer Les protocoles courts consistent à débuter quasi simultané-
sous stricte surveillance hormonale et échographique afin de ment le blocage ovulatoire et la stimulation au début du cycle
réduire les risques de grossesse multiple et de syndrome de FIV.
d’hyperstimulation ovarienne. Une prudence particulière avec La surveillance du cycle se fait par contrôles biologiques
réduction des doses et accentuation de la surveillance sera de répétés de la cinétique d’élévation du taux d’estradiol et par
mise chez les patientes ayant un profil clinicobiologique évaluation échographique de la croissance de la cohorte
d’ovaires polykystiques. folliculaire et de l’épaisseur de la muqueuse utérine.
Les critères de déclenchement de l’ovulation reposent sur le
rapport entre le taux d’estradiol et le nombre de follicules ayant
Fécondation in vitro et « intracytoplasmic atteint au moins 16 mm de diamètre (en pratique environ
300 pg d’E2/follicule mature). Si le taux d’estradiol est trop élevé
sperm injection » (ICSI) (> 3 500 pg/ml), on renonce en principe au déclenchement
La FIV standard est initialement destinée à contourner la pour éviter un syndrome clinique d’hyperstimulation ova-
stérilité féminine par obstruction ou altérations tubaires sévères rienne ; en alternative à cette attitude, certains préconisent le
non curables chirurgicalement ou après échecs de plastie coasting qui consiste à arrêter la stimulation et à attendre sous
tubaire. Ses indications ont rapidement été étendues aux surveillance une chute suffisante de l’estradiol pour déclencher
infertilités masculines relativement modérées après échecs l’ovulation. Cette approche semble cependant donner des
d’inséminations, aux infertilités inexpliquées et à certaines résultats décevants en termes de grossesse.
formes d’endométriose. L’ICSI, utilisée pour la première fois Le déclenchement de l’ovulation, lorsque les critères de
avec succès en 1992, a permis de prendre en charge les inferti- décision sont obtenus, se fait par une injection d’human
lités masculines les plus sévères, y compris les azoospermies non chorionic gonadotrophin (hCG) qui se fait 35 heures avant la
seulement excrétoires mais aussi sécrétoires grâce aux techni- ponction ovocytaire.
ques de ponctions épididymaires, déférentielles et de biopsie (ou Depuis quelques années, en alternative à ces fortes stimula-
ponction) testiculaire. tions et dans la perspective de réduire les risques de grossesse
En pratique, l’activité nationale est recensée par bilan multiple, certaines équipes préconisent des stimulations très
informatisé (FIVNAT) : pour ce qui concerne les activités de FIV faibles, voire même des FIV en cycle spontané, pour les patien-
en 2000, il y a eu 37 308 indications de FIV ou ICSI. Leur tes jeunes et normo-ovulantes. [6]
répartition est présentée sur le Tableau 1.
La FIV partage avec les inséminations intra-utérines le même Technique de prélèvement ovocytaire
principe de préparation du sperme par sélection/centrifugation/
lavage en milieu de culture approprié. En revanche, toutes les Le prélèvement ovocytaire se fait actuellement par ponction
autres étapes lui sont spécifiques : échoguidée transvaginale. Elle nécessite selon les équipes, soit
• les modalités de stimulation ovarienne ; une anesthésie générale, soit une neuroleptanalgésie ou une
• la technique de prélèvement ovocytaire ; anesthésie locale. Les liquides folliculaires contenant les
• la culture in vitro ; ovocytes sont aspirés à la seringue ou à l’aide d’un système
• le transfert embryonnaire ; d’aspiration par pompe. Ils sont placés immédiatement à
• la congélation embryonnaire. température de 37 °C et remis aussitôt au laboratoire.

Traité de Médecine Akos 3


3-1362 ¶ Assistance médicale à la procréation : principaux aspects biologiques, médicaux et éthiques

Techniques de préparation du sperme de sperme est une technique fréquemment utilisée en AMP.
Parmi les principales indications se trouvent :
Pour la FIV • les autoconservations avant traitements stérilisants ou
La préparation du sperme est identique à celle utilisée pour vasectomie ;
les inséminations intra-utérines. Après liquéfaction, le sperme • les conservations de spermatozoïdes issus de prélèvements
est déposé à la partie supérieure d’un tube préalablement rempli chirurgicaux (déférentiels, épididymaires, testiculaires) ;
d’un milieu visqueux présentant un gradient de densité crois- • les conservations préventives d’échecs de recueil en AMP ;
sant entre le fond et le haut du tube. L’ensemble est centrifugé • la conservation des dons de sperme.
et le culot qui contient les spermatozoïdes les plus mobiles et
potentiellement les plus fécondants est récupéré puis à nouveau Congélation ovocytaire
centrifugé pour rinçage dans le milieu de culture. On utilise À l’inverse, la congélation ovocytaire est rendue difficile en
environ 1 à 3 millions de ces spermatozoïdes pour les insémi- raison, d’une part de la grande taille de la cellule, d’autre part
nations intra-utérines alors que 30 000 à 100 000 seront de son obtention lorsque l’ovocyte est mature ; c’est-à-dire au
suffisants pour inséminer les ovocytes in vitro. stade de métaphase II. L’ovocyte est alors privé d’enveloppe
nucléaire et les organites cellulaires sont particulièrement
Pour l’ICSI
exposés aux traumatismes de la congélation. Cette technique,
Alors que toutes les autres étapes sont communes, il y a trop qui a néanmoins permis d’obtenir quelques succès, [7] est encore
peu de spermatozoïdes pour qu’une sélection du même type à un stade expérimental et ne peut être proposée que dans le
que celle utilisée en FIV classique soit possible. On pratique un cadre d’un protocole de recherche.
simple rinçage dans le milieu de culture puis une microgoutte
de la sélection est placée dans un milieu visqueux qui freine, si Congélation de tissus gonadiques
nécessaire, la mobilité du spermatozoïde afin qu’il puisse être Il en est de même en ce qui concerne la congélation de
récupéré dans une micropipette. Une fois aspiré, le flagelle en parenchyme ovarien qui est techniquement parfaitement
premier, le spermatozoïde est doucement expulsé jusqu’à ce que possible. Une première naissance a été publiée en 2004. [8] La
la tête sorte de la pipette qui sera alors utilisée pour casser sa pratique de ces prélèvements soulève cependant des interroga-
jonction avec le flagelle afin de l’immobiliser totalement. Il sera tions sur leur utilisation, soit par retransplantation secondaire
ensuite aussitôt injecté dans l’ovocyte. dans l’organisme de la femme, soit par récupération des
ovocytes après maturation in vitro. Dans le premier cas se
Culture in vitro
posent les problèmes d’une revascularisation fonctionnelle du
Les ovocytes sont cultivés dans un milieu de culture adapté parenchyme ovarien et du risque d’une éventuelle réinfestation
dont la composition en sucre et en acides aminés est corrélée par des cellules tumorales si l’indication était préventive des
aux besoins du métabolisme embryonnaire. Après insémination, complications iatrogènes d’un traitement carcinologique ; dans
les boîtes de culture sont placées dans une étuve à 37 °C dans le second, celui des risques épigénétiques de la maturation in
une atmosphère de 5 % CO2 dans l’air. vitro sur le développement embryonnaire et fœtal.
La culture est prolongée jusqu’au transfert qui peut avoir lieu
le deuxième, le troisième ou le cinquième jour de culture. Dans Congélation embryonnaire
ce dernier cas, l’embryon est au stade blastocyste et la culture
nécessite un changement de milieu afin de l’adapter aux La congélation embryonnaire est une technique relativement
variations du métabolisme embryonnaire qui modifie les efficace qui donne des chances additionnelles de succès, soit
besoins en sucre vers le troisième jour de développement. immédiat, soit différé pour une prochaine grossesse s’il s’agit
d’embryons surnuméraires.
Transfert embryonnaire Cette congélation peut être également effectuée de manière
systématique après accord du couple si les conditions d’un
Il est pratiqué habituellement au deuxième ou troisième jour
transfert immédiat in utero des embryons ne sont pas réunies
après la fécondation. Les embryons étant alors en moyenne
(signe d’hyperstimulation chez la femme, épisode fébrile,
respectivement à un stade de quatre et de huit cellules.
muqueuse endométriale insuffisante).
Avant le transfert, les embryons sont observés, évalués et
Ces embryons congelés et les parents qui en sont les auteurs
classés selon leur aspect morphologique. Cet aspect étant en
sont protégés par la loi. Seuls ces parents ont le droit de décider
général corrélé positivement au pronostic de grossesse, les
du devenir des embryons : les conserver pour un transfert
embryons ayant l’aspect cellulaire le plus régulier sont transférés
ultérieur, demander leur destruction, les confier à des recherches
préférentiellement. Conformément au guide des bonnes prati-
strictement encadrées et autorisées ou les proposer pour un
ques et sauf situations particulières (âge plus élevé, échecs
autre couple dans le cadre de l’accueil de l’embryon.
répétés etc.), deux embryons au maximum seront déposés dans
La possibilité d’utiliser ces embryons, lorsqu’ils ne sont plus
la cavité utérine.
encadrés par un projet parental, pour l’isolement et la culture
Dans les rares cas où le canal cervical n’est pas cathétérisable,
de cellules souches embryonnaires est actuellement envisagée
il est possible de faire un transfert transmyométrial sous
(Loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique).
contrôle échographique.
Par ailleurs, « font obstacle au transfert des embryons le décès
d’un des membres du couple, le dépôt d’une requête en divorce
Techniques de congélation ou en séparation de corps ou la cessation de la communauté de
Les techniques de cryoconservation dans l’azote liquide ont vie, ainsi que la révocation par écrit du consentement par
permis d’étendre et de mieux contrôler les différentes pratiques l’homme ou la femme » (Loi n° 2004-800 du 6 août 2004 rela-
d’AMP. La congélation est précédée d’une déshydratation des tive à la bioéthique).
cellules par passage dans des bains de milieu hyperosmotique.
Cette déshydratation limite les risques de dommages cellulaires
causés par des cristaux aqueux intracytoplasmiques. Elle est ■ Dons de gamètes
associée à une protection membranaire par addition de sucrose
et d’un cryoprotecteur de type glycérol ou propanediol. Les dons de gamètes, spermatozoïdes puis ensuite ovules, se
Plus une cellule est petite et son noyau protégé, mieux elle sont développés à partir de la validation des techniques de
supportera la congélation. congélation gamétiques.

Congélation gamétique Don de sperme


Congélation des spermatozoïdes En France, les premières banques de sperme congelé ont été
En raison de sa petite taille, le spermatozoïde résiste particu- créées en 1973. Elles ont pris le nom de Centre d’étude et de
lièrement bien aux techniques de congélation. La congélation conservation du sperme (CECOS), leur objectif n’étant pas d’être

4 Traité de Médecine Akos


Assistance médicale à la procréation : principaux aspects biologiques, médicaux et éthiques ¶ 3-1362

de simples laboratoires de conservation gamétiques mais des Tableau 2.


structures de référence dans les domaines techniques, scientifi- Bilan des fécondations in vitro (bilan FIVNAT 2000).
ques, éthiques et psychologiques. La signification du sigle Année 1998 1999 2000 2001 2002
CECOS s’est ensuite transformée en « Centre d’étude et de
conservation des œufs et du sperme » lorsque la congélation Transferts/ponction (%) 81,0 81,4 83,5 79,6 78,4
embryonnaire est apparue à la suite des techniques de FIV. Cycles avec congélation (%) 18,8 22,7 26,3 23,7 23,2
Le don de sperme repose en France sur la base d’un couple Taux de grossesses/ponction (%) 20,8 21,4 21,7 20,0 19,9
ayant déjà eu l’expérience d’être parent ; il doit être anonyme Taux de grossesses/transfert (%) 25,7 26,5 26,2 25,1 25,4
et bénévole. Accouchement/ponction 17,0 17,1 17,2 16,5 16,4
Les indications sont essentiellement les stérilités masculines
sans possibilité de prise en charge conjugale. Il peut également
s’agir de situations cliniques dans lesquelles les spermatozoïdes
du conjoint peuvent transmettre une pathologie héréditaire ou Tableau 3.
infectieuse particulièrement grave. Bilan des intracytoplasmic sperm injections (bilan FIVNAT 2000).
Les couples qui ont recours au don de sperme ont systémati- Année 1998 1999 2000 2001 2002
quement un entretien psychologique accompagné éventuelle- Transferts/ponction (%) 92,0 91,6 92,3 92,0 92.2
ment d’une prise en charge pour les aider à rationaliser leur
Cycles avec congélation (%) 21,4 24,5 30,8 25,2 25,5
décision et à élaborer leur attitude ultérieure par rapport à
l’enfant et en particulier sur la question du secret de la révéla- Taux de grossesses/ponction (%) 23,7 25,1 24,3 23,0 23,8
tion du mode de conception. Taux de grossesses/transfert (%) 25,7 27,5 26,6 25,0 25,9
Accouchement /ponction (%) 19,7 21,1 19,5 18,5 19,3
Don d’ovocytes
De la même manière, le don d’ovocytes est destiné aux Inséminations
couples dont la femme a une absence ou un épuisement
La pratique des inséminations ne bénéficie pas de ce registre
prématuré du capital folliculaire, des anomalies ovocytaires
et les résultats sont plus difficiles à interpréter de manière fiable.
graves, ou dans certains cas une atteinte d’ordre génétique. Les
Ils varient, selon les centres et les indications, entre 8 et 20 %
ovocytes sont donnés par des femmes déjà mères, de moins de
de grossesses par cycle. Ces chiffres étant bien entendu plus
36 ans au moment du don. Ces femmes ont un traitement de
favorables dans les indications où le sperme est a priori normal,
FIV habituel et leurs ovocytes peuvent être répartis entre deux
comme c’est le cas dans les inséminations avec sperme donneur
ou trois receveuses selon le nombre d’ovules obtenu.
ou lorsqu’il s’agit de contourner une anomalie cervicale (déficit
Les receveuses, en général ovarioprives, ont un cycle endo-
de glaire après conisation ou amputation du col, par exemple).
métrial synchronisé par un traitement estrogénique puis
progestatif avec celui des donneuses. En cas de grossesse, ce
traitement est maintenu ensuite 2 à 3 mois jusqu’au relais
Fécondation in vitro standard
placentaire. et « intracytoplasmic sperm injection »
Les Tableaux 2 et 3, reproduits avec l’autorisation de l’asso-
Accueil de l’embryon ciation FIVNAT, permettent d’évaluer les résultats globaux et
Il concerne avant tout les couples présentant une stérilité leur évolution au cours des dernières années.
totale mixte, à la fois féminine et masculine. Par extension les
indications peuvent être étendues aux échecs répétés de FIV ■ Techniques émergentes
intraconjugale avec embryons constamment de mauvaise
qualité ou à des risques majeurs de transmission biparentale de Les techniques d’AMP ont permis de trouver à une large
maladies héréditaires particulièrement sévères. échelle des solutions à des difficultés reproductives considérées
Les embryons cédés sont obligatoirement des embryons autrefois comme incurables.
surnuméraires congelés dont les auteurs renoncent à leur projet Cependant, elles représentent un coût, physique, psychologi-
parental. que, social et économique important. Il ne faut pas perdre de
Sur le plan technique, il s’agit d’un simple transfert vue qu’elles ne représentent qu’une approche palliative du
d’embryon congelé qui nécessite uniquement un traitement traitement de l’infertilité pour lequel on peut espérer à terme
hormonal du cycle de transfert pour préparer l’endomètre à qu’elles puissent être remplacées progressivement par des
l’implantation. traitements curatifs adaptés aux différentes étiologies rencon-
trées. Ceci nécessite un développement des recherches fonda-
mentales de physiologie et de génétique de la reproduction pour
■ Évaluation des résultats lesquelles un plus grand soutien des pouvoirs publics est
absolument indispensable.
L’évaluation des résultats dans le cadre de l’AMP est rendue Parmi les nouvelles techniques actuellement en cours d’éva-
difficile par le caractère multifactoriel des causes du succès ou luation, il faut isoler les suivantes.
de l’échec. L’âge des patientes, la qualité de la stimulation de
l’ovulation et de sa surveillance, la variabilité des paramètres Maturation ovocytaire in vitro
spermatiques sont autant de facteurs qui conditionnent le
Il s’agit de recueillir des ovocytes qui n’ont été soumis à
pronostic individuel de chaque tentative. Seule une étude
aucune stimulation et qui sont donc immatures au moment du
analytique d’un grand nombre de cas permet une évaluation
prélèvement. Ce recueil permet d’obtenir de nombreux ovocytes
globale du résultat des différentes techniques. Cette évaluation
qui seront cultivés au laboratoire dans des milieux spécifiques
est facilitée par la tenue de registres nationaux, comme c’est le
leur permettant d’acquérir la maturation nécessaire pour être
cas en France concernant les techniques de FIV pour lesquelles
fécondés. [9] Cette technique, a priori idéale pour les femmes
l’association FIVNAT récupère, grâce à la coopération de la
porteuses d’ovaires polykystiques, se heurte à des difficultés de
quasi-totalité des centres français d’AMP, l’ensemble des don-
réalisation conduisant à un rendement relativement faible. Elle
nées cliniques et biologiques de chaque tentative réalisée. Cette
pose également la question des risques génétiques et épigénéti-
association publie chaque année le bilan de l’activité nationale
ques inhérents à la manipulation de gamètes immatures.
et permet par ailleurs, grâce à sa très importante base de
données, de réaliser des études épidémiologiques et scientifiques
ciblées sur des aspects particuliers de la FIV. Ces bilans peuvent Maturation spermatique in vitro
être consultés librement sur le site de l’association (http : Il est également possible de tenter de faire maturer des
//perso.wanadoo.fr/fivnat.fr/). spermatozoïdes in vitro en cas d’arrêt de la spermatogenèse. Les

Traité de Médecine Akos 5


3-1362 ¶ Assistance médicale à la procréation : principaux aspects biologiques, médicaux et éthiques

mêmes réserves que pour la maturation ovocytaire in vitro cette hyperstimulation prend une traduction clinique sévère
peuvent être évoquées. Le risque d’aboutir à un spermatozoïde avec un abdomen distendu et douloureux accompagné d’une
anormal est sans doute plus grand dans la mesure où tout ou gêne respiratoire. Ce syndrome témoigne d’un épanchement
partie de la différenciation morphologique du spermatozoïde est liquidien intrapéritonéal et s’associe à une hypovolémie suscep-
impliqué par la maturation, alors que lorsqu’il s’agit d’ovocytes, tible d’entraîner un risque thrombotique mettant en jeu le
la différenciation est déjà réalisée avant la maturation puisque pronostic vital. Il peut être évité en arrêtant la stimulation
ces cellules proviennent d’un pool en place dans les ovaires ovarienne lorsque les taux d’estradiol atteignent des valeurs
depuis la période fœtale. anormalement élevées mais il est parfois imprévisible et non
corrélé au taux d’estradiol. Son traitement d’urgence consiste à
Transfert cytoplasmique réhydrater par voie parentérale, soulager la douleur par des
antalgiques et prévenir le risque embolique.
Cette technique consiste à injecter du cytoplasme d’ovules de
femme jeune dans des ovocytes de femmes plus âgées. Expéri- Complications de la ponction
mentalement, l’aptitude à l’obtention d’embryons de qualité
optimale est améliorée. Il s’agit donc d’une alternative au don Elles sont tout à fait exceptionnelles. Il peut s’agir d’une
d’ovocytes qui préserve le capital d’acide désoxyribonucléique hémorragie par blessure vasculaire pouvant conduire dans
(ADN) nucléaire de la receveuse. Cependant, les conséquences certains cas à une hémostase percœlioscopique ou encore d’une
d’une interférence d’ADN mitochondrial de la receveuse et de la complication infectieuse : pelvipéritonite, abcès de l’ovaire.
donneuse ne sont pas suffisamment évaluées en ce qui concerne
des risques potentiels sur l’embryon. [10] Risque carcinologique
Ce risque, lié à la stimulation hormonale, avait été évoqué,
Clonage reproductif notamment en ce qui concerne le cancer de l’ovaire. De
Le clonage reproductif qui consiste à utiliser le noyau d’une nombreuses séries d’observations internationales de suivi
cellule somatique incorporé dans le cytoplasme ovocytaire pour infirment cette hypothèse. Il semblerait en revanche que
initier un développement embryonnaire est légalement interdit certaines infertilités féminines associées à un dysfonctionne-
dans de nombreux pays dont la France. Il s’agit d’un mode de ment ovarien pourraient impliquer la présence d’un cofacteur
reproduction artificielle par copie de l’ADN d’un individu de risque pour ce type de cancer.
unique dont les conséquences génétiques sont encore mécon- Concernant le cancer du sein, la stimulation ne semble pas
nues. Le succès en termes de naissances des expériences de être un risque en elle-même ; en revanche, elle pourrait accélé-
clonage reproductif chez l’animal s’associe à des pathologies rer l’évolution d’une lésion cancéreuse sous-jacente préexistante.
diverses et à des morts prématurées qui ajoutent des raisons La surveillance gynécologique préventive régulière est donc
médicales gravissimes au refus éthique fondamental de pratiquer particulièrement impérative.
ce type de clonage dans l’espèce humaine.
Risques fœtaux et pédiatriques [13]
Utilisation de cellules souches
embryonnaires à visée thérapeutique Hypotrophie et prématurité
Les recherches concernant le clonage thérapeutique à partir Il s’agit essentiellement d’hypotrophies et de prématurités
d’embryons humains congelés confiés aux chercheurs par des liées aux grossesses multiples. Une politique rigoureuse de
couples renonçant à leur projet parental sont autorisées par limitation du nombre d’embryons transférés est indispensable
décret ministériel sous réserve d’un encadrement étroit de cette pour en diminuer la fréquence.
pratique. On note également un léger surcroît d’hypotrophies, lié d’une
L’objectif est d’obtenir des cellules souches ayant un potentiel part à un âge moyen des parturientes infertiles plus élevé que
de différenciation orienté vers le développement de différents celui de la population générale, d’autre part à la possibilité
tissus susceptibles de remplacer les tissus lésés de certaines d’une placentation de moins bonne qualité après culture
pathologies organiques. embryonnaire in vitro.
Ces cellules souches sont essentiellement récupérées au
Malformations et pathologies pédiatriques
niveau du bouton embryonnaire des embryons congelés au
stade blastocyste (au cinquième jour de développement in Le taux de malformations est du même ordre de grandeur
vitro). que dans la population générale s’il s’agit d’inséminations ou de
Une alternative serait d’associer le clonage embryonnaire à FIV classiques. En cas d’ICSI, le taux d’anomalies est légèrement
partir du noyau somatique d’un individu puis d’isoler ses plus élevé et cette augmentation est liée à la gravité de l’atteinte
propres cellules souches afin d’éviter les risques de rejet par spermatique. Ces anomalies touchent essentiellement l’appareil
incompatibilité human leukocyte antigen (HLA). Cette approche, génito-urinaire.
qui consiste à créer un clone humain à seule fin thérapeutique, Des pathologies pédiatriques extrêmement rares et liées à des
est interdite par la loi française pour des raisons éthiques perturbations épigénétiques de gènes soumis à l’empreinte
évidentes. parentale, telles que le syndrome de Beckwith-Wiedemann ou
Il faut par ailleurs être conscient que l’application en théra- celui d’Angelman, verraient leur fréquence sensiblement
peutique humaine de traitements à partir de cellules souches est augmentée chez les enfants conçus à l’aide des techniques de
encore du domaine de la recherche théorique et fondamen- FIV. [14] Cependant, cette légère augmentation semble également
tale. [11] Les questions concernant l’adaptation des milieux de constatée chez les enfants nés de parents ayant eu des difficultés
culture, la différenciation de la cellule souche, le risque de à concevoir, qu’il y ait eu ou non recours à des techniques
développement tumoral, la tolérance immunitaire sont loin d’AMP. [15]
d’être résolues. Au total, ces constatations conduisent à envisager un suivi à
long terme des enfants issus d’une AMP. Cependant, une telle
surveillance est difficile à réaliser, d’autant plus qu’elle pose des
■ Risques de l’assistance médicale interrogations éthiques et psychologiques à l’égard de familles
à la procréation pour lesquelles la probabilité de dépister une pathologie
infantile est finalement très faible.
Risques médicaux féminins [12] Risques éthiques
Syndrome d’hyperstimulation ovarienne Les risques éthiques générés par l’irruption des techniques
Toute stimulation ovarienne pour FIV implique un certain d’AMP dans les pratiques biomédicales se situent à différents
degré d’hyperstimulation ovarienne. Dans environ 6 % des cas, niveaux.

6 Traité de Médecine Akos


Assistance médicale à la procréation : principaux aspects biologiques, médicaux et éthiques ¶ 3-1362

Sur un plan fondamental et dans le cadre d’une réflexion [2] Fanchin R, Schonäuer LM, Righini C, Guibourdenche J, Frydman R,
spirituelle ou religieuse, deux questions se posent en première Taieb J. Serum anti müllerian hormone is more strongly related to
intention : ovarian follicular status than inhibin B, estradiol, FSH, and LH on day
• peut-on dissocier la procréation de la sexualité conjugale ? 3. Hum Reprod 2003;18:323-7.
• l’embryon humain, indépendamment de toute définition de [3] Nahum R, Shifren JL, Chang Y, Leykin L, Isaacson K, Toth TL. Antral
son statut, est-il a priori considéré comme « sacré » et par follicle assessment as a tool for predicting outcome in IVF-is it a better
conséquent exclu de toute possibilité de création et de predictor than age and FSH? J Assist Reprod Genet 2001;18:151-5.
manipulation in vitro ? [4] Granet P.Aspects psychologiques de l’infertilité conjugale et de sa prise
Dans notre société, la réponse à ces questions est laissée aux en charge dans le cadre des procréations médicalement assistées. Rev
choix individuels, le choix collectif, politique et finalement Devenir 1995;7(n°2).
légal étant d’accepter la pratique de ces techniques sous réserve [5] Hugues JN, Bry-Gavillard H. Inséminations intra-utérines : faut-il sti-
d’un encadrement juridique définissant ce qui est autorisé, qui muler l’ovulation? Réal Gynécol Obstét 2000;49:24-7.
est autorisé à y avoir recours, qui est autorisé à effectuer les [6] Olivennes F, Frydman R. Friendly IVF: the way of the future? Hum
actes médicaux et biologiques et enfin comment les pratiquer Reprod 1998;13:1121-4.
(guide des bonnes pratiques). [7] Porcu E, Fabbri R, Damiano G, Giunchi S, Fratto R, Ciotti PM, et al.
Au-delà de ces questions se pose celle du pouvoir de Clinical experience and applications of oocyte cryopreservation. Mol
l’homme, à l’aide des nouveaux outils biotechnologiques, sur le Cell Endocrinol 2000;169:33-7.
contrôle de sa reproduction. Tant qu’il s’agit d’essayer de [8] Donnez J, Dolmans MM, Demylle D, Jadoul P, Pirard C, Squifflet J,
compenser le handicap des couples infertiles, ces techniques et al. Livebirth after orthotopic transplantation of cryopreserved
restent dans le cadre de la philosophie médicale traditionnelle. ovarian tissue. Lancet 2004;364:1405-10.
En revanche, la puissance de ces outils permet aujourd’hui de [9] Le Du A, Kadoch IJ, Bourcigaux N, Doumerc S, Bourrier MC, Cheva-
répondre à des demandes qui sortent du cadre de la prise en lier N, et al. In vitro oocyte maturation for the treatment of infertility
charge des handicaps naturels. Le sexage embryonnaire, la associated with polycystic ovarian syndrome: the French experience.
sélection génétique de convenance (en dehors d’une pathologie Hum Reprod 2005;20:420-4.
grave préexistante connue), la reproduction non sexuée telle [10] Levy R, Elder K, Ménézo Y. Cytoplasmic transfer in oocytes:
que le clonage reproductif en sont les exemples les plus biochemical aspects. Hum Reprod Update 2004;10:241-50.
marquants. [11] Mandelbaum J. Des cellules souches, pour quoi faire? Gynécol Obstét
Il est heureux qu’un débat public se soit instauré sur ces mars 2002(n°452).
sujets dans la plupart des grands pays démocratiques. En [12] Belaisch-Allart J, Mayenga JM. Les effets secondaires des PMA.
revanche, la disparité des choix, y compris au sein des pays de Reprod Hum Horm 1995;8:305-10.
la communauté européenne, peut sembler paradoxale étant [13] Westergaard HB, Johansen AM, Erb K, Andersen AN. Danish national
donné l’universalité du sens de l’humain qui devrait spirituel- in vitro fertilization registry 1994 and 1995: a controlled study of birth,
lement émerger de cette réflexion. malformations and cytogenetics findings. Hum Reprod 1999;14:
.
1896-902.
[14] De Rycke M, Liebaers I, Van Steirteghem A. Epigenetic risks related to
■ Références assisted reproductive technologies: risk analysis and epigenetic
inheritance. Hum Reprod 2002;17:2487-94.
[1] Scott Jr. RT, Hofmann GE. Prognostic assessment of ovarian reserve. [15] Gardner DK, Lane M. Ex vivo early embryo development and effects
Fertil Steril 1995;63:1-1. on gene expression and imprinting. Reprod Fertil Dev 2005;17:361-70.

P. Granet (philippe.granet@imm.fr).
Institut Mutualiste Montsouris, 42, boulevard Jourdan, 75674 Paris cedex 14, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Granet P. Assistance médicale à la procréation : principaux aspects biologiques, médicaux et éthiques.
EMC (Elsevier SAS, Paris), Traité de Médecine Akos, 3-1362, 2006.

Disponibles sur www.emc-consulte.com


Arbres Iconographies Vidéos / Documents Information Informations Auto-
décisionnels supplémentaires Animations légaux au patient supplémentaires évaluations

Traité de Médecine Akos 7


¶ 3-1260

Cancer de l’endomètre
R. Rouzier, S. Legoff

Avec une incidence de 25/100 000, le cancer de l’endomètre est le cancer gynécologique le plus fréquent.
L’âge moyen de survenue est 63 ans. Il n’existe pas de programme de dépistage du cancer de
l’endomètre. Les facteurs de risque principaux sont l’âge, l’obésité, le diabète et l’hypertension artérielle.
Toute hyperœstrogénie augmente le risque de cancer de l’endomètre par augmentation de la
prolifération des cellules endométriales. La majorité des cancers de l’endomètre sont diagnostiqués au
stade I et ont un excellent pronostic. Les adénocarcinomes endométrioïdes constituent 80 à 90 % des
cancers de l’endomètre. Toute métrorragie postménopausique ou saignement anormal en période
périménopausique ou survenant chez une femme sous traitement hormonal substitutif (THS) doit être
exploré par un frottis cervical, une biopsie de l’endomètre et une échographie pelvienne. Une
hystéroscopie doit être réalisée en cas de doute diagnostique. Le bilan d’extension comprend un scanner
abdominopelvien et une radiographie pulmonaire. Le traitement du cancer de l’endomètre repose, pour
les stades précoces, sur une chirurgie et une radiothérapie adaptée à l’extension de la lésion et à l’état
général de la patiente.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Cancer de l’endomètre ; Anatomopathologie de l’endomètre ; Adénocarcinome ;


Métrorragie postménopausique ; Tamoxifène

Plan ■ Incidence, anatomopathologie


¶ Introduction 1
et facteurs de risque
¶ Incidence, anatomopathologie et facteurs de risque 1
Incidence 1
Incidence
Anatomopathologie 1 Avec 4 650 cas en France (1995), il s’agit du plus fréquent des
Facteurs de risque 1 cancers de la sphère génitale. L’incidence est de 25/100 000.
L’âge moyen de survenue est 63 ans. Il s’agit essentiellement
¶ Dépistage 2 d’un cancer de la femme ménopausée [1].
¶ Diagnostic 2
Signes d’appel 2 Anatomopathologie
Interrogatoire et examen physique 2 .

Bilan préthérapeutique 2 Les adénocarcinomes endométrioïdes constituent 80 à 90 %


des cancers de l’endomètre.
¶ Traitement 2 Les autres types histologiques incluent les adénocarcinomes à
¶ Pronostic et surveillance 2 cellules claires (2-4 %), les carcinomes adénosquameux (5-15 %)
et les carcinomes indifférenciés. Les cancers de l’endomètre
peuvent être plus ou moins différenciés : grade 1 (carcinome
bien différencié), grade 2 (carcinome moyennement différencié)
et grade 3 (carcinome indifférencié) [2]. Le grade est un facteur
■ Introduction pronostique.
Le cancer de l’endomètre est le cancer gynécologique le plus
fréquent. Il s’agit d’un cancer de bon pronostic car souvent Facteurs de risque
diagnostiqué au stade I du fait d’une symptomatologie justifiant Les facteurs de risque incluent :
une consultation rapide : les métrorragies postménopausiques. • Une exposition prolongée aux œstrogènes [3-8] :
C’est en partie pour cette raison qu’il n’y a pas de programme C soit du fait d’une longue période d’activité génitale :
de dépistage du cancer de l’endomètre. puberté précoce, ménopause tardive ;

Traité de Médecine Akos 1


3-1260 ¶ Cancer de l’endomètre

Tableau 1. Tableau 2.
Étiologies des métrorragies postménopausiques. Conduite à tenir devant des métrorragies en périodes péri- et
postménopausiques.
Étiologie %
Atrophie 50 Biopsie de l’endomètre
Hyperplasie 10 Positive : diagnostic de cancer de l’endomètre
Polypes 9 Négative : échographie endovaginale :
Adénocarcinome 8 • endomètre < 5 mm sans THS ou < 8 mm avec THS :
Endomètre prolifératif 4 atrophie de l’endomètre → surveillance
Endomètre sécrétoire 1 • endomètre > 5 mm sans THS ou > 8 mm avec THS :
hystéroscopie/curetage
Autre 17
THS : traitement hormonal substitutif.

C soit par transformation périphérique des androgènes lors de Bilan préthérapeutique


la ménopause : obésité, hypertension artérielle (HTA) ;
Les examens complémentaires permettent de faire le diagnos-
C soit du fait de perturbations hormonales : diabète, syn- .
tic du cancer de l’endomètre [13]. La conduite à tenir devant des
drome des ovaires polykystiques, tumeurs ovariennes métrorragies postménopausiques ou périménopausiques est
thécales ou de la granulosa ; schématisée dans le Tableau 2.
C soit iatrogène : traitement substitutif œstrogénique sans • Frottis cervicaux : ils sont systématiques.
progestatifs, tamoxifène (effet œstrogène-like sur l’endomè- • Biopsie d’endomètre : on peut la réaliser soit à la canule de
tre) ; Novak, soit à la Pipelle® de Cornier après désinfection du
• la nulliparité et la pauciparité [9] ; vagin et du col. Elle permet de faire le diagnostic de cancer
• l’hyperplasie atypique de l’endomètre [10] ; de l’endomètre et de préciser le type et le grade histologique.
• des syndromes génétiques comme le syndrome de Lynch, qui Sa sensibilité est de 81-99 % et sa spécificité de 98 %. Le
associent plusieurs cancers dont celui de l’endomètre [11]. prélèvement doit être accompagné des renseignements
cliniques indispensables pour l’interprétation des résultats :
âge, statut ménopausique, traitement hormonal substitutif.
■ Dépistage En cas de prélèvement positif, une échographie pelvienne et
.
un scanner ou une imagerie par résonance magnétique (IRM)
Il n’existe pas de programme de dépistage généralisé du pelvienne sont indispensables pour faire le bilan d’extension
cancer de l’endomètre. L’histoire naturelle du cancer de l’endo- locale. En cas de résultat négatif, la poursuite des investiga-
mètre en fait un cancer peu adapté à un dépistage précoce. En .
tions se fait par une échographie pelvienne.
effet, les états précancéreux (en particulier hyperplasie atypi- • Échographie par voie abdominale et endovaginale [14] :
que), qui sont la cible d’un dépistage primaire, sont rares et peu l’épaisseur de la muqueuse, l’extension des anomalies en
dépistables avec les outils diagnostiques disponibles. De plus, la surface et en profondeur et la présence d’anomalies annexiel-
majorité des cancers de l’endomètre sont diagnostiqués à un les ou une ascite sont évaluées. L’injection d’une solution
stade précoce (stade I) rendant illusoire un bénéfice apporté par saline par l’orifice endocervical (hystérosonographie) peut
un dépistage secondaire dont la cible est constituée aussi par les faciliter l’exploration de la cavité utérine. Un examen doppler
cancers de stade I. L’absence de dépistage impose l’exploration peut aussi apporter des renseignements sur la vascularisation
systématique des métrorragies postménopausiques [12]. d’une anomalie intra-utérine.
• Hystéroscopie curetage [15] : l’hystéroscopie est réalisée en
ambulatoire ; elle consiste à instiller du sérum physiologique
■ Diagnostic dans la cavité utérine afin de localiser une éventuelle anoma-
lie et la mesurer. Une biopsie dirigée peut alors être réalisée.
Signes d’appel .
• Scanner abdominopelvien ou mieux IRM : en cas de cancer
prouvé par la biopsie, le but est de déterminer l’envahisse-
Les signes d’appel incluent : les métrorragies spontanées, ment du myomètre et du col et de rechercher la présence
indolores et peu abondantes ou une hydrorrhée. Plus rarement, d’adénopathies rétropéritonéales pelviennes ou lomboaorti-
ce sont des troubles urinaires (cystite, hématurie, pollakiurie) et ques [16].
des douleurs pelviennes qui font porter le diagnostic en cas de • Radiographie pulmonaire.
forme avancée [2]. Toutes les métrorragies postménopausiques
doivent être explorées. Tous les saignements anormaux de la
période périménopausique ou survenant chez les femmes ■ Traitement (Fig. 1)
suivant un traitement hormonal substitutif doivent être explo-
rés. Dans plus de 70 % des cas, une pathologie organique est Le bilan clinique et paraclinique permet de déterminer le
retrouvée. Celles-ci sont reportées dans le Tableau 1 : si le cancer stade de la tumeur selon la classification de la Fédération
de l’endomètre ne constitue pas la cause la plus fréquente, il est internationale de gynécologie-obstétrique (FIGO). Celle-ci est
la cause à éliminer formellement. rapportée dans le Tableau 3.
Le traitement est fonction de la classification FIGO. Il
dépend cependant de l’état général de la patiente et des
Interrogatoire et examen physique comorbidités [1, 17, 18].
Les facteurs de risque du cancer de l’endomètre sont recher-
chés à l’interrogatoire.
L’examen général est nécessaire pour évaluer l’état général de ■ Pronostic et surveillance
la patiente et son opérabilité. La comorbidité (diabète, HTA,
obésité, insuffisance cardiaque) doit être prise en compte. Les taux de survie à 5 ans sont corrélés aux stades :
L’examen clinique comprend un examen au spéculum : il • stade I : 90 % ;
permet d’objectiver des métrorragies spontanées provenant de • stade II : 80 % ;
l’endocol et de réaliser des prélèvements cytologiques et • stade III : 40 % ;
histologiques (frottis, biopsie d’endomètre...). • stade IV : 10 %.
• Toucher vaginal : la taille, la consistance et la mobilité du Le pronostic semble également dépendre de la nature histo-
corps et du col de l’utérus sont étudiés. logique de la tumeur [19] . Les autres facteurs pronostiques
• Toucher rectal : un envahissement des paramètres et une avancés dans la littérature ne semblent pas avoir d’impact en
carcinose du cul-de-sac de Douglas sont recherchés. termes de survie [20].

2 Traité de Médecine Akos


Cancer de l’endomètre ¶ 3-1260

Métrorragies postménopausiques

Biopsie d'endomètre
(Pipelle® de Cornier, canule de Novak)
et frottis cervico-utérin

Négatif : Douteux : Positif (adénocarcinome)


endomètre normal hyperplastie atypique, Cancer de l'endomètre
non contributif

Échographie pelvienne Échographie pelvienne


par voie endovaginale par voie endovaginale

- Échographie pelvienne par voie


endovaginale à visée stratégique :
exploration de l'extension
Endomètre < 5 mm sans THS (myomètre, col, ovaires)
Hystéroscopie et - Scanner abdominopelvien/IRM
ou < 8 mm avec THS
curetage pelvienne
Atrophie de l'endomètre

Endomètre Hyperplasie
normal atypique Hystérectomie, curages
± radiothérapie

Polype bénin

Hyperplasie
typique
Hystérectomie simple
(risque de cancer méconnu)
Résection
hystéroscopique

Pas de consensus :
Surveillance Danatrol®,
progestatifs,
thermoablation

Figure 1. Arbre décisionnel. Stratégie diagnostique et traitement devant des métrorragies postménopausiques. IRM : imagerie par résonance magnétique ;
THS : traitement hormonal substitutif.

Tableau 3.
Classification de la Fédération internationale de gynécologie-obstétrique
(FIGO). “ Point fort
I : tumeur limitée au corps utérin
Ia : limitée à l’endomètre Traitement en fonction de la classification FIGO
Ib : envahissement < 50 % de l’épaisseur du myomètre Stade I :
Ic : envahissement > 50 % de l’épaisseur du myomètre Ia = hystérectomie totale et annexectomie bilatérale ;
II : extension au col utérin Ib grades 1 et 2 = hystérectomie totale, annexectomie
IIa : envahissement glandulaire bilatérale et curage pelvien puis curiethérapie ;
IIb : envahissement du stroma cervical Ib grade 3 ou Ic = hystérectomie totale, annexectomie
III : extension au-delà de l’utérus avec respect de la vessie bilatérale et curage pelvien, radiothérapie externe puis
et du rectum, limitée au pelvis curiethérapie.
IIIa : envahissement de la séreuse utérine, des annexes, ou cytologie Stade II : la radiothérapie peut précéder la chirurgie si
péritonéale positive
diagnostic préopératoire de stade II.
IIIb : extension au vagin
Stade III : radiothérapie externe, curiethérapie puis
IIIc : extension aux ganglions iliaques ou lomboaortiques
chirurgie sauf si l’on suspecte une atteinte annexielle,
IV : envahissement de la vessie, du rectum ou métastases à distance
IVa : envahissement de la vessie et/ou de la muqueuse rectale
auquel cas on réalise une chirurgie première. Irradiation
IVb : métastases à distance, extension intra-abdominale, ganglions lomboaortique dans les stades IIIc lomboaortiques.
inguinaux Stade IV : radiothérapie exclusive.

Traité de Médecine Akos 3


3-1260 ¶ Cancer de l’endomètre

En l’absence de signes d’appel, la surveillance repose sur [6] Tretli S, Magnus K. Height and weight in relation to uterine corpus
l’examen clinique général et gynécologique [21]. Le rythme des cancer morbidity and mortality.Afollow-up study of 570 000 women in
examens de surveillance n’est pas établi formellement : un Norway. Int J Cancer 1990;46:165-72.
examen tous les 6 mois les trois premières années, puis tous les [7] Parazzini F, La Vecchia C, Negri E, Riboldi GL, Surace M, Benzi G,
ans est suffisant. Toute patiente présentant des symptômes doit et al. Diabetes and endometrial cancer: an Italian case-control study. Int
avoir un bilan complémentaire. Il n’y a pas d’indication à faire J Cancer 1999;81:539-42.
des examens complémentaires paracliniques à la recherche de [8] McDonald TW, Malkasian GD, Gaffey TA. Endometrial cancer
récidive ou de métastase en l’absence de signe d’appel. Le CA associated with feminizing ovarian tumor and polycystic ovarian
125 est un des examens qui permettent le diagnostic précoce de disease. Obstet Gynecol 1977;49:654-8.
[9] Kvale G, Heuch I, Ursin G. Reproductive factors and risk of cancer of
récidive mais celui-ci n’a pas fait la preuve de son efficacité sur
the uterine corpus: a prospective study. Cancer Res 1988;48:6217-21.
le pronostic et ne peut être recommandé en routine. En cas de
[10] Kurman RJ, Kaminski PF, Norris HJ. The behavior of endometrial
troubles de la ménopause chez une patiente traitée pour un hyperplasia. A long-term study of ″untreated″ hyperplasia in 170
cancer de l’endomètre, il n’est pas démontré qu’un traitement patients. Cancer 1985;56:403-12.
hormonal prescrit aux femmes à faible risque augmente le [11] Dunlop MG, Farrington SM, Carothers AD, Wyllie AH, Sharp L,
risque de récidive ou de métastase [22] ; néanmoins, des études Burn J, et al. Cancer risk associated with germline DNA mismatch
prospectives sont nécessaires pour recommander la prescription repair gene mutations. Hum Mol Genet 1997;6:105-10.
d’un traitement hormonal substitutif à ces femmes. [12] Brandner P, Neis KJ. Diagnosis of endometrial cancer and its
precursors. Contrib Gynecol Obstet 2000;20:27-40.
[13] Deruelle P, Leroy JL. Diagnosis of endometrial cancer. Rev Prat 2001;

“ Point fort [14]


51:1439-43.
Goldstein RB, Bree RL, Benson CB, Benacerraf BR, Bloss JD,
Carlos R, et al. Evaluation of the woman with postmenopausal
bleeding: Society of Radiologists in Ultrasound-Sponsored Consensus
Toutes les métrorragies postménopausiques doivent être Conference statement. J Ultrasound Med 2001;20:1025-36.
explorées par une biopsie d’endomètre et éventuellement [15] Symonds I. Ultrasound, hysteroscopy and endometrial biopsy in the
une échographie et une hystéroscopie. investigation of endometrial cancer. Best Pract Res Clin Obstet
.
Gynaecol 2001;15:381-91.
[16] Ascher SM, Reinhold C. Imaging of cancer of the endometrium. Radiol
■ Références [17]
Clin North Am 2002;40:563-76.
Levine DA, Hoskins WJ. Update in the management of endometrial
[1] Amant F, Moerman P, Neven P, Timmerman D, Van Limbergen E, cancer. Cancer J 2002;8(suppl1):S31-S40.
Vergote I. Endometrial cancer. Lancet 2005;366:491-505. [18] Hanf V, Gunthert AR, Emons G. Endometrial cancer. Onkologie 2003;
[2] Tropé CG, Alektiar KM, Sabbatini PJ, Zaino RJ. Corpus: epithelial 26:429-36.
tumors. In: Wilkins LW, editor. Principles and practice of gynecologic [19] Prat J. Prognostic parameters of endometrial carcinoma. Hum Pathol
oncology. Philadelphia: Lippincott-Williams and Wilkins; 2005. 2004;35:649-62.
p. 823-72. [20] Chew SH. Prognostic factors in endometrial carcinoma. Ann Acad Med
[3] Goodman MT, Hankin JH, Wilkens LR, Lyu LC, McDuffie K, Liu LQ, Singapore 1999;28:266-71.
et al. Diet, body size, physical activity, and the risk of endometrial [21] Barnhill D, O’Connor D, Farley J, Teneriello M, Armstrong D, Park R.
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[5] Ziel HK. Estrogen’s role in endometrial cancer. Obstet Gynecol 1982; [22] Levgur M. Estrogen and combined hormone therapy for women after
60:509-15. genital malignancies: a review. J Reprod Med 2004;49:837-48.

R. Rouzier (roman.rouzier@tnn.aphp.fr).
S. Legoff.
Service de gynécologie-obstétrique et médecine de la reproduction, Hôpital Tenon, 4, rue de la Chine, 75970 Paris cedex 20, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Rouzier R., Legoff S. Cancer de l’endomètre. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Traité de Médecine Akos,
3-1260, 2007.

Disponibles sur www.emc-consulte.com


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4 Traité de Médecine Akos


¶ 3-1250

Cancer du col de l’utérus


R. Rouzier, S. Legoff

Le dépistage des dysplasies cervicales par le frottis cervical a permis de diminuer l’incidence et la mortalité
par cancer du col utérin du fait du traitement précoce des lésions précancéreuses et des carcinomes
épidermoïdes in situ. La majorité des cancers du col sont dues au virus Human Papillomavirus,
sexuellement transmissible. Avec 3 200 cas par an en France, le cancer du col de l’utérus représente 5 %
des cancers féminins. Le signe clinique majeur est le saignement postcoïtal. Le diagnostic histologique se
fait par biopsie sous colposcopie ou macroscopiquement orientée. Le type histologique le plus féquent est
le carcinome épidermoïde (85 %) mais l’incidence des adénocarcinomes augmente. Le bilan d’extension
comprend un examen clinique complet, une imagerie par résonance magnétique (IRM)
abdominopelvienne et une radiographie pulmonaire. Le traitement repose pour les stades très précoces
sur la chirurgie, pour les stades limités au col de bon pronostic soit sur la curiethérapie suivie de chirurgie
(colpohystérectomie élargie avec lymphadénectomie), soit sur la chirurgie exclusive, soit sur la
radiothérapie exclusive, et pour les stades plus évolués sur la radiothérapie (externe et curiethérapie) avec
chimiothérapie concomitante suivie éventuellement d’une chirurgie. En cas de tumeur de moins de 2 cm,
certaines équipes proposent un traitement conservateur appelé trachélectomie élargie.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Frottis cervical ; Colposcopie ; Human Papilloma virus ; Métrorragie ;


Colpohystérectomie élargie ; Radiothérapie ; Chimiothérapie

Plan agressifs, les lésions avancées doivent être traitées par radiothé-
rapie avec chimiothérapie concomitante. La survie en cas de
stade limité au col est environ de 85 % à 5 ans.
¶ Introduction 1
¶ Incidence 1
¶ Histoire naturelle et facteurs de risque 1 ■ Incidence
¶ Anatomopathologie 2
Avec 3 200 cas par an en France, le cancer du col de l’utérus
¶ Diagnostic 2 représente 5 % des cancers féminins. C’est le deuxième cancer
Circonstances de découverte 2 gynécologique par ordre de fréquence. L’incidence des lésions
Examen clinique 2 préinvasives est en hausse mais l’incidence des cancers invasifs
Diagnostic histologique 2 est en baisse grâce au dépistage. L’âge moyen des lésions
Stadification du cancer du col 2 préinvasives se situe entre 30 et 35 ans, celui des cancers
¶ Bilan 3 invasifs est de 55 ans. Pour la plus grande partie de la popula-
¶ Facteurs pronostiques 3 tion mondiale le cancer du col utérin reste l’une des principales
causes de mortalité par cancer chez la femme avant 50 ans.
¶ Traitement 3
Méthodes thérapeutiques 3
Indications 3
■ Histoire naturelle et facteurs
¶ Surveillance 4
de risque
L’histoire naturelle du carcinome épidermoïde du col utérin
■ Introduction en fait un modèle de carcinogenèse. En effet, son étiologie, bien
qu’incomplètement élucidée, est liée à l’infection par Human
Le cancer du col utérin est en recul grâce au dépistage des papillomavirus (HPV). Le stade in situ précède d’environ
lésions préinvasives. Le carcinome épidermoïde est le type 10-20 ans le cancer invasif [1] ; un cancer in situ évolue dans
histologique le plus fréquent mais l’incidence relative des 80 % des cas vers un cancer invasif en 30 ans [2]. L’incidence
adénocarcinomes est en hausse car ils sont mal dépistés par le des métastases ganglionnaires est globalement proportionnelle
frottis cervical. La prise en charge des cancers du col s’est au degré d’invasion locale ; évolué, le cancer touche les paramè-
modifiée ces dernières années : si les lésions limitées au col et tres, le vagin, le corps de l’utérus, la vessie, le rectum, la cavité
de petit volume peuvent bénéficier de traitements moins péritonéale ; les métastases à distance les plus fréquentes

Traité de Médecine Akos 1


3-1250 ¶ Cancer du col de l’utérus

concernent les poumons, les chaînes ganglionnaires médiasti- Tableau 1.


nales et sus-claviculaires, les os et le foie [3]. L’infection à HPV Stadification FIGO des cancers du col.
est une maladie sexuellement transmissible : les facteurs de Stade 0 Carcinome in situ
risque sont donc en rapport avec le comportement sexuel (âge
Stade I Carcinome limité au col
.
précoce au premier rapport, nombre élevé de partenaires,
grossesses multiples, bas niveau socio-économique) [4]. Les HPV - Ia1 - microscopique < 3 mm d’invasion et 7 mm en superficie
oncogènes les plus fréquents sont les types 16, 18, 31 et 33 [5]. - Ia2 - microscopique < 5 mm d’invasion et 7 mm en superficie
Le tabagisme et l’infection par le virus de l’immunodéficience - Ib1 - macroscopique < 4 cm
humaine (VIH) ainsi que d’autres causes d’immunodépression - Ib2 - macroscopique > 4 cm
sont aussi des facteurs de risque [6, 7]. Stade IIa Atteinte 2/3 supérieurs du vagin
L’adénocarcinome à cellules claires du col ne répond pas à la Stade IIb Atteinte paramétriale
même carcinogenèse ; l’exposition in utero au Distilbène en
Stade IIIa Atteinte 1/3 inférieur du vagin
augmente la fréquence [8]. L’âge au moment du diagnostic est
plus précoce (entre 10 et 30 ans, moyenne de 19 ans). Le Stade IIIb Paroi pelvienne et/ou hydronéphrose
Distilbène ayant été retiré du marché, les cancers lui étant liés Stade IVa Vessie/rectum
ne devraient bientôt plus se rencontrer en France. Stade IVb Métastase
Un lien entre contraception orale et cancer du col n’a pas pu
être établi [9, 10] bien que, chez l’animal, le cancer du col puisse
être induit par application d’hormones. peuvent être inapparentes au spéculum ; le toucher bimanuel
permet alors d’en suspecter la présence.

■ Anatomopathologie Diagnostic histologique


Il existe deux principaux types histologiques de cancer du col Le frottis cervical est l’outil diagnostique le plus efficace de
utérin : les carcinomes épidermoïdes et les adénocarcinomes. Les nos jours pour dépister les cancers du col infraclinique et les
carcinomes épidermoïdes représentent 85 à 90 % des cancers du lésions précancéreuses. Il est recommandé de faire 2 frottis à un
col et ils comprennent les carcinomes épidermoïdes classiques, an d’intervalle en début de dépistage, puis tous les 3 ans. L’âge
les carcinomes à cellules fusiformes, les carcinomes épidermoï- recommandé du premier frottis est 25 ans (éventuellement
des avec stroma pseudosarcomateux, à cellules claires, de type 20 ans en cas de facteurs de risque). Le dépistage doit être
lymphoépithéliome, avec éosinophile stromal, basaloïdes, poursuivi jusqu’à l’âge de 65 ans. Pour être interprétable, il ne
.
papillaires et verruqueux. Les adénocarcinomes représentent 10 doit pas être réalisé à moins de 48 heures d’un rapport sexuel,
à 15 % des carcinomes du col utérin mais leur incidence est en ni en période menstruelle, ni trop contaminé par les métrorra-
hausse. Ils comprennent les adénocarcinomes simples, endomé- gies, et doit se contrôler après traitement d’une éventuelle
.
trioïdes, à cellules claires, séreux et mixte. Les autres types infection cervicovaginale. Le climat hormonal (phase du cycle,
histologiques (carcinomes adénosquameux, sarcomes, ...) sont contraception orale, traitement hormonal substitutif) doit être
exceptionnels. précisé sur la demande d’analyse anatomopathologique, de
Le carcinome épidermoïde se développe généralement sur une même que les éventuels antécédents de dysplasie ou de conisa-
zone de métaplasie, à la jonction endocol-exocol. Quinze pour tion. Les cellules endocervicales doivent être représentées dans
cent des adénocarcinomes ont un développement intracervical, le recueil effectué. En cas d’anomalie au frottis, un examen sous
sans lésion visible au spéculum. colposcopie, plus ou moins complété par des biopsies des zones
suspectes, doit être réalisé. La jonction endocervicale doit être
vue de manière satisfaisante. L’ANAES a édité un dossier de
■ Diagnostic recommandations disponible sur internet (http://www.anaes.fr/
ANAES/framedef.
Circonstances de découverte nsf/0/71e60e94c17622aec125667f0023974b ? OpenDocument).
Le diagnostic histologique d’une lésion macroscopique
Les signes d’appel du cancer du col utérin sont en premier s’obtient par biopsie dirigée du col, voire du vagin emportant
lieu les métrorragies provoquées par les rapports sexuels. Il peut suffisamment de matériel en profondeur (cf. document
aussi s’agir de leucorrhées jaunâtres parfois nauséabondes électronique 1) ; il n’y a pas besoin d’anesthésie locale, les berges
(tumeur nécrotique), de douleurs pelviennes, fessières ou du col étant une zone naturellement insensible ; la demande
lombosacrées (invasion des chaînes ganglionnaires iliaque ou d’analyse anatomopathologique doit faire figurer un schéma
latéroaortique avec atteinte de la chaîne nerveuse lombosacrée, lésionnel et les antécédents de la patiente.
ou associée à une hydronéphrose). Dans les formes avancées, ce Il arrive parfois que le frottis et la colposcopie soient mis en
sont des troubles urinaires (cystite, hématurie, pollakiurie) et échec devant un cancer du col à développement endocervical ; le
rectaux (ténesme, épreintes, faux besoins) qui peuvent être le diagnostic est alors fait lors d’une hystéroscopie complétée de
motif de consultation. Un saignement chronique peut être à biopsies dirigées.
l’origine d’anémie, fatigue et perte de poids. Les formes avan-
cées seraient beaucoup plus rares si la couverture du dépistage
était suffisante.

Examen clinique “ Point important


Les facteurs de risque sont recherchés à l’interrogatoire ; la
Les métrorragies provoquées doivent être explorées par
date et le résultat du dernier frottis cervical sont à faire préciser.
La palpation abdominale vérifie l’absence d’ascite et de masse un examen au spéculum, un frottis et éventuellement une
abdominale. La palpation des aires ganglionnaires (Troisier, colposcopie.
ganglions inguinaux) est essentielle. L’examen général recherche
l’absence d’extension hépatique et thoracique.
À l’examen au spéculum, on retrouve une lésion bourgeon-
nante ou ulcérante développée à partir du massif cervical mais
Stadification du cancer du col
plus ou moins étendue, saignant au contact. La taille de la Les cancers du col sont stadifiés selon la classification de la
lésion est mesurée. Fédération internationale des gynécologues et obstétriciens
Le toucher vaginal et le toucher rectal permettent d’éva- (FIGO) (Tableau 1) qui repose sur l’examen clinique. Il peut
luer l’extension locale : recherche d’un envahissement du vagin, toutefois être plus aisé de réaliser cet examen sous anesthésie
des paramètres, etc. Les lésions à développement endocervical générale, voire de réaliser dans le même temps une cystoscopie

2 Traité de Médecine Akos


Cancer du col de l’utérus ¶ 3-1250

et une rectosigmoïdoscopie en cas de troubles urinaires ou qu’une exérèse des ganglions pelviens et éventuellement
digestifs. Cette classification tient compte de la taille de la lomboaortiques.
.
lésion, de l’envahissement de la paroi vaginale, de l’extension La mortalité opératoire est de moins de 1 % ; sa morbidité,
paramétriale. La stratégie thérapeutique en dépend. qui est le plus souvent immédiate, comporte les plaies
urétérales, les fistules urétérovaginales ou vésicovaginales
(1-2 %), une dysurie et les plaies vasculaires et digestives. Les
■ Bilan femmes jeunes ne sont pas toujours à l’abri d’une ménopause
précoce puisque seulement 50-60 % d’entre elles vont avoir
En cas de lésion macroscopique avec histologie confirmée, le une préservation de leur fonction ovarienne même sans avoir
bilan d’imagerie comprend une imagerie par résonance magné- reçu d’irradiation [24, 25].
tique (IRM) abdominopelvienne qui a supplanté le scanner et Certaines équipes proposent la réalisation d’une stadification
l’urographie intraveineuse. L’IRM permet de mesurer la taille du préthérapeutique par curage pelvien et lomboaortique par
col, d’évaluer l’envahissement des paramètres et l’extension aux cœlioscopie. Les modalités thérapeutiques sont alors adaptées à
cloisons rectovaginale et vésicovaginale, de rechercher un l’extension ganglionnaire de la maladie.
retentissement rénal et un envahissement ganglionnaire.
Néanmoins, avec une sensibilité de 60 %, l’IRM est peu perfor- Irradiation externe
mante pour l’analyse des ganglions. Le scanner a une perfor-
Pour l’irradiation des cancers du col utérin les photons
mance équivalente. La visualisation de l’appareil urinaire est
d’énergie supérieure ou égale à 10 MV sont un standard. La
.
indispensable. Elle peut être réalisée par urographie intravei-
limite supérieure est L4-L5 (L5-S1 éventuellement si la lésion est
neuse, clichés d’urographie postscanner, échographie rénale et
de petit volume et en l’absence d’envahissement ganglionnaire),
vésicale, tomodensitométrie ou IRM [11].
la limite latérale déborde de 1 à 2 cm les limites latérales
La radiographie pulmonaire est systématique à la recherche
osseuses du pelvis ; la limite latérale des champs antéroposté-
.
de métastases pulmonaires.
rieurs doit couvrir dans tous les cas la projection des aires
Cystoscopie et rectoscopie ne sont réalisées que sur signes
ganglionnaires ; la limite inférieure est déterminée par l’examen
d’appel.
vaginal : une marge de sécurité minimale de 4 cm en dessous
Au stade initial, les marqueurs présentent peu d’intérêt
de l’extension la plus basse est nécessaire. Il est recommandé
.
diagnostique.
d’utiliser une technique à 4 champs. Une protection médiane
Il n’y a pas d’indication pour la réalisation d’un typage HPV
est parfois réalisée en cas de curiethérapie utérovaginale
en pratique courante.
préalable. Le rythme de l’irradiation classique est de 2 Gy par
séances et 5 séances par semaine.
■ Facteurs pronostiques La dose dépend de l’objectif clinique (curatif ou palliatif), de
la stratégie thérapeutique (radiothérapie exclusive ou association
Les facteurs pronostiques ayant un impact sur la décision radiochirurgicale) et du compromis choisi entre la dose de
thérapeutique sont : contrôle tumoral qui dépend du volume tumoral ; la dose
• le stade de la FIGO, facteur pronostique indépendant corrélé requise pour stériliser les lésions utérines est de 60 à 75 Gy,
au contrôle pelvien, à la survie et à l’évolution métastatique pour les adénopathies métastatiques de 60 à 70 Gy et pour la
de la maladie [12] ; maladie résiduelle infraclinique de 45 à 55 Gy.
• le volume tumoral est un facteur pronostique indépendant La dose de tolérance est variable selon les organes critiques,
pour les formes limitées, notamment dans sa dimension ainsi en fonction du volume irradié et à titre indicatif : 60 à
invasive, avec une corrélation entre profondeur tumorale et 65 Gy pour le rectum et la vessie, 50 à 60 Gy pour le sigmoïde
atteinte ganglionnaire, survie sans récidive à 2 ans, récur- et 45 Gy pour le grêle. Le vagin, l’utérus et les uretères sont
rence [13], métastases [14] et survie globale [15] ; relativement radiorésistants. Les ovaires sont très radiosensibles
• l’envahissement lymphatique est aussi un facteur pronostique et perdent, après 10 Gy, leur fonction endocrine et germinative.
indépendant [16], en particulier dans les formes limitées des La morbidité due à la radiothérapie peut se révéler des années
cancers du col utérin, ainsi que le nombre de ganglions après l’irradiation, à type de troubles urinaires, intestinaux
atteints, le niveau supérieur de l’envahissement et la bilaté- (répondant habituellement bien au régime alimentaire et aux
ralité de l’atteinte [17] ; antispasmodiques), de fistule digestive nécessitant le plus
• la séropositivité VIH s’accompagne d’un fort risque de souvent une intervention chirurgicale, de plexite radique
récidive et de décès, que le cancer soit in situ ou invasif [18]. lombosacrée ou de myélite radique. Ces troubles atteignent
D’autres facteurs pronostiques ont été publiés dans la littéra- 3-5 % des patientes de stade I et IIa, et 10-15 % en cas de stade
ture, sans grand intérêt en pratique clinique : IIb et III. La radiothérapie précipite souvent les femmes prémé-
• taux du marqueur squamous cell carcinoma (SCC) préthéra- nopausées vers la ménopause.
peutique et durant le suivi post-thérapeutique [19] ;
• patiente atteinte d’hypertension artérielle [20] ;
Curiethérapie
• autres : taux de polynucléaires neutrophiles, position (anté/ Il existe deux techniques de curiethérapie : la plésiocuriethé-
rétroversée) de l’utérus, diabète [21]. rapie, lorsque les sources sont mises dans des cavités naturelles
La survie globale à 5 ans est de 85 % pour les stades I à IIa, au contact de la tumeur ou de la zone à irradier, et la curiethé-
60-65 % pour les stades IIb à IV, sachant que seules 18-34 % des rapie interstitielle, lorsque les sources sont implantées directe-
patientes de stade IVa sont encore vivantes à 5 ans [22, 23]. ment dans les tissus à irradier.
La curiethérapie distribue une dose inhomogène : des doses
très élevées sont délivrées à quelques millimètres de la source et
■ Traitement des doses très faibles à 1 ou 2 cm de la source (notion de
gradient de dose). Cette inhomogénéité de répartition de la dose
Méthodes thérapeutiques est à la base de l’efficacité et de la bonne tolérance de la
curiethérapie, si l’application est correcte et l’indication bien
Chirurgie adaptée.
Les troubles secondaires sont essentiellement une dyspareunie
L’extension de la chirurgie est fonction du stade initial, de la par rétrécissement du diamètre vaginal et altération de sa
séquence thérapeutique et de l’étendue des lésions résiduelles en souplesse et de sa lubrification.
cas de traitement initial par radiothérapie.
Une hystérectomie pour un cancer du col utérin est classi-
quement une colpohystérectomie élargie et doit donc comporter
Indications
une exérèse du dôme vaginal et des paramètres (vaisseaux Stades 0 et Ia1 : la chirurgie (hystérectomie totale extrafas-
utérins et tissu cellulograisseux qui entoure les vaisseaux), ainsi ciale) est le traitement standard. Toutefois, la conisation ou

Traité de Médecine Akos 3


3-1250 ¶ Cancer du col de l’utérus

Figure 1. Arbre décisionnel. Prise en charge


des tumeurs de moins de 4 cm. RT : radiothé-
Stades IB à IIB proximal de bon pronostic rapie.
(taille < 4 cm, N0, pas d'envahissement
du paramètre si chirurgie première)

Pas de standard, 3 options

Irradiation exclusive
Colpohystérectomie élargie RT externe Association
et lymphadénectomie + radiochirurgicale
curiethérapie

Si N+ : Si N+ :
irradiation pelvienne Si tumeur persistante irradiation pelvienne
± lomboaortique après la RT : ± lomboaortique
hystérectomie
dans un délai
de 6 à 8 semaines

Figure 2. Arbre décisionnel. Prise en charge


des tumeurs de plus de 4 cm.
IB à IIB proximal de mauvais IIB distal, III, IVA
pronostic (taille > 4 cm,
envahissement ganglionnaire
pelvien)

Radio-chimio-thérapie concomitante Radio-chimio-thérapie concomitante


comportant du cisplatine comportant du cisplatine

Option : hystérectomie complémentaire Options :


après un délai de 8 semaines en cas de - chirurgie complémentaire
mauvaise réponse surtout si tumeur > 4 cm - irradiation lomboaortique

l’amputation intravaginale du col au bistouri froid, nécessaires Les indications thérapeutiques sont reportées dans les
pour le diagnostic, sont suffisantes sur le plan thérapeutique Figures 1 et 2.
pour les stades Ia1 jusqu’à 1 mm d’infiltration en profondeur et
de 1 à 3 mm en l’absence de facteurs de mauvais pronostic
(niveau de preuve B), à condition que les berges soient saines ■ Surveillance
et les marges de sécurité respectées. La conisation est principa-
lement recommandée pour les femmes souhaitant une grossesse La surveillance par un examen clinique est la seule recom-
et acceptant une surveillance cervicale régulière. La curiethéra- mandation : le frottis vaginal, les marqueurs et l’imagerie n’ont
pie, réalisée chez des patientes inopérables, le laser et la pas démontré leur intérêt. Le rythme optimal n’a pas été
cryothérapie seraient capables de contrôler 100 % des carcino- officiellement arrêté. Les recommandations sont de trois à
mes in situ [26-28]. quatre examens par an pendant les 2 premières années, puis
Stade Ia2 : la conisation n’assure pas de contrôler la maladie tous les 6 mois pendant les 3 années suivantes, et enfin une fois
(faux positifs et faux négatifs des marges, ganglions envahis) [29, par an.
30] ; le traitement relève de l’hystérectomie extrafasciale ou Les traitements substitutifs hormonaux ne sont pas contre-
élargie, parfois de la curiethérapie. indiqués sauf pour les adénocarcinomes pour lesquels la réserve
Stades Ib et IIa : le traitement des tumeurs du col inférieures s’impose. La prise en charge des troubles psychologiques et
à 4 cm repose soit sur la curiethérapie (60 Gy) suivie de sexuels est majeure dans le suivi des patientes ayant eu un
chirurgie (Wertheim = colpohystérectomie élargie avec lympha- cancer du col.
dénectomie), soit sur la chirurgie exclusive, soit sur la radiothé- .

rapie exclusive [31, 32]. En cas de tumeur de moins de 2 cm,


certaines équipes proposent un traitement conservateur appelé ■ Références
trachélectomie élargie : cette intervention consiste en l’exérèse [1] Reagan JW, Wentz WB. Genesis of carcinoma of the uterine cervix.
du col et des paramètres tout en préservant les vaisseaux utérins Clin Obstet Gynecol 1967;10:883-921.
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à 4 cm repose sur la radiothérapie (45 Gy en externe + 15 Gy [3] Badib AO, Kurohara SS, Webster JH, Pickren JW. Metastasis to organs
en curiethérapie) ± chimiothérapie (platine) concomitante ± in carcinoma of the uterine cervix. Influence of treatment on incidence
chirurgie [34]. and distribution. Cancer 1968;21:434-9.

4 Traité de Médecine Akos


Cancer du col de l’utérus ¶ 3-1250

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R. Rouzier (roman.rouzier@tnn.aphp.fr).
S. Legoff.
Service de gynécologie obstétrique, Hôpital Tenon, 4, rue de la Chine, 75970 Paris cedex 20, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Rouzier R., Legoff S. Cancer du col de l’utérus. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Traité de Médecine Akos,
3-1250, 2007.

Disponibles sur www.emc-consulte.com


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Traité de Médecine Akos 5


3-1250

3-1250
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Cancer du col utérin

F Lécuru, F Robin, R Taurelle, C Durdux

L e dépistage du cancer du col utérin a permis d’en diminuer la fréquence. Sa stratégie de prise en charge a
évolué en précisant la place des curages ganglionnaires, de la radiothérapie et de la chimiothérapie.
© 1999 , Elsevier, Paris.


Introduction

Le cancer du col utérin est le deuxième cancer


Tableau I. – Variétés anatomopathologiques.

Carcinomes épidermoïdes
– Carcinome épidermoïde 1
gynécologique par ordre de fréquence, avec une – Carcinome à cellules fusiformes 2
incidence de 13 cas pour 100 000 femmes et par an, – Carcinome épidermoïde avec stroma pseudosar-
c’est-à-dire environ 5 000 nouveaux cas par an en comateux
France. – Carcinome épidermoïde à cellules claires
– Carcinome de type lymphoépithéliome
La fréquence de ce cancer et ses conséquences – Carcinome avec éosinophilie stromale
ont régressé depuis 30 ans, grâce au dépistage. – Carcinome basaloïde 3
Le cancer épidermoïde est le plus fréquent et – Carcinome épidermoïde papillaire
constitue un modèle en cancérologie pelvienne – Carcinome verruqueux
puisque l’on connaît son étiologie principale Adénocarcinomes
(Papillomavirus), sa physiopathologie (intégration du
– Adénocarcinome simple 1 Drainage lymphatique du col utérin. Schéma fron-
génome viral et transformation cellulaire) et l’histoire
– Adénocarcinome endométrioïde tal d’une lésion du col utérin avec le réseau lympha-
naturelle de la maladie. Il est précédé par une phase – Adénocarcinome à cellules claires tique cervical et le drainage vers les ganglions ilia-
préinvasive que l’on peut dépister et traiter. – Adénocarcinome séreux ques externes, via les paramètres.
– Adénocarcinome mixte


Autres carcinomes ailleurs, l’intégration du génome viral se fait à
Anatomopathologie proximité du proto-oncogène cellulaire c-myc.
– Carcinome adénosquameux qui associe un
contingent épidermoïde à un contingent glandu- Il en résulte une prolifération anormale des
Deux types de lésions néoplasiques peuvent être laire. Les carcinomes à cellules vitreuses représen- cellules au niveau de la zone de jonction, ainsi que
tent une variété peu différenciée leur transformation. On aboutit à la constitution
observés au niveau du col utérin : les cancers
– Carcinome à cellules de réserve d’une lésion épithéliale de haut grade, d’un
épidermoïdes et les adénocarcinomes. – Cylindrome
– Les cancers épidermoïdes représentent plus de – Carcinome avec une différenciation endocrine carcinome in situ, puis d’un cancer invasif.
80 % des cancers du col. On en décrit plusieurs – Adénocarcinome d’origine wolffıenne
‚ Histoire naturelle
sous-types (tableau I). Tumeurs non épithéliales
– Les adénocarcinomes sont plus rares, mais Les cancers épidermoïdes du col naissent de la
leur fréquence est en augmentation constante – Léiomyosarcome zone de jonction. Ils ont une évolution qui est
– Rhabdomyosarcome embryonnaire longtemps locorégionale.
depuis 15 ans (tableau I). – Sarcome du stroma endocervical
– Sarcome alvéolaire On observe la formation d’un carcinome in situ,


puis d’un carcinome micro-invasif qui envahit le
Autres stroma sur moins de 5 mm, puis d’un carcinome
Étiologie - histoire naturelle
– Tumeurs secondaires réellement invasif.
– Tumeurs diverses L’extension se fait dans la profondeur du col, vers
‚ Étiologie les paramètres, le vagin, la vessie, le rectum et plus
L’étiologie des cancers du col utérin est connue. rarement le corps utérin.
Les infections cervicales à human Papillomavirus Le mécanisme d’action principale des hPV est Le cancer du col a avant tout une extension
(hPV) sont en effet considérées comme la première l’intégration de leur génome à celui des cellules lymphatique (fig 1). Il faut savoir que des vaisseaux
cause de cancer du col [1]. Les hPV sont contractés cibles. Cette intégration permet la dérégulation du lymphatiques sont présents à moins de 3 mm sous
© Elsevier, Paris

lors des rapports sexuels. Ils sont à l’origine de génome viral, avec synthèse accrue des protéines la membrane basale de l’épithélium cervical. Le
l’apparition des dysplasies cervicales. Les hPV 16 et virales E6 et E7, qui se lient aux protéines cellulaires drainage lymphatique du col se fait, via le
hPV 18 sont plus fréquemment retrouvés que les p53 et pRb. L’affinité de ces oncoprotéines virales paramètre, vers les ganglions situés sous la veine
autres sérotypes dans les lésions épithéliales de haut pour p53 et pRb est d’autant plus élevée qu’elles iliaque externe et dans la bifurcation de la veine
grade et les cancers. sont issues des virus à risque hPV 16 et hPV 18. Par iliaque commune. Ces relais peuvent être considérés

1
3-1250 - Cancer du col utérin

comme les relais sentinelles du cancer du col. de dépistage (frottis cervicovaginal) ou sur une pièce
L’extension se fait ensuite vers les ganglions iliaques de conisation réalisée pour une dysplasie sévère. Tableau II. – Stadification des cancers du col
utérin (Fédération internationale des
communs puis les chaînes lomboaortiques. Le
gynécologues-obstétriciens [FIGO]).
drainage direct du col vers les chaînes lomboaor- ‚ Examen clinique
tiques est rare. En l’absence de métastase Stade Description
L’interrogatoire retrouve les facteurs de risque
ganglionnaire pelvienne, le risque d’observer une
(cf supra). Ia1 < 7 mm largeur et < 3 mm profondeur
métastase lomboaortique est inférieur à 3 % [8].
L’examen abdominal vérifie l’absence d’ascite et Ia2 < 7 mm largeur et < 5 mm profondeur
Une fois que les premiers relais ganglionnaires
de masse palpable.
sont macroscopiquement envahis, le drainage Ib1 Limité au col, col < 4 cm
La mise en place du spéculum permet d’observer
lymphatique peut suivre des voies inhabituelles et
le col porteur d’une lésion ulcérovégétante que l’on Ib2 Limité au col, col > 4 cm
l’on peut observer des reflux comme des circulations
biopsie. On vérifie l’absence d’extension
de suppléance. Ceci explique l’atteinte des ganglions IIa Sans extension paramétriale, sans attein-
macroscopique sur le vagin. On note la taille du col. dre le tiers inférieur du vagin
fessiers, hypogastriques..., responsable de récidives
L’examen général recherche des signes
pariétales après traitement chirurgical exclusif (ces IIb Extension paramétriale < paroi pelvienne
ganglions ne sont jamais enlevés lors des curages d’extension hépatique, thoracique et surtout sur les
aires ganglionnaires, inguinales, crurales ou sur le IIIa Sans extension paramétriale, atteinte du
chirurgicaux). tiers inférieur du vagin
ganglion de Troisier.
IIIb Extension paramétriale à la paroi pel-


‚ Stadification du cancer du col vienne
Facteurs de risque IIIu Dilatation du haut appareil urinaire
Elle est clinique. On réalise un examen sous
anesthésie générale, avec un chirurgien et un IVa Muqueuse vésicale ou rectale
Tous les facteurs épidémiologiques associés aux radiothérapeute qui confrontent leurs résultats.
infections cervicovaginales à hPV constituent des IVb Métastase à distance
On note la taille du col, sa mobilité par rapport à
facteurs de risque pour le cancer épidermoïde du col la paroi, l’extension vaginale, l’extension aux
utérin [1] : paramètres par le toucher rectal. On associe abdominopelvien, ou mieux, l’imagerie par
– premiers rapports sexuels précoces, partenaires systématiquement une cystoscopie. Il est utile de résonance magnétique (IRM), qui permet de mesurer
multiples ; réaliser un schéma qui comporte l’ensemble de ces la taille du col, d’étudier l’extension aux paramètres,
– première grossesse précoce, multiparité ; éléments. à la cloison rectovaginale et à la cloison
– instabilité maritale ; Le stade du cancer est connu à la fin de cet vésicovaginale, l’intégrité rénale, et enfin d’évaluer
– tabagisme ; examen et l’on peut décider de la stratégie l’extension ganglionnaire.
– immunodépression ; thérapeutique.
– infection du ou des partenaires par les hPV. La spécificité de l’IRM est bonne en ce qui
Dans le cas où une curiethérapie préopératoire
Les sérotypes 16 et 18 sont associés au risque concerne l’extension locale de la tumeur. Les sondes
est réalisée, on peut profiter de l’anesthésie pour
carcinogénétique le plus grand. endovaginales et endorectales amélioreront très
réaliser l’applicateur ou l’insérer (tableau II).
La contraception orale (en particulier séquentielle) certainement encore les performances de l’examen.
a été incriminée dans la genèse des Inversement, la sensibilité du diagnostic de


adénocarcinomes. l’extension ganglionnaire n’est que de l’ordre de
L’absence de dépistage et de suivi gynécologique Bilan d’extension 60 %. En effet, l’IRM ne peut détecter que des
constitue un facteur de risque majeur. ganglions augmentés de volume, alors que 50 %
des ganglions métastatiques ont un volume
L’urographie intraveineuse et la lymphographie normal [4, 5]. Le scanner a un rendement équivalent


Diagnostic

Type de description : cancer épidermoïde


bipédieuse sont rarement utilisées aujourd’hui.
L’examen de première intention est le scanner
pour l’analyse des ganglions, mais inférieur pour
l’extension locorégionale (fig 2).

débutant. 2 Adénopathie para-


aortique métastatique dans
‚ Circonstances de découverte un cancer stade IIIb.

L’âge moyen du diagnostic est de 54 ans.


La survenue de métrorragies, provoquées par les
rapports sexuels ou les toilettes, doit faire évoquer
une lésion cervicale. Parfois, le cancer du col se
révèle par des leucorrhées associées à du sang.

La reconnaissance de métrorragies
postménopausiques impose :
✔ d’examiner le col utérin (± frottis) ;
✔ d’explorer l’endomètre.

La constatation de douleurs pelviennes, de signes


urinaires ou digestifs, signe une extension locale déjà
avancée.
Si le dépistage était correctement organisé en
France, le cancer du col serait découvert sur un test

2
Cancer du col utérin - 3-1250

La réalisation d’une radiographie de thorax et le 28 % des cas après chirurgie élargie. Il s’agissait
dosage sérique du marqueur SCC (squamous cell surtout de complications aiguës entraînant peu de
carcinoma) et de la créatininémie sont conséquences à long terme [6].
systématiques. III
Il est également possible de réaliser des
Les autres examens (rectoscopie...) ne sont hystérectomies élargies par voie basse. On distingue
3
réalisés qu’en cas de signe d’appel. les interventions de Schauta-Stoeckel de
l’intervention de Schauta-Amreich en fonction de
II leur radicalité. Ces interventions amènent les


I
1 avantages de la chirurgie par voie vaginale, mais
Facteurs pronostiques imposent de réaliser les curages par cœlioscopie :
2 – récupération postopératoire plus rapide ;
Sont considérés comme facteurs péjoratifs : – moins de complications thromboemboliques,
– une taille tumorale supérieure à 4 cm ; etc.
– une invasion stromale supérieure à 75 % de Bien qu’aucune étude prospective contrôlée ne
l’épaisseur du col ; l’ait démontré, on considère généralement qu’elles
4
– des emboles lymphatiques et surtout donnent des résultats proches de ceux de
vasculaires ; l’hystérectomie élargie par voie abdominale [7]. Plus
– une variété non squameuse ou un grade III ; récemment, la trachélectomie élargie a été décrite.
– une atteinte paramétriale ; 3 Différents types d’hystérectomies élargies. La clas- Elle consiste en l’ablation du cul-de-sac vaginal, du
sification tient compte de l’importance de l’exérèse col et du paramètre. Elle permet de conserver l’utérus
– une anémie.
du paramètre par rapport aux piliers externes de la et donc la fertilité chez les femmes jeunes [2].
L’envahissement ganglionnaire pelvien, et a vessie et par rapport à la paroi pelvienne.
fortiori para-aortique, est un facteur hautement L’intérêt de la chirurgie est d’éviter la castration
péjoratif. Il est fortement lié aux facteurs précédents. systématique chez les femmes jeunes, en permettant
Il faut souligner que l’examen sous anesthésie une transposition ovarienne (les métastases
Tableau III. – Complications des curages par
générale et l’imagerie ne fournissent qu’une part laparotomie [11]. ovariennes des cancers épidermoïdes sont
restreinte des différents facteurs pronostiques. En rarissimes), de préserver la sexualité et de permettre
particulier, l’extension ganglionnaire est Complications Fréquence l’utilisation de la radiothérapie si survient une
insuffisamment appréciée par ce bilan pour qu’il soit Lymphocèle 20, 4 % récidive. Enfin, il est possible de réaliser une
décisionnel. « stadification chirurgicale et anatomopathologi-
Thrombose veineuse 8, 8 % que », plus fiable que l’examen clinique et l’imagerie
Dans les cancers opérables, les renseignements
Embolie pulmonaire 4, 4 % réunis car donnant les limites réelles de l’extension
issus de l’exploration chirurgicale et de l’analyse
tumorale.
anatomopathologique de la pièce restent Paresthésie nerf obturateur 5,4 %
fondamentaux. ‚ Radiothérapie
Abcès rétropéritonéal 1,4 %
Il faut ajouter que de nouveaux facteurs
Fistule urinaire 0,5 % On utilise généralement une association
pronostiques apparaissent aujourd’hui : présence
d’irradiation externe par des photons de haute
d’une p53 mutée, expression de l’oncogène c-myc,
énergie d’un accélérateur nucléaire (10 à 25 MV) et
néoangiogenèse importante… Ces variables sont hospitalier. Cependant, le recul est encore trop faible de curiethérapie.
généralement liées aux autres facteurs pronostiques, pour valider cette technique en pratique
mais peuvent participer à la décision thérapeutique courante [10]. Radiothérapie externe
chez les patientes pour qui les facteurs traditionnels
On associe systématiquement un curage pelvien Elle est délivrée par quatre faisceaux
sont rassurants (tableau II).
(tableau III), qui prélève les chaînes situées en orthogonaux. Elle concerne l’utérus, les paramètres
dedans et sous les vaisseaux iliaques externes et les aires ganglionnaires pelviennes. L’irradiation


(notamment les relais localisés dans la bifurcation vaginale est fonction des données de l’examen
Méthodes de traitement du cancer iliaque), ainsi que les relais iliaques primitifs et ceux clinique initial. La dose délivrée dans le volume
du col du promontoire. On associe souvent un curage tumoral est de 45 à 50 Gy en 4 à 5 semaines, à
lomboaortique. raison de cinq séances hebdomadaires de 2 Gy. Un
Le but est de traiter le col, le vagin, les paramètres La chirurgie élargie expose à un certain nombre complément de 20 à 25 Gy peut être réalisé sur la
et les ganglions qui drainent le col. de complications. La mortalité est aujourd’hui très tumeur, les chaînes ganglionnaires, les paramètres,
limitée (inférieure à 1 %), mais il faudra rechercher : en fonction du stade TNM (tumeur, nodes,
‚ Chirurgie – les fistules urétérovaginales : 10 % (écoulement métastases) et de la stratégie thérapeutique globale.
La colpohystérectomie élargie représente d’urines permanent) ; leur fréquence augmente avec La dose de radiothérapie externe tient compte d’une
l’intervention de référence pour le traitement du la radicalité de l’hystérectomie ; éventuelle curiethérapie associée.
cancer du col. On en définit cinq classes différentes – les sténoses urétérales : 5 % des cas ;
en fonction de leur radicalité (fig 3). Elle est – les fistules vésicovaginales : plus rares (moins ‚ Curiethérapie
classiquement réalisée par laparotomie. La durée de 5 %) ; Il existe deux techniques de curiethérapie :
moyenne d’hospitalisation est de 7 jours, avec – les dyskinésies vésico-urétrales : fréquentes, – la plésiocuriethérapie (ou endocavitaire),
réalisation systématique d’une urographie liées à la dénervation, la dévascularisation et la lorsque les sources radioactives sont mises dans les
intraveineuse avant la sortie, afin de vérifier modification des rapports anatomiques ; cavités naturelles : curiethérapie vaginale ou
l’absence de complication urinaire infraclinique. La – les lymphocèles : plus fréquemment observées utérovaginale ;
durée de la convalescence est supérieure à si le curage a été suivi d’une péritonisation et d’un – la curiethérapie interstitielle, lorsque les
6 semaines. traitement par l’héparine [11]. sources sont implantées directement dans le tissu
Il faut souligner que plusieurs équipes ont décrit Une étude randomisée récente, comparant la tumoral, lors d’une récidive vaginale ou paramétriale
des hystérectomies élargies cœlioscopiques. Cette chirurgie et la radiothérapie pour le traitement des par exemple.
voie d’abord semble limiter les saignements formes limitées de cancer du col, a montré que des Les sources utilisées en France sont l’iridium 192
peropératoires et réduire significativement le séjour complications de grade III étaient observées dans (haut et bas débits) ou le césium 137. Elles sont mises

3
3-1250 - Cancer du col utérin

en place par le biais d’un applicateur standard ou étant radiosensibilisants. La chimiothérapie 60 % des cas. Si le col est cathétérisable, elle est
personnalisé (après moulage anatomique adapté à néoadjuvante permettrait d’améliorer la survie de complétée par une curiethérapie endocavitaire,
chaque patient). Une hospitalisation en milieu certains cas [12]. destinée à stériliser le col et un complément de
protégé est nécessaire. Sa durée est fonction de radiothérapie externe sur le paramètre (20 Gy).
l’étude dosimétrique systématiquement réalisée. Les Si le bilan préthérapeutique montre des
doses délivrées varient là encore selon la stratégie
thérapeutique globale (60 Gy pour les curiethérapies
utérovaginales préopératoires, 20 Gy pour les
curiethérapies vaginales postopératoires après

Traitement : indications
classiques

‚ Formes localisées (stades Ib et IIa)


métastases ganglionnaires lomboaortiques,
l’irradiation de ce territoire peut être discutée, dans
l’espoir d’améliorer la survie (au prix d’une morbidité
augmentée).
irradiation pelvienne).
Le traitement débute par l’application d’une


La radiothérapie expose à un certain nombre de
curiethérapie utérovaginale qui délivre 60 Gy.
complications : Résultats
L’application du moule de curiethérapie peut être
– complications précoces, survenant en cours de
faite dès l’examen de stadification et réalisée sous
traitement, banales et réversibles : nausées,
anesthésie générale. L’intervention de référence est
vomissements, diarrhée, cystite ; Formes localisées (stades Ib et IIa)
la colpohystérectomie élargie de type II (avec section
– complications tardives, à distance du La survie à 5 ans est comprise entre 80 et 85 %,
du paramètre à l’aplomb de l’uretère), associée à une
traitement, en règle définitives mais heureusement quelle que soit la méthode utilisée : chirurgie,
lymphadénectomie pelvienne 6 semaines après la
rares : urinaires (fistules urétéro- et vésicovaginales, radiothérapie, association radiochirurgicale. La
curiethérapie. Si les ganglions pelviens sont envahis
sténoses urétérales), digestives (rectites radiques, survie est supérieure à 95 % à 5 ans pour les formes
sur l’examen anatomopathologique extemporané,
grêles radiques), vaginales (rigidité, sténose). Leur N-, et de l’ordre de 60 % à 5 ans pour les formes
on réalise un curage lomboaortique. Le traitement
fréquence a notablement été réduite grâce à N+ pelviennes.
est complété par une irradiation externe sur les aires
l’utilisation de la dosimétrie par ordinateur. Une
ganglionnaires métastatiques.
étude prospective récente à montré que l’on Formes localement avancées (stades IIb
Si le diamètre cervical dépasse 4 cm (stade Ib2) ou et plus)
déplorait encore 12 % de complications de grade III.
si le bilan d’extension montre des adénopathies
La survie à 5 ans est de l’ordre de 55 % pour les
métastatiques (adénomégalie vue sur l’IRM,
‚ Association radiochirurgicale stades IIb. Elle chute à 30-40 % pour les stades III.
confirmation de l’envahissement par une ponction
Le but de cette association est de réduire les guidée), on débute le traitement par une irradiation


complications en diminuant la dose de radiothérapie externe première ou une association radiochimio-
et la radicalité de la chirurgie. Elle associe une thérapique qui délivre 40 Gy. On la complète par Évolution actuelle du traitement
curiethérapie préopératoire qui délivre 60 Gy sur le une curiethérapie et on ne réalise l’intervention dans
col et le vagin, destinée à stériliser la pièce et à un deuxième temps qu’en cas de régression du Depuis 10 ans environ, nos conceptions sur le
diminuer le volume tumoral. Elle est suivie, volume tumoral. traitement du cancer du col ont évolué en raison des
6 semaines plus tard, par une colpohystérectomie L’intérêt de l’irradiation est de diminuer les concepts de maladie locale-maladie générale, de
élargie de type II, destinée à éviter les récidives récidives locales. Cependant, elle ne semble pas l’introduction de la cœlioscopie en oncologie
locales, la pyométrie ou les cancers de l’endomètre améliorer la survie. gynécologique et de l’utilisation de la
secondaires à une irradiation. Elle est complétée par Les femmes jeunes ou les cancers du col chimiothérapie.
une irradiation externe postopératoire sur les aires diagnostiqués pendant la grossesse bénéficient en
ganglionnaires métastatiques. général d’une chirurgie première, avec conservation ‚ Formes localisées (stades Ib et IIa) (fig 4)
Elle expose néanmoins à un certain nombre de et transposition ovariennes. Les tumeurs débutantes sans extension
complications : ganglionnaire, de taille inférieure à 2 cm, peuvent
– fistule : environ 3 % des cas ; ‚ Formes localement avancées (stades IIb être considérées comme des maladies essentiel-
– sténose urétérale : 3 à 6 % des cas ; et plus)
lement locales, ne réclamant qu’un traitement local.
– dysfonctionnement vésical, fistule rectovagi- Le traitement classique consiste en une irradiation Leur pronostic est excellent, quel que soit le
nale : 2 % des cas ; pelvienne exclusive, ou mieux, une association traitement envisagé. Il faut donc privilégier la qualité
– lymphocèle ; radiochimiothérapique. On effectue une irradiation de survie. La chirurgie est particulièrement adaptée
– accidents thromboemboliques et altération première délivrant 40 à 50 Gy sur le col, les puisqu’elle permet l’exérèse de l’ensemble des tissus
notable de la sexualité, avec arrêt complet de paramètres, le vagin et les chaînes pelviennes. Elle néoplasiques en entraînant peu de séquelles
celle-ci : plus de 20 % des cas. permet de réduire le volume tumoral dans environ fonctionnelles à long terme.
Une série prospective contrôlée récente a montré
que des complications de grade III étaient observées
chez 27 % des patientes traitées par une association 4 Algorithme pour les
Stades Ib – IIa stades de début.
radiochirurgicale [6].

‚ Chimiothérapie
< 2 cm 2 – 4 cm
Elle s’adresse aux formes métastatiques. La
chimiothérapie entraîne une réduction du volume
tumoral dans 50 % des cas, avec une régression Curage pelvien Curage pelvien
complète de la tumeur dans 30 % des cas [3].
Sont classiquement utilisés : les sels de platine, le
N– N+ N– N+
5-fluorouracile, l’étoposide et l’ifosfamide, le plus
souvent en association.
Actuellement, se développent, dans les formes Hystérectomie élargie Radiothérapie Curage para-aortique
localisées de gros volume, les chimiothérapies +/– hystérectomie élargie Radiothérapie
néoadjuvantes et surtout les associations +/– hystérectomie élargie
radiochimiothérapiques, les cytostatiques choisis

4
Cancer du col utérin - 3-1250

Les tumeurs sans extension ganglionnaire mais irradiation a été réalisée lors du traitement initial, on
avec un volume cervical supérieur à 2 cm de ne peut que proposer un traitement chirurgical qui
Ib > 4 cm
diamètre exposent à un risque de récidive consiste en une pelvectomie partielle ou totale. Il
centropelvienne plus important en cas de traitement IIb et plus s’agit d’une intervention longue, lourde, mutilante,
chirurgical exclusif. Certains auteurs ont montré associée à une mortalité importante (supérieure à
qu’une chimiothérapie néoadjuvante permettait 5 %) et à une morbidité élevée (infections, accidents
Adénopathie
d’augmenter la résecabilité de ces lésions et thromboemboliques, occlusions, fistules digestives,
para-aortique
d’allonger la survie de ces patientes [12] . Plus fistules urinaires, hospitalisation longue). Elle est
généralement, une irradiation ou une association donc à réserver à des femmes encore jeunes (moins
radiochimiothérapie améliorent significativement le N– N+ de 60 ans), en bon état physique et psychologique,
contrôle local. sans métastase ganglionnaire ou viscérale. En fait,
Les formes localisées avec atteinte ganglionnaire RT pelvis RT pelvis 80 % des femmes susceptibles d’avoir une
ne sont plus à considérer comme des maladies + chimiothérapie + lombo-aortique pelvectomie sont récusées lors du bilan
locales, mais comme des maladies générales. Il + chimiothérapie
préopératoire.
faudra donc associer au traitement local (chirurgie
Volume tumoral Hystérectomie élargie ?
ou radiothérapie, ou association radiochirurgicale),
Échec Complément RT


dont le but est de traiter la lésion et d’éviter les
récidives pelviennes, un traitement général qui 5 Algorithme pour les stades évolués. RT : Dépistage
devrait allonger la survie. Malheureusement, pour radiothérapie.
l’instant, les protocoles de chimiothérapie n’ont pas
donné les résultats escomptés. Cette surveillance comporte : Le dépistage organisé du cancer du col par la
Il apparaît donc que les deux éléments – un examen général ; réalisation de frottis cervicovaginaux tous les 2 ou
décisionnels initiaux sont la taille du col utérin et la – un examen pulmonaire ; 3 ans a montré que l’on pouvait obtenir une
connaissance de l’envahissement ganglionnaire – un examen digestif (occlusion, fistule) ; réduction importante de la mortalité par cancer du
pelvien (fig 4). Le curage chirurgical, avec examen – un examen urinaire (fistule, sténose, col (30 à 40 %) chez les femmes âgées de 45 à 65
anatomopathologique des ganglions prélevés, reste dysfonctionnement vésico-urétral) ; ans [1]. En France, ce dépistage n’est pas organisé. Le
la méthode la plus fiable pour connaître cet – un examen gynécologique, avec mise en place dépistage est donc individuel. Il consiste en la
envahissement ganglionnaire. d’un spéculum, réalisation de frottis vaginaux et de réalisation de frottis cervicovaginaux tous les 2 à 3
La tendance actuelle est donc de poursuivre touchers pelviens. ans en l’absence de facteurs de risque, et après avoir
l’examen de stadification, sous anesthésie générale, On vérifie également les aires ganglionnaires et vérifié la normalité du col par deux frottis normaux à
par un curage pelvien cœlioscopique. Les cas sans on demandera un dosage régulier du SCC sérique. 1 an d’intervalle.
atteinte ganglionnaire pourront bénéficier, dans le Quelques travaux ont montré que la multipli- Le résultat des frottis devrait être exprimé selon la
même temps opératoire, d’une hystérectomie cation des examens complémentaires n’amenait classification de Bethesda : frottis normal, frottis
élargie, soit par laparotomie, soit de façon plus aucun bénéfice en terme de survie, mais augmentait inflammatoire, frottis dystrophique, dyscaryose,
logique par cœlioscopie, et surtout par voie considérablement le coût de la surveillance. frottis ininterprétable. Cette classification a le mérite
cœliovaginale. Inversement, les patientes ayant un La tolérance du traitement sera évaluée sur la d’être claire et de guider le médecin dans la conduite
envahissement ganglionnaire devront entrer dans sexualité, la fonction vésicale et le transit. à tenir. Les femmes présentant une dyscaryose
un protocole de radiochimiothérapie, éventuel- doivent alors subir un test diagnostique : la
lement associé à un temps chirurgical. colposcopie avec biopsies. Cet examen permet

‚ Stades plus avancés (IIb et plus)


Ils répondent dans plus de 60 % des cas à une
association radiothérapie-chimiothérapie

Récidives

Plus de 90 % des récidives surviennent dans les


d’observer le col et de repérer les zones
pathologiques, d’apprécier la gravité des anomalies
et de faire des biopsies à l’endroit qui paraît le plus
pathologique.
concomitante. Dans ces cas, il paraît logique de 2 ans qui suivent le traitement. Plus d’une sur deux Les femmes présentant des facteurs de risque
poursuivre l’examen de stadification par un curage sera pelvienne. doivent bénéficier d’un frottis annuel.
lomboaortique coelioscopique. Cet examen
Le dépistage et le traitement des formes
permettra de sélectionner les patientes qui peuvent
préinvasives doivent permettre de traiter ces
bénéficier d’un traitement complémentaire ✔ Les facteurs de risque de récidives
femmes de façon conservatrice, en préservant leur
(irradiation lomboaortique ou chimiothérapie) (fig 5). sont connus :
intégrité anatomique et fonctionnelle.
Il faut souligner que le bénéfice, sur la survie, de ✔ type tumoral, grade III ;
l’irradiation lomboaortique reste controversé. ✔ embole lymphovasculaire ;
✔ atteinte paramétriale ;


On a en revanche montré que la réalisation d’une
hystérectomie élargie, 6 semaines après la fin de la ✔ atteinte ganglionnaire ; Formes cliniques
radiothérapie, permettait de réduire la fréquence des ✔ limite de résection envahie en cas
récidives locales, donc d’améliorer la qualité de de chirurgie.
survie, sans toutefois en allonger la durée. ‚ Cancers micro-invasifs
Récidives vaginales : elles seront traitées par une L’intérêt de définir un sous-type particulier de


Surveillance post-thérapeutique

On s’attachera à vérifier la mise en rémission


colpectomie (subtotale), en sachant qu’il existe un
risque important de fistules en cas d’irradiation
préalable. Les femmes n’ayant pas été irradiées lors
du traitement initial peuvent bénéficier d’une
cancer du col est d’identifier des formes de meilleur
pronostic pouvant bénéficier d’un traitement
conservateur.
Ceci est d’autant plus important que les cancers
complète et son maintien et à rechercher les curiethérapie. micro-invasifs (CMI) surviennent 10 ans plus tôt que
complications liées au traitement. Récidives pelviennes : en l’absence d’irradiation les cancers invasifs, chez des femmes ayant encore
Le rythme de surveillance initial est semestriel, lors du traitement initial, on peut proposer une une sexualité régulière et pouvant encore désirer des
puis annuel. irradiation externe à la dose de 50 Gy. Si une grossesses.

5
3-1250 - Cancer du col utérin

Deux définitions sont actuellement employées : femmes qui acceptent de se soumettre à une ‚ Adénocarcinomes
– la Society of Gynecologic Oncology (SGO) admet surveillance cytologique ultérieure régulière [9].
Le rôle des hPV dans leur genèse n’est pas
comme CMI les carcinomes dont l’invasion stromale L’hystérectomie n’apporte aucun bénéfice
démontré. De la même façon, il ne semble pas
est inférieure à 3 mm et qui ne sont pas associés à supplémentaire puisque aucune récidive n’a jamais
possible d’identifier une variété micro-invasive.
des emboles lymphovasculaires ; été rapportée au niveau de l’utérus. Ellle augmente
Le diagnostic, le bilan d’extension et le traitement
– la Fédération internationale des gynécologues- en revanche les conséquences anatomiques, la
ne diffèrent pas de ceux du cancer épidermoïde,
obstétriciens (FIGO) reconnaît deux sous-types : le morbidité et le coût du traitement.
mais l’annexectomie bilatérale sera systématique
stade Ia1, comprenant les tumeurs ayant une Les CMI dont l’invasion stromale est comprise
lors de l’intervention.
invasion stromale inférieure à 3 mm et une largeur entre 3 et 5 mm, associés à des emboles
Les facteurs pronostiques sont la profondeur
inférieure à 7 mm et le stade Ia2, constitué des lymphovasculaires, doivent être traités comme
d’invasion stromale, le volume de la tumeur et
lésions envahissant le stroma sur plus de 3 mm et d’authentiques cancers invasifs, car la fréquence des
l’existence de métastases ganglionnaires.
moins de 5 mm, avec une largeur inférieure à 7 mm. récidives après traitement conservateur et des
Le pronostic a longtemps été jugé moins bon que
Le diagnostic ne peut être posé que sur une pièce métastases ganglionnaires est proche de celle des
celui des variétés épidermoïdes. En réalité,
de conisation (ou d’hystérectomie) réalisée pour une cancers au stade Ib. Chez les femmes jeunes, la
l’appariement sur les principaux facteurs
lésion épithéliale de haut grade. Les frottis, la trachélectomie élargie constitue une alternative
pronostiques montre que les deux variétés
colposcopie et les biopsies ont des valeurs intéressante, car elle associe la radicalité
anatomopathologiques ont des pronostiques
prédictives insuffisantes pour affirmer le CMI. carcinologique et la préservation de la fertilité.
semblables.
L’analyse anatomopathologique de la pièce fournit Les lésions qui envahissent le stroma entre 3 et
les facteurs pronostiques : profondeur d’invasion 5 mm de profondeur, sans embole lymphovascu-
stromale, emboles lymphovasculaires...
Le risque de métastase ganglionnaire, comme celui
de récidive locale après traitement conservateur,
augmente avec le volume de la lésion et l’existence
laire, ou les cancers superficiels (inférieurs à 3 mm)
avec des emboles lymphovasculaires, ont un risque
intermédiaire. Chez les femmes jeunes, il est possible
de se contenter d’une conisation passant en zone

Perspectives

La mise en évidence de nouveaux facteurs


d’emboles lymphovasculaires. Le volume tumoral saine, associée à un curage pelvien endoscopique. pronostiques devrait limiter les échecs dans les
étant difficile à mesurer en routine, la profondeur Lorsqu’il existe une discordance entre la formes de début, sans envahissement ganglionnaire.
d’invasion stromale est utilisée par défaut. profondeur d’invasion stromale et l’étendue en Pour les formes évoluées, la mise au point de
Les lésions dont l’invasion stromale est surface de la lésion, il est impératif de faire relire les nouveaux traitements à visée générale est
inférieure à 3 mm ont un risque faible de métastase lames par un anatomopathologiste spécialisé en impérative. En effet, dans ces stades, la survie n’a pas
ganglionnaire, a fortiori en l’absence d’embole cancérologie pelvienne. C’est en effet dans ces cas varié depuis plusieurs décennies, malgré de
lymphovasculaire. Un traitement local (conisation que des récidives ont été décrites malgré des nombreux protocoles de chirurgie, de radiothérapie
passant en zone saine) est alors suffisant chez les invasions a priori limitées. ou d’association radiochirurgicale.

Fabrice Lécuru : Praticien hospitalier universitaire.


François Robin : Chef de clinique-assistant.
Roland Taurelle : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service.
Service de gynécologie-obstétrique, hôpital Boucicaut, 78, rue de la Convention, 75730 Paris cedex 15, France.
Catherine Durdux : Praticien hospitalier universitaire,
service de radiothérapie, hôpital Tenon, 4, rue de la Chine, 75020 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : F Lécuru, F Robin, R Taurelle et C Durdux. Cancer du col utérin.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1250, 1999, 6 p

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6
3-1405

3-1405
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Cancer et grossesse

V Castaigne, MV Senat, H Fernandez

L es cancers survenant le plus fréquemment pendant la grossesse sont les cancers du col de l’utérus et les cancers
du sein. L’association cancer et grossesse pose d’importants problèmes thérapeutiques, éthiques et
psychologiques. L’indication de traitement et la possibilité de retarder celui-ci doivent être décidées de façon
pluridisciplinaire, après information du couple.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

■ ■
Effets secondaires fœtales, toute chimiothérapie ou irradiation fœtale
Introduction de la radiothérapie étant potentiellement tératogène. Au cours de la
et de la chimiothérapie première semaine postconceptionnelle, les effets
obéissent à la loi du « tout ou rien », aboutissant soit
Les cancers survenant pendant la grossesse L’utilisation de ces thérapeutiques pendant la
à une fausse couche, soit à un développement fœtal
représentent environ 1/1 000 naissances vivantes. grossesse doit être limitée au maximum du fait des
normal. Puis, pendant la période d’organogenèse
effets secondaires fœtaux possibles. En cas de
Les tumeurs les plus fréquentes sont, dans l’ordre (jusqu’à la 12 e SA), les effets tératogènes
décision de chimiothérapie ou de radiothérapie
décroissant [10] : prédominent, avec une incidence de 10 à 20 % de
(tableau I), il est préférable de les utiliser au début du
– cancer du col utérin ; malformations en cas de chimiothérapie, contre 3 %
deuxième trimestre (fin de la période d’organo-
dans la population générale [3]. Le méthotrexate et
– cancer du sein ; genèse), d’utiliser les produits les moins tératogènes,
les agents alkylants en sont les principaux
– mélanome malin ; et de diminuer l’irradiation fœtale par l’utilisation de
pourvoyeurs. L’incidence des malformations suite à
– cancer de l’ovaire ; champs d’irradiation réduits au maximum et d’un
une radiothérapie est difficilement chiffrable car elle
tablier de protection abdominopelvien.
– cancer de la thyroïde ; dépend de la dose reçue (une dose de sécurité
Les effets secondaires fœtaux peuvent être aigus autour de 0,1 Gy semble recommandée) [7].
– lymphome ;
ou retardés. Les complications aiguës observées
– leucémie. dépendent de l’âge gestationnel et de la nature de Au cours des deuxième et troisième trimestres,
Les mélanomes et les hémopathies peuvent l’agent utilisé en cas de chimiothérapie et/ou des les complications prédominantes sont le retard de
métastaser au fœtus, alors qu’il n’a jamais été doses d’irradiation fœtale. croissance intra-utérin et les accouchements
rapporté de transmission pour les cancers du col, de prématurés. Il peut de plus exister des séquelles
Le premier trimestre est la période la plus
l’ovaire, de la thyroïde ou du sein. neurologiques (fin de l’organogenèse cérébrale
dangereuse, puisqu’elle expose aux malformations
plus tardive), et des malformations fœtales
La survenue d’un cancer pendant la grossesse
cependant moins fréquentes qu’au premier trimestre
pose d’importants problèmes thérapeutiques et
Tableau I. – Effets de la chimiothérapie et de la (1,3 %) [3].
éthiques. Un traitement rapide est souvent indiqué,
radiothérapie. En cas de chimiothérapie myélosuppressive au
nécessitant une hystérectomie en cas de cancer du
col ou de l’ovaire, une radiothérapie et/ou une Période d’exposition Effets principaux troisième trimestre, il est important de programmer
chimiothérapie dans les autres cas qui peuvent être l’extraction fœtale au moins 3 semaines après la
Première semaine post- « Tout ou rien » dernière cure pour une plus grande sécurité
délétères pour le fœtus, particulièrement au premier conceptionnelle
trimestre (période d’organogenèse). Il est donc maternelle et pour éviter une myélosuppression
Jusqu’à 12 SA Tératogénicité+++ néonatale [3].
important de décider de façon pluridisciplinaire de Tératogénicité neurolo-
l’indication, de la possibilité de retarder ce traitement gique Les complications tardives postnatales sont plus
pour poursuivre la grossesse ou d’envisager une difficiles à évaluer en raison d’un recul encore
Deuxième et troisième Mort in utero
interruption médicale de grossesse. trimestres Retard de croissance insuffisant et du petit nombre de femmes traitées.
Lorsque la poursuite de la grossesse est Prématurité Des cas de retard de croissance et de dévelop-
envisagée, une corticothérapie par bêtaméthasone pement ont été rapportés [7], ainsi que des cancers
< 3 semaines avant Toxicité d’organe
peut accélérer la maturation pulmonaire, et une l’accouchement (moelle, cutanée) induits (cancer de la thyroïde, neuroblastome) [7] et
extraction à partir de 32-33 semaines d’aménorrhée une hypofertilité.
Toute période Toxicité tardive
(SA) peut être envisagée en accord avec les L’administration de chimiothérapie contre-indique
néonatologistes. SA : semaines d’aménorrhée. l’allaitement maternel.

1
3-1405 - Cancer et grossesse


Cancer du col utérin Tableau II. – Conduite à tenir dans les cancers du col.

Traitement immédiat Traitement différé


Discussion
du traitement
‚ Prévalence
Stade II a et plus Ia et Ib1 Ib2
La prévalence du cancer in situ est de
Statut ganglionnaire N+ N- Évaluation ganglions
1,3/1 000 grossesses [4], tandis que celle du cancer
invasif est de 1/1 000 à 1/10 000 grossesses [11]. Terme grossesse < 20 SA > 20 SA
La grossesse ne modifie ni la répartition des types Parité Primipare Nullipare Adhésion patiente
histologiques des tumeurs du col, ni l’évolution du
SA : semaines d’aménorrhée.
carcinome épidermoïde. Cependant, pendant la
grossesse, la fréquence des stades I et II est plus


grande du fait d’un dépistage plus large dans cette comme traitement néoadjuvant associé à une
population [11]. interruption médicale de grossesse [11]. Cancer du sein
La chimiothérapie est exceptionnellement
‚ Méthodes diagnostiques néoadjuvante chez des patientes à un stade ‚ Prévalence
carcinologique avancé refusant l’interruption
Le frottis cervicovaginal (FCV) est très souvent La prévalence est de 1/3 000 à 1/10 000 gros-
médicale de grossesse.
réalisé à la première consultation de la grossesse, sesses, soit 1 à 4 % des cancers du sein [12], ce chiffre
Les différentes études publiées semblent prouver
permettant ainsi un large dépistage. englobant les cancers diagnostiqués pendant la
qu’un délai thérapeutique est acceptable en cas de
L’anatomopathologiste doit être prévenu de la grossesse et pendant l’année suivante.
stade I découvert au deuxième trimestre. À partir du
grossesse car elle modifie l’aspect du frottis, mais Le type histologique des tumeurs du sein n’est pas
stade II, il semble qu’une prise en charge retardée
celui-ci reste, dans la majorité des cas, modifié par la grossesse, et la grossesse n’augmente
augmente la mortalité maternelle [11].
interprétable [4]. pas le risque de survenue d’un cancer du sein. Le
En cas de décision d’interruption de grossesse, le pronostic d’un cancer du sein associé à la grossesse
En cas d’anomalie retrouvée au frottis, une
traitement peut être soit chirurgical d’emblée, réalisé est plus mauvais qu’en dehors de la grossesse, sans
colposcopie est indiquée, avec au besoin des
sur utérus gravide dans le même temps que la qu’un rôle propre de la grossesse soit clairement
biopsies dirigées [ 4 ] . Ces examens ne sont
césarienne, soit différé après évacuation utérine par démontré. En effet, il existe des facteurs confondants,
responsables que de 0,5 % de faux négatifs et de
voie basse ou césarienne, ce qui permet d’effectuer tels que le jeune âge, le retard thérapeutique, et
0,6 % de complications.
un bilan d’extension avec curage ganglionnaire et surtout le retard au diagnostic (2 à 11 mois en
En cas de lésions de bas grade, la répétition
éventuellement une transposition ovarienne. moyenne).
d’examens pendant la grossesse n’est pas justifiée
En cas de traitement différé, la patiente doit
pour tous ; certains auteurs recommandant une ‚ Méthodes diagnostiques
bénéficier d’une surveillance colposcopique
réévaluation en post-partum.
régulière, avec éventuellement répétition de l’IRM. Le dépistage pendant la grossesse repose sur
En cas de lésions de haut grade confirmées à la
L’accélération de la maturation pulmonaire fœtale l’examen attentif des seins. La découverte d’une
biopsie, une surveillance chaque trimestre environ
peut permettre une extraction dès 32-33 SA. masse, surtout si elle est suspecte, doit déboucher
est indiquée pour ne pas méconnaître un cancer qui
Il n’existe pas d’étude randomisée comparant la sur des explorations complémentaires plutôt que sur
imposerait une conisation à but diagnostique et
voie basse à la césarienne en cas de cancer du col. une surveillance clinique qui devient de plus en plus
parfois thérapeutique. La conisation peut être
La voie d’accouchement ne modifierait pas le difficile avec l’avancée de la grossesse.
associée à un cerclage préventif pour certains [5].
pronostic de la patiente en cas de stade précoce [5], La mammographie n’est pas contre-indiquée. Elle
mais des métastases sur le site de l’épisiotomie ont est réalisée avec un tablier de plomb permettant une
‚ Bilan préthérapeutique irradiation fœtale négligeable [1], mais sa sensibilité
été observées dans les stades plus avancés, ce qui
En cas de cancer invasif prouvé, une imagerie par est diminuée par la grossesse. L’échographie a
est associé à un fort taux de mortalité [11]. Si une
résonance magnétique (IRM) remplace le scanner également une moins bonne sensibilité, mais ne
césarienne est pratiquée, l’hystérotomie doit éviter le
abdominopelvien. La cystoscopie et la radiographie présente aucune contre-indication et peut guider
segment inférieur et la région cervicale afin de
pulmonaire avec un tablier de plomb peuvent être une ponction à l’aiguille. Le cytologiste doit être
diminuer le risque de dissémination
réalisées sur signes d’appel. prévenu de la grossesse, car il existe une
carcinologique [11].
prolifération cellulaire intense avec de fréquentes
Différentes situations peuvent être envisagées :
‚ Prise en charge thérapeutique atypies pouvant être à l’origine de faux positifs.
– accouchement par voie basse et traitement en Réalisé par des anatomopathologistes entraînés, cet
La décision de retarder la prise en charge post-partum immédiat ; examen a une sensibilité et une spécificité
thérapeutique de la patiente pour permettre une – césarienne et chirurgie carcinologique en un supérieures à 90 % [1]. En cas de doute persistant,
maturité fœtale dépend de plusieurs paramètres : temps ; une biopsie chirurgicale peut être pratiquée, qui est à
l’âge gestationnel au diagnostic, le stade de la – césarienne avec bilan d’extension comportant l’origine de plus de complications hémorragiques et
maladie, la parité de la patiente et son désir, après un curage ganglionnaire et éventuelle transposition infectieuses qu’en dehors de la grossesse.
une information, des différents risques pour elle et ovarienne.
son fœtus. ‚ Bilan préthérapeutique
Le traitement chirurgical classique, colpohysté- ‚ Conduite à tenir dans les cancers du col Le bilan d’extension peut se limiter aux patientes
rectomie élargie avec lymphadénectomie pelvienne (tableau II) présentant des points d’appel de maladie
et lomboaortique, est possible sur utérus gravide métastatique. La radiographie pulmonaire peut être
sans augmenter la morbidité du geste [11]. – Avant 20 SA : interruption médicale de
faite avec un tablier de plomb, la scintigraphie
La radiothérapie n’est pas envisageable en cas grossesse conseillée. osseuse au technétium 99m est déconseillée,
de désir de poursuite de grossesse car l’irradiation – Après 20 SA : principalement au premier trimestre [12].
pelvienne pour stériliser la tumeur est incompatible – stades Ia et Ib : traitement différé ; Les marqueurs sériques ACE et Ca 15-3 n’ont pas
avec une survie fœtale [11]. Elle peut trouver sa place – au-delà du stade Ib : interruption médicale de d’intérêt pendant la grossesse car ils sont
comme traitement adjuvant après la chirurgie, ou grossesse conseillée. physiologiquement augmentés.

2
Cancer et grossesse - 3-1405

‚ Prise en charge thérapeutique


Tableau III. – Conduite à tenir dans les cancers du sein.
Le plus souvent, la prise en charge est débutée
Tumeur accessible à une chirurgie conservatrice Tumeur non opérable
pendant la grossesse, permettant une poursuite de
celle-ci. L’interruption de grossesse n’améliore pas le Avant 20 SA Après 20 SA Avant 20 SA Après 20 SA
pronostic de la maladie. Elle permet cependant de Interruption médicale Traitement conservateur Interruption médicale Chimiothérapie
faciliter la prise en charge thérapeutique. de grossesse + de grossesse conseillée néoadjuvante
L’irradiation mammaire est le plus souvent + radiothérapie ±
traitement conservateur chimiothérapie
contre-indiquée pendant la grossesse, car elle
et radiothérapie en post-partum
expose le fœtus à une irradiation supérieure à ou
0,1 Gy, ce qui peut entraîner des effets traitement radical
secondaires [7]. Elle a sa place en post-partum pour
SA : semaines d’aménorrhée.
limiter les récidives locales en cas de traitement


conservateur ou de stade avancé. La proportion de cancers parmi les masses
La chimiothérapie peut être administrée pendant Mélanomes malins ovariennes découvertes pendant la grossesse est
la grossesse, mais elle expose à des complications donc plus faible que dans la population générale, ce
fœtales dont le couple doit être prévenu. S’il y a une qui s’explique par le jeune âge des patientes.
‚ Prévalence
indication pendant la grossesse, la chimiothérapie L’histologie des tumeurs est particulière pendant
La prévalence est de 2,8/1 000 naissances [13]. la grossesse, avec moins de tumeurs épithéliales
est débutée après le premier trimestre. Le protocole
C’est la tumeur métastasant le plus volontiers au (37,5 %) et plus de tumeurs de la lignée germinale
le plus employé repose sur l’association
placenta et au fœtus. Quand il existe une atteinte (45 %), avec prédominance des dysgerminomes [2].
doxorubicine + cyclophosphamide, plus ou moins
placentaire, le risque d’atteinte fœtale est de 40 à
5-fluorouracil [3]. Le stade tumoral est le plus souvent limité à une
50 % [13]. L’influence de la grossesse sur l’histoire
La chirurgie peut être réalisée à tout terme de la atteinte ovarienne unilatérale.
naturelle du mélanome reste controversée. Il semble
grossesse. Elle nécessite une hémostase soigneuse que les mélanomes découverts pendant la grossesse
du fait de l’hypervascularisation mammaire. Le ‚ Diagnostic
aient des critères de mauvais pronostic (localisation
traitement peut être conservateur ou radical dans les au tronc, au cou ou au visage, et envahissement La conduite à tenir devant une masse d’origine
stades I et II, le pronostic n’étant pas modifié si la ganglionnaire) et, de ce fait, un taux de récidive plus ovarienne présente des particularités du fait de la
radiothérapie complémentaire en cas de traitement élevé et une survie diminuée. Un rôle propre de la grossesse. En effet, au cours du premier trimestre, il
conservateur n’est pas trop retardée (fin des grossesse sur le pronostic n’a pas été démontré. est exceptionnel d’opérer ces patientes du fait du
deuxième et troisième trimestres) [12]. Un délai de risque important d’avortement (dépendance
7 semaines ou plus est associé à une augmentation ‚ Diagnostic hormonale de la grossesse liée à la présence du
des récidives locales, sans affecter la survie pour L’exérèse ou la biopsie d’une lésion suspecte ne kyste du corps jaune). La seule indication reste la
autant [12]. doit pas être différée du fait de la grossesse. torsion ovarienne.
L’hormonothérapie n’a pas été évaluée pendant Par la suite, la symptomatologie clinique, les
‚ Bilan d’extension
la grossesse, mais elle est tératogène et, de plus, données échographiques (évolution, critères de
80 % des cancers du sein associés à la grossesse La radiographie pulmonaire avec un tablier de malignité, taille) vont conditionner la prise en charge.
n’ont pas de récepteurs hormonaux [1]. plomb et l’échographie hépatique peuvent être Il est recommandé d’opérer les tumeurs de plus de
pratiquées pendant la grossesse. 6 cm, solides ou mixtes, d’autant plus qu’il existe des
Au cours du premier trimestre, en cas de désir de
poursuite de la grossesse et de tumeur opérable critères de malignité. Cette attitude est
‚ Traitement
d’emblée, le traitement chirurgical est radical car la recommandée principalement du fait du risque de
Il repose sur la chirurgie, qui peut être au mieux complications aiguës (torsions d’annexes,
radiothérapie serait trop retardée. Une
réalisée sous anesthésie locale, pour exérèse large. hémorragies intrakystiques) nécessitant une
chimiothérapie peut ensuite être débutée.
L’injection de colorant bleu pour repérer le ganglion chirurgie d’urgence associée à une augmentation de
Après le premier trimestre, le traitement sentinelle est autorisée pendant la grossesse. Si la la morbidité maternofœtale, mais aussi en raison de
chirurgical peut être conservateur, suivi d’une tumeur nécessite un traitement adjuvant par la crainte d’un cancer ovarien. Le terme idéal pour la
chimiothérapie en attendant la radiothérapie interféron alpha, il doit débuter en post-partum, ou chirurgie se situe entre 15 et 18 SA. Du fait de la
débutée en post-partum. après interruption médicale de grossesse, car il est rareté des cancers de l’ovaire, une kystectomie
L’allaitement n’est pas contre-indiqué, sauf en cas incompatible avec une survie fœtale. première par cœlioscopie est préconisée (sauf en cas
de chimiothérapie. La découverte d’un mélanome avec métastases de signes évidents de malignité) [2].
en début de grossesse fait bien sûr poser la question Le diagnostic définitif est anatomopathologique,
‚ Conduite à tenir dans les cancers du sein de l’interruption médicale de grossesse, bien que dans certains cas par un examen extemporané.
(tableau III) celle-ci n’améliore pas le pronostic catastrophique de
ces patientes.
‚ Bilan d’extension
Grossesse après cancer du sein [6]


Les marqueurs sériques alpha-fœto-protéine, CA
La chimiothérapie adjuvante provoque 125 ou CA 19-9, sont modifiés par la grossesse et ne
Cancer de l’ovaire
fréquemment une ménopause précoce due en sont pas utiles dans ce cas [2].
particulier à l’utilisation du cyclophosphamide. L’IRM remplace le scanner abdominopelvien
Si une grossesse est cependant envisageable, il ‚ Prévalence pendant la grossesse.
est conseillé d’attendre 2 ans (période durant Durant le premier trimestre, la découverte L’exploration chirurgicale (cytologie péritonéale,
laquelle on retrouve le plus de récidives), bien échographique d’une masse annexielle est estimée biopsies péritonéales multiples) reste le temps le plus
qu’aucune étude n’ait prouvé une augmentation du à 1/200 [2]. important du bilan d’extension. Il est réalisé
risque de récidive ou de métastases, même en cas L’incidence d’une masse ovarienne pendant toute d’emblée si la masse retirée est suspecte, ou
d’envahissement ganglionnaire. Une interruption de la grossesse est de 1/1 000, avec 2-5 % de secondairement (intérêt de la césarienne) en cas de
grossesse n’apporte aucun bénéfice. malignité [2]. découverte de malignité anatomopathologique.

3
3-1405 - Cancer et grossesse

‚ Prise en charge thérapeutique ‚ Prise en charge thérapeutique Au premier trimestre de la grossesse, la patiente
doit être informée des risques tératogènes de la
Le traitement est adapté au stade de la maladie, Les formes histologiques rencontrées pendant la
radiothérapie et des risques personnels liés à une
au type de tumeur et tient compte du terme de la grossesse étant de bon pronostic, un délai
sous-estimation de sa maladie. Une interruption
grossesse après information du couple. thérapeutique est parfaitement envisageable.
médicale de grossesse est habituellement la règle. Si
La poursuite de la grossesse est discutée au cas Pour la plupart des auteurs, avant 20 SA, un
celle-ci est refusée, après consentement éclairé, on
par cas, en sachant que la grossesse n’influence pas traitement chirurgical immédiat est préconisé. Passé
tente de retarder le traitement au deuxième
le pronostic de la maladie et qu’un traitement ce terme, le traitement est débuté en post-partum,
trimestre.
chirurgical conservateur est suffisant en cas de stade sans conséquences sur le pronostic [8].
Pendant les 2 derniers trimestres, la radiothérapie
IA. Pour les formes localisées, le traitement initial est Le traitement par iode radioactif ( 131 I) est
peut être débutée sans entraîner d’effets secondaires
chirurgical, avec annexectomie et stagging contre-indiqué pendant la grossesse pour les mêmes
fœtaux si toutes les précautions sont prises : tablier
chirurgical, ce qui est parfois suffisant (stade IA). raisons que la scintigraphie.
de protection abdominopelvien, réduction maximale
Les polychimiothérapies ont été utilisées, pendant
du champ d’irradiation avec fin de la radiothérapie
la grossesse, pour des stades plus avancés ou en Grossesse après traitement par iode
radioactif [8] en post-partum si la dose fœtale maximale est
complément de la chirurgie, sans que les effets
atteinte [9].
secondaires fœtaux soient fréquents si on évite le Le traitement par 131I provoque un dysfonction-
En cas de découverte de la maladie en fin de
premier trimestre (cisplatine, vinblastine, vincristine nement ovarien temporaire et réversible.
troisième trimestre, l’irradiation est réalisée en
et cyclophosphamide) [2]. Il n’existe pas de risque particulier concernant la
post-partum, car la position fœtale haute majore les
Les recommandations de traitement sont grossesse après un traitement par 131I, un délai
doses d’irradiation fœtale.
superposables à celles d’un cancer du col associé à la empirique de 1 an étant habituellement
grossesse. recommandé, le temps d’éliminer le produit. Stades supérieurs à II
Ils nécessitent une polychimiothérapie.

■ ■
Un terme inférieur à 24 SA nécessite le plus
Cancer de la thyroïde Lymphomes souvent une interruption médicale de grossesse
pour permettre un traitement correct.
Après 24 SA, on peut proposer une poursuite de
‚ Prévalence ‚ Prévalence la grossesse avec monochimiothérapie par
Elle est non chiffrée. La fréquence des nodules La prévalence est de 1/5 000 naissances pour la vinblastine, relayée par une polychimiothérapie
thyroïdiens est augmentée pendant la grossesse. De maladie de Hodgkin. Celle-ci est inconnue pour les après l’extraction fœtale.
même, la prévalence de cancer parmi les nodules LMNH (lymphomes malins non hodgkiniens), car ils
solitaires de la thyroïde est plus grande, représentant affectent rarement la tranche d’âge des femmes en Atteinte sous-diaphragmatique
40 % en cours de grossesse contre 15 % dans la âge de procréer et il n’existe qu’une centaine de cas La radiothérapie avec poursuite de la grossesse
population générale. L’hypothèse serait que via rapportés [9]. n’est pas envisageable car une irradiation pelvienne
l’augmentation du taux d’œstrogènes et de β-HCG La grossesse en soi n’aggrave pas le pronostic de est nécessaire. La conduite à tenir est superposable
(human chorionic gonadotrophin), il existe une ces hémopathies. Il existe des cas rapportés de aux stades supérieurs à II.
augmentation de la thyroxin binding globulin métastases placentaires pour ces deux hémopathies, La césarienne est recommandée par certains
entraînant une stimulation de la glande thyroïde [8]. avec atteinte fœtale pour les LMNH. auteurs, permettant un stagging de la maladie
Du fait de l’âge des patientes, les types sous-diaphragmatique, avec splénectomie et
histologiques largement prédominants sont les ‚ Diagnostic transposition ovarienne si besoin [9].
cancers papillaires ou vésiculaires, qui sont des Sans particularité pendant la grossesse. À la naissance, un typage HLA (human leukocyte
tumeurs bien différenciées de bon pronostic. antigen) de l’enfant est pratiqué au sang du cordon,
La grossesse n’aggrave pas le pronostic d’un ‚ Bilan d’extension en vue d’une éventuelle greffe de moelle.
cancer thyroïdien. Ces pathologies nécessitent un bilan d’extension
précis conditionnant la prise en charge Grossesse après traitement pour maladie
‚ Méthodes diagnostiques de Hodgkin
thérapeutique, mais la grossesse ne permet pas un
Les dosages hormonaux ou les tests dynamiques bilan optimal. Le scanner abdominopelvien peut être La grossesse n’est pas contre-indiquée dans cette
ont peu d’intérêt [8], en dehors du dosage de la supplanté par une IRM qui est moins bien évaluée. situation, mais il peut exister une ménopause
calcitonine si un cancer médullaire est suspecté, ce Ce bilan peut être complété en post-partum ou précoce en cas de radiothérapie en « Y » inversé sans
qui est exceptionnel. après décision d’interruption médicale de grossesse. transposition ovarienne, ou en cas de polychimio-
La scintigraphie à l’iode marquée est thérapie, surtout avec le protocole MOPP, auquel on
contre-indiquée du fait de la fixation du produit par ‚ Prise en charge thérapeutique de la préfère le protocole ABVD chez les femmes en âge
la thyroïde fœtale. maladie de Hodgkin (tableau IV) de procréer.
L’échographie ne pose pas de problème pendant La patiente doit également être informée des
Stades I et II sus-diaphragmatiques risques de récidive (maximaux dans les 2 ans) et de
la grossesse. Elle peut guider une ponction à
l’aiguille. Pour certains auteurs, l’examen Le traitement repose sur une radiothérapie. cancers secondaires.
anatomopathologique peut être différé au
post-partum en cas de découverte du nodule après Tableau IV. – Conduite à tenir dans une maladie de Hodgkin.
20 SA, sauf en cas de suspicion clinique de
malignité [8]. Atteinte sous-diaphragmatique
Stades I et II sus-diaphragmatiques
Stades > II
‚ Bilan d’extension
Deuxième et troisième Premier et deuxième
Les formes histologiques dominantes dans ce Premier trimestre Troisième trimestre
trimestres trimestres
contexte étant exceptionnellement associées à une
Interruption de gros-
dissémination locorégionale ou générale, aucun Interruption de grossesse Radiothérapie Vinblastine
sesse
bilan d’extension n’est systématique.

4
Cancer et grossesse - 3-1405

n’est pas modifié par la grossesse ; on observe


Tableau V. – Conduite à tenir dans les leucémies et les lymphomes malins non hodgkiniens. même une augmentation du taux de rémission sans
Première moitié de la grossesse Deuxième moitié de la grossesse que la survie soit modifiée, probablement du fait du
jeune âge des patientes [9].
Interruption de grossesse conseillée+++ Informations sur les risques maternofœtaux
Début de polychimiothérapie ‚ Diagnostic et bilan d’extension
Corticoïdes et extraction après 32-33 SA
Sans particularité pendant la grossesse.
SA : semaines d’aménorrhée.
‚ Prise en charge thérapeutique (tableau V)
‚ Prise en charge thérapeutique des pie [9], sans que les effets secondaires fœtaux Le traitement repose sur une polychimiothérapie
lymphomes malins non hodgkiniens immédiats soient majeurs. qui est trop fréquemment associée à des
(tableau V) À la naissance, un typage HLA de l’enfant est complications fœtales en cas d’utilisation au premier
pratiqué au sang du cordon, en vue d’une éventuelle trimestre (25 % de mortalité). Au cours des 2 derniers
Le traitement de ces lymphomes est toujours plus greffe de moelle. trimestres, les complications sont moins fréquentes,
agressif que celui de la maladie de Hodgkin, et estimées à 10 % de mortalité.


repose essentiellement sur des polychimiothérapies. À partir du milieu du deuxième trimestre, le
Vu la rareté de cette pathologie, le traitement n’est Leucémies traitement peut être débuté avec accélération de la
pas univoque. Du fait de l’utilisation nécessaire de maturation pulmonaire et extraction prématurée
polychimiothérapies agressives rapidement, certains pour permettre une prise en charge plus agressive
auteurs proposent une interruption médicale de ‚ Prévalence après information des risques au couple.
grossesse quel que soit le terme [7] . D’autres Elle est de 1/75 000 grossesses [9]. À la naissance, un typage HLA de l’enfant est
autorisent une poursuite de la grossesse à partir de Il existe des cas rapportés de métastases pratiqué au sang du cordon, en vue d’une éventuelle
24 SA environ, en débutant une polychimiothéra- placentaires et fœtales. Le pronostic de la maladie greffe de moelle.

Vanina Castaigne : Interne.


Marie-Victoire Senat : Chef de clinique-assistant.
Hervé Fernandez : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Service de gynécologie-obstétrique, hôpital Antoine Béclère, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92140 Clamart, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : V Castaigne, MV Senat et H Fernandez. Cancer et grossesse.
Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1405, 2000, 5 p

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Clin North Am 1998 ; 25 : 301-321

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3-1330

3-1330
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Difficulté sexuelle chez la femme

I Borten-Krivine

M algré la libération sexuelle, parler du sexe reste difficile, aussi bien pour la patiente que pour le médecin.
Pour ce dernier, la connaissance des conduites à tenir devant une difficulté sexuelle est essentielle.
© Elsevier, Paris.


Nous choisirons une classification clinique : le ‚ Dyspareunie superficielle
Introduction sexe qui fait mal, le sexe impénétrable, le sexe
Quand elle est primaire, il faut éliminer de rares
insensible.
lésions organiques, telles que des malformations
Nous parlerons de difficultés sexuelles plutôt que mineures de l’hymen dans sa forme, sa consistance
de dysfonctions sexuelles. Ce terme laisserait planer ou l’existence de cloisons.


l’idée d’une fonction sexuelle idéale ou normale, Quand elle est secondaire, peuvent être en
alors que la sexualité ne peut être ressentie comme Sexe qui fait mal (dyspareunie) cause :
parfaite en permanence. – des séquelles obstétricales, suites de déchirure
Malgré la « libération sexuelle », parler du sexe périnéale ou d’épisiotomie ;
n’est pas simple, que l’on soit plaignant ou soignant. On groupe sous ce nom toutes les douleurs au – des troubles trophiques et une sécheresse, en
La patiente peut ressentir le médecin comme trop cours ou au décours du rapport sexuel. On les rapport avec la ménopause.
proche ou trop distant. Sa demande sera alors distingue en dyspareunie orificielle ou profonde Qu’elle soit primaire ou secondaire, peuvent être
masquée derrière une plainte somatique ou sur les (fig 1). On les appelle primaires si elles ont toujours en cause :
conséquences d’un événement de vie. Quant au existé, ou secondaires. – des vulvovaginites infectieuses ou à Candida ;
médecin, la plainte sexuelle le déplace de sa position
médicale habituelle. Il est interpellé dans son identité
d’homme ou de femme. Ceci peut entraîner des
Déclenchant ?
contre-réactions médicales à la sexualité, que l’on
Le facteur
peut schématiser en psychiatrisation, banalisation et Dyspareunie organique Concomitant ?
technicisation [1]. L’expérience permet cependant de est-il
décoder certaines plaintes. Amplificateur ?
Identifier le symptôme, reconnaître s’il est
primaire ou secondaire, en repérer autant que faire Superficielle Profonde
se peut l’équation somatique/psychique, est une
première étape. L’examen gynécologique est Psychosomatique
indispensable, même (et surtout) depuis qu’il est
entré dans les mentalités que les difficultés sexuelles
Organique Organique
ne sont pas le plus souvent d’origine physique. Il faut (50 %) (80 %)
apprécier la place que le symptôme occupe dans la
Vulvodynie sans
subjectivité et la vie relationnelle de la patiente.
substratum anatomique
Telles sont les conditions préalables permettant de
décider quel est le praticien le plus adapté à
Malformation Endométriose
répondre à la situation, à la demande. C’est un
© Elsevier, Paris

Postcicatricielle Postinfection
travail complexe. Au-delà de l’intérêt, du bon sens, Trophicité vaginale Annexielle
cela nécessite une formation à la relation Infectieuse
médecin-malade telle que peut en donner, par
1 Dyspareunie.
exemple, le travail dans un groupe Balint.

1
3-1330 - Difficulté sexuelle chez la femme

– des dermatoses, essentiellement le lichen de la patiente. C’est ainsi que peut se nouer une tolère le symptôme, plus le pronostic s’assombrit, or,
scléroatrophique vulvaire, qui peut exister chez des relation thérapeutique qui permettra à la souffrance tous les auteurs travaillant sur le vaginisme notent le
femmes jeunes ; psychique d’apparaître en amont de la douleur talent qu’ont ces femmes pour trouver des
– des sensations douloureuses permanentes physique. C’est là l’approche psychosomatique en partenaires sur mesure, gentils, compréhensifs,
sans substratum anatomique, les vulvodynies [3]. gynécologie dont l’enseignement commence à être ayant des problèmes avec leur virilité, que la phobie
pratiqué. Dans d’autres cas, des sexothérapies avec de leur femme masque. Cliniquement, on peut
‚ Dyspareunie profonde une prise en charge du couple inspirées de Masters distinguer : les vaginismes simples où, malgré la
Qu’elle soit primaire ou secondaire, on peut et Johnson peuvent être conseillées. Là aussi, il existe peur, il existe un désir d’être pénétrée ; les
trouver une rétroversion utérine fixée, une maintenant un enseignement universitaire. vaginismes accompagnés (telle la migraine) de
endométriose, des séquelles d’infections tubaires, troubles névrotiques chez la femme ou chez


des kystes ovariens. l’homme, souvent appariés. On peut alors se trouver
Lorsqu’elles sont secondaires, il peut s’agir d’un Sexe impénétrable devant des phobies de pénétration croisées, où le
syndrome de Masters et Allen, des suites couple se satisfait de caresses et de masturbations et
d’hystérectomie. Si la dyspareunie est la douleur liée au coït, le ne consulte que lorsqu’il veut un enfant, qu’il vient
Une fois le bilan établi à l’aide de l’imagerie et vaginisme est l’impossibilité d’avoir des rapports alors demander à une médecine offrant aujourd’hui
surtout de la cœlioscopie, parfois complétées par avec pénétration vaginale [5] (fig 2). Ce symptôme, une possibilité d’immaculée conception par les
une consultation de dermatologie dans les qui n’est pas rare (0,5 %), est la résultante de la assistances médicales à la procréation (AMP).
dyspareunies superficielles, il arrive que le traitement contracture des muscles périvaginaux et releveurs. Certains auteurs parlent de 5 % de vaginismes ou de
d’une endométriose, d’une infection et de ses L’occlusion peut être si parfaite qu’il arrivait autrefois femmes non déflorées dans les consultations
séquelles ou qu’un traitement œstrogénique local ou qu’on endorme une femme pour vérifier qu’elle d’infertilité.
général règle le problème. Mais c’est bien souvent là avait bien un vagin. Ce symptôme est presque Dans la prise en charge du vaginisme, il faut
que les difficultés commencent. toujours primaire. Il atteint des femmes de structure savoir que l’incision de l’hymen ne résout rien.
hystérophobique qui ont peur de tout, et par-dessus L’obstacle créé par les muscles releveurs contractés
tout, une peur panique d’éclater, de mourir par est au-dessus de l’hymen, et surtout, l’obstacle est
En effet, la dyspareunie est un pénétration. Cet état :
symptôme sexuel qui s’accompagne dans l’idée que la femme se fait ou ne se fait pas de
– est fréquemment en cause dans la non- son vagin. Plusieurs approches sont proposées pour
d’un problème organique dans 50 % consommation du mariage ;
la prise en charge de cette expression physique d’un
des cas des dyspareunies superficielles – s’accompagne de désir et de sensibilité aux
problème psychique. À un pôle, une prise en charge
et dans 80 % des dyspareunies caresses, à condition que celles-ci s’arrêtent à une
du symptôme par une sexothérapie comportemen-
profondes. Ce problème est-il ligne de démarcation soigneusement établie par
taliste, à l’autre, une psychothérapie ou une
déclenchant, concomitant, et quels chacune ;
relaxation d’inspiration analytique.
sont ses amplificateurs ? – s’appuie sur un trouble de l’image du corps,
comme en témoignent les dessins que font ces La meilleure réponse semble être dans une
femmes de leurs organes génitaux externes et approche mixte, psychocorporelle. Celle-ci consiste
Le médecin sera attentif à : à « faire petit à petit toucher du doigt la réalité
internes.
– ne pas imputer aux lésions somatiques vaginale par la femme, dans une relation
L’étiologie n’est pas univoque : classiquement,
l’entièreté de la douleur des rapports sexuels, ce qui psychothérapique médecin-patiente autoritaire et
était mise en cause une éducation répressive ; on
le pousserait à un agir chirurgical sans aucun
voit aujourd’hui ce symptôme surgir dans un sécurisante à la fois » [5]. Cette approche entraîne un
résultat. On sait qu’au cours de cœlioscopies, il est
contexte permissif et on peut retrouver des fort taux de guérison des vaginismes simples. Il est
habituel de trouver des endométrioses importantes,
traumatismes de l’enfance, des conflits œdipiens, important d’associer le mari, en le faisant participer
ne s’accompagnant nullement de douleurs au cours
des troubles de l’identité féminine. au traitement. Cela permet de prendre la mesure
des rapports. Il y a des cas où une ancienne histoire
Le pronostic dépend de l’âge du symptôme : plus d’un éventuel problème chez lui qui peut apparaître
somatique est suivie d’une utilisation psychique
il est ancien, plus il est péjoratif ; du mari : plus il quand sa femme est guérie de son symptôme.
secondaire ;
– prendre la mesure de la part réactionnelle du
symptôme. Une dyspareunie apparaissant après une
hystérectomie peut exprimer la blessure de la Difficultés sexuelles
femme dans son intégrité narcissique ;
– faire face au fait qu’une douleur liée aux
relations sexuelles est une douleur relationnelle et
qu’il est nécessaire d’aborder la relation du couple et Sexe
de faire émerger les éventuels conflits. La douleur Sexe qui fait mal impénétrable Sexe insensible
peut exprimer une hostilité envers le partenaire, ou (dyspareunie) (vaginisme)
elle peut être une réaction à un problème sexuel de
celui-ci, telle une éjaculation prématurée [2]. En tout
état de cause, pour beaucoup de femmes, il peut être Superficielle Profonde Trouble de Trouble de la
l'image du sexualité du
plus facile de souffrir, de formuler leur plainte, que de
corps couple
porter plainte contre les blessures de la vie ou le
compagnon de vie. Il faut compter avec les cas où il
existe une érotisation de la douleur qui la rend
Organique Organique Approche Prise en charge
« essentielle » [4]. (50 %) (80 %) psychocorporelle individuelle
La prise en charge de la dyspareunie ne peut se ou du couple
faire que par des consultations répétées, jamais dans
l’urgence. Il est bon d’utiliser les données du bilan et Prise en charge globale
de prescrire des antalgiques, des antispasmodiques,
2 Diffıcultés sexuelles.
des progestatifs, tout en tolérant la plainte répétée

2
Difficulté sexuelle chez la femme - 3-1330

La guérison des vaginismes accompagnés de l’enfance, des interdits, une histoire familiale l’être le choix d’un partenaire destiné à éviter toute
phobies de pénétration est beaucoup plus pathogène. En prenant soin de ne pas être intrusif possibilité de satisfaction érotique. Le conflit avec le
problématique. Il est important d’identifier ces par des questions systématiques, on retrouve des partenaire est en rapport avec des conflits
phobies et autres psychopathologies avant abus sexuels, parfois incestueux. La distinction entre intrapsychiques anciens. Dans d’autres cas, les
d’envisager de répondre à certaines demandes troubles primaires et secondaires peut être floue. Un facteurs psychologiques sont moins évidents et les
d’enfant. Cela permet parfois une prise en charge de trouble ressenti et présenté par la femme comme causes plus inconscientes.
ces couples pathologiques, importante pour l’avenir secondaire à un événement de vie peut avoir existé La prise en charge de ces troubles, qui sont
de l’enfant, sans que toutefois le médecin ne s’érige antérieurement, l’événement étant venu l’aggraver souvent multifactoriels, peut se faire par des
en juge. ou le rendre conscient. approches différentes : celles qui restent au niveau
Il n’en reste pas moins qu’il y a des baisses de du symptôme en disséquant l’axe personnel,
conjugal, environnemental, ou celles qui essayent de


désir authentiquement réactionnelles. C’est habituel
Sexe insensible dans les dépressions. Certaines situations peuvent faire retrouver à la patiente le pourquoi de ses
induire des baisses ou absences de désir : le inhibitions en remontant aux conflits de l’enfance.
L’indication devrait être adaptée en fonction de
post-partum, période toujours délicate de
On ne peut qu’être satisfait du dépérissement du chaque cas, de la demande de la femme, du regard
remaniements psychiques, la ménopause, période
terme de frigidité dont la vision globalisante a pu qu’elle porte sur son trouble, du contexte du couple.
d’adieu à la fertilité et à l’idée de jeunesse que cela
exprimer pendant longtemps une certaine façon L’attitude du médecin est conditionnée par sa
signifie. La médicalisation de l’infertilité, avec la
d’être de la féminité. Puis ce mot a signifié absence personnalité profonde, ses réseaux professionnels.
médicalisation de la sexualité qu’elle amène, peut
d’orgasme lors de la pénétration vaginale. Dans la Certains gynécologues sont formés à l’approche
plus ou moins transitoirement avoir raison de
plainte de l’insatisfaction, on distingue aujourd’hui : psychosomatique des troubles sexuels dans une
l’érotisme. Enfin, une intervention comme
– l’absence de désir et de plaisir ou anaphrodisie ; perspective psychodynamique. La majorité des
l’hystérectomie peut être en cause.
– l’absence de plaisir ou anorgasmie. sexologues proposent des sexothérapies
On découvre parfois qu’une femme se plaignant La relation avec le partenaire est en cause dans individuelles ou de couple, librement inspirées de
d’insatisfaction a un orgasme clitoridien déprécié par de nombreux troubles du désir et du plaisir. Masters et Johnson. Il faut pour cela que le couple
elle et par son partenaire. Dans d’autres cas, on S’agissant de troubles réactionnels, il ne faut pas soit prêt à consulter ensemble et il peut être difficile
découvre qu’il y a un certain plaisir mais pas sous-estimer la fréquence du retentissement des de gérer les relations à trois. Une psychothérapie
d’orgasme. L’existence d’un désir sans satisfaction troubles sexuels du partenaire sur le désir et le plaisir d’orientation analytique devrait être proposée
est moins bien tolérée que les situations où, malgré féminin, en particulier la brièveté des rapports quand les conflits intrapsychiques se révèlent
l’absence de désir au départ, le rapport amène une sexuels qui entraîne frustration et désintérêt pour la prépondérants. Quelle que soit la démarche
satisfaction. Il est important de repérer si les troubles sexualité. C’est la femme qui consulte alors que le conseillée par le médecin, il est important que la
sexuels apparaissent isolés ou si la femme a d’autres problème est celui de l’homme, du couple [2]. patiente sente que son symptôme sexuel est
difficultés dans ses relations affectives. Il existe Dans les troubles d’allure primaire, il peut exister entendu comme exprimant une souffrance qu’elle
toujours des facteurs psychologiques remontant à des signes névrotiques repérables, comme peut pourra petit à petit aborder.

Irène Borten-Krivine : Gynécologue, attachée de consultation,


unité d’andrologie-sexologie, service du professeur Debré, hôpital Cochin, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : I Borten-Krivine. Diffıculté sexuelle chez la femme.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1330, 1998, 3 p

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[2] Mimoun S. Les dysfonctions sexuelles. In : Papiernik E, Belaisch-Allart J,
Rozenbaum H eds. Traité de Gynécologie. Paris : Masson, 1990

[3] Moyal-Barraco M, Consoli S. Brûlures vulvaires sans support organique.


Contracept Fertil Sex 1986 ; 14 : 941-947

3
3-1200

3-1200
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Douleur du sein

RM Dautry

L a douleur mammaire est fréquente et sans danger. Elle nécessite cependant un examen clinique diagnostique
et parfois des examens complémentaires pour rassurer la consultante, traiter selon l’étiologie et éliminer un
cancer qui très rarement peut lui être associé.
© 1999 , Elsevier, Paris.


Cette inspection évalue le volume des seins, leur
Introduction Pratiquement, pour le clinicien, face à place sur le thorax et la forme de celui-ci, la position
ces douleurs, deux risques existent : du cou et des épaules. Elle repère une asymétrie, une
trop médicaliser, le plus fréquent, ou anomalie des aréoles et des mamelons, des glandes
Les douleurs mammaires ou mastodynies passer à côté d’une pathologie apocrines turgescentes (syndrome de Fordyce), un
englobent toutes les douleurs sur le territoire du sein. sein surnuméraire axillaire par exemple. Elle
mammaire.
Elles sont un motif fréquent de consultation, aussi recherche une explication à la douleur : hématome,
bien en médecine générale que dans d’autres lieux lésion cutanée, cordon veineux induré [3], zone
plus spécialisés (gynécologie, sénologie, oncologie).
La glande mammaire subit des variations
hormonales. Sa structure particulière et sa situation
appliquée sur le thorax entre la troisième et la ‚ Interrogatoire

Diagnostic
inflammatoire, limitée ou étendue, vésicules
évoquant un zona. Elle note la présence de veines,
souvent responsables de douleurs dans des seins
volumineux [4].
septième côte, de même que son innervation,
Il faut commencer par un interrogatoire bien fait. Palpation
expliquent la plupart des douleurs dont se plaignent
Celui-ci, toujours bienveillant et respectueux,
les femmes. Au cours de la vie génitale, ces C’est un temps indispensable et complémentaire.
précisera à la fois l’âge, l’anamnèse, les antécédents
variations de volume, de consistance et de La palpation comprend l’examen comparatif des
gynécologiques et mammaires, les allaitements, la
sensibilité, sont habituelles. Le syndrome deux seins en position assise puis couchée,
situation hormonale actuelle, en particulier
prémenstruel, très fréquent, est sans danger. quadrant par quadrant, doucement, les mains
concernant une grossesse éventuelle, les
Dans l’imaginaire féminin, les seins ont une place réchauffées bien à plat, en faisant rouler la glande
médicaments, la contraception, de même que le
particulière. La petite fille, qui en est démunie, attend sur le thorax, à la recherche d’une asymétrie, d’une
contexte psychosocial et professionnel. Une écoute
souvent avec rage la poussée pubertaire. Il n’est anomalie. Il faut garder à l’esprit qu’il s’agit d’une
attentive permettra de repérer une anxiété
donc pas surprenant que la déception soit fréquente, glande nodulaire et hétérogène par définition,
particulière ou un facteur déclenchant. Les modalités
source de douleurs, la femme étant rarement particulièrement chez la femme jeune, et qu’il est
de la douleur, son mode d’apparition, sa répétition,
satisfaite de ses seins qu’elle trouve trop petits ou tout à fait dommageable de rendre malade un « sein
seront précisés, de même que la prise de
trop gros. Cette « éponge hormonale » a une double normal » ! On termine par les aires ganglionnaires
médicaments. Un cancer du sein traité antérieu-
fonction sexuelle et maternelle. Même si, dans notre axillaires et sus-claviculaires.
rement requerra une vigilance particulière, de même
société actuelle, les femmes allaitent peu, les seins que des antécédents familiaux de cancer du sein ‚ Synthèse clinique
restent l’organe de la relation, du don et aussi de la dont on précisera les caractères et l’âge de survenue,
confusion. Ainsi a-t-on pu dire que « le sein est plus Devant tout signe douloureux mammaire, il faut
avant ou après 50 ans. On connaît le rôle
souvent dans l’imaginaire que sur la face antérieure aboutir à un diagnostic à la suite de l’interrogatoire
traumatique de tels antécédents, pouvant resurgir
du thorax » [2]. et de l’examen clinique. Sinon, il faut utiliser des
sous forme de douleurs mammaires. C’est la femme
Ces consultations où la femme consulte pour des examens complémentaires.
qui vit sa douleur et la connaît...
douleurs mammaires sont très chargées Dès ce moment, le médecin sait souvent à quel Douleurs extramammaires
symboliquement. De plus, la crainte du cancer, type de douleur il a affaire : cyclique, névralgique, ou
formulée ou non, est toujours présente. Cette atypique. Il a pu évaluer le contexte émotionnel Ce sont les plus fréquentes. En effet, toute
douleur doit donc être prise en compte dans une sous-jacent et peut-être repérer une étiologie. l’innervation sensitive du sein provient du rachis
approche globale, replaçant le symptôme dans son cervicodorsal (C7 à D3) et des nerfs intercostaux du
contexte mais avec rigueur : en effet, il peut arriver ‚ Examen clinique deuxième au cinquième (fig 1). Ces nerfs sont très
exceptionnellement que la douleur soit en rapport Toute douleur implique un examen clinique. souvent irrités ; on retrouve alors facilement la
avec un cancer [5], ou coexiste par hasard sans lien douleur à la pression, très précise, dans l’espace
© Elsevier, Paris

avec lui. La patiente vient alors demander un avis Inspection intercostal concerné.
pour une douleur banale. Elle peut tout ignorer de ce C’est un temps majeur que l’on a volontiers envie Comme il est souvent difficile de convaincre la
cancer ou parfois en avoir une prescience, la de supprimer. Il est conseillé d’être assis devant la consultante angoissée qu’il ne s’agit pas du sein, il
demande de consultation étant alors un appel à femme, elle-même assise, bras levés, puis penchée peut être utile de lui montrer où est la zone
l’aide. en avant. On examinera ensuite le rachis. douloureuse, distincte de la glande. Les anomalies

1
3-1200 - Douleur du sein

vraisemblable (suites de couches, allaitement,


1 Situation du sein sur le traitement par le sulpiride, etc). L’abcès du sein doit
thorax et innervation inter- être un diagnostic d’élimination.
costale. 1. Creux sus-
claviculaire ; 2. sillon del-
Douleurs sans support organique
4
topectoral ; 3. bord
inférieur du grand pecto- Elles sont fréquentes et reflètent bien le rôle
1 ral ; 4. cartilages chondro- hautement symbolique du sein dans l’inconscient
costaux ; 5. troisième féminin et dans l’inconscient collectif (cf la publicité).
côte ; 6. nerfs intercos- La consultation est alors particulièrement difficile et
2 taux ; 7. septième côte. doit éviter à la fois la surenchère médicamenteuse et
les examens complémentaires inutiles, de même
5 que les interventions chirurgicales itératives.
Il s’agit à la fois d’un diagnostic d’élimination et
d’intégration des divers éléments recueillis. Pour
éviter les consultations à répétition d’une patiente
toujours insatisfaite, il faut parfois proposer un avis
6
spécialisé.
3

7 Douleurs intriquées
Enfin, plusieurs types de douleurs peuvent se
combiner de façon variable, à cause de l’innervation
commune du sein et du thorax, parce que toute
douleur chronique peut retentir sur le psychisme, et
que les émotions, comme on le sait, peuvent
modifier les sécrétions hormonales par le biais de
l’axe hypothalamohypophysaire. On peut avoir une
douleur mammaire comme un « battement de
cœur » ou un « serrement de gorge ».
rachidiennes ou les névralgies cervicobrachiales antibiotiques, et refaire une évaluation au bout de Ainsi donc, au terme de la consultation pour
peuvent se projeter sur le sein ou dans le creux 15 jours : il ne faut jamais oublier que le cancer douleur mammaire (en dehors de l’allaitement), on
axillaire. Le syndrome de Tietze, qui correspond à la inflammatoire au début ressemble à un abcès banal. se trouve dans l’une des situations résumées dans
pression douloureuse des cartilages chondrocostaux Il faut y penser, même lorsque l’abcès est très l’arbre décisionnel de la figure 2.
(deuxième, troisième et quatrième) au niveau du
sternum, est aussi une cause fréquente de
consultation. Douleur dans le territoire du sein
Douleurs mammaires
Ces douleurs mammaires proprement dites, liées Douleur mammaire Douleur non mammaire
aux tissus glandulaire, conjonctif et graisseux, sont
associées au cycle, le plus souvent bilatérales à type
de lourdeur, de gêne, surtout dans les quadrants
Cyclique Atypique Conduite à tenir
supéroexternes. Elles sont physiologiques les (Non rythmée selon l'étiologie
quelques jours qui précèdent les règles. Elles peuvent Postménopausique
devenir invalidantes si elles occupent l’essentiel du Associée à d'autres
cycle (mastodynies dites rétrogrades), rendant le symptômes mammaires)
sport et les relations sexuelles impossibles. Souvent
elles commencent au moment de l’ovulation,
nécessitant un changement de soutien-gorge. De
nombreuses hypothèses pathogéniques ont été Seins souples Seins granuleux Nécessite un bilan
diagnostique
évoquées, dont l’insuffisance lutéale, responsable de
l’œdème du tissu palléal [1, 4]. Refaire après les règles
Actuellement, aucun profil hormonal n’est ou après progestatifs
caractéristique des mastodynies et les dosages
hormonaux sont inutiles. Il n’y a certainement pas Avant 40 ans Après 40 ans
une cause univoque. Le volume et la texture des
seins interviennent, et les seins volumineux, lourds, à
Persistance d'une zone ambiguë
la vascularisation veineuse accentuée, sont plutôt
soulagés par les toniques veineux ou les Avant 30 ans Après 30 ans
Rien Mammographie
anti-inflammatoires, alors que les progestatifs de
synthèse sont efficaces la plupart du temps dans les
mastodynies « hormonales » [4]. Échographie Mammographie
Traitement des mastodynies cycliques Cytologie Échographie
En revanche, il faut être vigilant devant une
1 Rien Cytologie
douleur unilatérale : on se méfiera d’une douleur à 2 Progestérone percutanée
type de brûlure mamelonnaire, unilatérale, qui 3 Toniques veineux
nécessite, associée ou non à un écoulement, une 4 Vitamines
mammographie (possibilité de carcinome 5 Progestatifs
intracanalaire). 6 Psychothérapie
En cas d’abcès du sein, il faut utiliser les
2 Arbre décisionnel en cas de douleur dans le territoire du sein.
traitements locaux, les anti-inflammatoires et les

2
Douleur du sein - 3-1200


La thérapeutique est affaire de cas : elle sera
Résultats toujours minimale, souvent inversement Si la palpation reste non fiable, il faut
proportionnelle au temps passé en consultation. s’aider d’examens complémentaires :
‚ Douleurs extramammaires
À 40 ans et plus, il faut demander une ✔ avant 30 ans, l’échographie
mammographie sauf si, normale, elle a moins de mammaire est l’examen de choix s’il
Elles nécessitent une prise en charge adaptée, 1 an. est fait de façon compétente ;
avec en particulier repérage de la cause ou des
facteurs aggravants (enfants petits, positions
✔ après 30 ans, il faut combiner
Examen clinique incertain
vicieuses au travail, etc). mammographie et échographie pour
L’examen est difficile : seins granuleux, écarter toute anomalie.
‚ Douleurs mammaires hétérogènes, sans masse dominante. Il faut d’abord
Examen clinique anormal préciser le contexte hormonal, le moment du cycle


en période d’activité génitale, l’existence ou non
L’examen retrouve d’emblée une anomalie, qui d’un traitement substitutif après la ménopause. Conclusion
coïncide ou non avec la douleur : lésion cutanée,
Il ne faut jamais décider d’examens complémen-
placard, nodule, écoulement unipore, adénopathie,
taires sans avoir fait un examen clinique dans de
abcès...
bonnes conditions : après les règles, après l’arrêt Au total, toute douleur nécessite un diagnostic,
Il faut faire un bilan diagnostique et la douleur
d’un traitement substitutif, après un changement de afin d’éliminer une pathologie associée (impliquant
devient alors secondaire, que la pathologie soit
pilule contraceptive, enfin, après prise de la mise en œuvre d’un traitement particulier). Ces
bénigne ou non.
progestatifs, si besoin pendant un cycle ou deux, douleurs sont pour la plupart non mammaires ou en
Examen clinique normal ceux-ci permettant souvent aux douleurs de rapport avec les modifications hormonales. Il
L’examen est normal, la palpation est normale et régresser tout en rendant l’examen plus facile. convient surtout de rassurer la patiente, d’éviter
fiable : seins souples, parfaitement dépressibles. En Signalons que le temps est le plus souvent un atout toute médicalisation intempestive et parfois de
dessous de 40 ans et en l’absence de tout facteur de majeur qui fait disparaître les douleurs et normalise respecter les symptômes.
risque familial (mère ou sœur ayant eu un cancer du les seins. S’il n’y a pas de lien causal entre douleur et
sein avant 50 ans), il ne faut faire aucun examen En cas d’anomalie, l’attitude dépend de cancer, il faut cependant garder à l’esprit qu’il existe
complémentaire. l’étiologie. des coïncidences [5].

Rose-Marie Dautry : Gynécologue sénologue, attaché consultant des hôpitaux de Paris,


service de gynécologie-obstétrique (Pr Frydman), hôpital Antoine-Béclère, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92141 Clamart cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Dautry RM. Douleur du sein.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1200, 1999, 3 p

Références

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[2] Gros D. Le sein dévoilé. Paris : Stock, 1987 modalités thérapeutiques médicales. J Gynécol Obstét Biol Reprod 1986 ; 15 :
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[3] Mondor H. Tronculite sous-cutanée subaiguë de la paroi thoracique antérola-
térale. Mém Acad Chir 1939 ; 65 : 1271

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3-1170
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Douleur pelvienne de la femme

É Daraï, É Meneux, JL Bénifla, A Batallan, D Tardif, P Madelenat

L a douleur pelvienne est le signe d’appel le plus fréquemment rencontré en pathologie gynécologique. Un
examen clinique soigneux, aidé d’examens complémentaires de routine, permet le plus souvent un diagnostic
étiologique et une prise en charge spécifique.
© 1999 , Elsevier, Paris.


troubles du transit, des brûlures mictionnelles et une L’examen clinique permet un diagnostic
Introduction pollakiurie, soit en faveur d’une étiologie étiologique d’orientation avec une sensibilité
gynécologique tels que les signes sympathiques de estimée à 85 %. Elle diffère sensiblement en fonction
La conduite à tenir devant une douleur pelvienne grossesse, l’existence de saignements d’origine de la pathologie. La valeur prédictive positive de
de la femme pose à la fois un problème de génitale et de leucorrhées. Enfin, il convient de ne l’examen clinique est également bonne puisqu’elle
diagnostic et de thérapeutique. La première étape pas omettre de préciser l’existence de signes est d’environ 80 %. De ce fait, un examen clinique
consiste à rattacher la douleur à une pathologie généraux (syndrome infectieux, anémique). anormal permet d’évoquer l’organicité de la
gynécologique ou extragynécologique. La deuxième pathologie. La mauvaise valeur prédictive négative
étape consiste à différencier le symptôme « douleur ‚ Examen physique de l’examen clinique fait, qu’à l’inverse, sa normalité
aiguë » du symptôme « douleur chronique » qui est ne permet en aucun cas d’être rassurante.
L’examen général recherche d’emblée une
pour ce dernier le plus souvent plurifactoriel. La instabilité hémodynamique (pâleur, tachycardie,
douleur aiguë est une urgence thérapeutique hypotension) qui fait suspecter une hémorragie
imposant une démarche étiologique et dont le
traitement, parfois chirurgical, permet rapidement la
sédation. La douleur chronique impose un bilan
lésionnel complet, la recherche d’une cause
aiguë. L’inspection de l’abdomen permet de noter
l’existence de cicatrices, notamment d’une incision
de McBurney ou ombilicale correspondant à une
cœlioscopie qui peut ne pas être reconnue par la

Diagnostic étiologique

somatique, de facteurs d’entretien associés et si Le diagnostic étiologique des douleurs pelviennes


patiente comme une véritable intervention
possible un traitement étiologique ou à défaut un chez la femme est orienté par les informations
chirurgicale. Une position antalgique (psoïtis) peut
traitement symptomatique de qualité. être retrouvée ou une voussure abdominopelvienne obtenues par l’examen clinique. Nous envisagerons
pouvant évoquer une masse utérine, une formation dans un premier temps les affections extragynécolo-
giques, puis dans un deuxième temps, les


annexielle ou un globe vésical. La palpation douce
Examen clinique intéresse l’ensemble des quadrants abdominaux en pathologies gynécologiques en les différenciant en
terminant par la zone électivement douloureuse. Elle fonction du caractère aigu ou chronique de la
comporte également la palpation des fosses douleur. Enfin, nous proposerons une attitude
‚ Interrogatoire lombaires. Une défense ou une contracture pratique lorsque l’examen clinique est peu
pelvienne est recherchée. Cet examen abdomino- contributif.
Il permet le plus souvent d’orienter le praticien
vers une étiologie et de faire un choix parmi les pelvien est systématiquement complété par
examens complémentaires permettant d’étayer le l’exploration de la vulve et du périnée, à la recherche ‚ Douleurs pelviennes d’étiologies
diagnostic. d’une tuméfaction et/ou d’une malformation. extragynécologiques
Les caractéristiques de la douleur doivent être L’examen sous spéculum permet inconstamment
précisées : la topographie, les irradiations, l’intensité, de rattacher la symptomatologie à la sphère Certains signes cliniques associés à des douleurs
le mode de début ainsi que l’évolution et le caractère génitale. Il permet de préciser l’origine d’un pelviennes permettent d’évoquer de première
cyclique. Ces informations doivent être replacées saignement, l’aspect du col, de la glaire, la présence intention une pathologie extragynécologique. C’est
dans le contexte propre à la patiente. Pour ce faire, il de fils de stérilet, l’existence de leucorrhées, et le cas de l’existence d’une douleur spontanée ou
convient de préciser l’âge, le statut pré- ou d’effectuer si besoin dans le même temps des provoquée de la fosse lombaire ou d’un arrêt des
postménopausique, les caractéristiques des cycles prélèvements à visée bactériologique et cytologique. gaz et/ou des matières. Trois pathologies
menstruels, la date des dernières règles, le type de Le toucher vaginal associé à la palpation extragynécologiques doivent systématiquement être
contraception éventuellement utilisé et les sus-pubienne est déterminant en identifiant la zone évoquées : le syndrome appendiculaire, la colique
antécédents médicaux, chirurgicaux, gynéco- douloureuse, la douleur à la mobilisation utérine et néphrétique et/ou la pyélonéphrite, ainsi qu’une
obstétricaux, infectieux, notamment de salpingite les caractéristiques d’une masse utérine ou gastroentérite (tableau I). Afin de confirmer ces
annexielle (taille, consistance et mobilité). La douleur diagnostics, il est possible de faire appel à des
© Elsevier, Paris

et/ou de maladies sexuellement transmissibles.


Parfois, outre la douleur, peuvent coexister des provoquée reproduit la douleur spontanée. Le examens complémentaires de routine tels qu’une
signes fonctionnels d’accompagnement de grande toucher rectal complète cet examen. Il a une valeur numération formule sanguine à la recherche d’une
valeur, soit en faveur d’une étiologie extragynécolo- diagnostique, notamment chez les patientes vierges, hyperleucocytose, un dosage de la CRP (C reactive
gique tels que des nausées, des vomissements, des et permet d’éliminer une pathologie rectale. protein) et une bandelette urinaire.

1
3-1170 - Douleur pelvienne de la femme

Tableau I. – Principales étiologies des douleurs pelviennes d’origine extragynécologique. Douleur pelvienne

Localisation Signes
Pathologie Signes digestifs
de la douleur d’accompagnement Aiguë Chronique

Appendicite Anorexie FID Défense localisée


Nausée Périombilicale Fièvre Signes Signes gynécologiques +
Vomissement Hyperleucocytose extragynécologiques examens complémentaires

Gastroentérite Nausée Tout l’abdomen Déshydratation


Vomissement Fièvre Orientation Pas d'orientation
Diarrhée étiologique étiologique

Colique néphrétique Aucun ou rare Costovertébrale Pollakiurie


Hématurie Traitement chirurgical Traitement médical

Pyélonéphrite Rare Fosse lombaire Fièvre


Réévaluation clinique,
Brûlures mictionnelles
Microcœlioscopie biologique et échographique
FID : fosse iliaque droite.
Échec Succès Continuer

‚ Douleurs pelviennes d’étiologies l’ensemble du pelvis lorsqu’il s’agit de formes 1 Arbre décisionnel devant une douleur pelvienne.
gynécologiques évoluées (pyosalpinx, pelvipéritonite). Dans ces
formes compliquées, des signes digestifs peuvent hétérotopique, associant à la fois une GEU et une
Douleurs pelviennes aiguës
coexister, notamment à type de diarrhées. Les signes grossesse intra-utérine. En dehors du contexte de
Il est difficile de faire un catalogue des différentes d’accompagnement, dont la fièvre et les leucorrhées, grossesse, l’existence d’une masse annexielle
étiologies gynécologiques pouvant générer des orientent vers une origine infectieuse. Les touchers associée à une douleur fera évoquer en premier lieu
douleurs pelviennes. Toutefois, il convient d’insister pelviens retrouvent une douleur des culs-de-sac, une une torsion d’annexe et en deuxième lieu un kyste
sur les principales étiologies que sont la grossesse mobilité douloureuse de l’utérus et parfois une hémorragique. L’échographie pelvienne trouve dans
extra-utérine (GEU), les infections génitales hautes et masse nettement individualisable uni- ou bilatérale. ces circonstances une place privilégiée dans le
les syndromes abdominaux aigus relevant de Les examens complémentaires nécessaires sont la diagnostic étiologique.
diverses pathologies gynécologiques. CRP et la numération formule sanguine qui, outre
leur valeur diagnostique, permettent d’apprécier Douleurs pelviennes chroniques
¶ Grossesse extra-utérine
Elle doit être systématiquement éliminée chez l’évolution sous traitement. Les prélèvements Elles sont définies comme des douleurs existant
toute femme en âge de procréer. Un faisceau bactériologiques, notamment l’examen au direct, depuis plus de 6 mois. Toutefois, il semble plus
d’arguments permet le diagnostic dont les orientent la thérapeutique. L’échographie pelvienne légitime de parler de douleurs chroniques en
antécédents de maladies sexuellement transmis- peut être normale ou retrouver une image présence d’algies persistant depuis plusieurs
sibles (infection à Chlamydiae), de salpingites, de annexielle hétérogène plurilobée évoquant des semaines et/ou résistant aux antalgiques usuels.
plastie tubaire et d’infertilité. L’interrogatoire trompes dilatées. Le passage de la sonde vaginale Parmi les différentes causes, on individualise les
recherche la notion de retard des règles. La douleur reproduit la douleur. L’épanchement du Douglas est syndromes prémenstruels, les dysménorrhées et
est le plus souvent d’apparition soudaine, mais rare. La sensibilité du diagnostic clinique permet l’endométriose. Par ailleurs, diverses pathologies
d’évolution variable pouvant s’atténuer, voire d’identifier 40 à 65 % des infections génitales hautes gynécologiques peuvent être responsables de
disparaître temporairement. Dans la forme classique, avec une valeur prédictive positive d’environ 60 %. douleurs pelviennes chroniques que nous
les algies pelviennes sont latéralisées, associées à En fonction de l’âge de la patiente, du désir de résumerons dans un paragraphe spécifique (fig 2).
des métrorragies et à une masse annexielle. Le grossesse et du tableau clinique est discuté soit un
traitement antibiotique d’épreuve, soit une ¶ Syndromes prémenstruels
diagnostic de grossesse doit être confirmé, et dans ce
Ils sont une cause fréquente de consultation. En
contexte spécifique il est possible de demander de exploration microcœlioscopique ou cœlioscopique à
effet, plus de 25 % des patientes présentent à des
première intention un dosage quantitatif des hCG visée diagnostique et thérapeutique.
degrés divers des signes évocateurs. Cependant, ces
(human chorionic gonadotrophin). Le diagnostic doit À l’inverse de ce tableau clinique, il convient
syndromes sont considérés importants dans 2 à
être confirmé par une échographie pelvienne qui d’insister sur la fréquence des formes paucisympto-
15 % des cas. Le diagnostic repose sur un cortège de
associe systématiquement un abord sus-pubien et matiques, trompeuses (formes pseudoabortives,
signes qui, outre la douleur pelvienne, associe une
transvaginal. À l’échographie, le plus souvent digestives), voire tronquées par une antibiothérapie
sensation de tension mammaire, une prise de poids,
coexistent une vacuité utérine et une masse préalable. C’est dans ces contextes que peuvent se
une impression de gonflement, des céphalées et des
annexielle en cocarde. Un sac gestationnel justifier une microcœlioscopie et/ou une cœlioscopie
troubles de l’humeur. Plus inconstamment peuvent
extra-utérin est parfois visualisé avec un écho à visée diagnostique.
être notés des signes digestifs, cutanés, voire
embryonnaire présentant rarement une activité
¶ Syndromes pelviens aigus d’autres origines ostéoarticulaires. Le diagnostic est exclusivement
cardiaque. L’épanchement intra-abdominal n’est pas
Ce chapitre recouvre un ensemble de pathologies clinique reposant sur l’interrogatoire, l’examen
systématique. Le diagnostic de GEU peut être évoqué
gynécologiques pouvant être associées ou non à clinique et l’utilisation d’un calendrier d’autoéva-
en échographie pour un dosage de hCG supérieur
une grossesse (fig 1). Dans le contexte de la luation. Les examens complémentaires sont peu
ou égal à 1 000 UI/mL. En effet, pour une valeur
grossesse, il peut s’agir d’une complication liée à son contributifs à l’établissement du diagnostic. Le
égale ou supérieure à ce taux, il est possible par voie
évolution (fausse couche spontanée) ou d’une traitement est basé sur des règles hygiénodiététiques
transvaginale d’affirmer l’existence d’une grossesse
pathologie associée à la grossesse, notamment à la en limitant les causes de stress et en évitant le
intra-utérine. Le diagnostic de GEU impose une prise
rupture d’un corps jaune gravidique qui tabagisme, la consommation d’alcool et de café. Les
en charge urgente dans un service spécialisé.
échographiquement associe une grossesse thérapeutiques médicamenteuses préconisées sont
¶ Infections génitales hautes normalement évolutive, une masse annexielle la progestérone micronisée à la dose de 300 mg/j
Elles représentent la deuxième cause d’algies électivement douloureuse au passage de la sonde, et ou la dydrogestérone (20 mg/j du 12e au 26e jour
pelviennes aiguës. Le début est parfois brutal mais le parfois un épanchement du Douglas. Toutefois, il est du cycle) et le nomégestrol acétate (5 mg/j). Parfois,
plus souvent d’aggravation progressive. La douleur à noter, notamment dans le cadre de l’aide médicale le recours à une contraception à climat progestatif et
est pelvienne, bilatérale, parfois généralisée à à la procréation, la possibilité d’une grossesse à des psychotropes est nécessaire.

2
Douleur pelvienne de la femme - 3-1170

La pathologie veineuse pelvienne est également


Douleur pelvienne chronique 2 Arbre décisionnel de- souvent sous-estimée. Le diagnostic clinique est
vant une douleur pelvienne difficile et les explorations complémentaires peu
chronique.
contributives en dehors de la visualisation de varices
Orientation étiologique
pelviennes à l’échographie. Le traitement repose sur
OUI NON l’utilisation des veinotoniques. Le traitement
chirurgical ne doit être réservé qu’aux échecs de ce
Endométriose Syndrome Pathologie Pathologie Traitement traitement.
prémenstruel infectieuse veineuse symptomatique Les anomalies de la statique pelvienne peuvent
également être source de douleurs chroniques et de
dyspareunie. Le diagnostic est clinique et la prise en
Cœlioscopie Traitement d'épreuve Réévaluation
± traitement charge chirurgicale peut être préconisée après échec
médical de la rééducation.
Échec Succès Échec
Douleurs pelviennes d’étiologie incertaine
Malgré une analyse sémiologique soigneuse, il est
Traitement d'entretien possible que l’examen clinique ne puisse pas donner
suffisamment d’informations pour établir un
diagnostic étiologique, tant pour les douleurs aiguës
¶ Dysménorrhées endométriose et dans ce cas il est licite devant une
que chroniques. Dans ce contexte, les examens
Elles sont définies par la survenue de douleurs forte suspicion clinique de faire appel à une
biologiques doivent permettre dans un délai
contemporaines des menstruations. On distingue la cœlioscopie diagnostique et thérapeutique
minimal une orientation diagnostique. Les
dysménorrhée primaire survenant précocement permettant le traitement des implants péritonéaux principaux examens sont la numération formule
après la ménarche qui est le plus souvent essentielle, et/ou l’exérèse de nodules endométriosiques. Le sanguine, la CRP, le dosage des hCG plasmatiques, la
de la dysménorrhée secondaire qui doit faire traitement médical repose sur l’utilisation bandelette urinaire, ainsi que l’étude bactériologique
rechercher une étiologie organique. La d’analogues de la LH-RH (luteinizing hormone- des sécrétions vaginales. Ce bilan biologique est
dysménorrhée primaire impose, cependant, releasing hormone), mais également sur l’utilisation complété par une exploration échographique. Nous
notamment chez la jeune fille pubère, d’éliminer une du danazol et les progestatifs type promégestone. proposons un arbre décisionnel contribuant à
malformation de la filière génitale dont
l’établissement d’une stratégie diagnostique et
l’imperforation hyménéale qui associe un ¶ Autres causes gynécologiques thérapeutique (fig 3).
hématocolpos. En dehors du contexte malformatif, Les étiologies de douleurs chroniques sont
le traitement de la dysménorrhée primaire repose particulièrement nombreuses. Nous ne ferons que


sur l’utilisation des associations de paracétamol et de rappeler les principales. Parmi celles-ci, il convient de
codéine (Efféralgant codéine, Dafalgant, souligner l’importance des séquelles d’infection
Traitement
Codolipranet) et les anti-inflammatoires non pelvienne, dont le diagnostic est facile quand il
stéroïdiens, voire les œstroprogestatifs. La existe des antécédents de salpingite ou d’infection à La prise en charge de la douleur aiguë d’origine
dysménorrhée secondaire doit être traitée, après Chlamydiae. Le diagnostic peut être évoqué par une gynécologique impose la reconnaissance de
élimination d’une pathologie organique (sténose hystérosalpingographie retrouvant des lésions l’étiologie qui repose sur des critères anamnestiques,
cervicale, adénomyose, synéchies, dispositifs
évocatrices d’adhérences, ainsi que par l’étude cliniques et des examens complémentaires de
intra-utérins) par les anti-inflammatoires non
bactériologique des sécrétions vaginales complétée routine. Les principales étiologies retrouvées sont
stéroïdiens.
par l’analyse des sérologies à Chlamydiae, dont avant tout la GEU, la fausse couche spontanée, la
¶ Endométriose l’appréciation des immunoglobulines A. Parfois le torsion d’annexe, la rupture de kyste et les infections
La dysménorrhée d’origine endométriosique a diagnostic reste plus incertain, imposant une pelviennes aiguës. Une fois le diagnostic établi, le
pour caractéristique d’être secondaire, retardée exploration microcœlioscopique ou cœlioscopique. plus souvent une thérapeutique adaptée est
(deuxième jour des règles) et progressive. Elle est
associée à une dyspareunie profonde, une infertilité,
ainsi que parfois à un ténesme et des saignements. Douleur pelvienne
3 Arbre décisionnel de-
L’examen clinique permet d’évoquer le diagnostic si vant une douleur pelvienne
des lésions endométriosiques sont visibles au sans orientation clinique.
NFS + CRP + hCG NFS : numération formule
spéculum dans le cul-de-sac postérieur ou si le
sanguine ; CRP : C reac-
toucher vaginal identifie un nodule au niveau des
hCG positifs hCG négatifs tive protein ; GEU : gros-
ligaments utérosacrés réveillant la douleur, une Échographie pelvienne Échographie pelvienne sesse extra-utérine ; GIU :
rétroversion utérine fixée et/ou une masse grossesse intra-utérine ;
annexielle. Les explorations complémentaires GB : globules blancs ;
Vacuité utérine Sac ovulaire Masse annexielle normale
peuvent étayer la suspicion clinique si, à hCG : human chorionic go-
intra-utérin
l’échographie, une formation kystique finement nadotrophin.
échogène à paroi épaisse est visible, évoquant un Masse annexielle Sac ovulaire Fausse CRP et GB CRP et GB Antalgique
endométriome. L’hystérographie décèle les signes ± épanchement extra-utérin couche normaux élevés
évocateurs d’une adénomyose (angulation en ± embryon
baïonnette de l’isthme, tuba erecta des cornes
utérines). L’imagerie par résonance magnétique GEU GEU Torsion d'annexe Infection Réévaluation ±
Corps jaune rompu Kyste hémorragique génitale
permet de révéler les implants endométriosiques GIU précoce haute
sous la forme de lésions hyperintenses en T1 et T2. Microcœlioscopie
Le dosage plasmatique du CA 125 est incons- ou cœlioscopie
tamment élevé. Cependant, les examens Traitement
complémentaires peuvent ne pas orienter vers une

3
3-1170 - Douleur pelvienne de la femme

envisagée, soit chirurgicale d’emblée imposant dans nécessaires si l’on préconise l’utilisation de l’aspirine. à des opiacés agonistes-antagonistes tels que le
le contexte gynécologique une prise en charge le Des associations de paracétamol et codéine peuvent buprénorphine (Temgésict). Il est exceptionnel, en
plus souvent endoscopique, soit médicale qui sera également être prescrites (Efféralgant codéine, dehors du contexte cancérologique, qu’il faille faire
associée à une réévaluation secondaire. Dafalgant, Codolipranet). Les anti-inflammatoires appel à des opiacés puissants agonistes.
Le traitement médical doit être étiologique, c’est le non stéroïdiens à visée antalgique sont représentés


cas des antibiotiques dans le cadre des infections par les dérivés des acides propionique et
génitales hautes, mais aussi symptomatique, méfénamique. L’acide méfénamique peut être Conclusion
reposant sur l’utilisation des antalgiques. Le choix de préconisé à des doses maximales de 1 500 mg/j pour
la thérapeutique antalgique est fonction de une durée au plus de 5 jours (Ponstylt, Antadyst). Les La douleur pelvienne est le signe d’appel le plus
l’intensité de la douleur ainsi que de sa résistance dérivés de l’acide propionique sont nombreux tels fréquemment rencontré en pathologie gynécolo-
aux médications. que l’ibuprofène (Advilt, Algifènet, Nurofent). gique. Un examen clinique soigneux et des examens
Pour les douleurs légères, on privilégie l’utilisation Pour les douleurs légères à modérées, les opiacés complémentaires de routine permettent le plus
de médicaments non opiacés par voie orale ou faibles agonistes associés éventuellement aux non souvent un diagnostic étiologique et une prise en
sublinguale tels que le paracétamol et les opiacés permettent la résolution de la majorité des charge spécifique. Dans le doute, le recours à une
anti-inflammatoires non stéroïdiens à doses douleurs pelviennes aiguës. Parmi les opiacés exploration microcœlioscopique et/ou cœliosco-
antalgiques. Pour obtenir cet effet antalgique, il faibles, le chlorhydrate de dextropropoxyphène est pique à visée diagnostique peut être nécessaire. La
convient de donner des doses suffisantes de produits l’un des plus usités. Une forme galénique associant douleur, outre le traitement étiologique, ne doit pas
actifs. L’action antalgique du paracétamol est dose du paracétamol est disponible (Di-Antalvict). La être sous-estimée et justifie le recours à des
dépendante : une posologie de 3 g/24 h est persistance de la symptomatologie après élimination thérapeutiques médicamenteuses antalgiques à
recommandée. Des doses équivalentes sont formelle d’une urgence chirurgicale justifie le recours doses efficaces.

Émile Daraï : Praticien hospitalier.


Éric Meneux : Chef de clinique-assistant.
Jean-Louis Bénifla : Praticien hospitalier.
Agnès Batallan : Chef de clinique-assistant.
Didier Tardif : Chef de clinique-assistant.
Patrick Madelenat : Professeur des Universités.
Service de gynécologie-obstétrique, centre hospitalier universitaire Bichat-Claude-Bernard, 170, boulevard Ney, 75018 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Daraï É, Meneux É, Bénifla JL, Batallan A, Tardif D et Madelenat P. Douleur pelvienne de la femme.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1170, 1999, 4 p

Références

[1] Chapron C, Benhamou D, Belaisch-Allart J, Dubuisson JB. La douleur en [4] Melone C, Erny R. Le point sur le traitement des dysménorrhées primaires
gynécologie. Paris : Arnette-Blackwell, 1997 essentielles. Contracept Fertil Sex 1993 ; 21 : 463-465

[2] Conférence de consensus en thérapeutique anti-infectieuse. Maladies sexuel- [5] Tamborini A, Taurelle R. Syndromes prémenstruels. Encycl Med Chir (Else-
lement transmissibles (MST) chez la femme, la mère, la mineure. Grenoble 3 vier, Paris) Gynécologie, 161-C-10, 1994 : 1-11
novembre 1993. J Gynecol Obstet Biol Reprod 1994 ; 23 : 210-216

[3] Henry-Suchet J, Dahan M, Tannous W, Askienazy-Elbhar M. Salpingites


aiguës non spécifiques. Conduite à tenir. Encycl Med Chir (Elsevier, Paris), Gyné-
cologie, 470-A-10, 1995 : 1-18

4
¶ 3-1340

Endométriose génitale et extragénitale


L. Remoue, R. Fauvet

L’endométriose est définie comme la présence en situation ectopique de cellules endométriales. Elle
survient surtout chez les femmes en âge de procréer avec une prévalence de 5 à 20 %. Cette pathologie
touche principalement la sphère génitale mais peut également se développer dans presque tous les
organes du corps. Ainsi, elle est responsable de douleur et d’infertilité mais également d’hématurie, de
rectorragies, d’hémoptysies, de ténesme, d’occlusion digestive. Cependant, elle peut également être
complètement asymptomatique. La physiopathologie de l’endométriose est multifactorielle impliquant
des facteurs mécaniques, hormonaux, immunologiques, inflammatoires, génétiques, angiogéniques,
apoptotiques. Son diagnostic clinique est soupçonné devant des signes évocateurs d’endométriose à
l’interrogatoire tels que des douleurs cycliques, invalidantes, responsables de dysménorrhée et/ou de
dyspareunie. Son diagnostic repose également sur des examens paracliniques tels que l’échographie et
l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Son traitement peut faire appel aux traitements
médicamenteux par progestatifs ou par agonistes de la GnRH, aux traitements chirurgicaux avec
résection des nodules endométriosiques et/ou kystectomie des endométriomes et enfin à l’association des
deux. Après traitement, des récidives peuvent survenir d’où la nécessité d’un suivi.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Endométriose génitale ; Endométriose extragénitale ; Dysménorrhée ; Dyspareunie ; Infertilité

Plan Formes classiques de l’endométriose 4


¶ Classifications nosologiques 5
¶ Définition 1 ¶ Symptômes et circonstances de diagnostic 5
¶ Épidémiologie et facteurs de risque 2 Douleur 5
Infertilité 5
¶ Facteurs de risque 2
Autres symptômes 6
Âge 2
Sexe 2 ¶ Moyens diagnostiques 6
Origine ethnique et classe sociale 2 Examen clinique 6
Facteurs psychologiques 2 Marqueurs plasmatiques 6
Facteurs familiaux 2 Ponction-aspiration ou biopsie percutanée 6
Imagerie 6
Caractéristiques du cycle menstruel et antécédents obstétricaux 2
Utilisation de contraceptifs 2 ¶ Traitement 7
Antécédents gynécologiques 2 Traitement en fonction des symptômes (recommandations de
Dysfonctionnement immunitaire 2 l’AFSSAPS) 8
Tabac, alcool, café et mode de vie 2
Facteurs environnementaux 2
¶ Étiologie 2
Facteurs mécaniques 3 ■ Définition
Facteurs hormonaux 3
Facteurs immunologiques 3 L’endométriose, décrite pour la première fois par Rokitansky
Facteurs angiogéniques 3 en 1860 [1], a été définie par Sampson en 1927 [2] comme étant
Facteurs apoptotiques 3 la présence en situation ectopique, de cellules endométriales
Facteurs inflammatoires et infectieux 3 glandulaires et stromales, présentant les caractères fonctionnels
Facteurs génétiques 3 de l’endomètre, et situées à distance et sans connexion avec lui.
En conclusion 3 Selon cette définition, l’endométriose diffère, d’une part de
l’adénomyose qui est définie par la présence de tissu endomé-
¶ Localisations des lésions 3 trial au sein du myomètre, et d’autre part de la colonisation
Localisations pelviennes 3 intramurale des trompes de Fallope où le tissu endométrial
Localisations extrapelviennes 3 glisse dans la trompe et reste toujours en continuité avec
¶ Anatomopathologie 4 l’endomètre [3].

Traité de Médecine Akos 1


3-1340 ¶ Endométriose génitale et extragénitale

■ Épidémiologie et facteurs s’expliquerait par une exposition moindre aux menstruations,


une modification de l’environnement endocrinien pendant la
de risque grossesse et/ou la lactation ou une dilatation irréversible du col
lors de l’accouchement par voie vaginale, diminuant le reflux
L’épidémiologie de l’endométriose dans la population géné- rétrograde. Néanmoins, l’effet bénéfique de la grossesse semble-
rale est difficile car son diagnostic est le plus souvent fait chez rait davantage lié à l’aménorrhée qu’à la grossesse elle-même, au
des femmes symptomatiques et impose non seulement la cours de laquelle des observations d’aggravation des symptômes
visualisation complète du pelvis mais aussi la biopsie des lésions de la maladie ont même été rapportées [24].
pour être certain de leur nature [4].
Bien que sous-estimée, la prévalence de la maladie a tendance
à augmenter et serait de 3 % dans la population générale [5]. Utilisation de contraceptifs
Chez les femmes en période d’activité génitale, elle serait de 5 Le risque de développer une endométriose serait réduit chez
à 20 % et chez celles qui présentent des douleurs pelviennes les utilisatrices de contraceptifs oraux et surtout lors de leur
et/ou une infertilité, la prévalence serait de 20 à 90 % [6]. En prise en continu. La durée du traitement n’aurait pas
postménopause, elle a été estimée à moins de 4 % [7]. d’influence [21, 25, 26]. La fréquence de l’endométriose chez les
femmes traitées par un dispositif utérin depuis plus de 2 ans
serait plus élevée [25] . Cependant, des études ont montré
■ Facteurs de risque l’efficacité du dispositif intra-utérin libérant du lévonorgestrel
(Mirena®), dans l’amélioration des symptômes et la diminution
Âge des récidives [27].
L’âge est le seul caractère sociodémographique dont la
relation avec l’endométriose est établie. L’endométriose touche Antécédents gynécologiques
essentiellement la femme en âge de procréer, principalement Les anomalies obstructives du tractus génital (sténose,
entre 30 et 40 ans [8]. Après la ménopause, les lésions régressent cloison) seraient un facteur de risque d’endométriose [28], ainsi
en règle générale spontanément. Cependant, des implants que l’exposition in utero au Distilbène® [29].
endométriaux en postménopause peuvent persister longtemps à
l’état quiescent et sont susceptibles d’être réactivés par un
traitement œstrogénique [9]. L’endométriose n’est pas rare à Dysfonctionnement immunitaire
l’adolescence où son incidence augmente avec l’âge, ainsi à Des anomalies des mécanismes immunitaires humoraux et
partir de 17 ans quand il existe une douleur pelvienne chroni- cellulaires sont actuellement considérées comme des détermi-
que, elle est aussi fréquente que chez les femmes plus âgées [10]. nants hypothétiques de l’endométriose [30]. Ainsi, une préva-
Cependant, la fréquence du diagnostic d’endométriose chez lence plus importante de maladies immunologiques telles que le
les femmes de 30 à 40 ans reflète plus un âge où la demande lupus ou la polyarthrite rhumatoïde, a été rapportée chez les
de soins est élevée et où la symptomatologie occasionne plus de femmes présentant une endométriose [31, 32].
cœlioscopie, que l’âge où se produit réellement la maladie.
Tabac, alcool, café et mode de vie
Sexe
Des études ont suggéré qu’un tabagisme important diminue-
Quelques rares cas d’endométriose masculine ont été rappor-
rait le risque d’endométriose par l’hypo-œstrogénie induite [17],
tés, notamment chez des hommes castrés, traités par œstrogé-
cependant cette relation reste controversée [8, 31, 33, 34]. Aucune
nothérapie, le plus souvent dans le cadre d’un cancer de la
relation significative n’a été établie concernant l’alcool ou la
prostate [11].
caféine et l’endométriose [17, 35]. Les patientes présentant un
surpoids seraient moins sujettes à l’endométriose, cela s’expli-
Origine ethnique et classe sociale querait par des cycles plus irréguliers et plus souvent anovula-
Une étude a montré une prédominance raciale, avec deux fois toires [17, 36, 37] ; cela reste cependant controversé [38]. De plus,
plus d’endométriose chez les Japonaises que chez les Caucasien- une activité physique régulière réduirait le risque d’endomé-
nes [12]. Ceci doit être pondéré avec les caractéristiques différen- triose, mais les données sont actuellement insuffisantes pour
tes de ces populations, concernant l’accès aux soins et à la l’affirmer [31].
contraception, le ressenti de la symptomatologie et la politique
familiale du pays [13]. Il n’a pas été retrouvé de relation signifi- Facteurs environnementaux
cative entre l’endométriose et la classe sociale [8].
Des études ont montré que l’exposition à la dioxine augmen-
tait le risque d’endométriose [39, 40], suggérant également que
Facteurs psychologiques d’autres facteurs environnementaux pourraient être incriminés.
Certains traits de la personnalité, comme un égocentrisme,
un perfectionnisme, une hyperanxiété ou une hyperactivité, ont
été rattachés à l’endométriose [14]. ■ Étiologie
De nombreuses théories ont été proposées pour expliquer
Facteurs familiaux l’étiologie de l’endométriose [41] . Aucune n’a été jusqu’ici
L’incidence et la sévérité de l’endométriose augmenteraient complètement validée. Les mécanismes pathogéniques semblent
chez les femmes ayant un parent au premier degré présentant différer selon la localisation et la morphologie des lésions.
la pathologie [15, 16]. Des atteintes simultanées ont été rappor- La théorie la plus volontiers admise, notamment pour
tées chez des jumelles monozygotes [16]. expliquer les lésions superficielles est la théorie de l’implanta-
tion qui a été proposée par Sampson en 1927 [2]. Pendant les
Caractéristiques du cycle menstruel règles, des fragments d’endomètre refluent par les trompes dans
la cavité abdominale où ils pourraient chez certaines femmes
et antécédents obstétricaux s’implanter [42] . Plusieurs observations argumentent cette
Il existe une association entre l’endométriose et certains théorie : le reflux menstruel touche plus de 90 % des fem-
aspects du cycle menstruel tels qu’une ménarche précoce avant mes [43] , il est plus fréquent en cas d’endométriose [44] . Le
12 ans, des cycles courts, des ménorragies et une liquide péritonéal récupéré pendant les règles contient des
dysménorrhée [17-20]. cellules endométriales capables de prolifération et d’adhérence
Le risque d’endométriose diminue avec la parité [21-23]. La chez 98 % des femmes [45, 46]. Des études ont confirmé l’adhé-
prévalence plus faible de l’endométriose chez les multipares rence rapide des cellules endométriales épithéliales et stromales

2 Traité de Médecine Akos


Endométriose génitale et extragénitale ¶ 3-1340

à la surface du tissu. En 2002, Beliard a montré la nécessité de Facteurs immunologiques


la présence simultanée des cellules stromales et glandulaires
pour « réussir » l’implantation péritonéale : les cellules stromales La survenue de l’endométriose repose sur plusieurs étapes :
semblent être responsables du processus d’adhésion au méso- reflux, adhésion, protéolyse de la matrice extracellulaire,
thélium, et les cellules glandulaires sont impliquées dans la prolifération, angiogenèse et inflammation. Normalement, des
croissance de la lésion [47]. Le flux rétrograde ne comporte que mécanismes de défense peuvent interrompre à chaque étape le
des cellules isolées ou en clusters et non des fragments, favori- processus [42]. Chez les femmes qui deviendront endométriosi-
sant la traversée des trompes dont le diamètre de la portion ques, ce système « épurateur » est inefficace ou débordé. Les
intramurale est très étroit [48]. L’augmentation des menstrua- dysfonctionnements responsables impliquent l’immunité
tions rétrogrades par l’obstruction du flux antérograde normal humorale, l’immunité cellulaire, le péritoine, l’endomètre
entraîne une augmentation de l’incidence de l’endométriose eutopique.
chez les femmes. Dans le cas de durée de règles plus longue et
de cycle plus court, le risque de reflux rétrograde est plus élevé, Facteurs angiogéniques
ainsi que celui de développer une endométriose [35]. L’angiogenèse est l’un des facteurs impliqués dans la patho-
Mais le reflux menstruel touche plus de 90 % des femmes génie de l’endométriose. L’implantation et l’accroissement des
avec des trompes perméables, et seulement 20 % d’entre elles îlots endométriosiques nécessitent la présence d’une néovascu-
développent une endométriose [43]. Cet apparent paradoxe peut larisation préexistante. Les lésions péritonéales sont souvent
s’expliquer par un excès de reflux menstruel, débordant les entourées d’une hypervascularisation, et dans le cas d’endomé-
capacités de nettoyage de la cavité péritonéale, diminuées par triose extragénitale, les lésions se développent souvent dans des
ailleurs par des mécanismes immunitaires défaillants [49]. Enfin, tissus hypervascularisés [67].
si cette théorie explique la fréquence des localisations pelvien-
nes, elle n’est pas satisfaisante pour justifier des lésions Facteurs apoptotiques
extrapelviennes [50].
D’autres théories sont alors évoquées telles que la théorie de L’apoptose est un mécanisme physiologique impliqué dans
la métaplasie cœlomique [51-54]. Ainsi, l’épithélium ovarien et le l’homéostasie cellulaire, permettant donc de maintenir un
revêtement péritonéal viscéral et pariétal dérivent de la cavité équilibre entre prolifération et mort cellulaires. Dans la patho-
cœlomique qui durant la période embryonnaire forme en logie cancéreuse il existe une altération de l’apoptose permet-
s’invaginant les canaux de Müller et donc l’endomètre. Ce sont tant sa prolifération. L’endométriose, bien qu’étant une
des tissus analogues dont les cellules pluripotentes sont capables pathologie bénigne peut avoir également une altération compa-
de se différencier en tissu endométrial spontanément ou après rable de l’apoptose [68].
induction infectieuse, toxique, hormonale ou autres [55]. Cette
théorie peut expliquer la survenue d’endométriose à distance de Facteurs inflammatoires et infectieux
l’endomètre, objectivée partout où se trouvent des tissus dérivés L’endométriose doit être considérée comme une maladie
de l’épithélium cœlomique, par exemple aux niveaux du inflammatoire. L’inflammation impliquant, entre autres, des
thorax, de la paroi abdominopelvienne. Elle peut également cytokines, des prostaglandines et des fibroblastes, participe au
expliquer l’endométriose chez les femmes sans utérus et chez les maintien de l’endométriose [69]. La prévention et le traitement
hommes. Une étude récente in vitro a montré la survenue par des maladies sexuellement transmissibles jouent un rôle dans la
métaplasie de lésions endométriales sur des cellules épithéliales prise en charge des patientes à risque d’endométriose.
superficielles ovariennes humaines [56].
À ces deux théories s’ajoutent la théorie métastatique [57] et Facteurs génétiques
la théorie dite de l’induction ou théorie mixte qui dérive des
précédentes [58, 59]. Les anomalies immunitaires, péritonéales et endométriales
Une théorie ne peut donc à elle seule expliquer toutes les seraient génétiquement déterminées [70]. Récemment, Cramer et
localisations. Il faut également prendre en compte les facteurs Missmer ont proposé des facteurs génétiques identifiant
étiologiques favorisant le développement de l’endométriose. un « phénotype endométriosique », impliquant une ménarche
Ces facteurs sont multiples. précoce, des cycles courts, des dysménorrhées, une hypofertilité
et probablement des femmes de grande taille [15].
Facteurs mécaniques En conclusion
Le flux menstruel rétrograde est d’autant plus intense qu’il va
L’étiopathogénie exacte de l’endométriose n’est donc pas
favoriser l’endométriose [60]. Ainsi, tout obstacle à l’écoulement
encore définie, sa meilleure compréhension permettra le
du flux menstruel par voie normale (comme une sténose
développement de futures thérapies.
cervicale iatrogène ou une anomalie congénitale avec atrésie
d’un segment du tractus mullérien), facilite la croissance de
lésions d’endométriose. Certaines caractéristiques intrinsèques ■ Localisations des lésions
du cycle menstruel (cycles courts et ménorragies) [61], l’hypoto-
nie de la jonction utérotubaire, des contractions rétrogrades L’endométriose s’observe dans presque toutes les parties du
excessives de la musculeuse tubaire et myométriale [62], favori- corps de la femme et aux niveaux du tractus urogénital et de la
sent également le reflux menstruel. paroi abdominale chez l’homme [66, 71].
La pathologie affecte essentiellement l’étage pelvien chez la
femme. Les localisations extrapelviennes sont rares mais ne
Facteurs hormonaux doivent pas être méconnues [50, 72].
Plusieurs observations cliniques et expérimentales ont montré
que les lésions d’endométriose sont hormonodépendantes. En Localisations pelviennes
effet, les noyaux des cellules endométriosiques présentent des
Les lésions endométriosiques sont essentiellement observées
récepteurs aux œstrogènes et à la progestérone et les œstrogènes
dans le péritoine pelvien et dans l’ovaire. Les localisations
jouent un rôle important dans le maintien et la croissance du
rencontrées par ordre de fréquence sont l’ovaire (Fig. 1), le
tissu endométriosique [63-65]. La majorité des femmes en post-
péritoine pelvien (Fig. 2), les ligaments utérins (utérosacrés,
ménopause ont une atrophie des implants endométriosiques,
ronds et larges), la cloison rectovaginale, le cul-de-sac de
probablement liée à la perte des hormones gonadiques [61]. La
Douglas et les ganglions lymphatiques pelviens [73].
littérature rapporte des cas de réactivation endométriosique chez
la femme ménopausée sous traitement œstrogénique [9]. Les
rares cas d’endométriose rapportés chez l’homme sont associés Localisations extrapelviennes
à une œstrogénothérapie à fortes doses pour carcinome Elles sont moins souvent rencontrées et sont, par ordre de
prostatique [66]. fréquence, le côlon et l’intestin grêle, le col utérin, la vulve, le

Traité de Médecine Akos 3


3-1340 ¶ Endométriose génitale et extragénitale

Figure 1. Endométriome droit, vue cœlioscopique (photographie Phi-


lippe Merviel, CHU Amiens).

Figure 3.
A, B. Endométriose ombilicale. Aspect clinique préopératoire et aspect
macroscopique après exérèse (photographie Thierry Routiot, CHU
Nancy).

rouges, bleues, brunes ou noires, en légère saillie ou déprimées.


Des adhérences par fibrose peuvent être associées. Le kyste
endométriosique unique correspond à un endométriome que sa
localisation soit ovarienne ou non [3], son contenu pâteux de
couleur chocolat ou goudron est caractéristique, mais n’est pas
pathognomonique.

Aspects histologiques
Le tissu endométrial est défini par l’association d’un épithé-
lium endométrial et d’un stroma encore appelé chorion cyto-
gène [3] . Le tissu endométrial ectopique est fonctionnel, il
Figure 2. Endométriose péritonéale, vue cœlioscopique (photographie
présente les mêmes aspects que l’endomètre dans 40 à 80 % des
Philippe Merviel, CHU Amiens).
cas [76]. Son apparence dépend de sa réponse aux fluctuations
hormonales du cycle menstruel et de l’ancienneté de la lésion.
Ainsi, le tissu endométrial peut être en phase proliférative
vagin, la paroi abdominale (essentiellement aux niveaux des (phase préovulatoire), en phase sécrétoire et de décidualisation
cicatrices, de l’ombilic [Fig. 3] et du creux inguinal), l’uretère et (phase postovulatoire). Chez la femme ménopausée, le tissu
l’épiploon. Les autres localisations rares sont : le poumon et la endométriosique devient atrophique et les glandes deviennent
plèvre, les tissus mous, l’os, le péritoine abdominal supérieur, kystiques au sein d’un stroma fibroblastique [65]. Les aspects
l’estomac, le pancréas, le foie, le nerf sciatique, l’espace sous- varient en fonction de l’âge. Ainsi, les lésions blanches et
arachnoïdien, l’encéphale, le rein et l’urètre [73]. rouges, plus actives histologiquement et biologiquement, sont
Aucun cas n’a été rapporté aux niveaux du cœur et de la plus fréquentes chez les femmes jeunes. Alors que les épaissis-
rate [74, 75]. sements blanchâtres et les lésions marron, lésions respective-
ment de type séquellaire et régressif, sont plus fréquentes chez
les femmes plus âgées. La fibrose augmente avec l’ancienneté
■ Anatomopathologie des lésions et englobe parfois complètement la composante
endométriale, rendant le diagnostic d’endométriose difficile.

Formes classiques de l’endométriose Lésions microscopiques


Elles sont définies comme des lésions endométriosiques
Aspects macroscopiques
péritonéales microscopiques localisées sur le péritoine, macro-
L’appareil génital est la localisation principale de l’endomé- scopiquement normal, et donc non identifiées lors de la cœlio-
triose, les aspects « classiques » des foyers d’endométriose sont scopie [77]. Chez des femmes présentant une stérilité inexpli-
bien connus et facilement identifiés. quée, l’examen microscopique de péritoine sain révèle dans
En général, l’aspect macroscopique varie selon le siège, le 20 % des cas des implants endométriaux [78]. Plusieurs aspects
caractère superficiel ou profond, la période du cycle et l’ancien- microscopiques sont décrits : polypes, implants péritonéaux et
neté de la lésion [3]. lésions sous-péritonéales. L’origine de ces lésions explique pour
L’endométriose constituée du péritoine peut se présenter certains les récidives précoces observées après l’exérèse chirurgi-
comme : des taches, des nodules ou des lésions microkystiques, cale, justifiant l’association des thérapeutiques médicales et

4 Traité de Médecine Akos


Endométriose génitale et extragénitale ¶ 3-1340

chirurgicales. Cependant, ces hypothèses sont controversées. Les Aucune méthode de classification de l’endométriose extrapel-
lésions microscopiques pourraient représenter un stade infracli- vienne n’est validée. Markham et al. [80] ont proposé un système
nique de la pathologie. Il reste à élucider leur capacité ou non divisant l’endométriose extrapelvienne en quatre classes :
à progresser et engendrer des lésions macroscopiques classiques • classe I : endométriose du tractus intestinal ;
à l’origine de « l’endométriose maladie ». • classe U : endométriose du tractus urinaire ;
• classe L : endométriose du poumon et de la cage thoracique ;
• classe O : endométriose des autres localisations en dehors de
■ Classifications nosologiques la cavité abdominale.
Ces classes sont subdivisées en stade extrinsèque ou intrinsè-
La classification la plus utilisée pour l’endométriose pelvienne que de la maladie, en fonction de leur localisation au niveau de
est celle révisée en 1985 de l’American Fertility Society [79] l’organe atteint.
(Tableau 1). Les implants d’endométriose au niveau du péritoine
ou de l’ovaire sont classés en fonction de leur taille et de leur
profondeur. Les adhérences sont prises en compte en fonction ■ Symptômes et circonstances
de leur densité. Les différents stades sont :
• endométriose minime : 1 à 5 points ; de diagnostic (Tableau 2)
• moyenne : 6 à 15 ;
• modérée : 16 à 40 ; L’endométriose intéresse différents organes. Elle est donc à
• sévère : supérieure à 40. l’origine de tableaux cliniques variés. Les symptômes les plus
Le principal reproche fait à cette classification est l’absence de fréquents sont la dysménorrhée, la douleur pelvienne, la
prise en compte du caractère évolutif de la pathologie. dyspareunie et l’infertilité. Néanmoins, l’interrogatoire doit
rechercher les signes évocateurs des localisations les plus
fréquentes, mais aussi ceux liés aux localisations plus rares.
Tableau 1.
Score AFSr de l’endométriose. Douleur
Lésions péritonéales (ne coter que la lésion la plus sévère, superficielle
La douleur est le signe le plus fréquent, retrouvé dans 75 %
ou profonde)
des cas d’endométriose. Les douleurs typiques de la maladie
Péritoine Superficielles Profondes sont pelviennes et peuvent être secondaires aux lésions elles-
< 1 cm 1 2 mêmes, aux réactions inflammatoires, aux adhérences entre les
1 à 3 cm 2 4 organes, entre les organes et la paroi et à l’infiltration des nerfs
> 3 cm 4 6 sous-péritonéaux. Elles peuvent dans les cas de localisations
Lésions ovariennes (ne coter que la lésion la plus sévère et ajouter les profondes survenir lors des changements de position ou être à
scores des ovaires droit et gauche) l’origine d’une dyspareunie (atteinte des ligaments utérosacrés)
Ovaire droit Superficielles Profondes ou d’une dyschésie (atteinte de la cloison rectovaginale). Ni le
volume, ni la taille de la lésion ne sont corrélés à l’intensité des
< 1 cm 1 4
douleurs. D’après Koninckx, seule la profondeur de pénétration
1 à 3 cm 2 16 des lésions dans la paroi des organes influence l’intensité des
> 3 cm 4 20 douleurs [81] . Elles sont avant tout spontanées, survenant
Ovaire gauche Superficielles Profondes volontiers à l’arrêt de la pilule qui, jusque-là, masquait leur
< 1 cm 1 4 existence. Elles peuvent être permanentes, épisodiques ou
1 à 3 cm 2 16 rythmées par le cycle avec des recrudescences périovulatoires et
> 3 cm 4 20 prémenstruelles. Les douleurs sont progressives et s’aggravent
dans le temps [82]. En pratique, le caractère cyclique et l’inten-
Adhérences annexielles selon la circonférence (ajouter les scores des sité de la douleur, invalidante dans les activités quotidiennes,
2 ovaires et des 2 trompes) sont évocateurs d’endométriose ; de plus, lorsque la dysménor-
Ovaire droit Vélamenteuses Denses rhée ne cède pas aux antalgiques habituels, l’endométriose doit
< 1/3 de la surface 1 4 être évoquée [82].
1/3 à 2/3 2 8
> 2/3 4 16 Infertilité
Ovaire gauche Vélamenteuses Denses
L’infertilité est plutôt retrouvée dans les cas de localisations
< 1/3 de la surface 1 4
péritonéale, ovarienne et tubaire. Elle est surtout retrouvée dans
1/3 à 2/3 2 8 les formes sévères de l’endométriose [83], expliquée entre autres
> 2/3 4 16 par les séquelles adhérentielles obturantes. Les endométrioses
Trompe droite Vélamenteuses Denses révélées par des douleurs sont à un stade plus avancé que lors
< 1/3 de la surface 1 4* d’une exploration pour infertilité. Des études récentes ont décrit
1/3 à 2/3 2 8*
> 2/3 4 16
Tableau 2.
Trompe gauche Vélamenteuses Denses
Diagnostic clinique de l’endométriose.
< 1/3 de la surface 1 4*
1/3 à 2/3 2 8* Signes cliniques très évocateurs s’ils sont prédominants pendant
les règles :
> 2/3 4 16
- dysménorrhée (présente dans 64 % des cas d’endométriose profonde)
*Si le pavillon de la trompe est complètement immobilisé, compter 16
- douleurs pelviennes chroniques (présentes dans 44 % des cas
Oblitération du Douglas
d’endométriose profonde)
Partielle Totale
- dyspareunie profonde (présente dans 37 % des cas d’endométriose
4 40 profonde)
Stade de l’endométriose Degré de sévérité Score AFS - dysurie
Stade I Endométriose minime 1-5 - dyschésie ± rectorragie
Stade II Endométriose modérée 6-15 - troubles du transit digestif
Stade III Endométriose moyenne 16-40 L’examen clinique gynécologique peut être normal dans l’endométriose
Stade IV Endométriose sévère > 40 et ne permet pas d’éliminer le diagnostic

Traité de Médecine Akos 5


3-1340 ¶ Endométriose génitale et extragénitale

une infertilité dans l’endométriose minime et modérée, expli-


quée par une augmentation des prostaglandines chez ces
patientes [82, 83].

Autres symptômes
Les autres signes d’appels varient en fonction des localisa-
tions des lésions d’endométriose et peuvent correspondre à une
hématurie, des rectorragies, des hémoptysies, une hydronéph-
rose, un ténesme, une occlusion digestive ...

■ Moyens diagnostiques
L’interrogatoire à la recherche des facteurs de risque et
l’analyse des symptômes provoquant la consultation sont
indispensables afin d’orienter l’examen clinique et la prescrip-
tion d’examens complémentaires.

Examen clinique
L’examen gynécologique est indispensable devant des symp-
tômes d’endométriose, qu’elle soit génitale ou extragénitale. Il Figure 4. Aspect échographique d’un endométriome (photographie
est intéressant de le pratiquer en période menstruelle pour Philippe Merviel, CHU Amiens).
sensibiliser certains signes.
Il comprend :
• l’inspection de la zone douloureuse (ombilic, cicatrices...) ; abdominale antérieure, les structures digestives superficielles, les
• l’examen au spéculum (lésions du cul-de-sac postérieur...) ; feuillets péritonéaux et le bas appareil urinaire... Elle a une
• le toucher vaginal est le temps primordial et doit rechercher spécificité de 90 % dans le diagnostic de l’endométriome
une mobilisation utérine douloureuse, une déviation latérale ovarien (Fig. 4). L’échographie sous-estime souvent des lésions
du col, une rétroversion utérine fixée, une masse annexielle, de localisation péritonéale et sous-péritonéale (ex. : ligaments
une infiltration et une hypersensibilité des ligaments utéro- utérosacrés). Les premières sont essentiellement visibles à la
sacrés. L’association au toucher rectal peut permettre égale- cœlioscopie, les secondes surtout à l’IRM.
ment d’apprécier une masse annexielle mais parfois aussi des
nodules de la cloison rectovaginale. Échographie des voies urinaires
L’association de plusieurs signes est évocatrice de la maladie, Elle doit être réalisée de principe chez toute femme présen-
cependant, dans les formes modérées, cet examen peut être tant des signes urinaires cycliques a fortiori avec des urines
normal [84]. stériles. Elle recherche une dilatation des cavités pyélocalicielles
traduisant l’atteinte des uretères.
Marqueurs plasmatiques
Échographie endorectale
Il n’existe pas de marqueur biologique spécifique et fiable de
l’endométriose. Elle est indiquée chez les patientes chez qui on suspecte une
Le marqueur tumoral CA 125 est souvent élevé dans les endométriose profonde. Ainsi, lorsqu’une infiltration rectale
endométrioses péritonéales ou ovariennes (supérieur à 35 UI/ et/ou colique est décelée, le diagnostic d’endométriose digestive
l) [82]. Sa mauvaise sensibilité et sa mauvaise spécificité n’en font peut être retenu. Lorsqu’une résection est proposée, cet examen
pas un marqueur fiable. Le dosage d’effecteurs immunitaires est contribue au bilan d’extension préopératoire, en déterminant la
une voie de recherche actuelle, comme les anticorps antiendo- présence et l’étendue des atteintes digestives et elle participe
métriaux, les macrophages sanguins, mais aussi diverses cytoki- donc au choix de la voie d’abord (laparotomie ou cœlioscopie)
nes et prostaglandines présentes dans le liquide péritonéal. et du geste à réaliser sur le tube digestif [88].

Ponction-aspiration ou biopsie percutanée Tomodensitométrie


En cas d’endométriose pariétale, la ponction ou la biopsie C’est un examen moins spécifique que l’IRM pour le diagnos-
sont contre-indiquées, car il existe un risque de tic d’endométriose, néanmoins souvent utilisé car d’accès plus
dissémination [85]. aisé (Fig. 5).

IRM
Imagerie
Elle est réalisée en seconde intention pour étayer le diagnostic
Lorsque le diagnostic clinique d’endométriose est suspecté, les et définir la stratégie thérapeutique. Les kystes endométriosiques
méthodes d’imagerie permettent de manière non invasive de de taille variable uni- ou bilatéraux présentent un hypersignal
conforter le diagnostic d’endométriose et d’établir une cartogra- caractéristique ≥ au signal de la graisse sous-cutanée en pondé-
phie précise des lésions. Deux examens sont prépondérants : ration T1 persistant après suppression de la graisse (Fig. 6) et un
l’échographie par voie endovaginale et l’imagerie par résonance hypersignal T2 ou de façon plus caractéristique un affaissement
magnétique (IRM). D’autres examens peuvent y être associés en du signal plus ou moins important en pondération T2 (shading).
fonction des localisations de l’endométriose. Dans le cadre de Le diagnostic des localisations d’endométriose profonde repose
l’endométriose il est intéressant de pratiquer ces différentes sur des données topographiques morphologiques et des anoma-
techniques en période menstruelle [86]. En pratique, cela est lies de signal. L’endométriose profonde est caractérisée par une
difficilement réalisable. fibrose et une hypertrophie musculaire engendrée par le tissu
endométrial ectopique générant en pondération T2 des plages
Échographie pelvienne d’hyposignal contenant parfois de petits spots hyperintenses
Elle reste le premier examen à prescrire devant toute suspi- (Fig. 7 à 10).
cion d’endométriose pelvienne, étant donné son innocuité, sa L’IRM a donc un intérêt pour dépister d’éventuelles autres
bonne sensibilité, son coût faible et son accès facile [87]. Elle lésions d’endométriose associées, souvent profondes, et ainsi
explore les ovaires, l’utérus, le col, les annexes, la paroi établir une cartographie facilement reproductible [86].

6 Traité de Médecine Akos


Endométriose génitale et extragénitale ¶ 3-1340

Figure 7. Aspect IRM d’une lésion endométriosique au niveau de la


glande de Bartholin gauche (photographie Raffaèle Fauvet, CHU Amiens).

Figure 5. Aspect tomodensitométrique d’une antésite pubienne droite


endométriosique (photographie Raffaèle Fauvet, CHU Amiens).

Figure 8. Endométriose avec atteinte rectale (coupe sagittale T2) (pho-


tographie Marc Bazot, hôpital Tenon, Paris).

Cœlioscopie
La cœlioscopie peut avoir un intérêt diagnostique sauf dans
le cas d’endométriose cutanée qui est accessible à l’examen
clinique.
Elle permet l’exploration rigoureuse de la cavité pelvienne
afin d’établir un bilan lésionnel descriptif précis d’une part, et
d’autre part, l’exérèse des lésions dans un but diagnostique et
thérapeutique. La découverte et le traitement d’une endomé-
triose extragénitale n’impliquent pas forcément une exploration
pelvienne par cœlioscopie car elle n’est associée que dans 26 %
des cas à de l’endométriose pelvienne intra-abdominale [89, 90].
Ainsi, en l’absence de symptomatologie pelvienne, la cœliosco-
pie n’est-elle pas recommandée.

■ Traitement
Le traitement de l’endométriose peut être indiqué devant une
douleur, un endométriome ou une infertilité. Les formes
asymptomatiques de l’endométriose ne relèvent pas d’une
Figure 6. thérapeutique médicamenteuse.
A, B. Aspect d’endométriomes typiques en T1 et T2 (photographie Marc L’endométriose est caractérisée par des lésions de natures
Bazot, hôpital Tenon, Paris). diverses et des relations incertaines avec les symptômes qui lui

Traité de Médecine Akos 7


3-1340 ¶ Endométriose génitale et extragénitale

Tableau 3.
Les médicaments de l’endométriose (recommandations de l’AFSSAPS,
décembre 2005).
Posologie
AINS ayant l’AMM « dysménorrhée »
Acide méfénamique : Ponstyl® 500 mg × 3/j
Acide tiaprofénique : Flanid®, 200 mg × 3/j
Surgam®
Diclofénac : Voldal®, 50 mg × 2/j
Voltarène®,Xénid®
Flurbiprofène : Antadys®,Cebutid® 200 à 300 mg/j en 2 ou 3 prises
Ibuprofène : Antaren®, Brufen®, 400 mg en 1 prise (max 1600 mg/j)
Intralgis®, Nurofen®
Kétoprofène : Toprec® 25 mg × 3/j
Naproxène : Apranax®// 550 mg × 2/j // 500 mg x 2/j
Naprosyne®
Progestatifs à dose antigonadotrope ayant l’AMM dans
l’endométriose
Acétate de chlormadinone : 10 mg/j en traitement continu
Lutéran®
Acétate de médroxyprogestérone : 150 à 250 mg/mois
Dépo-Prodasone®
Acétate de noréthistérone : 10 mg/j en traitement continu
Figure 9. Endométriose avec atteinte des ligaments utérosacrés (flèche) Primolut-Nor®
avec atteinte rectale (tête de flèche) (coupe axiale T2) (photographie Dydrogestérone : Duphaston® 30 mg/j en traitement continu
Marc Bazot, hôpital Tenon, Paris). ou discontinu (du 5e au 25e jour
du cycle)
Lynestrénol : Orgamétril® 5 à 10 mg/j sans interruption
pendant au moins 6 mois
Médrogestone : Colprone® 5 à 15 mg/j du 5e au 25e jour
du cycle ou traitement continu
Agonistes de la GnRH ayant l’AMM dans l’endométriose
Leuproréline : Enantone LP 3.75®, 1 injection s.c. ou i.m. / 4 semaines
Enantone LP 11.25® 1 injection s.c. ou i.m. / 3 mois
®
Nafaréline : Synarel 0.2 400 µg/j en 2 prises à raison d’une
pulvérisation dans une narine
le matin et d’une pulvérisation
dans l’autre narine le soir
Triptoréline : Décapeptyl LP 3®, 1 injection i.m. / 4 semaines
Décapeptyl LP 3.75® 1 injection i.m. / 3 mois
Autres antigonadotropes
Danazol : Danatrol® 400 à 800 mg/j en 2 ou 3 prises
(mais effets secondaires androgéni-
ques, métaboliques et hépatiques)
s.c. : sous-cutané ; i.m. : intramusculaire.

Traitement en fonction des symptômes


Figure 10. Endométriose avec atteinte vésicale (coupe axiale T1) (pho- (recommandations de l’AFSSAPS) (Fig. 11)
tographie Marc Bazot, hôpital Tenon, Paris).
Douleur
En cas de douleurs cycliques menstruelles en dehors d’un
sont attribués. Les lésions sont en perpétuel renouvellement besoin de contraception, un traitement par anti-inflammatoire
jusqu’à l’arrêt de l’activité ovarienne. Une stratégie univoque est non stéroïdien (AINS) est préconisé. Dans les autres situations
donc difficile à mettre en place. de douleurs pelviennes, on propose un progestatif à dose
Le traitement médical repose sur l’hormonodépendance des antigonadotrope ou une contraception œstroprogestative. À
lésions endométriosiques. Les drogues utilisées entraînent une l’issue des 3 mois de traitement, en cas de succès, on poursuit
hypo-œstrogénie du milieu, la suppression des saignements le même traitement, en cas d’échec, on oriente la patiente vers
endométriaux et une régression des lésions endométriosiques. une consultation spécialisée.
Les agents thérapeutiques n’inactivent que temporairement
les lésions d’endométriose et sont inefficaces sur les adhéren- Endométriose profonde (avec localisations
ces, les endométriomes et les lésions séquellaires fibreuses. sous-péritonéales) en dehors d’une infertilité
Le taux de récidive après traitement médical est difficile
à évaluer. Il dépend des moyens de diagnostic mis en jeu, Deux choix thérapeutiques sont possibles : médical ou
de la durée de surveillance et de la gravité initiale des chirurgical.
lésions [24]. Traitement médical antigonadotrope : ce traitement est instauré
Les principales drogues utilisées sont représentées dans le pour un minimum de 3 mois. Les progestatifs à dose antigona-
Tableau 3. dotrope sont le plus souvent recommandés en première

8 Traité de Médecine Akos


Endométriose génitale et extragénitale ¶ 3-1340

Examen clinique
+ échographie

Signes cliniques et/ou Dysménorrhée isolée Douleurs


échographiques ou prédominante pelviennes
d'endométriose chroniques

Consultation Traitement Traitement symptomatique de 1re


spécialisée symptomatique de 1re intention de 3 mois :
intention de 3 mois : - progestatifs à dose
- AINS antigonadotrope
- ou contraception
estroprogestative

Succès Succès

Oui Non Non Oui

Poursuite du traitement Consultation spécialisée Poursuite du traitement


et de la surveillance et de la surveillance

Figure 11. Arbre décisionnel. Principaux symptômes de l’endométriose rencontrés en soins primaires (hors infertilité). D’après les recommandations de
l’AFSSAPS, décembre 2005. AINS : anti-inflammatoires non stéroïdiens.

intention, on choisit ceux avec peu d’effets antiandrogéniques Infertilité


et ayant une efficacité suffisante sur l’endométriose. Les
agonistes de la GnRH peuvent également être prescrits mais Aucun traitement médical administré seul n’a prouvé son
pour une durée limitée à 6 mois (sauf pour la leuproréline) en efficacité pour améliorer la fertilité des femmes endométrio-
raison de la perte osseuse qu’ils induisent en traitement siques. De plus, ces médicaments peuvent retarder la fertilité
prolongé. On peut leur associer une hormonothérapie œstro- car ils sont antigonadotropes. Le diagnostic et le traitement
progestative de substitution (« add-back therapy »). Il n’est de l’endométriose sont réalisés au cours de la cœlioscopie
actuellement pas recommandé de réaliser une seconde cure effectuée dans le cadre du bilan de l’infertilité, après avis
d’agonistes, même à distance. spécialisé. En cas d’endométriose de stade I et II, le traitement
Le recours à des antalgiques, y compris de niveau III, ou la chirurgical est généralement réalisé dans le même temps
prise en charge en centre antidouleur peut être nécessaire dans opératoire. Secondairement, selon l’étiologie de l’infertilité,
les formes hyperalgiques. une assistance médicale à la procréation (AMP) peut être
En cas d’inefficacité des traitements médicaux, un traitement proposée. En cas d’endométriose de stade III et IV, les agonis-
chirurgical peut être également discuté. tes de la GnRH en préopératoire permettent de réaliser
Traitement chirurgical : son but est l’exérèse des foyers d’endo- l’intervention chirurgicale dans de meilleures conditions et
métriose. On peut recourir à une préparation de l’intervention d’avoir moins d’adhérences secondaires à la chirurgie. Les
par des agonistes de la GnRH seuls pendant 3 mois. En cas agonistes de la GnRH prescrits en postopératoire pendant au
d’exérèse complète, un traitement médical complémentaire par moins 3 mois avant une AMP, par le freinage ovarien qu’ils
progestatifs à dose antigonadotrope peut être prescrit pour induisent, peuvent être proposés pour améliorer les taux de
augmenter l’intervalle libre sans douleur. En cas d’exérèse succès de grossesses obtenues.
suboptimale, un traitement médical complémentaire est
recommandé. En conclusion
D’autres traitements potentiels de l’endométriose sont en
Endométriose extragénitale cours d’étude tels que la mifépristone et les inhibiteurs de
La chirurgie est le principal traitement notamment pour les l’aromatase.
nodules pariétaux, ombilicaux ou les lésions digestives. Une Le suivi des patientes traitées varie en fonction de la symp-
exérèse chirurgicale large est recommandée, car en cas d’exérèse tomatologie, des lésions endométriosiques et des traitements
incomplète ou de rupture de la masse lors de l’intervention, on administrés. Les taux moyens de récidive après chirurgie sont
s’expose à une récidive de l’endométriose. environ de 20 % à 5 ans.

Traité de Médecine Akos 9


3-1340 ¶ Endométriose génitale et extragénitale

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L. Remoue, Médecin généraliste.


Angers, France.
R. Fauvet, Praticien hospitalier (fauvet.raffaele@chu-amiens.fr).
Service de Gynécologie Obstétrique, CHU Amiens, 124, rue Camille-Desmoulins, 80054 Amiens, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Remoue L., Fauvet R. Endométriose génitale et extragénitale. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Traité de
Médecine Akos, 3-1340, 2007.

Disponibles sur www.emc-consulte.com


Arbres Iconographies Vidéos / Documents Information Informations Auto-
décisionnels supplémentaires Animations légaux au patient supplémentaires évaluations

Traité de Médecine Akos 11


3-1430

3-1430
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Examen prénuptial

MF Le Goaziou, S Figon

L a consultation prénuptiale est une consultation légalement obligatoire avant le mariage qui a pour objectif de
dépister les pathologies ou les facteurs de risque qui poseront problème en vue d’une éventuelle conception.
Elle comporte une recherche d’antécédents, de pathologies acquises, un examen clinique et des recherches
biologiques. Elle se conclut par un certificat signé et remis en mains propre au futur(e) marié(e).
Il serait certainement utile de placer cette consultation en préconceptionnelle pour les couples qui ne se marient pas.
© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : examen prénuptial, certificat prénuptial.


Maladies chroniques Par un examen clinique orienté
Introduction L’examen clinique sera le plus complet possible :
Cette consultation permet de conseiller la patiente
afin de régler les problèmes que pose une maladie cardiovasculaire, pulmonaire, abdominal, articulaire.
L’examen prénuptial est un examen obligatoire chronique avant une éventuelle conception ou au La bouche sera examinée à la recherche de
en vue du mariage. contraire afin de proposer une contraception efficace caries, la vision ainsi que l’audition seront
si la grossesse n’est pas désirée. C’est par exemple le rapidement vérifiées, le poids, la taille et la tension
cas pour l’épilepsie qui nécessiterait une consultation artérielle (TA) seront notées.


Obligations légales de l’examen

Ce certificat est établi en application de l’article 63


spécialisée (prescription de folates), ou bien le cas du
diabète et de l’hypertension artérielle (HTA) qui
doivent être parfaitement contrôlés avant toute
grossesse. Il en est de même pour les maladies telles
Pour les femmes, il faut s’assurer d’un suivi
gynécologique et le proposer s’il est inexistant (frottis
de dépistage, palpation des seins). Pour les hommes,
il sera nécessaire d’interroger sur les éventuels
du Code civil, conformément aux dispositions de que néphropathie chronique, lupus, affection problèmes et de faire un examen de l’appareil
l’article L.153 du Code de la santé publique et de cardiaque, hyperthyroïdie, qui doivent comporter un génital si nécessaire (une varicocèle peut orienter
l’article premier du décret n° 92-143 du 14 février traitement médicamenteux au long cours. vers une consultation spécialisée).
1992. Le modèle de ce certificat est fixé par arrêté Il faut penser aussi à rechercher des antécédents ‚ Prescrire les examens obligatoires
(du 7 mars 1997) (disponible CFES Cerfa obstétricaux pathologiques. et recommandés
n° 10345*01). Ce certificat ne peut être délivré qu’au
Pour la femme âgée de moins de 50 ans, sont
vu de résultats d’analyses ou d’examens dont la liste ‚ Réaliser une consultation de prévention obligatoires : le groupage sanguin A, B, O Rhésus, la
est fixée par voie réglementaire. générale recherche des anticorps irréguliers en cas de Rhésus
Une brochure d’éducation sanitaire doit être
négatif et dans les cas où il existe un risque
remise à chacun des futurs conjoints en même Par un entretien dirigé
d’allo-immunisation par suite d’une transfusion
temps que le certificat médical. – L’hygiène de vie est explorée par quelques antérieure, la sérologie de la rubéole en l’absence de
À l’occasion de l’examen prénuptial, après questions sur l’alimentation et l’activité sportive car preuve d’immunité et de la toxoplasmose.
information sur les risques de contamination, un test le début de la vie de couple modifie souvent le La sérologie de la syphilis n’est plus obligatoire.
de dépistage de l’infection par le virus de rythme de vie en particulier en supprimant le sport La sérologie VIH doit être proposée mais non
l’immunodéficience humaine (VIH) est proposé aux partiellement ou en totalité et occasionne des prises imposée et, s’il existe des facteurs de risques, la
futurs conjoints. de poids non négligeables. sérologie de l’hépatite C doit aussi être proposée.
– La recherche de prise de produits addictifs tels Pour le patient homme : la sérologie VIH est aussi


tabac, alcool, drogues permet d’évaluer le niveau de proposée ainsi que la sérologie de l’hépatite C s’il
Objectifs de la consultation dépendance et de donner le conseil minimal existe des facteurs de risque. Le groupage sanguin
prénuptiale (recommandation Anaes [1]). doit être fait si la femme a un groupe Rhésus négatif.
– Les vaccinations obligatoires (tétanos, polio) Pour les deux, il peut être opportun de profiter de
‚ Dépister les pathologies ou les facteurs seront vérifiées et les vaccinations facultatives seront cet examen pour contrôler une glycémie ou un
de risque qui poseront problème conseillées selon l’activité (hépatite B, bacille de cholestérol s’il y a des antécédents familiaux ou des
en vue d’une éventuelle conception Calmette et Guérin [BCG], etc). Maintenant que le facteurs de risques personnels.
service militaire a disparu, il est également important


Maladies génétiques d’insister pour les garçons comme pour les filles sur
La consultation pour examen prénuptial donne les rappels nécessaires. En pratique
une place importante à la recherche d’antécédents – En vue d’une grossesse, c’est le moment
familiaux ou personnels qui pourraient faire d’insister, si nécessaire, sur les méfaits du tabac, des
conseiller une consultation de conseil génétique drogues, de l’alcool et de donner une information ‚ Déroulé de la consultation
(mucoviscidose, myopathie, trisomie 21 pour les plus sur la prise d’acide folique avant la conception et En pratique, soit le médecin connaît les futurs
fréquentes). durant le premier trimestre [2]. conjoints, soit il ne les connaît pas.

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3-1430 - Examen prénuptial

Le plus souvent, le couple est bien connu du Il est indispensable de s’assurer que chaque Par exemple : prévention de la rubéole par le
médecin généraliste. Le médecin s’attache, dans ce conjoint souhaite la présence de l’autre en posant la vaccin, conseils pour éviter la toxoplasmose …
cas, à lister les points importants qui n’auraient pas question avant le début de la consultation. Il est important de ne donner le certificat signé
été mis en évidence lors des précédentes qu’après réception des résultats, car la responsa-
consultations. ‚ Brochure d’information : (disponible au bilité médicolégale du médecin est engagée.
Si ce sont de nouveaux patients, il doit réaliser un CFES : Cerfa n° 5044#01) Cet examen est souvent banalisé parce que les
entretien soigneux et un examen complet comme couples ont vécu maritalement ensemble, ou bien
Le médecin doit commenter la brochure
pour toute nouvelle consultation. parce que la patiente prend depuis longtemps une
d’information remise au couple. La plupart de temps,
contraception ou a déjà des enfants.
‚ Faut-il recevoir séparément cette brochure est donnée aux conjoints à la mairie
Il est dommage que seuls les futurs mariés en
ou ensemble ? en même temps que le certificat à remplir.
bénéficient. Ne faudrait-il pas le transformer en
Théoriquement, chaque membre du couple certificat préconceptionnel pour tout couple qui a un
‚ Certificat remis aux patients
devrait être reçu seul et c’est à lui de délivrer à son projet d’enfant ?
après contrôle des examens
conjoint ce qu’il souhaite dire. Le secret Cette consultation prénuptiale permet de faire le
professionnel est bien sûr opposable à chacun. Lorsque les résultats arrivent, il peut être point à un moment où le couple est plus réceptif à sa
En pratique, il est fréquent que les deux nécessaire de revoir le ou les membres du couple si santé. Elle mérite une attention toute particulière
partenaires consultent ensemble et ce, d’autant plus des résultats sont anormaux afin de donner les pour que les messages de prévention passent bien
facilement qu’ils sont connus du médecin. conseils appropriés. auprès du couple.

Le certificat prénuptial
Établi en application de l’article 63 du Code civil, conformément aux dispositions des articles L. 155 et L. 157 du Code de la santé
publique et du décret n° 78 396 du 17 mars 1978.
Je soussigné, docteur en médecine, certifie avoir :
Procédé à un examen clinique de .....................................................................................
Nom.....................................................................................................................................
Prénom................................................................................................................................
Pris connaissance des résultats d’un examen sérologique, datant de moins de trois mois, effectué en vue de détecter la syphilis.
Et, s’il s’agit d’une femme de moins de 50 ans, des résultats :
- des tests sérologiques respectifs de la rubéole et de la toxoplasmose datant de moins de trois mois (ces tests n’ont pas à être
effectués si les résultats des tests antérieurs apportent la preuve d’un état d’immunité) ;
- d’un examen de sang comportant la détermination des groupes sanguins A, B, O et Rhésus et, le cas échéant (notamment
antécédents de transfusion ou de grossesse, même interrompue), la recherche dans le sang d’anticorps irréguliers
antiérythrocytaires RAI.
Dans le cas où le résultat de ce dernier examen ouvre la possibilité d’une incompatibilité fœtomaternelle, l’étude des groupes
sanguins correspond aux anticorps trouvés chez la femme doit être effectuée chez le futur conjoint.
Fait par mes constatations à l’intéressé(e) ; si la future conjointe est de groupe Rhésus négatif, je l’ai informée de la nécessité de
recourir à une prévention d’immunisation Rhésus D par injection d’immunoglobulines anti-D dans les soixante-douze heures qui
suivent chaque accouchement d’un enfant Rhésus positif ou chaque interruption de grossesse.
À..............................le......................................................................................................
(cachet et signature)

Décret no 92-143 du 14 février 1992 relatif aux examens obligatoires prénuptial, pré- et postnatal
Le Premier ministre, sur le rapport du ministre d’État, ministre de l’Économie, des finances et du budget, du ministre des Affaires
sociales et de l’Intégration et du ministre de l’Agriculture et de la Forêt, vu les articles L. 153 et L. 154 du Code de la santé
publique ; vu l’article 63 du Code civil ; vu le Code de la Sécurité sociale, et notamment ses articles L. 331-1, L. 331-2, R. 534-1,
R. 534-2 et R. 534-4 ; vu le décret n° 62-840 du 19 juillet 1962 modifié, relatif à la protection maternelle et infantile ; vu l’avis du
Comité interministériel de coordination en matière de Sécurité sociale du 18 juin 1991 ; vu l’avis du conseil d’administration de la
Caisse nationale d’allocations familiales du 8 octobre 1991 ; vu l’avis du conseil d’administration de la Caisse nationale de
l’assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles du 14 octobre 1991 ; vu la demande
d’avis au conseil d’administration de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés en date du 30 août 1991 ;
Le Conseil d’État (section sociale) entendu,
Décrète :
Art. 1er.
Le médecin ne peut délivrer le certificat prénuptial prévu à l’article L.153 du Code de la santé publique qu’au vu du résultat pour
les femmes âgées de moins de cinquante ans :
a) des examens sérologiques de la rubéole et de la toxoplasmose qui sont obligatoirement effectués lors de l’examen prénuptial en
l’absence de documents écrits permettant de considérer l’immunité comme acquise ;
b) du groupe sanguin A, B, O Rhésus standard complété par une recherche d’anticorps irréguliers si le groupe sanguin ouvre une
possibilité d’immunisation et dans les cas où existe un risque d’allo-immunisation par suite d’une transfusion antérieure.

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Examen prénuptial - 3-1430

Le médecin communique à la personne examinée ses constatations ainsi que les résultats des examens effectués en application des
alinéas ci-dessus. Dans les cas graves, il doit faire cette communication par écrit. Lorsque les antécédents ou l’examen le
nécessitent, il oriente vers une consultation spécialisée ou un dépistage particulier.
Enfin, le médecin commente la brochure d’information dont le contenu est précisé par arrêté du ministre chargé de la Santé.
Art. 2.
Les examens médicaux obligatoires des femmes enceintes prévus à l’article L.154 du Code de la santé publique sont au nombre de
sept pour une grossesse évoluant jusqu’à son terme.
Le premier examen médical prénatal doit avoir lieu avant la fin du troisième mois de grossesse. Les autres examens doivent avoir
une périodicité mensuelle à partir du premier jour du quatrième mois et jusqu’à l’accouchement.
Art. 3.
Chaque examen doit comporter un examen clinique, une recherche de l’albuminurie et de la glycosurie.
De plus sont effectués :
1. lors du premier examen prénatal :
a) en cas de première grossesse, une détermination des groupes sanguins (A, B, O, phénotypes Rhésus complet et Kell) si la
patiente ne possède pas de carte de groupe sanguin complète (deux déterminations) ;
b) dans tous les cas, les dépistages de la syphilis, de la rubéole et de la toxoplasmose en l’absence de résultats écrits permettant de
considérer l’immunité comme acquise, ainsi que la recherche d’anticorps irréguliers, à l’exclusion des anticorps dirigés contre les
antigènes A et B; si la recherche est positive, l’identification et le titrage des anticorps sont obligatoires ;
2. au cours du quatrième examen prénatal (sixième mois de grossesse), un dépistage de l’antigène HBs, une numération
globulaire, et chez les femmes à Rhésus négatif ou précédemment transfusées, la recherche d’anticorps irréguliers, à l’exclusion
des anticorps dirigés contre les antigènes A et B; si la recherche est positive, l’identification et le titrage des anticorps sont
obligatoires ;
3. au cours du sixième ou du septième examen prénatal (huitième ou neuvième mois de grossesse), une deuxième détermination du
groupe sanguin A, B, O, Rhésus standard si nécessaire ;
4. au cours des sixième et septième examens prénatals (huitième et neuvième mois de grossesse), chez les femmes à Rhésus négatif
ou précédemment transfusées, la recherche d’anticorps irréguliers, à l’exclusion des anticorps dirigés contre les antigènes A et B ;
si la recherche est positive, l’identification et le titrage des anticorps sont obligatoires.
En outre, la sérologie toxoplasmique sera répétée chaque mois à partir du deuxième examen prénatal si l’immunité n’est pas
acquise.
Art. 4.
Un examen médical postnatal doit être obligatoirement effectué dans les huit semaines qui suivent l’accouchement.
Art. 5.
Au premier alinéa de l’article R.534-1 du Code de la Sécurité sociale, les mots : « quinze premières semaines de la grossesse »,
sont remplacés par les mots: « quatorze premières semaines de la grossesse ».
Art. 6.
L’article R.534-2 du Code de la Sécurité sociale est rédigé comme suit :
« Art. R.534-2. - La preuve que les six examens prénatals obligatoires autres que celui mentionné à l’article 534-1 du Code de la
Sécurité sociale ont été passés dans les délais fixés en application de l’article L.154 du Code de la santé publique résulte de la
production à l’organisme ou service dont relève l’allocataire, d’une attestation d’examen mentionnant la date de l’examen. »
Art. 7.
Dans l’article R.534-4 du Code de la sécurité sociale :
« Au premier alinéa, les mots : « article L.159 du Code de la santé publique » et « quinze premières semaines de la grossesse »,
sont remplacés par les mots : « article L.154 du Code de la santé publique» et « quatorze premières semaines de la grossesse » ;
Le deuxième alinéa est complété par la phrase suivante :
« Elle n’est toutefois pas réduite lorsque l’examen n’a pu être passé parce que la naissance survient avant ladite date limite. »
Le cinquième alinéa est abrogé.
Art. 8.
Les articles 2 à 7 du présent décret sont applicables aux examens et déclarations des femmes dont la date présumée de début de
grossesse est postérieure au premier jour du mois civil qui suit la publication dudit décret.
Art. 9.
Les articles 6-1, 6-2, 6-3 et l’article 7 du décret du 19 juillet 1962 modifié susvisé sont abrogés.
Art. 10.
Le ministre d’État, ministre de l’Économie, des Finances et du Budget, le ministre de l’Agriculture et de la Forêt, le ministre des
Affaires sociales et de l’Intégration, le ministre délégué au Budget, le ministre délégué à la Santé, le secrétaire d’État à la Famille,
aux Personnes Âgées et aux Rapatriés sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié
au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 14 février 1992.
Édith Cresson par le Premier ministre : le ministre des Affaires sociales et de l’Intégration, Jean-Louis Bianco, le ministre d’État,
ministre de l’Économie, des Finances et du Budget, Pierre Bérégovoy, le ministre de l’Agriculture et de la Forêt, Louis Mermaz, le
ministre délégué au Budget, Michel Charasse, le ministre délégué à la Santé, Bruno Durieux, le secrétaire d’État à la Famille, aux
Personnes âgées et aux Rapatriés, Laurent Cathala.

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3-1430 - Examen prénuptial

Marie-France Le Goaziou : Professeur associé de médecine générale.


Sophie Figon : Attaché d’enseignement.
Université Claude Bernard Lyon 1, 43, boulevard du 11-Novembre, 69622 Villeurbanne, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : MF Le Goaziou et S Figon. Examen prénuptial.
Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1430, 2003, 4 p

Références

[1] ANAES. Arrêt de la consommation de tabac. Conférence de consensus, 1999.

[2] Collectifs d’auteurs. Prévention du spina bifida, supplémenter en acide foli-


que dès avant la grossesse. Prescrire 2001 ; 220 : 600-611

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3-1310

Exploration d’un couple


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

consultant pour stérilité


H Fernandez

L es causes d’infertilité sont nombreuses, les façons de les prendre en charge également, en sachant qu’elles
intéressent à part égale l’homme et la femme. Si le praticien dispose d’un large éventail de solutions
thérapeutiques, il tentera d’en faire le meilleur usage, sans générer la iatrogénie et en gérant l’impatience des
couples.
© Elsevier, Paris.

■ ■
vite et le groupe des couples « encore à risque »,
Quelques définitions à rappeler c’est-à-dire n’ayant pas encore conçu, comporte de Bilan féminin d’infertilité
plus en plus de couples peu fertiles au fur et à
■ Un individu fécond est un individu qui a conçu mesure que le temps passe. Il est donc logique que le
et dont le contraire est infécond, que ceci soit risque de conception diminue mois après mois. ‚ Interrogatoire
volontaire ou involontaire. En France, la fécondabilité, qui reste une notion Il est, à l’évidence, la première étape du bilan
■ Un individu fertile est un individu apte à statistique à l’échelle d’une population, varie autour féminin d’infertilité, car il va pouvoir s’enquérir de
concevoir et dont le contraire est stérile, ce qui est d’une moyenne de 25 % par cycle. À partir l’histoire de la vie génitale et rechercher des
toujours involontaire. d’enquêtes réalisées sur une population générale, on pathologies ayant pu altérer la fonction de
Même si les causes de stérilité sont nombreuses, peut montrer qu’environ 10 % des couples ont une reproduction. Cependant, il aura fallu s’informer de
rarement le fait de la femme ou de l’homme fécondabilité réduite inférieure à 10 %. Ainsi, après la profession du couple, car celle-ci peut conditionner
exclusivement, mais le plus souvent dues à 1 an, la moitié de ces couples n’aura toujours pas la vie sexuelle en contribuant à la diminution de
l’association de causes survenant chez deux conçu. C’est ainsi que se détermine le groupe de l’exposition à la probabilité de grossesse et donc à
individus peu fertiles, c’est souvent la femme, seule, couples hypofertiles. Mais leur sort n’est pas augmenter l’hypofécondité. C’est le cas des couples
qui va consulter. désespéré. À la fin de la seconde année, trois sur dont les heures de travail ne concordent pas et/ou
Le délai séparant la première consultation quatre de ces couples auront conçu. dont les déplacements professionnels sont
d’infertilité et le désir d’avoir un enfant est très fréquents. De la même façon, l’âge du conjoint, la
Si l’on s’intéresse aux couples encore moins
variable : de quelques mois à quelques années. En durée de vie commune, la fréquence des rapports
fertiles, avec une fécondabilité inférieure à 5 %
fait, il n’existe pas de réelle définition de l’infertilité sexuels et la période du cycle à laquelle ils ont lieu
(représentant 2 % de la population), le taux de
devant amener à consulter pour établir un premier feront partie, au moment jugé le plus opportun par
succès après 1 an et 2 ans s’établit respectivement à
bilan. le médecin, de l’interrogatoire initial.
un tiers et à la moitié.
On voit donc, à partir de ces exemples, qu’une


‚ Histoire de la vie génitale
Quand faut-il parler absence de conception après 12 mois d’exposition
de stérilité ? aux risques de grossesse, ne devrait pas être Plusieurs questions sont systématiques : l’âge et la
considérée, dans un premier temps, comme un date des premières règles et le déroulement de la
La stérilité est un fait prouvé et acquis, alors que la indicateur de stérilité, mais plus comme un puberté, la régularité des cycles, la longueur des
fertilité n’est qu’un état de potentialité. À partir des indicateur d’hypofertilité qui peut justifier la mise en cycles, l’aspect des règles (existe-t-il des caillots ?). La
définitions de la stérilité, des indices ont été créés route d’un bilan, mais pas la mise en œuvre recherche d’un antécédent de grossesse permet de
afin d’unifier les langages. Le plus utilisé est la immédiate de traitements médicaux, sauf pathologie définir la stérilité primaire (jamais de grossesse) et la
fécondabilité, qui est la probabilité de concevoir à tubaire dûment identifiée. stérilité secondaire (antécédent de grossesse et/ou
chaque cycle menstruel. Deux autres indices sont Après la durée de l’infertilité, l’âge de la femme de fausse couche et/ou d’interruption volontaire de
proposés : reste le deuxième élément essentiel dans l’approche grossesse [IVG] et/ou de grossesse extra-utérine
– le premier est la probabilité de concevoir sur de l’infertilité. Cependant, mesurer l’effet exact de [GEU]).
une période plus longue, comme 1 ou 2 ans ; l’âge sur la fertilité apparaît difficile en raison du Une contraception a-t-elle déjà été utilisée : orale,
– le second est le délai nécessaire à concevoir nombre de facteurs associés qui viennent locale ou mécanique par stérilet ? Il est important de
(DNC). compliquer l’interprétation du rôle causal de l’âge noter si plusieurs contraceptions ont été utilisées et
© Elsevier, Paris

L’ensemble de ces indices varie d’un couple à dans la stérilité. La fécondité semble diminuer dès durant combien de temps. Il est en effet connu que
l’autre, et il est ainsi plus facile d’établir une 30 ans, et l’infertilité augmenter au-delà de 35 ans. Il la pose d’un dispositif intra-utérin chez une nulligeste
distribution sur l’ensemble d’une population. En effet, faudra donc tenir compte de la conjonction de ces augmente la probabilité de séquelles infectieuses.
la fécondabilité n’est pas identique pour tous les deux facteurs âge/durée d’infertilité pour au moins L’interrogatoire va rechercher la notion d’algies
couples. Les plus fertiles tentent de concevoir plus déterminer la rapidité du bilan féminin. pelviennes au moment des règles en précisant si

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3-1310 - Exploration d’un couple consultant pour stérilité

elles débutent avant, pendant ou après les règles, en Antécédents chirurgicaux à rechercher répartition des graisses, la pilosité et la présence
cherchant à quantifier ces douleurs dans leur d’acné pouvant évoquer un dérèglement hormonal
¶ Antécédent de plastie tubaire
intensité, en précisant les thérapeutiques qui les Il est important de demander et de retrouver le type hirsutisme.
contrôlent. compte rendu opératoire de manière à préciser s’il L’examen des seins est systématique, à la
L’interrogatoire va ensuite rechercher les s’agissait d’une adhésiolyse et si les adhérences recherche d’une galactorrhée pouvant témoigner
antécédents obstétricaux. En cas de grossesse, il faut étaient fines ou épaisses, s’il s’agissait d’une d’une hypersécrétion de prolactine.
préciser les modalités de l’accouchement (voie fimbrioplastie (reconstitution du pavillon de la La palpation de la thyroïde peut retrouver une
naturelle ou césarienne), les complications possibles trompe) ou d’une néosalpingostomie (création d’un augmentation de son volume.
du postpartum immédiat (hémorragie de la nouveau pavillon à partir d’une trompe dont L’examen gynécologique débute par l’inspection
délivrance, endométrite du postpartum) et le devenir l’extrémité était bouchée). On recherchera de la vulve et de l’hymen, à la recherche d’une
des enfants (état, séquelle, maladie génétique). En également la notion d’anastomose tubaire, soit malformation congénitale du vagin, essentiellement
cas d’antécédent d’IVG, il faut préciser le terme après reperméabilisation d’une trompe préala- en cas d’aménorrhée primaire. L’examen au
auquel elle a été pratiquée, la méthode (aspiration blement stérilisée, soit après pathologie tubaire. spéculum permet d’examiner les parois du vagin à la
ou médicale) et les complications éventuelles, en L’existence d’une endométriose péritonéale est à recherche d’une cloison et d’examiner le col utérin et
particulier infectieuses. En cas d’antécédent de fausse rechercher et, en cas d’antécédent de cœlioscopie, le parfois de découvrir deux cols évoquant une
couche, il faut préciser le nombre, l’écart séparant score AFS (American Fertility Society) doit être malformation utérine. Dans ce cas, une échographie
plusieurs fausses couches, le mode d’expulsion reconstitué afin de pouvoir classer l’endométriose rénale doit rechercher une malformation associée.
(naturel, aspiration ou curetage). dans les stades I, II, III ou IV. Cette classification est Le col peut être agglutiné ou sténosé suite à un
Pour les GEU, il faut préciser les modalités du réalisée par le chirurgien, au décours du traitement, traumatisme type électrocoagulation, voire à une
traitement (laparotomie, cœlioscopie avec dans les en fonction de l’étendue de la localisation de chirurgie du col pour lésions précancéreuses type
deux cas, traitement conservateur ou salpingec- l’endométriose. conisation. Dans ce cas, il est important de connaître
tomie, ou traitement médical par du méthotrexate). La chirurgie tubaire peut également concerner un la technique opératoire, à savoir exérèse à l’anse,
Quelle que soit la preuve témoignant de la antécédent de GEU avec traitement conservateur ou conisation au laser ou conisation au bistouri à lame
fécondabilité d’une femme (grossesse, IVG, fausse quelle que soit l’indication, un antécédent de froide associée à une réparation ayant fait pratiquer
couche, GEU), il faut préciser si la grossesse a été salpingectomie, voire un traitement médical par le des points de Sturmdoff qui augmentent le risque
obtenue avec le même partenaire que celui impliqué méthotrexate. d’hyposécrétion de glaire cervicale. L’examen
à la consultation de stérilité, ou avec un partenaire clinique pratiqué en milieu de cycle permet
différent. Si c’est avec le même partenaire, il faudra ¶ Antécédent de kyste de l’ovaire d’examiner la glaire cervicale qui est un témoin
préciser au bout de quel délai avait été obtenue cette Il est important de connaître la technique indirect, mais de qualité, de l’ovulation. On peut, lors
grossesse, ou si des traitements avaient été opératoire (laparotomie ou cœlioscopie, cette de cet examen clinique, tester la perméabilité
nécessaires pour obtenir cette grossesse. dernière étant considérée comme moins cervicale à l’aide d’un cathéter d’insémination ou
adhésiogène) et l’étiologie du kyste de l’ovaire d’une bougie en gomme. L’examen clinique permet
Antécédents infectieux à rechercher (séreux, mucineux, dermoïde, endométriosique). de pratiquer, de manière systématique, des frottis
Les sérologies de rubéole, de toxoplasmose, ¶ Antécédent d’appendicectomie cervicovaginaux, voire, dans le même temps, de
d’hépatite B seront demandées. En cas d’absence Il faut rechercher l’âge auquel a été pratiquée faire une recherche d’infection pelvienne par la
d’atteinte rubéolique et d’une sérologie négative de cette intervention car, en cas d’appendicite chez une pratique de prélèvements bactériologiques à la
l’hépatite B, une vaccination sera conseillée en femme ayant déjà des rapports sexuels, il faut recherche de Chlamydia trachomatis ou de
même temps que le bilan d’infertilité sera pratiqué. toujours s’interroger si une salpingite n’a pas été mycoplasme au niveau de l’endocol et de l’urètre.
Une sérologie du virus de l’immunodéficience ignorée. L’association d’une appendicite avec une Le toucher vaginal permettra enfin de palper
humaine et de l’hépatite C est fréquemment pelvipéritonite est un événement souvent péjoratif l’utérus à la recherche de modifications évoquant
demandée, surtout si une exploration chirurgicale pour le risque d’adhérences pelviennes. des fibromes, de rechercher une masse annexielle et
est proposée ou une méthode de procréation L’interrogatoire doit rechercher l’existence de de rechercher l’existence d’une douleur provoquée.
médicalement assistée envisagée. maladie endocrinienne, et en particulier de diabète,
La recherche d’antécédent de maladie ‚ Examens complémentaires
de tumeur hypophysaire, de trouble thyroïdien
sexuellement transmissible fait partie de tout (maladie de Basedow, hypothyroïdie, thyroïdite Ils ont pour but de faire le diagnostic du type de
interrogatoire. Un antécédent de salpingite aiguë d’Hashimoto), de prise de médicaments comme les stérilité. Ils seront présentés du plus simple au plus
n’est retrouvé que dans 20 à 30 % des cas de stérilité antidépresseurs qui peuvent modifier l’ovulation, de compliqué, certains étant systématiques, d’autres
tubaire. Chez deux tiers des patientes, on ne retrouve prise de toxiques (morphine, héroïne, cocaïne ou indiqués en fonction d’une situation spécifique
aucun antécédent d’infection pelvienne ou tout au dérivés) qui peut être responsable d’aménorrhée, et amenée par le résultat des premiers examens.
plus une histoire de douleurs pelviennes frustres et bien évidemment de prise de Distilbènet chez la
anciennes qui n’ont jamais conduit au diagnostic de mère de la patiente pour celles nées entre 1955 et Courbe de température
salpingite. L’infection à Chlamydia trachomatis 1977. C’est un examen facile et indispensable dont la
représentant plus de 50 % des causes d’altérations L’interrogatoire doit également rechercher une réalisation impose de prendre la température rectale
tubaires, il est légitime de demander une sérologie à anorexie mentale, une pratique sportive de tous les matins, au réveil, avant le lever. La
Chlamydia ayant pour seul but de retrouver un compétition, qui peuvent également être température est ensuite reportée sur un graphique
contage antérieur. Il est admis qu’une sérologie est responsables de troubles de l’ovulation. Enfin, et plus préétabli où tous les événements survenus au cours
positive en immunoglobulines G (IgG) au-delà de exceptionnellement, l’histoire clinique peut retrouver du cycle (saignement, maladie) ou oubli de la prise,
1/64e. En aucun cas le taux de positivité de la la notion d’un antécédent carcinologique avec seront reportés. Le principe de la courbe de
sérologie ne permettra de dater l’infection pelvienne. radiothérapie ou chimiothérapie ayant pu altérer la température est basé sur l’augmentation thermique
L’interrogatoire peut cependant retrouver la notion fonction ovarienne. due à la sécrétion de progestérone par le corps jaune
de Chlamydia trachomatis dans le col, dans l’urètre ou postovulatoire. La progestérone ainsi sécrétée à
chez les partenaires, tout comme la notion ‚ Examen clinique partir de l’ovulation maintiendra la température à ce
d’antécédent d’infection à Neisseria gonorrhoeae dont Le poids est le premier élément relevé : un poids niveau pour former un plateau thermique qui dure
la fréquence diminue ou d’infection à Mycoplasma trop faible (moins de 45 kg), ou une obésité (plus 12 à 14 jours en l’absence de grossesse. La détection
hominis dont la pathogénie semble supérieure à de 85 kg) sont responsables de troubles de de l’ovulation n’est possible que a posteriori, car
Ureaplasma urealyticum. l’ovulation. L’analyse de la morphologie apprécie la l’ovulation se produit au point le plus bas (nadir),

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Exploration d’un couple consultant pour stérilité - 3-1310

habituellement la veille de la montée thermique. pratique d’inséminations intra-utérines ou pouvant les annexes. L’échographie associe un temps
Ainsi, la courbe thermique confirme l’existence d’une indiquer de rechercher l’existence d’anticorps abdominal, où il est nécessaire d’avoir la vessie
ovulation, fixe la date de réalisation de certains antispermatozoïdes, d’autant plus si le spermo- pleine afin de rendre accessibles les organes
examens, détermine grossièrement la période fertile gramme a retrouvé une agglutination des génitaux aux ultrasons, en les dégageant de leur
et peut diagnostiquer une grossesse lorsque le spermatozoïdes. situation en arrière des os du bassin, complété par
plateau thermique se prolonge au-delà du un temps vaginal, après évacuation vésicale.
quinzième jour. Habituellement deux, voire trois Dosages hormonaux L’échographie permet de préciser la taille, la forme,
cycles au maximum sont indispensables. Ils ont pour but d’explorer la fonction hormonale l’épaisseur de l’utérus ainsi que l’épaisseur de
de la femme d’autant plus si les cycles sont l’endomètre tapissant la cavité utérine, en précisant
Test postcoïtal ou test de Huhner à chaque fois si cette épaisseur concerne une ou
irréguliers, voire absents, et si la courbe de
Il consiste à étudier la relation entre les température est jugée anormale. Ils sont deux faces.
spermatozoïdes et la glaire cervicale, en appréciant actuellement tous pratiqués sur des prélèvements L’échographie permet ainsi de diagnostiquer les
la qualité de la glaire et le nombre de spermato- sanguins et non plus urinaires. fibromes utérins en localisant leur situation, de
zoïdes par champ microscopique. Le test de Huhner Le dosage de la FSH (follicle stimulating hormone) rechercher les kystes ovariens et de participer au
doit être programmé en fonction du cycle dans la plasmatique permet de déterminer si une diagnostic d’ovaire micropolykystique où l’on
période préovulatoire. Pour faire un test dans de aménorrhée ou un trouble de l’ovulation sont dus à découvre en périphérie d’un ovaire augmenté de
bonnes conditions, il faut avoir un rapport sexuel 3 à un « épuisement » ovarien type ménopause précoce volume, au moins six à huit follicules mesurant
5 heures avant le test afin d’apprécier la mobilité des (FSH élevée au moins supérieure à 20 mUI/mL) ou 6 mm. L’échographie est par ailleurs indispensable
spermatozoïdes, ou avoir un rapport sexuel 12 à une atteinte hypophysaire (FSH basse). dans la surveillance des cycles de stimulation, en
18 heures avant le test pour apprécier la mobilité et mesurant régulièrement la taille et le nombre des
Le dosage de la LH (luteinizing hormone), s’il est
la survie des spermatozoïdes. Il est préférable de follicules ovariens. L’échographie est également
élevé, évoque une maladie des ovaires
faire précéder ce test d’une abstinence de 3 jours et couplée à l’étude doppler sur les vaisseaux
polykystiques avec rareté ou absence d’ovulation,
de ne pas faire de toilette vaginale après le rapport utéro-ovariens. Cependant, son rôle exact,
source de spanioménorrhée ou d’aménorrhée.
sexuel. La glaire est prélevée à l’aide d’une pipette diagnostique et thérapeutique, reste encore à
Le dosage de la prolactine est systématique, à la
Pasteur à l’orifice du col. Elle est déposée sur une préciser. L’échographie peut également être
recherche d’une hypersécrétion pouvant témoigner
lame et examinée au microscope à grossissement complétée par l’injection de produit de contraste
d’un adénome à prolactine. En cas de taux élevé,
200. Le test est considéré comme positif lorsqu’il intra-utérin qui a pour but de mieux préciser des
une imagerie par résonance magnétique ou un
existe au moins cinq spermatozoïdes mobiles par structures intracavitaires (polype, fibrome), ainsi que
scanner de la selle turcique sont réalisés.
champ microscopique. Parallèlement, la glaire est la perméabilité tubaire. Cet examen échographique
Le dosage des œstrogènes, et en particulier de
examinée pour apprécier sa filance entre les deux reste cependant encore peu utilisé en routine.
l’œstradiol (E2), témoigne de la qualité de la sécrétion
branches d’une pince (normale 8 à 10 cm avant de
ovarienne. Hystérosalpingographie
se rompre), son abondance et sa clarté. En se
Le dosage de la progestérone en deuxième partie
déposant sur une lame, elle se cristallise et prend un Cet examen est indispensable à tout bilan de
de cycle témoigne de la sécrétion et de la
aspect classique de « feuille de fougère ». L’ouverture stérilité. Elle se pratique en première partie de cycle,
fonctionnalité du corps jaune. La variabilité de sa
du col, l’abondance de la glaire, la filance, la en l’absence d’infection du col et en l’absence de
sécrétion peut imposer un prélèvement poolé
cristallisation sont cotées de 1 à 3 pour donner le saignement. Cinq clichés radiologiques sont
comportant trois prélèvements consécutifs réunis
score d’Insler qui doit être au moins égal à 8 pour habituellement nécessaires. L’observation de la
dans un même tube.
être satisfaisant. En cas de test de Huhner négatif par cavité utérine permet de diagnostiquer une
Le dosage des androgènes : chez les femmes, ils
manque de glaire, il faut le refaire après un malformation utérine, une pathologie de la cavité
sont sécrétés par l’ovaire et la surrénale. Il est
traitement augmentant la sécrétion de glaire. Pour ce utérine (synéchie, polype, fibrome), une obturation
habituel de doser essentiellement la testostérone et,
faire, on peut utiliser soit des pilules séquentielles, tubaire soit cornuale, soit distale et, dans ce cas, il
en cas d’anomalie, on demandera un dosage
soit des œstrogènes seuls à partir du huitième jour, faudra préciser la qualité de la muqueuse en
d’androstènedione, de la delta-4-androstènedione et
soit utiliser une stimulation par l’hormone recherchant l’existence de plis. Une endométriose ou
du sulfate de déshydroandrostènedione.
ménopausique gonadotrophine (hMG). L’optimali- une adénomyose peuvent être évoquées par
sation de la glaire a ainsi un double intérêt, Les dosages thyroïdiens de la TSH (thyroid l’existence d’images d’addition classiquement en
interpréter la pénétration dans la glaire des stimulating hormone) et de T3-T4 peuvent être « boule de gui ». Lorsque l’hystérographie montre
spermatozoïdes et prévoir l’action sur le col de proposés en cas de normalité des dosages une obturation à la corne, il est légitime de proposer
certains traitements. En cas de test de Huhner négatif hypothalomohypophysaires et ovariens, associée à une hystérographie sélective qui a pour but de
malgré l’optimalisation de la glaire et un un trouble de l’ovulation. mettre un cathéter intra-utérin préformé qui va se
spermogramme normal, on peut être amené à Il est évident que pour optimiser l’interprétation mettre au niveau de l’ostium tubaire et permettre de
demander un test de pénétration croisée afin de des dosages hormonaux, il faudra les pratiquer en faire une injection dirigée et de retrouver une
déterminer la part de responsabilité entre l’homme fonction de l’information désirée à un moment perméabilité tubaire distale dans 70 % des cas.
et la femme. spécifique du cycle. Idéalement, le dosage de FSH, de
LH et de l’œstradiol est fait le troisième ou le Hystéroscopie
Test de pénétration croisée quatrième jour du cycle, dans un laboratoire qui doit C’est l’exploration endoscopique de la cavité
Il est réalisé au laboratoire dans les indications être considéré comme référence. En cas de utérine par une fibre optique introduite par l’orifice
préalablement vues. Il ne sera en aucune façon monitorage de l’ovulation, un dosage de LH et cervical. Elle se pratique en première partie de cycle,
réalisé systématiquement. Le sperme est recueilli par d’œstradiol sera réalisé vers le treizième ou en l’absence d’infection cervicale. Elle ne nécessite
masturbation et la glaire prélevée juste avant quatorzième jour du cycle, ou en fonction de l’aspect aucune anesthésie et est pratiquée en consultation
l’ovulation. La glaire de la patiente est mise en échographique du follicule. Le dosage de la au cabinet du médecin. La distension de la cavité
présence de spermatozoïdes du partenaire et de progestérone sera pratiqué habituellement entre le utérine est réalisée par l’insufflation de gaz
spermatozoïdes témoins, tandis que les vingt et unième et le vingt-deuxième jour du cycle. carbonique. L’hystéroscopie permet d’explorer les
spermatozoïdes du partenaire sont étudiés dans une glandes du col utérin et le trajet du col, pouvant
glaire témoin. En cas de test de pénétration croisée Échographie guider ultérieurement une insémination. Une
négatif, il existe une confirmation d’une C’est un examen simple, indolore, que l’on peut hystérométrie est pratiquée dans le même temps
incompatibilité glaire/sperme pouvant indiquer la facilement répéter et qui permet d’étudier l’utérus et opératoire.

3
3-1310 - Exploration d’un couple consultant pour stérilité

Elle permet d’examiner la muqueuse utérine et de primaire et en cas d’indication de don de gamètes Kartagener. Dans ce cas, il existe une fréquente
pratiquer des biopsies en cas d’hyperplasie, de ou d’insémination intracytoplasmique du sperme. Le association avec une altération de la mobilité des
polype ou d’aspect de congestion faisant évoquer caryotype se pratique à partir d’une simple prise de spermatozoïdes.
une infection. sang. Le résultat est obtenu en 8 ou 15 jours. Il faut
noter une incidence d’anomalies chromosomiques
¶ Antécédents chirurgicaux et traumatiques
L’hystéroscopie permet d’examiner les orifices
Il s’agit surtout des interventions sur l’appareil
tubaires au niveau de la jonction entre la cavité tout venant proche de 4 %. En cas de fausses
génital et le petit bassin.
utérine et la portion interstitielle de la trompe. Le couches à répétition, outre les bilans morpholo-
giques déjà cités, il faudra rechercher des Cryptorchidie testiculaire uni- ou bilatérale
passage du CO2 dans la cavité abdominale peut être
pathologies auto-immunes avec dosages des (testicule non descendu dans les bourses). Il faut
à l’origine de douleurs abdominales, voire de
facteurs antinucléaires, des anticorps anticardioli- préciser l’âge de l’opération ou à quel âge les
scapulalgies par irritation diaphragmatique.
pines, la recherche d’un anticoagulant circulant. La testicules sont descendus spontanément.
L’hystéroscopie précise également les images
intracavitaires évoquées à l’hystérographie et/ou à présence de ces anticorps est de cause inconnue. Cure de hernie inguinale avec le risque de lésion
l’échographie. Dans le même temps, elle peut traiter du canal déférent.
une synéchie de petit volume qui cède par pression Biopsie de l’endomètre Hypospadias (malformation de l’ouverture de
de l’extrémité biseautée de l’hystéroscope. l’urètre sur la verge).
Elle a pour but de juger la qualité de l’ovulation en
L’hystéroscopie doit enfin précéder, de manière appréciant le développement de l’endomètre lié à Chirurgie du col vésical pouvant être responsable
systématique, toute procréation médicalement l’imprégnation œstroprogestative. Elle se pratique à d’éjaculation rétrograde.
assistée. L’hystéroscopie est au mieux réalisée entre l’aide d’une pipette souple ou d’une canule rigide, Chirurgie du testicule secondaire à une torsion
le dixième et le quatorzième jour du cycle. suivant le même principe que l’hystérométrie. aiguë du testicule ou à un traumatisme direct. Ce
Habituellement, la biopsie d’endomètre est type de pathologie est une urgence chirurgicale
Cœlioscopie pratiquée entre le vingtième et le vingt-deuxième devant être opérée dans les 4 à 6 heures suivant le
Elle représente l’examen clé du bilan jour du cycle. Son intérêt reste toujours très début des symptômes.
anatomique pelvien. Cette intervention, souvent controversé pour déterminer la qualité de la fenêtre Troubles acquis de l’érection ou de l’éjaculation
nécessaire, soit en raison de la découverte d’une d’implantation. d’origine neurologique liés aux paraplégies
anomalie sur l’hystérographie, soit, au contraire, en secondaires aux accidents de la voie publique, ou
raison de la négativité du bilan anatomique de aux séquelles chirurgicales des curages


stérilité, n’est cependant pas dénuée de risques. En ganglionnaires pour cancer du testicule, ou à la
effet, un accident sur 1 000 cœlioscopies peut se
Bilan masculin d’infertilité chirurgie du rectum ou de la prostate.
produire, pouvant nécessiter une laparotomie. La
¶ Recherche d’une maladie cancéreuse
cœlioscopie permet d’examiner l’utérus, son
‚ Examen de l’homme Une radiothérapie à partir de 6 à 10 grays sur le
volume, sa taille et sa couleur, d’examiner les
testicule est responsable d’une azoospermie
ovaires en précisant leur situation, leur forme, Interrogatoire définitive (disparition des spermatozoïdes).
l’existence de kyste(s) ou d’adhérences. Elle permet
¶ Profession La chimiothérapie, et en particulier les agents
d’observer les trompes en distinguant celle qui
Elle conditionne la vie sexuelle du couple en alkylants (cyclophosphamide), ou la procarbazine,
présente une obturation (hydrosalpinx) ou une
contribuant à l’hypofécondité. C’est le cas pour les utilisée dans le traitement de la maladie de Hodgkin,
distension avec sténose proximale prépavillonaire
hommes fréquemment en déplacement (exemple : sont responsables d’azoospermie définitive.
(phimosis), l’aspect de la paroi tubaire, souple ou
cadre, chauffeur, travailleur sur pétroliers...). Dans tous les cas où l’homme est exposé à ces
épais, libre ou englobé dans des adhérences, et
D’autres métiers peuvent orienter vers une traitements, un recueil de sperme avant traitement
d’explorer le péritoine et la cavité abdominale. Lors
étiologie de l’infertilité et en particulier les en vue d’une congélation est nécessaire.
de la cœlioscopie, on pratique une injection par le
professions qui sont soumises à une élévation
col de bleu de méthylène pour visualiser le passage ¶ Vie sexuelle
du colorant à travers les trompes. Ceci permet de thermique du scrotum comme les boulangers, les
Il est essentiel de rechercher l’absence d’érection,
localiser le niveau d’une éventuelle obturation : chauffeurs routiers, ou les agriculteurs soumis au
un trouble de l’éjaculation, la pauvreté des rapports,
proximale à la corne, médioampullaire ou distale. contact de produits insecticides.
la notion de rapports douloureux.
Dans le même temps que la cœlioscopie, on peut ¶ Antécédents infectieux
pratiquer une salpingoscopie. Elle se réalise en L’infection peut être d’origine bactérienne et être Examen clinique
introduisant un tube optique par le pavillon et en responsable de prostatite (inflammation de la Il faut noter la taille et le poids. L’obésité est
explorant de proche en proche l’ensemble de la prostate, aiguë ou chronique), d’urétrite souvent associée à une hypofécondité.
muqueuse. (inflammation de l’urètre). Elle est en rapport avec
L’examen debout recherche la présence d’une
Si la cœlioscopie permet de faire le diagnostic des des germes sexuellement transmissibles :
varicocèle, varice de la veine spermatique, plus
stérilités mécaniques, elle permet de pratiquer dans gonocoque, Chlamydia trachomatis, mycoplasmes
fréquente à gauche : il s’agit d’une dilatation
le même temps un geste thérapeutique. On peut (Ureaplasma urealyticum ou Mycoplasma hominis).
veineuse au-dessus du testicule et en dehors du
ainsi enlever les adhérences (adhésiolyse), traiter un La tuberculose et la syphilis sont devenues plus cordon.
kyste de l’ovaire soit par kystectomie intrapérito- rares.
néale, soit par kystectomie transpariétale, pratiquer L’examen du sujet allongé fait disparaître le
une plastie tubaire après ouverture de l’extrémité ¶ Antécédents médicaux varicocèle. Il faut palper les testicules en précisant :
distale de la trompe au laser, au bistouri bipolaire ou Endocriniens : recherche d’un diabète, d’une leur position, leur volume, leur consistance. On
au ciseau à lame froide. Elle permet de détruire les pathologie thyroïdienne, d’une gynécomastie recherche une hydrocèle qui est un épanchement
lésions d’endométriose grâce au laser ou à la (développement des seins), ou d’une maladie des liquidien autour du testicule. On palpe l’épididyme à
coagulation bipolaire. surrénales avec hypersécrétion de cortisol. la recherche d’un noyau induré. Le canal déférent est
Néphrologiques : recherche d’une insuffisance palpé dans le cordon.
‚ Autres explorations du couple infertile rénale, a fortiori si le patient est en hémodialyse. La taille de la verge et la position du méat urétral
Pneumologiques : recherche d’une bronchite (hypospadias) sont recherchés. L’aspect général du
Caryotype chronique qui, associée à une sinusite chronique et à scrotum est noté.
Il est réalisé en cas de fausses couches à l’inversion des organes dans le sens gauche-droite Les orifices herniaires sont examinés à la
répétition, d’anomalies à l’origine d’une aménorrhée (situs inversus), représente le syndrome de recherche d’une hernie inguinale.

4
Exploration d’un couple consultant pour stérilité - 3-1310

L’examen général recherche une gynécomastie, nombre de spermatozoïdes ; jaunâtre, il évoque une En cas de spermoculture positive, les germes
des troubles de l’olfaction (disparition de l’odorat) infection ; hémorragique, il évoque une retrouvés sont soumis à un antibiogramme pour
pouvant traduire une anomalie hypothalamohypo- hémospermie ; déterminer l’antibiotique efficace contre le germe
physaire, des troubles thyroïdiens (hyper- ou retrouvé. Le temps moyen de traitement est de
– le pH : il est à l’émission alcalin, entre 7, 6
hypothyroïdie). 10 jours.
et 7, 9.
La pilosité (visage, pubis, aisselles), l’aspect de la En cas de récidive d’infection du sperme, il faut
peau, la tonalité de la voix, la répartition des masses La concentration en spermatozoïdes est évaluée rechercher une infection chronique, surtout au
musculaires sont notés. par millilitres d’éjaculat, elle est normalement niveau de la prostate (prostatite).
comprise entre 25 et 250 M.
Examens complémentaires ¶ Examens chimiques
En dessous, on définit l’azoospermie (absence de La biochimie du sperme permet de doser des
¶ Spermogramme
Le mode de recueil : le sperme doit être recueilli sperme) et l’oligospermie qui se répartit en très marqueurs témoins de la fonction des organes qui
après une durée d’abstinence ni trop longue (risque sévère (moins de 5 M/mL), sévère (entre 5 et participent à l’élaboration de l’éjaculat.
d’abaisser la mobilité), ni trop courte (risque de 10 M/mL) et modérée (entre 10 et 25 M/mL). – Le fructose traduit la qualité de sécrétion des
réduire le volume et la concentration en Au-dessus de 250 M/mL, on définit la vésicules séminales.
spermatozoïdes de l’éjaculat). Idéalement, le délai polyzoospermie. – Le citrate et/ou les phosphatases acides
d’abstinence est de 3 à 5 jours. mesurent la sécrétion de la prostate.
Le recueil se fait par masturbation au laboratoire La numération des cellules rondes : au-delà de – La carnitine libre ou l’alphaglucosidase détecte
de manière à obtenir l’éjaculat complet. 10 % du nombre des spermatozoïdes, il faut le fonctionnement de l’épididyme.
Avant le recueil, une toilette locale est suspecter une infection. Les cellules rondes sont – La transferrine reflète l’activité des cellules de
recommandée, et l’éjaculat est émis dans un constituées de spermatogonies et de polynucléaires. Sertoli.
réceptacle stérile. La mobilité s’étudie par l’examen direct après la Les chiffres normaux de ces constituants
Les constantes du spermogramme sont très liquéfaction spontanée. biochimiques sont compris dans une zone très large
variables, et en cas d’anomalie, d’autres et dépendent du laboratoire. La détermination de
spermogrammes sont nécessaires pour les Elle se lit après 30 minutes ou 1 heure, et à la
ces dosages est utile en cas d’azoospermie ou
confirmer. Un recueil fractionné est parfois réalisé quatrième heure. Les résultats s’expriment en
d’oligozoospermie très sévère, afin de rechercher le
afin d’analyser plus précisément la première partie pourcentage de spermatozoïdes mobiles.
niveau de l’occlusion le long du tractus génital.
de l’éjaculat, plus riche en spermatozoïdes. La mobilité normale à la première heure est
Le volume : c’est le reflet de la sécrétion de la ¶ Dosages hormonaux
comprise entre 40 et 60 %. Leur apport diagnostique est faible car ils ne
prostate et des vésicules séminales. Le volume
normal est de 4 ± 2 mL. Chez l’homme fécond, le La motilité caractérise la qualité de la mobilité. Elle reflètent que très mal la situation hormonale
volume augmente de 0,3 mL par jour d’abstinence, permet de définir si le spermatozoïde a une mobilité intratesticulaire. En effet, les régulations
avec un plateau au cinquième jour. normale, diminuée ou s’il est fléchant. intragonadiques (dans le testicule) semblent
On définit : prévalantes sur les mécanismes régulateurs centraux
La vitalité caractérise le nombre des spermato- et périphériques.
– l’aspermie : 0 à 0,5 mL ;
zoïdes vivants, quelle que soit la mobilité. La
– l’hypospermie : 0,5 à 2 mL ; La FSH : son taux de base normal est situé entre
normale est proche de 80 %.
– l’hyperspermie : plus de 6 mL. 3 et 10 UI/L.
En l’absence d’émission de sperme (moins de 2 % L’examen direct permet d’observer la présence La FSH agit essentiellement sur la cellule de
des cas), il faut rechercher : d’autoagglutinats. Ils traduisent l’agglutination de Sertoli.
■ une éjaculation rétrograde : il faut faire uriner spermatozoïdes entre eux, quelle que soit la zone de Le taux de FSH est corrélé à l’état fonctionnel de la
le patient après l’orgasme et rechercher les contact. spermatogenèse ; en cas d’atrophie de la lignée
spermatozoïdes dans l’examen direct des urines ou germinale avec disparition du stade spermatide, la
Leur présence doit faire rechercher des
après centrifugation ; FSH augmente, par défaut du rétrocontrôle négatif
autoanticorps antispermatozoïdes dans le sang et
■ les causes mécaniques : réalisé par l’inhibine.
dans le sperme. Il faut coupler cette découverte à un
– congénitale : maladie du col de la vessie ; L’élévation pathologique du taux de FSH est
test de Huhner et à un test de pénétration in vitro.
– acquise : après chirurgie de la prostate ou du toujours péjorative pour le pronostic de la fertilité.
col de la vessie ; L’interprétation du dosage doit tenir compte du
¶ Spermocytogramme
■ les causes neurologiques : mode de sécrétion pulsatile de la FSH.
– postchirurgicale ; C’est l’étude de la morphologie des
La LH : son taux de base est situé entre 4 et
– post-traumatisme médullaire ; spermatozoïdes.
15 UI/L.
■ les causes médicamenteuses :
On définit un sperme normal lorsque le nombre La LH agit au niveau de la cellule de Leydig qui
– neuroleptiques ;
de spermatozoïdes normaux est situé entre 40 % et seule possède des récepteurs spécifiques de cette
– antihypertenseurs centraux (exemple
60 %. hormone.
Catapressant) ;
Son dosage est couplé à celui de la FSH, et les
■ un diabète ; Au-dessous de ce chiffre, on définit la
■ une anéjaculation : informations apportées sont similaires à celles de la
tératospermie.
– d’origine nerveuse (traumatisme médullaire) ; FSH.
Les anomalies sont classées en atypie de la tête, La prolactine : son taux habituel est situé entre
– d’origine psychique (les plus fréquentes).
de la pièce intermédiaire ou du flagelle. 3 et 15 ng/mL.
Les caractéristiques physiques et chimiques du
sperme sont : La prolactine influence la fonction testiculaire par
¶ Spermoculture son action directe sur la cellule de Leydig, en
– la viscosité : le sperme est visqueux à l’émission
et il se liquéfie normalement en 30 minutes à Elle est réalisée immédiatement après le recueil augmentant la réponse leydigienne à la stimulation
température ambiante. L’hypo- ou l’hyperviscosité stérile du sperme. Elle est soit systématique, avant par la LH.
peut entraîner une hypofertilité ; d’entreprendre une procréation médicalement Une hyperprolactinémie peut révéler un
– la couleur : le sperme est blanchâtre et opaque. assistée, soit indiquée en fonction de l’observation adénome hypophysaire et être responsable de
Trop clair, il peut évoquer une diminution du du spermogramme et du spermocytogramme. troubles sexuels.

5
3-1310 - Exploration d’un couple consultant pour stérilité

En cas d’hyperprolactinémie modérée spermatozoïdes à migrer dans certains milieux (B2, varicocèle qui a pu être évoquée cliniquement ou
fonctionnelle, l’interprétation pathologique est Percoll, Ficoll...). qui n’est peut-être que de découverte
difficile. L’étude du mouvement : l’observation en échographique.
L’inhibine B : c’est une hormone protéique microcinéma des spermatozoïdes étudie la vitesse L’échographie endorectale est plus indiquée
sécrétée par la cellule de Sertoli. Elle est émise dans de progression linéaire et l’ampleur des pour visualiser la prostate et les vésicules séminales
la tête de l’épididyme par le flux du Rete testis qui est mouvements de la tête des spermatozoïdes. dans le cadre d’une recherche d’infection génitale.
la confluence des tubes séminifères constituant la Les anomalies morphologiques des spermato- Elle peut également être indiquée en cas de
masse du testicule. L’inhibine est ensuite résorbée au zoïdes sont précisées par la microscopie électronique spermoculture régulièrement positive, à la recherche
niveau de la tête de l’épididyme où elle passe dans le et par des techniques de coloration (Talbot, bleu d’un foyer infectieux chronique.
plasma. d’aniline).
La testostérone : sa sécrétion est circadienne,
avec un taux minimal vers 19 heures et un plateau
maximal entre 7 et 10 heures le matin. La normale
est située entre 4 et 12 ng/mL.
¶ Examens échographiques
L’échographie scrotale va permettre de visualiser
la masse testiculaire, d’en situer la position et d’en

Conclusion

Au décours de l’exploration d’un couple infertile, il


mesurer le volume. Elle permet d’identifier sera possible de déterminer éventuellement une
¶ Autres tests l’épididyme et, à l’aide de l’examen doppler, de cause, dont il faudra tenir compte pour appliquer au
Les tests de migration étudient l’aptitude des mettre en évidence un reflux témoin d’une mieux une bonne stratégie thérapeutique.

Hervé Fernandez : Professeur des Universités, praticien hospitalier,


service de gynécologie-obstétrique, hôpital Antoine-Béclère, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92141 Clamart cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Hervé Fernandez. Exploration d’un couple consultant pour stérilité.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1310, 1999, 6 p

Références

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6
3-1320

3-1320
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Fausses couches à répétition

H Fernandez

L e terme fausses couches est préféré, car moins angoissant, au terme avortements spontanés à répétition. Il faut
savoir les définir, pour mieux les comprendre et mieux les prendre en charge, à défaut de pouvoir trouver un
traitement idéal.
Ce terme se définit par l’expulsion d’un embryon ou d’un fœtus, avant un âge gestationnel approximatif de 20
semaines, et ayant un poids inférieur à 500 g, suivant la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Il faut distinguer deux groupes de patientes : celles dont toutes les grossesses se terminent par une fausse couche, et
qui doivent être considérées comme « stériles d’enfant » ; celles qui ont déjà mené une grossesse à terme.
© Elsevier, Paris.


Incidence des fausses couches

Dans les grossesses cliniques, c’est-à-dire avec


Tableau I. – Risque de fausse couche.

Fausses couches primaires


2
15 %
3
38 %
4
60 %
retard de règles, le taux d’avortement précoce est Fausses couches secondaires 9% 9% 11 %
d’environ 15 %. Cependant, le taux d’arrêt de Une naissance vivante à une gestité quelconque 9% 9% 11 %
développement embryonnaire après l’implantation
est probablement trois à quatre fois plus élevé que le comprise entre 15 et 30 %. Toutes les anomalies
– les fausses couches survenant après une utérines peuvent être tenues comme responsables.
taux d’avortements cliniquement reconnus.
première naissance vivante (fausses couches
Dans les grossesses cliniques se terminant par La béance cervico-isthmique est également
secondaires) ;
une fausse couche, il est estimé que le taux invoquée comme cause de fausses couches à
– les fausses couches survenant à une grossesse répétition. Elle correspond à un manque de tonicité
d’avortement est de 60 % avant 8 semaines, de
quelconque encadrant une naissance vivante. de la partie anatomique située à la jonction entre le
25 % entre 9 et 18 semaines, et de 15 % après 19
La probabilité de fausses couches, en tenant col et le corps de l’utérus. Elle se diagnostique par
semaines de gestation.
compte de ces critères, est exprimée dans le l’histoire clinique (antécédent de fausse couche
tableau I. tardive avec rupture précoce de la poche des eaux et


Ces résultats confortent l’idée que les femmes naissance d’un fœtus vivant) et par l’examen
Définitions ayant eu une naissance vivante sont épidémiologi- clinique retrouvant un col spontanément perméable,
quement différentes de celles qui n’ont fait que des voire par l’hystérographie ou l’échographie
fausses couches spontanées. pratiquées par voie vaginale.
Les fausses couches à répétition sont définies par De toute façon, toutes les études montrent que
trois avortements spontanés consécutifs au moins. même après trois ou quatre fausses couches
‚ Causes infectieuses
Beaucoup de cliniciens, répondant à la demande successives, les chances d’avoir une grossesse Longtemps invoquées, les causes infectieuses ne
inquiète des patientes, admettent une définition normale sont situées entre 40 et 90 % et pas sont probablement responsables de fausses couches
moins stricte (deux avortements au moins). toujours différentes de ce que donne le hasard. que de manière anecdotique.
– Si l’on admet que 15 % est le taux
Il faut toujours garder à l’esprit ces chiffres pour ‚ Causes génétiques
d’avortement retrouvé dans les grossesses cliniques,
interpréter les résultats des hypothétiques Les anomalies chromosomiques ne sont pas une
le risque lié au hasard d’avoir deux, trois ou quatre
traitements visant à réduire l’incidence des fausses cause répandue de fausses couches à répétition,
fausses couches successives est respectivement de
couches spontanées. mais l’aneuploïdie (cellule sans chromosome) ou la
2,3 %, 0,34 % et 0,05 %.
polyploïdie (plus de 46 chromosomes par cellule)
– Si l’on admet que 50 % est le taux
sont si fréquentes dans les produits de fausses


d’avortement retrouvé après l’implantation, le risque
couches, que le hasard leur attribue probablement
lié au hasard, dans les mêmes conditions, est de Causes un facteur de causalité. Les anomalies chromoso-
25 %, 12,5 %, 6,25 %.
miques les plus fréquemment retrouvées (chez 4 %
L’observation de femmes ayant fait des fausses
Il faut toujours éviter de confondre cause et des couples consultant pour fausses couches à
couches spontanées successives permet de trouver
association, ce qui peut conduire à des répétition) sont les réarrangements parentaux
une potentialité de faire une troisième fausse couche
thérapeutiques inappropriées. L’âge de la patiente équilibrés (échange équilibré de deux portions de
située entre 17 et 35 % et une probabilité, en cas de
est probablement une des causes essentielles, chromosomes), transmis à l’embryon sous forme
trois ou plus antécédents de fausses couches, située
puisque l’incidence des fausses couches croît d’une anomalie déséquilibrée responsable de la
entre 25 et 46 %.
fausse couche.
© Elsevier, Paris

Cependant, il faut tenir compte des différentes parallèlement à l’âge.


définitions des fausses couches pour établir leurs ‚ Causes endocriniennes
risques de récidive à une grossesse ultérieure : ‚ Causes anatomiques L’association entre des anomalies de l’ovulation
– les fausses couches survenant à toutes les L’incidence des malformations utérines, (ovulation lente et/ou retardée) et des anomalies de
grossesses (fausses couches primaires) ; associées surtout aux fausses couches primaires, est la deuxième partie du cycle (insuffisance lutéale)

1
3-1320 - Fausses couches à répétition

avec les fausses couches à répétition ont été d’anticorps sera systématique dans le bilan d’une Si une cause est retrouvée, un traitement
rapportées et seraient retrouvées dans 20 à 60 % patiente consultant pour fausses couches à approprié sera effectué.
des cas. Les patientes présentant des ovaires répétition. Cependant, dans la majorité des cas, aucune
polykystiques ont un taux double de fausse couche. cause n’est retrouvée, ce qui est souvent plus
Les dosages hormonaux de base, pratiqués au ‚ Bilan de thrombose angoissant pour le couple.
troisième jour du cycle, permettent de mesurer la Si dans l’anamnèse des patientes on retrouve la
réserve ovarienne en cas d’indication d’assistance
médicale à la procréation. Il est actuellement
démontré qu’un taux de FSH (hormone folliculosti-
mulante) élevé, supérieur à 10 UI/mL et/ou un taux
notion de thrombose profonde inexpliquée, a fortiori
dans un contexte familial, il faudra faire une
recherche d’un déficit en protéine S, C et en
antithrombine III, ainsi que la recherche de mutation

Traitement

Aucun traitement, à ce jour, quand aucune cause


d’estradiol de base élevé (supérieur à 75 ng/mL), du facteur V et du facteur II Leiden. Les fausses n’est retrouvée, n’a montré son efficacité. Il a été
outre le fait que le taux de grossesse observé est très couches sont aussi associées à un déficit du facteur proposé un traitement par immunoglobulines, qui
faible, voire nul, expose, quand ces patientes sont de Hageman. pourrait avoir un rétrocontrôle négatif sur les cellules
enceintes, à un taux de fausse couche pouvant natural killer. Cependant les résultats sont
atteindre 80 à 90 %. Il devient intéressant de ‚ Facteurs psychologiques divergents. Des traitements par injection de
mesurer systématiquement le dosage de FSH, de Même si la douleur morale est constante chez les lymphocyte paternel ou de leucocyte de donneur
LH (hormone lutéostimulante) et d’estradiol, au couples qui vivent des fausses couches à répétition, ont également été effectués, et là aussi, les résultats
troisième jour du cycle, chez les femmes consultant cela n’implique pas que le stress psychologique soit restent contradictoires.
pour fausses couches. un facteur de causalité. Il faut cependant savoir Actuellement, il est proposé, bien qu’aucune
Les mauvais fonctionnements de la thyroïde ne écouter les couples et répondre à leur détresse. certitude quant à l’efficacité n’ait été démontrée, une
semblent pas être responsables de fausses couches. association d’aspirine à faible dose, de prednisone et
Le diabète insulinodépendant, bien traité, d’héparine à bas poids moléculaire. Ces traitements


n’augmente pas le risque de fausses couches, et il est ne peuvent être proposés que dans le cadre d’essais
peu probable que des fausses couches révèlent un Conduite à tenir thérapeutiques.
diabète non connu. En cas de fausses couches à répétition,
l’assistance médicale à la procréation n’a pas montré
‚ Causes médicamenteuses Même si l’exploration porte essentiellement sur la de meilleurs résultats.
et d’environnement femme (tableau II), le couple devra être vu En cas de nouvel échec, le soutien psychologique
ensemble, afin d’apporter les explications immédiat puis secondaire doit permettre d’expliquer,
La prise de Distilbènet chez les mères des
rassurantes. de conseiller et d’encourager ces couples.
patientes peut être tenue comme responsable de
fausses couches à répétition, par l’existence d’une
plus grande fréquence de malformations utérines. Tableau II. – Exploration clinique des fausses couches à répétition.
Le tabagisme et la consommation exagérée
Facteurs recherchés Diagnostic Traitement
d’alcool ont été incriminés, bien que l’augmentation
de risque soit faible. Cependant, ce type d’exposition Anomalies anatomiques
est tellement répandu qu’il peut jouer un rôle Malformation utérine HSG Section des cloisons sous hysté-
important dans les facteurs de risques. roscopie
Béance cervico-isthmique HSG Cerclage du col
Synéchies/fibromes Hystéroscopie Chirurgie per hystéroscopie
‚ Causes immunologiques
Anomalies génétiques
Les anticorps auto-immuns, incluant les anticorps
Aneuploïdie récidivante Caryotype fœtal Aucun
antiphospholipides, les anticorps anti-ADN (acide Translocation parentale Caryotype des parents Conseil génétique
désoxyribonucléique) et les anticorps antithyroï- Mutation Analyse de l’ADN (?) ?
diens, ont été associés au risque de fausses couches.
L’élévation des anticorps antiphospolipides est Anomalie endocrinienne FSH, LH, E2 j3 du cycle Citrate de clomifène
associée, par un mécanisme de thrombose Insuffısance lutéale Deuxième partie du cycle Progestatifs (?)
< 10 j BE (?) hCG (?)
vasculaire du throphoblaste ou du placenta, à des
pertes fœtales. Causes immunologiques
Le laboratoire peut confirmer la présence d’un AC anticardiolipine Test d’hémostase Aspirine à faible dose
anticoagulant circulant de type lupique ou un AC antiphospholipide
anticardiolipine (maladie des anticorps ADN : acide désoxyribonucléique ; FSH : hormone folliculostimulante ; LH : hormone lutéostimulante ; HSG : hystérosalpingographie ; BE : biopsie
antiphospholipide). Aussi, la recherche de ce type d’endomètre ; hCG : hormone choriogonadotrophine.

Hervé Fernandez : Professeur des Universités, praticien hospitalier,


service de gynécologie-obstétrique, hôpital Antoine-Béclère, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92141 Clamart cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : H Fernandez. Fausses couches à répétition.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1320, 1998, 2 p

2
¶ 3-1235

Frottis de dépistage du cancer du col


de l’utérus
C. Bergeron

Le dépistage par le frottis cervical a réduit l’incidence et la mortalité du cancer du col de l’utérus en France.
Le dépistage du cancer du col est individuel et n’est pas organisé. Il n’y a pas de registre national, mais il
existe des registres régionaux dans neuf départements. Les données épidémiologiques et l’estimation sur
l’incidence et la mortalité du cancer du col sont disponibles sur le site de l’Institut de veille sanitaire. On
estime les nouveaux cas de cancer du col à 3 387 et les décès à 1 000 par an. Environ 6 millions de frottis
par an sont réalisés pour une population féminine de 16 millions, âgée de 25 à 65 ans. La couverture est
évaluée globalement à 55 % avec des variations selon l’âge. Les frottis sont prélevés dans 95 % des cas
par des gynécologues et sont interprétés dans 95 % des cas dans des structures de pathologie privées. Les
recommandations nationales sur la conduite à tenir devant un frottis anormal incluant la terminologie
cytologique, les performances du frottis conventionnel et en milieu liquide et l’évaluation de l’intérêt du
dépistage par la recherche de l’acide désoxyribonucléique (ADN) du papillomavirus humain (HPV) sont
disponibles sur le site de la Haute Autorité de santé. Elles sont largement explicitées dans ce document. Les
efforts doivent porter sur la couverture de la population défavorisée et l’assurance qualité du prélèvement
et son interprétation, que le frottis soit fait par la méthode conventionnelle ou en milieu liquide. Le
dépistage par le test HPV est prématuré et nécessite des études de coût-efficacité dans le contexte
français.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Dépistage du cancer ; Frottis en milieu liquide ; Couverture ; Assurance qualité ;
Papillomavirus humain

Plan cellules prélevées par une spatule et/ou une brosse, étalées sur
lame et colorées par la méthode de Papanicolaou. Le dépistage
¶ Introduction : dépistage du cancer du col en France 1 par le frottis cervical conventionnel a réduit l’incidence et la
mortalité du cancer du col de l’utérus en France. Le dépistage
¶ Lecture du frottis du col utérin 2
du cancer du col en France n’est pas organisé et reste, en 2006,
Qualité du prélèvement 2
individuel. Il n’y a pas de registre national mais il existe des
Compte rendu des anomalies cytologiques 2
registres régionaux dans neuf départements qui sont le Bas-
¶ Frottis conventionnel 3 Rhin, le Calvados, le Doubs, l’Hérault, l’Isère, le Haut-Rhin, la
Technique du frottis conventionnel 3 Manche, la Somme et le Tarn. Les données épidémiologiques et
Performances du frottis conventionnel 3 l’estimation sur l’incidence et la mortalité du cancer du col sont
¶ Frottis en milieu liquide 3 disponibles sur le site de l’Institut de veille sanitaire [1]. On
Technique du frottis en milieu liquide 3 estime les nouveaux cas de cancer du col à 3 387 et les décès à
Qualité du prélèvement 4 1 000 par an. Environ 6 millions de frottis par an sont réalisés
Performances diagnostiques 4 en France pour une population féminine de 16 millions, âgée
Remboursement 4 de 25 à 65 ans. La couverture est évaluée globalement à 55 %
¶ Assurance qualité 5 avec des variations selon l’âge : 60 % chez les femmes de 20 à
¶ Conduite à tenir devant un frottis anormal 5 49 ans et 48 % chez les femmes de 50 à 59 ans [2]. Les frottis
sont prélevés dans 95 % des cas par des gynécologues et sont
¶ Conclusion 6
interprétés dans 95 % des cas dans des structures de pathologie
privées. Le rythme de dépistage est variable et un nombre non
négligeable de femmes n’ont pas de frottis (femmes en situation
■ Introduction : dépistage précaire, immigrées ou ménopausées non substituées). Il existe
peu d’études en France permettant d’estimer la part due à une
du cancer du col en France absence de dépistage et la part due à un faux négatif du
Le carcinome du col de l’utérus est un cancer d’évolution frottis [3, 4], mais les causes d’échec du dépistage sont les mêmes
lente qui est précédé de lésions précancéreuses appelées néopla- que dans les autres pays développés. Les femmes qui dévelop-
sies intraépithéliales cervicales (CIN). Le frottis cervical permet pent un cancer du col de l’utérus n’ont pas eu de frottis de
de dépister des anomalies par l’examen au microscope des dépistage ou l’ont eu de manière trop espacée dans 60 % des cas

Traité de Médecine Akos 1


3-1235 ¶ Frottis de dépistage du cancer du col de l’utérus

aux États-Unis [5]. Dans 10 % des cas, elles ont eu un frottis


mais n’ont pas eu un suivi approprié. Enfin, dans 30 % des cas,
elles ont eu un frottis régulier et le cancer est associé à un faux
négatif de la cytologie lié au prélèvement ou à
l’interprétation [5].

■ Lecture du frottis du col utérin


Des efforts importants ont été faits ces vingt dernières années
pour uniformiser les conclusions des comptes rendus de l’exa-
men cytologique du col. Le système de Bethesda est un modèle
de réponse qui existe depuis 1988 aux États-Unis et a été
réactualisé en 2001 [6]. La Haute Autorité de santé (HAS) a
recommandé son utilisation en France en 1998 et a réactualisé
ses recommandations en 2002 [7]. Le Tableau 1 décrit le système
Bethesda 2001. Il s’applique quelle que soit la technique de
prélèvement du frottis. La classification de Papanicolaou doit
être abandonnée car elle est obsolète.

Qualité du prélèvement Figure 1. Lésion malpighienne intraépithéliale de bas grade : il existe


Le système de Bethesda insiste sur la qualité du frottis et des koïlocytes au niveau des cellules superficielles.
l’importance d’expliquer au clinicien les raisons qui empêchent
l’interprétation correcte du prélèvement. La qualité du prélève- faux négatifs de la cytologie cervicale sont dus à un mauvais
ment est essentielle pour détecter la présence de cellules prélèvement [8]. Les frottis considérés comme non interprétables
anormales au microscope. On estime qu’un tiers à deux tiers des correspondent à 1 à 2 % de la totalité des frottis de routine [3].
La raison principale qui empêche l’interprétation de ces frottis
est la paucicellularité. Les autres raisons sont la présence
Tableau 1. d’hématies, d’inflammation ou un défaut de fixation. L’absence
Système de Bethesda 2001. de cellules endocervicales peut représenter 6 à 8 % des frottis de
Qualité du prélèvement routine. L’absence de cellules endocervicales ne correspond plus
Satisfaisant pour évaluation à un critère qui rend le frottis non interprétable dans le système
Non satisfaisant pour évaluation (préciser la raison) de Bethesda 2001 mais elle doit être mentionnée dans le
compte rendu au clinicien qui décidera de refaire éventuelle-
Interprétation. Résultats
ment le prélèvement en fonction de la situation anatomique de
Pas de lésion intraépithéliale ou de cellule suspecte de malignité
la jonction squamocylindrique. La présence de cellules endocer-
Micro-organismes (Trichomonas vaginalis ; éléments mycéliens ; anoma- vicales est le témoin d’une bonne représentativité de la jonction
lies de la flore vaginale évoquant une vaginose bactérienne ; bactéries de squamocylindrique et les cellules endocervicales sont importan-
type Actinomyces ; modifications cellulaires évoquant un herpès sim- tes à analyser pour détecter une éventuelle lésion de l’épithé-
plex)
lium cylindrique endocervical.
Autres modifications non néoplasiques : modifications réactionnelles
(inflammation, irradiation, ou présence d’un dispositif intra-utérin) Compte rendu des anomalies cytologiques
Cellules glandulaires bénignes après une hystérectomie
Les lésions précancéreuses et les cancers invasifs sont associés
Atrophie
dans 95 % des cas à un papillomavirus humain (human
Anomalies des cellules malpighiennes papilloma virus [HPV]) oncogène. L’infection de l’épithélium
Atypies cellulaires : cervical par un HPV oncogène est le plus souvent latente et ne
– atypies cellulaires malpighiennes : de signification indéterminée (ASC- produit pas de modifications morphologiques. Cette infection
US) peut être productive. Elle est alors caractérisée par la présence
– ne permettant pas d’exclure une lésion de haut grade (ASC-H) de koïlocytes et sa traduction cytologique est la « lésion
Lésion malpighienne intraépithéliale de bas grade (LSIL), y compris malpighienne intraépithéliale de bas grade » (low grade squamous
koïlocytes/dysplasie légère/CIN 1 intraepithelial lesion [LSIL]), selon le système de Bethesda
Lésion malpighienne intraépithéliale de haut grade (HSIL), y compris (Tableau 1) [6] (Fig. 1). Ces anomalies régressent le plus souvent
dysplasies modérée et sévère, CIS/CIN 2 et CIN 3. Le cas échéant, pré- spontanément. L’infection par un HPV oncogène est aussi
sence d’éléments faisant suspecter un processus invasif (sans autre préci- associée à des anomalies marquées des cellules basales de
sion) l’épithélium malpighien qui définissent la « lésion malpi-
Carcinome malpighien ghienne intraépithéliale de haut grade » (high grade squamous
Anomalies des cellules glandulaires
intraepithelial lesion [HSIL]) (Fig. 2). Les HSIL correspondent à
des anomalies précancéreuses directes. Les atypies des cellules
Atypies endocervicales, endométriales, ou glandulaires
malpighiennes (atypical squamous cell [ASC]) ont été divisées en
Atypies glandulaires ou endocervicales évoquant une néoplasie atypie des cellules malpighiennes de signification indéterminée
Adénocarcinome endocervical in situ (atypical squamous cell of undetermined significance [ASC-US]) qui
Adénocarcinome : endocervical, endométrial, extra-utérin, ou d’origine sont des anomalies mal définies des cellules superficielles
non précisée (Fig. 3) et en atypies des cellules malpighiennes ne permettant
Autres néoplasies malignes (préciser) pas d’exclure une lésion malpighienne intraépithéliale de haut
Autre : cellules endométriales (chez une femme âgée de plus de 40 ans) grade (atypical squamous cell cannot exclude HSIL [ASC-H]) qui
Examen automatisé (préciser la technique utilisée et les résultats) sont des anomalies mal définies des cellules basales (Fig. 4).
L’adénocarcinome in situ (AIS) a été individualisé parmi les
Recherche de l’ADN du papillomavirus (préciser la technique utilisée
et les résultats)
atypies des cellules cylindriques (ACC) (Fig. 5). Le centre de
regroupement informatique et statistique de données d’anato-
ADN : acide désoxyribonucléique ; ASC-US : atypical squamous cells of mocytopathologie en Île-de-France (CRISAPIF) a fait une
undetermined significance ; ASC-H : atypical squamous cells cannot exclude HSIL ;
LSIL : low grade squamous intraepithelial lesion ; CIN 1 : cervical intraepithelial
enquête pour évaluer le pourcentage et la répartition des lésions
neoplasia grade 1 ; HSIL : high grade squamous intraepithelial lesion ; CIN 2 ou 3 : précancéreuses et des cancers du col de l’utérus en Île-de-
cervical intraepithelial neoplasia grade 2 ou 3 ; CIS : carcinome in situ. France diagnostiqués par le frottis cervical selon le système de

2 Traité de Médecine Akos


Frottis de dépistage du cancer du col de l’utérus ¶ 3-1235

Figure 2. Lésion malpighienne intraépithéliale de haut grade : les cel- Figure 4. Atypies des cellules malpighiennes ne permettant pas d’ex-
lules basales ont des anomalies nucléaires marquées. clure une lésion malpighienne de haut grade : il existe des anomalies
nucléaires au niveau des cellules basales.

Figure 3. Atypies des cellules malpighiennes de signification indétermi-


née : il existe des anomalies nucléaires légères au niveau des cellules Figure 5. Adénocarcinome in situ : les cellules endocervicales ont une
superficielles. disposition radiaire et des noyaux qui ont perdu leur polarité.

Bethesda [9]. Le taux de LSIL en 2002 était de 1,5 % et celui de


(ANAES) en 1998 sur des publications sélectionnées entre
HSIL de 0,30 %. Le taux d’ASC-US était de 1,5 %, taux très
1992 et 1998 [11]. La sensibilité varie de 32 à 73 % si le seuil de
inférieur à celui publié dans la littérature nord-américaine [10].
détection est une LSIL et entre 32 et 98 % si le seuil de
détection est une HSIL. La spécificité varie de 40 à 83 % dans
■ Frottis conventionnel le premier cas et de 57 à 82 % dans le second cas. Il existe des
limitations méthodologiques pour interpréter ces publications,
en raison de la variabilité du matériel de prélèvement utilisé,
Technique du frottis conventionnel l’absence de lecture indépendante systématique et la prise d’une
Le frottis devrait être effectué à distance des rapports sexuels biopsie dans un petit nombre de cas après un diagnostic de
(48 heures), en dehors des périodes menstruelles, de toute LSIL.
thérapeutique locale ou d’infection et, si nécessaire, après
traitement œstrogénique chez la femme ménopausée. Il faut
éviter de faire le toucher vaginal avant le frottis et d’utiliser un ■ Frottis en milieu liquide
lubrifiant. Le prélèvement doit concerner la totalité de l’orifice
cervical externe et l’endocol. Il est recommandé d’utiliser une Technique du frottis en milieu liquide
spatule d’Ayre associée à une brosse, ou un Cervex Brush® ou
une spatule d’Ayre modifiée qui permettent de prélever à la fois Le frottis en milieu liquide correspond à un prélèvement qui
au niveau de l’orifice cervical externe et au niveau de l’endocol. met les cellules en suspension dans un liquide de conservation.
Le matériel prélevé est étalé de façon uniforme. La fixation doit Pour le clinicien, le prélèvement se fait de la même manière que
être réalisée immédiatement. celui du frottis conventionnel en utilisant une brosse en
plastique qui peut prélever la jonction squamocylindrique et
l’endocol ou en combinant l’usage d’une spatule et d’une brosse
Performances du frottis conventionnel endocervicale. Le matériel prélevé est ensuite immédiatement
Les performances du frottis conventionnel ont été analysées rincé dans le flacon qui contient un fixateur permettant le
par l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé transport au laboratoire. Une brosse sécable peut être utilisée et

Traité de Médecine Akos 3


3-1235 ¶ Frottis de dépistage du cancer du col de l’utérus

laissée dans le flacon. Le clinicien n’a plus à prendre en charge lésions [7]. Cela s’explique en partie par les difficultés méthodo-
l’étalement qui se fait au laboratoire. Actuellement, deux logiques d’évaluation des performances de ces tests. Les classi-
modalités techniques qui utilisent des automates ont été fications utilisées en Europe ne sont pas identiques. Les
validées par la Food and Drug Administration (FDA) et sont les populations choisies sont hétérogènes. Beaucoup d’études ne
plus utilisées. L’une procède par filtration et collection des font que comparer les taux respectifs de détection des anomalies
cellules sous vide sur une membrane avec transfert des cellules par les deux techniques cytologiques, sans confirmation
sur une lame (procédé ThinPrep® de la Société Cytyc®). L’autre histologique. L’évaluation de l’ANAES en 2002 a porté sur
procède par centrifugation et sédimentation à travers un 17 études avec contrôle histologique et neuf études sans
gradient de densité (procédé Prepstain® de la Société Roche contrôle biopsique. Le taux de détections des LSIL est augmenté
Analyse devenue Tripath Imaging® commercialisé en France par de manière significative dans toutes les études. Le taux de
la Société Microm ® ). Les techniques Cytoscreen System ® détections des HSIL est le plus souvent augmenté mais ne l’est
distribuées par la Société SEROA, Turbitec ® (Labonord ® ), pas toujours de manière significative. Sur les études retenues, la
CellSlide® (Menarini®) et Papspin® (Shandon®) sont des techni- sensibilité est le plus souvent supérieure à celle du frottis
ques manuelles de centrifugation et sédimentation qui n’utili- conventionnel, mais la différence n’est pas significative. Les
sent pas d’automate et qui n’ont pas demandé une validation données ne permettaient pas de conclure sur la spécificité.
par la FDA. Elles commencent à s’implanter en Europe depuis Le NICE a évalué la sensibilité du frottis en milieu liquide sur
2003. une méta-analyse de 14 études [13]. Avec un seuil de détection
L’étalement en couche mince qui résulte de ces techniques LSIL+, la sensibilité était augmentée de 5 % si on incluait
élimine une grande partie des cellules inflammatoires, de la l’étude française de Coste et al. [14] et de 12 % sans cette étude.
nécrose et des hématies, aboutissant à « un nettoyage » de La spécificité du frottis en milieu liquide étudiée sur une méta-
l’étalement. L’étalement en couche mince permet d’éviter la analyse de six études n’était pas supérieure à celle du frottis
plupart des artefacts de superposition du frottis conventionnel, conventionnel. Le taux de détections des anomalies glandulaires
mais la dispersion du matériel cellulaire supprime aussi des de l’étude pilote était équivalent à celui du frottis convention-
repères visuels habituels. Les cytologistes ont l’habitude de lire nel. La productivité a été considérée comme supérieure en
des étalements de cellules fixées dans un milieu liquide pour les raison de la diminution des frottis inadéquats entraînant une
urines, les séreuses ou les ovaires. Elle impose une analyse diminution des frottis à refaire et du plus grand nombre de
élément par élément et un apprentissage au moins de 6 mois frottis en milieu liquide pouvant être lus à l’heure. Les experts
pour réajuster les critères morphologiques. Les cellules ne sont du NICE ont donc considéré qu’en prenant en compte le
pas aplaties sur le support mais déposées et la taille des élé- potentiel d’une meilleure sensibilité, d’une diminution des
ments et les aspects tinctoriaux s’en trouvent modifiés. Les frottis inadéquats et d’une meilleure productivité, la cytologie
noyaux ne sont plus hyperchromatiques mais prennent un en milieu liquide pouvait avoir un coût-efficacité en Angleterre
aspect vésiculaire et les cytoplasmes sont importants pour malgré un coût supérieur. Le NICE, en octobre 2003, a recom-
différencier l’origine cellulaire. mandé l’utilisation du frottis en milieu liquide pour le pro-
gramme de dépistage du cancer du col en Angleterre et au Pays-
de-Galles [13]. Les études ont été considérées insuffisantes pour
Qualité du prélèvement recommander un milieu de conservation plutôt qu’un autre.
Les performances ont été évaluées par plusieurs agences Parmi les perspectives, il était recommandé de comparer les
nationales dont les conclusions sont convergentes quant à performances des milieux de conservation et de valider le
l’amélioration de la qualité du frottis. Les frottis non interpré- nombre de cellules par échantillon nécessaire pour établir la
tables ou limités par la présence d’inflammation et d’hématies qualité du frottis.
sont statistiquement moins importants avec l’étalement en Le frottis en couche mince a aussi été fait pour permettre une
couche mince qu’avec la méthode conventionnelle [7]. L’absence lecture plus efficace par des caméras reliées à un programme sur
de matériel cellulaire due à un prélèvement de mauvaise qualité ordinateur. La lecture automatisée a été conçue pour augmenter
reste aussi fréquente en couche mince qu’en frottis convention- la sensibilité de la cytologie en détectant des petites cellules
nel. La présence de cellules endocervicales a été évaluée de anormales de type malpighien ou glandulaire qui sont difficiles
différentes manières. Dans les études où le prélèvement a été à diagnostiquer en lecture conventionnelle. Cela devrait
divisé en un étalement conventionnel et où le matériel résiduel également augmenter la spécificité en sélectionnant seulement
a été rincé dans le flacon (split-samples), les cellules endocervi- des anomalies reproductibles.
cales sont moins nombreuses dans l’étalement en couche
mince. Dans les études où la totalité du prélèvement a été
rincée dans le flacon (direct-to-vial) et les résultats comparés de
Remboursement
manière rétrospective à ceux où l’étalement était fait de manière Les choix de chaque pays doivent être faits sur des études de
conventionnelle, l’absence de cellules endocervicales est coût-efficacité qui ne sont pas transposables d’un pays à l’autre.
identique entre les deux méthodes. L’Écosse a été le premier Le frottis en milieu liquide est largement utilisé aux États-Unis
pays européen à intégrer le frottis en milieu liquide dans un où le dépistage par un frottis en milieu liquide tous les 2 ans
programme de dépistage organisé [12]. Cette décision a été prise est considéré comme une méthode efficace [15]. Le surcoût du
sur les résultats d’une étude de 70 000 frottis portant sur trois frottis en milieu liquide est plus ou moins important selon le
centres. Le calcul coût-efficacité s’est révélé en faveur du frottis consommable, l’équipement en matériel et les salaires liés à une
en milieu liquide car le taux de frottis inadéquats passe de 7 %, technique manuelle ou automatisée. Le remboursement du
avec le frottis conventionnel, à 1 % avec le frottis en milieu frottis en milieu liquide en Europe varie d’un pays à l’autre,
liquide. La définition d’un frottis inadéquat en Écosse et en mais la plupart des systèmes de santé remboursent le frottis en
Angleterre inclut les frottis dépourvus de cellules endocervicales. milieu liquide au même prix que le frottis conventionnel. En
Cette définition explique le pourcentage élevé de frottis Écosse, le programme du dépistage a accepté un coût supplé-
inadéquats du frottis conventionnel. Dans l’étude pilote faite en mentaire et a choisi de faire la cytologie en milieu liquide par
Angleterre, le taux de frottis inadéquats défini selon les critères la méthode ThinPrep® dans l’ensemble des laboratoires. En
du National Health System Cervical Screening Programme Angleterre, les recommandations de NICE n’ont pas préconisé
(NHSCSP) passe de 9,1 % avec le frottis conventionnel à 1,6 % un milieu de conservation liquide plutôt qu’un autre [13] .
avec le frottis en milieu liquide [13]. Certains pays autorisent que le surcoût soit remboursé par
l’assurance privée, comme en Allemagne, en Espagne, en Italie
Performances diagnostiques ou au Portugal. Ce surcoût n’est plus autorisé en Suisse depuis
avril 2003. En France, le surcoût ne peut être demandé aux
Le consensus n’est pas clairement établi quant à la supériorité mutuelles que dans les structures de pathologie qui travaillent
par rapport au frottis conventionnel pour identifier les en secteur 2 (droit au dépassement d’honoraires).

4 Traité de Médecine Akos


Frottis de dépistage du cancer du col de l’utérus ¶ 3-1235

■ Assurance qualité
ASC-H ASC-US
Le moyen idéal de contrôler la qualité des résultats cytologi-
ques serait de relire la totalité ou une grande partie des frottis
en utilisant un ou deux observateurs ou en corrélant les
résultats à une biopsie faite sous colposcopie. Cela reste bien sûr Cytologie à Recherche HPV
un modèle qui n’est pas applicable en routine car les femmes 6 mois oncogènes
Positive
ayant un frottis normal n’ont, la plupart du temps, pas de suivi
histologique. Les erreurs de lecture ont conduit à des recom- Négative
mandations d’assurance de qualité qui sont uniques à la
cytologie. La relecture de 10 % des frottis pris au hasard fait
Négative Positive
partie des recommandations du Clinical Laboratory Improve- Cytologie à
ment Amendments (CLIA) [16]. La relecture rapide de l’ensemble Positive 1 an
des frottis et la relecture ciblée d’une population à risque
(patientes avec des antécédents de frottis anormaux, séropositi- Négative
ves, ayant une maladie sexuellement transmissible) sont
considérées comme plus efficaces pour détecter les faux négatifs Colposcopie Cytologie de Colposcopie
de la lecture cytologique. Les autres méthodes le plus souvent Biopsie routine Biopsie
préconisées pour détecter les faux négatifs de manière rétro-
spective sont la relecture des antériorités à l’apparition d’une Figure 7. Arbre décisionnel. Prise en charge des atypies des cellules
anomalie sur un frottis ou sur une biopsie sous colposcopie. Les malpighiennes (ASC) (d’après www.anaes.fr). ASC-US : atypical
frottis anormaux sont relus systématiquement par un patholo- squamous cells of undetermined significance ; ASC-H : atypical squamous
giste. Les faux positifs sont plus faciles à déceler car ils entraî- cells cannot exclude HSIL ; HPV : human papilloma virus.
nent des explorations complémentaires et la corrélation cyto/
histologie est possible.
Il n’existe pas en France de contrôle obligatoire des frottis ni
d’évaluation quant à la prise en charge des anomalies dépistées. CIN II-III. Le test HPV est plus sensible que la cytologie et
De nombreuses initiatives ont pourtant été prises pour amélio- permet de ne faire une colposcopie qu’à environ la moitié des
rer et évaluer les performances du frottis. L’Association française patientes [7, 17]. Le test virologique peut être effectué sur le
d’assurance de qualité en anatomie et cytologie pathologiques matériel résiduel d’un frottis en milieu liquide, ce qui évite de
(AFAQAP) a mis à la disposition des anatomocytopathologistes reconvoquer la patiente. La colposcopie n’est faite qu’en cas
depuis plusieurs années des cédéroms permettant une autoéva- d’un prélèvement HPV positif [7]. Cette approche est privilégiée
luation des performances diagnostiques avec une réponse selon aux États-Unis pour des raisons de coût-efficacité. En France,
le système de Bethesda. Ce contrôle de qualité externe est devant un diagnostic d’ASC-US (dans 5 à 10 % des cas : CIN 2,
particulièrement utile pour des cytologistes isolés qui n’ont pas CIN 3, exceptionnellement cancer invasif) : trois options sont
l’opportunité de montrer des cas anormaux à leurs collègues. proposées : une colposcopie d’emblée, un frottis de contrôle
6 mois plus tard ou un test HPV qui est remboursé depuis
février 2004 dans cette seule indication [18] (Fig. 6). Devant un
■ Conduite à tenir devant frottis ASC-H (dans 40 % des cas : CIN II, CIN III, exceptionnel-
lement cancer invasif), la colposcopie d’emblée est recomman-
un frottis anormal dée (Fig. 7).
La cytologie conventionnelle ou en milieu liquide permet de Le test HPV n’est pas recommandé en première intention
dépister des anomalies cytologiques bien définies qui condui- après un diagnostic cytologique de LSIL car ce test est positif
sent à une biopsie sous colposcopie qui permet le diagnostic dans plus de 80 % de ces lésions [7]. La persistance d’une LSIL
d’un CIN. Le grade I, II, ou III est donné en fonction de la ou la découverte d’une HSIL ou d’un ASC-H sur un frottis fait
hauteur de la désorganisation de l’épithélium et de la présence pratiquer une biopsie sous colposcopie (Fig. 6, 7, 8). Devant une
d’atypies nucléaires et de figures de mitose anormales. Les CIN HSIL, la colposcopie d’emblée est recommandée (2 e frottis
de grade II et III ont le potentiel de progresser vers un cancer inutile et dangereux) pour repérer les lésions et orienter les
malpighien invasif. Leur diagnostic et leur traitement permet- prélèvements qui doivent être de bonne qualité. Si l’intégralité
tent de diminuer le nombre des cancers invasifs du col utérin. des lésions cervicales, notamment vers le canal endocervical,
Dans le cas d’un diagnostic d’ASC-US, des études ont com- n’est pas observée, la colposcopie n’est pas satisfaisante et une
paré la performance du suivi cytologique et celle de la détection exérèse à visée diagnostique est recommandée. Le test HPV n’est
d’un HPV oncogène par les techniques d’Hybrid Capture II ou de pas recommandé en France pour le suivi des patientes après
polymerase chain reaction (PCR) pour identifier la présence d’un conisation mais cette indication est en cours d’évaluation.

Frottis anormal

ASC-H ASC-US LSIL


HSIL ACG
(cf. Fig. 7) (cf. Fig. 7) (cf. Fig. 8)

Biopsie sous Biopsie sous colposcopie


Test HPV Suivi cytologique Biopsie sous colposcopie
colposcopie + curetage de l' endomètre

Figure 6. Arbre décisionnel. Prise en charge diagnostique des anomalies cytologiques. ASC-US : atypical squamous cells of undetermined significance ; ASC-H :
atypical squamous cells cannot exclude HSIL ; LSIL : low grade squamous intraepithelial lesion ; HSIL : high grade squamous intraepithelial lesion ; ACG : atypical
glandular cells ; HPV : human papilloma virus.

Traité de Médecine Akos 5


3-1235 ¶ Frottis de dépistage du cancer du col de l’utérus

LSIL

2 options

Colposcopie
Satisfaisante et
normale
Satisfaisante et
Cytologie de contrôle anormale Non satisfaisante
à 4-6 mois
Cytologie
Négative Positive
à 1 an

Biopsie
Cytologie 6 mois
Colposcopie Colposcopie après
plus tard Positive
traitement œstrogénique
Négative
Satisfaisante et Satisfaisante et
Non satisfaisante anormale anormale
Cytologie 1 an
Colposcopie Cytologie à 1 an Biopsie
plus tard Positive

Curetage endocol Recherche HPV et


cytologie
Négative
Négative/normale
Anormal Normal Positive/
Négative/anormale
anormale
Positive/normale

Conisation Conisation
Cytologie à 2 ans Cytologie à 1 an Cytologie et HPV à 1 an
diagnostique diagnostique

Figure 8. Arbre décisionnel. Conduite diagnostique en cas de frottis cervico-utérin avec lésion malpighienne intraépithéliale de bas grade (LSIL) (d’après
www.anaes.fr). LSIL : low grade squamous intraepithelial lesion ; HPV : human papilloma virus.

Quelles que soient les anomalies des cellules glandulaires, une de 25 ans, la mise en place du dépistage à partir de cet âge
colposcopie avec biopsie dirigée et/ou curetage de l’endocol est paraît justifiée. Par ailleurs, le risque de cancer du col est
recommandée (Fig. 6). Si, de plus, les anomalies des cellules maximal chez les femmes de plus de 65 ans et confirme qu’il
glandulaires sont de type endométrial, un contrôle histologique faut poursuivre le dépistage après 65 ans chez les femmes
de l’endomètre est recommandé. n’ayant pas bénéficié de frottis avant cet âge. Ces femmes n’ont
Dans le dépistage primaire, l’hypothèse de deux tests négatifs pas de suivi gynécologique. L’implication particulière des
(frottis cervical et test HPV) ayant une valeur prédictive négative médecins généralistes est donc primordiale car elle constitue
proche de 100 % conduirait à espacer l’intervalle de dépistage à une opportunité de bénéficier d’un examen de dépistage dans
cette classe d’âge.
3 ans [19]. Plusieurs études randomisées en cours comparent les
résultats du frottis conventionnel et en milieu liquide et le test
HPV en dépistage primaire sur une large population. Les
résultats prévus en 2007 permettront de conclure sur l’intérêt de
cette association. Pour le moment, l’ANAES considère que le
dépistage par le test HPV est prématuré [19] . Les ressources
“ Points essentiels
devraient d’abord être consacrées à une optimisation des Le dépistage par frottis cervical est un moyen efficace pour
modalités du dépistage pour : diminuer l’incidence et la mortalité du cancer du col de
• augmenter le taux de couverture ; l’utérus.
• améliorer le contrôle de qualité des frottis (prélèvement et Ce dépistage doit être fait régulièrement tous les trois ans
lecture) ; entre 25 et 65 ans.
• améliorer la prise en charge des patientes ayant un frottis Le frottis peut être prélevé et étalé sur lame (frottis
anormal. conventionnel) ou peut être conservé dans un milieu de
conservation (frottis en milieu liquide) et techniqué au
laboratoire par une méthode de filtration ou de
■ Conclusion centrifugation.
Les anomalies cytologiques nécessitent une prise en
Le dépistage du cancer du col de l’utérus par le frottis cervical charge spécifique définie par l’ANAES.
reste une priorité de santé publique en France [20]. Ce cancer est
en diminution dans la plupart des pays européens où le .

dépistage existe, qu’il soit spontané ou organisé. La plupart des


dépistages organisés misent actuellement sur l’amélioration du ■ Références
taux de couverture de la population cible. Le Plan Cancer se
[1] Exbrayat C. Col de l’utérus. In: Évolution de l’incidence et de la mor-
propose « d’élargir l’offre de frottis » et de « développer les talité par cancer en France de 1978 à 2000, 2003. (www.invs.sante.fr).
actions d’information auprès des femmes » [20]. L’organisation [2] RousseauA, Bohet P, Merlière J, Treppoz H, Heules-Bernin B,Ancelle-
d’un dépistage de masse reste probablement la seule façon Park R. Évaluation du dépistage organisé et du dépistage individuel du
d’étendre la couverture du frottis à l’ensemble de la population cancer du col de l’utérus : utilité des données de l’assurance maladie.
française. Le taux de HSIL augmentant chez les femmes à partir Bull Epidémiol Hebd 2002;19:8-9.

6 Traité de Médecine Akos


Frottis de dépistage du cancer du col de l’utérus ¶ 3-1235

[3] Fender M, Schott J, Baldauf JJ, Muller J, Sclund E, Dellenbach P. EVE, [12] Scottish Cervical Screening Programme. Steering group report on the
une campagne régionale de dépistage du cancer du col de l’utérus. feasibility of introducing liquid-based cytology, January 2002. (http:
Organisation, résultats à 7 ans et perspectives. Presse Med 2003;32: //www.show.scot.nhs.uk).
1545-51. [13] National Institute for Clinical Excellence (NICE). Guidance on the use
[4] Mubiayi N, Bogaert E, Boman F, Leblanc E, Vinatier D, Leroy JL, et al. of liquid-based cytology for cervical screening. October 2003. (http:
Histoire du suivi cytologique de 148 femmes atteintes d’un cancer //www.nice.org.uk).
invasif du col utérin. Gynecol Obstet Fertil 2002;30:210-7. [14] Coste J, Cochand-Priollet B, de Cremoux P, Le Galès C, Cartier I,
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screening: a word of caution. Obstet Gynecol 1999;94:307-10. monolayer cytology, and human papillomavirus DNA testing for cer-
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et al. The 2001 Bethesda System. Terminology for reporting results of [15] Saslow D, Runowicz CD, Solomon D, Moscicki AB, Smith RA,
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[7] Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé. Recom- detection of cervical neoplasia and cancer. Cancer J Clin 2002;52:
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(www.anaes.fr). When bad data is worse than no data or what works, what doesn’t, and
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[9] Bergeron C, Cartier I, Guldner L, Lassalle M, Savignoni A, Asselain B. pap smears: a meta-analysis of the accuracy to detect high-grade
Lésions précancéreuses et cancers du col de l’utérus diagnostiqués par intraepithelial neoplasia. J Natl Cancer Inst 2004;96:280-93.
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Hebd 2005;2:4-5. nomenclature des actes de biologie médicale. Journal Officiel du 30
[10] Jones BA, Novis DA. Follow-up of abnormal gynaecologic cytology: a mars 2004.
College of American Pathologists Q-Probes study of 16,132 cases from [19] Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé. Évalua-
306 laboratories. Arch Pathol Lab Med 2000;124:665-71. tion de l’intérêt de la recherche des papillomavirus humains (PVH)
[11] Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé. Conduite dans le dépistage des lésions précancéreuses et cancéreuses du col de
à tenir diagnostique devant un frottis anormal du col de l’utérus. Paris. l’utérus, mai 2004. (www.anaes.fr).
1998 (www.anaes.fr). [20] Plan cancer 2003-2007. (www.plancancer.fr).

C. Bergeron (bergeron@pasteur-cerba.com).
Laboratoire Pasteur-Cerba, 95066 Cergy-Pontoise cedex 9, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Bergeron C. Frottis de dépistage du cancer du col de l’utérus. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Traité de
Médecine Akos, 3-1235, 2007.

Disponibles sur www.emc-consulte.com


Arbres Iconographies Vidéos / Documents Information Informations Auto-
décisionnels supplémentaires Animations légaux au patient supplémentaires évaluations

Traité de Médecine Akos 7


3-1290

3-1290

Guide pratique de la rééducation


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

périnéale
D Fernandez

L a rééducation périnéale ne doit pas être systématique dans le post-partum. En revanche, en cas d’incontinence
urinaire, elle est un traitement efficace, isolée ou en association aux thérapeutiques médicochirurgicales chez
la femme plus âgée.
© Elsevier, Paris.


‚ Contre-indications à l’électrostimulation
Introduction Tableau I. – Testing des muscles releveurs de
l’anus : cotation. – En cas d’accouchement traumatique, il existe un
risque de dénervation. On sursoit de quelques mois à
Force musculaire la rééducation urogénitale.
La rééducation périnéale a pour but d’améliorer la – Les infections urinaires et les mycoses vaginales
statique pelvienne, l’incontinence urinaire et fécale, les La cotation se fait de 0 à 5 comme en kinésithéra- sont des contre-indications temporaires.
béances vulvaires. Cette rééducation permet pie classique – Le stérilet n’est pas une contre-indication et les
d’éduquer les patientes et de leur montrer le rôle du 0 Pas de contraction visible ou palpable
règles non plus, mais celles-ci peuvent engendrer une
périnée, la manière dont il fonctionne au quotidien et
1 Contraction très faible ressentie sous le doigt,
comme un frémissement très diffıcilement percepti- gêne pour les patientes.
comment on peut s’en servir. ble


La rééducation demande une participation 2 Contraction faible mais perçue sans aucun doute
volontaire de la patiente quelles que soient les 3 Contraction bien perçue. Elle n’est pas tout à fait
suffısante pour être contrariée par une opposition Biofeedback
techniques utilisées : travail manuel, biofeedback ou
modérée
électrostimulation. Elle nécessite aussi la présence 4 Contraction d’une bonne force, mais l’opposition
constante du rééducateur lors des séances. que l’on peut y appliquer n’est pas intense C’est une technique comportementale. La patiente
5 Contraction maximale. Résistance à une opposi- participe activement à son traitement et à sa guérison.
La rééducation périnéale avec travail manuel, Elle peut observer, sur l’écran de l’appareil, ses
tion forte. Les deux doigts de l’examinateur se fati-
biofeedback et électrostimulation, est proposée en capacités plus ou moins importantes à contracter le
guent pour effectuer l’opposition
première intention lors du traitement de l’incontinence périnée. La sonde vaginale est laissée en place et la
urinaire plus spécifiquement liée à l’effort. Les meilleurs Tenue patiente contracte sur des temps plus ou moins longs.
résultats de cette rééducation urogynécologique sont Le reflet de son travail s’inscrit sur un écran lumineux
La contraction doit pouvoir être tenue avec une
obtenus sur les prolapsus antérieurs et moyens force égale pendant 5 sec qui la stimule et lui permet de progresser. La présence
(cystocèle et hystéroptose). La rééducation, si elle ne On cote la tenue par les qualificatifs : bonne, du rééducateur est indispensable afin de contrôler le
modifie pas l’anatomie du plancher pelvien, fait moyenne, médiocre travail, de le corriger, de conseiller et d’encourager.
souvent disparaître la gêne fonctionnelle. Il faut La séance doit s’effectuer dans le calme : une
Fatigabilité
prévenir les patientes que la pérennité du résultat est grande concentration de la part de la patiente est
liée à l’autoentretien qu’elles réaliseront. Lors de la La contraction doit pouvoir être répétée avec une nécessaire.
première consultation, doivent se créer des relations même intensité et une bonne tenue, au moins 5 fois La patiente doit se prendre en charge et atteindre
de confiance indispensables, entre le rééducateur (la de suite
une performance. Elle doit posséder des capacités de
sage-femme ou le kinésithérapeute) et la patiente. Inversions de commande compréhension, de motivation et de concentration.

– Il faut noter les ICP : la femme pousse au lieu de

■ ■
contracter ses releveurs
– Il faut de même noter les associations À qui proposer une rééducation
Travail manuel (syncinésies) périnéale ?

ICP : inversions de commande périnéale.


Ce travail a lieu après une information permettant Il est nécessaire que les femmes soient motivées.
une prise de conscience du plancher pelvien. Il faut Seules celles ayant une pathologie le seront. Une
s’aider de schémas anatomiques, de glace dans femme ayant un testing faible mais aucune


symptomatologie urinaire ne sera pas stimulée pour
laquelle la patiente peut se voir. La perception
Électrostimulation faire cette rééducation contraignante.
manuelle est irremplaçable pour évaluer les tensions
et la qualité de la contraction (tableau I). Elle se réalise Cette rééducation s’adresse donc aux patientes
ayant une incontinence urinaire prédominante à
à l’aide de deux doigts en crochet intravaginaux. On
Elle permet d’activer les releveurs de l’anus, les l’effort, une instabilité vésicale ou urétrale (envie
demande un travail actif : contraction des releveurs.
systèmes sphinctériens et anaux. Elle inhibe la d’uriner au contact de l’eau, excepté sous la douche,
Lorsque le testing est supérieur ou égal à 3, un travail
contraction du détrusor. On utilise une sonde fuites lors des rapports qui sont typiques de l’instabilité
contre résistance s’établit par pression plus forte des
© Elsevier, Paris

endovaginale avec un courant biphasique de basse urétrale), des mictions impérieuses, une incontinence
doigts vaginaux. Enfin, il faut contrôler si le périnée
fréquence. Cette sonde est achetée en pharmacie, non anale (gaz ou selles), une béance vulvaire, des troubles
reste tonique au décours d’un effort comme la toux.
remboursable par la sécurité sociale. Certains hôpitaux sexuels (dyspareunie, absence de sensation) (fig 1).
Ce travail se fera tout en essayant de réduire la en possèdent et les stérilisent. Le coût d’une sonde est Cette rééducation peut être associée à un
lordose lombaire et lors d’une expiration. d’environ 230 francs. traitement médical en cas d’instabilité vésicale.

1
3-1290 - Guide pratique de la rééducation périnéale

de ce dernier. On éduque la patiente à contracter, donc


à verrouiller son périnée avant un effort entraînant
Incontinence urinaire une fuite (éternuement, port de poids, etc).
L’acquisition de cet automatisme amène à modifier
ses habitudes de vie pour pérenniser la prévention des
récidives.
Rééducation Deux séances hebdomadaires de 40 minutes, avec
la présence indispensable du rééducateur, semblent
nécessaires pour bien intégrer le schéma du plancher
Inefficace Efficace pelvien.
Il faut informer la patiente du risque de récidives en
cas de fatigue, de froid, de stress, de perte brutale de
Avertir du poids. Les récidives seront plus rapprochées si la
risque femme ne pratique pas une autorééducation régulière.
BUD de récidives et
(après accouchement continuer les


attendre 1 an) contractions
d'entretien Rééducation : lieu de parole

Les séances de rééducation urogynécologique sont


Si récidive un lieu de relaxation et de parole. Le rééducateur est à
l’écoute et il doit aider les patientes à exprimer leurs
non-dits ou leurs plaintes.
Rééducation Les patientes évoquent le vécu de l’accouchement
Rééducation et des suites de couches avec des questions sur
l’allaitement, le rôle du père, la confiance en soi, la
reprise d’une sexualité.
Inefficace Efficace
Traitement D’autres femmes vont évoquer des problèmes liés à
médical la ménopause. La pratique de la rééducation doit, dans
ce cas, amener à faire accepter un traitement
Proposition hormonal substitutif de ménopause si celui-ci n’était
de pas commencé.
chirurgie D’une façon générale, ces femmes se sentent
entendues, soutenues et rassurées. Elles ont espoir de
1 Incontinence urinaire. BUD : bilan urodynamique. voir se résoudre un problème qui gêne leur vie sociale.

■ ■
Elle peut se placer avant ou après une chirurgie
traitant cette incontinence. En cas d’opération, des
Ordonnance de rééducation
urogénitale Conclusion
releveurs trophiques et toniques sont un gage de
solidité et la poursuite des exercices une prévention
des récidives. Pratiquer une rééducation périnéale avec sonde La rééducation urogynécologique est avant tout un
endovaginale, électrostimulation et biofeedback : 10 à examen manuel nécessitant une participation de la


15 séances. patiente et du rééducateur, et il est inadmissible de
Place du bilan urodynamique Une fois cette ordonnance rédigée, le rééducateur pratiquer un branchement systématique de sonde et
remplit une demande d’entente préalable. La sécurité de quitter la pièce. Ce type de rééducation devient
sociale répond dans les 10 jours en cas d’avis alors inefficace et les patientes doivent être prévenues
La pratique d’un bilan urodynamique n’est pas défavorable. de cet état de fait, afin qu’elles ne persistent pas dans
essentielle dans le post-partum ou de première intention La rééducation se pratique par une sage-femme une rééducation qui deviendrait alors inefficace.
lorsqu’une patiente consulte. On attend au moins 1 an ou un kinésithérapeute exerçant en institution ou en Une fois que les patientes auront acquis la capacité
après un accouchement pour le pratiquer. Sinon, il sera activité libérale. Le remboursement est à 70 % lorsque de contracter leur périnée de façon volontaire, elles
prescrit en cas d’échec de la rééducation. L’interrogatoire la rééducation est pratiquée par une sage-femme et à devront continuer à effectuer des contractions
est important et permet souvent de savoir de quel type 60 % lorsqu’elle est pratiquée par un kinésithérapeute. volontaires spontanément, sans avoir recours à
d’incontinence il s’agit. Le bilan urodynamique peut Il faut entre 10 et 15 séances généralement pour l’électrostimulation. Pour que ces différentes méthodes
aider à prendre une décision chirurgicale ou à prescrire obtenir une prise de conscience périnéale, un de rééducation réussissent, il faut un bon contact avec
un traitement médical associé. automatisme du verrouillage périnéal et une efficacité les patientes, un suivi sérieux et une bonne motivation.

Dominique Fernandez : Sage-femme,


service de gynécologie-obstétrique du Pr René Frydman, hôpital Antoine-Béclère, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92140 Clamart cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : D Fernandez. Guide pratique de la rééducation périnéale.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1290, 1998, 2 p

2
3-1300

3-1300
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Hémorragie génitale

M Cosson

L e traitement chirurgical, dans le cadre de ménorragies répétées, n’est jamais une urgence. Une décision
chirurgicale sera d’autant mieux supportée et comprise par la patiente si elle a été précédée de plusieurs
tentatives médicales bien menées.
© 1999 , Elsevier, Paris.


Introduction

Les saignements d’origine génitale sont un motif


Tableau I. – Définitions.

Ménorragies
Abondance des règles
##
Régularité des cycles
Réguliers
Durée des règles
#
fréquent de consultation en gynécologie. Quelle que
soit l’étiologie de ces saignements, il est indispensable Métrorragies ⊥ Irréguliers ⊥
de savoir confirmer, dans un premier temps, l’origine En dehors des règles
génitale de ces saignements, puis d’apprécier la gravité Hyperménorrhée ## Réguliers ⊥
de ces hémorragies et leur retentissement général,
notamment en cas d’hémorragie aiguë. Hypoménorrhée && Réguliers ⊥
Tout saignement d’origine génitale avant la puberté Oligoménorrhée ⊥ Fréquence & ⊥
ou après la ménopause doit être considéré comme
anormal. Chez les patientes en âge de procréer, il est Pollakiménorrhée ⊥ Fréquence# ⊥
essentiel de diagnostiquer une éventuelle grossesse, Polyménorrhée ⊥ ⊥ #
en raison des étiologies bien spécifiques de ces
métrorragies en début de grossesse et de l’urgence
habituelle de leur prise en charge. En dehors de la
grossesse, il est parfois difficile de faire la distinction
entre saignements anormaux et règles normales.
En fonction d’une part de l’âge des patientes et

Appréciation du retentissement
des hémorragies génitales
veineuse et réanimation adaptée. Le traitement
gynécologique consiste, en cas de persistance de
l’hémorragie génitale, en un curetage utérin
hémostatique en cas d’urgence. En cas d’hémorragie
d’autre part des caractéristiques de ces saignements, ‚ Diagnostic de gravité d’une hémorragie persistante sans retentissement, on préférera un
on distinguera les saignements survenant en dehors aiguë traitement par œstrogènes, en général par voie
des règles (métrorragies) des règles anormales intraveineuse ou per os, qui permet de contrôler
(ménorragies) chez les femmes en période d’activité l’hémorragie en quelques heures par stimulation de la
génitale. Hémorragie aiguë croissance de l’endomètre. Ce n’est qu’une fois l’état
Les étiologies sont très nettement différentes dans ✔ Évaluer l’importance de de la patiente stabilisé qu’on pourra se préoccuper de
ces trois groupes et la démarche diagnostique doit l’hémorragie. l’étiologie de ces saignements.
donc être adaptée. ✔ Surveiller les signes de choc,
d’anémie. ‚ Tolérance des hémorragies chroniques
Certaines patientes consulteront en dernier recours


✔ Vérifier l’origine génitale de
après des années de saignements responsables d’une
Règles normales et anormales l’hémorragie.
anémie, alors que d’autres patientes consulteront
✔ Rechercher une cause évidente après deux ou trois cycles d’abondance à peine
(vulvovaginale, cervicale). supérieure à la normale. Il a ainsi pu être établi que
Chez une patiente en période d’activité génitale, il
jusqu’à 50 % des patientes consultant pour une
est indispensable de savoir faire la distinction entre des
saignements anormaux et des règles normales. Cette Chez une patiente consultant dans le cadre d’une hyperménorrhée ont en réalité des règles normales. À
distinction n’est pas toujours facile, pour la patiente hémorragie génitale abondante, la recherche de l’inverse, jusqu’à 40 % des patientes présentant une
comme pour le médecin, et il nous a donc paru l’étiologie de cette hémorragie passe au second plan. hyperménorrhée avec des règles supérieures à 80 mL
intéressant de rappeler quelques chiffres. On considère Le premier élément à rechercher est d’une part son considèrent qu’elles ont des règles normales. Le risque
que des règles normales durent en moyenne 4,7 jours, abondance et d’autre part son retentissement sur l’état peut donc être d’une part de traiter abusivement
neuf patientes sur dix présentant des règles de moins clinique de la patiente. Ce retentissement peut certaines femmes qui ont en réalité des règles
de 8 jours. Des cycles de plus de 42 jours ou de moins consister, en cas d’hémorragie de très grande d’abondance normale, d’autre part de sous-estimer le
de 21 jours et des règles durant plus de 7 jours doivent abondance, en une chute de la tension artérielle, retentissement possible des métrorragies chez d’autres
être considérés comme anormaux, particulièrement associée à des signes de collapsus cardiovasculaire. patientes.
chez des femmes réglées depuis plus de 2 ans. La perte Parfois, une anémie d’installation progressive a L’évaluation subjective par la patiente a le mérite de
© Elsevier, Paris

sanguine moyenne au cours d’un cycle est estimée à fragilisé la patiente et une hémorragie d’abondance tenir compte de son histoire personnelle, de sa
35 mL, alors que des pertes répétées supérieures à moyenne suffira à entraîner une décompensation. Le tolérance personnelle aux saignements, et donc de
80 mL seront à l’origine de l’installation progressive bilan comme le traitement seront réalisés en correspondre à sa qualité de vie. Le risque est de
d’une anémie. Les anomalies des règles peuvent donc hospitalisation après prise en charge du choc s’acharner à traiter des saignements d’abondance
être classées comme sur le tableau I. cardiovasculaire par mise en place d’une voie d’abord normale mal tolérés psychologiquement, avec les

1
3-1300 - Hémorragie génitale

mauvais résultats que l’on peut imaginer, au point


parfois de finir par proposer une hystérectomie Tableau II. – Examen clinique et paraclinique.
« abusive ».
Examen clinique - Importance des hémorragies
- Pouls, TA, signes de collapsus
Hémorragie chronique - Examen gynécologique
✔ Évaluer l’importance des Examen paraclinique (en cas de doute) - β-HCG plasmatique
saignements. - ± NFS
✔ Évaluer leur retentissement. - Échographie pelvienne par voie endovaginale
✔ Recherche de traitements associés,
TA : tension artérielle ; NFS : numération formule sanguine.
de dispositif intra-utérin (DIU).
✔ Caractères des hémorragies.
1 Démarche diagnostique
✔ Examen clinique. Hémorragie en période d'activité génitale
devant une hémorragie en
✔ Échographie pelvienne + période d’activité génitale.
endosonographie ou hystéroscopie Examen clinique DIU : dispositif intra-
ambulatoire. utérin.

Il est donc essentiel de posséder quelques critères


Pas de cause évidente Causes évidentes
objectifs qui permettront, dans certaines situations
embrouillées, d’apprécier la nécessité de la prise en Cervicovaginale.
charge médicale. Il ne peut être question de proposer β-HCG plasmatique Fibromyomes
systématiquement une évaluation objective basée sur Échographie endovaginale
l’extraction par élution dans la soude de l’ensemble β-HCG
β-HCG
des protections utilisées durant la période menstruelle. négatif
positif
De même, l’évaluation objective par table visuelle
permettant de comptabiliser, avec une bonne Grossesse évolutive Hémorragie
Hémorragie
corrélation, les protections en fonction de leur nombre Fausse couche spontanée fonctionnelle organique
et de leur degré de souillure reste difficile à imposer Menace d'avortement
Môle hydatiforme
systématiquement. En cas de règles d’abondance
Grossesse extra-utérine
normale, on considère que trois à cinq protections
par jour sont nécessaires. Utérus Annexes
Un interrogatoire bien orienté suffira donc le plus
souvent, en insistant plus particulièrement sur les Fibrome Endométriose
événements survenant durant la nuit. L’utilisation Polype Salpingite
Adénomyose
d’une double protection, d’une serviette éponge ou Tumeur
DIU
d’une alèse isolant le matelas signent l’hyperménor- Cancer
rhée authentique. De même, l’existence d’une anémie
ferriprive ou d’une insuffisance martiale caractérise de
façon certaine une mauvaise tolérance à des normales. Le moindre doute quant à une éventuelle vascularisation de l’utérus et des annexes, ainsi que de
hémorragies chroniques. Le recours aux échelles grossesse doit entraîner une vérification biologique. la cavité utérine, vient compléter le bilan à chaque fois
visuelles, voire à l’évaluation biochimique, ne seront qu’elle est possible. L’échographie peut être couplée à
‚ Examen clinique
alors indiquées qu’en cas de doute. une endosonographie, avec injection de sérum
Un examen clinique général est bien entendu physiologique dans la cavité utérine en cours
indispensable (tableau II) et comprend plus d’échographie vaginale, ce qui permet d’obtenir une


particulièrement un examen gynécologique associant analyse plus fine de la muqueuse utérine et du
Démarche diagnostique palpation abdominale, inspection vulvaire et contenu de la cavité utérine. Une hystéroscopie
périnéale, toucher pelvien bimanuel, et examen du col diagnostique permet également de vérifier le contenu
et du vagin au spéculum à chaque fois que cela est utérin et de réaliser dans le même temps une biopsie
En dehors de toute situation d’urgence, la principale possible. L’examen clinique doit permettre dans un dirigée, le tout au moyen d’un hystéroscope souple en
préoccupation reste le diagnostic de l’étiologie de ces premier temps de vérifier l’origine génitale des ambulatoire. Un bilan de coagulation et une
saignements génitaux afin de tenter de proposer un hémorragies si elles sont en cours, en excluant une numération plaquettaire sont nécessaires en cas de
traitement médical efficace. origine rectale ou vésicale éventuelle. Il permet de suspicion de troubles de l’hémostase. Une numération
rechercher une cause générale, voire une grossesse, et
‚ Interrogatoire formule sanguine avec dosage de la sidérémie peut
également d’éliminer une origine gynécologique enfin être utile afin d’évaluer le retentissement
Après avoir estimé l’abondance et vérifié l’origine évidente vulvovaginale ou cervicale. En dehors du d’hémorragies chroniques.
génitale des saignements, l’interrogatoire s’attache à cadre de l’urgence, toute consultation sera le prétexte
caractériser le type des saignements que présente la Deux figures viennent résumer la démarche
à la réalisation d’un examen clinique complet, diagnostique, la hiérarchie des différents examens
patiente. Le caractère primaire de ces saignements notamment un examen des seins, et en dehors de
(existant depuis les premières menstruations) peut complémentaires et les principaux diagnostiques, que
périodes d’hémorragie importante, la réalisation de ce soit chez les femmes en période d’activité génitale
orienter vers une anomalie de la coagulation, alors frottis cervicovaginaux. Cet examen clinique est un
qu’une origine secondaire sera plus en faveur d’une (fig 1) ou après la ménopause (fig 2).
préalable indispensable et devrait toujours précéder la
étiologie organique. Les troubles du cycle associés sont réalisation d’examens paracliniques. Chez une


recherchés systématiquement (tableau I). L’association patiente vierge, l’examen au spéculum et le toucher
d’un syndrome prémenstruel marqué évoque ainsi vaginal sont remplacés par un toucher rectal et un Diagnostic étiologique
une insuffisance lutéale. On recherche également examen au spéculum de vierge.
l’association de douleurs pelviennes, de signes
urinaires ou digestifs, et bien entendu les antécédents ‚ Examen paraclinique Une description exhaustive des différentes
familiaux et personnels de la patiente, en insistant sur Il n’est pas toujours nécessaire, mais on réalisera étiologies des hémorragies génitales serait indigeste et
les traitements utilisés, particulièrement hormonaux systématiquement un dosage sanguin de β-HCG si l’on superflue. Plusieurs tableaux résument les principales
ou anticoagulants. On doit absolument penser à suspecte une grossesse débutante (tableau II). indications en fonction de l’âge des patientes
vérifier l’existence de moyens de contraception, de Une échographie pelvienne par voie endovagi- (tableaux III, IV). Un rappel concernant les étiologies les
rapports sexuels récents et la date des dernières règles nale avec étude fine de la structure et de la plus fréquentes paraît suffisant.

2
Hémorragie génitale - 3-1300

toute cause vulvaire, vaginale ou cervicale. On


2 Démarche diagnostique recherche tout particulièrement un cancer de la vulve,
Hémorragie postménopausique
devant une hémorragie du vagin ou du col, mais les causes locales les plus
postménopausique. fréquentes sont infectieuses ou à type de dysplasies ou
Examen clinique de polypes. Les infections aiguës génitales, vaginite,
salpingite, endométrite ou cervicite, sont fréquentes.
On recherchera également des lésions du col comme
un ectropion surinfecté, une dysplasie ou un polype du
Pas de cause évidente Causes évidentes
col. Certaines lésions utérines ou annexielles peuvent
être dépistées par l’examen clinique. Le toucher
Vulve (ulcération ou cancer)
Vagin (vulvovaginite, tumeur) bimanuel peut permettre de faire le diagnostic de
Col utérin (polype, cancer) léiomyomatose utérine importante ou de masse
Biopsie d'endomètre
Échographie vaginale + endosonographie annexielle, alors que des lésions plus modestes ou des
Hystéroscopie pathologies endo-utérines ne seront diagnostiquées
que par des explorations hystéroscopiques et
échographiques. La léiomyomatose est la cause la
plus fréquente de ménométrorragies, en particulier
Utérus Annexes lorsqu’il existe une localisation sous-muqueuse ou un
polype endo-utérin. Néanmoins, on retrouve des
Cancer de l'endomètre Tumeur de l'ovaire
fibromes chez 50 % des femmes de plus de 35 ans, la
Fibrome Cancer de la trompe
Polype
majorité restant asymptomatique et le lien entre
Sarcome fibrome et hémorragies n’est pas toujours facile à
Causes fonctionnelles
affirmer. De plus, il n’existe habituellement pas de
corrélation entre le volume des fibromes et
Hyperplasie de l'endomètre l’importance des saignements observés. Par ordre de
Atrophie de l'endomètre
fréquence, l’adénomyose est la deuxième cause de
saignement organique en période d’activité génitale.
Enfin, on peut retrouver une cause endo-utérine
Tableau III. – Principales étiologies des métrorragies. comme un cancer de l’endomètre, voire un polype
endo-utérin.
En période prépubaire - Lésions vulvovaginales Certaines pathologies générales peuvent être à
- Corps étranger, traumatisme l’origine d’hémorragies génitales, en particulier les
- Puberté précoce diathèses hémorragiques constitutionnelles ou
acquises, ainsi que les maladies de système.
- Tumeur
- Abus sexuel L’hypothyroïdie, le lupus érythémateux ou
À l’adolescence - Anovulation l’insuffisance hépatique peuvent également être en
- Grossesse cause.
- Traitement hormonal Enfin, on doit toujours rechercher une cause
- Coagulopathie iatrogène à l’interrogatoire, comme la prise
- Infection cervicale ou pelvienne d’anticoagulants ou certains contraceptifs oraux mini-
En période de reproduction et de périménopause - Anovulation ou microdosés (tableau V), sans oublier un éventuel
- Grossesse DIU (tableau VI).
- Traitement hormonal
- Fibromyomes ‚ Hémorragies idiopathiques
- Adénomyose On gardera dans cette catégorie toutes les
- Polype endo-utérin, hyperplasie hémorragies sans cause organique chez des patientes
- Pathologie cervicale présentant une fonction ovarienne normale. Elles
- Anomalie de la fonction thyroïdienne
concernent, d’après Dargent, environ la moitié des
patientes présentant des ménométrorragies sans
organiques, avant de rappeler les principales causes étiologie organique.
Tableau IV. – Causes d’hémorragie génitale. d’hémorragies génitales en fonction de l’âge des
patientes. Tableau V. – Traitement hormonal et hémorra-
En période de ménopause
gie utérine.
- Lésions d’endomètre : ‚ Hémorragies fonctionnelles
- cancer
Elles sont liées à un déséquilibre hormonal plus - Pilule œstroprogestatif par atrophie
- atrophie
qu’à l’existence de lésions organiques. Ces de l’endomètre (arrêt ou oubli)
- polype
déséquilibres hormonaux sont liés à un cycle - Progestatif de synthèse ou progestatif microdosé
- hyperplasie (atrophie de l’endomètre)
- Traitement hormonal anovulatoire ou à une insuffisance lutéale sévère.
- Traitement hormonal de la ménopause :
- Vaginite atrophique, lésions vulvovaginales : L’hémorragie est alors secondaire à une hyperœstro-
• Séquence progestatif trop courte = hyperplasie
- cancer du col génie relative, responsable d’une altération de de la muqueuse
- cancer de la vulve l’endomètre avec hyperplasie muqueuse. Le • Doses progestatif trop fortes = atrophie
- cancer du vagin diagnostic peut être posé en échographie, ou mieux de la muqueuse
par une hystéroscopie diagnostique ambulatoire avec
biopsie muqueuse, couplée éventuellement à un
L’examen clinique et le bilan paraclinique sont dosage sanguin de la progestérone en milieu de phase
destinés à éliminer une origine organique qui Tableau VI. – Métrorragies sur dispositif
prémenstruelle.
nécessiterait un traitement adapté, les causes intra-utérin (DIU).
fonctionnelles ou idiopathiques restant un diagnostic ‚ Hémorragies organiques
- Fréquentes
d’exclusion. En l’absence de diagnostic évident après Devant toute hémorragie génitale, la première - # volume et durée surtout les premiers mois
un examen clinique et paraclinique bien conduit, un préoccupation sera d’éliminer une cause organique, et - Métrorragies intermenstruelles
avis spécialisé paraît nécessaire. Nous aborderons tout particulièrement de ne pas passer à côté d’un - Traitement médical symptomatique
dans un premier temps les distinctions entre cancer génital. L’examen clinique doit permettre de - DIU en cas de résistance
hémorragies idiopathiques, fonctionnelles et s’orienter dans la plupart des cas et de diagnostiquer

3
3-1300 - Hémorragie génitale

L’étiologie des saignements d’origine génitale varie répétition du trépied diagnostique tous les 2 jours ou Toute pathologie bénigne déformant la cavité
en fonction de l’âge des patientes (tableau IV). en hospitalisation en fonction de l’état clinique et des utérine, de type fibrome, polype ou hyperplasie de
possibilités de surveillance. l’endomètre, relève d’un traitement d’exérèse par
Périodes prépubertaire et pubertaire hystéroscopie. Les pathologies les plus fréquemment
¶ En dehors de la grossesse
Les causes fonctionnelles sont les plus fréquentes, responsables de ménorragies comme les fibromes,
Chez les femmes en période d’activité génitale, ce
liées dans l’immense majorité des cas à l’existence de l’adénomyose ou les hémorragies fonctionnelles,
sont les étiologies organiques qui prédominent, et
cycles anovulatoires. On estime que jusqu’à 5 % des relèvent classiquement d’une tentative de traitement
particulièrement les fibromyomes et l’adénomyose.
jeunes filles présentent des ménorragies fonctionnel- médical. Ce n’est qu’en cas d’échec du traitement
La principale préoccupation est de ne pas négliger une
les. On considère que les jeunes femmes verront leur médical qu’un traitement chirurgical peut être
lésion cancéreuse de la vulve et surtout du col utérin,
cycle se régulariser d’autant plus tôt que la date de envisagé.
de l’endomètre, voire plus rarement de la trompe ou
leurs premières règles a été précoce. Ainsi, lorsque les
de l’ovaire. Les lésions bénignes sont fréquentes, à ‚ Traitement en urgence
premières règles surviennent avant l’âge de 12 ans, on
type d’ectropion, de dysplasie ou de polypes. En cas d’hémorragie génitale menaçant le pronostic
atteint le pourcentage de 50 % de cycles ovulatoires
Enfin, les causes infectieuses se rencontrent vital, un curetage hémostatique s’impose. Il permet la
au bout de 1 an, contre 3 ans lorsque les premières
également, comme les vaginites aiguës, l’endométrite, plupart du temps de venir à bout de l’hémorragie et ce
règles sont apparues après l’âge de 13 ans. Le risque
les cervicites ou les salpingites aiguës. pour plusieurs semaines. L’analyse des débris curetés
de cycles anovulatoires est augmenté en cas de
En préménopause, les causes fonctionnelles sont à en anatomopathologie peut permettre de préciser le
pathologie générale thyroïdienne ou diabétique,
nouveau fréquentes, liées à l’existence de cycles diagnostic. Le curetage se fera le plus souvent sous
d’usage de drogue ou d’alcool, d’anorexie, de
anovulatoires. anesthésie générale ou sous anesthésie locale.
boulimie, ou d’activité physique excessive. Un
examen clinique soigneux est néanmoins nécessaire La survenue d’hémorragies génitales chez une Les œstrogènes peuvent être utilisés en injection
associant, lorsque cela est possible, la mise en place femme sous contraception orale est fréquente et intraveineuse en cas de saignements importants. On
d’un spéculum de vierge, un toucher unidigital, voire normale les 2 ou 3 premiers mois. L’usage de micro- utilise alors des œstrogènes conjugués de type
un toucher rectal. Un test de grossesse doit être ou macroprogestatifs est souvent à l’origine d’atrophie Prémarint 20 mg toutes les 6 heures, à trois reprises.
effectué au moindre doute. Il faut savoir rechercher un de l’endomètre, responsable de saignements répétés On peut utiliser aussi, par voie orale, l’éthinyl-œstradiol
trouble de la crase sanguine en cas d’anomalies de faible abondance. L’arrêt ou l’oubli de la pilule de 50 à 150 µg en fonction de l’hémorragie. Le résultat
prolongées. peuvent être cause de saignements. Enfin, certains sera alors moins rapide. Il est essentiel en cas de
œstroprogestatifs peuvent être responsables traitement par œstrogènes de prendre le relais avec
On sait qu’il existe des métrorragies physiologiques
d’atrophie de l’endomètre. Le remplacement durant l’administration de progestatifs, l’hémorragie risquant
dans les jours suivant la naissance par privation des
un cycle ou deux par une pilule séquentielle est de reprendre de façon aussi importante en cas d’arrêt
œstrogènes d’origine maternelle. Il est rare d’observer
préconisé avant de changer de type de pilule. brutal du traitement par œstrogènes.
des saignements génitaux avant l’apparition des
caractères sexuels secondaires et il faut alors réaliser Les patientes chez qui on met en place un DIU
doivent être averties du risque de règles plus
‚ Traitement au long cours
un bilan soigneux chez les jeunes filles prépubères. En
abondantes, particulièrement au cours des premiers Ces traitements sont présentés dans les tableaux VII
période prépubertaire, une irritation vulvaire peut être
mois. Cette tendance s’atténue les mois suivants, mais et VIII.
responsable d’un prurit et de lésions d’excoriation
hémorragiques. Une puberté précoce est possible mais les règles restent encore souvent légèrement Progestatifs
rare en l’absence de caractères sexuels secondaires. augmentées, en durée comme en abondance. Le DIU
Ils sont utilisables en cas d’hémorragie importante,
Certains rhabdomyosarcomes vaginaux peuvent se au lévonorgestrel est souvent responsable durant les 3
mais les saignements ne diminuent qu’au bout de 2 ou
révéler par une hémorragie génitale. Enfin, il faut premiers mois de métrorragies irrégulières, avant de
3 jours de traitement. En relais d’un traitement par
savoir rechercher par un examen, au besoin grâce à diminuer ensuite la durée et l’abondance des règles.
œstrogènes, on préférera l’utilisation d’un norstéroïde,
un endoscope, sous anesthésie générale, un corps Métrorragies postménopausiques (fig 2) à la dose de 2 à 4 comprimés par jour durant un
étranger intravaginal ou une origine traumatique, en minimum de 15 à 20 jours après l’arrêt des
ayant alors toujours à l’esprit le risque d’abus sexuels. Par ordre de fréquence, elles sont liées à la prise
saignements. Les patientes doivent être averties que
Un examen spécialisé doit être demandé au moindre d’œstrogènes, ou à l’inverse, à une atrophie de
les règles suivant l’arrêt des progestatifs sont
doute. l’endomètre, voire à une vaginite atrophique. Ces
habituellement très abondantes.
deux causes représentent plus de la moitié des
Période d’activité génitale (fig 1) patientes. Néanmoins, étant donné leur gravité, les
causes cancéreuses sont les plus redoutées, que ce Tableau VII. – Traitement symptomatique des
¶ Penser à la grossesse hémorragies fonctionnelles.
soit les cancers de l’endomètre, les cancers du col
Il est indispensable devant des saignements
utérin, les sarcomes utérins, voire les tumeurs
d’origine génitale chez une femme en période - Acide tranexamique
annexielles. On peut également rencontrer des Exacylt
d’activité génitale d’éliminer une grossesse. Les
pathologies bénignes comme les hyperplasies de Spotoft 2 à 4 g/24 heures en 2 ou 3 prises,
étiologies des métrorragies du premier trimestre de
l’endomètre ou les polypes, ainsi que des causes 3 à 5 jours, contre-indication : thromboembolies
grossesse ne font pas partie du sujet qui nous
traumatiques. - Acide méfénamique
préoccupe. Rappelons néanmoins que toute
hémorragie en début de grossesse constitue une Ponstylt 500 mg3 par jour, 3 à 5 jours
- DIU au levonorgestrel


urgence dont le bilan et le traitement doivent être
Mirenat 52 mg norgestrel, 20 µg de lévonorgestrel
réalisés en urgence. L’examen clinique, le dosage Indications thérapeutiques /24 heures
sanguin de β-HCG plasmatique quantitatif et - Progestatif de synthèse
l’échographie pelvienne par voie endovaginale en Luténylt 2 comprimés/j, 500 mg, 15e au 24e jour
constituent le trépied diagnostique, indispensable à On peut distinguer, de façon un peu artificielle, le du cycle, jusqu’à 20 j/mois
réaliser en urgence. Après avoir éliminé par un traitement des hémorragies en urgence ou au long - Endomètrectomie
examen clinique un diagnostic différentiel urinaire ou cours. Dans le premier cas, on peut faire appel au
digestif, ainsi que les causes locales de saignements curetage hémostatique ou aux œstrogènes. Le DIU : dispositif intra-utérin.
vulvaires, vaginaux ou cervicaux, le diagnostic se traitement au long cours peut être d’une part médical
partage entre une fausse couche spontanée, une (progestatifs ou antifibrinolytiques), ou d’autre part
Tableau VIII. – Traitement des hémorragies
menace d’avortement avec grossesse encore chirurgical (curetage utérin, embolisation du
sur fibrome.
évolutive, une grossesse extra-utérine, voire une fibromyome, myomectomie, endométrectomie,
grossesse môlaire de survenue rare. En dehors des cas, hystérectomie). Bien entendu, le traitement des - En cas d’insuffısance lutéale : Acide
fréquents, de menace d’avortement sur grossesse saignements d’origine génitale est fonction de tranexamique ou progestatifs de synthèse
évolutive ou de fausse couche précoce certaine, un l’étiologie qui a été retrouvée lors du bilan - Pas d’insuffısance lutéale : embolisation
avis spécialisé semble nécessaire. Les patientes diagnostique. Nous ne revenons pas dans ce chapitre artérielle ou myomectomie
présentant un tableau clinique douteux chez lesquelles sur le traitement des cancers gynécologiques ou sur le - Hystérectomie vaginale
une grossesse extra-utérine ne peut être éliminée, traitement des infections d’origine génitale qui sont
doivent bénéficier d’une surveillance rapprochée avec traités dans les chapitres correspondants. DIU : dispositif intra-utérin.

4
Hémorragie génitale - 3-1300

Les progestatifs de synthèse sont également utilisés idiopathiques. Ils sont alors aussi efficaces que les le fibrome est symptomatique. La myomectomie ou
afin de lutter contre une hyperœstrogénie. On utilise progestatifs et mieux tolérés, mais échouent plus d’une l’embolisation sont préférées chez les femmes désirant
alors un traitement des hémorragies fonctionnelles. fois sur deux. une grossesse ou désirant conserver leur utérus malgré
On préférera l’utilisation de progestatifs du 16e au 24e le risque de récidive.
jour du cycle. Les doses nécessaires sont à adapter en Dispositif intra-utérin au lévonorgestrel
Endométrectomie
fonction de la symptomatologie, en débutant à la dose La libération intra-utérine de lévonorgestrel permet
de deux comprimés par jour, dose qui peut être L’ablation de l’endomètre peut être réalisée par
d’obtenir un effet local avec une diminution
diminuée à un comprimé par jour, voire augmentée. Il photocoagulation au laser, électrocoagulation ou
significative de l’abondance de l’écoulement
a été démontré que la progestérone naturelle permet électrorésection, voire thermocoagulation. Il existe un
menstruel. Il a été démontré qu’après 3 mois de mise
d’obtenir des résultats identiques à ceux obtenus avec consensus pour considérer qu’il s’agit de la procédure
en place, le Mirénat qui contient 52 mg de
idéale dans le cas où des ménométrorragies
un progestatif de synthèse dans les cas de lévonorgestrel et libère pendant 5 ans 20 µg de
ménométrorragies fonctionnelles vraies. On peut être inexpliquées persisteraient malgré un traitement
lévonorgestrel par 24 heures, permet de réduire les
amené à prescrire des cures plus longues, de 12, 15, médical bien conduit. Le taux de complications
pertes sanguines moyennes de près de 86 %. Plus de
voire 20 jours. Les résultats du traitement progestatif opératoires est faible, aux alentours de 6 %. Le taux
15 % des patientes sont améliorées sous traitement.
dans les cas de ménorragies fonctionnelles vraies sont d’échec de cette technique est d’environ 25 % chez les
En cas d’échec ou de mauvaise tolérance aux
excellents avec plus de 90 % de guérison. patientes sans pathologie utérine. S’il existe une
progestatifs par voie générale, la mise en place de ce
Malheureusement, à l’arrêt du traitement, la récidive adénomyose associée, le risque d’échec devient
type de dispositif paraît tout à fait souhaitable dans les
est presque inéluctable. Enfin, on estime que de un supérieur à 50 %.
cas de ménométrorragies fonctionnelles ou
quart à un tiers des patientes environ abandonnent idiopathiques, voire même de pathologies organiques Curetage et résection endo-utérine
après 6 mois de traitement, en raison de la mauvaise bénignes, avant d’envisager une solution médicale. Il s’agit du traitement proposé en cas de fibrome ou
tolérance à ces progestatifs. de polype déformant la cavité utérine. On préfère
‚ Traitements chirurgicaux
Antifibrinolytiques habituellement l’exérèse sous contrôle hystéroscopi-
Hystérectomie que, technique simple et efficace qui doit toujours être
L’utilisation de progestatifs dans le cas de tentée avant un geste plus radical.
ménométrorragies idiopathiques vraies peut Elle reste à l’heure actuelle l’intervention
gynécologique la plus pratiquée chez la femme.


permettre d’améliorer la symptomatologie, mais cet
effet est tout à fait variable. Dans ces indications, les Toutes les études et audits effectués dans divers pays
ont montré que la fréquence de l’hystérectomie peut et
Stratégies thérapeutiques
résultats sont moindres que ceux obtenus, en
particulier avec les antifibrinolytiques. L’utilisation des doit être réduite. Si on se place en dehors des
antifibrinolytiques permet de réduire le processus de indications carcinologiques, l’hystérectomie réalisée L’hémorragie génitale aiguë, en tant que véritable
fibrinolyse et de diminuer le saignement menstruel. pour ménométrorragie avec mauvaise tolérance urgence médicale et chirurgicale, est une éventualité
Plusieurs médicaments sont utilisés, en particulier chronique peut toujours être précédée d’un traitement exceptionnelle. Elle demande une hospitalisation, un
l’acide tranexamique. On peut proposer l’utilisation médical, voire d’un traitement chirurgical bilan et un traitement sans perte de temps.
d’Exacylt à la dose de 6 mg/j pendant les 3 premiers conservateur. Il ne s’agit pas d’une intervention La situation est très différente dans le cadre des
jours des règles, puis à dose décroissante jusqu’à la fin urgente et l’on doit donner le temps de la réflexion aux hémorragies chroniques. Le pronostic vital des
du saignement. Il est également possible de proposer patientes. Réalisée dans le cadre d’une pathologie patientes n’est alors pas en jeu. Les indications
l’utilisation de Spotoft. Ces traitements permettent bénigne, elle peut être réalisée par voie vaginale neuf thérapeutiques médicales ou chirurgicales doivent être
d’obtenir une réduction objective des saignements fois sur dix, pour peu que l’on sache utiliser une prises à tête reposée. Il faut savoir, dans un premier
dans plus de 50 % des cas, et sont donc aussi efficaces assistance cœlioscopique. Il s’agit alors d’une temps, attendre la répétition des hémorragies avant
dans les traitements de ménométrorragies intervention rapide (1 heure) dont l’hospitalisation est d’envisager un traitement. Ainsi, une anomalie isolée
idiopathiques que les progestatifs, et le plus souvent courte (3 jours) et dont la durée de convalescence varie des règles, un épisode de règles prolongées, peuvent
mieux tolérés. L’utilisation au long cours de ces entre 3 et 5 semaines. s’avérer être un phénomène temporaire qui ne
traitements pourrait être responsable d’accidents nécessitera ni bilan, ni traitement. L’hémorragie
thromboemboliques, mais cette donnée n’a jamais été
Embolisation des fibromes ou myomectomie génitale avant la puberté ou après la ménopause
démontrée. Le traitement des fibromes avec conservation de demande en revanche toujours un bilan soigneux
l’utérus est toujours possible en l’absence de pathologie suivi d’un traitement en cas de pathologie organique.
Anti-inflammatoires non stéroïdiens myométriale associée chez la femme, mais expose au Chez les femmes en période d’activité génitale, la
Leur utilisation permettrait de rétablir le ratio risque de récidive secondaire. L’embolisation artérielle répétition de métrorragies doit être traitée sans
prostaglandines E2 et F2 qui est altéré chez les des fibromes se réalise sous anesthésie locale en précipitation. Il convient de s’assurer de la prise
patientes présentant des ménométrorragies radiologie interventionnelle mais est encore en cours correcte du traitement médical. Enfin, l’hystérectomie,
idiopathiques. Il a été démontré que l’utilisation d’acide d’évaluation et n’a pas encore été confrontée à la qui peut être réalisée par voie vaginale dans plus de
méfénamique de type Ponstylt à la dose de 200 mg chirurgie dans une étude randomisée. La myomectomie, 90 % des cas, est une intervention bien tolérée chez les
trois fois par jour, durant 3 à 5 jours permet de qu’elle soit réalisable par voie abdominale, vaginale, femmes de plus de 40 ans ne souhaitant plus avoir de
diminuer les saignements chez plus d’un quart des cœlioscopique ou hystéroscopique, est une technique grossesse, et chez lesquelles les saignements ont
femmes présentant des ménométrorragies simple. Ces interventions ne doivent être réalisées que si résisté au traitement médical.

Michel Cosson : Praticien hospitalier,


maternité Paul Gellé, centre hospitalier de Roubaix, université Lille II, 91, avenue J Lagache, 59100 Roubaix, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : M Cosson. Hémorragie génitale.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1300, 1999, 5 p

Références

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signs. In : Berek JS ed. Novak’s gynecology. Baltimore : Williams and Wilkins,
[2] Dargent D. Prise en charge des ménométrorragies dites rebelles, retour sur 1988
quelques évidences. Job Gyn 1996 ; 6 : 383-390

5
1-0680

1-0680

Hémorragie génitale de la femme


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

en dehors de la grossesse
V Doridot, F Audibert

L ’hémorragie génitale se définit soit par des ménorragies (règles prolongées), soit par une hyperménorrhée
(règles trop abondantes), soit par des métrorragies (hémorragie d’origine utérine survenant en dehors des
règles). Trois points sont à retenir : la recherche, en premier, des signes de mauvaise tolérance hémodynamique,
nécessitant une réanimation hydroélectrolytique rapide et un traitement chirurgical immédiat ; l’élimination d’une
grossesse en effectuant un dosage de β-hCG (human chorionic gonadotrophin) systématique ; enfin, la recherche de
l’étiologie.
© Elsevier, Paris.


L’examen clinique recherche des signes de – cancer de l’endomètre : il est évoqué après une
Hémorragie mal tolérée mauvaise tolérance avec pâleur, tachycardie... hystérosalpingographie, une hystéroscopie et un
ou abondante
L’examen gynécologique confirme au spéculum curetage biopsique ;
C’est une urgence vitale. Après mise en place l’origine du saignement, son abondance, l’aspect du – tumeurs de l’ovaire (cancer, kystes) : elles sont
d’une, voire de deux voies veineuses périphériques col. On pratiquera des FCV systématiques. Le toucher évoquées par l’échographie pelvienne ;
de bon calibre avec remplissage macromoléculaire vaginal estime la taille de l’utérus, recherche une – tumeurs de la trompe.
et réanimation hydroélectrolytique, on pratique un masse latéro-utérine. On n’omettra pas la palpation ■ Causes organiques non néoplasiques :
bilan biologique en urgence avec groupe, Rhésus, des seins. – fibrome utérin : il est mis en évidence à
recherche d’agglutinine irrégulière (RAI), numération l’échographie pelvienne et à l’hystéroscopie ;


formule sanguine (NFS), plaquettes, taux de – polypes accouchés par le col ou polypes de
prothrombine (TP), temps de céphaline activé (TCA), Examens complémentaires l’endomètre : ils nécessitent une hystéroscopie et un
β-hCG. On discute une transfusion si nécessaire. curetage biopsique ;
Le traitement instauré en l’absence de grossesse – adénomyose : elle est envisagée à
repose sur le Prémarint (1 flacon de 20 mg On pratiquera de façon systématique un dosage l’hystérosalpingographie (aspect de tuba erecta).
intramusculaire ou intraveineux 2 à 3 fois/j) ou des β-hCG afin d’éliminer une grossesse. Les autres
■ Causes infectieuses :
l’Exacylt (1 flacon de 500 mg 3 fois/j). examens à demander sont : groupe, Rhésus, RAI,
– cervicite : il faut rechercher un ectropion
En cas d’échec ou de très mauvaise tolérance NFS, plaquettes, TP, TCA.
associé. Le traitement repose sur des ovules locaux
hémodynamique, un curetage utérin en urgence au Puis, en fonction de l’étiologie, une courbe
antiseptiques ;
bloc opératoire s’impose. thermique, une échographie pelvienne par voie
– endométrite : il faut toujours rechercher un
Dans un deuxième temps, on envisagera une sus-pubienne et endovaginale, une hystérosalpingo-
contexte évocateur, notamment une IVG, une
enquête étiologique. graphie, une hystéroscopie avec curetage biopsique,
révision utérine, le post-partum. Le traitement repose
une colposcopie avec biopsies cervicales, des
sur un traitement anitibiotique par voie générale et
dosages hormonaux (FSH [follicle-stimulating


des utérotoniques ;
Examen clinique hormone], LH [luteinizing hormone], œstradiol...).
– salpingite : elle témoigne de l’endométrite
associée.


L’interrogatoire recherche les antécédents ■ Causes fonctionnelles (diagnostic
gynéco-obstétricaux (parité, gestité, fausses couches Étiologies d’élimination) :
spontanées, interruptions volontaires de grossesse – hémorragie de l’ovulation : elle correspond à la
[IVG], grossesses antérieures, cycles réguliers, Les différentes étiologies sont résumées dans la chute des œstrogènes lors de la rupture du follicule.
contraception, traitements suivis, derniers frottis figure 1. L’abstention thérapeutique est la règle. On peut
néanmoins proposer des œstrogènes du 10e au 16e
© Elsevier, Paris

cervicovaginaux [FCV]...), les antécédents


médicochirurgicaux, les antécédents familiaux, le ‚ Période d’activité génitale jour ou un traitement œstroprogestatif ;
caractère du saignement, sa date d’apparition, sa ■ Causes néoplasiques : – hémorragies prémenstruelles : elles sont
périodicité, l’existence d’une douleur associée, de – cancer du col utérin : le diagnostic est fait par la secondaires à une insuffisance lutéale. Le traitement
leucorrhées... colposcopie et les biopsies cervicales ; repose sur des progestatifs du 15 e au 25e jour.

1
1-0680 - Hémorragie génitale de la femme en dehors de la grossesse

■ Causes iatrogènes : dispositif intra-utérin,


progestatifs par atrophie endométriale,
Hémorragie génitale en dehors de la grossesse
œstroprogestatifs. Il convient alors de changer de
pilule.
Mal tolérée :
■ Causes générales : maladie de Willebrand,
traitement
chirurgical en anomalies de l’hémostase...
urgence

‚ Période postpubertaire
β-hCG Positif : grossesse
■ Causes fonctionnelles : les plus fréquentes sont
secondaires à une insuffisance lutéale. Le traitement
Négatif repose sur des progestatifs du 15e au 25e jour
(exemple : Duphastont), voire un blocage de
Période d'activité l’ovulation par Stédirilt.
génitale Ménopause Postpubertaire
■ Causes organiques. Ce sont essentiellement :
– une adénose vaginale (rechercher une prise de
Causes néoplasiques : Causes néoplasiques : Causes fonctionnelles Distilbènet chez la mère) ;
- col - endomètre +++
– une tumeur de l’ovaire ;
- endomètre - col Causes organiques :
- ovaire - trompe - tumeur ovaire – un corps étranger intravaginal...
- ovaire - corps étranger intravaginal
Causes organiques non
néoplasiques : Causes fonctionnelles : ‚ Préménopause
- kyste ovaire - atrophie
- adénose vaginale ■ Causes fonctionnelles : les plus fréquentes sont
- polype endocol Causes iatrogènes : représentées par l’insuffisance lutéale.
- fibrome utérin - traitement
■ Causes organiques.
- adénomyose hormonal substitutif

Causes infectieuses :
- cervicite ‚ Postménopause
- endométrite Toute métrorragie postménopausique est un
- salpingite
cancer de l’endomètre, jusqu’à preuve du contraire.
Causes iatrogènes : ■ Causes organiques :
- DIU, progestatifs, – cancer de l’endomètre : il est mis en évidence
œstroprogestatifs
par l’hystéroscopie et le curetage biopsique ;
Causes fonctionnelles : – cancer du col, de l’ovaire ou des trompes.
- ovulation
■ Causes fonctionnelles :
- prémenstruelles
– atrophie de l’endomètre : elle est évoquée à
Maladie générale : l’hystéroscopie et nécessite un traitement hormonal
- maladie de Willebrand substitutif.
- anomalie de l'hémostase
■ Causes iatrogènes : il s’agit de traitements
hormonaux substitutifs mal conduits entraînant une
1 Hémorragie génitale en dehors de la grossesse. DIU : dispositif intra-utérin.
hyperplasie de l’endomètre.

Virginie Doridot : Interne des Hôpitaux.


François Audibert : Chef de clinique-assistant.
Service de gynécologie-obstétrique, hôpital Antoine Béclère, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92140 Clamart, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : V Doridot et F Audibert. Hémorragie génitale de la femme en dehors de la grossesse.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 1-0680, 1998, 2 p

2
3-1270

3-1270
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Incontinence urinaire

M Herry, H Fernandez

L es femmes commencent à parler de leur incontinence d’urine responsable d’une vraie gêne à la vie sociale.
Comment les examiner, quand et comment les explorer et quels traitements proposer ?
© Elsevier, Paris.


Deux mécanismes étiopathologiques sont Devant des impériosités mictionnelles, on précise
Introduction évoqués : la possibilité de différer la miction, le temps écoulé
– une altération des mécanismes extrinsèques de entre deux mictions impérieuses, la présence d’un
L’incontinence urinaire est définie par une fuite soutien du sphincter urétral : le col urétral devient comportement de prévention, à type de pollakiurie
involontaire d’urine par le méat urétral, hypermobile et bascule en arrière à la poussée. Il le plus souvent.
responsable d’une gêne à la vie sociale. Ce s’agit d’une insuffisance anatomique ; Les incontinences urinaires d’effort sont classées
symptôme devient un motif de consultation chez – une incompétence intrinsèque du sphincter en trois stades :
les femmes jeunes. Il est assez facilement avoué après dilacération, dévascularisation ou – stade 1 : les fuites surviennent à la toux, au rire,
lors de l’interrogatoire chez les femmes plus dénervation : on parle alors d’insuffisance à l’éternuement ;
âgées. De quelques fuites transitoires après sphinctérienne. – stade 2 : les pertes se produisent lors du
l’accouchement ou chez des jeunes filles soulèvement de charges, à la marche, au
pratiquant des sports de compétition, Incontinence urinaire par impériosité changement de position ;
mictionnelle (urge incontinence) – stade 3 : les fuites existent dès le moindre effort.
l’incontinence s’aggrave au fur et à mesure des
traumatismes obstétricaux. Les mécanismes de la La fuite urinaire est précédée d’un besoin non Il peut s’agir de quelques gouttes ou de véritables
continence s’altèrent encore à la ménopause, répressible d’uriner. La femme assiste alors, mictions incontrôlables.
imposant souvent le port de garnitures. L’impact impuissante, à une miction le plus souvent complète.
psychosocial devient majeur chez les femmes Il s’agit de mictions impérieuses. À un stade de Critères semi-objectifs
âgées : 20 % des patients admis en gériatrie le moins, la patiente parvient à refréner cette envie : ce Des questionnairess plus ou moins maniables ont
sont pour incontinence. Une prise en charge sont des impériosités mictionnelles sans fuite. Le été élaborés pour préciser au mieux le degré de
précoce rééducative, médicale ou chirurgicale besoin est parfois induit par des stimuli sensoriels gêne fonctionnelle : on s’enquiert d’une réduction
peut améliorer sensiblement la qualité de vie de variés (audition d’un robinet ouvert, contact avec des activités professionnelles, ménagères ou
cette population. l’eau froide) ou lors de paroxysmes émotionnels sportives.
La fragilité du système sphinctérien urétral et la (peur, colère...). Cette incontinence d’origine vésicale
Le calendrier mictionnel précise, sur 24 heures, les
brièveté de l’urètre sont responsables de la précarité est la conséquence de contractions du détrusor, non
apports hydriques, le volume uriné à chaque
de la continence féminine. Le diagnostic, le inhibées, qui submergent la puissance du sphincter
miction, la fréquence de ces dernières.
retentissement et, dans une moindre mesure, les urétral. Parfois, la contraction vésicale est associée à
Le degré de souillure des protections peut être
chances de succès de la chirurgie, reposent sur un relâchement sphinctérien. Le mécanisme
précisé par pesage.
l’interrogatoire et l’examen clinique. Les examens invoqué est une instabilité vésicale ou un
complémentaires permettent d’affiner le diagnostic dysfonctionnement vésico-urétral. ‚ Recherche des autres antécédents
étiologique et le pronostic des incontinences et des pathologies associées (tableau I)
urinaires complexes. Cas complexes
La symptomatologie est plus difficile à Antécédents chirurgicaux


analyser : un besoin impérieux peut être – Chirurgie proctologique ou colique.
Interrogatoire déclenché par l’effort. Des besoins impérieux – Cure de prolapsus par voie vaginale ou
permanents peuvent masquer une composante abdominale.
d’effort. La fuite peut être goutte à goutte,
‚ Type d’incontinence
permanente.
Les fuites sont en jet, intermittentes : deux Tableau I. – Interrogatoire.
tableaux sont alors évocateurs. ‚ Évaluation de la gêne fonctionnelle
Préciser le type d’incontinence :
Incontinence urinaire d’effort (stress urinary Elle repose sur des critères subjectifs et – incontinence urinaire d’effort
semi-objectifs. – incontinence par impériosité mictionnelle
incontinence)
© Elsevier, Paris

– incontinence urinaire complexe


La fuite survient lors de conditions d’hyper-
pression abdominale : toux, rire, éternuement, Critères subjectifs Évaluer le degré de gêne fonctionnelle
course, marche rapide, lever, montée d’escalier. Le L’interrogatoire indique la fréquence des Préciser les antécédents médicochirurgicaux
synchronisme entre les deux actions est total. symptômes et leur degré de sévérité.

1
3-1270 - Incontinence urinaire

– Cure chirurgicale d’incontinence urinaire. Devant une incontinence urinaire d’effort, on


– Hystérectomie ou chirurgie pelvienne majeure Tableau III. – Évaluation de la tonicité repositionne manuellement le col vésical, en plaçant
des releveurs de l’anus.
pour cancer. deux doigts écartés au niveau de chaque cul de sac
On précise l’importance de la gêne fonctionnelle 0 - Pas de contraction palpable vaginal latéral, sans comprimer l’urètre.
avant et après l’intervention. L’arrêt des fuites lors des efforts de toux est un
1 - Frémissement sous le doigt
élément de bon pronostic chirurgical.
Antécédents obstétricaux 2 - Contraction faible mais certaine
– Nombre d’accouchements voie basse ou Examen neurologique
3 - Contraction nette facilement contrariée
césarienne. Il comprend une étude de la sensibilité périnéale,
– Poids des nouveau-nés. 4 - Contraction forte mais encore aisément
un examen des réflexes achiléens, rotuliens et
contrariée
– Forceps. clitorido-anal (ce dernier peut être absent chez 30 %
– Épisiotomie ou déchirure. 5 - Contraction maximale résistant à une opposi- de la population féminine sans incidence
– Incontinence urinaire du post-partum et tion forte
pathologique). Une incontinence urinaire peut
rééducation périnéale éventuelle. révéler une sclérose en plaques débutante.

Antécédents médicaux et pathologies ‚ Bilan urogynécologique


Recherche d’une rétention chronique d’urine
associées avec mictions par regorgement
L’examen clinique comprendra un bilan
– Diabète, affection neurologique, affection urogynécologique complet. Ce diagnostic doit être évoqué chez les femmes
rachidienne, toux chronique, syndrome dépressif.
âgées ou les malades neurologiques. On peut
On recherche systématiquement : Appréciation de la trophicité vaginale pratiquer une étude clinique du résidu postmic-
– une pollakiurie, une dysurie associée ; La carence hormonale de la femme ménopausée tionnel par simple sondage.
– une incontinence aux gaz, aux matières favoriserait l’incontinence urinaire.
liquides ou solides, une constipation opiniâtre ;


– une pesanteur, une douleur vaginale : on Recherche d’une hypermobilité du col vésical
précise le type, la périodicité, les circonstances Examens complémentaires
Le col bascule en arrière dans le vagin lorsque
déclenchantes ;
l’on demande à la patiente de pousser, authentifiant
– une prescription de traitement hormonal de la
ainsi la cervicocystoptose dont la définition exacte ‚ Examen urodynamique
ménopause, de traitement antidépresseur .
est radiologique. Plus rarement, on introduit un Il confirme le type d’incontinence urinaire
coton tige dans l’urètre : à la poussée, l’axe du coton


suspecté cliniquement et expertise un équilibre
tige s’horizontalise. sphinctérien qui conditionne le pronostic.
Examen clinique
Il comporte trois temps :
Recherche d’une cystocèle
– une débitmétrie ;
Il authentifie une incontinence urinaire d’effort : Elle correspond à une chute de la vessie en – une cystomanométrie couplée à la mesure de
vessie à moitié remplie, on demande à la patiente, arrière, entraînant ainsi un déroulement de la partie la pression abdominale ;
en position couchée, de tousser pour reproduire la haute du vagin antérieur (zone non striée du vagin). – une mesure statique et dynamique de la
fuite. Si le test est négatif, il est répété, patiente en La cystocèle peut être présente dès l’inspection ou pression urétrale.
position assise, puis debout, un pied surélevé. n’apparaître qu’à la poussée. Il est nécessaire de
déprimer le vagin postérieur avec une des deux Cystomanométrie
‚ Diagnostic différentiel
valves du spéculum pour la mettre en évidence. Une Une incontinence urinaire par impériosité est
L’examen clinique permet d’éliminer ce qui n’est cystocèle peut masquer une incontinence urinaire : confirmée par la cystomanométrie.
pas une incontinence urinaire (tableau II). la courbure de l’urètre est modifiée, un effet pelote Des contractions vésicales de plus de 15 cm d’eau
est réalisé. La réduction manuelle ou par une valve d’amplitude apparaissent à bas volume de
Pertes d’origine vaginale
de spéculum de cette cystocèle est indispensable remplissage. On précise leur fréquence et leur
– Hydrorrhée intermittente. pour démasquer l’incontinence urinaire.
– Fistule vésico-utérine ou vésicovaginale : amplitude. Cette contraction peut être associée à une
l’examen doit être pratiqué vessie pleine pour relaxation urétrale réflexe, alors qu’une contraction
Recherche d’autres éléments de prolapsus
authentifier la fistule. vésicale devrait induire une réponse sphinctérienne.
– Hystéroptose : le col utérin atteint le tiers Cette réponse insuffisante ou trop tardive est donc
Fuites postmictionnelles inférieur du vagin (type I), affleure la vulve (type II) ou responsable des fuites.
s’extériorise (type III) à la poussée. On distingue schématiquement :
L’examen retrouve une poche sous-urétrale. Il
– Rectocèle : un déroulement de la paroi – des contractions amples, avec un bon tonus
existe des antécédents de chirurgie urétrale.
postérieure du vagin, accompagné d’une saillie du sphinctérien, justiciables d’un traitement médical ;
rectum est recherchée en déprimant la vagin – des contractions de faible amplitude, associées
Tableau II. – Examen clinique.
antérieur avec une valve de spéculum. à une hypotonie sphinctérienne, dont le traitement
Éliminer : – Élytrocèle : souvent présente en cas de est davantage rééducatif.
– pertes vaginales prolapsus récidivé, elle est difficile à différencier
– fuites postmictionnelles cliniquement d’une rectocèle. Urétromanométrie
Mettre en évidence la fuite d’urine Les chances de succès d’un traitement chirurgical
Testing des muscles releveurs de l’anus
Préciser les éléments du bilan de l’incontinence urinaire d’effort sont appréciées
urogynécologique : On note leur trophicité. Leur puissance est cotée par l’urétromanométrie.
– trophicité vaginale de 1 à 5 (tableau III). L’urétromanométrie statique détermine la
– mobilité du col vésical « pression efficace » du sphincter urétral, encore
– prolapsus associé Manœuvre de Bonney dénommée pression de clôture... Sa valeur normale
– testing des releveurs de l’anus
– manœuvre de Bonney Il faut toujours évaluer les chances de succès est de 100 cm d’eau moins l’âge. Un résultat
– examen neurologique d’une cure chirurgicale de l’incontinence par la inférieur à 30 cm d’eau traduit une atteinte
manœuvre de Bonney. intrinsèque sévère du sphincter urétral ou

2
Incontinence urinaire - 3-1270

insuffisance sphinctérienne. C’est un élément de Chirurgie


mauvais pronostic : le taux d’échec chirurgical est de Tableau IV. – Traitement de l’incontinence
urinaire par mictions impérieuses. Le principe est de soutenir le col vésical par un
6 % [2] quand la pression est à plus de 50 cm d’eau,
contre 70 % quand la pression de clôture est point fixe sur lequel il vient se fixer et se fermer lors
Suppression des épines irritatives
inférieure à 30 cm d’eau. – Infection urinaire des efforts avec hyperpression abdominale.
L’urétromanométrie dynamique évalue le – Lithiase ou tumeur vésicale
Les techniques les plus usitées sont :
différentiel de pression entre la vessie et l’urètre lors – Fécalome
– les colposuspensions rapprochant le col vésical
des efforts de toux. L’existence d’un défaut de Traitement médical de l’instabilité vésicale
transmission des pressions devrait correspondre à la – Anticholinergiques : oxybutynine (Ditropant, du ligament de Cooper (procédé de Burch) ou du
présence d’une cervicocystoptose. Ce test n’est plus Driptanet : 1 à 3 comprimés/j) périoste rétrosymphysaire (Marshall Marchetti) ;
– Myorelaxants (Urispast : 3 à 6 comprimés/j)
réalisé par certaines équipes, en raison du manque – Inhibiteurs calciques – les frondes sous-cervicales utilisant une
de corrélation entre l’examen clinique et l’examen (Adalatet : 1 à 2 comprimés/j) bandelette aponévrotique (opération de
urodynamique, de la faible sensibilité et de la – Anti-inflammatoires non stéroïdiens Gœbell-Stœckel).
mauvaise reproductibilité de cet examen. (Ponstylt : 2 comprimés 3 fois/j)
En l’absence d’insuffisance sphinctérienne, le taux
Rééducation périnéale et comportementale
Débitmétrie de succès à 1 an est de 80 % à 90 % [3]. Les
Elle renseigne sur la pression mictionnelle. Une techniques de colposuspension par voie basse seule
vessie hypocontractile compensera mal la dysurie ou par injection sous-cervicale de biomatériaux sont
induite par l’intervention : le tableau pourra évoluer Tableau V. – Traitement de l’incontinence uri- moins efficaces.
vers une rétention ou des mictions par regorgement. naire d’effort.
La chirurgie, si elle corrige l’absence de
L’examen urodynamique précise enfin les Rééducation périnéale soutènement du col vésical, n’améliore pas la qualité
mécanismes d’une incontinence urinaire complexe Œstrogénothérapie locale et générale si patiente intrinsèque du sphincter. Devant une insuffisance
ou récidivée. ménopausée
sphinctérienne sévère, se discutent une fronde
Chirurgie
sous-cervicale ou l’implantation d’un sphincter
‚ Cystoscopie
artificiel.
Elle est indispensable au bilan étiologique d’une 2,5 à 5 mg 3 fois/j permettent une relaxation du
incontinence urinaire par impériosité. détrusor. Ils sont contre-indiqués en cas de glaucome
ou de myasthénie. Les effets secondaires sont une
‚ Cas particuliers
Elle permet de mettre en évidence une lithiase,
une tumeur vésicale, une sténose urétrale organique sécheresse de la bouche, une constipation et très
– Incontinence urinaire du post-partum : elle
ou fonctionnelle. Les instabilités sensorielles au froid rarement des épisodes de confusion mentale.
associe le plus souvent une hypermobilité cervicale
ou à l’eau, les causes psychogènes ne sont que des – Inhibiteurs calciques : Adalatet 10 à 20 mg/j. Ils
et, dans les cas les plus graves, une insuffisance
diagnostics d’élimination. Une instabilité vésicale sont utilisés quand les anticholinergiques sont
sphinctérienne. Le traitement est rééducatif ; 1 % des
peut être le témoin d’une affection grave, à explorer contre-indiqués ou inefficaces.
femmes présentent une incontinence de grade 3,
avant tout traitement médical. – Anti-inflammatoires non stéroïdiens : Ponstylt
1 an après le premier accouchement [4], 10 à 15 %
2 comprimés 3 fois/j.
‚ Colpocystogramme souffrent d’une gêne épisodique [1].
– Myorelaxants : Urispast 3 à 6 comprimés/j. Ils
C’est un examen spécifique de la statique sont de moindre efficacité. – Chez la femme ménopausée, l’œstrogénothé-
pelvienne. Il permet le bilan d’un prolapsus – Benzodiazépines (Valiumt) : elles potentialisent rapie locale et générale a une action trophique sur la
complexe, chez des patientes déjà opérées. l’action des anticholinergiques avec lesquels elles muqueuse urétrotrigonale. C’est un traitement
Il est inutile devant une incontinence urinaire peuvent être associées. d’appoint.
isolée. – Présence d’un prolapsus associé : il doit être
Rééducation
corrigé dans le même temps chirurgical que
‚ Examen cytobactériologique des urines Une rééducation peut être indiquée.
l’incontinence, sous peine d’induire une instabilité
Grâce aux techniques de biofeedback, la patiente
Une infection urinaire peut être responsable vésicale postopératoire.
apprend à prévenir et à inhiber les contractions
d’impériosités mictionnelles.
vésicales par une contraction périnéale. La
rééducation comportementale agit sur les habitudes


Traitement
mictionnelles et le mode de vie, la relaxation permet
une prise de conscience du schéma corporel. Ce sont
des traitements d’appoint.

Conclusion

Il est à la fois étiologique et symptomatique, en ‚ Incontinence urinaire d’effort (tableau V)


Le bilan d’une incontinence urinaire est avant tout
fonction des tableaux cliniques (tableau IV).
Rééducation périnéale clinique. L’incontinence urinaire d’effort mérite d’être
‚ Incontinence par mictions impérieuses C’est une prise de conscience de la musculature dépistée et traitée, même chez une femme jeune,
périnéale et de la façon de s’en servir. L’acquisition alors que la symptomatologie est encore discrète. Le
Suppression des épines irritatives du verrouillage périnéal à l’effort permet de diminuer traitement de choix est la rééducation périnéale. En
Le traitement est d’abord celui des éventuelles les fuites d’urine quand l’incontinence est peu péri- ou postménopause, alors que l’incontinence
épines irritatives : sévère. devient plus invalidante, la chirurgie donne
– infection urinaire ; Elle fait appel à deux techniques : d’excellents résultats. Les incontinences urinaires
– lithiase ou tumeur vésicale ; – l’électrostimulation fonctionnelle : elle réactive avec insuffisance sphinctérienne sévère demeurent
– fécalome. les muscles périnéaux et augmente leur résistance à de mauvais pronostic. La mise en place d’un
la fatigue musculaire ; sphincter artificiel est une voie de recherche. Les
Traitement médical de l’instabilité vésicale – la kinésithérapie active, contre résistance, instabilités vésicales, en particulier chez la femme
– Anticholinergiques : oxybutynine (Ditropant, associée au biofeeback : elle rend la patiente âgée, répondent bien aux anticholinergiques dont la
Driptanet) à dose progressivement croissante de capable de contracter le périnée volontairement. tolérance est bonne.

3
3-1270 - Incontinence urinaire

Martine Herry : Ancien chef de clinique-assistant,


département mère-enfant, institut mutualiste Montsouris, 42, boulevard Jourdan, 75014 Paris, France.
Hervé Fernandez : Professeur des Universités, praticien hospitalier,
service de gynécologie-obstétrique, hôpital Antoine-Béclère, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92141 Clamart cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : M Herry et H Fernandez. Incontinence urinaire.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1270, 1998, 4 p

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[4] Viktrup L, Lose G, Rolf M, Barfoed K. The symptom of stress incontinence
[2] Haab F, Ciofu C, Pedron P, Lukacs B, Doublet JD, Gategno B et al. Faisabilité caused by pregnancy or delivery in primiparas. Obstet Gynecol 1992 ; 79 : 945-949
du Valsava leak point pressure. Étude prospective. Prog Urol 1997 ; 7 : 611-614

4
3-1560

3-1560

Incontinence urinaire chez la femme


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

en médecine générale
AM Magnier, M Perrigot, P Vu, D Mazevet

S ’il s’agit d’une incontinence urinaire d’effort typique et isolée, la prescription d’une kinésithérapie est licite sans
autre examen qu’un examen cytobactériologique des urines et une échographie de l’appareil urinaire.
© 2002 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : incontinence urinaire, incontinence d’effort, incontinence par impériosité.


– Fréquence de survenue des fuites et leur condition féminine et de l’avancée en âge, pour la
Introduction importance quantitative et qualitative. majorité des femmes, ce n’est pas un motif de
La fréquence de survenue des fuites est variable : consultation.
L’incontinence urinaire ou fuite involontaire 10 % des femmes auraient une fuite au moins Il est nécessaire de dépister systématiquement ce
d’urines est un symptôme extrêmement fréquent. hebdomadaire et 12 % aurait une fuite quotidienne. symptôme dans les populations les plus à risque à
Révélatrice de diverses pathologies le plus souvent Une incontinence jugée significative, c’est-à-dire l’occasion de consultation pour un autre motif : chez
bénignes, son diagnostic n’est pas si difficile et sa lorsqu’elle justifie le port de garniture, concernerait les femmes âgées de plus de 65 ans, chez les
prise en charge souvent rentable. environ 10 % des femmes. femmes jeunes dans l’année qui suit un
Elle est souvent l’objet d’a priori, aussi bien de la accouchement, et chez les patientes institutionna-


part des médecins qui se sentent incompétents ou lisées, alitées ou grabataires.
Diagnostic L’interrogatoire a deux buts : le diagnostic et
dépassés que des patientes qui n’osent aborder un
problème ressenti comme une véritable déchéance. l’évaluation de la gêne fonctionnelle.
L’incontinence urinaire n’est pas une maladie L’interrogatoire permet d’évaluer la gêne, la
mais un symptôme (ANDEM 1995). Elle peut être demande, et ce que la patiente est prête à faire


Prévalence. Épidémiologie
et qualité de vie [1, 2, 16]
L’incontinence urinaire est définie comme une
révélatrice de pathologies très diverses
(fonctionnelles, obstructives urinaires ou
neurologiques) qui doivent être impérativement
recherchées.
(kinésithérapie, chirurgie...).

‚ Antécédents

perte involontaire d’urines. La prévalence de ce Il existe quatre grands mécanismes définissant Gynéco-obstétricaux
symptôme est difficile à évaluer. Elle est calculée en quatre types d’incontinence : – Âge de la ménopause, traitement éventuel
divisant le nombre de personnes souffrant de ce – l’incontinence urinaire d’effort, qui est la perte général ou local.
symptôme par le nombre total de personnes involontaire d’urines à l’effort : rire, toux, – Nombre d’accouchements, poids de naissance
examinées dans un échantillon représentatif de la éternuement, sport et autres activités physiques ; des enfants (gros poids de naissance, grand
population étudiée. Les chiffres ainsi obtenus varient – l’incontinence urinaire par instabilité vésicale, périmètre crânien), caractéristiques de l’accou-
de 12 à 58 %. Il est nécessaire d’interpréter ces qui est la perte involontaire d’urines précédée par un chement (siège, forceps, épisiotomie, déchirure),
données en fonction de divers paramètres : l’âge des besoin impérieux et intense. Ceci peut survenir au rééducation pelvienne.
sujets étudiés et leur environnement, le type repos, la nuit et sans effort particulier ; – Chirurgie pelvienne (hystérectomie, cure de
d’incontinence, la fréquence de survenue des fuites – l’incontinence urinaire mixte, qui est constituée prolapsus, etc).
et leur importance quantitative et qualitative. par l’association des deux types précédents ;
– Âge des sujets étudiés et leur environnement. – l’incontinence d’origines diverses (regorge- Médicaux
La prévalence de l’incontinence augmente avec ment, fistule, postmictionnelles, urination ?)
Traitements éventuels (anticholinergiques,
l’âge : 12,1 % chez les femmes de 46 ans et 24,6 % (tableau I).
sympatholytiques) (tableau II), constipation, toux
chez les femmes de 86 ans (International Continence
chronique, infections urinaires, diabète, passé
Society 1993). Concernant la femme active,
Éléments physiopathologiques énurétique, obésité, maladies neurologiques,
l’incontinence urinaire toucherait 10 à 15 % d’entre
L’incontinence urinaire survient troubles cognitifs, dépression.
elles (incontinence modérée à sévère). Les
lorsque les forces d’expulsion (poussée
circonstances d’apparition des fuites sont également
abdominale, contraction vésicale) ‚ Questionnaire urologique
différentes selon l’âge.
– Type d’incontinence.
dépassent les forces de retenue – Ancienneté des fuites.
L’incontinence urinaire d’effort est la plus exercées par l’urètre (pression – Fréquence et horaire de la fuite (repos/effort ;
fréquente. Dans un tiers des cas, elle est associée à urétrale, résistance urétrale). diurne/nocturne).
une impériosité mictionnelle. L’incontinence par – Perception de la fuite ou d’un besoin, qualité du
impériosité est plus fréquente chez les patientes les Jugée tantôt comme un handicap invalidant et jet, capacité à interrompre la miction.
plus âgées. dégradant, tantôt comme un avatar inéluctable de la – Type d’effort déclenchant (intensité, brutalité).

1
3-1560 - Incontinence urinaire chez la femme en médecine générale

– la mobilité périnéale : rechercher lors d’un


Tableau I. effort de poussée en position semi-assise un
Incontinence urinaire d’effort Incontinence par impériosité éventuel bombement de l’étage antérieur avec
ouverture de la fente vulvaire (cervicocystoptôse,
Hypermobilité du col vésical par rupture du hamac Instabilité vésicale ; existence de contractions vési- cystocèle postérieure) ou une éventuelle disparition
sous-cervical cales désinhibées pendant la phase de remplissage :
- traumatisme obstétrical surtout - affection locale irritant la muqueuse : infection, des plis radiaires de l’anus (rupture sphinctérienne
- efforts chroniques de poussée (lever de poids, lithiase, tumeur anale).
constipation) - lésion neurologique centrale
- altération de l’arc réflexe ‚ Examen gynécologique
- cause psychogène : pollakiurie au froid,
à l’émotion – La mise en place d’une valve postérieure à
Insuffısance sphinctérienne Instabilité urétrale : par ouverture inopinée du col vessie pleine permet de visualiser une cervicocys-
- traumatisme obstétrical (écrasement sphinctérien, vésical et de l’urètre toptôse et une cystocèle postérieure.
traumatisme neurologique) - urétrites chroniques – Manœuvre de Bonney : la patiente doit
- séquelles de chirurgie ou de radiothérapie - causes psychogènes pousser ou tousser en position gynécologique et
- maladies neurologiques (paraplégies flasques,
polynévrites, syndromes de la queue de cheval) vessie pleine. L’apparition d’un jet d’urine confirme
l’incontinence d’effort. Le même effort est reproduit
La carence œstrogénique par l’intermédiaire des après introduction de deux doigts (ou d’une pince
récepteurs aux œstrogènes (urètre, col vésical,
trigone) longuette) dans la partie distale du vagin, écartés
d’environ 1 cm (afin de repositionner le col vésical).
L’absence de fuite urinaire lors de ce deuxième
Tableau II. – Médicaments favorisant ou précipitant l’incontinence urinaire (ANDEM 1995). temps permet de préjuger de l’utilité d’une
éventuelle cervicocystopexie.
Médicaments Mécanisme – La mise en place d’une valve antérieure (sous la
Anticholinergiques, antihistaminiques, opiacés, anti- Paralysie du détrusor avec incontinence par regor- vessie) permet de visualiser une éventuelle rectocèle.
spasmodiques, antiparkinsoniens, psychotropes gement – Après miction et mise en place d’un spéculum,
Augmentation de la sédation et de la mobilité du il est possible d’apprécier la mobilité du col utérin à la
patient poussée et la présence d’un éventuel prolapsus.
Sédatif, alcool Effet sédatif, augmentation de la diurèse (en plus – Lors du toucher vaginal, l’appréciation du tonus
pour l’alcool), réduction de la mobilité des releveurs et l’existence d’une éventuelle
Sympathomimétiques (alphastimulants) Certains décongestionnants nasaux peuvent entraî- contraction simultanée des muscles abdominaux.
ner chez un patient âgé porteur d’hypertrophie pros-
tatique une rétention vésicale ou une augmentation ‚ Au terme de l’examen clinique (fig 1, 2)
du résidu postmictionnel avec incontinence
par regorgement – Ont été éventuellement mis en évidence : un
Sympatholytiques (alphabloquants) État confusionnel entraînant une incontinence globe vésical source de mictions par regorgement ;
Chute du tonus urétral chez la femme âgée un fécalome.
(dont l’urètre est souvent déjà hypotonique) – Sont identifiés les troubles associés :
constipation, incontinence aux gaz.
– Sont hiérarchisées les demandes prioritaires et
– Association à une pollakiurie, une dysurie, ‚ Évaluation de la gêne quotidienne
leur nature : amélioration, guérison et l’implication
voire une hématurie, à des signes évocateurs d’une
Recherche d’une modification du comportement : de la patiente.
infection urinaire, une dyspareunie.
fausses pollakiuries de précaution, limitation des – Sont différenciées d’autres pathologies : fistule
sorties, utilisation de changes, quantification de la vésicovaginale, maladie neurologique.
‚ Au terme de cet interrogatoire
fuite (nombre et type de changes par jour). Il existe
Au terme de cet interrogatoire, il est déjà possible des questionnaires standardisés dont la mesure du


de distinguer : handicap urinaire (MHU) (tableau III) et l’échelle de
– incontinence urinaire d’effort : fuite en jet, sans qualité de vie Ditrovie (tableau IV). Examens complémentaires
besoin préalable, au cours d’efforts brefs et intenses
(toux, éternuements, course), en général en position
debout ;
– impériosité, instabilité vésicale : fuite précédée
d’un besoin urgent (signe de la clef), améliorée par la
restriction hydrique, jet de bonne qualité, voire

Examen clinique [6]

L’examen clinique comporte une exploration


‚ Examens de première intention
Deux examens semblent importants avant tout
traitement, surtout si est suspecté un facteur
« irritatif » :
explosif ; spécifique minutieuse qui présente plusieurs – examen cytobactériologique des urines (ECBU).
– formes mixtes ; difficultés. En effet, il doit idéalement être réalisé : Ce n’est qu’après traitement d’une éventuelle
– autres tableaux justifiant d’une prise en charge – en deux temps : vessie pleine et vessie vide ; infection urinaire que d’autres explorations peuvent
plus approfondie dont : – en plusieurs positions : patiente couchée, être envisagées ;
– insuffisance sphinctérienne : pas de assise, parfois debout ; – échographie de l’appareil urinaire (haut et bas)
perception du besoin, écoulement aux changements – en plusieurs circonstances : repos, lors d’effort dès qu’est suspecté un regorgement (résidu), une
de position, à la marche. Incapacité à interrompre le de toux, de poussée et de retenue. pathologie vésicale, une lithiase, une malformation.
jet d’urine (fistule urogénitale) ; Les autres examens ne sont indispensables que si
‚ Inspection
– incontinence par regorgement : débor- la chirurgie est envisagée. En particulier, s’il s’agit
dement d’une vessie distendue souvent en fin de Elle permet d’apprécier : d’une incontinence urinaire d’effort typique et isolée,
nuit, obstacle (fécalomes, dysurie iatrogène, – la trophicité vulvaire et vaginale ; la prescription d’une kinésithérapie est licite sans
pathologie neurologique). – la présence de cicatrices ; autre examen.

2
Incontinence urinaire chez la femme en médecine générale - 3-1560

Tableau III. – Échelle mesure du handicap urinaire (MHU) : mesure quantitative des différents symptômes urinaires.

Score 0 1 2 3 4 Scores
Impériosité miction- Absente Délai de sécurité Délai de sécurité Délai de sécurité Délai de sécurité
nelle entre 10 et 15 minu- entre 5 et 10 minutes entre 2 et 5 minutes < 2 minutes
tes ou caractère
immédiatement
pressant du besoin
d’uriner sans fuite
Fuite urinaire par Absente Moins d’une Plusieurs fois/mois Plusieurs Plusieurs fois/jour
impériosité fois/mois fois/semaine
Score impériosité
fuite =
Fréquence miction- Intervalle mictionnel Intervalle mictionnel Intervalle mictionnel Intervalle mictionnel Intervalle mictionnel
nelle diurne > 2 heures 1 h 30 à 2 heures 1 heure 1/2 heure < 1/2 heure
Fréquence miction- 0 ou une deux mictions/nuit 3-4 mictions/nuit 5-6 mictions/nuit > 6 mictions/nuit
nelle nocturne miction/nuit
Score pollakiurie =
Incontinence urinaire Absente Efforts violents Efforts moyens Efforts faibles (toux Au moindre change-
à l’effort (sports, course) (quinte de toux, éter- isolée, marche, ac- ment de position
nuement, soulève- croupissement, mou-
ment, rire) vement brusque)
Score fuite effort =
Autre incontinence 0 En gouttes postmic- Paroxysme émotion- Énurésie Permanentes goute à
tionnelles énurésie nel énurésie (plusieurs/semaines) goutte énurésie (1/j)
(> 1/mois) (1/semaine)
Score autre =
Dysurie rétention 0 Dysurie d’attente, Poussées abdomina- Poussées manuelles Cathétérisme
dysurie terminale les jet haché miction prolongée,
sensation résidu
Score dysurie =

Dans le cas des « urgences mictionnelles » par Colpocystogramme Exploration urodynamique


instabilité vésicale, un traitement médicamenteux est Il s’agit d’un viscérogramme pelvien dynamique L’exploration urodynamique comprend trois
envisageable d’emblée avec une surveillance stricte où sont superposées, après réalisation de calques, phases [17] :
des résultats et avec un recours spécialisé les images de la vessie, du vagin, de l’utérus et du – débitmétrie : mesure du débit urinaire ; évalue
rapidement en cas d’échec ou de résultats rectum après repérage par chaînette du périnée, à la la qualité du jet (vessie pleine). Courbe
incomplets. fois au repos, à l’effort de retenue et de poussée. La monophasique avec un pic supérieur à 15 mL/s (en
mobilité des viscères, l’importance de la ptôse, la général 20-25 mL/s) ;
descente périnéale peuvent être ainsi quantifiées. Il – cystomanométrie : évalue les pressions dans la
‚ Examens de deuxième intention
est d’un intérêt majeur si la patiente a déjà été vessie à différents moments : remplissage, miction.
D’autres investigations sont nécessaires si une opérée ou si l’on recherche une élytrocèle débutante Une sonde de petit calibre est introduite dans la
solution chirurgicale est envisagée. Même s’ils ne (hernie du Douglas) ou encore un prolapsus interne vessie, une autre dans le rectum recueille la pression
relèvent pas d’une prescription de première du rectum ou un asynchronisme abdominopelvien intra-abdominale ;
intention, leurs objectifs et leurs modalités doivent en associant des clichés de défécographie. – profilométrie urétrale : mesure des pressions au
être connus et éventuellement expliqués. retrait du cathéter, à différents niveaux de l’urètre, et
Échographie peut être couplée à la cystomanométrie. Elle évalue
Grâce à des sondes à hautes fréquences utilisées la puissance des muscles sphinctériens.
Cysto-urétrographie
par voie périnéale ou endocavitaire (vaginale ou Cet examen permet l’évaluation de l’équilibre
Elle est réalisée par voie antérograde au décours anale), l’échographie permet de visualiser la vésicosphinctérien :
d’une urographie intraveineuse ou par voie morphologie du col vésical, sa position au repos, sa – compliance de la vessie (pression de
rétrograde par cathétérisme vésical. L’urétrographie mobilité, son ascension volontaire, ainsi que l’effet remplissage), facteur de sécurité pour le haut
après opacification ou mise en place d’un cathéter de la poussée ou de la toux. Peuvent être ainsi appareil, capacité à maintenir une pression basse
ou d’une chaînette intra-urétrale renseigne, par des observés la bascule rotationnelle de la jonction avec le remplissage ;
clichés de profil ou de trois quarts au repos, sur la urétrovésicale, un possible glissement dans l’axe de – contractilité mictionnelle de la vessie, évalue le
position de la jonction urétrovésicale et la valeur de l’urètre, ou encore la vésicalisation de l’urètre, ce que « moteur vésical » et évalue le risque de rétention
l’angle urétrovésical postérieur. Les clichés à la ne permet pas l’examen clinique. En outre, il est après chirurgie si faible (< 30 cmH2O au cours de la
poussée jugent de la mobilité de la jonction possible d’apprécier la position et le volume de miction volontaire) ;
urétrovésicale, de l’existence d’une béance cervicale l’utérus et l’état des annexes. – évaluation des forces qui s’opposent à la
ou d’une cystocèle. Les clichés permictionnels miction : résistance urétrale mictionnelle assurant
explorent l’ouverture du col vésical, les éventuels Endoscopie une « continence sans dysurie » ;
rétrécissements urétraux et accessoirement le reflux C’est un examen de consultation spécialisée, s’il – autres informations plus subjectives : sensibilité
vésico-urétral. existe une suspicion de pathologie urothéliale. vésicale (besoins d’uriner), capacité vésicale (souvent

3
3-1560 - Incontinence urinaire chez la femme en médecine générale

Tableau IV. – Échelle Ditrovie : échelle de qualité de vie utilisable pour l’évaluation du retentissement des troubles mictionnels.

Au cours des 4 dernières semaines, vos troubles urinaires :


Pas du tout Un peu Moyennement Beaucoup Énormément
(1) vous ont-ils gêné lorsque vous étiez à l’extérieur de chez
1 2 3 4 5
vous ?
(2) vous ont-ils gêné pour faire les courses ou les achats ? 1 2 3 4 5
(3) vous ont-ils gêné pour porter quelque chose de lourds ? 1 2 3 4 5
(4) ont-ils nécessité que vous interrompiez fréquemment votre
1 2 3 4 5
travail ou vos activités quotidiennes ?

Au cours des 4 dernières semaines, à cause de vos troubles urinaires, avec quelle fréquence :
Jamais Rarement De temps en temps Souvent En permanence
(5) avez-vous éprouvé un sentiment de honte, de dégradation ? 1 2 3 4 5
(6) avez-vous craint de sentir mauvais ? 1 2 3 4 5
(7) avez-vous perdu patience ? 1 2 3 4 5
(8) avez-vous craint de sortir de chez vous ? 1 2 3 4 5
(9) avez-vous été obligé de vous relever plusieurs fois pendant
1 2 3 4 5
votre sommeil ?

(10) Compte tenu de vos troubles urinaires, comment évaluez-vous actuellement votre qualité de vie ? (entourez la réponse de votre choix)...
Excellente 1 2 3 4 5 Mauvaise

Score global : somme des scores aux dix questions divisée par dix.
Interprétation du score :
1 = correspond à une patiente peu gênée dans ses activités, son psychisme, son sommeil et qui a une excellente qualité de vie.
5 = correspond à une patiente extrêmement gênée dans ses activités, son psychisme, son sommeil et qui a une mauvaise qualité de vie.

inférieure de 40 % au calcul volume de – confirmer ou dépister une instabilité vésicale – prévoir les résultats des interventions
diurèse/nombre de mictions), activité vésicale soupçonnée cliniquement. L’exploration chirurgicales en fonction de la qualité du tonus
(nombre de contractions/volume). urodynamique mesure la force des contractions urétral, vésical et sphinctérien.
L’exploration urodynamique est indispensable vésicales et la qualité de la réponse sphinctérienne ; Les figures 3, 4 et 5 donnent des exemples de
pour : – apprécier l’équilibre vésicosphinctérien ; résultats.

Déroulement de l’examen urodynamique


Après un examen clinique du périnée, l’examen urodynamique comporte en règle trois parties :
✔ la débitmétrie, qui consiste à uriner dans un appareil ressemblant à des toilettes et qui permet de connaître la puissance du jet
urinaire ;
✔ la cystomanométrie, étude des pressions dans la vessie. Après désinfection locale, une sonde de petit calibre, stérile, à usage
unique (ou un microcapteur électronique restérilisable) est introduite dans la vessie par les voies naturelles. La vessie est alors
progressivement remplie avec du sérum physiologique stérile (ou du gaz) et les pressions automatiquement enregistrées. Il est
parfois nécessaire d’associer un enregistrement des pressions abdominales par une sonde rectale ou vaginale, de petit calibre, et
d’analyser l’activité du sphincter urétral par une électrode-aiguille à usage unique (ou dans certains cas par une électrode de
surface). Pendant le remplissage est notée l’apparition des différents besoins d’uriner (besoin habituel, besoin pressant, besoin
impérieux). En fin d’examen, il est demandé d’essayer d’uriner ;
✔ la sphinctérométrie mesure les pressions dans le sphincter, le plus souvent à l’aide de la sonde de cystomanométrie retirée
progressivement hors de la vessie.
L’examen est parfois complété par une exploration électrophysiologique, lorsqu’on recherche une atteinte neurologique. Cette
dernière consiste à examiner par une électrode (aiguille stérile à usage unique) le fonctionnement des muscles et des nerfs du
périnée par des stimulations électriques non douloureuses.
La durée globale de l’examen est variable (de 0,5 à 1 heure).
Il n’est pas nécessaire de boire pour l’examen ; il n’est pas nécessaire d’être à jeun. Dans la mesure du possible le patient doit
s’abstenir d’uriner 1 heure avant l’examen. Il est nécessaire de connaître les traitements suivis. Il est indispensable de connaître
les allergies à des désinfectants locaux ou au latex, la prise de médicaments anticoagulants et le port d’un pacemaker. Aucune
injection de médicament ou de produit de contraste (iode...) ne sera effectuée.
L’examen urodynamique ne peut être réalisé en cas d’infection urinaire.
Malgré toutes les précautions prises, une douleur urétrale pendant la miction est possible pendant quelques heures ou quelques
jours au décours de l’examen, exceptionnellement une infection urinaire. Pour cette raison, il est recommandé d’augmenter le
régime hydrique après l’examen.

4
Incontinence urinaire chez la femme en médecine générale - 3-1560

– phase d’acquisition du verrouillage périnéal à


Interrogatoire l’effort.
Résid
Examen clinique u+
C Exploration Exercices du plancher pelvien
fa aus cause du résidu
cte e Le travail manuel intravaginal des muscles du
ur tran
sp s plancher pelvien permet de faire varier le type de
Incontinence urinaire ré itoi
Primitive cip re contraction (concentrique, excentrique), de localiser
récidivée ita
nt Traitement la stimulation sur des faisceaux musculaires
s
spécifiques et d’apprécier la qualité de la contraction.
Cette technique renforce les muscles du plancher
pelvien. Le travail des muscles du plancher pelvien
Persistance varie en fonction des sollicitations du thérapeute :
– mise en tension des releveurs ;
Endoscopie
Imagerie – demande de contractions statiques ;
Échec – demande de contractions concentriques ou
Examen excentriques ;
urodynamique Rééducation – étirement du noyau fibreux central ;
+ œstrogènes Guérison – facilitation de la commande automatique et du
verrouillage périnéal avant l’effort ;
+ médicaments – contrôle du complexe lombo-pelvi-fémoral.
Le travail manuel est une technique à grande
diversité d’exercices.
Il permet un bon renforcement du plancher
Cervicocystoptôse pelvien avec un recul allant de 2 à 7 ans et présente
Insuffisance sphinctérienne
55 % de résultats corrects dans le temps (11 % de
Mécanisme guérisons, 44 % d’améliorations).
Chirurgical

« Biofeedback » instrumental ou verbal


Traitement
L’ utilisation d’un signal sonore ou visuel permet
d’objectiver la contraction des muscles du plancher
Médical
pelvien, qu’elle soit correcte ou incorrecte. Ceci aide
1 Arbre décisionnel : incontinence urinaire d’effort de la femme. la patiente à améliorer le recrutement musculaire. Il
faut que le testing musculaire soit au moins
‚ « Valsalva leak point pressure » [11] – Incontinence par impériosité (en l’absence de supérieur à 2. Ceci permet une symbolisation de la
Le Valsalva leak point pressure (VLPP) est un test dysurie obstructive). contraction et de son intensité.
permettant une évaluation globale de la fonction – Rééducation préventive après accouchement, Par l’intermédiaire de capteurs, soit électromyo-
sphinctérienne chez la femme. C’est la plus petite chirurgie pelvienne... graphiques, soit manométriques, les patientes
pression intravésicale générée par un effort de Dans l’incontinence multifactorielle, ce qui est prennent conscience, de façon instantanée, de leur
poussée abdominale, à glotte fermée, entraînant souvent le cas, il n’y a pas de facteurs prédictifs activité musculaire par un renvoi visuel ou sonore.
une fuite d’urine en l’absence de toute contraction d’efficacité sûrs. Il est donc nécessaire d’impliquer la Ces capteurs sont, soit des sondes endocavitaires
du détrusor. patiente dans le choix de ce type de traitement. munies d’électrodes de surface, soit des électrodes
Chez des sujets volontaires sains, un effort de de surface, soit des sondes endocavitaires munies
poussée abdominale atteignant jusqu’à 250 cmH2O Buts d’un ballonnet permettant d’enregistrer une
n’entraîne pas de fuite d’urine. McGuire, dans sa Il s’agit d’améliorer la contraction des muscles augmentation de pression lors de la contraction
publication originale sur le VLPP (in [8]), a proposé striés du périnée (sphincter strié de l’urètre et périnéale.
une classification physiopathologique de releveurs de l’anus), d’apprendre la contraction Le biofeedback instrumental est plus efficace,
l’incontinence urinaire d’effort de la femme en réflexe avant l’effort et d’acquérir le verrouillage permet une prise de conscience plus rapide, de
fonction de la valeur du VLPP. Dans cette étude ont périnéal. meilleure qualité et donc plus fiable que le
été analysés simultanément l’urètre en fluoroscopie biofeedback verbal.
au cours d’un examen vidéo-urodynamique et le Techniques [9]
VLPP. Les patientes dont le VLPP était inférieur à 60 Électrostimulation fonctionnelle
La rééducation passive (électrothérapie avec
cmH2O avaient plutôt une incontinence urinaire par utilisation d’une sonde intravaginale, remboursée Les paramètres de l’électrostimulation
insuffisance sphinctérienne, tandis que les patientes par l’assurance maladie, stimulation par courant fonctionnelle (ESF) sont à l’heure actuelle bien
dont le VLPP était supérieur à 60 cmH2O avaient biphasique) est indiquée si le testing musculaire est définis : fréquence de 50 Hz pour provoquer une
plutôt une incontinence par hypermobilité inférieur à 2 sur 5. Les contre-indications à contraction des muscles du plancher pelvien et
cervico-urétrale sans insuffisance sphinctérienne. l’électrostimulation fonctionnelle sont la grossesse, la fréquence de 5 à 25 Hz pour provoquer une
inhibition vésicale.


présence d’un pacemaker, l’hypoesthésie périnéale.
Traitements La rééducation active se déroule en plusieurs Cette technique a plusieurs objectifs :
phases : – inhibition vésicale ;
– phase d’apprentissage : perception de la – aide à la prise de conscience du plancher
‚ Rééducation contraction et du relâchement (plus difficile à sentir) ; pelvien et de ses contractions ;
Indications [13, 14] – phase de l’électivité : dissocier la contraction du – réveil musculaire ou assistance musculaire.
– Essentiellement l’incontinence urinaire d’effort blocage abdominal néfaste ; Pour l’incontinence d’effort, 66 % à 89 % de bons
typique isolée ou associée à un prolapsus de faible – phase de renfort de l’intensité : avec exercices à résultats sont obtenus par l’ESF ; pour l’incontinence
stade. la maison (pipi-stop) ; urinaire par impériosité, 49 % à 72 %.

5
3-1560 - Incontinence urinaire chez la femme en médecine générale

‚ Évaluation de la rééducation
Histoire (ANDEM 1995)
ECBU +
Examen clinique Causes trans
Traitement Guérison L’efficacité de la rééducation et son évaluation
ECBU itoires
ire peuvent reposer au mieux sur une fiche de liaison
a
rin adressée au prescripteur et/ou au médecin traitant
c eu
en
tin comme le propose l’ANAES (décembre 1999)
on
inc
n ce (tableau V). Cette fiche rassemble les informations
rsista concernant le bilan de rééducation de la patiente.
Objectivation des fuites Pe Traitements
Recherche résidu Guérison À l’issue d’une première série de séances de
spécifiques
Cystoscopie + cytologie rééducation, soit il y a une amélioration mais
Persistance IU

insuffisante et le traitement peut être prolongé d’une


série de dix à 15 séances, soit aucune amélioration
clinique objectivable ou subjective n’est notée et il
n’est pas nécessaire de poursuivre une rééducation
inefficace, soit l’amélioration est satisfaisante et la
Résidu
rééducation peut être interrompue. Il est toutefois
Rééducation + postmictionnel
Mécanisme recommandé d’assurer un suivi et une autoprise en
traitement physiopathologique
pharmacologique charge des patientes dans le temps.
Le succès initial de la rééducation est inconstant
Guérison (trois cas sur quatre) et pas forcément durable. Les
résultats le plus souvent corrects après 1 an se
dégradent en fin de deuxième année, et en fin de
Persistance des fuites troisième année, seulement 25 % des patientes
Pas d'obstruction Obstruction restent améliorées.
Évaluation urodynamique
Outre la fiche de liaison, l’efficacité de la
rééducation peut être appréciée sur l’association de
Sondage intermittent divers paramètres.
Chirurgie Palliatif Rééducation – Critères d’incapacité, critères de fuites urinaires :
Autre traitement Traitement
– subjectifs : autoévaluation de la patiente en
fin de traitement ;
– quantitatifs : les pad-tests ;
Guérison – quantitatifs : nombre de protections utilisées.
Chirurgie – Critères de fréquence, avant et après
Autre rééducation :
– fréquence des mictions ;
– fréquence des fuites.
2 Arbre décisionnel : incontinence urinaire (IU) mixte de la femme non neurologique. ECBU : examen
cytobactériologique des urines. ‚ Prescription de rééducation [20]
Traitements comportementaux par la rééducation par exercices du plancher pelvien La prescription est toujours de la responsabilité
La programmation mictionnelle qui s’appuie sur et évitaient la chirurgie pour l’incontinence urinaire médicale. « Le médecin peut, s’il le souhaite, préciser
le calendrier mictionnel est couramment utilisée. Elle d’effort et l’incontinence urinaire mixte. sa prescription, qui s’impose alors au masseur-
a pour but de redonner aux patientes, souvent La diminution des bons résultats à long terme kinésithérapeute ». Toute incontinence urinaire est
pollakiuriques, une fréquence mictionnelle la plus rend nécessaires la mise en place d’une stratégie de susceptible de bénéficier d’une rééducation :
proche possible de la normale (cinq à sept mictions suivi des patientes et le fait d’insister sur – incontinence urinaire isolée liée ou non à
par jour, aucune à une miction par nuit). l’autoentretien des patientes. La rééducation l’effort ;
À l’aide de fiches journalières et d’un pointage comportementale nécessite que les patientes soient – incontinence urinaire associée à des troubles
régulier des mictions, des fuites, des besoins dans un état psychique et physique correct. mictionnels (pollakiurie, impériosité mictionnelle,
impérieux, chaque femme peut suivre l’évolution de dysurie) ;
Cônes vaginaux
sa propre prise en charge. Les patientes apprennent – incontinence urinaire associée à une
La patiente doit retenir en contractant les muscles
à différer les mictions « inutiles » par le verrouillage incontinence anale et/ou à des troubles
périnéaux un cône introduit dans le vagin, la partie
périnéal, elles inhibent les contractions vésicales génitosexuels ;
effilée reposant sur la face profonde du périnée, ceci
grâce au réflexe périnéodétrusorien inhibiteur. La – incontinence urinaire associée à un prolapsus
pendant 15 minutes. Sont utilisés successivement au
rééducation comportementale apparaît comme un vésical, utérin ou rectoanal ;
cours de la rééducation, des cônes de volume et de
traitement de première intention adapté de – incontinence urinaire d’origine neurologique
formes identiques mais de poids croissant.
l’incontinence par impériosité, avec 80,7 % de dans quelques cas particuliers.
C’est une solution alternative à la rééducation
réduction des fuites par rapport au traitement Cependant, le bilan médical doit avoir éliminé
périnéale traditionnelle, quand il y a refus ou
médicamenteux (68,5 % de réduction) et au groupe une cause organique dont l’incontinence urinaire
indisponibilité des patientes.
contrôle (39,4 % de réduction). La rééducation pourrait être le seul signe fonctionnel d’appel, et
comportementale paraît adaptée à la prise en ‚ Dispositifs intravaginaux dont le traitement pourrait suffire (infection urinaire,
charge de l’incontinence urinaire des personnes Les moules en Silastict, pessaires, gardent des lithiase urinaire, tumeur pelvienne, rétrécissement
âgées et peut être également une solution indications car ils sont d’utilisation simple et d’une urétral...). L’interrogatoire précis et l’examen clinique
thérapeutique chez les patientes plus jeunes qui ont tolérance actuelle satisfaisante. Ils donnent de plus systématique sont une aide précieuse pour ce
modifié leur comportement mictionnel du fait de la une indication diagnostique concernant le diagnostic différentiel : impossibilité d’interruption du
gêne induite par l’incontinence urinaire. À 1 an, mécanisme de l’incontinence urinaire, dans l’attente jet mictionnel (stop-test), béance vulvaire, testing des
47 % des patientes étaient guéries ou améliorées d’une intervention chirurgicale. muscles releveurs de l’anus inférieur à 3 sur 5, en

6
Incontinence urinaire chez la femme en médecine générale - 3-1560

3 Exemple d’examen urodynamique pratiqué chez une femme de 46 ans présen- Courbe bleue : cystomanométrie. La pression vésicale est stable. Courbe verte :
tant une incontinence urinaire d’effort. L’examen urodynamique rapporte les différentiel pression urétrale-pression vésicale. Les pics négatifs témoignent d’un
troubles à une insuffısance de pression de clôture cervico-urétrale ; le trouble de déficit de la transmission des pressions vésicales (courbe bleue) à l’urètre (courbe
la transmission des pressions vésico-urétrales est modéré (30 %) et ne paraît pas rouge). UF ; longueur fonctionnelle de l’urètre ; AC : aire de continence ; PC :
expliquer l’incontinence urinaire d’effort. Courbe rouge : sphinctérométrie. La pression de clôture.
pression de clôture cervico-urétrale est basse (30 cmH2O ; normale 60 cmH2O).

4 Exemple d’examen urodynamique pratiqué chez une femme de 60 ans présen- urétrale (106,6 à 122 %), également signe de l’instabilité urétrale. Courbe bleue :
tant une incontinence urinaire d’effort non pure. L’examen urodynamique rap- cystomanométrie. Il existe une instabilité vésicale après 239 mL de remplissage,
porte les troubles à une instabilité vésico-urétrale. Il y a une bonne corrélation sous forme de contraction mal inhibée. LUF : longueur fonctionnelle de l’urètre ;
entre la symptomatologie clinique et les données urodynamiques. Courbe rouge : AC : aire de continence ; PC : pression de clôture ; PU : pression urétrale ; PV :
sphinctérométrie. Les pressions de clôture cervico-urétrale sont variables (25 à 48 pression vésicale ; PVB : pression vésicale de base.
cmH2O). La pression urétrale est instable. Il y a une hypertransmission vésico-

faveur d’une insuffisance sphinctérienne d’une seule technique ou s’il est nécessaire d’associer degrés), la prescription est de 20 séances, pouvant
incontinence urinaire d’effort pure, prolapsus en plusieurs techniques (ce qui est le cas le plus être prolongée jusqu’à 40, et parfois davantage, en
faveur d’un défaut de soutènement urétral... Il est fréquent). La prescription doit donc correspondre au particulier lorsqu’il s’agit d’une insuffisance
donc utile de faire figurer sur l’ordonnance un libellé suivant : rééducation périnéale active sous sphinctérienne, et en fonction de l’évolution clinique
diagnostic le plus précis possible : typologie précise contrôle manuel et/ou électrostimulation et/ou constatée et contrôlée. Dans cette dernière
de l’incontinence urinaire, données de l’examen biofeedback. indication, un autotraitement à domicile par
pelvipérinéal, mécanismes physiopathologiques Lorsque la rééducation est une technique électrostimulation neuromusculaire est possible :
supposés ou précisés par le bilan urodynamique. thérapeutique d’attente (préopératoire) ou d’essai après objectivation de l’insuffisance sphinctérienne
Les techniques efficaces dans la rééducation de (incontinence urinaire très marquée, prolapsus de au bilan urodynamique, après une période
l’incontinence urinaire peuvent être : kinésithérapie grade élevé), dix séances sont suffisantes pour probatoire de 6 à 8 semaines et contrôle
manuelle, méthodes instrumentales de rétrocontrôle apprécier l’efficacité ou non. Lorsque la rééducation post-thérapeutique. La prise en charge de cet
(biofeedback), ESF, traitements comportementaux. paraît la première technique thérapeutique autotraitement n’est pas cumulable sur une même
Sauf cas particuliers (grossesse, post-partum précoce, souhaitable (incontinence urinaire de gravité période avec toute autre technique de rééducation
personnes âgées), on ne peut établir a priori s’il suffit modérée ou moyenne, prolapsus des premiers périnéale.

7
3-1560 - Incontinence urinaire chez la femme en médecine générale

5 Exemple d’examen urodynamique pratiqué chez une femme de 73 ans présen- contemporaines. Courbe bleue : cystomanométrie. Il y a une hypertonie intravé-
tant une rétention avec fuites par regorgement. Il y a une bonne concordance entre sicale (en fin de remplissage le chiffre normal des pressions vésicales est toujours
les signes fonctionnels urinaires et les anomalies urodynamiques. Il y a suspicion inférieur à 20 cmH2O). Il n’y a aucune activité contractile de la vessie et une
de vessie neurologique. Courbe rouge : prise de pression urétrale en continue. Il perception tardive du besoin d’uriner (B1 : 245 mL ; normale 150 mL). PV :
existe une hypertonie urétrale avec hyperréflexie car le premier pic d’hyperpres- pression vésicale ; PVB : pression vésicale de base.
sion urétrale est beaucoup plus élevé que les pressions vésicales et abdominales

première séance). Le kinésithérapeute doit


Tableau V. – Fiche de liaison reprenant les indicateurs de suivi chez une patiente incontinente également être formé, équipé, motivé et patient...
traitée par la rééducation périnéosphinctérienne.
Dix à 20 séances de 30 minutes sont
Nom : Prénom : Date : recommandées avec kinésithérapie manuelle au
Date de naissance : début, à raison d’une à deux séances par
Motif de la consultation : semaine.
Nom du thérapeute : Nom du médecin prescripteur : Nom du médecin traitant :
Testing intravaginal des muscles rele- Date de début Date intermédiaire Date de fin
veurs de l’anus. Cotation de 0 à 5 (1)
Côté droit
Côté gauche
Nombre de fuites

Traitements médicamenteux

‚ Traitements diminuant la contractilité


[10]

Jour
Nuit vésicale
Nombre et type de protections Ils sont utilisés devant un tableau où domine
Jour l’impériosité mictionnelle, plus qu’une insuffisance
Nuit sphinctérienne.
Échelle MHU
Anticholinergiques et antispasmodiques
Échelle de qualité de vie musculotropes
Contilifet L’atropine et les anticholinergiques bloquent la
Autre échelle stimulation parasympathique qui entraîne la
contraction du détrusor. Ce blocage est souvent
Détails de la rééducation Commentaires
incomplet.
(1)
La molécule la plus efficace dans ce groupe est
Cotation du testing de 0 à 5 : 0 = pas de contraction palpable ; 5 = contraction maximale. MHU : mesure du handicap urinaire.
l’oxybutinine (Ditropant, Driptanet).
Sa courte demi-vie impose trois à quatre prises
La rééducation périnéosphinctérienne, de par sa En pratique, la patiente doit être apte à un travail quotidiennes. Une première prescription doit être
spécificité, son champ d’activité et les connaissances prolongé, volontaire, bien informée (surtout pour la d’un demi-comprimé toutes les 8 heures. Les doses
particulières qu’elle exige, nécessite des peuvent être augmentées d’un demi-comprimé
kinésithérapeutes ayant reçu une formation
spécifique, postérieure à la formation initiale. Le
contrôle de la qualité des soins de kinésithérapie, Ordonnance type
délivrés de façon individuelle, justifie le devoir du Rééducation périnéale avec électrothérapie endocavitaire, travail actif par technique
prescripteur de s’enquérir de la compétence du manuelle associée dès que possible au biofeedback, acquisition de l’automatisme du
rééducateur auquel il confie sa patiente. C’est dire verrouillage périnéal à l’effort et lors des urgences mictionnelles : une à deux
que cela nécessite un minimum de connaissance des séances par semaine, 15 séances.
techniques et de leurs règles d’application. (Sonde d’électrostimulation à prescrire séparément)

8
Incontinence urinaire chez la femme en médecine générale - 3-1560

toutes les 4 heures, soit un total de trois comprimés joue un rôle dans la qualité de la continence. Les Cette technique est indiquée dans les
sur 24 heures. Elle est contre-indiquée en cas de œstrogènes peuvent être utilisés par voie générale incontinences d’effort, y compris s’il existe une
glaucome à angle fermé. Ses effets secondaires ou par voie locale. Par voie locale, il y a néanmoins instabilité sphinctérienne.
principaux sont la sécheresse de la bouche et la un léger passage dans la circulation plasmatique et Les résultats sont meilleurs (80-90 %) et plus
constipation. les contre-indications habituelles à l’utilisation des stables à long terme, mais le risque de dysurie est
Prescrite pour une durée initiale de 3 à 4 mois, en œstrogènes s’appliquent donc. En outre, certaines plus important.
tenant compte des effets secondaires, l’évaluation de femmes âgées ne continuent pas le traitement local
son efficacité peut conduire à diminuer le traitement en raison d’effets secondaires à type de réveil de la ‚ Autres techniques
jusqu’à la dose minimale efficace ou à l’arrêt en cas libido parfois mal accepté dans le grand âge.
d’inefficacité. L’association alphamimétiques et supplémen- Sphincter artificiel de l’urètre
Dès la prescription initiale, les patientes doivent tation œstrogénique peut être tentée lorsque la Il s’agit d’une prothèse hydraulique en silicone,
être averties de la diminution de la contraction du monothérapie ne suffit pas. totalement implantable, composée d’une manchette
détrusor et donc d’une miction plus longue et lente gonflable située autour du col de la vessie, d’un


et de la nécessité de dépister un éventuel résidu ballonnet prévésical qui détermine la pression dans
postmictionnel par une échographie. Traitement chirurgical [7, 15, 22] la manchette et qui sert de réservoir au liquide qui
D’autres classes thérapeutiques ont été utilisées, remplit le sphincter, d’une pompe placée dans la
mais le niveau de preuve associé à leur emploi reste grande lèvre et de tubulures reliant ces trois
Dans tous les cas, le résultat de la chirurgie est
faible : éléments. L’indication en est l’incontinence récidivée
d’autant plus favorable qu’il s’agit d’une
– flavoxate (Urispast), antispasmodique avec manœuvre de Bonney négative et insuffisance
incontinence avec peu ou pas d’impériosités, que le
musculotrope sans effet cholinergique et donc doté sphinctérienne sévère.
sphincter est tonique et que le détrusor est
de peu d’effets secondaires. Il est utile en cas Le taux de succès à 10 ans se maintient à 80 à
normoactif. C’est une chirurgie fonctionnelle dont
d’intolérance aux parasympatholytiques habituels ; 90 %. Il faut parfois réintervenir pour changer la
l’indication dépend essentiellement de l’évaluation
– anticalciques, partiellement efficaces. Des prothèse (érosion urétrale, infection ou changement
de la gravité du trouble par la patiente. C’est aussi
risques de torsades de pointe ont été décrits après d’un élément).
une chirurgie non dénuée d’échecs : persistance de
emploi dans l’incontinence urinaire ; l’incontinence ou apparition d’une dysurie. Enfin, il
– anti-inflammatoires non stéroïdiens : ils ont été Injections endo-urétrales [12]
faut prendre en compte les autres troubles de la
utilisés mais leurs effets secondaires digestifs rendent statique pelvienne qui peuvent s’aggraver après Réalisées par voie endo-urétrale ou plus rarement
impossible leur emploi sur de longues périodes ; l’intervention (fixation de la région cervico-urétrale). péri-urétrale, sous endoscopie, ces injections sont
– agonistes bêta-adrénergiques (terbutaline : Les indications principales reposent donc sur le composées de Téflon, collagène, graisse autologue,
Bricanylt), mais ils ont des effets secondaires choix de la patiente, l’échec des traitements particules de silicone ou petits ballons en silicone.
fréquents dans cette indication (tachycardie, antérieurs et sur les mécanismes de l’incontinence. Elles visent à créer un obstacle cervico-urétral.
tremblements) ; Le bilan préopératoire prend toute son Elles sont réservées aux incontinences par
– antidépresseurs tricycliques, en particulier importance. Deux éléments sont prépondérants : le insuffisance sphinctérienne et test de Bonney
imipraminiques, longtemps très utilisés, ont des test de Bonney et l’imagerie. négatif. Le taux de succès varie de 30 à 40 % à
effets secondaires très gênants. – Si le test de Bonney est positif et qu’il y a 2 ans.
En pratique, les anticholinergiques sont les plus descente du col, l’intervention chirurgicale a de
utilisés dans cette famille ; les anticalciques et les


bonnes chances de réussite.
antidépresseurs peuvent être intéressants si une – Si le test de Bonney est négatif et qu’il y a Populations particulières
autre pathologie (cardiovasculaire pour les descente du col, le succès chirurgical est plus
anticalciques, psychiatrique pour les antidépresseurs) aléatoire.
justifie par ailleurs leur emploi. – Si le test de Bonney est négatif et le col est en ‚ Grossesse et accouchement [8, 21]
place, il n’y a pas d’indication à la chirurgie classique.
‚ Traitements augmentant les résistances Pendant la grossesse, la prévalence de
urétrales ‚ Techniques opératoires prédominantes l’incontinence urinaire d’effort varie de 30 à 67 %.
Les femmes de race blanche et les multipares sont
Ils sont utilisés face à un tableau où domine Colposuspension les plus exposées. Parmi les troubles mictionnels, la
l’insuffisance sphinctérienne (fuites à l’effort, urètre
La plus fréquente des colposuspensions est celle pollakiurie et l’impériosité mictionnelle sont
mobile en poussée, pression de clôture urétrale
de Burch, consistant à suspendre la paroi vaginale fréquentes, apparaissant vers la fin du premier
abaissée).
antérieure par des fils amarrés au ligament de trimestre. Les troubles sont maximaux au troisième
Le col vésical et l’urètre proximal sont richement Cooper situé au bord supérieur du pubis. trimestre. La rétention est classique mais rare, le fait
innervés par des fibres orthosympathiques dont la
L’objectif de cette intervention est de remonter le d’un prolapsus important, chez les multipares. Les
stimulation entraîne la fermeture du col et
col dans l’enceinte manométrique de l’abdomen. mécanismes responsables des fuites sont
l’augmentation des pressions urétrales. Les agonistes
Cette technique est indiquée dans l’incontinence nombreux : parfois aggravation d’une incontinence
alpha-adrénergiques peuvent améliorer la fermeture
d’effort à test de Bonney positif et pression de clôture préexistante, insuffisance sphinctérienne
du col vésical, mais leur emploi doit être prudent en
normale. Il y a alors 80 % de succès à 2 ans, mais (incontinence urinaire souvent invalidante),
cas d’hypertension artérielle, de trouble
avec un taux de dysurie de 10 %, et les résultats se instabilité vésicale (fuite par impériosité en fin de
cardiovasculaire ou d’hyperthyroïdie. Le principal
dégradent à long terme. grossesse). Il y a encore les modifications
produit de ce groupe est la phénylpropanolamine,
hormonales et anatomiques qui se répercutent sur le
qui se trouve dans divers médicaments utilisés dans Bandelettes sous-cervico-urétrales ou frondes fonctionnement du bas appareil urinaire,
les rhinites. Ce traitement, utilisé dans cette Il s’agit de mettre en place une « hémiceinture » de l’hyperlordose, l’hyperpression intrapelvienne.
indication aux États-Unis, n’a pas l’autorisation de la région cervico-urétrale constituée par une L’incontinence urinaire va disparaître dans 80 % des
mise sur le marché en France dans cette indication. bandelette aponévrotique ou synthétique (TVTt) cas. Deux éléments sémiologiques font craindre la
fixée au pubis. persistance des troubles : une incontinence urinaire
‚ Œstrogènes
L’objectif de cette intervention est de rendre importante dès le premier trimestre par insuffisance
L’imprégnation œstrogénique améliore la solidaires les deux berges du col vésical, empêchant sphinctérienne, une incontinence apparaissant dans
trophicité du trigone et de l’urètre féminins, et par là la berge postérieure de s’ouvrir à l’effort. le post-partum. La prise en charge thérapeutique se

9
3-1560 - Incontinence urinaire chez la femme en médecine générale

limite à une information, des prescriptions musculation de la sangle abdominale n’est nombre de cas (70 % environ), la prise en charge
hygiénodiététiques, parfois une rééducation envisagée que lorsque la commande des muscles thérapeutique des différents facteurs, dans le cadre
périnéale (travail actif pur, en cas d’incontinence périnéaux est normale. Si les facteurs de risque sont d’une prise en charge globale, conduit à la
invalidante et mal vécue), plus rarement un nombreux et s’il existe une incontinence urinaire disparition des troubles, même chez les malades
traitement anticholinergique (instabilité vésicale invalidante (20 % des accouchements), la affaiblis intellectuellement (cependant MMS > 20). La
dans le dernier trimestre). rééducation pelvipérinéale spécifique est seule prise en charge globale intéressant l’ensemble de
Dans le post-partum, la prévalence est variable, entreprise (prescription de 20 séances d’emblée). En l’équipe soignante est bien visualisée sur des
en particulier selon le temps écoulé depuis cas d’échec ou de résultat insuffisant, une schémas.
l’accouchement : post-partum immédiat, retour de exploration urodynamique est nécessaire, de même Les mécanismes de réapparition d’une
couches, post-partum « tardif », de 10 à 21,5 % des lorsque les signes cliniques mictionnels sont incontinence urinaire, qui avait été contrôlée après
femmes. Les facteurs favorisants sont nombreux d’interprétation difficile. une prise en charge thérapeutique, sont
mais tous controversés, essentiellement : multifactoriels et relèvent en règle d’un déficit de la
accouchement par voie basse, rôle du premier ‚ Femmes âgées [14] prise en charge. C’est ainsi qu’une « formation
accouchement, périmètre crânien supérieur à 35 cm, La prévalence de l’incontinence urinaire chez les continue » est indispensable pour cette catégorie de
poids de l’enfant supérieur à 3 700 g, enfant de petit personnes vivant à leur domicile, comme chez celles soins : motivation, formation, organisation,
poids (expulsion en « bouchon de champagne »), vivant en institution, est très variable dans la responsabilisation.
distance anovulvaire courte (inférieure à 20 mm), littérature, respectivement 2,2 à 42 % à domicile, Les techniques de traitement de l’incontinence
distance anopubienne courte (inférieure à 50 mm), 12,6 à 48 % en institution, voire plus. Dans cette urinaire de la personne âgée sont identiques à celles
incontinence urinaire pendant la grossesse, dernière population, il existe un lien très significatif utilisées dans les autres groupes : traitements
présentation par le siège, manœuvres instrumen- entre la prévalence des affections neuropsychia- médicamenteux, rééducation, chirurgie. Le
tales, expression abdominale, hypotonie du centre triques et celle de l’incontinence urinaire d’une part, traitement comportemental, la suppression des
tendineux pelvien (CTP), hypoplasie vaginale, atrésie de la polypathologie aggravant la dépendance facteurs précipitants sont les traitements de première
vaginale. d’autre part, à tel point que l’incontinence urinaire intention.
Il n’en reste pas moins que le traumatisme est un bon facteur évaluant la dépendance, et même
obstétrical est le grand pourvoyeur de l’incontinence
urinaire d’effort chez la femme. À chaque
accouchement, même eutocique, il y a des lésions
périnéales. Les mécanismes invoqués sont souvent
dans l’hémiplégie vasculaire par exemple, de
pronostic vital. La typologie clinique et
urodynamique de l’incontinence urinaire se répartit
entre insuffisance sphinctérienne, instabilité vésicale,

Conclusion

L’incontinence urinaire chez la femme, problème


mixte, et rétention chronique, dont la symptomato- de Santé publique de par sa prévalence dans la
associés : lésions des fibres nerveuses par étirement
logie fonctionnelle peut être commune : population générale, son retentissement démontré
ou compression des nerfs honteux internes, des
incontinence urinaire d’effort ou par impériosité et connu sur la qualité de vie, son coût pour les
fibres musculaires striées ; lésions cutanées, lésions
mictionnelle, pollakiurie, ou même miction personnes généré par les palliatifs, justifie et
ligamentaires qui sont irréversibles. L’incontinence
apparemment involontaire. nécessite une conduite diagnostique rigoureuse, en
urinaire est ainsi rare après césarienne, mais plus
particulier dans la recherche des mécanismes
élevée cependant que dans une population Le bilan urodynamique est souvent utile pour
physiopathologiques, et une thérapeutique établie
nullipare. L’évolution de l’incontinence urinaire se préciser le ou les mécanismes en cause. Un tel bilan
en programme.
fait vers la régression spontanée dans plus de deux est utile s’il existe une efficience corticale suffisante
tiers des cas. La pratique d’une épisiotomie bien faite (mini mental state [MMS] > 10). Ces éléments sont actuellement parfaitement
et au bon moment est reconnue comme un geste de Après 70 ans, le vieillissement normal et systématisés et peuvent être appliqués dans bon
prévention de l’incontinence urinaire. pathologique de l’appareil vésicosphinctérien et des nombre de situations.
La rééducation est utile pour toutes les systèmes de régulation et de contrôle contribue à Les résultats obtenus pour l’ensemble de la
accouchées. En l’absence de facteur de risque et une fragilisation des mécanismes de la continence : population incontinente sont satisfaisants à court
d’incontinence urinaire, la gymnastique périnéale altération des mécanismes de clôture cervico- terme (deux tiers d’amélioration ou plus selon les
peut être pratiquée avec prudence. S’il existe un ou urétrale, désinhibition du réflexe mictionnel, techniques utilisées) et « tiennent » à moyen terme
plusieurs facteurs de risque et une incontinence altération du contrôle encéphalique du cycle chez un patient sur deux au moins. C’est dire qu’une
urinaire modérée, ou d’autres troubles mictionnels miction-continence. Dès lors, un certain nombre de surveillance médicale est toujours nécessaire, quand
bénins, la rééducation spécifique du périnée est à facteurs ajoutés révèle une incontinence urinaire on connaît quelques facteurs précipitants ou
faire en premier, après la visite postnatale (6 à 8 jusqu’alors potentielle : perte d’efficience corticale, aggravants de l’incontinence urinaire, surtout chez
semaines après l’accouchement). Il s’agit des facteurs d’irritation vésicale, facteurs écologiques, les personnes âgées de plus de 70 ans, et qu’il est
techniques de rééducation classiques ; la action iatrogène des médicaments. Dans un bon possible de prévenir ou de pallier rapidement.

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Incontinence urinaire chez la femme en médecine générale - 3-1560

Anne-Marie Magnier : Professeur des Universités, associé de médecine générale,


département de médecine générale.
Michel Perrigot : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Patrick Vu : Chef de clinique-assistant.
Dominique Mazevet : Praticien hospitalier.
Service de médecine physique et de réadaptation, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 75013 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Magnier AM, Perrigot M, Vu P et Mazevet D. Incontinence urinaire chez la femme en médecine générale.
Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1560, 2002, 11 p

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[7] Darai E, Grossman T, Benefila JL, Meneux E, Panel P, Benzakrine Y et al. vier, 1998 : 67-85
L’incontinence urinaire à l’effort : prise en charge endoscopique. In : Amarenco G,
Serment G éd. L’incontinence urinaire féminine. SIFUD - Actualités en urodyna-
mique. Paris : Elsevier, 1998 : 90-104 [18] Pélissier J, Costa P, Lopez S, Marès P. Rééducation vésicosphinctérienne et
anorectale. Progrès en médecine de rééducation. Paris : Masson, 1992
[8] Fatton B, Jacquetin B. Physiologie des troubles mictionnels de la grossesse et
de l’accouchement. In : Amarenco G, Serment G éd. L’incontinence urinaire [19] Recommandations pour la pratique clinique. Évaluation et état des connais-
féminine. SIFUD - Actualités en urodynamique. Paris : Elsevier, 1998 : 74-89 sances concernant l’incontinence urinaire de l’adulte. Paris : ANDEM, 1995

[9] Grosse D, Sengler J. Évaluation des techniques de rééducation périnéale. In : [20] Roques CF, Chatain M, Courtade D. La prescription en rééducation. In :
Amarenco G, Serment G éd. L’incontinence urinaire féminine. SIFUD - Actuali- Held JP, Dizien O éd. Traité de médecine physique et de réadaptation, Paris :
tés en urodynamique. Paris : Elsevier, 1998 : 121-150 Flammarion Médecine-Sciences, 1998 : 320-323

[10] Haab F. Traitement médical per os de l’instabilité vésicale. In : Amarenco G, [21] Serment G, Baudier G. Troubles mictionnels de la grossesse et du post-
Serment G éd. L’hyperactivité vésicale. SIFUD - Actualités en urodynamique. partum. Paris : SIFUD, 1994
Paris : Elsevier, 1998 : 159-167
[22] Serment G, Sakr R, Bladou F. Traitement chirurgical de l’insuffisance sphinc-
[11] Haab F, Ciofu C. Place du Valsalva leak point pressure (VLPP) dans l’explo- térienne (hors sphincter artificiel). In : Amarenco G, Serment G éd. L’insuffisance
ration de l’incontinence urinaire de la femme. In : Amarenco G, Serment G éd. sphinctérienne de la femme. SIFUD - Actualités en urodynamique. Paris : Else-
L’insuffisance sphinctérienne de la femme. SIFUD - Actualités en urodynamique. vier, 2000 : 257-265
Paris : Elsevier, 2000 : 143-153

11
¶ 3-1370

Interruption volontaire de grossesse


J. Brunerie-Kauffmann

L’interruption volontaire de grossesse (IVG) concerne environ 200 000 femmes en France chaque année.
Sa pratique est possible selon deux protocoles : L’IVG médicamenteuse jusqu’à sept semaines
d’aménorrhée, par administration de mifépristone (Mifégyne®) suivie de misoprostol (Cytotec®), depuis
juillet 2001, cette méthode peut être pratiquée en ville. L’IVG chirurgicale jusqu’à quatorze semaines
d’aménorrhée doit être pratiquée en milieu hospitalier, sous anesthésie générale ou anesthésie locale, par
aspiration après dilatation cervicale facilitée par l’administration de Mifépristone et de Misoprostol. Il est
nécessaire que se développe la prise en charge hors hôpital de l’IVG médicamenteuse et la pratique de
l’anesthésie locale pour l’IVG chirurgicale. Il faut insister sur la nécessaire prise en charge psychologique
de la femme pour étudier les causes de cette IVG et la contraception ultérieure.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Avortement ; Mifépristone (Mifégyne®) ; Misoprostol (Cytotec®) ; Aspiration pour IVG ;
Anesthésie locale pour IVG ; Dilatation du col pour IVG ; Avortement médicamenteux

Plan De nombreuses implications d’ordre religieux, éthique et


moral viennent encore perturber le déroulement des IVG.
Une insuffisance de la prise en charge des IVG perdure tant
¶ Introduction 1
dans le secteur public que dans le secteur privé, obligeant
¶ Loi 1 encore un certain nombre de femmes à se rendre dans les pays
Décision 1 limitrophes plus accueillants.
Délai 1 Le rôle du médecin est capital lors de la prise en charge de la
Lieu 1 femme et du couple lors de la demande d’IVG. C’est de cette
Déroulement 2 écoute et de l’accueil de l’équipe vers laquelle ils seront orientés
Femmes étrangères 2 que dépendra le vécu de cet acte difficile survenant le plus
Mineures 2 souvent lors d’un conflit d’ordre conjugal, psychologique ou
Frais 2 social.
Bulletin statistique 2
¶ IVG, les chiffres 2
¶ Techniques chirurgicales ou médicamenteuses 2 ■ Loi
Première consultation 2
La loi du 17 janvier 1975, puis du 30 novembre 1979, a
¶ Techniques médicamenteuses 3 défini le cadre de la pratique des IVG. Ce cadre a été élargi par
Indications 3 la loi du 4 juillet 2001. [1]
Technique 3
Prescription 3
Contrôle 3
Décision
Discussion 3 La décision de l’acte appartient à la femme seule.
¶ Techniques chirurgicales 3
Dilatation-aspiration 3 Délai
Intervention 3
Complications 4 Le délai légal pour le recours à l’IVG a été porté à 12 semai-
Consultation postopératoire après deux semaines 4 nes de grossesse, soit 14 semaines d’aménorrhée.
Complications des méthodes chirurgicales 4
Lieu
L’IVG peut être pratiquée :
• dans les établissements publics de santé ;
■ Introduction Tout médecin peut opposer une clause de conscience mais le
chef de service est tenu d’en assurer l’organisation.
L’IVG est un acte médical particulier. Sa pratique, longtemps • dans les établissements privés de santé sans quota ;
interdite, est encore pénalisée par la loi de 1920, en dehors du Celui-ci a été supprimé par la loi de 2001 ;
cadre défini par la loi Veil de 1975 élargie par la loi de 2001 ; • hors établissements de santé ;

Traité de Médecine Akos 1


3-1370 ¶ Interruption volontaire de grossesse

Les nouvelles dispositions de la loi permettent d’envisager la


prise en charge des IVG médicamenteuses en médecine
■ IVG, les chiffres
ambulatoire dans le cadre d’une convention, fixée par le Les chiffres les plus importants sont résumés dans le
décret du 30 mai 2002, liant un établissement autorisé à Tableau 1. Le nombre d’IVG en France est stable depuis de très
pratiquer des IVG et des praticiens d’exercice libéral. .
nombreuses années, avoisinant le chiffre de 200 000. [4] La
Il existe un délit d’entrave à la pratique de l’IVG. pratique se fait pour les deux tiers en milieu hospitalier. La
technique médicamenteuse concerne un tiers des IVG.

Déroulement
• Le médecin doit dès la première consultation informer la
■ Techniques chirurgicales
femme des différentes techniques d’IVG et des risques ou médicamenteuses
encourus.
• Un dossier guide doit lui être remis. Première consultation
• Un délai de réflexion d’une semaine est obligatoire.
• Un entretien social doit être systématiquement proposé avant Interrogatoire
et après l’IVG mais n’est plus obligatoire pour les femmes
majeures. • Dialogue ouvert.
• Antécédents médicaux, chirurgicaux, gynécologiques et
obstétricaux.
• Date des dernières règles.
Femmes étrangères • Métrorragies, douleur.
La réalisation d’une IVG pour une femme étrangère n’est plus
soumise à aucune condition de durée et de régularité de séjour. Examen
• Spéculum : dépister et traiter les infections et maladies
Mineures [2, 3] sexuellement transmissibles (MST).
• Toucher vaginal (TV) : taille de l’utérus confirmant le terme.
• La loi de 2001 ne revient pas sur le principe de l’autorisation
parentale mais prévoit une dérogation pour les mineures dans Dosages
l’impossibilité de recueillir ce consentement ou souhaitant
garder le secret. La mineure doit dans ce cas se faire accom- • b-hCG quantitatif.
pagner dans sa démarche par une personne majeure de son • groupe Rhésus.
choix. • sérologie de l’immunodéficience humaine (VIH) proposée.
• L’entretien social reste obligatoire pour les mineures. • sérologie à Chlamydia trachomatis éventuelle.

Échographie
Frais Elle est facultative sauf si suspicion de grossesse extra-utérine
(GEU), fausse couche spontanée (FCS), terme dépassé ou pour
Les frais afférents à l’IVG sont pris en charge par l’État.
détermination du terme.

Deuxième consultation
Bulletin statistique
• Confirmation de la demande.
Un bulletin statistique établi par l’INED (Institut national des • Choix de la technique qui est largement expliquée.
études démographiques) doit être rempli. • Projet contraceptif.

Tableau 1.
Les IVG en France métropolitaine.
1990 1998 1999 2001
IVG 197 406 195 960 196 885 198 700
Femmes de 15 à 49 ans 14 118 963 14 560 131 14 493 094 14 385 029
IVG pour 1000 femmes de 15-49 ans 14,0 13,5 13,6 13,8
Nombre d’IVG par âge
15-17 8 766 10 012 10 205 10 153
18-19 14 261 15 244 16 923 16 880
20-24 46 214 46 030 45 118 48 649
25-29 46 908 44 317 44 033 43 382
30-34 40 332 37 866 38 094 38 069
35-39 28 369 28 725 29 061 28 834
40-44 11 633 11 656 12 339 11 536
45-49 923 2 111 1 111 1 198
Part des IVG des mineures dans l’ensemble des IVG 4,4 % 5,1 % 5,2 % 5,1 %
IVG pour 1000 femmes
15-17 7,0 8,5 8,9 9,1
18-19 16,4 20,5 21,9 21,4
20-24 21,8 24,2 24,4 26,1
25-29 21,8 21,0 20,8 21,3
30-34 18,8 17,4 17,7 18,0
35-39 13,2 13,3 13,3 13,1
40-44 5,7 5,5 5,8 5,4
45-49 0,7 1,0 0,5 0,6
Vilain A., Mouquet M.-C., Les interruptions volontaires de grossesse en 2001, Études et résultats (DREES), 2003 ; n° 279.

2 Traité de Médecine Akos


Interruption volontaire de grossesse ¶ 3-1370

• Consultation éventuelle avec l’anesthésiste si anesthésie dans le cadre d’un réseau ville-hôpital. La Mifégyne ® est
générale (AG), troubles de la coagulation, pathologie médicale maintenant disponible dans les pharmacies. Le médecin sera
connue. dans ce cas le « maître d’œuvre » de l’IVG en relation avec le
• En cas de chirurgie, il est prescrit un dilatateur du col : centre d’orthogénie de l’hôpital selon un protocole bien défini.
C soit 1 comprimé de Mifégyne® 48 heures avant l’interven- La femme pourra alors choisir de prendre le misoprostol à
tion ; domicile. Cette possibilité de l’IVG à domicile pourra alléger la
C soit 2 comprimés de Cytotec® dans les 12 heures avant prise en charge, pour les femmes qui le désirent, bien sûr.
l’intervention : soit oral, soit vaginal.
La prise de ces différents dilatateurs peut entraîner quelques
contractions utérines et des métrorragies, exceptionnellement, ■ Techniques chirurgicales
l’expulsion de l’œuf.
Possible sous AG ou AL après prescription, dans les deux cas,
d’un dilatateur en ambulatoire. [9]
■ Techniques médicamenteuses [5-9]
Dilatation-aspiration
Techniques par prise de mifépristone (Mifégyne® ou RU 486®)
+ prostaglandines (misoprostol : Cytotec®). Anesthésie locale [10]
Elle doit correspondre au choix de la femme.
Indications Prémédication :
Atropine sublinguale (0,5 mg). Si nécessaire 1 comprimé de
• Terme inférieur ou égal à 49 jours d’aménorrhée.
Lexomil® ou Lysanxia® sublingual.
• Résultat de b-hCG positif.
Matériel : soit une aiguille à boule située à 0,5 cm de l’extré-
• Contre-indications au Mifégyne® : insuffisance surrénale ou
mité, soit une aiguille à ponction lombaire.
corticothérapie.
Produit : Xylocaïne® à 1 % (flacon de 20 ml) ou Xylocaïne®
• Contre-indications au misoprostol : asthme, fumeuse de plus
adrénalinée à 1 % (flacon de 20 ml).
de 35 ans.
Deux techniques : [11]
Bloc paracervical :
Technique • asepsie rigoureuse du col et des culs-de-sac ;
J1 : prise de 600 mg (3 comprimés) de Mifégyne® , obligatoi- • pose d’une pince de Pozzi sur la lèvre antérieure et traction ;
rement devant le médecin : la femme repart aussitôt. • injection aux divers sites sur maximum 0,5 cm de pénétra-
J3 : prise de 2 comprimés de misoprostol (Cytotec®) : tion ;
• la femme reste sous surveillance 3 heures ; • selon les opérateurs à 3h et 9h, ou 5h et 7h, ou 12-3-6-9 :
• administration d’antalgiques en cas de douleurs ; Injection intracervicale :
• prise de 2 autres comprimés de misoprostol après 2 heures s’il Directement dans le col, parallèlement au canal cervical, à
n’y pas eu d’expulsion ; 4 ou 5 cm de profondeur.
• la femme expulse l’œuf dans un bassin (et le produit doit être • Des effets secondaires immédiats peuvent survenir : pâleur,
contrôlé par un membre de l’équipe médicale) ; tachycardie, bourdonnements d’oreille (pour les éviter on
• elle peut repartir s’il n’y a pas eu d’expulsion. Celle-ci se peut diluer la Xylocaïne® avec 20 ml de sérum physiologi-
produit dans la majorité des cas dans les 24 heures. que).
En cas de métrorragies importantes entre j1 et j3 : échogra- • Il convient d’attendre impérativement 3 minutes avant la
phie avant la prescription de Cytotec®. dilatation.
En cas de non-expulsion à j5 : échographie.
Anesthésie générale
Prescription • Courte durée.
• Au cas où la femme ne choisit pas l’AL.
On prescrit des c-globulines anti-D (si Rhésus négatif) • Pratiquée en ambulatoire après une consultation d’anesthésie
+ pilule. obligatoire (pas de bilan biologique particulier sauf le groupe
Rhésus).
Contrôle • Sortie à la cinquième heure, accompagnée.
Produits :
À j14 : b-hCG ou échographie. • association analgésiques + hypnotiques en ventilation
Le b-hCG est encore positif mais nettement inférieur à celui spontanée ;
pratiqué à j1. • le morphinique le mieux adapté : Rapifen® (alfentanil) car
En cas de non-expulsion, une aspiration est proposée sous rapidité d’action ;
anesthésie locale (AL). • l’hypnotique : produit de référence le Diprivan® (propofol) ;
• les benzodiazépines peuvent être utilisées en complément de
Discussion l’AL. L’hypnovel® doit être préféré au Valium® car l’élimina-
tion est plus rapide.
Net avantage : pas de geste mécanique.
Ne peut concerner des femmes ambivalentes (délai très court).
Déroulement plus long (sur 3 jours) que l’IVG chirurgicale. Intervention
Métrorragies parfois plus longues.
Vécu différent surtout si expulsion à la maison.
Dilatation
Contrôle impératif à j14. • Elle est favorisée par l’administration d’un « facilitateur »
Il existe un problème concernant le risque tératogène éven- (Mifégyne® ou Cytotec®).
tuel du mifépristone ou du misoprostol (au cas où la femme ne • Gestes rigoureux pour éviter les lésions du col (déchirure et
revient pas au deuxième rendez-vous) qui est encore mal perforation utérine).
élucidé. Cependant, des études de pharmacovigilance menées • Bien verticaliser l’utérus par traction sur la pince (prise sur la
jusqu’à ce jour ont montré que la prise à doses usuelles de l’un lèvre postérieure ou antérieure).
ou l’autre des deux produits ne doit pas apporter d’inquiétude • Dilatation par des sondes en gomme ou métalliques au
particulière. Cela dit, il est nécessaire de bien choisir les femmes diamètre croissant (le diamètre désiré correspond au terme de
à qui l’on propose cette méthode. la grossesse : introduire une canule de 6 mm pour 6 semaines
La loi du 4 juillet 2001 permet la pratique des IVG médica- d’aménorrhée, une canule de 7 mm pour 7 semaines d’amé-
menteuses en ville. Le décret de mai 2002 a fixé les conditions norrhée [SA], etc.).

Traité de Médecine Akos 3


3-1370 ¶ Interruption volontaire de grossesse

• Si la dilatation est difficile, ne pas insister : on peut aspirer • évaluer l’abondance des métrorragies ;
une grossesse de 12 semaines d’aménorrhée avec une canule • vérifier au TV la taille de l’utérus ;
de 8 mm. • s’assurer de la prise de la contraception ou de la difficulté à
l’accepter ;
Aspiration
• une pose de dispositif intra-utérin (DIU) peut être effectuée.
Matériel
Canule de polyéthylène à usage unique transparente :
• soit semi-rigide de 20 cm de longueur avec deux ouvertures Complications des méthodes chirurgicales
latérales (canule de Karman) ;
• soit rigide, droite ou courbe ; Les deux plus fréquentes sont la rétention et la synéchie.
• de diamètre de 6 à 12 mm ;
• s’adaptant sur un manchon rotatif lié à un aspirateur ou sur Rétention
une seringue.
Partielle
Sources de vide
• Persistance de métrorragies abondantes ;
• Seringue à butée de 50 ml. Dépression 500 à 600 mbar.
• utérus gros et mou ;
Avantage : silencieuse pour les AL.
• Aspirateur électrique. Dépression nécessaire 600 à 800 mbar. • faire pratiquer une échographie et une nouvelle aspiration si
La canule est reliée à l’aspirateur par un manchon et un nécessaire ;
conduit transparents. • dans ce cas, il faut proposer une hystéroscopie à 2 mois pour
diagnostiquer et traiter simplement les synéchies dont la
Technique après la dilatation survenue est proche de 10 %.
• Mise en place de la sonde d’aspiration jusqu’au fond utérin.
• Branchement de l’aspiration. Complète
• Mouvements de rotation de la canule jusqu’à l’obtention Elle est exceptionnelle, surtout avec persistance de l’évoluti-
d’une sensation de rétraction. vité de la grossesse. Dans ce cas, si le terme reste inférieur ou
• Retrait de la canule, après avoir débranché la dépression. égal à 14 semaines d’aménorrhée, il faut pratiquer une nouvelle
• Parfois il est nécessaire d’évacuer des débris ovulaires à la aspiration. Si le terme est devenu supérieur à 14 semaines
pince. d’aménorrhée, il faut contacter un expert pour qu’un interrup-
Le produit d’aspiration doit être examiné, surtout en cas de tion médicale de grossesse pour détresse maternelle soit possible
grossesse jeune pour affirmer la présence de villosités choriales, si la femme le souhaite.
et en cas d’aspect inhabituel (demander un examen histologi-
que si suspicion de môle).
Synéchie
En cas d’AL, la femme se lève aussitôt ; elle reste dans une
petite salle de repos durant un quart d’heure où une collation Elle est évoquée en cas d’aménorrhée. Il faut informer sur
lui est servie. l’absence des règles qui nécessitera une consultation rapide et
En cas d’AG, elle est surveillée 1 heure en salle réveil ; elle une hystéroscopie.
sort à la cinquième heure. Administration d’un vaccin anti-D si
besoin + antibioprophylaxie au moment du geste (Augmentin®
Autres complications
en intraveineux ou 1 comprimé de tétracycline 1 heure avant
le geste). • Endométrite : douleur, métrorragie, fièvre.
La loi du 4 juillet 2001 a élargi la possibilité de la pratique • Béance du col.
des IVG de 12 SA à 14 SA. L’intervention chirurgicale, effectuée • Méconnaissance d’une grossesse môlaire.
par les équipes compétentes, ne doit pas être différente.
L’aspiration est possible jusqu’au terme de 14 SA dans les
mêmes conditions.

Complications
Immédiates
“ Quelques conseils après
l’interruption de grossesse
• Perforation : l’aspiration doit être pratiquée sous cœlioscopie ;
• hémorragies : administration d’ocytociques ; • Pendant 8 jours :
• méconnaissance d’une grossesse extra-utérine (GEU).
C prendre la température rectale matin et soir ;
Prescription en postopératoire C éviter : les injections vaginales, les bains, le port de
tampons, les rapports.
• Antibiothérapie éventuelle si leucorrhées importantes ou • Les saignements peuvent persister une dizaine de jours
notion de MST ; et ne doivent pas dépasser l’abondance des règles.
• utérotoniques (Méthergin®) en cas de saignements abon-
• Il se produit parfois une petite crise au troisième ou
dants ;
• pilule ;
quatrième jour après l’interruption de grossesse, avec
• hygiène génitale : le port des tampons, les douches vaginales une température à 38 °C, des douleurs à type de
et les rapports sont proscrits durant quelques jours ; contractions utérines, des saignements plus abondants
• un document sur le déroulement des suites opératoires est avec expulsion de caillots ou de petits débris. Cette crise
remis à la femme : possibilité d’une métrorragie plus impor- cède spontanément en 24 heures et ne nécessite aucun
tante au troisième jour, sans gravité. traitement. Si la température reste au-dessus de 38 °C
plus de 24 heures, ou si les saignements et les douleurs
Consultation postopératoire semblent trop importants, il est préférable de revenir
consulter.
après deux semaines • Les règles reviennent 4 à 6 semaines après l’IVG ou à la
La femme peut revoir la conseillère conjugale. fin de la plaquette de la pilule séquentielle prescrite.
La consultation médicale doit : • Un contrôle médical est nécessaire 15 jours après l’IVG.
• interroger sur les suites ;

4 Traité de Médecine Akos


Interruption volontaire de grossesse ¶ 3-1370

■ Références
.

[9] Durlot F, Dubois C, Brunerie J, Frydman R. Efficiency of progesterone


antagonist RU 486 (mifepristone) for preoperative cervical dilatation
[1] Loi n° 2001-588 du 4 juillet 2001. Décrets n° 2002-778, n° 2002-779 du during first trimester abortion. Hum Reprod 1988;3:583-4.
3 mai 2002 (JO du 5 mai 2002). Circulaires n° 2001-467 du 28 septem- [10] Lefebvre P, Monniez N, Norel G, Prévost D, Scharfman W. Interruption
bre 2001 et n° 2003-71 du 13 février 2003. volontaire de grossesse : nouvelles perspectives de l’anesthésie locale.
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[4] De la contraception à l’avortement : sociologie des grossesses non taires de grossesse. Direction générale de la Santé, 1999.
prévues. Paris: INSERM; Collection « Questions en Santé publique »;
2003.
[5] Journal Officiel n° 152 du 02.07.04, p. 12061, texte n° 27.
[6] Mifépristone. brochure d’information scientifique. Roussel Uclaf
Laboratoire. 2002. Pour en savoir plus
[7] Collins PW. Misoprostol: discovery development and clinical applica-
tions. Med Res Rev 1990;10:149-72. Association Nationale des Centres d’Interruption de Grossesse et de
[8] Peyron R, Aubeny E, Targosz V, Silvestre L, Renault M, Elkik F, et al. Contraception: www.ancic.asso.fr.
Early termination of pregnancy with mifepristone (RU 486) and orally Loi n° 2001-588 : www.ancic.asso.fr/textes/ressources/legislation_loi 72001.html.
active prostaglandin misoprostol. N Engl J Med 1993;328:1509-13. Décret 2002-778 : www ; ancic.asso.fr/textes/ressources/legislation_medical.html.

J. Brunerie-Kauffmann (joelle.brunerie@wanadoo.fr).
2, avenue René-Coty, 75014 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Brunerie-Kauffmann J. Interruption volontaire de grossesse. EMC (Elsevier SAS, Paris), Traité de Médecine
Akos, 3-1370, 2005.

Disponibles sur www.emc-consulte.com


Arbres Iconographies Vidéos / Documents Information Informations Auto-
décisionnels supplémentaires Animations légaux au patient supplémentaires évaluations

Traité de Médecine Akos 5


3-1410

3-1410

Le médecin face aux agressions


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

sexuelles et au viol
F Guillet-May

A gressions sexuelles, viol : face à ces situations, que dire, que faire, comment les prévenir ?

© 1999 , Elsevier, Paris.


rapidement possible, par peur de la machine Les raisons de l’interrogatoire et de la nécessité de
Introduction judiciaire ou impossibilité de « dire », dans l’espoir l’examen clinique doivent être clairement expliquées
d’oublier. à la victime, afin que ceci ne constitue pas une
Il n’y a jamais d’oubli, mais une reconstruction, un seconde agression.
La loi de 1992 définit l’agression sexuelle comme « après », est toujours possible [9]. Croire la victime, l’aider à parler alors que sa
« toute atteinte sexuelle commise avec violence, Le généraliste doit faire partie du réseau d’accueil parole vient d’être niée par l’agresseur, savoir ses
contrainte, menace ou surprise » (art 222.22 du Code des victimes de violences sexuelles et connaître les réactions très variables, du mutisme à l’excitation,
pénal), et le viol comme « tout acte de pénétration, différentes étapes de la prise en charge afin de voire le détachement et la confusion, constituent des
de quelque nature qu’il soit, sur la personne d’autrui, mieux appréhender l’état des victimes et les clés qui lui permettront de surmonter le traumatisme
avec menace, contrainte ou surprise » (art 222.23 du accompagner de façon positive. dans un premier temps.
Code pénal).
Le nouveau Code pénal précise les peines ‚ Interrogatoire
encourues (20 ans de réclusion) et les peines
aggravées liées aux circonstances, aux auteurs ou à
la victime (fig 1).
L’agression sexuelle est un délit, le viol est un

Examen en urgence d’une victime
de viol ou d’agression sexuelle

Le médecin généraliste ne doit pas refuser de


Il peut être long, jusqu’à 1 heure, et porte sur le
déroulement des faits : contexte, heure, lieu, mode
d’agression, nombre d’agresseurs. Tous les détails
ont de l’importance. Le généraliste ou le spécialiste
crime passible de la cour d’assises. doivent connaître les différentes circonstances du
recevoir une victime présumée de viol. Cependant,
La fréquence de ces viols reste difficile à apprécier. viol, évitant ainsi de manifester un étonnement
les conditions de l’examen et des prélèvements, qui
En France, on note une augmentation de 25 % des préjudiciable à la victime qui ne se sent « pas crue ».
auront une valeur juridique, seront au mieux réalisés
plaintes pour viol entre 1985 et 1995 (2 823 à On peut schématiquement distinguer divers cas.
par des gynécologues-obstétriciens dans un centre
7 069). La permanence téléphonique « Viol femme
habitué à cette pathologie [7, 9, 10] (fig 2). L’agression dans un lieu public, avec passage à
information » (tél : 0 800 05 95 95) et l’estimation des
Il convient donc, pour le médecin : l’acte brutal, sans approche préalable : elle ne se
services de police laissent à penser qu’une femme
■ de prendre un contact téléphonique avec ce produit que dans un quart des cas. La victime est
sur quatre seulement porte plainte. On peut alors
centre ; menacée par une arme dans un quart des cas, et des
estimer à 28 276 le nombre de viols perpétrés en
■ de faire accompagner ou d’accompagner coups violents sont portés dans un tiers des cas.
France en 1995. Il en est probablement de même
lui-même la victime ; Le viol par abus de confiance (dans quatre-
des agressions sexuelles, mais des enquêtes
■ de se préoccuper de son hébergement et de cinquièmes des cas, la victime connaît son
approfondies sont nécessaires pour diminuer ce
l’entourage ; agresseur) : par le biais de faux prétextes, l’agresseur
chiffre « noir » des agressions sexuelles [9].
■ de signaler le fait au procureur de la rencontre sa victime, la retient, et après une période
L’Observatoire national de l’enfance en danger République s’il s’agit d’un mineur ou d’une personne de relation tout à fait banale, devient agressif et la
fait état de 6 500 enfants victimes d’abus sexuels en vulnérable du fait d’une maladie, d’une infirmité, viole.
1996 [2]. d’un handicap ou d’une grossesse ; Le viol par inceste : nous y reviendrons.
Le viol est une attaque brutale et destructrice, à la ■ de donner d’emblée des conseils :
fois du propre sentiment de valeur de la femme (ou Le viol par personne ayant autorité : en
– éviter toute toilette ; particulier, ceux qui exercent des fonctions
de l’homme) et de son intégrité personnelle, et de la – conserver les vêtements portés lors de
confiance qu’elle a dans les autres. éducatives et thérapeutiques (kinésithérapeutes,
l’agression ; gynécologues, psychiatres, éducateurs,
Il entraîne chez la victime une terreur liée à la peur ■ de noter tous les détails de l’agression : heure, professeurs...).
de mourir, puis un sentiment de honte et de lieu, menaces, utilisation d’armes (au besoin de les
culpabilité, source de silence et d’enfermement, dont Le viol en réunion : viol collectif, de plus en plus
enregistrer) ;
les conséquences sont lourdes à moyen et à long fréquent, en particulier parmi les adolescents.
■ d’inciter la victime à porter plainte d’emblée, et
terme. La recherche des antécédents doit être
c’est alors les services de police ou de gendarmerie
Le premier examen médical, urgent, aura des soigneuse : médicaux, chirurgicaux, gynécologiques,
qui accompagneront la victime dans le service
conséquences judiciaires, médicales et psycholo- obstétricaux, andrologiques, psychiatriques,
d’urgence adapté ;
giques. Le médecin généraliste doit les connaître afin habitudes sexuelles...
■ de recontacter de principe la victime dans les
d’accompagner et d’orienter les victimes vers les jours qui suivent.
‚ Examen général
structures les plus adaptées et être ensuite un relais L’accueil d’une victime de viol ou d’agression
© Elsevier, Paris

indispensable. sexuelle nécessite du temps et un lieu calme et Il doit être complet, illustré par des schémas et des
Si les plaintes ont augmenté, les condamnations paisible. Qu’il soit fait sur la demande de la victime photographies.
pénales stagnent, par défaut de prise en charge ou sur réquisition de l’autorité judiciaire, le même Zones d’appuis, visage, zones de protection
médicale (constituant des preuves de l’agression) et soin doit y être apporté, car la victime peut porter avant-bras, chevilles, face interne des cuisses,
psychosociale, entravant les dépôts de plainte le plus plainte ultérieurement. bouche, dents.

1
3-1410 - Le médecin face aux agressions sexuelles et au viol

1 Le nouveau Code pénal et les agressions sexuelles.

2
Le médecin face aux agressions sexuelles et au viol - 3-1410

Danatrolt en une prise à renouveler 12 heures


2 Examen en urgence plus tard ;
Prendre contact - Avoir du temps d’une victime de viol – mifépristone : 3 comprimés en une seule
avec un centre Accueil - Lieu calme ou d’agression sexuelle. prise.
habitué à La pose d’un stérilet dans les 6 jours n’est pas
ces situations
conseillée du fait du risque de MST.

‚ Prise en charge psychologique [3, 8]


C’est une nécessité impérative dans l’urgence, qui
conditionnera la récupération de la victime à long
terme.
Accompagner, Signalement au Le psychiatre attaché au service d’urgence qui
ou faire accompagner procureur de reçoit la victime ou se déplace à son chevet en cas
la victime la République d’hospitalisation, lui expliquera les différents
symptômes du syndrome aigu post-traumatique :
troubles du sommeil, fatigue, céphalées, trouble de
l’appétit, agoraphobie, tristesse, excitation, incapacité
à travailler, nausées, algies diverses.
L’exposé de ces symptômes ne les aggrave pas
Éviter toute mais, au contraire, rassure les victimes qui ont peur
toilette Porter plainte de perdre la raison.
avant les On insistera sur le fait positif que la victime est
premiers examens
toujours en vie après l’agression.
L’entourage familial, le conjoint en particulier,
devra être reçu, tant il est difficile pour lui
Police Gendarmerie d’appréhender les conséquences psychologiques du
viol, en particulier à long terme.
On travaillera avec la victime sur sa culpabilité en
Recherche de contusions, abrasions, morsures, – prélèvements sanguins : TPHA (Treponema redisant l’interdit et le fait que l’agresseur est le
griffures, lacérations, signes de contention (poignets, pallidum heamagglutination), VDRL (venereal coupable.
chevilles) ou d’écartement (genoux, cuisses, bras) et desease research laboratory), virus de l’immunodéfi- Un suivi à moyen et à long terme doit être
strangulation, très fréquents. cience humaine (VIH), HBs, HBc, hCG (human apporté par le psychiatre et les associations
L’aspect des vêtements doit être noté. chorionic gonadotropin) test, alcoolémie, toxiques ; féminines spécialisées (droits des femmes au sein de
Si, dans 50 % des cas, l’examen somatique ne – la recherche d’empreinte génétique sur les chaque préfecture, pouvant communiquer la liste
retrouve pas de lésion, cela ne signifie pas qu’il n’y a prélèvements (col, vagin, anus, poils pubiens) des centres d’information des femmes [CIDF] du
pas eu viol. La surprise, la terreur ont pu mettre la nécessite une conservation rigoureuse à 4 °C département). Seuls les psychiatres ayant travaillé ce
victime hors d’état de se défendre. Elle a pu être pendant 3 jours, avant acheminement en sujet peuvent accompagner une victime de viol,
droguée (recherche de toxiques et d’alcoolémie). laboratoire spécialisé. Elle ne se fera qu’après dépôt toute prise en charge analytique classique étant
de plainte. dans les premiers temps une contre-indication
‚ Examen sexuel formelle.
Nécessité du matériel de spécialiste : colposcope, ‚ Traitement L’intégration à un groupe de parole peut être un
colorant, lugol et bleu de toluidine. moyen de se reconstruire, avec l’aide d’autres
Le médecin est aussi un thérapeute, bienveillant victimes.
Schéma des lésions éventuelles : face interne des et disponible.
cuisses, pubis, clitoris, petites et grandes lèvres, Traitement local des lésions cutanées et des ‚ Rédaction du certificat
observation de l’hymen dont les variétés déchirures nécessitant une réparation chirurgicale, À l’issue de cette première prise en charge, toutes
physiologiques sont grandes, vagin, verge, bourses. fréquentes chez les femmes ménopausées. les constatations seront indiquées sur un certificat
Il faut rechercher des déchirures ou defects
Traitement général : sérovaccination antitéta- médical utilisant le conditionnel, précis, accompagné
atteignant la muqueuse vaginale, siégeant presque
nique en cas de plaies. de schémas explicatifs, remis à l’autorité requérante
exclusivement à 5 et 7 h, dont la cicatrisation dure
Prophylaxie des MST : ou à la victime.
5 à 7 jours.
– doxycyclines 100 mg : 2 comprimés/j pendant Un double est conservé dans le dossier, avec les
L’examen de l’hymen peut être facilité par
8 jours ; résultats des examens pratiqués.
l’introduction d’une sonde de Folley intravaginale
avec ballonnet gonflé à 20 cm3. – Pyostacinet 500 mg : 2 comprimés/j pendant
‚ Diagnostic différentiel
Examen de l’anus en déplissant la marge anale. 5 jours ;
– vaccin antihépatite B dans les 15 jours si la Les lésions infectieuses ou postinfectieuses
Recherche de fissures, lésions douloureuses,
victime n’est pas protégée ; tumorales, les variations anatomiques, les séquelles
appréciation du tonus sphinctérien par le toucher
– VIH : demander au juge un contrôle de traumatisme ne doivent pas être confondues
rectal (TR).
sérologique de l’agresseur s’il est connu. Thérapie avec les séquelles du viol.
Des prélèvements indispensables ont pour but de Néanmoins, il y a peu d’intérêt à inventer un viol
confirmer l’agression, la pénétration et de permettre préventive s’il est VIH+ (contacter le centre de
dépistage du VIH de chaque région). Surveillance de pour la victime, d’où l’intérêt de la croire et d’un
l’identification de l’agresseur : examen complet et précis par un spécialiste.
– recherche de spermatozoïdes au niveau du la victime à 3 mois.
vagin, de l’anus, de la cavité buccodentaire (en Prévention de la grossesse :


regard des molaires et des incisives) en cas de – contraception postcoïtale : Stédirilt
fellation ; 2 comprimés à 12 heures d’intervalle dans les Cas particuliers
– peigner les poils pubiens (dans un sac plastique 72 heures suivant le rapport Tetragyron.
perforé) ; – En cas de contre-indication :
– mise dans un sac plastique des vêtements ; – progestatifs seuls : 20 comprimés de ‚ Agressions sexuelles sur mineur
– recherche de maladies sexuellement Microvalt en une seule prise dans les 12 heures de moins de 15 ans [2, 10]
transmissibles (MST) : germes banals, gonocoques, suivant le rapport ; Nous l’avons vu, la fréquence de ces agressions
Chlamydiae, mycoplasme ; – danazol : 5 comprimés à 200 mg de sexuelles est très importantes. Selon les études, 10 à

3
3-1410 - Le médecin face aux agressions sexuelles et au viol

25 % des femmes ont été victimes d’agression – boulimie, anorexie ; médecin généraliste peut y être confronté dans le
sexuelle dans l’enfance. Les garçons subissent – comportements sexuels perturbés (pouvant cadre de missions humanitaires, ou lorsque
également des violences sexuelles (un garçon pour conduire à la prostitution...) ; surviennent des grossesses issues de viol sur les
trois filles), mais le non-dit est encore plus grand chez – conduite de fuite, drogue, alcool, fugues ; populations déplacées et réfugiées en centre
les hommes. – conduite à risque ; d’hébergement, avec risque d’infanticide ou
L’agression sexuelle peut être perpétrée sans – agressivité extrême ; d’abandon.
violence physique, avec violence allant jusqu’à – comportement d’agresseur sexuel.
l’homicide, ou il peut s’agir d’exploitation sexuelle L’ensemble de ces conséquences est considéra- ‚ Grossesse issue de viol [6, 10]
des enfants à des fins lucratives. blement aggravé quand la réalité des faits n’a pas Elle est probablement moins rare que ne le
Soixante-quinze à 80 % des agresseurs été prise en considération et que l’auteur n’a pas été laissent imaginer les statistiques des centres d’accueil
appartiennent à l’entourage de l’enfant. Les sanctionné. médicojudiciaire.
agresseurs appartiennent à tous les milieux sociaux, À l’inverse, les enfants retrouveront leur équilibre Le milieu gynécologique ne sait guère dépister ces
les victimes également. Dans une forte proportion, s’ils ont été soutenus par des spécialistes de ces grossesses, souvent diagnostiquées tardivement, en
les agresseurs peuvent être gentils, avenants et agressions, entourés et aidés par des adultes particulier issues d’inceste.
appréciés. Dans plus de 50 % des cas, les agresseurs chaleureux et aimants qui accordent foi en leur C’est peut-être dans les centres d’interruption
appartiennent à la famille (père, grand-père, frère, parole. volontaire de grossesse (IVG) que l’interrogatoire
etc). Les jeunes sont très souvent victimes de viols L’examen du mineur de moins de 15 ans se fera pourrait permettre de dépister l’origine de ces
réitérés. en dehors de son représentant légal, mais en grossesses.
Sur le plan juridique, les sanctions sont présence d’une tierce personne. La grossesse issue de viol ne constitue pas
aggravées : L’interrogatoire, long, doit être très approfondi. légalement une indication d’interruption
– lorsque l’agresseur est un ascendant légitime La parole de l’enfant doit être retranscrite avec ses thérapeutique de grossesse. Cependant, dans les
naturel ou adoptif ou toute autre personne ayant propres termes. L’utilisation de dessins et de services d’obstétrique avec présence d’expert, le
autorité sur l’enfant ; poupées sexuées, pour faire expliquer l’agression, traumatisme lié au viol et à la grossesse consécutive
– lorsque l’agresseur est une personne qui abuse est très utile. devrait, après avis éclairé, permettre de prendre en
de l’autorité que lui confère ses fonctions ; Autant que faire se peut, et c’est tout l’intérêt des charge les femmes, même au-delà du terme légal de
– lorsque l’enfant est âgé de moins de 15 ans. centres d’accueil médicojudiciaires et spécifiques, il l’IVG. Pour le moment, aucune jurisprudence ne fait
La loi (art 4343 du nouveau Code pénal) fait est souhaitable de tout faire en un temps : état d’une décision contestée a posteriori d’IVG chez
obligation à quiconque (en particulier le médecin qui interrogatoire policier et judiciaire, examen médical la victime présumée « de viol ou d’inceste ».
ne se retranchera pas derrière le secret et psychologique, afin de minimiser le traumatisme. Même s’il n’y a pas dépôt de plainte, il faut dater
professionnel, lequel peut être levé dans ces L’examen somatique et sexuel (caractères exactement la grossesse (échographie) et prendre les
circonstances : art 44 du décret du 6 septembre sexuels, stade de la puberté) sera très complet, mesures pour que la démonstration biologique de la
1995 du Code de déontologie médicale), ayant identique à celui des victimes adultes, avec filiation à partir de l’œuf ou de l’enfant puisse être
connaissance de sévices à des mineurs de moins de description précise de l’hymen chez la fillette (grande établie.
15 ans, d’en informer les autorités administratives variation physiologique), de la verge et du testicule
ou judiciaires. Le non-respect de ces prescriptions chez le garçon et de la région anale. Les explorations ‚ Viol entre époux [4, 9]
constitue un délit qui peut être sanctionné par une endocavitaires, difficiles en raison de la douleur et de C’est seulement depuis 1980 que la notion de viol
peine de 3 ans d’emprisonnement et une amende la crainte, ne seront faites qu’en cas d’extrême entre époux a été reconnue par les magistrats, avec
de 300 000 F. nécessité. la même définition que pour toute autre personne.
Pour dénoncer les faits, il existe en France : Il relève du spécialiste et du réseau Il fait partie du cadre plus général des violences
– un dispositif administratif, organisé par le médico-socio-judiciaire. conjugales qui constituent un délit passible du
conseil général de chaque département. Il existe
À l’issue de cet examen, un certificat médical tribunal correctionnel, même si elles n’ont entraîné
souvent une cellule « enfance maltraitée », rattachée
détaillé relatant également le comportement de aucune interruption temporaire de travail (ITT)
à l’aide sociale à l’enfance, répondant 24 heures sur
l’enfant sera établi. (nouveau Code pénal 1992).
24 au signalement effectué. Numéro national : 119.
Il est important que les parents, ou la mère, ou le Selon les statistiques nord-américaines, ou les
Dans certains départements, en particulier en
tuteur, ayant connaissance des faits, portent plainte données françaises des statistiques de police ou de
Meurthe-et-Moselle, des chartes ont été signées
avec constitution de partie civile. gendarmerie ou des permanences téléphoniques
entre le conseil général, la cour d’appel et le rectorat
pour une prise en compte rapide et efficace de la (violences conjugales Femmes info service, tél :
‚ Agression sexuelle de la femme enceinte 01 40 02 02 33), un tiers des femmes subiraient des
violence, en particulier sexuelle, chez les mineurs
(circulaire du 26 août 1997 du Bulletin officiel de Elle n’est pas rare et constitue, pour l’auteur violences conjugales, dans tous les milieux, y
l’éducation nationale [2]) ; reconnu, une aggravation des peines. compris chez des femmes de milieu socioprofes-
– en cas d’urgence ou de danger pour l’enfant, L’examen ne diffère pas de la femme non sionnel élevé.
un dispositif policier et judiciaire, qui permet de enceinte, en milieu obstétrical. Le climat Le médecin généraliste est probablement le plus à
saisir d’emblée le procureur de la République psychologique de la grossesse peut être difficile. même de dépister ce type de violences qui se
24 heures sur 24, quel que soit le mode des produisent au cours de scènes répétées, de plus en
‚ Handicapés mentaux plus sévères, entraînant des blessures et des
agressions (attouchement, caresses, exhibition,
pornographie, tentative de viol, fellation, viol Les agressions sexuelles, en particulier en séquelles affectives et psychologiques graves.
vaginal, anal...). Aucune atteinte n’est anodine. institution, ne sont pas rares du fait du personnel Ces femmes consultent fréquemment leur
Au-delà des conséquences physiques graves sur la encadrant ou d’un autre handicapé. généraliste pour des plaintes variées n’ayant qu’un
croissance, le développement et l’état général, ces Les preuves de l’agression, dans ce contexte, sont lointain rapport avec le viol : céphalées, insomnies,
atteintes provoquent des ravages psychologiques difficiles, car l’interrogatoire est sujet à caution. Les douleurs digestives, douleurs dorsales, anxiété,
plus ou moins importants avec tendance à la familles, souvent anxieuses et opposées à la vie dépression grave, abus d’alcool ou de psychotropes,
dévalorisation, culpabilité, inhibition, perte de sexuelle de ces malades, portent plainte. L’examen tentatives de suicide, dyspareunie, frigidité, algies
confiance en soi et dans les autres. clinique devra être complété par une expertise pelviennes, métrorragies.
Par la suite, certaines victimes d’agressions subies psychiatrique. Le lien de confiance entre ces femmes et leur
dans l’enfance ou dans l’adolescence pourront généraliste autorise celui-ci à poser des questions
développer des troubles sévères [1] : ‚ Viol des réfugiés, « arme » de guerre directes sur l’origine des lésions cutanées, la violence
– dépression ; Le déplacement des populations et la du mari et la possibilité de rapports imposés.
– tentative de suicide ou suicide ; recrudescence des guerres tribales et ethniques Ces femmes se sentent tellement seules,
– automutilation ; expliquent la recrudescence de ces viols impunis, car diminuées et terrorisées, que des questions directes
– retard psychomoteur ; peu de tribunaux internationaux fonctionnent. Le peuvent tout d’abord les aider à parler.

4
Le médecin face aux agressions sexuelles et au viol - 3-1410

Le rôle du généraliste est alors : reçus pour s’assurer de l’absence de MST ou de Une lettre détaillée en recommandé [10] avec
– de faire un examen clinique soigneux ; grossesse, et à 6 mois, pour un nouveau contrôle accusé de réception permet de saisir la CIVI. Il n’est
– de rassembler des preuves médicales ; VIH. pas nécessaire que la victime ait un avocat ou
– de conseiller, après un viol avec sévices Sur le plan financier, en cas d’examen sur intente un procès. Si une procédure pénale a été
physiques, une consultation auprès d’un médecin réquisition, la prise en charge est assurée par la engagée, la CIVI peut se prononcer sans attendre le
légiste ; justice. Dans les autres cas, il faut discuter de la jugement.


– de dire que la violence conjugale est un délit et couverture sociale, des mutuelles dont elle peut
le viol entre époux un crime ; bénéficier, et en cas d’absence de couverture sociale, Conclusion
– de lui indiquer les associations féminines du une intervention auprès du service social de la caisse
département (CIDF) susceptibles de l’accompagner d’assurances maladie doit éviter qu’au traumatisme
sur le plan juridique, et voir avec elle les possibilités ne s’ajoutent des difficultés d’ordre financier. La prise en charge des victimes de viol et
d’hébergement en milieu amical ou en centre d’agression sexuelle, on l’a vu, doit être
Un suivi psychologique nous paraît indispensable,
d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) multidisciplinaire [5], au sein de centres d’accueil
parfois prolongé.
(dépendant de la Direction départementale de médico-psycho-socio-judiciaire. La circulaire 97 380
C’est le rôle du médecin traitant d’encourager la
l’action sanitaire et sociale [Ddass]). du 27 mai 1997, du ministère du Travail et des
victime à se faire suivre par les spécialistes
Ces violences conjugales et sexuelles évoluent Affaires sociales, relative aux dispositifs régionaux
compétents, de conseiller à la famille et au conjoint d’accueil et de prise en charge des personnes
par cycles, avec des périodes de rémission qui
de voir également les spécialistes, d’indiquer que ce victimes de violences sexuelles, permet une
laissent croire à la victime que « tout peut s’arran-
phénomène n’est pas rare et que des associations meilleure connaissance de ce dispositif, en particulier
ger ». Ceci explique les allers-retours de ces femmes
dans une décision de porter plainte (on leur féminines sont spécialisées (la chargée de mission par le généraliste. Elle prévoit des formations de tous
conseillera alors de révéler les viols) et de quitter leur aux droits des femmes en préfecture peut les personnels chargés de l’accueil, auxquels les
conjoint. communiquer le numéro de téléphone) sur les plans médecins sont associés.
Connaissant cette évolution, le généraliste se doit juridique et social. Cette sensibilisation doit être de plus en plus large
de ne pas accroître la culpabilité de ces femmes L’accompagnement ne s’arrête pas au dépôt de pour les médecins en termes de formation initiale
dépressives, et donc hésitant à prendre des décisions plainte. Il peut durer des mois, voire des années. (quasi inexistante) et de formation continue.
radicales, mais au contraire de les accompagner, Le viol et l’agression sexuelle sont des Les données des conférences internationales
patiemment, tout en évoquant le problème de la traumatismes justifiant une réparation des (Pékin, Stockholm) sur les violences faites aux
dangerosité de leur conjoint et en les aidant à dommages corporels et psychologiques. La femmes et aux enfants, commencent à avoir des
développer des moyens de protection dans commission d’indemnisation des victimes répercussions pratiques en France, « avec une
l’urgence. d’infraction (CIVI) ou les associations d’aide aux approche globale humaine et non violente de ce
victimes du tribunal de grande instance le plus fléau social enfin reconnu » (selon Catherine
‚ Prise en charge ultérieure des victimes proche du domicile, permettent aux victimes d’être Marneffe).
Le médecin qui reçoit la victime doit insister sur la indemnisées par l’état, au nom de la solidarité, Il importe de poursuivre la réflexion et l’action
nécessité impérieuse de la revoir dans les 15 jours, opportunité particulièrement intéressante si l’auteur politique, parallèlement, en termes de prévention et
une fois les résultats des examens complémentaires des faits est inconnu ou insolvable. d’éducation.

Frédérique Guillet-May : : Gynécologue-obstétricienne,


maternité régionale de Nancy, 10, rue du Docteur-Heydenreich, 54042 Nancy cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : F Guillet-May. Le médecin face aux agressions sexuelles et au viol.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1410, 1999, 5 p

Références

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1989 ; 146 : 1602-1606 1997 ; 227 : 11-14

[2] Chabrun-Robert C. Les mauvais traitements à l’enfant. Concours Med 1997 ; [8] Nadelson Carol C. Consequences of rapes clinical and treatment aspects.
120 : 119-141 Psychother Psychosom 1989 ; 51 : 187-192

[3] Collectif féministe contre le viol. Le viol : un crime. Vivre après. Actes du [9] Rapport du groupe de travail pour la préparation de la 4e Conférence mon-
colloque 14 janvier1995 diale sur les femmes. Violences à l’encontre des femmes. Publié sous l’égide du
ministère des Affaires sociales, de la Santé et de la Ville et du ministère des
[4] Goldberg W, Tomlanovich M. Domestic violence victimes in the emergency Affaires étrangères, 1995
department. JAMA 1984 ; 251 : 3259-3264
[10] Soutoul JH, Chevrant Breton G. Les agressions sexuelles de l’adulte et du
[5] Guillet-May F, Judlin P, Pichené C, Peton P. Les violences sexuelles : néces- mineur. Paris : Ellipses, 1994
sité d’une prise en charge multidisciplinaire. Contracept Fertil Sex 1997 ; 25 : 1-3

[6] Holmes Melisa M, Resmik Heidi S, Kilpatrick D, Best Connie L. Rape related
pregnancy: estimates and descriptive characteristics from a national sample of
women. Am J Obstet Gynecol 1996 ; 175 : 320-325

5
3-1230

3-1230
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Masse ovarienne

H Fernandez

L a découverte d’une masse ovarienne doit être systématiquement reconfirmée en première partie de cycle.
L’échographie est l’examen qui va guider la conduite à tenir. La cœlioscopie permettra de confirmer le
diagnostic et de traiter par la même voie. En cas de cancer, le pronostic reste redoutable, puisque le taux global de
survie est d’environ 30 % à 5 ans, ce qui témoigne de la gravité de cette affection souvent découverte à un stade
tardif.
© 1999 , Elsevier, Paris.


s’amender dans les heures suivantes et être associée
Circonstances de découverte à des signes d’irritation péritonéale, à des nausées et Échographie initiale suspecte
des vomissements. C’est une urgence chirurgicale si
l’on veut préserver l’ovaire ;
‚ Lors d’un examen systématique Deuxième technique d'image
– soit d’une hémorragie intrakystique donnant où l'échographie
La découverte d’une masse ovarienne est évoque le diagnostic de kyste
un tableau d’hémorragie interne avec douleurs, état
caractérisée par son polymorphisme clinique. Le dermoïde
de choc et contractures ;
plus souvent, il s’agit d’une découverte d’examen
systématique. – soit d’un contexte infectieux évoquant un
Diagnostic cœlioscopique
L’examen clinique précise le volume, la pyosalpinx.
consistance et la sensibilité de cette masse. Le < 5 cm > 5 cm
Plus rarement, il s’agit de tumeur masculinisante
toucher vaginal, par l’existence d’un sillon séparant ou de tumeur féminisante.
l’utérus de la masse pathologique, confirme son
En cas d’association à une ascite, la tumeur Kystectomie Ponction
caractère indépendant de l’utérus et sa probable sans ponction Protection du
ovarienne est fortement suspecte de malignité.
origine ovarienne. Les mouvements imprimés à avec protection pelvis avant
du pelvis kystectomie
l’utérus ne sont pas transmis à la masse et vice versa. transpariétale
‚ Existe-t-il des facteurs de risque connus
Le toucher rectal sera systématique en précisant ou laparotomie
de pathologie ovarienne ?
l’aspect de la masse enclavée dans le cul-de-sac de 1 Échographie initiale suspecte.
Douglas et en précisant la souplesse du pelvis. Il existe une augmentation de l’incidence des
Les masses ovariennes peuvent être découvertes cancers de l’ovaire depuis 30 ans, amenant à une
au décours d’une consultation pour douleurs fréquence actuelle de 12 à 15 pour 100 000. Peu de suspecte (fig 1). Elle est devenue essentielle pour
pelviennes diffuses. Quand l’irradiation de la douleur facteurs favorisants sont connus. A contrario, la prise trois raisons :
se fait vers la face interne de la cuisse, celle-ci est très d’une pilule œstroprogestative pendant au moins – confirmer le diagnostic de cette masse ;
évocatrice d’une masse ovarienne, sans cependant 5 ans diminue d’environ 50 % le risque de cancer de – déterminer de quel organe dépend cette masse
faire suspecter son caractère bénin ou malin. l’ovaire. pelvienne ;
‚ Au décours d’une complication – distinguer les formes bénignes et les formes


malignes.
Il peut s’agir :
– soit d’une compression des organes de
Examens complémentaires Quel que soit l’aspect échographique du kyste, il
indispensables
voisinage (vessie responsable d’une rétention est essentiel de ne pas opérer trop rapidement pour
d’urine, uretère responsable d’un syndrome éviter des gestes chirurgicaux inutiles (fig 2). La règle
veut que toute masse pelvienne soit recontrôlée le
© Elsevier, Paris

douloureux à type de colique néphrétique ayant ‚ Échographie


pour conséquence une hydronéphrose, soit rectal cycle suivant, juste après les prochaines règles. Ceci a
responsable de ténesmes) ; Elle détient une place essentielle dans la prise en pour but essentiel d’éviter la mauvaise interprétation
– soit d’une torsion : c’est une urgence charge et les conduites à tenir chez les femmes sémiologique d’un saignement intrakystique qui
abdominale avec douleur brutale aiguë qui va présentant une masse pelvienne éventuellement peut faire évoquer une végétation.

1
3-1230 - Masse ovarienne

Cependant, en aucun cas un traitement


œstroprogestatif ne fera disparaître par lui-même un
Diagnostic Échographie initiale suspecte
cœlioscopique kyste fonctionnel.
évoqué :
– fonctionnel L’échodoppler peut-il renforcer la notion
– paratubaire
– endométriome de bénignité ou de malignité ?
Non
Il faudra utiliser essentiellement les dopplers
Réévaluation de tous les éléments couleurs type énergie. L’existence de vaisseaux
Oui Ponction pré- et peropératoires anormaux à bas débit au sein d’une végétation ou
Kystoscopie et en fonction de cela
d’une zone suspecte est un élément péjoratif.
Cependant, l’examen doppler n’a pas encore
Signes de suspicion
d’apport diagnostique essentiel et habituellement
n’influence que peu la conduite à tenir.
Non Oui Autres signes
de malignité Existe-t-il une taille de la masse pouvant faire
Végétation unique modifier la conduite à tenir ?
et petite
Annexectomie
Jusqu’à 5 cm, en l’absence d’élément de malignité
et quel que soit l’âge en péri- ou postménopause,
l’attitude peut être attentiste. Au-delà de 5 cm, il est
Examen extemporané Examen extemporané habituel d’envisager une attitude chirurgicale (fig 3).
Kystectomie possible et négatif Impossible ou positif
‚ Apport des autres techniques d’imagerie
2 Conduite à tenir devant une échographie suspecte. Elles sont essentiellement représentées par le
scanner et l’imagerie par résonance magnétique
(IRM).
3 Conduite à tenir en L’IRM, en cas de kyste dermoïde, permet la mise
5 < Kyste liquidien pur < 10 cm
fonction de la masse ova- en évidence aisée du tissu graisseux, confirmant de
rienne. manière quasi pathognomonique la nature
Abstention ou dermoïde de ces kystes.
œstroprogestatif Cependant, si l’on pratique une évaluation des
à 50 γ
coûts et des économies que peut engendrer la
pratique de tels examens, on s’aperçoit que ceux-ci
3 mois ne modifient en rien ni l’indication, ni l’intervention
chirurgicale.
Persistance Disparition De ce fait, la seule indication réelle est un bilan
d’extension d’une tumeur certainement maligne sur
la confrontation clinique et échographique.
Cœlioscopie Surveillance
‚ Marqueurs tumoraux

Principaux aspects sémiologiques cloisons et des végétations intra- ou extrakystiques


échographiques
Marqueurs tumoraux
pouvant être associées à une ascite les rendant, dans
✔ Aucun intérêt diagnostique.
¶ Kyste séreux ce cas, mieux visibles.
✔ Valeur que si le prélèvement a lieu
Il est habituellement uniloculaire, à contours nets, Malgré une sémiologie apparemment bien
avant l’intervention.
à parois fines et à contenu homogène. déterminée, aucun aspect n’est formel et un kyste
✔ Doit-on les « doser » que si la
paraissant banal à l’échographie peut être un cancer.
¶ Kyste mucineux ou mucoïde tumeur est maligne ou s’il s’agit
Il est habituellement de grande taille, à parois ¶ Kyste fonctionnel d’un endométriome ?
épaisses, à contenu finement échogène et souvent Il est par définition bénin et ne nécessite aucune
multiloculaire. intervention chirurgicale. Cependant, l’expérience
Il faut sans cesse rappeler que le CA 125 n’a
montre que 20 % des kystes opérés sont des kystes
¶ Kyste dermoïde aucun intérêt pour le diagnostic des tumeurs
fonctionnels.
Il présente un polymorphisme échographique en pelviennes. Ceci est dû à la fréquence des faux
raison de la multiplicité des organes pouvant être Ceci est dû à un polymorphisme sémiologique et positifs, en particulier en cas d’endométriose où le
présents dans le kyste dermoïde. Le sébum est à la fréquente observation de saignements CA 125 peut être utilisé comme marqueur
hypoéchogène, très rarement transsonique, avec intrakystiques de ces kystes fonctionnels, pouvant d’évolution, en cas d’infection, ou dans les situations
discret renforcement postérieur. Il est fréquemment faire évoquer alors une masse ovarienne organique. où il existe un épanchement péritonéal.
occupé par des nodules arrondis bien limités, Ceci renforce la nécessaire obligation de contrôler En effet, le CA 125 est un marqueur de sécrétion
hyperéchogènes. Les structures pileuses ont un les kystes à au moins deux examens. des séreuses.
aspect piqueté échogène et les calcifications isolées En cas de suspicion de kystes fonctionnels, surtout Cependant, ce marqueur est indispensable pour
évoquent des structures dentaires ou osseuses. au sein d’un ovaire dystrophique, c’est-à-dire associé la surveillance des cancers de l’ovaire au décours du
à de petites masses kystiques inférieures à 15 mm, traitement, à la condition que le dosage du CA 125
¶ Kyste endométriosique folliculaires, il peut être licite de proposer un ait lieu avant l’intervention. Il paraît donc licite de
Il a des parois épaisses et un contenu échogène,
traitement œstroprogestatif qui permettra de faire systématiquement ce prélèvement si le kyste
hématique, hétérogène.
s’assurer que la lésion vue, que l’on a éventuel- justifie un acte opératoire. À l’extrême, on pourrait
¶ Lésions malignes lement décidé d’opérer, sera toujours présente au dire que ce dosage ne pourrait être pratiqué et
Quelle que soit l’origine histologique, elles ont en bout de 3 mois et que ce n’est pas un nouveau kyste réalisé que si la tumeur s’avère maligne ou s’il s’agit
principe une composante tissulaire irrégulière, des qui sera apparu et venu remplacer le précédent. d’un endométriome ovarien.

2
Masse ovarienne - 3-1230

D’autres marqueurs sont utiles, comme le CA


19-9, essentiellement dans les tumeurs mucineuses,
5 < Kyste liquidien pur < 10 cm
l’inhibine dans les tumeurs de la granulosa, et l’hCG
(h u m a n c h o r i o n i c g o n a d o t r o p i n ) dans les
choriocarcinomes. Les remarques faites pour le CA
Ponction échographique
125 sont également applicables pour ces Liquide de kyste : graisseux,
marqueurs. huileux, chocolat, séreux,
Jaune safran trouble, feuille morte
‚ Place de la ponction échographique Hémorragique
dans les masses ovariennes
La ponction échographique est indiquée en cas E2
de kyste liquidien pur, anéchogène, à cloison unique CA 125
cytologie
et fine dont la limite dans la littérature est mal définie
et peut être comprise entre 5 et 10 cm. Dans cette E2 E2
et et
situation, les dosages du CA 125 et du CA 19-9 CA 125 CA 125
doivent être normaux. et et
La ponction échographique est faite suivant la cytologie – cytologie +
même technique que la ponction folliculaire utilisée Cœlioscopie
en fécondation in vitro. Habituellement, elle ne Surveillance
nécessite aucune anesthésie et une simple
désinfection vaginale par un soluté bétadiné ou de la 4 Place de la ponction sous échographie.
chlorhexidine suffit. Le kyste est évacué dans sa
totalité. En cas d’aspect jaune safran ou pathologiques, cette situation se retrouve dans accepter un taux élevé de faux positifs qui
hémorragique, on pratique un dosage d’estradiol et moins de 10 % des cas, mais que chez des patientes conduiront, dans ces cas-là, à une laparotomie.
de CA 125 intrakystique, et une cytologie est multiopérées, ces pièges diagnostiques peuvent se Lors de l’exploration cœlioscopique, il faut tenir
adressée en anatomopathologie. En cas d’estradiol rencontrer jusque dans 50 % des cas. compte des données anamnestiques et échogra-
élevé et de CA 125 bas avec une cytologie négative, phiques pour interpréter l’aspect d’un kyste, et
on pratiquera une surveillance simple 3 mois plus choisir entre réaliser une ponction percœlioscopique,
tard. En cas d’estradiol bas ou de CA 125 élevé ou de Cœlioscopie faire une kystectomie intrapéritonéale, une
cytologie positive, il sera indiqué dans les 8 jours une ✔ Exploration. kystectomie transpariétale ou une laparotomie.
cœlioscopie. Dans les autres situations, quand ✔ Cytologie péritonéale.
l’aspect du kyste apparaît graisseux, huileux, trouble, ✔ Kystectomie fermée. ‚ Indication de la ponction
séreux, épais, noir, une cœlioscopie est proposée ✔ Ponction à l’aiguille ; percœlioscopique (fig 4)
dans les 8 jours. La principale indication de la ponction-aspiration.
Elle est réalisée uniquement si l’examen
ponction reste les kystes ovariens non suspects de ✔ Kystoscopie.
malignité et symptomatiques. En effet, la simple macroscopique a éliminé toute suspicion de
✔ Extraction dans un sac.
ponction fait disparaître la douleur. malignité. La ponction est réalisée par une aiguille
Après la ménopause, on peut situer la limite de fine pour les petits kystes ou par un système
taille entre 5 et 6 cm du fait de l’augmentation de – Détermination de la nature de la tumeur : la d’aspiration-lavage pour les kystes supérieurs à
fréquence des cancers dans cette tranche d’âge, cœlioscopie permet de retrouver des végétations 5 cm. La coloration du liquide de kyste va guider
même en cas de kystes uniloculaires à marqueurs extrakystiques, des granulations péritonéales qui, l’indication opératoire. La ponction permet ensuite
normaux. isolément ou associées à un examen extemporané, une évaluation endokystique, avec recherche de
peuvent confirmer la malignité. Dans tous les cas, végétations intrakystiques qui, présentes, peuvent
une cytologie péritonéale sera faite avant toute justifier un examen extemporané de façon à mieux

■ mobilisation des organes. déterminer la conduite à tenir.


Diagnostic chirurgical Si les kystes apparaissent organiques, on pratique
‚ Aspect cœlioscopique des différents une kystectomie par voie cœlioscopique, le plus
kystes souvent par voie intrapéritonéale (le kyste est
– Les kystes fonctionnels sont à parois minces, intégralement disséqué de l’ovaire en cœlioscopie),
La plupart des masses pelviennes translucides, peu vascularisés. ou par voie transpariétale, essentiellement réservée
imposent une exploration chirurgicale – Les kystes séreux et mucineux sont d’aspect au kyste dermoïde de gros volume, qui consiste à
sauf dans les cas suivants : globalement identique, à parois épaisses, avec amener le kyste en dehors de la paroi par une courte
✔ masse uniloculaire ; discrète vascularisation. incision.
✔ masse anéchogène ; – Les kystes dermoïdes sont marqués par des Dans tous les cas, l’extraction des pièces
✔ masse inférieure ou égale à 5 cm ; zones denses jaunâtres. opératoires se fait en protégeant la paroi
✔ CA 125 normal. – Les kystes endométriosiques s’accompagnent abdominale par mise en place du kyste ou de
d’adhérences périovariennes et sont souvent l’ovaire dans des sacs.
associés à d’autres localisations pelviennes Dans le cas d’ovaire de gros volume, on peut
‚ Cœlioscopie permettant de les inclure dans les classifications type pratiquer l’extraction après colpotomie postérieure.
Elle présente un double intérêt. AFS (American Fertility Society) ou FOATI (foyer, Dans les autres cas, la cœlioscopie permet d’indiquer
– Confirmation du diagnostic en cas de ovaires, adhérences avant lyse, trompes, au mieux la voie d’abord de la laparotomie, soit en
problème diagnostique avec d’autres masses inflammation). évitant une incision transversale basse qui n’est pas
pelviennes (adhérences péritubo-ovariennes, Le diagnostic cœlioscopique de malignité est indiquée dans le traitement carcinologique des
hydrosalpinx, kystes vestigiaux, kystes péritonéaux, fiable, avec une sensibilité proche de 100 %. Pour lésions ovariennes, soit au contraire en permettant
fibrome pédiculé, magma adhérentiel, endomé- atteindre cette sensibilité, il faut une exploration de pratiquer une incision sus-pubienne plus
triose). Il faut savoir qu’en l’absence d’antécédents complète de l’abdomen lors de la cœlioscopie et esthétique. Après la ménopause, il est classique, dès

3
3-1230 - Masse ovarienne

totale avec annexectomie bilatérale, omentectomie,


Traitement initial conservateur 5 Traitement chez la appendicectomie, curage pelvien et curage
Annexectomie ou kystectomie femme de plus de 40 ans. ganglionnaire lomboaortique. Si tous les
prélèvements sont négatifs, aucun traitement
complémentaire n’est utile, excepté pour les tumeurs
Découverte postopératoire d'une tumeur borderline
à cellules claires qui imposent une chimiothérapie.
Pour les stades Ib à IIb, le traitement chirurgical
Femme ménopausée ou > 40 ans sera identique à celui du stade Ia, avec l’association à
une chimiothérapie réunissant, en fonction des
Cœlioscopie Laparotomie protocoles, le cisplatine, l’Endoxan Astat ou le
Taxolt sur une période de six cycles.
Cytologie péritonéale
Annexectomie bilatérale de totalisation Pour les stades IIc et III, le traitement chirurgical
Hystérectomie + omentectomie consiste en l’exérèse tumorale la plus complète
Biopsie péritonéale possible. Les exérèses digestives ne se justifient que
(exérèse des orifices de trocart,
appendicectomie si tumeur mucineuse) si elles permettent une chirurgie complète. La
chimiothérapie sera identique à celle préalablement
proposée.
Pas de traitement complémentaire Pour les stades IV ou dans les situations où les
Surveillance
tumeurs sont inextirpables, on peut discuter une
chimiothérapie première avec traitement chirurgical
ultérieur.
Certaines équipes proposent des chimiothérapies
Traitement initial conservateur 6 Traitement chez la intrapéritonéales.
Annexectomie ou kystectomie femme jeune.
‚ Cas particuliers des autres tumeurs
Découverte postopératoire d'une tumeur borderline
Le séminome impose soit une annexectomie
simple pour les stades Ia, soit une annexectomie
Femme désireuse de grossesse
bilatérale et une hystérectomie dans les autres cas,
avec irradiation pelvienne lomboaortique et
Si kystectomie Si annexectomie
sus-claviculaire.
Cœlioscopie Cœlioscopie
Le deuxième look n’est pas systématique, hormis
de stadification de stadification chez les patientes incluses dans des protocoles
d’évaluation, car sur un plan individuel, la
Cytologie péritonéale découverte d’une récidive ne modifie pas le
Annexectomie unilatérale pronostic de survie.
de totalisation On peut estimer que pour les stades I, la survie est
Biopsie péritonéale Surveillance
(exérèse des orifices de trocart, de 90 % à 5 ans.
appendicectomie si tumeur Pour les stades III qui sont habituellement le stade
mucineuse) de découverte des tumeurs cancéreuses, le pronostic
est de l’ordre de 25 à 30 %.

qu’il existe un kyste, que l’on décide d’opérer et de La légitimité du traitement endoscopique des
pratiquer une ovariectomie souvent bilatérale. tumeurs borderlines et des cancers stade Ia ne se


conçoit que si, dans tous les traitements
‚ Que proposer lorsque la cœlioscopie cœlioscopiques des kystes ovariens, une cytologie Conclusion
initiale a ignoré une tumeur péritonéale ou une extraction protégée du kyste,
« borderline » ou un cancer stade Ia ? voire une kystectomie à kyste fermé, sont réalisées
systématiquement avec une toilette péritonéale Toute masse ovarienne est a priori un cancer de
Chez la femme de plus de 40 ans (fig 5) large. Ultérieurement, ces patientes seront surveillées l’ovaire, jusqu’à ce que l’on ait pu éliminer cette
cliniquement, échographiquement et biolo- hypothèse. Cependant, il n’est peut être pas légitime
Si la femme a plus de 40 ans, il faut proposer une
giquement. d’opérer toutes les patientes.
laparotomie avec restaging et pratiquer une
Il faut donc établir une bonne analyse
hystérectomie, une annexectomie bilatérale, une
sémiologique, clinique et surtout échographique,


omentectomie, une appendicectomie si la tumeur
afin d’indiquer au mieux une cœlioscopie qui, par
est d’origine mucineuse, et des biopsies péritonéales Traitement des tumeurs malignes elle-même, ne peut être considérée comme un
multiples.
examen complémentaire mais comme une
En cas de tumeurs malignes, tout dépend de la intervention à part entière, diagnostique et
Chez la femme jeune (fig 6) thérapeutique.
classification de la Fédération internationale de
Si la femme est jeune et désireuse de grossesse, il gynécologie et d’obstrétique (FIGO) (tableau I),établie Cependant, malgré les progrès de l’échographie
faut pratiquer une nouvelle cœlioscopie, pratiquer à ventre ouvert au début de la laparotomie. Pour les gynécologique, encore beaucoup trop de kystes
un nouveau bilan et une annexectomie unilatérale stades Ia chez la femme jeune désirant des enfants, fonctionnels sont opérés. Il faut sûrement
et ne réserver la kystectomie qu’aux patientes ayant une simple annexectomie est utile. Dans les autres développer d’autres armes diagnostiques et
une annexe unique. cas, on fera un traitement associant hystérectomie décisionnelles pour essayer de réduire ce taux.

4
Masse ovarienne - 3-1230

Tableau I. – Classification des cancers de l’ovaire (FIGO, 1987).

Stade I - Tumeur limitée aux ovaires


Stade Ia Tumeur unilatérale. Capsule intacte. Pas de tumeur extériorisée en surface. Pas d’ascite
Stade Ib Tumeur bilatérale. Capsule intacte. Pas de tumeur extériorisée en surface. Pas d’ascite.
Tumeur au stade Ia ou Ib mais avec extériorisation de la tumeur à la surface d’un ou des deux ovaires
ou rupture(s) capsulaire(s)
Stade Ic
ou présence d’ascite classe IV
ou lavage péritonéal classe IV
Stade II - Atteinte d’un ou des deux ovaires avec extension pelvienne
Stade IIa Extension et/ou métastase à l’utérus et/ou aux trompes
Stade IIb Extension aux autres tissus pelviens
Tumeur au stade IIa ou IIb mais avec extériorisation de la tumeur à la surface d’un ou des deux ovaires
ou rupture(s) capsulaire(s)
Stade IIc
ou présence d’ascite classe IV
ou lavage péritonéal classe IV
Stade II - Tumeur uni- ou bilatérale avec implants péritonéaux en dehors du pelvis et/ou adénopathies rétropéritonéales ou inguinales
Stade IIIa Atteinte microscopique des surfaces péritonéales abdominales. Pas de ganglion
Stade IIIb Implants < 2 cm de diamètre. Pas de ganglion
Stade IIIc Implants > 2 cm de diamètre et/ou ganglion rétropéritonéal ou inguinal positif

Stade IV - Métastase à distance y compris intrahépatique

Hervé Fernandez : Professeur des Universités, praticien hospitalier,


service de gynécologie-obstétrique, hôpital Antoine Béclère, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92140 Clamart cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : H Fernandez. Masse ovarienne.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1230, 1999, 5 p

Références

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malignant ovarian cysts: a 78-case national survey part 1: preoperative and laparo- malignomas. Geburtshilfe Frauenheilk 1995 ; 55 : 687-694
scopic evaluation. Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 1994 ; 56 : 177-180
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[2] Blanc B, D’Ercole C, Nicoloso E, Boubli L. Laparoscopic management of subsequently found to be malignant. Obstet Gynecol 1991 ; 77 : 563-565
malignant ovarian cysts: a 78-case national survey part 2: follow-up and final
treatment. Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 1995 ; 61 : 147-150 [8] Malkasian GD, Knapp RC, Latvin PT et al. Preoperative evaluation of serum
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diagnosis of adnexal cystic masses: a 12 years experience with long-term follow- puncture and aspiration in expectant management of simple ovarian cysts: a ran-
up. Obstet Gynecol 1994 ; 83 : 707-712 domised study. Br Med J 1996 ; 313 : 1110-1113
[5] Canis M, Pouly JL, Wattiez A, Mage G, Manhes H, Bruhat MA. Laparoscopic
management of adnexal masses suspicious at ultrasound. Obstet Gynecol 1997 ;
89 : 679-683

5
3-1375

3-1375

Médecin généraliste
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

et suivi de la grossesse
MF Le Goaziou

L e médecin généraliste est un relai essentiel des services d’obstétrique qui ont parfois des difficultés à suivre
toutes les femmes enceintes. Il peut assurer la surveillance des grossesses non compliquées jusqu’au sixième
ou septième mois et doit dépister précocement les grossesses à risques qui nécessitent une prise en charge spécialisée.
Il est enfin souvent amené à intervenir dans le post-partum.
© 2002 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : grossesse, suivi de la grossesse, législation de la grossesse.

■ ■
Cette interrogation est fréquente ; la femme a
Introduction plusieurs craintes : la peur d’un enfant anormal, la Première consultation
crainte d’être stérile, un désir de grossesse plus ou
moins lointain.
La première consultation doit établir avec la
Les médecins généralistes effectuent 55 % des Ces questions fréquentes [6] nécessitent de la part patiente un calendrier de suivi des visites
consultations des femmes enceintes (Ministère de la du médecin généraliste une écoute attentive pour obligatoires ; il est souhaitable qu’elle sache que le
santé, Impact médecin avril 1994) et le Centre de décrypter la vraie demande, pour donner une médecin peut répondre à ses questions à tout
recherche d’étude et de documentation en réponse à la fois scientifique et compréhensible. moment.
économie de la santé rapporte 2,4 millions de
Quelquefois, il faut faire prendre conscience à la Plusieurs situations sont à bien distinguer :
recours pour motifs obstétricaux en 1992 auprès du
patiente de la nécessité d’un bilan avant d’être – la première grossesse et les autres ;
généraliste, dont 15 % réalisés au domicile [1].
enceinte (bilan d’une pathologie chronique, diabète – la grossesse qui s’annonce sans problème et les
Les services d’obstétrique ont des difficultés à par exemple), ou d’un avis spécialisé au sujet de autres.
prendre en charge toutes les femmes enceintes.
maladies chroniques (diabète, épilepsie, Pour le praticien de médecine générale, la
En urgence et pour les pathologies intercurrentes, hypertension artérielle...) et de leurs traitements, ou connaissance antérieure de la patiente permet
le médecin de famille reste le premier recours. bilan génétique qui demande du temps souvent d’avoir une approche psychologique
Le suivi de la grossesse est une difficulté de Santé (mucoviscidose par exemple, chorée de Huntington) adaptée : trop souvent, la grossesse est transformée
publique bien réelle puisque, malgré le niveau de et si nécessaire consultation de conseil génétique, et en maladie et certaines femmes vivent ces 9 mois
médicalisation, la France arrive au treizième rang enfin bilan systématique de l’immunité (rubéole, dans la terreur d’un événement grave, d’une
pour la mortalité infantile et au dixième pour les toxoplasmose...). maladie ou, au contraire, la femme se néglige,
décès maternels, par un suivi insuffisant et un travaille trop, ne mange pas assez ou mal.
Souvent, il est nécessaire de donner ou redonner
manque de repérage des grossesses à risques. Le suivi de la grossesse a été codifié ces dernières
des informations simples sur le fonctionnement
Le médecin généraliste, médecin de premier années par le décret n° 92-143 du 16 février 1992 et
sexuel, période de fécondité dans le cycle, indice de
recours, se doit d’avoir des connaissances simples par les recommandations de l’Agence nationale
fertilité en fonction de l’âge, risque de grossesse trop
mais solides sur la grossesse normale et d’être d’accréditation et d’évaluation en santé.
tardive etc, pour permettre aux femmes et aux
capable de poser un diagnostic de gravité devant les L’arrêté du 30 septembre 1997 relatif au
couples une décision éclairée.
multiples plaintes de la femme enceinte. consentement de la femme enceinte à la réalisation
Le féminisme des années 1970 avec son slogan
La compétence du médecin généraliste doit être des analyses mentionnées à l’article R.162-16-1 du
« un enfant quand je veux » n’est pas étranger à
triple : Code de la santé publique codifie la mise en place de
l’incompréhension de certains couples devant
– celle de suivre les grossesses sans problème, la la recherche de la trisomie 21.
quelques mois d’attente avant que la grossesse
grossesse restant un état physiologique normal de la Sept visites de suivi sont obligatoires avec des
n’arrive.
femme ; contenus obligatoires légaux et facultatifs
Là aussi, une information suffisante permet de
– celle de dépister les grossesses à risques et de conseillés [3].
les adresser à une équipe obstétricale performante ; dédramatiser beaucoup de situations et de résoudre
Les consultations du premier trimestre sont
avec un peu de patience la plupart des problèmes [5].
– celle de travailler en harmonie avec les fondamentales. La grossesse demande un long
spécialistes dans un réseau de soins coordonnés Le suivi optimal d’une grossesse normale est temps d’entretien et d’examen.
autour de la patiente. possible par tout praticien car il est bien codifié.
Elles sont fondamentales pour :
L’affirmation d’une grossesse enclenche en – mettre à jour le dossier médical de la patiente
France un processus de suivi bien codifié avec les avec ses antécédents, en particulier obstétricaux,


visites obligatoires, ainsi que les examens cliniques l’état des vaccinations, des dépistages, en particulier
Avant la grossesse et paracliniques à réaliser (tableau I) [3]. le frottis du col utérin ;
Au-delà de cet aspect technique facile à réaliser – interroger sur l’état de santé du conjoint, les
pour 90 % des parturientes, les consultations de suivi maladies génétiques et/ou familiales ;
En médecine générale, la prise en compte de la de grossesses, surtout la première, sont l’objet d’une – repérer les facteurs de risques sociaux et
grossesse commence souvent bien avant la écoute attentive des questions de la femme et de psychologiques (charge de travail, investissement de
conception par la question d’avoir ou non un enfant. son conjoint, des angoisses, des phantasmes... la grossesse, environnement de la femme enceinte) ;

1
3-1375 - Médecin généraliste et suivi de la grossesse

Tableau I. – Suivi de la grossesse.

Âge
Entretien Clinique Biologie Échographie
de la grossesse
Avant 12 SA Antécédents familiaux Poids Groupage et AC irréguliers 11-13 SA
Antécédents personnels Cœur Sérologie : syphilis
Antécédents obstétricaux Tension artérielle rubéole, toxoplasmose
Conditions de vie Varices Sucre et albumine dans les urines
Conditions de travail Œdèmes des membres inférieurs Proposée : virus de l’immunodéficience
Conditions psychologiques Seins humaine
Col, annexes, utérus Frottis si nécessaire
Avant 16 SA Information de dépistage de la triso- Idem Si toxoplasmose négative : sérologie
mie 21 mensuelle
Conseils alimentaires, en particulier Sucre et albumine mensuels
pour la prévention de la listériose et de Marqueurs d risque de trisomie (14 à 17
la toxoplasmose si la sérologie est néga- SA)
tive
Déclaration de grossesse
Mois 4 Écoute et réassurance + hauteur utérine Toxoplasmose si négative
sucre et albumine
Mois 5 Idem + bruits du cœur, mouvements actifs du Idem 22-24 SA
fœtus, état du col
Mois 6 Aborder l’allaitement et la préparation à Idem NFP
l’accouchement Antigène HBS
Examen cytobactériologique des urines
Glycémie conseillée
Anticorps irréguliers si Rhésus négatif
Mois 7 Adressé à l’obstétricien Idem Toxoplasmose si négative
sucre et albumine
Mois 8 Obstétricien si possible Idem Pronostic obstétrical Toxoplasmose 32-34 SA
Prévoir la consultation d’anesthésie sucre et albumine
Mois 9 Obstétricien impératif Toxoplasmose si négative
sucre et albumine

– mettre en place un calendrier de suivi avec les Les consultations suivantes sont mensuelles et le La sérologie pour le virus de l’immunodéficience
obligations légales à remplir en termes de médecin généraliste doit pouvoir assurer le suivi des humaine doit être proposée mais n’est pas
consultations et d’examens paracliniques ; choisir le grossesses normales jusqu’au sixième, voire obligatoire.
lieu de l’accouchement et s’y inscrire assez tôt ; septième mois, mais il est important que la femme Une recherche de sucre et d’albumine dans les
– répondre aux questions, soucis, inquiétudes de soit connue de l’obstétricien qui assurera urines complète ce premier bilan.
la femme enceinte, surtout s’il s’agit d’une première l’accouchement au moins 2 mois avant le terme Le formulaire de déclaration de grossesse est
grossesse (nutrition, activité sportive, vie sexuelle, présumé, afin de créer une relation de confiance et rempli. La patiente adresse une partie à la Caisse de
tabac, alcool…) ; de faire un pronostic obstétrical précis. sécurité sociale et l’autre partie à la Caisse
– avoir un examen clinique de qualité noté dans Sept consultations prénatales sont obligatoires d’allocations familiales.
le dossier et qui sert de repère en cas de difficulté (décret 92-143 du 14 février 1992) : la consultation Si le début de la grossesse pose question,
ultérieure, en particulier le poids, la tension artérielle, de déclaration de grossesse réalisée dans les l’échographie apporte la solution.
l’auscultation cardiaque, l’état veineux et un examen 3 premiers mois et une consultation mensuelle aux La première échographie se réalise entre les
gynécologique ; quatrième, cinquième, sixième, septième, huitième 11e et 13e semaines d’aménorrhée [2].
– expliquer et réexpliquer les points importants et neuvième mois. Elle permet une datation précise de l’âge de la
de prévention, en particulier vis-à-vis de la Au cours du premier trimestre, le diagnostic de grossesse, mesure la vitalité embryonnaire et permet
toxoplasmose si la sérologie est négative, de la grossesse est posé et la déclaration de grossesse de découvrir les grossesses gémellaires. Elle permet
listériose, d’une incompatibilité sanguine ; l’authentifie. aussi la mesure de la clarté nucale qui est un signe
– expliquer et proposer le dépistage de la Devant une femme bien réglée, la datation de la important dans le cadre du dépistage des
trisomie 21. grossesse est facile ; il faut s’aider de temps en temps trisomies 21. Cette clarté nucale ne doit pas dépasser
Si cette consultation peut être cotée 2C en par un diagnostic biologique de grossesse : bêta 3 mm.
spécialité, elle est pour le médecin généraliste cotée human chorionic gonadotrophin (b-hCG) urinaire ou Cet examen est opérateur-dépendant et il est
comme une consultation ordinaire et pourtant le sanguin, surtout s’il y a des pertes de sang qui donc très important d’avoir des correspondants
contenu est le même. peuvent évoquer une fausse couche spontanée, connus.
Le carnet de maternité qui est délivré après la mais ce dosage ne permet pas une datation précise, Il est aussi particulièrement important de poser le
déclaration de grossesse arrive trop tard ; ceci est que seule l’échographie permet de réaliser. diagnostic de gémellité tôt, car la surveillance de la
dommage car ce carnet est un guide visuel qui La déclaration de grossesse doit être faite avant la patiente doit être plus attentive (conditions de vie, de
permet de ne rien oublier et de faire le lien entre des 14e semaine d’aménorrhée. travail...) et un arrêt de travail s’impose dès la
intervenants différents pendant les 9 mois de la Elle s’accompagne d’examens obligatoires : 20 e semaine d’aménorrhée pour éviter la
grossesse. – le groupage sanguin et facteur Rhésus ; prématurité.
Cette ou plutôt ces premières consultations du – les anticorps irréguliers (qu’il faut répéter aux Ces consultations du premier trimestre permettent
premier semestre peuvent paraître fastidieuses et, sixième, septième, huitième et neuvième mois de de donner à la patiente des conseils d’hygiène de
pourtant, c’est sur ces bases fondamentales des grossesse si la patiente est Rhésus négatif ou si elle a vie : alimentation variée, riche en laitage ; repos
connaissances de la situation médicale, sociale et eu des transfusions) ; suffisant, en particulier temps de sommeil ; garder
psychologique de la femme que va se personnaliser – les sérologies de la syphilis, de la rubéole et de une activité physique de type marche régulière ou
un suivi de qualité. la toxoplasmose. natation par exemple.

2
Médecin généraliste et suivi de la grossesse - 3-1375

Si la sérologie de la toxoplasmose est négative, il


est important de rappeler l’éviction des chats, de Toxoplasmose
bien cuire les viandes. Une sérologie de la Pour les femmes enceintes non immunisées :
toxoplasmose est alors obligatoire chaque mois. – bien cuire la viande (bœuf, mouton, porc, cheval), c’est-à-dire une cuisson d’au
Pour éviter la listériose, il faut rappeler aux moins 65 °C dans toute l’épaisseur de la viande ; éviter la consommation de viande
femmes les mesures de conservation des aliments : marinée, fumée ou grillée (comme cela peut être le cas pour le gibier) ;
bien laver les légumes et éplucher les fruits, se méfier – lors de la préparation des repas :
des laitages non contrôlés, des charcuteries. – laver soigneusement les légumes et plantes aromatiques, surtout s’ils sont terreux
et consommés crus ;
– éplucher les légumes et les fruits ;


Consultations suivantes – laver soigneusement les ustensiles de cuisine, ainsi que le plan de travail ;
– se laver les mains après contacts avec des légumes, des fruits ou de la viande crue
et avant de passer à table ;
– une bonne hygiène des mains et des ustensiles de cuisine est importante pour
Chaque consultation comporte un examen
clinique, avec en particulier la mesure de la tension éviter la transmission de la toxoplasmose pendant la grossesse ;
artérielle, du poids, un examen gynécologique et – lors des repas pris hors du domicile, éviter la consommation de crudités et préférer
obstétrical, et une recherche du sucre et de les légumes cuits ; la viande doit être consommée bien cuite ou bien on privilégie
l’albumine dans les urines. la consommation de volaille ou de poisson ;
La mesure de la hauteur utérine, l’appréciation – éviter les contacts directs avec les objets qui pourraient être contaminés par les
des mouvements fœtaux et des bruits du cœur excréments de chats (comme les bacs à litière, la terre) et porter chaque fois des
permettent de vérifier le bon développement de gants en cas de manipulations de ces objets ; désinfecter les bacs à litière de chat
l’enfant et l’examen au spéculum ainsi que le avec de l’eau de Javel et éviter de faire ces tâches pendant la grossesse ;
toucher vaginal recherchent une infection ou un col – éviter le contact direct avec la terre et porter des gants de jardinier ; se laver les
trop court (en Angleterre, il n’y a ni examen au
mains après des activités de jardinage, même si elles sont protégées par des gants.
spéculum, ni toucher vaginal).
Depuis l’arrêté du 30 septembre 1997, toute
femme enceinte doit être informée lors d’une
consultation de conseil génétique de la possibilité du
Listériose
dépistage prénatal de la trisomie 21. La femme Aliments à éviter
enceinte doit donner un consentement éclairé et – Éviter la consommation de fromages à pâte molle au lait cru, les poissons fumés
écrit avant de subir les prélèvements sanguins. Ce (saumon fumé, par exemple) et les graines germées (soja).
consentement explique le risque et les possibilités de – Pour les achats de produits de charcuterie consommés en l’état (pâté, rillettes,
dépistage. produits en gelée, jambon...), préférer les produits préemballés aux produits vendus
Le prélèvement sanguin permet de doser deux à la coupe ; ces produits doivent être consommés rapidement après leur achat.
marqueurs sériques dont au moins l’hCG (totale ou – Préférer les achats contrôlés en magasin aux achats de marché, bord de route...
libre) et la parturiente doit être informée qu’en cas de pendant la grossesse et vérifier les dates de péremption.
risque important, elle devra subir une amniocentèse Règles d’hygiène à respecter
qui présente un petit risque de fausse couche – Cuire soigneusement les aliments crus d’origine animale (viande, poissons).
spontanée.
– Éplucher les fruits et crudités.
Les dosages sont effectués par des laboratoires – Laver soigneusement les légumes crus et les herbes aromatiques.
agréés à la 15e, 16e ou 17e semaine d’aménorrhée – Conserver les aliments crus (viandes, légumes etc) séparément des aliments cuits
et la première échographie devient incontournable
ou prêts à être consommés.
pour bien préciser l’âge de la grossesse.
– Après la manipulation d’aliments non cuits, se laver les mains et nettoyer les
Cette obligation d’information oblige à rédiger
ustensiles de cuisine qui ont été en contact avec ces aliments.
deux documents signés, l’un par la femme enceinte
– Nettoyer fréquemment et désinfecter ensuite à l’eau javellisée le réfrigérateur.
donnant son consentement à la réalisation de ce
prélèvement, l’autre par le médecin prescripteur
– Vérifier régulièrement la température du réfrigérateur.
attestant que l’information a été faite. Le laboratoire – Être vigilant sur la chaîne du froid.
agréé qui réalise l’analyse doit obligatoirement – Dans le cadre de repas qui ne sont pas pris en collectivité, les restes alimentaires
disposer de ces deux documents. et les plats cuisinés doivent être réchauffés soigneusement avant consommation
D’autres situations vont donner lieu à une immédiate.
proposition d’emblée d’amniocentèse qui doit
conduire à une consultation d’obstétrique précoce La seconde échographie est réalisée entre la porteuse d’une pathologie préexistante, il est
au cours de la grossesse (âge avancé, antécédents 22e et la 24e semaine d’aménorrhée ; de sa qualité indispensable que s’instaure un suivi conjoint.
obstétricaux ou familiaux particuliers...). Cette dépend le dépistage des malformations fœtales. Le médecin de famille peut faire appel aux
information spécifique sur l’amniocentèse est faite La troisième échographie est réalisée entre la 32e intervenants médicosociaux : sage-femme du service
par l’obstétricien qui réalisera le geste. Cette et la 34e semaine ; elle s’attache au pronostic de protection maternelle et infantile (PMI),
information donne lieu à deux signatures, une de la obstétrical. travailleuse familiale, assistante sociale... pour l’aider
part de la patiente et l’autre de la part du médecin. Pour une bonne prise en charge des femmes dans la prise en charge de sa patiente.
La première consultation doit être faite par un enceintes, les visites du huitième et du neuvième La loi réglemente les arrêts de travail : 6 semaines
médecin, les autres peuvent être faites par une mois doivent être réalisées par l’obstétricien qui avant l’accouchement avec la possibilité de
accouchera la femme. 2 semaines complémentaires si la grossesse est à
sage-femme.
Si le médecin généraliste peut suivre les risque et 10 semaines après l’accouchement, portées
Au sixième mois, une numération globulaire et un grossesses normales jusqu’à 6 voire 7 mois, dès à 12 semaines en cas de grossesse gémellaire et à
dosage de l’antigène HBs sont obligatoires. qu’une pathologie apparaît (diabète, hypertension 20 semaines pour la troisième grossesse. Ces
Une glycémie est conseillée ainsi qu’un examen artérielle, menace d’accouchement prématuré, périodes sont prises en charge au titre de l’assurance
cytobactériologique des urines (ECBU). grossesse gémellaire...) ou si la parturiente est maternité.

3
3-1375 - Médecin généraliste et suivi de la grossesse

En cas d’arrêts de travail supplémentaires, pour La prudence est d’utiliser des produits connus et Aux second et troisième trimestres, il faut être très
grossesse pathologique, gémellarité, c’est l’assurance de limiter au maximum les prescriptions en nombre prudent. Un examen clinique précis à la recherche
maladie qui prend en charge. et en durée. de signes de gravité (tension artérielle, pouls,
L’appel au spécialiste doit être mis en œuvre dès Beaucoup de plaintes restent banales, voire appréciation de la métrorragie...) permet soit
cette première consultation si une difficulté apparaît, normales : constipation, lombalgie, pubalgie, jambes d’hospitaliser en urgence, soit de s’assurer une
d’ordre médical, social ou psychologique. lourdes, pyrosis... consultation rapide en service spécialisé pour vérifier
Chaque plainte exige une écoute attentive et une la vitalité fœtale et l’insertion placentaire.
explication des modifications corporelles pendant Le diabète nécessite une prise en charge conjointe


cette période. soit avec le service d’obstétrique, soit avec le service
Pathologies intercurrentes d’endocrinologie.
pendant la grossesse Cette écoute suffit, avec de petits traitements
symptomatiques, à faire accepter les désagréments De 2 à 3 % des femmes enceintes ont une
de la grossesse. intolérance au glucose ; le diabète gestationnel
À côté de ces consultations légales de suivi, le survient entre la 24e et la 26e semaine ; ceci justifie
‚ Situations à risques où il est important
praticien généraliste est très souvent consulté pour pour certains auteurs une glycémie systématique.
de faire un diagnostic de gravité
des pathologies intercurrentes et là, toute sa Si la patiente a pris beaucoup de poids ou a des
Les vomissements qui réapparaissent au troisième antécédents de gros bébés, une mesure de la
vigilance est de mise.
trimestre de la grossesse doivent faire rechercher un glycémie est indispensable.
Ne pas banaliser trop vite, ne pas inquiéter à tort,
syndrome chirurgical et une affection hépatique ; un L’Organisation mondiale de la santé conseille une
se méfier des médicaments [9].
dosage des transaminases s’impose et si nécessaire glycémie à jeun et postprandiale systématique à la
C’est certainement une des tâches les plus
un avis spécialisé. 26e semaine ou un test de Sullivan (absorption de
difficiles pour le praticien généraliste qui voit peu de
En début de grossesse, une perte de poids trop 50 g de glucose, la glycémie doit être inférieure ou
femmes enceintes pour les visites de suivi normal
importante doit faire rechercher une cause égale à 1,35 g/L à 60 minutes).
mais doit les traiter pour des pathologies variées,
psychologique, mais le plus souvent avec quelques La tension artérielle doit être prise après 10
allant du simple rhume ou de la crise hémorroïdaire
conseils (fractionner les repas, manger ce qui fait minutes de repos et en position assise chez la
à la céphalée qui peut signer une éclampsie, ou à
plaisir, prendre le temps de manger…) et un femme enceinte. Toute mesure supérieure ou égale
l’hyperthermie qui inquiète [8].
antiémétique, les signes s’amendent et deviennent à 145/85 nécessite une reprise de l’interrogatoire et
Là, il est demandé au médecin généraliste, non tolérables.
seulement de faire un diagnostic de la pathologie en la mise au repos de la patiente pendant 2 semaines
Les céphalées sont toujours inquiétantes pendant avec un contrôle régulier. Ce contrôle peut être
cours, mais de tenir compte des modifications
la grossesse et doivent conduire à un examen réalisé par une sage-femme à domicile ou une
apportées par la grossesse.
neurologique complet, au contrôle régulier de la infirmière.
tension artérielle, en particulier des minima, à la
‚ Plaintes banales mais pour lesquelles il Si la tension artérielle reste élevée, un bilan
recherche de signes de prééclampsie : albuminurie,
faut apporter une réponse à la patiente biologique est nécessaire : albuminurie, uricémie,
œdème, troubles visuels.
fibrinogène, numération-formule des plaquettes
La fatigue parfois intense des premiers mois, les Les migraines peuvent être aggravées pendant la (NFP), ECBU.
nausées, l’hypersomnie sont dits signes grossesse.
sympathiques de grossesse et il est important de Un avis spécialisé s’impose pour une échographie
L’hyperthermie qui ne fait pas sa preuve impose à la recherche d’un retard de croissance intra-utérin
bien rassurer la patiente après un examen clinique un ECBU ; l’infection urinaire peut être paucisymp-
normal. et d’anomalie des flux dans les artères utérines
tomatique pendant la grossesse. maternelles et du cordon.
Les douleurs du bas ventre comme si les règles La listériose est un diagnostic difficile car sans
allaient venir peuvent durer quelques semaines Il est important de distinguer la femme
tableau clinique spécifique : devant toute fièvre
aussi. hypertendue avant sa grossesse et l’hypertension
d’allure grippale, il est bon de faire des hémocultures
gravidique.
Les mastodynies peuvent être intenses et et c’est la mise sous antibiotiques très rapide qui
nécessiter un décongestionnant local type Chaque consultation recherche les signes de
assure la meilleure prise en charge (3 g
Osmogelt. prééclampsie (œdème des membres inférieurs,
d’amoxicilline par jour).
céphalées, protéinurie, hyperexcitabilité
En général, ces signes s’amendent en début de Les c o n t r a c t i o n s u t é r i n e s imposent un
neuromusculaire) qui imposent l’hospitalisation
troisième mois et disparaissent. interrogatoire précis sur le mode de vie, les charges
d’urgence.
Le troisième trimestre voit l’apparition de douleurs de travail et un examen clinique qui apprécie
Enfin, il est important de ne pas vouloir à tout prix
musculaires, tendineuses ou osseuses dues à la l’évolution du raccourcissement du col.
faire baisser une tension limite si elle est bien
distension de l’abdomen et de la symphyse Le repos s’impose dès qu’ont été éliminées les
supportée.
pubienne, de pesanteur vésicale avec pollakiurie, de contractions physiologiques (ce qui n’est pas
L’hypertension même modérée demande un
constipation souvent accompagnée d’hémorroïdes, toujours facile) et une aide par une travailleuse
suivi conjoint de la patiente avec l’obstétricien.
de jambes lourdes, de lombalgies, voire de familiale peut être proposée par le biais des Caisses
sciatalgies. La rupture de la poche des eaux impose
d’allocations familiales et de la Protection maternelle
l’hospitalisation d’urgence.
Le médecin doit, après examen, rassurer le mieux et infantile (PMI). Un enregistrement des contractions
possible et conseiller une hygiène alimentaire et une pour faire la différence entre physiologie et
hygiène de vie adaptées ; une supplémentation par pathologie peut être utile. À ne pas faire pendant la grossesse
acide folique est indispensable pour les femmes Un suivi conjoint s’impose si le col se modifie et Sauf nécessité absolue, il n’est pas
ayant un antécédent d’anomalie de fermeture du souvent une hospitalisation est nécessaire.
recommandé de réaliser des bilans
tube neural lors d’une précédente grossesse ou qui Les métrorragies sont toujours inquiétantes pour
biologiques dont l’interprétation doit
prennent un traitement antiépileptique. Dans ces la patiente qui consulte en urgence.
cas, 4 mg d’acide folique sont prescrits dans le mois Au premier trimestre, elles peuvent annoncer, tenir compte des modifications des
qui précède la conception et pendant le premier avec des douleurs, une fausse couche et la conduite normes biologiques pendant la
trimestre sous forme d’un comprimé quotidien de à tenir doit être bien explicitée à la patiente (avant la grossesse.
Spéciafoldinet. Pour les femmes sans antécédent, fin du second mois, l’hospitalisation n’est pas


cette supplémentation est recommandée à la même indispensable si le médecin est disponible en cas de
période, mais à la dose journalière de 0,2 mg (acide difficultés ou d’angoisse). Dépister les grossesses à risques
folique CCD 0,2 mg) [4]. Le médecin doit toujours suspecter et éliminer
Lorsque le médecin doit prescrire, le Vidalt doit une grossesse extra-utérine (signes généraux, b-hCG,
être consulté régulièrement pour vérifier les échographie, toucher vaginal). Il s’agit là d’une mission fondamentale du
contre-indications absolues et relatives, les Souvent, il s’agit d’une cervicite et un traitement médecin de soins primaires car de ce repérage
précautions d’emploi… désinfectant règle le problème. dépendent les moyens mis en œuvre pour prévenir

4
Médecin généraliste et suivi de la grossesse - 3-1375

un accouchement prématuré, une aggravation de Une attention toute particulière doit être apportée Le médecin généraliste de famille a là une place
l’état de santé de la mère, une prise en charge à l’hyperthermie, signe de début de lymphangite du capitale dans la prévention de ces troubles
précoce de la santé du nouveau-né. sein, d’endométrite... relationnels.
Le médecin généraliste demande au spécialiste Une prise en charge très rapide de ces


obstétricien d’être disponible pour un renseignement complications évite une évolution qui peut être
ou un conseil et de pouvoir recevoir rapidement une grave. Conclusion
parturiente si une pathologie de la grossesse L’engorgement et la lymphangite simple sont
apparaît (hypertension artérielle, diabète, menace traités par antithermiques et antiphlogistiques Le médecin de famille peut suivre sans difficulté
d’accouchement prématuré...) de façon à mettre en locaux, par vidange des seins soit sous la douche, majeure sa patiente jusqu’au sixième, voire septième
place un suivi conjoint. soit avec un tire-lait. mois de grossesse mais il est souhaitable qu’elle
Les résultats des travaux de suivi conjoint Pris en charge très rapidement, ces phénomènes fasse connaissance avec l’équipe qui procédera à
soulignent une amélioration des prises en charge et régressent en quelques heures, sinon une l’accouchement au moins 2 mois avant celui-ci et
une diminution de la mortalité et de la morbidité antibiothérapie s’impose pour éviter les abcès. qu’elle bénéficie de la préparation à l’accouchement.
pour les grossesses à risques. Cependant, ils ne sont Le travail du médecin généraliste avant la
Si l’évolution se fait malgré tout vers l’abcès
pas assez nombreux pour en tirer des conclusions grossesse est considérable et nécessite trois niveaux
(collection rénitente), l’incision chirurgicale est la
générales. de compétence complémentaires :
seule solution.
Un travail réalisé dans la région havraise [7] – la compétence à suivre une grossesse normale
L’endométrite simple, avec paramètres souples et
montre, sur un groupe de médecins volontaires qui facilitée par la codification du suivi de la grossesse
ont audité leur pratique, une insuffisance de état général conservé, peut être traitée au domicile
par antibiothérapie, antithermiques, prévention des par les textes légaux et par l’utilisation de l’outil
recherche des critères psychosociaux, une « carnet de suivi de la grossesse » ;
insuffisance de l’utilisation des bandelettes urinaires, phlébites. L’interrogatoire, l’examen clinique
permettent d’évaluer la gravité. La surveillance – la compétence à dépister une grossesse à
de la mesure de la hauteur utérine et du carnet de risque qui implique une vigilance particulière du
suivi de la grossesse. Les grossesses à risques sont rapprochée s’impose les 2 à 3 premiers jours.
médecin généraliste, en particulier lorsqu’il intervient
bien dépistées dans l’ensemble, mais 69 % Enfin, le « baby blues » fréquent (il concerne
pour des pathologies intercurrentes ;
seulement des femmes à risques sont adressées environ une femme sur cinq) demande une écoute
– la compétence à travailler en réseau de soin
dans un service spécialisé. de la patiente mais aussi un regard sur la
pour les grossesses à risques et les pathologies
Pour les grossesses sans problème, un travail réorganisation de la famille avec l’arrivée de l’enfant.
intercurrentes difficiles.
anglo-saxon montre qu’il n’est pas nécessaire Réassurer la mère sur ses capacités à s’occuper de C’est à ce prix que le défi de Santé publique de
d’impliquer les obstétriciens dans les grossesses à son enfant, la conseiller pour se faire aider ou faire diminuer la prématurité et la mort maternelle
faible risque [10] mais l’organisation du système de s’organiser afin de garder pour elle un temps pourra être relevé.
santé français ne permet pas d’extrapoler suffisant de repos, mettre le père dans le coup – Le suivi de la grossesse est bien codifié et
complètement à notre pays ces résultats ; lorsque cela est possible, est la thérapeutique permet un suivi de qualité.
cependant, la surcharge de nos maternités doit première. – C’est la première consultation qui est
conduire à mieux organiser le suivi des femmes Réévaluer la situation rapidement permet de déterminante. Elle permet de proposer à chaque
enceintes. dépister les dépressions graves et les psychoses. Le patiente un calendrier de suivi et d’écouter ses
« baby blues » cède en une quinzaine de jours le plus inquiétudes.
souvent.


– Elle permet de rechercher les critères de risques
Post-partum Le médecin de famille qui suit une grossesse peut de prématurité : mode de vie, travail, trajet,
souvent prévoir les difficultés qui surgiront à la environnement familial, antécédents gynécolo-
naissance et proposer un soutien personnalisé ou giques et obstétricaux.
Avec les sorties de plus en plus précoces de la une aide extérieure. L’enjeu de cette période est la – Les pathologies préexistantes ou intercurrentes
maternité, le médecin généraliste peut être sollicité qualité de la relation mère-enfant et le devenir du graves doivent conduire à un suivi conjoint avec
pour des difficultés maternelles du post-partum. couple et du nouveau trio. l’obstétricien ou le spécialiste concerné.

Marie-France Le Goaziou : Professeur associé de médecine générale,


121, rue du Professeur-Beauvisage, 69008 Lyon, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : MF Le Goaziou. Médecin généraliste et suivi de la grossesse.
Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1375, 2002, 5 p

Références

[1] Aguzzoli F, Le Fur P, Semet C. Clientèle et motifs de consultations en méde- [7] Mairesse JP, Aulanier S, Descamps P et al. Dépistage des grossesses à risques.
cine libérale en1992. Paris : Credes, mars1994 Rev Prat Méd Gén 1998 ; 12 : 29-36

[2] ANAES recommandations et références professionnelles. L’échographie obs- [8] Seigneur D, Aubrege A, Beis JN, Salfati G. Les particularités de la prescrip-
tétricale au cours de la grossesse en l’absence de facteur de risque. 1998 tion chez la femme enceinte. Exercer 1998 ; 47 : 12-15

[3] Collectifs d’auteurs. Guide de surveillance de la grossesse. Paris : ANDEM, [9] Thoulon JM. Petits maux de la grossesse. Encycl Méd Chir (Éditions Scienti-
2000 fiques et Médicales Elsevier SAS, Paris), Obstétrique, 5-012-A-20, 1994 : 1-6

[4] Collectifs d’auteurs. Prévention du spina bifida, supplémenter en acide foli- [10] Tucker JS, Hall MH, Howie PW, Reid ME, Barbour RS, Florey CD et al.
que dès avant la grossesse. Rev prescrire 2001 ; 220 : 600-611 Should obstetricians see women with normal pregnancies? A multicentre ran-
domised controlled trial of routine antenatal care by general practitioners and
[5] Ducot B, Spira A, Thonneau P, Toulemon L, Leridon H. Difficultés à conce- midwives compared with shared care led by obstetricians. Br Med J 1996 ; 312 :
voir. J Gynécol ObstétBiol Reprod 1991 ; 20 : 643-650 554-559
[6] Léonard D. Surveillance de la grossesse en médecine générale. Exercer 1997 ;
42 : 12-15

5
¶ 3-1420

Médicaments au cours de la grossesse


A.-M. Bouldouyre-Magnier

Quatre à 5 % des cas de malformations constatées à la naissance sont d’origine toxique ou en rapport
avec des médicaments. La prescription des médicaments durant la grossesse doit donc reposer sur
l’évaluation à la fois des risques tératogènes et fœtotoxiques de la prescription et des risques évolutifs
propres de la maladie qui justifie la prescription. Le problème se pose en pratique dans trois situations,
bien différentes : une femme a pris des médicaments ne se sachant pas enceinte et s’inquiète d’un
éventuel risque pour le bébé ; une femme est sous traitement chronique au long cours et désire un enfant ;
une femme enceinte tombe malade et a besoin d’un traitement. Dans chacune de ces circonstances, le
raisonnement s’appuie sur des données expérimentales concernant la toxicité du médicament chez
l’animal et sur les données de suivi de grossesses exposées antérieurement à ces médicaments. Les libellés
des résumés des caractéristiques des produits, tels que ceux proposés par le groupe de travail de l’Agence
française de sécurité sanitaire des produits de santé, rapportés dans les notices des médicaments dans le
dictionnaire Vidal®, permettent de distinguer différents niveaux de prescription pour les praticiens.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Médicament ; Évaluation risque ; Grossesse ; Tératogénicité ; Fœtotoxicité

Plan automédication, à but curatif ou préventif (vitamines et fer


compris), pris par voie générale ou localement (pommades).
¶ Introduction 1 Les médecins généralistes voient beaucoup ces patientes ; en
1992, l’enquête du CREDES (IRDES) notait que sur 5,4 millions
¶ Conseils à une femme qui a pris des médicaments ne se sachant
de recours aux soins pour motifs obstétricaux, 2,4 millions se
pas enceinte et qui s’inquiète d’un éventuel risque pour le bébé 1
font chez le généraliste, ce qui représente 1,1 % de leur
Ce que l’on sait du développement embryonnaire et du terme
activité [4].
de la grossesse 2
Dans tous les cas, même s’ils ne désirent pas suivre la
Ce que l’on sait du médicament 2
grossesse, les médecins généralistes sont sollicités, soit en cas
¶ Conseils aux femmes sous traitement chronique d’urgence, soit pour gérer et traiter tous les « petits maux » de
au long cours et qui désirent un enfant 3 la grossesse.
¶ Choix des médicaments chez une femme enceinte qui tombe C’est dire que la prescription de médicaments chez la femme
malade et qui a besoin d’un traitement 3 enceinte se décline dans différentes circonstances.
En fonction de l’âge de la grossesse 3
En fonction de ce que l’on sait du médicament 4
Apprécier la nécessité de traiter ou non, et les risques encourus
par l’absence de traitement 4 ■ Conseils à une femme qui a pris
¶ Conclusion 5 des médicaments ne se sachant pas
enceinte et qui s’inquiète
d’un éventuel risque pour le bébé
■ Introduction
C’est une situation qui n’est pas rare ; or il y a très peu de
Il y a en France, chaque année, environ 750 000 naissances. médicaments dont la tératogénicité dans l’espèce humaine est
On compte près de 75 000 nouveau-nés malades dont 2 à 3 % certaine et conduit le plus souvent à une interruption médicale
(15 000 environ) souffrent de malformations. Alors que dans la de grossesse. Le plus connu d’entre eux est l’isotrétinoïne
grande majorité des cas (65 à 70 % des cas) la cause en reste (l’acitrétine également). Ses conditions de prescription sont
inconnue, elle est, dans 4 à 5 % des cas, d’origine médicamen- particulièrement renforcées [5] et l’on ne devrait plus voir de tels
teuse ou toxique [1]. problèmes qu’exceptionnellement (Tableau 1).
Les femmes enceintes prennent des médicaments et d’une Dans la majorité des cas, il sera nécessaire de prendre contact,
manière un peu étonnante en prennent beaucoup : en soit avec le centre de pharmacovigilance, soit avec le Centre de
moyenne 13,6 médicaments différents [2] avec en général une recherche sur les agents tératogènes (hôpital Trousseau : 01 43
augmentation en fin de grossesse. [3] Ces chiffres compren- 41 26 22), selon une procédure qui prend en compte la globalité
nent tous les médicaments pris, qu’ils soient prescrits ou en du problème (Fig. 1).

Traité de Médecine Akos 1


3-1420 ¶ Médicaments au cours de la grossesse

Tableau 1.
Médicament nécessitant une surveillance particulière pendant le
traitement ; l’exemple de l’isotrétinoïne. Extrait du résumé des Exposition au risque
caractéristiques du produit « isotrétinoïne ». Nature et dosage du produit
Pour les femmes en âge de procréer Nature et durée d'exposition
– La prescription nécessite préalablement le recueil de l’accord de soins Quantité totale
et de contraception de la patiente ;
– la prescription est limitée à 1 mois de traitement dont la poursuite
nécessite une nouvelle prescription ;
– la délivrance doit être effectuée au plus tard 7 jours après la prescrip-
tion ; Âge gestationnel précis
– la délivrance ne peut se faire qu’après avoir vérifié que toutes au moment de l'exposition au risque (hCG)
les mentions obligatoires suivantes figurent sur l’ordonnance. Échographie si nécessaire pour préciser le terme
Lors de la première prescription :
• signature de l’accord de soins et de contraception ;
• mise en place d’au moins une méthode de contraception efficace
depuis au moins 1 mois ;
• évaluation du niveau de compréhension de la patiente ;
• date du test de grossesse (human chorionic gonadotropin [hCG] Enquête/CRAT
plasmatique) ; (Centre de recherche sur
les agents tératogènes)
Lors des prescriptions suivantes :
• poursuite d’une contraception efficace ; Médicament : nature, doses
• évaluation du niveau de compréhension de la patiente ; - Âge de la grossesse
- Âge de la patiente
• date du test de grossesse (hCG plasmatiques).
- Pathologie/prise du médicament
Documents d’aide à la prescription - Antécédents personnels et familiaux
Afin d’aider les prescripteurs, les pharmaciens et les patientes à éviter
l’exposition du fœtus à l’isotrétinoïne, le titulaire de l’autorisation
de mise sur le marché (AMM) leur fournira des brochures explicatives
destinées à renforcer les mises en garde liées à la tératogénicité de
l’isotrétinoïne, à informer sur les méthodes contraceptives et à insister
sur la nécessité des tests de grossesse.
Les prescripteurs doivent fournir une information complète à tous les Réponse : quels risques pour quels organes?
patients, aussi bien les hommes que les femmes, concernant le risque
tératogène de l’isotrétinoïne et les mesures strictes de prévention
de la grossesse comme énoncé dans le programme de prévention de
la grossesse.
Précautions supplémentaires Choix du meilleur moment
Les patients doivent être avertis qu’ils ne devront jamais donner ce mé- pour le contrôle échographique
dicament à une personne de leur entourage, et qu’ils doivent rapporter des malformations possibles
toutes les capsules non utilisées à leur pharmacien à la fin du traitement.
Les patients ne doivent pas effectuer de don de sang durant le traite-
ment par isotrétinoïne ni au cours du mois suivant son arrêt, en raison Figure 1. Arbre décisionnel. Prise médicamenteuse en début de
de la présence d’isotrétinoïne dans le sang, des risques de contamina-
grossesse.
tion éventuelle de femmes enceintes et du risque potentiel pour
le fœtus.

il est donc indispensable de recueillir, d’une part le maximum


de renseignements sur la date précise de la grossesse, mais aussi
Ce que l’on sait du développement sur les dates de prise des médicaments et leur posologie
effective.
embryonnaire et du terme de la grossesse
Avant l’implantation (du premier au 12e jour environ après la Ce que l’on sait du médicament
conception) ; du fait de l’absence de placenta, les échanges avec
l’organisme maternel sont minimes et c’est dans cette période Les rubriques « Grossesse Allaitement » du Vidal® reposent sur
qu’a été évoquée la « loi du tout-ou-rien » : soit toxicité l’analyse des données disponibles, expérimentales chez l’animal
maximale avec mort embryonnaire, soit absence d’effet. et d’observation dans l’espèce humaine [6].
Mais ceci n’a été réellement validé qu’en expérimentation Les données des études de tératogenèse sont effectuées chez
animale et avec les radiations ionisantes. S’agissant des médica- l’animal obligatoirement sur deux espèces (données publiées ou
ments, il convient d’être plus prudent et de prendre en compte non) et font partie du dossier d’AMM. Les études de tératoge-
nèse ne sont obligatoires que depuis 1985, à la suite du drame
la demi-vie d’élimination du médicament en se souvenant que
du thalidomide. Le plus souvent, aucune donnée n’est men-
96 % du produit est éliminé au bout de 5 demi-vie en cinétique
tionnée pour les médicaments les plus anciens. Pour les médi-
linéaire. On conçoit bien que pour des médicaments à demi-vie
caments les plus récents, à ce jour, aucun médicament n’ayant
longue, cela puisse poser problème. C’est la raison pour laquelle pas eu d’effet tératogène chez l’animal ne s’est par la suite
la poursuite de la contraception est nécessaire pour les trétinoï- révélé tératogène dans l’espèce humaine et à condition que les
nes dans le mois qui suit l’arrêt du traitement. études aient été bien faites, on peut donc être rassurant. À
La période embryonnaire est la période de l’organogenèse qui l’inverse, si un risque a été mis en évidence, il sera nécessaire
va, chez l’être humain, du 13e au 56e jour après la conception. d’apprécier l’importance du risque encouru et d’en déduire une
Les risques sont alors des risques malformatifs touchant de conduite à tenir allant de la surveillance échographique
manière privilégiée tel ou tel organe selon la chronologie de adaptée, à l’éventualité de l’interruption de grossesse.
l’organogenèse et le tropisme spécifique des facteurs tératogènes. D’autre part, à chaque fois que possible sont étudiées et
En cas d’exposition à un médicament pendant cette période, analysées les grossesses exposées aux médicaments quand les

2 Traité de Médecine Akos


Médicaments au cours de la grossesse ¶ 3-1420

données sont disponibles. Les études de cohortes permettant C’est une situation fréquente. Il est nécessaire d’en parler
d’écarter un doublement du taux de malformations observées précocement alors même que la patiente n’a pas posé encore de
en population générale sont rares : les effectifs habituellement questions car dans certaines situations, il sera nécessaire de
requis totalisent environ un millier de patientes exposées lors mettre en route des précautions avant même la conception,
du premier trimestre. Plus souvent, il s’agit seulement de ainsi pour les patientes sous antiépileptiques, la prescription
données issues d’une large utilisation mais le nombre d’obser- d’une substitution par acide folique [7].
vations exploitables de grossesses exposées et analysées selon
une méthodologie validée reste encore limité.
Ainsi à partir de la synthèse de ces études, sont formulées des
recommandations.
“ À retenir
Patientes sous antiépileptiques

“ À retenir
En France, 700 grossesses environ par an sont affectées par
une anomalie congénitale de fermeture du tube neural
(anencéphalie ou spina bifida), qui donne lieu à une
Libellé proposé par le groupe de travail interruption médicale de grossesse dans la majorité des
« Reproduction, grossesse, naissance » cas. Une supplémentation quotidienne de 0,4 mg d’acide
(septembre 2002) Afssaps. Extrait Vidal® 2004 folique pendant le mois qui précède et les 2 mois qui
1. Une situation où l’utilisation est formellement proscrite suivent la conception réduit significativement le risque de
durant la grossesse. En effet, il existe un risque malformatif telles anomalies.
ou fœtotoxique prouvé dans l’espèce humaine. Ce traitement est conseillé pour toutes les femmes et en
« Compte tenu des données disponibles, l’utilisation du ... particulier :
est contre-indiquée (tout au long ou une partie de la • pour les femmes enceintes sous traitement
grossesse) et chez la femme en âge de procréer antiépileptique par valproate de sodium et
n’utilisant pas de contraception efficace. En effet, en carbamazépine, même si la dose optimale n’en est pas
clinique... » encore connue ;
Un contraception efficace est obligatoire pour pouvoir • pour les femmes ayant un antécédent de grossesse avec
prescrire ce médicament. anomalie de fermeture du tube neural, à la dose de
2. Une situation où la prescription en cours de grossesse 5 mg/j.
doit être soigneusement pesée.
L’utilisation du médicament n’est pas formellement
proscrite, il ne s’agit donc pas d’une contre-indication,
mais : Lorsqu’il s’agit de traitement anticoagulant ou d’antidiabé-
• soit il existe une suspicion à confirmer ou à infirmer : tique, la substitution du traitement est facile et bien codifiée ;
il s’agit de mettre la jeune femme sous héparine ou sous
« Compte tenu des données disponibles, l’utilisation du ...
insuline. Ces médicaments dont on dit qu’ils ne traversent
est déconseillée (tout au long ou une partie de la pas la barrière placentaire permettent la grossesse en sécurité.
grossesse) et chez la femme en âge de procréer n’utilisant Il s’agit dans tous les cas de grossesse à surveillance particu-
pas de mesure contraceptive. En effet, en clinique... » lièrement renforcée. Pour ce qui est du diabète, la surveillance
• soit l’absence d’élément inquiétant ne repose que sur des glycémies doit permettre d’obtenir un équilibre glycémi-
des données encore parcellaires : que parfait afin d’éviter les risques malformatifs dus au
« Compte tenu des données disponibles, il est préférable, diabète lui-même.
par mesure de prudence, d’éviter d’utiliser le ... (tout au Pour les autres traitements, tels les antiépileptiques, lithium,
long ou une partie de la grossesse). En effet, en neuroleptiques, médicaments non dénués de risques, il n’est pas
clinique... » toujours facile de remplacer un traitement par un autre.
Certains médicaments pouvant être toxiques pour tel ou tel
3. Une situation où l’utilisation d’un médicament est
organe, c’est parfois en fonction du calendrier de l’organogenèse
possible au cours de la grossesse.
(Fig. 2) que seront évalués, d’une part les risques d’un médica-
Deux libellés sont proposés en fonction de la qualité des ment ou d’un autre, d’autre part les risques en rapport avec la
données humaines. pathologie elle-même, comme pour les femmes sous chimiothé-
Autant que possible, le choix se portera sur un rapie ou sous antirétroviraux.
médicament bénéficiant du dernier libellé (niveau
d’utilisation le plus sûr).
« Compte tenu des données disponibles, l’utilisation du ... ■ Choix des médicaments chez une
est envisageable (tout au long ou une partie de la
grossesse) » femme enceinte qui tombe malade
« Compte tenu des données disponibles, l’utilisation du ... et qui a besoin d’un traitement
est possible (tout au long ou une partie de la grossesse) »
La décision doit également être pesée.

En fonction de l’âge de la grossesse


■ Conseils aux femmes sous On distingue l’âge de la grossesse (semaines d’aménorrhée) et
l’âge de l’embryon ou du fœtus (compté à partir de l’âge de
traitement chronique au long cours conception).
et qui désirent un enfant En début de grossesse, les risques sont d’ordre malformatif.
La période fœtale commence à la fin du 2e mois et se pour-
Il s’agit de conseils avant conception : évaluation du risque suit jusqu’à l’accouchement. Il s’agit alors d’une période de
de toxicité pour l’embryon ou le fœtus du traitement en cours, croissance et de maturation des organes en place (système
alternatives thérapeutiques éventuelles. nerveux central, organes génitaux, reins...). Les conséquences

Traité de Médecine Akos 3


3-1420 ¶ Médicaments au cours de la grossesse

Figure 2. Calendrier d’organogenèse simplifié.


Division Période fœtale
Âge de l'embryon (en semaines) (en semaines)−//→terme
cellulaire
1 2 3 4 5 6 7 8 9 16 20-36 38

Système
nerveux central

Cœur

Membres
supérieurs

Yeux

Membres
inférieurs

Dents

Palais

Organes génitaux externes

Oreilles

Mort Anomalies morphologiques majeures Déficiences fonctionnelles


prénatale et anomalies morphologiques mineures

Période de grande sensibilité Période de moindre sensibilité

d’une exposition fœtale peuvent être alors moins voyantes groupe de travail de l’Afssaps sur l’information des femmes
mais tout aussi problématiques et parfois tardives : difficultés enceintes [9] précise bien que l’efficacité et l’innocuité
de développement psychomoteur, effets carcinogènes comme des thérapies complémentaires ou alternatives ont été insuf-
cela a été le cas - heureusement exceptionnel - pour le fisamment évaluées pendant la grossesse.
diéthylstilbestrol [8]. Il est indispensable de contrôler l’automédication et mettre
en garde les patientes contre les médicaments qui peuvent
En fonction de ce que l’on sait apparaître d’usage courant et sans danger et notamment de
du médicament rappeler la contre-indication de tous les anti-inflammatoires
Le problème le plus fréquent est lié au métabolisme du non stéroïdiens (AINS) à partir de 24 semaines d’aménorrhée
médicament et à son devenir à l’approche de l’accouchement : révolues. Les AINS, y compris l’aspirine et les inhibiteurs
comment est-il éliminé en fin de grossesse, comment le bébé sélectifs de la cyclo-oxygénase 2 sont inhibiteurs de synthèse
s’en accommodera-t-il à la naissance ? des prostaglandines et donc susceptibles d’entraîner, même lors
Pour la mère en fin de grossesse, plusieurs facteurs intervien- de prises brèves (1 j) et quelle que soit la voie d’administration
nent : augmentation du volume plasmatique total et de la (collyre, pommade, crème ou gel pour application locale), des
fraction libre des médicaments, augmentation du débit sanguin effets vasoconstricteurs au niveau rénal et cardiovasculaires
rénal et de la clairance de la créatinine qui modifient le (avec en particulier fermeture du canal artériel avant la nais-
métabolisme des médicaments. sance entraînant la mort du fœtus). Le risque lié à la prise des
Après la naissance, le nouveau-né est « seul » avec les médi- AINS apparaît à partir du début du 6e mois de grossesse. Il est
caments accumulés alors que ses capacités métaboliques hépa- cependant déconseillé de prendre un AINS au long cours entre
tiques sont faibles ainsi que ses capacités excrétrices rénales. 12 et 24 SA.
Ainsi le nouveau-né peut, dans certains cas, être encore impré- Si certaines situations peuvent être évitées tels les voyages,
gné par le médicament pendant plusieurs jours, voire plusieurs parfois ce n’est pas possible et des vaccins sont nécessaires
semaines. La demi-vie plasmatique d’élimination des médica- (Tableau 2).
ments est, chez lui, beaucoup plus longue (2 à 4 fois et plus
A contrario, il ne serait pas raisonnable d’arrêter un traite-
encore chez le prématuré).
Des effets toxiques peuvent ainsi être observés chez le ment sous prétexte de la grossesse. Ainsi s’agissant des femmes
nouveau-né alors que les posologies maternelles sont restées toxicomanes, alors qu’elles-mêmes le souhaitent, le sevrage n’est
dans l’intervalle thérapeutique. pas recommandé en raison des risques qu’il fait courir au
fœtus ; il faut substituer par méthadone de préférence car de
Apprécier la nécessité de traiter ou non, nombreuses grossesses ont été suivies, [10] ou par buprénorphine
car il vaut mieux que ces patientes n’aient pas recours à des
et les risques encourus par l’absence produits inconnus.
de traitement Enfin, il ne peut être question de laisser une femme malade
Il faut rester vigilant ; ce n’est pas parce que rien n’est sans traitement. De nombreuses pathologies ne posent pas de
mentionné que la prescription est totalement sans risque. Le problèmes particuliers pendant la grossesse : les traitements de

4 Traité de Médecine Akos


Médicaments au cours de la grossesse ¶ 3-1420

Tableau 2.
Vaccinations possibles ou non chez la femme enceinte. D’après [9].
■ Conclusion
Vaccin Administration Commentaires La prescription pendant la grossesse doit prendre en compte
pendant la grossesse à la fois la patiente, la maladie et le bébé à venir alors même
BCG Non Sauf forme inactivée que les données disponibles pour les prescripteurs restent encore
Choléra Non-innocuité non déter-
difficiles d’accès et devraient être diffusées [9] plus largement.
minée Récemment le centre de référence sur les agents térato-
gènes (CRAT) est devenu accessible en ligne à l’adresse :
Hépatite A Non Innocuité non déterminée
.

www.lecrat.org, proposant des informations et des réponses


Hépatite B Oui Si risque infectieux personnalisées aux questions des praticiens.
Grippe (influenza) Oui .

Encéphalite Non
japonaise ■ Références
Méningocoque Oui Si risque d’infection
[1] Wilson JG. Embryotoxicity of drugs in man. In: Handbook of
Rougeole Non teratology. 1 General principles and etiology. New York: Plenum
Oreillons Non Press; 1977. p. 309-55.
Poliomyélite Oui Si indication [2] Lacroix I, Damase-Michel C, Lapeyre-Mestre M, Montastruc JL. Pres-
inactivée cription of drugs during pregnancy in France. Lancet 2000;356:1735-6.
[3] Schilliger P, Bavoux F, Elefant E. Attention aux médicaments en fin de
Rage Oui Si indication
grossesse. Rev Prescrire 1991:423-9 (n°110).
Rubéole Non Vaccination après l’accou- [4] IRDES. Clientèle et motifs de recours en médecine libérale. 1992.
chement, contraception [5] Autret E, Radal M, Jonville-Bera AP, Goehrs JM. Isotrétinoïne
conseillée (Roaccutane®) chez la femme en âge de procréer : insuffisance du suivi
Diphtérie Non Entraîne des réactions fé- des recommandations de prescription. Ann Dermatol Venereol 1997;
briles importantes. Possible 124:518-22.
si indication [6] Elefant E, Sainte-CroixA. Évaluation du risque médicamenteux chez la
Tétanos Oui femme enceinte : méthodologie d’évaluation et management du risque.
Typhoïde Non Innocuité non déterminée Therapie 1997;52:307-11.
[7] Rédaction Prescrire. Prévention du spina-bifida : supplémenter en acide
Variole Non
folique dès avant la grossesse. Rev Prescrire 2001 (n°220).
Varicelle Non [8] Vessey MP. Epidemiological studies of the effects of diethylstilboestrol.
Fièvre jaune Oui Éviter sauf en cas de risque IARC Sci Publ 1989;96:335-48.
élevé [9] HAS. Comment mieux informer les femmes enceintes ? Recomman-
BCG : bacille de Calmette et Guérin.
dations pour les professionnels de santé, avril 2005.
[10] Lejeune C, Simmat-Durand L. Grossesse et substitution - Enquête sur
les femmes enceintes substituées à la méthadone ou à la buprénorphine
l’asthme, la plupart des antibiotiques [11] et en alternative aux haut dosage et caractéristiques de leurs nouveau-nés. Paris: OFDT;
anti-inflammatoires pour faire face à des problèmes douloureux 2003 (142p).
ou fébriles, quel que soit le terme de la grossesse, les antalgiques [11] Berrébi A, Damase-Michel C, Elefant E. Guide des médicaments
de paliers 1, 2 ou 3, voire les corticoïdes sont des recours anti-infectieux lors de la grossesse et de l’allaitement. Paris: Doin;
possibles. 2003.

A.-M. Bouldouyre-Magnier, Professeur (ammagnier@nerim.fr).


Faculté de médecine Pierre et Marie Curie, Département de médecine générale, site Saint-Antoine, 12 rue Chaligny, 75012 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Bouldouyre-Magnier A.-M. Médicaments au cours de la grossesse. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),
Traité de Médecine Akos, 3-1420, 2007.

Disponibles sur www.emc-consulte.com


Arbres Iconographies Vidéos / Documents Information Informations Auto-
décisionnels supplémentaires Animations légaux au patient supplémentaires évaluations

Traité de Médecine Akos 5


¶ 3-1210

Nodules du sein
R. Rouzier, S. Legoff

La prise en charge d’un nodule du sein implique de suivre une démarche diagnostique définie, passant par
l’interrogatoire, l’examen clinique, des examens d’imagerie, voire des examens à visée histologique. La
conduite à tenir dépend de l’âge de la patiente et surtout des données de l’examen clinique. L’imagerie de
première intention comprend une mammographie et éventuellement une échographie. Le cancer du sein
est le diagnostic à éliminer quel que soit l’âge de la patiente. Le traitement de ces nodules dépend de leur
nature histologique. En cas de doute diagnostique, l’exérèse chirurgicale est indispensable.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Tumeur ; Facteur de risque ; Cancer ; Mammographie ; Échographie ; Histologie

Plan est fonction de l’âge de la patiente. Les pathologies bénignes


sont les plus fréquentes avant 50 ans, mais un tiers des cancers
surviennent avant l’âge de 50 ans.
¶ Introduction 1
¶ Conduite à tenir diagnostique 1
Interrogatoire 1 ■ Conduite à tenir diagnostique
Examen clinique 1
La démarche diagnostique doit être la même devant tout
Mammographie 2
nodule. Elle repose sur :
Échographie 2
• l’interrogatoire ;
Prélèvement à visée histologique 2
• l’examen clinique ;
¶ Étiologies 3 • l’imagerie : mammographie, échographie ;
Lésions kystiques 3 • la cytoponction ou la ponction-biopsie.
Lésions tissulaires 4 Il faut avoir conscience qu’environ 30 % des nodules palpés
par la patiente elle-même ou un médecin ne sont pas confirmés
par un chirurgien gynécologue [1] du fait de leur involution
spontanée ou de faux-positifs (densification naturelle du tissu
■ Introduction glandulaire du quadrant supéroexterne et du repli infra-
mammaire, cicatrice d’une ancienne biopsie, articulation
chondrocostale, côtes proéminentes, tendon du muscle grand
pectoral, mauvaise technique d’examen, notamment en pinçant
“ Point essentiel le tissu mammaire). Un nodule mammaire avéré est typique-
ment distinct des tissus environnants dans ses trois dimensions,
généralement asymétrique par rapport au sein controlatéral et
Seuls 8 à 10 % des nodules du sein sont cancéreux ; persistant.
toutefois, l’incidence du cancer augmente nettement à
partir de 40 ans Interrogatoire
L’interrogatoire précise les circonstances de diagnostic, les
facteurs de risque de pathologie mammaire personnels et
Le sein est constitué histologiquement de trois tissus princi- familiaux, les antécédents de pathologie mammaire, ponctions
paux : le tissu épithélial (canaux galactophores et acini, avec les ou biopsies mammaires, la durée et la régularité des cycles ou
éléments myoépithéliaux), le tissu conjonctif (tissu de soutien) bien la date de la ménopause, les traitements hormonaux pris
et le tissu adipeux. Un nodule du sein peut correspondre à une (contraception orale, traitement hormonal substitutif), les
prolifération bénigne du tissu conjonctif (fibroadénome), caractéristiques de la tumeur (date de découverte et évolution
rarement à une prolifération maligne (sarcome) ou à une durant le cycle et au cours des 6 derniers mois, sensibilité,
anomalie épithéliale : les kystes et les ectasies galactophoriques écoulement mamelonnaire associé, modifications de forme du
constituent l’essentiel des pathologies bénignes et les carcino- sein).
mes canalaires infiltrants, développés aux dépens des cellules
épithéliales des canaux galactophoriques, représentent la Examen clinique
majorité des tumeurs malignes. Les nodules aux dépens du tissu L’examen clinique est bilatéral et comparatif. La patiente est
graisseux (lipomes) sont rares et en fait surtout de découverte torse nu, assise, bras le long du corps puis levés. L’examen est
fortuite à l’imagerie. La fréquence de ces différentes pathologies ensuite pratiqué sur la patiente debout puis couchée.

Traité de Médecine Akos 1


3-1210 ¶ Nodules du sein

Tableau 1.
Classification ACR-BIRADS des anomalies mammographiques.
ACR 0 : des investigations complé- Comparaison avec les documents antérieurs, incidences complémentaires, clichés centrés comprimés, agrandisse-
mentaires sont nécessaires ment de microcalcifications, échographie, etc. C’est une classification « d’attente », qui s’utilise en situation de dépis-
tage ou dans l’attente d’un second avis, avant que le second avis soit obtenu ou que le bilan d’imagerie soit complété
et qu’ils permettent une classification définitive
ACR 1 : mammographie normale
ACR 2 : il existe des anomalies béni- Opacité ronde avec macrocalcifications (adénofibrome ou kyste)
gnes ne nécessitant ni surveillance Ganglion intramammaire
ni examen complémentaire
Opacité(s) ronde(s) correspondant à un (des) kyste(s) typique(s) en échographie
Image(s) de densité graisseuse ou mixte (lipome, hamartome, galactocèle, kyste huileux)
Cicatrice(s) connue(s) et calcification(s) sur matériel de suture
Macrocalcifications sans opacité (adénofibrome, kyste, adiponécrose, ectasie canalaire sécrétante, calcifications vascu-
laires, etc.)
Microcalcifications annulaires ou arciformes, semi-lunaires, sédimentées, rhomboédriques (calcifications d’aspect
carré ou rectangulaire de face, losangiques ou trapézoïdales de profil, à étudier sur des agrandissements)
Calcifications cutanées et calcifications punctiformes régulières diffuses
ACR 3 : il existe une anomalie pro- Microcalcifications rondes ou punctiformes régulières ou pulvérulentes, peu nombreuses, en petit amas rond isolé
bablement bénigne pour laquelle Petit(s) amas rond(s) ou ovale(s) de calcifications amorphes, peu nombreuses, évoquant un début de calcification
une surveillance à court terme est d’adénofibrome
conseillée
Opacité(s) bien circonscrite(s), ronde(s), ovale(s) ou discrètement polycyclique(s) sans microlobulation, non
calcifiée(s), non liquidiennes en échographie
Asymétrie focale de densité à limites concaves et/ou mélangée à de la graisse
ACR 4 : Il existe une anomalie indé- Microcalcifications punctiformes régulières nombreuses et/ou groupées en amas aux contours ni ronds, ni ovales
terminée ou suspecte qui indique Microcalcifications pulvérulentes groupées et nombreuses
une vérification histologique
Microcalcifications irrégulières, polymorphes ou granulaires, peu nombreuses
Image(s) spiculée(s) sans centre dense
Opacité(s) non liquidienne(s) ronde(s) ou ovale(s) aux contours lobulés, ou masqués, ou ayant augmenté de volume
Distorsion architecturale en dehors d’une cicatrice connue et stable
Asymétrie(s) ou surcroît(s) de densité localisé(s) à limites convexes ou évolutif(s)
ACR 5 : il existe une anomalie évo- Microcalcifications vermiculaires, arborescentes ou microcalcifications irrégulières, polymorphes ou granulaires,
catrice d’un cancer nombreuses et groupées
Groupement de microcalcifications quelle que soit leur morphologie, dont la topographie est galactophorique
Microcalcifications associées à une anomalie architecturale ou à une opacité
Microcalcifications groupées ayant augmenté en nombre ou microcalcifications dont la morphologie et la distribu-
tion sont devenues plus suspectes
Opacité mal circonscrite aux contours flous et irréguliers
Opacité spiculée à centre dense
La classification doit tenir compte du contexte clinique et des facteurs de risque. La comparaison avec des documents anciens ou le résultat d’investigations complémentaires
peuvent modifier la classification d’une image : une opacité ovale régulière classée ACR 3 mais présente sur des documents anciens peut être reclassée ACR 2, quelques
calcifications résiduelles après prélèvement percutané contributif bénin d’un amas classé ACR 4 peuvent être reclassées ACR 2, etc.

À l’inspection, on note la forme et la taille du sein, et on ainsi qu’à son interprétation, devraient être soumis à un
recherche une asymétrie, une voussure, une ride ou rétraction contrôle de qualité régulier. Afin de préciser le diagnostic, des
cutanée, un aspect en peau d’orange, un œdème, des signes incidences complémentaires et des agrandissements de clichés
inflammatoires, une anomalie du mamelon. peuvent être envisagés. À l’heure actuelle, les compte rendus
La palpation se fait doigts à plat quadrant par quadrant, y mammographiques standards où sont formulées les hypothèses
compris la région mamelonnaire, la région paramammaire et le diagnostiques selon le degré de suspicion de la classification
prolongement axillaire. La consistance des glandes et leur ACR sont recommandés. La classification ACR est rapporté dans
caractère homogène ou non sont évalués. Si un nodule est le Tableau 1.
palpé, ses caractéristiques sont précisées : ferme ou dur ; régulier La classification ACR-BIRADS peut être utilisée à la fois pour
ou non ; bien ou mal limité. On mesure sa taille dans son plus les nodules et pour les opacités non palpables (Fig. 1). La
grand diamètre et on note le siège précis dans le sein sur un mammographie peut être complétée par une échographie.
schéma daté. On recherche une adhérence à la peau, au grand
pectoral ou au mamelon, et un écoulement mamelonnaire
provoqué par la pression du mamelon ou d’un des quadrants du Échographie
sein.
L’examen clinique mammaire se termine par la palpation des L’échographie est particulièrement informative lorsque les
creux axillaires et sus-claviculaires. seins sont denses, chez la femme de moins de 30 ans, enceinte
En cas de suspicion de cancer ou de signe fonctionnel ou allaitante. Une classification BI-RADS Ultrasonography a
particulier, un examen abdominal (palpation hépatique), également été établie pour décrire ces nodules et orienter plutôt
rhumatologique ou neurologique peut être nécessaire. vers une histologie bénigne ou maligne (Tableau 2).

Mammographie Prélèvement à visée histologique


Une mammographie bilatérale standard comprend deux
incidences (face et oblique externe), éventuellement complétées Un examen histologique par microbiopsie (14-18 gauges) peut
par des incidences complémentaires et une échographie. Les être proposé afin de préciser encore le diagnostic.
différents éléments (mammographe et chaîne de développe- La biopsie mammaire transcutanée consiste à prélever une
ment) qui concourent à la création de l’image radiologique, carotte du nodule sous anesthésie locale après une petite

2 Traité de Médecine Akos


Nodules du sein ¶ 3-1210

Image non palpable

ACR ACR ACR ACR


2 3 4 5

Surveillance Nécessité
Mammographie d'un diagnostic
+/- échographie Micro/macrobiopsie préopératoire
à 24 mois (ganglion sentinelle)

Surveillance Bénin Malin, Microbiopsie


Mammographie atypique (cytoponction)
+/- échographie pour
à 4 mois confirmation

Exérèse
chirurgicale

Figure 1. Arbre décisionnel. Prise en charge diagnostique d’une lésion non palpable.

Tableau 2. La biopsie chirurgicale ou tumorectomie sous anesthésie


Classification Bi-RADS échographique. locale ou générale s’impose en cas d’impossibilité de réaliser une
BI-RADS 1 Absence de masse
biopsie ou si celle-ci a conclu à une atypie, est non informative
ou discordante avec la clinique ou l’imagerie. Elle permet en
BI-RADS 2 Bénignité certaine : lipome, Masse .
outre le traitement de certaines lésions cancéreuses sous
ganglion intramammaire elliptique/macrolobulée certaines conditions.
plus large que haute La démarche diagnostique est rapportée dans la Figure 2.
encapsulée
BI-RADS 3 Bénignité probable (2 % de
risque de cancer) : adénofi-
■ Étiologies
brome À l’issue de cette démarche, le nodule doit pouvoir être classé
BI-RADS 4 Malignité probable : dans l’une des catégories suivantes : lésions kystiques ou lésions
4a : de 3 à 49 % de risque de tissulaires.
cancer
4b : de 50 à 89 % de risque Lésions kystiques
de cancer Elles sont fréquentes, surtout dans la cinquième décennie et
BI-RADS 5 Malignité certaine (90 % de Hypoéchogénicité mar- en périménopause ; elles doivent faire évoquer une obstruction
risque de cancer) quée du canal galactophorique en aval par un cancer chez la femme
Halo hyperéchogène ménopausée. Cliniquement, les kystes sont fermes ou élastiques,
Plus haute que large bien délimités, souvent multiples, dans un sein dense ; ils
évoluent souvent avec le cycle et peuvent être sensibles
Contours spiculés
lorsqu’ils sont apparus rapidement (contexte de variations
Microlobulations hormonales rapides). Ils s’inscrivent dans le cadre d’une
Aspect branché dystrophie tissulaire principalement épithéliale dite « mastopa-
Extension intracanalaire thie fibrokystique », bénigne : hyperplasie de l’épithélium
Cône d’ombre postérieur galactophorique (composante glandulaire) simple, atypique (ce
Microcalcifications qui est alors un facteur de risque de cancer) voire adénose
(hyperplasie de tous les constituants de l’unité terminale
ductolobulaire [cellules épithéliales, myoépithéliales et tissu
incision cutanée ; sa sensibilité dépasserait 98,7 %, les faux- conjonctif] réalisant une augmentation en taille et en nombre
positifs étant rares [2]. Elle permet de différencier les cancers in .
des lobules), et sclérose conjonctive responsable de la compres-
situ des invasifs. sion des canaux galactophores à l’origine de formations kysti-
Certaine équipes proposent des cytoponctions. La cytoponc- ques de taille variable.
tion à l’aiguille fine, réalisée par un opérateur et un anatomo- La mammographie peut montrer un nodule isolé ou des
pathologiste entraînés, est simple, peu dangereuse, peu nodules multiples, avec parfois des calcifications de grande
coûteuse, sensible à 65-98 % et spécifique à 34-100 % [3]. Elle taille, irrégulières, une zone dense inhomogène, parfois réticu-
classe le prélèvement en trois catégories : bénin, suspect/malin lée, parsemée de nodules arrondis de taille plus ou moins
ou non contributif ; elle ne permet pas de préciser le degré grosse, parfois associée à des microcalcifications rendant le
d’invasion d’un cancer. Elle est possible chez les patientes sous tableau suspect ; elle peut être difficile d’interprétation lorsque
aspirine ou anticoagulant à condition de comprimer la zone le sein est trop dense. À l’échographie, les nodules se manifes-
après aspiration. tent par des opacités hétérogènes mais sans atténuation des

Traité de Médecine Akos 3


3-1210 ¶ Nodules du sein

Nodule du sein

Examen clinique et interrogatoire +/-


mammographie - échographie

Image typique Image douteuse Image typiquement


Kyste
d'adénofibrome ou suspecte maligne

Si gêne : Âge < 30 ans Âge > 30 ans


cytoponction
diagnostique
+/- thérapeutique Nécessité
Microbiopsie d'un diagnostic
(cytoponction préopératoire
diagnostique) (ganglion sentinelle)

Microbiopsie
Surveillance Bénin Malin,
(cytoponction)
Mammographie atypique
pour
+/- échographie
confirmation
à 3 mois

Exérèse
chirurgicale

Figure 2. Arbre décisionnel. Prise en charge diagnostique d’un nodule du sein palpable.

faisceaux ; ils sont associés à des formations kystiques (masse se présentent sous la forme d’une masse ovalaire ou polylobée,
anéchogène bien limitée, ovalaire ou polylobée, de taille et de indolore, mobile, ferme, de taille croissante sur des semaines,
topographie variables, avec renforcement postérieur) [4]. voire des années (de 5 à 15 cm au moment du diagnostic),
radio-opaque et bien circonscrite par un liseré régulier conte-
Lésions tissulaires nant parfois des calcifications grossières, dont le centre contient
des structures hyper- et hypoéchogènes mais transmet bien les
Le cancer est le diagnostic à éliminer quel que soit l’âge de
ultrasons [4]. Le traitement est chirurgical, et doit avoir des
la patiente ; toutefois, son incidence n’augmentant nettement
larges marges de sécurité étant donné la tendance à la récidive
qu’à partir de 40 ans, la prise en charge doit être adaptée à l’âge
et la potentialité maligne.
de la patiente. De nombreux autres types histologiques peuvent
correspondre à un nodule du sein : seuls 8 à 10 % des nodules Lipome
du sein sont cancéreux [5].
Les lipomes sont bénins par définition, avec des localisations
Adénofibrome extramammaires fréquentes (paroi thoracique, membres supé-
C’est la plus fréquente (52 % [6]) des tumeurs de la femme de rieurs). Ils touchent les hommes et les femmes plus âgés et se
moins de 40 ans, surtout dans sa troisième décennie [7] ; elle est présentent comme une masse bien définie, indolore, mobile,
bénigne (tissu glandulaire et stromal). Il s’agit d’une masse bien molle, souvent présente depuis des années, radiotransparente,
limitée, ferme ou élastique, ronde, ovalaire ou polylobée, parfois entourée d’une fine capsule fibreuse, refoulant le tissu
indolore, mobile par rapport aux plans sus- et sous-jacents et au fibroglandulaire périphérique [11]. Les lipomes ne dégénèrent
reste de la glande ; ils sont parfois bilatéraux ou multiples (15 % jamais et ne nécessitent aucun traitement.
des cas [8] ). Radiologiquement, ils ont l’aspect d’opacités
Hamartome
homogènes de même taille que la tumeur palpée, sans calcifi-
cations suspectes [4]. En échographie, l’image typique est une Ils sont rares, bénins (lobules glandulaires encapsulés par un
lacune hypoéchogène à contours nets, parallèle au plan cutané, tissu fibrograisseux) et concernent les femmes de 40 à 45 ans en
sans renforcement postérieur [9]. La cytoponction ne trouve pas moyenne. Ils se présentent comme un nodule indolore de
de signe de malignité ni d’atypie. La prise en charge peut être consistance relativement molle ou épaisse, semblables au reste
médicale (surveillance simple, chez les femmes de moins de de la glande, de taille moyenne comprise entre 2 et 4 cm.
35 ans sans antécédent familial ni personnel de cancer du sein L’aspect mammographique marbré en « tranche de saucisson »
.
et avec nodule typique, dont les caractéristiques concordent aux est caractéristique ; à l’échographie, ils apparaissent sous forme
examens clinique, échographique et cytohistologique ; proges- de tissu transsonore (adénomateux) traversé de septa échogènes
tatif) ou chirurgicale. (gras et fibreux) [4].

Tumeurs phyllodes Abcès


Elles sont rares [10] ,
parfois bénignes, parfois malignes, Le contexte infectieux (fièvre, inflammation locale) est ici au
concernant la femme au milieu de sa quatrième décennie. Elles premier plan. L’abcès touche plus volontiers la femme qui

4 Traité de Médecine Akos


Nodules du sein ¶ 3-1210

allaite ou en cas de piercing mamelonnaire. Hors de ces contex- Autres étiologies


tes, il doit faire évoquer un cancer sous-jacent ; la masse est plus
ou moins bien délimitée selon son degré de collection, doulou- Adénopathie intramammaire, kyste graisseux, adénome,
reuse spontanément et à la palpation, avec écoulement galacto- cytostéatonécrose, hématome, tumeurs stromales, vasculaires,
phorique purulent (test de Budin positif : l’écoulement granulomateuses, inflammatoires (amylose, maladie de Wegener,
mammaire déposé sur une compresse y laisse un dépôt solide sarcoïdose) et métastatiques (cancer du sein, hémopathies
[débris cellulaires leucocytaires]) ; la mammographie n’a pas malignes) sont des entités rares.
d’intérêt, à la fois du fait de sa difficulté de réalisation (douleur) .

et de l’absence de spécificité ; une échographie peut permettre


d’apprécier le degré de collection (image arrondie hypoéchogène ■ Références
ou mixte à contenu hétérogène ; épaississement du tissu sous-
[1] Morrow M, Wong S, Venta L. The evaluation of breast masses in
cutané en regard) [4]. Le traitement est avant tout chirurgical,
women younger than forty years of age. Surgery 1998;124:634-41.
une fois l’abcès collecté (incision, lavage, drainage, soins [2] Agarwal T, Patel B, Rajan P, Cunningham DA, DarziA, Hadjiminas DJ.
infirmiers) et doit faire pratiquer une biopsie peropératoire à la Core biopsy versus FNAC for palpable breast cancers. Is image
recherche d’un cancer sous-jacent. guidance necessary? Eur J Cancer 2003;39:52-6.
[3] Giard RW, Hermans J. The value of aspiration cytologic examination of
Adénocarcinome the breast. A statistical review of the medical literature. Cancer 1992;
Exceptionnel avant 20 ans et de fréquence croissante notam- 69:2104-10.
ment au-delà de 40 ans, un cancer du sein peut être associé à [4] Kopans DB. Pathologic, mammographic, and sonographic correlation.
des facteurs de risque qu’il convient de rechercher lors de In: Ryan J, editor. Breast imaging. Philadelphia: Lippincott-Raven;
l’interrogatoire. Cliniquement, un cancer du sein typique se 1998. p. 511-615.
manifeste par un nodule dur, indolore, à contours irréguliers, [5] Linsk JA, Franzen S. Clinical aspiration cytology. London: JB
Lippincott; 1983.
adhérent à la peau, au mamelon ou au grand pectoral ; la
[6] Palmer ML, Tsangaris TN. Breast biopsy in women 30 years old or less.
présence d’adénopathies axillaires dures est aussi suspecte. À la
Am J Surg 1993;165:708-12.
mammographie, cinq signes sont particulièrement évocateurs :
[7] Franco N, Arnould L, Mege F, Picard SF, Arveux P, Lizard-Nacol S.
opacité irrégulière, localisée à un endroit aglandulaire du sein Comparative analysis of molecular alterations in fibroadenomas
(graisse entre le pectoral et la glande), cernée d’un halo clair, associated or not with breast cancer. Arch Surg 2003;138:291-5.
avec présence de microcalcifications et de modifications [8] Dent DM, Cant PJ. Fibroadenoma. World J Surg 1989;13:706-10.
cutanées en regard (œdème et rétraction). L’aspect échographi- [9] Fornage BD, Lorigan JG, Andry E. Fibroadenoma of the breast:
que suspect est celui d’une masse irrégulière, spiculée, aux sonographic appearance. Radiology 1989;172:671-5.
contours microlobulés, d’orientation perpendiculaire au plan [10] Chen WH, Cheng SP, Tzen CY, Yang TL, Jeng KS, Liu CL, et al.
cutané, entraînant un cône d’ombre postérieur [4]. Le traitement Surgical treatment of phyllodes tumors of the breast: retrospective
local dépend de l’invasion du cancer (épithélium, et plans review of 172 cases. J Surg Oncol 2005;91:185-94.
.
cutanés et musculaires adjacents), de la taille de la tumeur, de [11] Solivetti FM, Thorel MF, Marandino F. Breast lipomas in echography.
son caractère uni- ou multifocal : tumorectomie ou A discussion of 3 cases and a review of the literature. Radiol Med
mastectomie. (Torino) 2000;99:281-2.

R. Rouzier (roman.rouzier@tnn.aphp.fr).
S. Legoff.
Service de gynécologie obstétrique, Hôpital Tenon, 4 rue de la Chine, 75020 Paris, France.
Université Pierre et Marie Curie (Paris VI) UPRES EA 4053.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Rouzier R., Legoff S. Nodules du sein. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Traité de Médecine Akos, 3-1210,
2007.

Disponibles sur www.emc-consulte.com


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Traité de Médecine Akos 5


3-1280

3-1280
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Prolapsus génital

X Fritel, A Pigné

L e prolapsus génital est une pathologie fréquente et bénigne de la femme dont l’incidence augmente avec l’âge
et les accouchements. Le médecin généraliste a un rôle de conseil et d’orientation. Les indications
thérapeutiques dépendent du handicap fonctionnel.
© Elsevier, Paris.


probable, mais il est difficile à démontrer. C’est le seul
Introduction Tableau I. – Description du prolapsus génital facteur pour expliquer le prolapsus génital de la
selon les éléments prolabés. vierge ou de la nullipare, l’association fréquente avec
d’autres troubles pariétaux (hernies, éventrations) et
Paroi vaginale anté-
Le prolapsus génital est une pathologie Colpocèle antérieure les familles à prolapsus.
rieure
fréquente de la patiente âgée. Sa prise en charge
tient compte uniquement du handicap fonctionnel. Urètre Urétrocèle
Les patientes qui consultent tôt, pour des lésions peu
prononcées, sont souvent plus inquiètes pour
l’avenir que handicapées dans leur vie quotidienne.
Le prolapsus génital non opéré peut s’aggraver avec
Col vésical
Vessie
Fond vaginal
Cervicocystoptose
Cystocèle
Colpocèle fundique

Prévention

Elle passe par le traitement ou la prophylaxie des


le temps, mais il existe aussi 15 % de récidives après facteurs de risque :
chirurgie (résultats à 5 ans sur une série de 218 Utérus Hystéroptose
– au cours de la grossesse, limiter la prise de
patientes [2]). Comme il n’est pas plus difficile d’opérer Col utérin restant Trachéloptose poids et dépister le diabète gestationnel ;
un prolapsus modéré qu’un prolapsus important, il – au cours de l’accouchement, préférer
n’y a pas d’indication à intervenir en avance. Paroi vaginale posté-
Colpocèle postérieure l’épisiotomie à la déchirure périnéale, le forceps à
rieure
Une incontinence urinaire d’effort est associée au l’expression abdominale et la césarienne au forceps
prolapsus dans seulement la moitié des cas, mais Cul-de-sac de Douglas Élytrocèle difficile ;
l’examen clinique prolapsus refoulé peut découvrir – entretenir la trophicité de l’urètre, du trigone et
Rectum Rectocèle
une incontinence masquée. La descente du col du vagin par une hormonothérapie chez la patiente
vésical, si elle existe, doit être traitée dans le même ménopausée ;
temps opératoire, sous peine de voir apparaître une – éviter ou traiter les causes d’hyperpression
incontinence après l’intervention. Tableau II. – Classification du prolapsus géni- abdominale chronique.
tal selon le degré de saillie.


0 Pas de prolapsus


Définition et classification

Le prolapsus génital est un trouble de la statique


1
2
3
Intravaginal
À la vulve
Extériorisé
Complications des prolapsus non
traités

Elles sont rares et concernent les prolapsus


pelvienne se manifestant par l’issue des parois extériorisés : ulcération de la partie extériorisée du
prolapsus, compression urétrale avec hydro-


vaginales à la vulve.
Les viscères adjacents accompagnent les parois néphrose et insuffisance rénale (exceptionnelle).
Facteurs de risque
vaginales et donnent leur nom aux différents


éléments du prolapsus (tableau I). La description du
prolapsus génital est divisée en trois étages : Les facteurs de risque sont soit acquis, soit Examen clinique
antérieur, fundique et postérieur. En avant, la constitutionnels. Le traumatisme obstétrical est le
colpocèle antérieure est accompagnée par la vessie facteur prépondérant dans la genèse du prolapsus. Il
(cystocèle). La descente du fond vaginal est est facilement retrouvé sur la durée ou la difficulté de Le prolapsus génital est le plus souvent découvert
accompagnée par l’utérus (hystéroptose). En arrière, l’expulsion, le poids des enfants, la survenue d’une par la patiente lors de sa toilette. Plus rarement, il est
c’est le plus souvent le rectum qui habite la colpocèle déchirure, l’utilisation d’un forceps ou d’une découvert à l’examen clinique chez une patiente se
postérieure (rectocèle), avec parfois le cul-de-sac de expression abdominale (même 40 ans après, les plaignant de dysurie ou d’une pesanteur pelvienne
Douglas (élytrocèle). Le degré de gravité du patientes se rappellent combien l’accoucheur a aggravée par la position debout ou l’effort.
prolapsus est coté entre 0 et 3, selon la descente par appuyé sur leur ventre). Les situations d’hyper- L’interrogatoire précise et recherche :
rapport à la vulve (tableau II). Ainsi, un prolapsus pression abdominale comme l’obésité, la – les facteurs de risque ;
© Elsevier, Paris

génital noté C3 H2 R1 correspond à une cystocèle constipation, la bronchite chronique, l’asthme, le port – les antécédents chirurgicaux et plus
extériorisée (cystocèle du troisième degré), avec un de charges et certaines activités sportives, particulièrement les interventions pour prolapsus ou
col utérin à la vulve (hystéroptose du deuxième contribuent à aggraver le prolapsus. L’âge et la incontinence ;
degré) et une saillie intravaginale de la paroi ménopause favorisent également la dégradation – les tares et traitements associés ;
vaginale postérieure (rectocèle du premier degré). des tissus. Un facteur tissulaire constitutionnel est – le désir de grossesse chez les patientes jeunes ;

1
3-1280 - Prolapsus génital

perméabilité urétrale, les cicatrices antérieures, la insuffisance sphinctérienne multiplie par deux le
béance vulvaire, la sensibilité et les réflexes risque d’échec sur la continence urinaire (41 versus
périnéaux. 20 %, résultats à 5 ans sur 109 patientes opérées
d’un prolapsus génital et incontinentes avant
l’intervention [2]).


Explorations complémentaires

Elles ne sont utiles que si la patiente désire un


traitement chirurgical.
Le colpocystogramme est indiqué en cas de

Principes du traitement

Les indications dépendent de la gêne


récidive après chirurgie. Il comprend une fonctionnelle (fig 4). Chez une patiente peu
1 La valve postérieure permet d’exposer la colpo- opacification de l’urètre, de la vessie, du vagin et du handicapée (gêne cotée entre 0 et 3), il n’y pas
cèle antérieure : il existe une cystocèle extériorisée rectum, avec un cliché de profil en retenue et un d’indication chirurgicale. Pour une gêne moyenne
(troisième degré) accompagnée par le col utérin à la autre en poussée. Les deux clichés sont résumés sur (entre 4 et 6), le traitement médical des troubles
vulve (hystéroptose du deuxième degré). un calque (fig 3). Cet examen permet de préciser la génitaux associés (sécheresse vaginale, pesanteur
place du col vésical, de la vessie, du cul-de-sac de pelvienne, incontinence urinaire d’effort) peut
Douglas et du rectum par rapport au déroulement permettre de retrouver une qualité de vie
des parois vaginales. satisfaisante. Enfin, le traitement chirurgical est choisi
Le bilan urodynamique est utile pour évaluer le en cas de gêne importante (7 ou plus).
risque de dysurie ou d’incontinence urinaire ■ Le pessaire peut être une alternative à la
postopératoire. La présence d’une mégavessie chirurgie chez les patientes non opérables, mais il
hypotonique (fréquente chez des sujets âgés) expose demande une surveillance régulière pour dépister les
à un risque de rétention postopératoire. Une complications. Il ne reste pas en place en cas

2 La valve antérieure permet d’exposer la colpocèle


postérieure : il existe une rectocèle faisant saillie à la
vulve (deuxième degré).

– l’activité sexuelle chez les patientes âgées ;


– les troubles pelviens associés : incontinence
anale ou difficulté à évacuer les selles, incontinence
urinaire ou dysurie, impériosités mictionnelles,
hémorragies génitales ;
– l’histoire du prolapsus : circonstances de
découverte, évolution, traitements déjà entrepris ;
– surtout, le handicap fonctionnel quotidien qui
est la principale justification chirurgicale.
Il existe des scores de qualité de vie pour mesurer
le handicap en cas de prolapsus génital [3]. En
pratique, nous utilisons une échelle visuelle
analogique, en demandant à la patiente de coter sa
gêne entre 0 et 10 (0 pour une gêne nulle et 10 pour
la pire gêne imaginable).
3 Colpocystogramme pour prolapsus après hystérectomie et colposuspension de Burch. En poussée, la paroi
L’examen s’effectue à vessie vide, en effort de
vaginale postérieure s’extériorise avec une élytrocèle du troisième degré (E) et une rectocèle du troisième degré
poussée maximal. Une valve vaginale (ou la moitié (R), en revanche le col vésical (C) reste en place.
d’un spéculum de Collin) est utilisée pour refouler la
paroi vaginale postérieure quand on recherche un
prolapsus antérieur et vice versa pour le prolapsus
postérieur (fig 1, 2). Enfin, les deux valves sont Estimation du handicap fonctionnel
réunies pour rechercher le prolapsus du fond
vaginal, en tirant éventuellement sur le col utérin à
l’aide d’une pince de Pozzi. La classification est faite
sur l’extériorisation maximale observable. Chez une Pas de gêne Gêne moyenne Gêne importante
patiente jamais opérée, l’examen clinique suffit pour
classer le prolapsus. Chez une patiente déjà opérée
d’un prolapsus génital, la présence de tel ou tel Traitement médical Opérable ?
organe de l’autre côté de la paroi vaginale ne peut des troubles associés Désir de la patiente
pas être affirmée avec certitude. En particulier, il est État général
difficile de faire la différence entre une élytrocèle Œstrogènes locaux
et une rectocèle haute. C’est pourquoi un Rééducation périnéale
Oui Non
colpocystogramme est demandé en cas de récidive.
Amélioration ?
L’examen à vessie pleine et prolapsus refoulé
Prévention
recherche une incontinence urinaire d’effort. Les des facteurs de risque Oui Non Chirurgie Pessaire
touchers pelviens apprécient la taille de l’utérus et la
qualité des muscles releveurs. L’examen clinique
4 Prise en charge du prolapsus génital.
note également la trophicité des muqueuses, la

2
Prolapsus génital - 3-1280

d’éversion complète et ne traite pas l’incontinence choisie chez les patientes jeunes ou présentant des il se réduit spontanément après le troisième mois en
urinaire associée ou démasquée par la réduction du facteurs de risque (hyperpression abdominale raison du développement abdominal de l’utérus.
prolapsus. Les complications courantes sont chronique). Il n’existe pas de travail randomisé Dans les rares cas où il persiste, il s’agit le plus
l’infection vaginale, qui peut avoir un retentissement comparant les deux méthodes. souvent d’un prolapsus cervical : l’utérus reste en
général, et les ulcérations vaginales. Les Par laparotomie, l’intervention la plus répandue place et le col s’allonge dans le vagin (allongement
incarcérations, les cancers du vagin et les consiste à suspendre la paroi vaginale antérieure et hypertrophique du col). On peut proposer le repos et
compressions urétérales sont exceptionnels. Il est postérieure au promontoire sacré, par l’intermédiaire la mise en place d’un pessaire.
conseillé de revoir les patientes 1 mois après la pose, d’une bandelette (double promontofixation). Une
Chez la femme jeune désireuse d’une nouvelle
puis tous les 3 à 6 mois pour changer l’anneau. suspension du col vésical par l’intermédiaire du
grossesse, on conseille, si la gêne est modérée, de
■ La rééducation avec électrostimulation a une vagin (colposuspension de Burch) et un
n’intervenir qu’ensuite. Sinon, une intervention par
action sur les troubles urinaires associés et sur la rapprochement des muscles releveurs par voie
laparotomie en conservant l’utérus est choisie, et, en
pesanteur pelvienne, mais elle est ne peut pas vaginale (myorraphie des releveurs) sont souvent
cas de grossesse, l’accouchement par césarienne est
corriger le trouble anatomique. associés à la promontofixation.
conseillé.
■ L’hormonothérapie, chez la patiente Par voie vaginale, le fond vaginal peut être
ménopausée, permet d’améliorer la trophicité locale, suspendu au petit ligament sacrosciatique Le prolapsus après hystérectomie associe le plus
de réduire les troubles urinaires et de faciliter la (sacrospinofixation ou intervention de Richter). Une souvent un prolapsus du fond utérin et une
rééducation ou la chirurgie. suspension du col vésical par voie vaginale et une élytrocèle. Le colpocystogramme est utile pour
myorraphie des releveurs sont, là aussi, souvent diagnostiquer cette élytrocèle (fig 3). Il peut retrouver
associées. D’autres combinaisons sont possibles et une mobilité anormale du col vésical (cervicocysto-


Chirurgie

Le traitement chirurgical repose sur deux


utilisées.
Une hystérectomie accompagne souvent la cure
chirurgicale du prolapsus à partir de 45 ans. Elle
facilite le geste chirurgical, que ce soit par
ptose), qui devra être traitée en même temps, même
en l’absence d’une incontinence urinaire d’effort.


principes : laparotomie ou par voie vaginale, et il est plus
– n’opérer que les patientes gênées ; difficile de réaliser une hystérectomie ensuite en cas Conclusion
– traiter dans le même temps les trois étages de pathologie utérine ultérieure.
(colpocèle antérieure, fundique et postérieure) [ 1, 4]. Avec le temps, les opérées sont exposées à un
L’intervention chirurgicale combine plusieurs risque de rechute dans environ 15 % des cas [2]. Les indications thérapeutiques dans le prolapsus
gestes pour traiter chacun des éléments prolabés. La génital reposent sur le handicap fonctionnel. Il ne


technique utilisée est déterminée par la gravité du faut pas hésiter à opérer une patiente gênée, même
prolapsus, les facteurs de risque de la patiente et les Formes cliniques particulières si elle est âgée. En revanche, il n’existe aucune
habitudes du chirurgien. urgence chez la patiente qui ne souffre pas dans ses
En pratique, la voie vaginale est préférée chez les activités quotidiennes. Une incontinence urinaire
patientes de plus de 60 ans s’il n’existe pas de Chez la femme enceinte, le prolapsus est d’effort associée doit être recherchée systémati-
facteurs de risque de récidive. La laparotomie est exceptionnel en cours de grossesse. Le plus souvent, quement et traitée dans le même temps opératoire.

Xavier Fritel : Praticien hospitalier.


Alain Pigné : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Service de gynécologie-obstétrique, hôpital Rothschild, 33, boulevard de Picpus, 75571 Paris cedex 12, France.
@ rth-op-hop-paris-fr.

Toute référence à cet article doit porter la mention : X Fritel et A Pigné. Prolapsus génital.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1280, 1998, 3 p

Références

[1] Barrat J, Pigné A, Marpeau L. Le prolapsus génital et son traitement. Paris : [4] Villet R, Buzelin JM, Lazorthes J. Les troubles de la statique pelvipérinéale de
Masson, 1990 la femme. Paris : Vigot, 1995

[2] Fritel X, Commegeille P, Fauconnier A, Liou Y, Moyal M, Deval B et al.


Vaginal surgery for genital prolapse: long-term results in 218 cases. Hernia 1997 ;
1 : 83-88

[3] Uebersax JS, Wyman JF, Shumaker SA, McClish DK, Fantl JA. Short forms
to assess life quality and symptom distress for urinary incontinence in women: the
incontinence impact questionnaire and the urogenital distress Inventory. Conti-
nence Program for Women Research Group. Neurourol Urodyn 1995 ; 14 :
131-139

3
3-1390

3-1390

Rôle du généraliste
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

dans les suites de couches


D Fernandez, H Fernandez

O rienter la contraception, informer sur la sexualité, dépister les incontinences, conseiller en diététique, sont les
tâches capitales de la visite postnatale dont l’importance doit être revalorisée.
© Elsevier, Paris.


Chez les patientes de plus de 40 ans et qui n’ont En l’absence d’allaitement, il apparaît
Introduction jamais eu de mammographie, cette visite du spontanément en 6 à 8 semaines, mais jusqu’à
post-partum est le moment idéal pour faire une 3 mois le retard n’est pas pathologique.
La visite postnatale, trop souvent omise par les ordonnance de mammographie qui sera pratiquée En cas d’allaitement, le retour de couches est
patientes, est en fait capitale. La sage-femme ou le quelques semaines plus tard. retardé et sa date est imprévisible. Il surviendra
médecin faisant l’examen de sortie de la maternité habituellement dans le mois suivant l’arrêt de
‚ Examen de l’abdomen
se doit de la conseiller à la patiente. l’allaitement ou, si celui-ci est prolongé, il se produit
L’examen de l’abdomen confirmera ou non la vers le sixième mois. Dans ce dernier cas, il y a une
Cette consultation a lieu environ 6 à 8 semaines
persistance d’un diastasis des muscles droits, la reprise rapide de l’ovulation et l’allaitement ne
après l’accouchement. Elle permet de faire un bilan
persistance de la distension abdominale et participe pas à la contraception.
après celui-ci et avant la reprise d’une vie
l’existence de vergetures. Il appréciera la qualité de la Le retour de couches est habituellement similaire
professionnelle pour la majorité des femmes.
peau abdominale. En cas de séquelles majeures, à des règles normales. Il peut cependant être
surtout après une grossesse multiple, il peut être licite


hémorragique, avec caillots, et persister plusieurs
d’informer les patientes qu’une chirurgie réparatrice jours. Il est fréquent que le premier ou le deuxième
Examen clinique du post-partum
peut exister. Ce conseil n’est pas une incitation mais cycle du retour de couches soit anovulatoire.
une information utile, afin que certaines femmes
L’aménorrhée du post-partum est définie par
La patiente sera pesée de manière à apprécier le évitent d’intérioriser ce problème esthétique. L’utérus
l’absence de règles 3 mois après l’accouchement
nombre de kilogrammes restant à perdre, afin de ne doit plus être palpable à cette période, à la
chez une femme n’allaitant pas, et 5 mois après
conseiller la patiente. palpation abdominale.
l’accouchement si la femme a allaité.
La pression artérielle sera mesurée, a fortiori en
cas d’hypertension en fin de grossesse, et pour ‚ Examen du périnée


conseiller la contraception la plus appropriée. Il faut vérifier la bonne cicatrisation de
l’épisiotomie, aussi bien sur le plan vulvaire que sur Contraception du post-partum
‚ Examen des seins le plan vaginal. Il peut persister, à ce terme, la
Il est systématique. Bien sûr, si la femme allaite perception de fils à résorption lente et il faudra
encore, il sera sommaire et vérifiera uniquement rassurer la patiente. ‚ Femme allaitant
l’absence de signe de lymphangite ou d’abcès du Il faut pratiquer un testing des releveurs de l’anus
Si un allaitement long est prévu et que la patiente
sein, ce qui est exceptionnel en l’absence de plainte (cf chapitre « Rééducation périnéale »).
souhaite une contraception orale, le meilleur choix
spontanée de la patiente. L’examen au spéculum montre l’état du col,
est une micropilule qui sera prise sans interruption, si
Chez les femmes n’allaitant plus, on examinera l’absence de zone cicatricielle, et un examen à l’aide
possible à heure fixe. Celle-ci est d’ailleurs débutée
tous les quadrants, de manière à éliminer toute d’un spéculum à valves peut mettre en évidence
dès la sortie de la maternité. Il est habituel d’observer
pathologie bénigne ou maligne ayant pu être l’existence d’une cystocèle ou d’une rectocèle.
des métrorragies avec ce type de contraception.
ignorée durant la grossesse en raison de Le toucher vaginal (qui aura permis de pratiquer
l’augmentation du volume du sein. On rassurera le Dans les autres cas, la femme peut choisir une
le testing des releveurs) permettra de palper l’utérus
plus souvent la patiente sur la persistance, à la contraception locale à base de spermicide pour elle
et les annexes et de confirmer ainsi le retour à la
et/ou de préservatifs pour son conjoint.
© Elsevier, Paris

pression du mamelon, de quelques gouttes de lait. normale.


En quelques semaines celui-ci se tarira.
‚ Retour de couches ‚ Femme n’allaitant pas
Le volume des seins peut rester augmenté ou au
contraire être plus réduit qu’avant la grossesse. Il Lors de l’examen du périnée, le retour de couches La visite de suites de couches est une opportunité
faudra simplement rassurer et informer les patientes. ne s’est pas toujours produit. pour rediscuter d’une contraception, surtout si la

1
3-1390 - Rôle du généraliste dans les suites de couches

femme n’avait pas de moyen de contraception


avant la grossesse ou si elle désire en changer.
Les œstroprogestatifs peuvent être proposés. Ils Examen clinique
sont habituellement prescrits dès le troisième jour du
retour de couches ou chez les patientes ayant des
cycles réguliers, immédiatement lorsque la patiente Aucune
est vue en consultation. Incontinence
incontinence
Si un dispositif intra-utérin est préféré, il sera posé
dès le retour de couches.
Les autres modes de contraception nécessitent
seulement une information quant à leur emploi. Rééducation Conseils Rééducation
Chez les patientes considérées comme infertiles abdominale Contraception périnéale
avant leur grossesse, il faudra réévaluer les causes remboursée Diététique remboursée
à 100 % Marche à 70 ou 60 %
d’infertilité.
Natation
Hormis les situations où l’infertilité sera jugée Vélo (sauf VTT)
définitive, il faudra, même en cas de doute sur une
probable hypofertilité, conseiller la patiente pour une
Aucun Trouble
régulation des naissances, quitte parfois à introduire trouble persistant
des moyens de contraception chez des patientes urinaire
n’ayant jamais jugé utile de le faire.
Les questions autour de la contraception doivent
permettre d’aborder la sexualité et il ne faut pas Rééducation
attendre pour poser les questions. abdominale
Si aucun rapport n’a eu lieu depuis l’accou- remboursée
chement, il faut rassurer la femme en lui précisant à 100 %
qu’à l’examen, la vulve est d’aspect normal,
l’épisiotomie bien cicatrisée et qu’elle a retrouvé une Discuter
bilan
anatomie normale. Il ne faut pas omettre de poser Reprise urodynamique
des questions en ce qui concerne le conjoint, car une d'activités
des causes fréquentes de la non reprise de la sportives
sexualité est une sorte de dégoût ou de traumatisme (sauf aérobic)
du conjoint pouvant faire suite au fait d’avoir assisté
à l’accouchement. 1 Visite postnatale 6 à 8 semaines après l’accouchement. VTT : vélo tout-terrain.
Si la sexualité est reprise mais que les rapports
sont douloureux, il faut préciser s’il s’agit d’une – Ces fuites persistent-elles actuellement ? Dans un deuxième temps, lorsque les problèmes
dyspareunie orificielle, souvent due à une fourchette En fait, certaines femmes sous-évaluent la notion seront résolus, on prescrira une rééducation
vulvaire encore scléreuse. Dans ce cas, il faut de fuites et omettent d’en parler. En revanche, abdominale et la reprise d’autres sports, avec
proposer un massage avec une pommade type d’autres surestiment ces fuites qui ont disparu cependant d’éventuelles restrictions type aérobic.
É laset, en faisant pénétrer celle-ci durant rapidement après l’accouchement.


2 minutes deux fois par jour. En cas de dyspareunie En cas de fuites, il faut préciser les circonstances
plus profonde, il peut s’agir d’une atrophie de la dans lesquelles elles apparaissent : Rééducation abdominale
muqueuse vaginale (fréquente en cas d’allaitement). – à l’effort, à savoir : toux, éternuement, rire, port
Dans ce cas, il faut proposer des ovules à base du bébé. Ceci évoque une incontinence à l’effort ; Elle est proposée s’il n’y a aucun problème
d’œstrogènes durant 20 jours, type Trophigilt ou
– fuites au contact de l’eau : y a-t-il des mictions d’incontinence, d’impériosité et de béance vulvaire.
Colpotrophinet.
impérieuses avec ou sans fuites (exemple de La prescription est de dix séances de rééducation
Il faut faire préciser s’il y a diminution ou absence question à poser : lorsque vous avez envie d’uriner, abdominale du post-partum.
de la libido. Dans ce cas, il faut rassurer la patiente, pouvez-vous vous retenir, et combien de temps ?) ? Ces séances sont prises en charge à 100 % par la
lui expliquer que le facteur temps est important. Ce type de fuites évoque une instabilité vésicale ou sécurité sociale, après entente préalable. Au décours
Habituellement, au bout de quelques semaines, les urétrale. de ces dix séances, la femme peut reprendre une
sensations reviennent, et il faut insister sur
Il faut préciser également : pratique sportive.
l’allongement de la période des préliminaires
– si les gaz sont bien retenus ;
amoureux. On peut également suggérer, dans le cas


– si les selles sont bien retenues ? Le plus
où l’enfant semble prendre une place prépondérante
souvent, on peut avoir une impériosité aux selles, Constipation
dans la dimension familiale, de retrouver la
avec d’exceptionnelles pertes de matières.
complicité du couple par des dîners en tête-à-tête,
des week-ends à deux, etc. Elle est habituelle dans cette période du
‚ Conduite à tenir
post-partum. Il faut savoir préciser si elle est


La rééducation périnéale est proposée en cas antérieure à la grossesse ou si elle lui est
Incontinences d’incontinence d’urines, de gaz et de selles, contemporaine. Il faut remédier à ces problèmes par
d’impériosité, de béance vulvaire, d’absence de des conseils diététiques dans un premier temps. Il est
sensation sexuelle à plusieurs reprises (cf chapitre capital de traiter une constipation chronique, car si
‚ Interrogatoire « Rééducation périnéale »). l’ampoule rectale est pleine, elle distend en
Ces questions sont à aborder systématiquement Durant cette période de rééducation, les femmes permanence le périnée et tire sur les fibres
pour éviter le non-dit. désireuses de reprendre une activité sportive seront musculaires qui s’épuisent et risquent de devenir
– Y a-t-il eu des fuites d’urines dans l’immédiat plutôt orientées vers la marche, la natation et le inefficaces après quelques années, en entraînant
post-partum ? vélocipède (sauf vélo tout terrain) (fig 1). une rectocèle définitive.

2
Rôle du généraliste dans les suites de couches - 3-1390


Il faut conseiller aux patientes de boire 1 L à vers l’aisselle et ganglions axillaires sensibles. Le
1,5 L/j, en utilisant éventuellement de l’eau d’Hépar. Consultation en urgence mamelon est habituellement normal et il n’y a aucun
Il faut manger des légumes à fibres (type salade, signe d’infection du lait. Le traitement associe des
haricots verts, épinards, betterave, petits pois), des anti-inflammatoires locaux, type pansement
Avant la visite, qui devrait être systématique entre
fruits et du pain au son. Antiphlogistinet, de l’aspirine à 1 g/j. Il n’y a aucune
la sixième et la huitième semaine suivant
Si cela ne suffit pas, on peut envisager un l’accouchement, trois événements peuvent amener indication à arrêter l’allaitement ni à donner une
traitement par du son (1 à 3 cuillères/j de All-Brant) à consulter en urgence dans le post-partum : antibiothérapie. Ce n’est qu’en l’absence
ou prescrire des mucilages type Spagulaxt (1 à 3 – un problème d’allaitement ; d’amélioration après 48 heures qu’il faudra instituer
sachets ou cuillères/j). – une hémorragie ; une antibiothérapie antistaphylococcique.


– de la fièvre.
Abcès du sein
Conseils diététiques
‚ Problèmes d’allaitement Il s’observe rarement avant le quinzième jour. Le
La patiente a souvent envie de retrouver sa Ils sont résumés dans la figure 2. diagnostic est d’abord clinique, avec une sensibilité
féminité et son corps de femme. Il est nécessaire de unilatérale, une traction douloureuse lors de la tétée
l’informer qu’après une maternité le corps est Crevasses du mamelon et un lait teinté de pus. Dans les phases aiguës, on
différent et garde parfois plus de rondeurs, mais il Elles apparaissent dès les premiers jours du retrouve un placard localisé. Le traitement est
n’en est que plus sensuel. post-partum et sont fréquentes (25 % des cas). Elles initialement antibiotique par un antistaphylococ-
On peut bien sûr aider les patientes en prodiguant sont favorisées par des anomalies anatomiques cique. Au stade aigu et de collection, le traitement
quelques conseils diététiques. Toutefois, un régime (mamelon ombiliqué ou trop court), par une sera chirurgical. Il faut tirer le lait et le jeter du côté du
n’est envisageable que si la femme se décide à macération liée à une absence d’hygiène ou par sein infecté, jusqu’à la guérison. La reprise complète
quitter son état de grossesse et de suites de couches. l’emploi d’un tire-lait. Elles se manifestent par des de l’allaitement est ensuite possible. Le sevrage n’est
L’intervalle de temps ainsi constitué est variable douleurs contemporaines à la tétée qui peuvent être donc pas une nécessité.
selon chaque femme, selon sa parité et son histoire, uni- ou bilatérales et des saignements.
et il sera plus long si elle allaite son enfant. En Sevrage
À l’examen, on retrouve des fissures ou des
pratique, le régime n’est suivi que s’il est associé à un érosions en coup d’ongle à la base ou au sommet du La diminution de la fréquence des tétées permet le
projet : reprise du travail par exemple. mamelon. tarissement progressif de la lactation. Ce sevrage doit
Moins nombreuses sont les femmes qui trouvent Le traitement est surtout prophylactique, mais s’étendre entre 2 et 3 semaines. En cas d’indication au
qu’elle maigrissent trop après une grossesse. Les lorsque la crevasse est constituée, il faut appliquer un sevrage brutal, on associe une restriction hydrique, le
conseils diététiques doivent alors être associés à des corps gras et savoir utiliser un bout-de-sein afin port d’un soutien-gorge serré, la prise de 1 g d’aspirine,
conseils de relaxation et de musculation et à la d’éviter de suspendre l’allaitement. voire la prise d’un comprimé par jour de furosémide,
pratique d’un sport qui leur procurera de la durant 48 à 72 heures.
satisfaction. Engorgement mammaire
Dans les deux cas, la pratique d’un sport devra C’est rarement un problème du post-partum car il
‚ Hémorragies
tenir compte de l’examen du périnée, et donc de est contemporain de la mise en route de la lactation. La cause la plus fréquente des hémorragies est
l’existence éventuelle d’incontinence urinaire.
l’endométrite du post-partum, qui associe une


Lymphangite aiguë température modérée entre 38 °C et 38,5 °C, des
Problèmes administratifs Elle réalise une poussée thermique, parfois pertes purulentes souvent fétides, un utérus gros mal
jusqu’à 40 °C, avec à l’examen un placard involué, mou, douloureux à la mobilisation, avec, à
‚ Congé postnatal inflammatoire localisé et douloureux avec traînées l’examen, un col ouvert et des culs-de-sac libres. Le

Le congé postnatal est de 10 semaines pour les


primi- et secondipares. À partir de la parité 3, il est de
18 semaines. Pour les grossesses gémellaires et Problèmes
triples, il est de 22 semaines (tableau I). d'allaitement

‚ Congé supplémentaire
La femme peut prétendre, auprès de son
employeur, à un congé parental non rémunéré ou à Crevasses Lymphangite Abcès du sein
un mi-temps jusqu’aux 3 ans de l’enfant.
Il n’existe pas de congé de suites de couches
pathologiques. Hygiène Anti-inflammatoire
Dans certains cas, le médecin peut prescrire un Traitement Pas d'antibiotique
arrêt de travail de 2 à 28 jours. Il faut cependant tenir local
Traitement Chirurgie
compte d’un éventuel arrêt plus long durant la antibiotique
grossesse, qui pourrait entraîner un demi-salaire
pour la femme. Continuer Continuer
l'allaitement l'allaitement Si échec
Tableau I. – Congé postnatal.

Parité Nombre de semaines


Jeter le lait
1 10 du côté de l'abcès
2 10 jusqu'à guérison
3 et plus 18
Grossesse gémellaire 22
Grossesse triple 22 2 Problèmes d’allaitement.

3
3-1390 - Rôle du généraliste dans les suites de couches

diagnostic est souvent confirmé par un prélèvement


bactériologique et par une hyperleucocytose
associée. Fièvre du post-partum

Le traitement associe des antibiotiques agissant


sur le streptocoque, Escherichia coli et systémati-
quement sur les anaérobies, et un utérotonique. La
durée du traitement est de 8 à 10 jours. Sein Appareil
Utérus Paroi
La rétention placentaire est beaucoup plus rare. urinaire
Le diagnostic est échographique. Le diagnostic
différentiel avec l’endométrite est difficile car celle-ci
peut-être une complication de la rétention
Vessie Rein
placentaire. Le curage ou le curetage du post-partum
doit être prohibé. Le traitement associe une Endométrite Rétention
antibiothérapie et des utérotoniques. placentaire

‚ Fièvre Pyélonéphrite

Celle-ci peut être inaugurale. Elle devra faire


rechercher un problème mammaire, un problème Lymphangite Abcès Abcès Abcès vulvaire
utérin, une infection urinaire, une infection de paroi si césarienne si épisiotomie
abdominale en cas de césarienne, vulvaire en cas
3 Fièvre du post-partum.
d’épisiotomie (fig 3).

Dominique Fernandez : Sage-femme.


Hervé Fernandez : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Service de gynécologie-obstétrique du Pr René Frydman, hôpital Antoine-Béclère, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92140 Clamart cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : D Fernandez et H Fernandez. Rôle du généraliste dans les suites de couches.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1390, 1998, 4 p

4
3-1380

3-1380
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Surveillance de la grossesse

N Costedoat-Chalumeau, F Goffinet, B Wechsler, JC Piette

L a surveillance repose sur des examens cliniques régulièrement pratiqués, des examens biologiques et
échographiques et sur certaines mesures préventives.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : diabète gestationnel, toxémie-éclampsie, Rhésus, caryotype, toxoplasmose, Listeria, radiopelvimétrie.


Introduction

Le rôle du médecin généraliste, en collaboration


Tableau I. – Congés maternité (en semaines). Au cours de ces congés, la mère perçoit 100 % de
son salaire. Quatorze jours supplémentaires peuvent être prescrits en cas d’état pathologique
résultant de la grossesse.

avec le gynécologue obstétricien, est très important Total du congé Prénatal Postnatal
dans la surveillance d’une grossesse ; celui-ci ne fera Premier ou deuxième 16 6 10
que s’accentuer dans les années qui viennent enfant (dont 2 obligatoires)
compte tenu d’une diminution notable du nombre
Troisième enfant (1) 26 8 18
de gynécologues obstétriciens d’année en année.
Que ce soit lors du diagnostic de celle-ci ou au cours Jumeaux 34 12 22
de son évolution, le médecin généraliste va être
Triplés 46 24 22
amené à conseiller la patiente, à répondre à ses
nombreuses questions, à programmer différents (1) Deux enfants à charge ou nés viables mais décédés.
examens et à prescrire certains médicaments.
Surtout, il va devoir rester vigilant en maintenant – informer la patiente des dates de congés de
une surveillance précise afin de dépister tout signe maternité dont elle peut bénéficier (tableau I) ; Mesures à prendre pour prévenir la
alarmant devant conduire à un avis spécialisé – effectuer un interrogatoire complet recherchant listériose :
urgent. Tout ceci s’inscrit dans un réseau de soins des antécédents médicaux personnels (hypertension ✔ éviter la consommation de lait cru
dans lequel chacun partage les rôles de prévention, artérielle [HTA], diabète, antécédents thromboembo-
(non pasteurisé) ;
de diagnostic et de traitements des pathologies qui liques, épilepsie, néphropathie, cardiopathie,
maladie auto-immune, séropositivité pour le virus de
✔ éviter les fromages à pâte molle ou
surviennent lors de la grossesse.
l’immunodéficience humaine [VIH], exposition in persillée et les bleus ;
La répartition des examens (examens cliniques,
utero au Distilbènet…) et les antécédents ✔ cuire soigneusement les aliments
biologiques, échographiques) et les mesures
préventives [1] sont établies dès le début du suivi, la chirurgicaux ou obstétricaux (antécédents de fausse d’origine animale ;
partie obstétricale proprement dite étant prise en couche, de grossesse extra-utérine, de prématu- ✔ éviter la consommation de produits
charge par l’obstétricien. rité…) qui pourraient avoir des implications pratiques de charcuterie cuite ;
pour la surveillance ultérieure de cette grossesse ; ✔ réchauffer soigneusement les plats
– chercher des antécédents familiaux particuliers,
cuisinés ;


notamment des problèmes génétiques ;
– évaluer tous les traitements pris en rappelant à
✔ laver les légumes crus et
Première consultation
la patiente que toute prise médicamenteuse en cours les herbes ;
de grossesse est potentiellement dangereuse et doit ✔ se laver les mains après
Cette consultation, qui est obligatoire, doit avoir être soumise à l’approbation d’un médecin ; la manipulation d’aliments non cuits
lieu avant la 15e semaine d’aménorrhée (SA). Très – évaluer les conditions de vie (travail, trajets, et avant chaque repas.
importante, elle a plusieurs objectifs : niveau socioéconomique) qui conditionnent le
– affirmer la grossesse par l’examen clinique en risque d’accouchement prématuré qu’il faudra
s’aidant, en cas de doute, d’un dosage de prévenir ; – discuter du principe d’une amniocentèse
beta-human chorionic gonadotropin (bhCG), – insister sur l’arrêt du tabagisme ; (antécédents d’anomalies caryotypiques, maladies
qualitatif plasmatique, et éventuellement d’une – prendre en charge un éventuel alcoolisme ou génétiques familiales, âge maternel supérieur à 38
échographie pelvienne (de préférence par voie une toxicomanie (ceci peut être fait dans un centre ans…) ;
vaginale avant 12 SA) ; comportant une équipe multidisciplinaire) ; – discuter un repos précoce ou un cerclage (si
– vérifier son caractère normalement évolutif – fournir à la patiente des conseils hygiénodiété- antécédent de fausse couche tardive à répétition ou
avec réalisation d’une échographie pelvienne au tiques : alimentation équilibrée et riche en calcium, béance cervico-isthmique) qui est effectué si
moindre doute (antécédent de chirurgie ou avec suppression des fromages à pâte molle au lait nécessaire par un gynécologue obstétricien entre 13
d’infection tubaire, fécondation in vitro…) ; cru afin de prévenir le risque de listériose, conseils et 14 SA ;
– déterminer le terme exact de cette grossesse hygiénodiététiques en cas de négativité de la – effectuer un examen clinique complet,
(en s’aidant si besoin d’une échographie pelvienne) sérologie de la toxoplasmose, repos de préférence comportant en particulier une prise de poids, de la
et prévoir la date théorique d’accouchement ; en décubitus latéral gauche ; tension artérielle, l’examen des systèmes

1
3-1380 - Surveillance de la grossesse

Ces consultations visent à s’assurer du bon La consultation anesthésique doit être


Mesures à prendre pour prévenir déroulement de la grossesse et à éliminer une programmée en fin de grossesse, idéalement avant
la contamination par le toxoplasme : complication obstétricale. la fin du huitième mois.
✔ éviter les contacts avec les chats : Elles doivent comporter systématiquement, dans Une préparation à l’accouchement est proposée à
faire nettoyer chaque jour, par une un premier temps, une prise du poids, de la tension la patiente.
artérielle et la réalisation d’un examen par Ces consultations permettent la prescription des
autre personne, avec de l’eau
bandelette urinaire. En effet, toute prise de poids examens obligatoires (tableau II), des échographies
bouillante ou un désinfectant, les anormale (supérieure à 2 kg par mois) doit conduire et éventuellement des arrêts de travail en cas de
récipients qui reçoivent leurs à rechercher d’une part un diabète gestationnel et grossesse à risque.
excréments ; d’autre part des œdèmes des membres inférieurs, À chacune de ces consultations, le médecin signe
✔ se laver les mains soigneusement évoquant une prééclampsie s’ils s’associent à une deux certificats provenant du carnet de maternité,
avant les repas ; protéinurie (> 300 mg/L) et à une HTA gravidique (TA l’un que la patiente adresse à la Sécurité sociale pour
✔ ne pas manipuler la viande crue ou > 135/85 à deux reprises au repos à 6 heures se faire rembourser ses soins, l’autre qu’elle adresse
se laver soigneusement les mains d’intervalle). à la caisse d’Allocations familiales pour obtenir
après ; L’interrogatoire vérifie la présence de l’allocation jeune enfant à partir du quatrième mois
mouvements actifs fœtaux (généralement perçus à de grossesse et jusqu’au troisième mois de l’enfant
✔ manger de la viande très cuite
partir de 3 mois et demi environ chez la multipare et (sous conditions de ressources).
(ne pas manger de fondue 4 mois chez la primipare) et recherche des signes La prise en charge de ces consultations et des
bourguignonne, de brochettes, de anormaux : métrorragies, contractions patholo- examens complémentaires est de 100 % à partir du
steak tartare…) ; giques (fréquentes et douloureuses), pertes de liquide sixième mois de grossesse.
✔ ne manger que des fruits et amniotique.
légumes soigneusement lavés à L’examen obstétrical comporte une détermi-


grande eau (en particulier les nation de la hauteur utérine. Celle-ci est mesurée au
salades, fraises…). ruban métrique, à partir du bord supérieur du pubis Dernière consultation
jusqu’au fond utérin. L’augmentation de la hauteur
utérine doit être régulière et en rapport avec le terme
cardiovasculaire et pulmonaire, des seins, du réseau de la grossesse. Elle a lieu au début du neuvième mois et doit être
veineux et la réalisation d’un examen par bandelette effectuée par le spécialiste. Outre les éléments
urinaire ; précédemment décrits, elle doit permettre :
– effectuer l’examen obstétrical proprement dit La hauteur utérine est mesurée à – d’évaluer le pronostic mécanique de
(palpation sus-pubienne, examen du col au partir du cinquième mois. La valeur l’accouchement et de programmer éventuellement
spéculum éventuellement associé à un frottis de attendue est calculée selon le principe une césarienne prophylactique ;
dépistage, toucher vaginal et auscultation des bruits suivant : il faut multiplier le nombre – de vérifier que la consultation anesthésique est
du cœur fœtaux à l’aide d’un doppler) ; de mois par quatre pour obtenir la programmée (si elle n’a pas déjà été réalisée) ;
– prescrire (au minimum) les examens hauteur utérine en centimètres. Par – de fixer un rendez-vous à la patiente à terme si
obligatoires (tableau II) et les échographies elle n’a pas accouché, afin d’organiser la surveillance
exemple : à 5 mois, la hauteur utérine
obstétricales ; et de programmer éventuellement un déclen-
– conseiller à la patiente de prendre contact avec doit être de 4 × 5 = 20 cm.
chement systématique.
la maternité (pour l’inscription). À partir du huitième mois, il faut
Au terme de cette consultation, le médecin doit rajouter 2 cm par mois.


remplir la feuille de déclaration de grossesse qui est
adressée à la Sécurité sociale et aux Allocations
Éléments de la surveillance
Une hauteur utérine excessive évoque une erreur à ne pas négliger
familiales. de terme, une grossesse multiple, une macrosomie
ou un hydramnios (dont les causes sont les


malformations fœtales, le diabète, les incompatibi- Rappelons certaines anomalies qui doivent
Consultations ultérieures lités sanguines, les infections…). Une hauteur utérine conduire à une prise en charge rapide par un
insuffisante évoque une erreur de terme, une spécialiste. Il s’agit de l’apparition :
hypotrophie fœtale, un retard de croissance – d’une protéinurie à la bandelette urinaire : on
Leur fréquence est d’une fois par mois jusqu’à 8 intra-utérin ou un oligoamnios. doit alors contrôler ce résultat par une protéinurie
mois, puis tous les 8 à 15 jours jusqu’au terme. Cette À partir du septième mois, la palpation utérine des 24 heures et un examen cytobactériologique
fréquence est accrue et le contenu de la consultation permet l’étude de la présentation (céphalique, en des urines (ECBU) ; si la protéinurie est confirmée, un
adapté en cas de grossesse pathologique. La siège ou transverse). bilan d’HTA doit être prescrit ;
patiente est alors systématiquement adressée à un L’examen comporte ensuite une auscultation des – d’une HTA (pression artérielle systolique
spécialiste. bruits du cœur fœtaux à l’aide d’un doppler, puis la supérieure à 135 mmHg et/ou diastolique
Les dernières consultations sont au mieux réalisation d’un toucher vaginal recherchant une supérieure à 85 mmHg, à deux examens successifs
effectuées par un spécialiste, dans la maternité où modification du col (en faveur d’une menace effectués en position assise à au moins 6 heures
l’accouchement est prévu. d’accouchement prématuré). d’intervalle) ;

Tableau II. – Examens au cours de la grossesse.

Examens obligatoires Examens facultatifs


- Bandelette urinaire (recherche de glycosurie et de protéinurie) à chaque consultation - Frottis cervicovaginal
- Groupe Rhésus (deux déterminations) - ECBU (recommandé vers le 5e mois)
- Recherche d’anticorps irréguliers à répéter chaque mois si Rhésus négatif - Fibrinogène, temps de saignement, TP, TCA (8e mois)
- Sérologie syphilis (TPHA et VDRL) - Test de O’Sullivan
- Sérologie rubéole (sauf si antérieurement positive) à répéter chaque mois si négative - Électrophorèse de l’hémoglobine (selon l’origine géographique)
- Sérologie toxoplasmose (sauf si antérieurement positive) à répéter chaque mois si négative - Sérologie VIH
- Sérologie de l’hépatite B (antigène HBs) au 6e mois - Sérologie de l’hépatite C
- NFS plaquette au 6e mois - Uricémie (dans un contexte d’HTA ou d’antécédents particuliers)

TPHA : réaction d’agglutination passive pour le tréponème (treponema pallidum hemagglutination assay) ; VDRL : réaction d’agglutination syphilitique (veneral disease research laboratory) ; NFS : numération-formule sanguine ; ECBU :
examen cytobactériologique des urines ; TP : taux de prothrombine ; TCA : temps de céphaline activé ; VIH : virus de l’immunodéficience humaine ; HTA : hypertension artérielle.

2
Surveillance de la grossesse - 3-1380

Tableau III. – Calendrier de la surveillance de la grossesse.

Date Examen clinique Examens obligatoires Examens conseillés


3e mois (10-14 SA) - Pouls, TA, poids, BU - Bilan obligatoire - Frottis cervicovaginal
- BDC, TV - Déclaration de grossesse (avant 15 SA) - Échographie (11 à 12 SA)
- Examen général
4e mois (15-19 SA) - Pouls, TA, poids - BU - Dosages hCG, alphafœtoprotéine, estriol
- HU - Sérologie toxoplasmose et/ou rubéole (si
négative)
- BDC - RAI (si Rhésus négatif)
- Col utérin
5e mois (20-23 SA) - Apparition des MA - BU - ECBU
- Pouls, TA, poids - Sérologie toxoplasmose et/ou rubéole (si - Échographie (19 à 22 SA)
négative)
- HU - RAI (si Rhésus négatif)
- BDC
- Palpation utérus
- Col utérin
6e mois (24-27 SA) - Pouls, TA, poids - BU - Début de préparation à l’accouchement
- HU - Sérologie toxoplasmose et/ou rubéole (si - Test de O’Sullivan
négative)
- BDC - RAI (si Rhésus négatif)
- MA - NFS
- Palpation utérus - Antigène HBs
- Col utérin
7e mois (28-31 SA) - Pouls, TA, poids - BU
- HU - Sérologie toxoplasmose et/ou rubéole (si
négative)
- BDC - RAI (si Rhésus négatif)
- MA
- Palpation utérus
- Col utérin
8e mois (32-36 SA) - Pouls, TA, poids - BU - Fibrinogène, temps de saignement, TP, TCA
- HU - Sérologie toxoplasmose et/ou rubéole (si - Prélèvement bactériologique vaginal (streptocoque B ?)
négative)
- BDC - RAI (si Rhésus négatif) - Échographie (31-33 semaines)
- MA - Radiopelvimétrie à 36 semaines si indiquée
- Palpation utérus - Consultation anesthésie
- Col utérin
- Diagnostic de présentation
9e mois (37-40 SA) - Pouls, TA, poids - BU - Radiopelvimétrie si besoin
- HU - Sérologie toxoplasmose et/ou rubéole (si
négative)
- BDC - RAI (si Rhésus négatif)
- MA
- Palpation utérus
- Col utérin
- Présentation
- Examen clinique du bassin
À partir de la 41e SA - Surveillance du terme dépassé - BU - Quantification de liquide amniotique à l’échographie
- Pouls, TA, poids, BU - RAI (si Rhésus négatif) - Surveillance du rythme cardiaque fœtal
- MA, BDC

TA : tension artérielle ; BU : bandelette urinaire ; BDC : bruits du cœur du fœtus ; TV : toucher vaginal ; SA : semaine d’aménorrhée ; HU : hauteur utérine ; RAI : recherche d’agglutinines irrégulières ; hCG : human chorionic
gonadotropin ; MA : mouvements actifs (du fœtus) ; ECBU : examen cytobactériologique des urines ; NFS : numération-formule sanguine ; TP : taux de prothrombine ; TCA : taux de céphaline activé.


– d’œdèmes importants des membres inférieurs hématome, une fausse couche précoce, une lyse sur
d’apparition rapide (en 24 à 48 heures) ;
Métrorragies du premier grossesse multiple, un œuf clair (ce qui correspond à
trimestre
– d’une hyperuricémie, marqueur de toxémie (il une grossesse arrêtée), une rétention ovulaire et
s’agit d’un examen qui n’est pas systématique) ; enfin une maladie trophoblastique (môle
– de douleurs abdominales (hématome C’est une situation à laquelle le médecin est hydatiforme, choriocarcinome). Enfin, dans 50 % des
rétroplacentaire, prééclampsie ?) ; fréquemment confronté. Elle doit conduire à réaliser cas, il s’agit d’une grossesse normalement évolutive.
– de métrorragies ; rapidement une échographie pelvienne, de En effet, 20 à 30 % des grossesses à terme ont été
– de vomissements importants ; préférence par voie endovaginale qui va permettre compliquées de métrorragies du premier trimestre.
– d’une fièvre (listériose, pyélonéphrite, d’orienter le diagnostic et donc le traitement. Ceci reste cependant un diagnostic d’élimination.
chorioamniotite ?) ; En effet, il faut éliminer une grossesse


– d’une diminution des mouvements actifs extra-utérine dont le diagnostic précoce reste
fœtaux ; extrêmement important pour éviter les complica- Prescriptions au cours
– d’une perte de liquide amniotique ; tions hémorragiques et pour permettre un
de la grossesse
– d’une séroconversion de la sérologie de la traitement conservateur de la trompe.
toxoplasmose ou de la rubéole ; Les autres étiologies de ces métrorragies du Le médecin peut être conduit à prescrire différents
– d’une hyperglycémie lors du test de O’Sullivan. premier trimestre sont la constitution d’un traitements chez une femme enceinte. Il peut s’agir

3
3-1380 - Surveillance de la grossesse

– la vitamine D3 est intéressante pour prévenir systématique, mais est intéressante en cas de
Diabète gestationnel les hypocalcémies néonatales (100 000 unités per os pathologie maternelle vasculaire afin de prédire le
Son dépistage est réalisé entre 24 et en une fois au sixième mois) ; risque d’hypotrophie fœtale.
28 SA en l’absence de facteurs de – l’acide folique peut être prescrit au cours du
deuxième trimestre et pendant l’allaitement à la


risque et en début de grossesse (avec
dose de 350 µg/j afin de prévenir l’anémie Modifications physiologiques
renouvellement entre 24 et 28 SA si
gravidique mégaloblastique ; cependant un régime au cours de la grossesse [2]
négatif), en cas de surcharge alimentaire équilibré couvre habituellement les
pondérale maternelle, d’antécédents besoins. La supplémentation est en revanche
familiaux de diabète, d’antécédents de nécessaire en cas de malnutrition, de malabsorption, Les résultantes des modifications physiologiques
mort fœtale in utero, de macrosomie, d’anémie hémolytique chronique, de grossesse de la grossesse sont utiles à connaître pour ne pas
gémellaire et de traitement par acide valproïque les considérer comme pathologiques et ne pas les
d’hyperglycémie lors de la prise
(Dépakinet). Enfin, des données récentes sont en traiter.
d’œstroprogestatifs, de corticoïdes ou
faveur d’une prescription périconceptionnelle dans Les modifications cliniques comportent une
lors d’une grossesse antérieure. accélération du rythme cardiaque, une baisse de la
le but de prévenir les défauts de fermeture du tube
Il se dépiste par le dosage de la pression artérielle (expliquant que l’HTA gravide est
neural. Cette attitude est déjà préconisée dans le cas
glycémie 1 heure après ingestion de particulier d’anomalie de fermeture du tube neural définie par des chiffres artériels plus bas) et une
50 g de glucose (test de O’Sullivan) : lors d’une grossesse précédente ou de prise d’acide augmentation de la pression veineuse des membres
✔ négatif si inférieure à 1,40 g/L valproïque par la mère. L’acide folique est alors inférieurs.
(7,8 mmol/L) ; prescrit à la dose de 5 mg/j, à commencer 1 mois Les modifications biologiques comportent
✔ diabète si supérieure à 2 g/L avant la conception et à poursuivre pendant la essentiellement une anémie par hémodilution, une
grossesse ; discrète hyperleucocytose à polynucléaires, une
(11,1 mmol/L).
– le fer dont la prescription à petite dose (25 à diminution de l’uricémie, de l’urée, de la créatinine,
Entre 1,4 et 2 g/L, il faut réaliser une de l’albumine (moins de 10 g/L), de la glycémie à
hyperglycémie provoquée par voie 30 mg/j) est généralement proposée à partir du
deuxième trimestre ; jeun, de la thyroid stimulating hormone (TSH) et une
orale qui est positive si deux des augmentation de la vitesse de sédimentation, des
– le fluor dont l’intérêt reste discuté et dont
quatre valeurs suivantes sont l’administration n’est pas recommandée triglycérides, du cholestérol, des phosphatases
pathologiques : actuellement par le collège des gynécologues et alcalines, du complément et de ses fractions C3 et
✔ T0 > 1,05 g/L (5,8 mmol/L) ; obstétriciens français. C4. Il existe également une hyperfibrinogénémie à
✔ T 1 h > 1,90 g/L (10,6 mmol/L) ; 5-6 g/L en fin de grossesse et une augmentation des
D-dimères, facteurs VII, VIII, X, XII avec diminution
✔ T 2 h > 1,65 g/L (9,2 mmol/L) ;


des facteurs XI, XIII, de la protéine S et de
✔ T 3 h > 1,45 g/L (8,1 mmol/L). l’antithrombine III. Le seuil rénal du glucose est
Une prise en charge spécialisée est Échographies obstétricales
abaissé, et donc l’apparition d’une glycosurie est
alors nécessaire pour prévenir les physiologique. La cétonurie isolée (de jeûne) est
complications (mort fœtale in utero, Deux ou, plus classiquement trois, sont fréquente.
macrosomie, HTA gravidique). conseillées, mais non obligatoires.


Le sac gestationnel est visible à 5 semaines et
demie d’aménorrhée, l’activité cardiaque à 6 ou Consultation post-partum
de la poursuite d’un traitement antérieur à la
7 SA.
grossesse. Il faut, dans ce cas, s’assurer de son
– La première échographie doit être idéalement
innocuité établie chez la femme enceinte et se poser Cette consultation, idéalement assurée par
réalisée entre 11 et 13 SA. Ses objectifs sont de dater
systématiquement la question de sa nécessité. l’obstétricien, doit permettre de rediscuter des
le début de la grossesse (à 3-5 jours près) par la
D’autre part, il peut s’agir d’un traitement prescrit mesure de la longueur craniocaudale, de définir son problèmes rencontrés lors de la grossesse et de
du fait de la grossesse. Les médicaments le plus caractère unique ou multiple, d’obtenir une étude l’accouchement et d’évaluer les éventuels risques
souvent concernés sont alors : précoce de la morphologie fœtale et de mesurer la pour une grossesse ultérieure.
– l’aspirine à dose antiagrégante (100 mg/j en clarté nucale qui doit être inférieure à 3 mm. Si cette Elle a également pour objectif d’évaluer l’état de
règle générale) qui doit être prescrite, lorsqu’elle est mesure est supérieure à 3 mm, cela place la femme santé maternel, de répondre aux questions de la
indiquée, au cours du premier trimestre, voire dès la dans un groupe à risque de trisomie 21, voire du patiente et de l’aider face à d’éventuelles difficultés.
première consultation (dans certaines maladies syndrome de Turner. La patiente doit alors être L’examen gynécologique comporte en particulier un
auto-immunes par exemple). Ses indications sont les informée que la seule manière d’être certaine du examen périnéal et des seins. Une incontinence
antécédents d’hématome rétroplacentaire, de mort diagnostic est de réaliser une amniocentèse. anale ou urinaire est dépistée et, en cas de
fœtale in utero, de retard de croissance d’origine – La deuxième échographie doit avoir lieu entre césarienne, la cicatrice est examinée. Les éventuels
vasculaire lors d’une grossesse précédente (HTA, 20 et 24 SA. Elle permet l’étude morphologique du problèmes d’allaitement sont abordés, de même que
prééclampsie ou éclampsie) et certaines maladies fœtus, son étude biométrique (mesure du diamètre la question de la contraception (en rappelant à la
auto-immunes (lupus, syndrome des antiphospholi- bipariétal, de la longueur du fémur et du périmètre patiente l’inefficacité de l’allaitement seul comme
pides). Les contre-indications sont l’allergie vraie à abdominal). Elle visualise également l’insertion moyen contraceptif).
l’aspirine, l’ulcère gastroduodénal et les troubles de placentaire, le nombre de vaisseaux du cordon
l’hémostase. Ce traitement est généralement arrêté à


ombilical et la quantité de liquide amniotique. Enfin,
35 SA et ne contre-indique pas la réalisation d’une elle permet une étude hémodynamique par doppler Évaluation biologique
péridurale ; utérin, systématiquement pour certains auteurs, du risque de trisomie 21 [1]

– l’injection de gammaglobulines anti-Rhésus D seulement en cas de grossesse à risque vasculaire


doit être prescrite chez les femmes Rhésus négatif gravidique pour d’autres (antécédent de
afin de prévenir l’allo-immunisation Rhésus lors de prééclampsie, de retard de croissance intra-utérin). ‚ Principe
tout geste invasif (amniocentèse, biopsie du – La troisième échographie doit être réalisée Il est possible d’évaluer le risque de trisomie 21 en
trophoblaste, cerclage du col, version par manœuvre entre 31 et 33 SA. Elle répète l’étude morphologique dosant trois facteurs : alphafœtoprotéine, hCG
externe, réduction embryonnaire), lors de et biométrique, mesure la quantité du liquide totales et estriol entre 14 et 18 SA révolues. Ces
métrorragies, d’accident de la voie publique, de amniotique et détermine la présentation du fœtus et dosages doivent être réalisés par un laboratoire
traumatisme abdominal, d’interruption volontaire de la localisation placentaire. Là encore, l’étude biologique agréé. Le risque donné pour une patiente
grossesse, de fausse couche, de grossesse vélocimétrique (flux utérin, flux sanguin ombilical, est alors évalué à l’aide d’un logiciel en fonction des
extra-utérine ou d’accouchement ; voire étude de la vascularisation fœtale) n’est pas résultats et de l’âge.

4
Surveillance de la grossesse - 3-1380

L’établissement d’un caryotype fœtal par


amniocentèse est proposé dès lors que le risque ✔ Quelques définitions
excède 1/250. L’établissement de ce risque prend en
– Le terme de la grossesse est défini en SA.
compte l’âge de la femme.
– Durée totale de la grossesse : 40 SA et 4 jours (ou à partir de la date d’ovulation :
Ce test ne permet ni de faire le diagnostic de 270 jours ou 9 mois).
trisomie 21 (il faut toujours recourir à un caryotype) – Accouchement prématuré : accouchement survenant avant 37 SA. Sa fréquence
ni d’éliminer formellement la trisomie 21 (un tiers est estimée à 5 % en France.
des trisomies 21 ne sont pas dépistées). – HTA gravidique : définie, au cours de la grossesse, par une pression artérielle
Ce test n’est intéressant que pour la seule systolique supérieure à 135 mmHg et/ou une pression artérielle diastolique
trisomie 21 et n’a aucun intérêt pour dépister les supérieure à 85 mmHg lors de deux examens successifs à au moins 6 heures
autres aberrations chromosomiques. d’intervalle chez une patiente en position couchée.
– Toxémie ou prééclampsie : HTA gravidique associée à une protéinurie
‚ Législation (> 300 mg/L).
– Éclampsie : complication extrême de la prééclampsie correspondant à des
L’information concernant les bénéfices et les convulsions.
inconvénients de ce test est obligatoire (décret du 6 – Rythme cardiaque fœtal : le rythme normal de base est compris entre 120 et
mai 1995), la patiente ayant le choix de faire réaliser 160 battements par minute. Il doit comporter une variabilité du rythme de 5 à
ou non cet examen. En cas de consentement, elle 25 battements par minute, avec des accélérations en particulier lors
doit signer une feuille d’information officielle. des mouvements fœtaux. Ces éléments se jugent sur un enregistrement d’au moins
Si le couple apparaît hésitant, on peut conseiller 30 minutes.
une consultation de conseil génétique.

Si le test met en évidence un risque élevé


conduisant à une amniocentèse, celle-ci est alors ✔ Radiopelvimétrie
prise en charge par l’assurance maladie. Ses indications sont :
– un utérus cicatriciel ;
– une grossesse multiple ;


– une présentation de siège ;
Indications d’un caryotype – une taille maternelle inférieure à 150 cm ;
– un antécédent de traumatisme du bassin.
– Un âge maternel supérieur à 38 ans au jour du La radiopelvimétrie est réalisée à partir de 37 SA et comporte deux clichés : un profil
prélèvement. strict et une incidence de Thoms qui permettent la mesure des paramètres du détroit
supérieur et moyen afin de vérifier la probabilité d’un accouchement par voie basse.
– Une hyperclarté nucale supérieure à 3 mm sur Cet examen peut actuellement être réalisé par scanner.
l’échographie faite entre 11 et 13 SA.

– Un risque calculé par le dosage sérique effectué Le prélèvement caryotypique peut se faire : actuellement. Ce prélèvement est responsable de 0,5
entre 14 et 18 SA de l’hCG, de l’alphafœtoprotéine et à 1 % de fausse couche. Les résultats sont
– par biopsie des villosités choriales entre 10 et
de l’estriol supérieur à 1/250 (le caryotype est alors habituellement obtenus en 15 jours ;
12 SA (voie transabdominale ou transcervicale). Le
normal dans 98 % des cas). taux de fausses couches compliquant ce – par ponction de sang fœtal entre 20 et 38 SA,
prélèvement est d’environ 1 % pour les équipes entraînant 2 % de fausses couches (ce type de
– Un antécédent d’enfant porteur d’une prélèvement n’a presque plus d’indications en
entraînées. Les résultats sont habituellement
anomalie chromosomique.
obtenus en 3 à 5 jours ; dehors du cas très particulier de certaines
– Un parent porteur d’une translocation – par amniocentèse sous contrôle échogra- pathologies fœtales découvertes au troisième
équilibrée. phique, entre 14 et 18 SA, voire plus tôt trimestre).

Nathalie Costedoat-Chalumeau : Chef de clinique-assistante.


Bertrand Wechsler : Professeur au Collège hospitalier, médecin des Hôpitaux.
Jean-Charles Piette : Professeur des Universités, chef de service.
Service de médecine interne, centre hospitalier universitaire Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France.
François Goffınet : Chef de clinique-assistant,
service de gynécologie et obstétrique de Port-Royal, hôpital Cochin Saint-Vincent-de-Paul, 121-123 boulevard de Port-Royal, 75014 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : N Costedoat-Chalumeau, F Goffınet, B Wechsler et JC Piette. Surveillance de la grossesse.
Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1380, 2001, 5 p

Références

[1] Rudigoz RC. Grossesse : diagnostic, surveillance clinique, indication des exa- [3] Wechsler B, Janse-Marec J, Pechère JC. Pathologies maternelles et grossesse.
mens complémentaires, réglementation. Rev Prat 1999 ; 49 : 303-310 Paris : Medsi/McGraw-Hill, 1988

[2] Tchobroutsky C. Modifications physiologiques de l’organisme gravide. In :


Godeau P, Herson S, Piette JC éd. Traité de médecine. Paris : Médecine-Sciences
Flammarion, 1996 : 1916-1917

5
3-1190

3-1190

Suspicion d’infection
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

génitale basse
P Judlin

L es vulvovaginites sont toujours là, même si les germes impliqués ont changé. Leur prise en charge efficace
protège des salpingites et fait reculer la stérilité.
© Elsevier, Paris.

■ ■
recherches microbiologiques et sérologiques
Introduction exhaustives sont nécessaires dans tous les cas. Examen clinique
L’abstention sexuelle durant la durée du
traitement et le recours systématique ensuite aux Un interrogatoire précis (signes fonctionnels,
Les infections génitales basses sexuellement
préservatifs sont nécessaires. circonstances d’apparition, signes éventuellement
transmissibles ont, en l’espace de 20 ans,
considérablement évolué. Certaines maladies associés...) et un examen gynécologique complet
sont systématiques. L’examen comprendra


sexuellement transmissibles (MST) comme la
syphilis, la gonococcie et la trichomonase ont vu leur notamment :
Circonstances de découverte – la palpation des aires ganglionnaires
fréquence nettement diminuer alors que d’autres
(chlamydiose, herpès génital...) devenaient de plus inguinales ;
en plus répandues. Nous envisagerons successi- Les principales circonstances de découverte de – l’inspection des régions vulvaires, périnéales et
vement les circonstances de découverte, l’examen MST féminines sont résumées dans le tableau I. périanales ;
clinique et le bilan complémentaire, avant de Ces circonstances sont les suivantes : – l’examen au spéculum du vagin et du col ;
détailler les principales MST, ainsi que la conduite à – le toucher vaginal.
– les leucorrhées, qui constituent le signe
tenir. fonctionnel et le motif de consultation le plus L’examen clinique va pouvoir mettre en évidence
fréquent ; diverses pathologies.
– une symptomatologie urinaire, évocatrice ‚ Leucorrhées


Remarques liminaires

Certaines infections virales, transmissibles


d’une urétrite ;
– des lésions anovulvaires ou périnéales. Il peut
s’agir d’une vulvite ou d’ulcérations anogénitales ;
– une bartholinite ;
Elles sont la manifestation la plus fréquente. On
s’attachera à en préciser les circonstances de
survenue (rapports sexuels, changement de
partenaire, traitement antibiotique récent), leurs
notamment par voie sexuelle, telles que les hépatites – la découverte, lors d’une consultation caractères (abondance, couleur, consistance, odeur)
B et C et le cytomégalovirus, ne seront pas traitées ici systématique ou lors d’un examen motivé par la et l’existence d’éventuels signes d’accompagnement
car elles sortent, à notre avis, du cadre spécifique des mise en évidence d’une MST chez le partenaire. (prurit ou brûlures vulvovaginales, pollakiurie,
MST et ne disposent pas d’un traitement brûlures mictionnelles).
anti-infectieux classique. On éliminera facilement des leucorrhées
Tableau I. – Principales circonstances de dé-
De même, les infections à virus de l’immunodéfi- couvertes d’une maladie sexuellement trans- physiologiques qui sont peu abondantes, sauf en
cience humaine (VIH) et le syndrome missible féminine. milieu de cycle, inodores, n’entraînant aucun trouble
d’immunodéficience acquis (sida) ne seront pas fonctionnel.
développés ici. Cependant, l’infection à VIH, de part Leucorrhées Les leucorrhées pathologiques peuvent
son mode de contamination possible par voie Signe d’urétrite correspondre quant à elles à :
sexuelle et de part les troubles immunitaires qu’elle – une vaginite ou une vulvovaginite : les parois
Lésions anovulvaires subtilisées en vulvite et ulcé-
induit, favorise le développement de MST telles que
© Elsevier, Paris

ration anogénitale vaginales sont congestives, inflammatoires,


syphilis, gonococcie et infection à hPV (human recouvertes par les leucorrhées plus ou moins
Papillomavirus). Bartholinite abondantes ;
Plusieurs MST peuvent être simultanément Découverte lors d’un examen systématique – une endocervicite, isolée ou associée à une
présentes chez une patiente et c’est pourquoi des vaginite. La localisation cervicale de l’infection doit

1
3-1190 - Suspicion d’infection génitale basse

faire évoquer la possibilité d’une affection génitale nécessaires (syphilis, gonococcie). Dans tous les cas,
haute (endométrite ou salpingite), évoquée par compte tenu des associations fréquentes de Tableau III. – Trichomonase : modalités du
traitement par voie orale.
l’existence de douleurs pelviennes et confirmée par plusieurs MST, il est nécessaire de proposer à la
l’existence d’un toucher vaginal anormal. La patiente les sérologies du VIH, de l’hépatite B (HBs) et Nom commercial Posologie
mobilisation utérine est douloureuse. Il peut en outre de l’hépatite C (VHC) ;
Flagylt 500 mg 4 comprimés en une
exister un empâtement annexiel uni- ou bilatéral. – des examens microbiologistes et sérologiques
prise unique
du ou des partenaires.
‚ Urétrite féminine Flagylt 250 mg 1 comprimé 2 fois/j
pendant 10 jours


Quand elle est isolée, elle est souvent
asymptomatique. Le diagnostic pourra néanmoins
Principales MST et conduite Naxogynt 1 000 2 comprimés en une
à tenir prise unique à renouve-
être évoqué à l’interrogatoire (sensations de brûlures ler après 25 à 30 jours
mictionnelles et/ou de pollakiurie), alors que
‚ Vulvovaginite mycosique Fasigynet 500 2 comprimés en une
l’examen clinique est généralement négatif.
La vulvovaginite mycosique est due le plus prise unique
‚ Vulvite souvent à Candida albicans. C’est la plus fréquente
des vaginites. Le mode de transmission par voie
Une vulvite ou inflammation des formations démangeaisons sont fréquentes. S’y associent, dans
sexuelle n’est qu’accessoire. Candida albicans est très
vulvaires est rarement totalement isolée. L’origine en 25 à 50 % des cas, des signes d’urétrite. À l’examen
largement présent dans notre environnement et sa
est le plus souvent mycosique. Les formations au spéculum, le vagin présente un aspect
virulence est la résultante d’une rupture de l’équilibre
vulvaires, et en particulier les massifs labiaux, sont érythémateux, voire granuleux.
entre la levure, la flore commensale vaginale et les
inflammatoires, œdématiées et congestives, rendant Le diagnostic repose sur les cultures à partir d’un
autres mécanismes de défense du vagin [1].
l’examen génital difficile car douloureux. prélèvement vaginal sur écouvillon.
L’infection mycosique se manifeste par une
Les ulcérations vulvopérinéales, voire périanales, Le traitement, à base de dérivés du métroni-
vulvovaginite très congestive et prurigineuse. La
peuvent être uniques ou multiples. On précisera : dazole, combine prise par voie orale (tableau III) et
patiente peut également décrire des brûlures
– leur localisation précise ; ovules vaginaux (Flagylt et Tergynant), un ovule par
mictionnelles et pollakiurie.
– leur aspect : exulcération propre ou lésions jour pendant 10 jours. Durant la gestation, on
À l’examen, les formations labiales et la
vésiculopustuleuses ; évitera d’utiliser le métronidazole par voie générale
muqueuse vaginale sont rouges, œdématiées,
– le caractère douloureux ou non des lésions ; et l’on se contentera du traitement vaginal.
sensibles au moindre contact et recouvertes de
– l’existence éventuelle d’adénopathies satellites, Le ou les partenaires recevront systématiquement
leucorrhées blanchâtres, épaisses, peu abondantes.
inguinales (uni- ou bilatérales), voire iliaques, le même traitement par voie orale.
Le diagnostic repose sur la mise en culture, après
éventuellement perceptibles au toucher vaginal.
prélèvement vaginal, sur écouvillon.
‚ Chlamydioses
‚ Bartholinite Le traitement (tableau II) consiste en la
prescription d’un dérivé imidasolé concomitamment Dues à Chlamydia trachomatis, elles peuvent
Elle correspond à l’abcédation de la glande de sous forme d’ovules vaginaux (un ovule 3 jours de prendre cliniquement la forme d’une endocervicite
Bartholin ou de son canal dilaté. Elle se manifeste suite ou un ovule unique selon les formes ou d’une urétrite. Insistons sur le fait que plus des
par une tuméfaction vulvopérinéale douloureuse, galéniques), et de crèmes appliquées largement sur deux tiers des chlamydioses féminines sont
visible à l’inspection, entraînant une déformation la vulve (deux fois par jour pendant environ 1 totalement asymptomatiques. La plupart des cas
unilatérale de la région périnéale postérieure, semaine). d’urétrite ne s’accompagnent d’aucun signe
accompagnée de signes inflammatoires cutanés. Sa Le traitement du partenaire par l’application de fonctionnel. En cas d’endocervicite, on notera un
palpation, à travers le périnée ou par l’intermédiaire crèmes sur le gland du pénis n’est pas préconisé endocol fragile, saignant au contact, d’où sortent
du vagin au toucher vaginal, est électivement systématiquement mais s’avère utile si celui-ci éventuellement des leucorrhées. On recherchera
douloureuse. présente des signes de balanite ou en cas de mycose attentivement l’éventualité d’une infection génitale
La bartholinite peut être due à des germes récidivante. haute associée (cf supra).
sexuellement transmissibles (gonocoques, Le diagnostic repose essentiellement sur les
Chlamydia trachomatis, mycoplasmes) mais aussi à ‚ Trichomonase urogénitale prélèvements endocervicaux. Différentes techniques
d’autres types de micro-organismes : germes, Elle est due à Trichomonas vaginalis, pathogène sont disponibles : cultures cellulaires, longues,
entérobactéries (Escherichia coli...), anaérobies. anaérobie très contagieux dont la transmission se coûteuses et peu sensibles mais très spécifiques,
Spontanément, elle évolue vers la fistulisation, fait essentiellement par voie sexuelle [2]. l’immunofluorescence et l’immunopransimologie
créant un pertuis cutanéomuqueux laissant soudre Cliniquement, elle se traduit par une vaginite avec rapides mais moins spécifiques, et enfin, les
du pus. leucorrhées jaunâtres, abondantes et nauséa- nouvelles techniques d’amplification génique, PCR
Le traitement consiste essentiellement à la mise à bondes. Brûlures vaginales, dyspareunie et (polymerase chain reaction) ou LCR (ligase chain
plat chirurgical par marsupialisation ou plus reaction), très sensibles et spécifiques. Avec ces
rarement exérèse de la glande. Tableau II. – Exemples d’antimycosiques et dernières techniques, il semble qu’un prélèvement
leurs posologies. sur jet d’urine soit aussi sensible que le prélèvement
endocervical. Dans le cas présent, les études


Examens complémentaires

Ils seront détaillés pour chaque pathologie. De


Ovules
Gyno-Pevarylt :
1 ovule pendant 3 jours
Gyno-Pevaryl LPt :
Crèmes antimycosiques
Pevarylt lait

Mykt crème
sérologiques (titrage des anticorps IgG anti-
Chlamydia trachomatis) n’ont que peu d’intérêt.
Le traitement repose sur la prescription d’un
antibiotique efficace vis-à-vis de Chlamydia
1 ovule
façon générale, on aura recours à : trachomatis (tableau IV), pour une durée de 7 à 10
Gyno-Daktarin 400t : Mycologt crème
– des prélèvements microbactériologiques : ils 1 ovule 3 jours de suite jours. Les fluoroquinolones systémiques sont, quant
sont toujours indispensables. Ils sont effectués au site Gynomykt : 1 ovule à elles, réservées au traitement des infections
de l’infection : vulve, vagin, urètre ou endocol, ou 3 jours de suite génitales hautes [3]. L’apparition de l’azithromycine
bien directement au niveau d’une ulcération ; Gyno-Trosydt : 1 ovule (Zithromaxt), dérivé azalide disposant d’une très
Lomexint : 1 ovule
– des examens sérologiques : des examens Fongarext : 1 ovule longue demi-vie et d’une bonne pénétration
sérologiques spécifiques peuvent s’avérer tissulaire, autorise une prise unique [4].

2
Suspicion d’infection génitale basse - 3-1190

Le traitement des lésions repose sur leur


Tableau IV. – Exemples de traitement anti- Tableau V. – Principes du traitement du l’her- destruction par cryothérapie ou pulvérisation laser.
Chlamydia trachomatis et leurs posologies. pès génital.
La destruction chimique (podophylline ou acide
Nom commercial Posologie Zélitrext 1 000 : 2 fois trichloroacétique) peut être proposée en cas de
Primo-infection : 1 comprimé/j pendant lésions périnéales peu nombreuses.
Doxycycline (Doxy- 2 fois 100 mg/j 10 jours
100t, Vibramycinet...) Le partenaire fera l’objet d’un examen
Zélitrex t 1 000 : péniscopique qui permettra de repérer et de détruire
Macrolides : Récidive : 2 comprimés en une les éventuelles lésions.
– Josacinet 2 fois 1 g/j prise pendant 5 jours
– Rulidt 2 fois 150 mg/j
– Claramidt 150 mg 2 fois 150 mg/j Zélitrex t 1 000 : ‚ Gonococcie
Traitement prophylacti-
1 comprimé/j pendant 6
Azithromycine (Zythro- 4 comprimés à 250 mg que : L’infection à Neisseria gonorrhœae a vu sa
à 12 mois
maxt) en prise unique fréquence décroître très sensiblement ces dernières
années.
‚ Herpès génital Sur le plan urogénital, l’infection, volontiers
Le traitement du ou des partenaires repose sur les
Dû au virus HSV2 (70 % des cas) et HSV1 (30 %), il diffuse, peut cliniquement revêtir les formes
mêmes principes.
s’agit d’une MST très répandue, au caractère d’urétrite, de bartholinite ou de cervicite. L’urétrite est
chronique, responsable de récidives. L’herpès génital ici habituellement symptomatique, accompagnée
‚ Cas particuliers des mycoplasmes est parfois mal reconnu par la patiente qui en est d’une pyurie. La cervicite est d’importance variable,
porteuse. responsable de leucorrhées jaune verdâtre.
Les principaux mycoplasmes potentiellement La primo-infection se traduit généralement par L’association à une infection génitale haute est à
pathogènes au niveau génital sont Mycoplasma une vulvite aiguë, œdématovésiculeuse, dans un redouter et sera recherchée systématiquement [7].
hominis et Ureaplasma urealyticum. Ils sont contexte général (fièvre, myalgies, asthénie). Les Le diagnostic repose avant tout sur la mise en
fréquemment retrouvés au niveau urétral ou lésions sont multiples et algiques. Les récidives culture à partir d’un prélèvement cervical ou urétral.
endocervical, qu’il y ait ou non infection. Leur rôle génitales sont de localisation et d’intensité variables. Le traitement, compte tenu de l’émergence de
exact est difficile à établir car ils sont souvent Vulve, périnée et région périanale en constituent les souches résistant aux pénicillines, pourra faire appel
associés à d’autres pathogènes. sites les plus fréquents. Les lésions, rapidement notamment à la spectinomycine (Trobicinet : 2 g
Actuellement, leur traitement qui repose sur une extensives, passent par un stade de vésicules intramusculaire [IM] en une seule injection) ou à la
prescription de cyclines ou de macrolides groupées sur une base érythémateuse qui se ceftriaxone (Rocéphinet : 500 mg IM en une seule
comparable au traitement de C h l a m y d i a transformeront ensuite en érosions ou ulcérations dose).
trachomatis, n’est préconisé que dans les cas plus ou moins douloureuses. Les localisations Le ou les partenaires bénéficieront du même
suivants [5] : vaginales et surtout cervicales, souvent régime thérapeutique.
– infection patente : cervicite ou urétrite ; asymptomatiques, peuvent passer totalement
– association avec d’autres pathogènes ; inaperçues. ‚ Syphilis récente
– infertilité. Le diagnostic repose sur des prélèvements
effectués directement au niveau des vésicules ou des Elle est actuellement devenue rare chez la femme.
ulcérations. Différentes techniques sont disponibles. La plupart des cas diagnostiqués aujourd’hui sont le
‚ Vaginose bactérienne (vaginite Le traitement repose sur l’aciclovir et ses dérivés, fait de dépistage systématique (populations
à Gardnerella) notamment le valaciclovir (Zélitrext 1 000 mg) dont transplantées, partenaire porteur d’une syphilis).
la biodisponibilité et la forme galénique sont Cliniquement, la syphilis primaire va se traduire
Elle résulte essentiellement d’un déséquilibre de la par un chancre unique ou multiple qui peut être
particulièrement adaptées au traitement de l’herpès
flore vaginale commensale qui se traduit par le localisé sur une lèvre ou au niveau du col utérin.
génital (tableau V) [7]. Dans la primo-infection, on
remplacement des lactobacilles par une flore
prescrira Zélitrext 1 000 mg, 2 comprimés/j pendant Le diagnostic peut être réalisé directement par
plurimicrobienne, comprenant notamment
10 jours. En cas de récidive, le simple traitement local recherche du tréponème à partir d’un prélèvement
Gardnerella vaginalis, de nombreux anaérobies réalisé au niveau de l’ulcération (examen au
par topique (Zoviraxt crème ou Vira-MPt gel) est
(peptostreptocoque, Prevotella et Bacteroïdes...) et microscope sur fond noir ou immunofluorescence).
insuffisant et doit être associé à un traitement oral de
des mycoplasmes [6]. La transmission par voie Le plus souvent cependant, ce sont les techniques
type Zélitrext 1 000 mg, 2 comprimés en une prise
sexuelle n’est pas exclusive. Si la vaginose sérologiques qui seront utilisées :
pendant 5 jours. En cas de poussées fréquentes (au
bactérienne n’est pas inquiétante en soi, il a été – l’immunofluorescence indirecte (FTA-Abs
moins six récidives par an), un traitement
néanmoins démontré qu’elle facilitait la survenue [fluorescent Treponema antibody absorption]) qui est
prophylactique (Zélitrext 1 000 mg, 1 comprimé/j
d’infections génitales hautes, d’infections pelviennes positive dès le troisième jour ;
pendant 6 mois à 1 an) doit être proposé à la
postopératoires et de pathologies infectieuses patiente. – le TPHA (Treponema pallidum haemaggluti-
obstétricales. La symptomatologie de la vaginose nation assay) qui se positive vers la troisième
Il n’y a pas de traitement spécifique du partenaire.
bactérienne est le plus souvent discrète : leucorrhées semaine ;
Les rapports protégés par préservatifs constituent la
grisâtres, volontiers nauséabondes, parfois associées meilleure prévention vis-à-vis de la propagation de – la réaction VDLR (Venereal Disease Research
à une sensation prurigineuse. l’infection. Laboratory) ;
Le diagnostic sera confirmé par coloration de – le test de Nelson.
Gram effectuée à partir du prélèvement vaginal sur ‚ Condylomes Le traitement de la syphilis primaire repose, en
écouvillon. Ces lésions virales sont dues aux Papillomavirus. l’absence d’allergie, sur la pénicilline : benzathine,
Le traitement fait appel au métronidazole, utilisé Leur localisation est variée : vulve, périnée, vagin ou benzylpénicilline (Extencillinet : 2,4 millions d’unités
indifféremment par voie orale (Flagylt : un col utérin. L’évolution des lésions condylomateuses IM en une dose unique). Si le caractère récent de la
comprimé de 500 mg deux fois/j) ou par voie cervicales vers des néoplasies intraépithéliales est syphilis est douteux, les injections seront répétées
vaginale (Flagylt : un ovule/j pendant 7 jours). fréquente et nécessite une prise en charge trois fois à 1 semaine d’intervalle. En cas d’allergie
Le traitement du ou des partenaires est assuré par spécifique. avérée à la pénicilline, on pourra recourir à la
un dérivé hymidasolé en traitement court Le diagnostic repose essentiellement sur des tétracycline (deux fois 1 g/j) ou à la doxycycline
(tableau III). examens biopsiques. (deux fois 100 mg/j) pendant 15 jours [2].

3
3-1190 - Suspicion d’infection génitale basse


délicate. Les MST constituent un véritable enjeu de différentes MST. Seule une action d’envergure
Conclusion santé publique. Une politique de prévention doit permettra d’éviter la propagation de l’infection à de
associer une meilleure information du public, et en nouveaux partenaires et la survenue de
complications sous forme d’infections génitales
particulier des jeunes (rapports sexuels protégés,
Les infections génitales basses d’origine hautes. Il reste à espérer que les études actuelles sur
sexuellement transmissibles sont fréquentes et reconnaissance des signes précoces d’infection) à différents modèles de vaccin (vis-à-vis de Chlamydia
variées. Plusieurs MST peuvent être présentes une sensibilisation du corps médical qui saura ainsi trachomatis, HSV2, Papillomavirus...) aboutiront et
concomitamment, rendant la prise en charge plus mieux reconnaître et traiter de façon adaptée les permettront une véritable action de prévention.

Philippe Judlin : Professeur de gynécologie-obstétrique,


clinique universitaire de gynécologie-obstétrique de la maternité régionale de Nancy, 10, rue du Docteur-Heidenreich, BP 4213, 54042 Nancy cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : P Judlin. Suspicion d’infection génitale basse.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1190, 1998, 4 p

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(Chicago, USA), 1991

4
3-1191

3-1191

Suspicion d’infection génitale


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

haute
P Judlin

M ême si les salpingites diminuent, elles gardent toute leur gravité, de part les séquelles pelviennes irréversibles
induites. Mieux connaître leur nouvelle présentation clinique permet d’espérer voir baisser l’incidence de
l’infertilité.
© Elsevier, Paris.


‚ Autres diagnostiques
Introduction Tableau I. – Fréquence des signes fonctionnels
d’IGH relevés dans plusieurs études. De très nombreux diagnostics différentiels
peuvent être envisagés. Les principaux sont :
Les infections génitales hautes (IGH) se définissent Signes fonctionnels Fréquence (%) – les endocervicites isolées ;
comme les infections utérines et/ou annexielles Douleurs sus-pubiennes 80 à 98 – une grossesse extra-utérine, qui est évoquée
d’origine bactérienne. Leur fréquence a nettement dans un contexte de retard ou de troubles du cycle
Douleurs unilatérales 25 à 35
diminué en France, ces dernières années, du fait de menstruel. Un test plasmatique de β-hCG (human
l’incidence en baisse des principales maladies Leucorrhées 48 à 64 chorionic gonadotrophin) permettra d’éliminer
sexuellement transmissibles (MST), mais elles n’ont Métrorragies 35 à 44 rapidement cette hypothèse ;
cependant pas disparu, en particulier chez les jeunes – d’autres affections génitales douloureuses, qui
filles et les jeunes femmes. La symptomatologie a, Fièvre > 38 °C 17 à 48 peuvent naturellement être évoquées, en particulier
quant à elle, bien changé : les deux tiers environ des une endométriose pelvienne ;
IGH sont à présent totalement asymptomatiques [7]. – des pathologies digestives (appendicite,
Quand des signes fonctionnels ou cliniques existent, Tableau II. – Principaux signes d’infection sigmoïdite, colopathie fonctionnelle...), qui peuvent
ils sont généralement peu bruyants, voire trompeurs,
génitale haute à l’examen clinique. donner une symptomatologie semblable.
rendant le diagnostic difficile. Enfin, les salpingites Palpation abdominale sensible ou douloureuse Le recours à des investigations complémentaires
gardent toute leur gravité en raison de la possibilité est donc nécessaire pour confirmer le diagnostic
de survenue de complications aiguës et surtout de Au spéculum d’IGH.
Leucorrhées ou métrorragies issues du col utérin
séquelles pelviennes irréversibles [1]. Présence d’une endocervicite ‚ Examens complémentaires non invasifs
Toucher vaginal Seule la bactériologie est réellement


Douleurs à la palpation et la mobilisation utérine
Diagnostic positif (forme indispensable. Le tableau III regroupe les
Douleurs annexielles uni- ou bilatérales
non compliquée) ± infiltration et/ou empâtement annexiel pathogènes le plus fréquemment retrouvés dans les
IGH à l’heure actuelle [3].
‚ Signes fonctionnels Fait important, les IGH sont fréquemment des
défense ni contracture, l’examen au spéculum infections polymicrobiennes associant plusieurs
Ils sont dominés par les douleurs pelviennes. trouve souvent une endocervicite associée, micro-organismes aérobies ou anaérobies :
Celles-ci peuvent prendre de multiples aspects, tant responsable de leucorrhées. Elle se caractérise par immunofluorescence ou culture cellulaire, recherche
dans leur intensité que dans leur localisation un endocol inflammatoire, fragile, saignant des germes banals et de gonocoque (tableau IV).
(tableau I). Elles sont volontiers peu intenses. Des facilement au simple contact. L’endocervicite est le Chlamydia trachomatis, pathogène sexuellement
pertes d’origine utérine sont également fréquentes. Il point de départ habituel de l’IGH. Au toucher vaginal, transmissible, est souvent en cause, notamment
s’agit le plus souvent de leucorrhées, mais celles-ci on constate un utérus douloureux à la palpation et chez les jeunes filles et les jeunes femmes. Son
peuvent être remplacées par des métrorragies et/ou surtout à la mobilisation. Il existe fréquemment, en incidence est en particulier très élevée dans la
des troubles du cycle. En revanche, les signes outre, une douleur provoquée à la palpation population des moins de 18 ans. Les techniques de
généraux infectieux tels que fièvre et altération de annexielle, uni- ou bilatérale, qui peut être associée à mise en évidence les plus adaptées sont les
l’état général ne s’observent habituellement pas une infiltration et/ou un empâtement annexiel. Dans techniques d’amplification génique (PCR
dans les IGH non compliquées. ces formes non compliquées, il n’existe pas de
© Elsevier, Paris

[polymerase chain reaction] ou liquide céphalora-


masse annexielle. Le tableau II résume les principaux chidien [LCR]) ou à défaut l’immunofluorescence [6].
‚ Examen clinique signes de l’examen clinique. Les entérobactéries sont dominées par Escherichia
L’état général est normal, la palpation Au total, l’examen clinique est rarement très coli qui sont assez souvent devenus résistants aux
abdominale est sensible, voire douloureuse, sans concluant. dérivés de la pénicilline. Les anaérobies sont

1
3-1191 - Suspicion d’infection génitale haute

‚ Passage à la chronicité
Tableau III. – Pathogènes le plus fréquemment isolés dans les infections génitales hautes.
Dans un nombre limité de cas, l’infection tubaire
Fréquence va persister, avec ou sans manifestation clinique. Le
Chlamydia trachomatis 5 à 25 % risque de séquelles pelviennes irréversibles est alors
Entérobactéries (Escherichia coli, Proteus...) 20 à 30 % particulièrement élevé.
Anaérobies 5 à 50 %
Autres aérobies (staphylocoques, streptocoques...) 10 à 35 %
Gonocoques <5% ‚ Séquelles pelviennes
Générées par des phénomènes immunoaller-
giques déclenchés lors de l’infestation tubaire, ces
Tableau IV. – Prélèvements bactériologiques en cas de suspicion d’infections génitales hautes. lésions pelviennes sont irréversibles. La réaction
immunitaire locale va en effet entraîner une
Prélèvements endocervicaux Recherche germes banals
Recherche Chlamydia trachomatis destruction cellulaire et une transformation
Recherche gonocoque sclérofibrineuse définitive des tissus [2]. Cela se traduit
au niveau tubaire par des obstructions, mais surtout
Sérologie IgG anti-Chlamydia trachomatis
VHC par des destructions pariétales plus ou moins
HBs complètes, et au niveau pelvien par des adhérences.
VIH L’ensemble de ces lésions peut avoir comme
conséquences : une grossesse extra-utérine, une
VHC : virus de l’hépatite C ; VIH : virus de l’immunodéficience humaine. stérilité et des douleurs pelviennes chroniques.

fréquemment en cause dans les IGH, bien qu’ils intrapelviens et si nécessaire de réaliser un geste


soient très difficiles à mettre en évidence. En chirurgical à minima (salpingo-ovariolysis
revanche, la fréquence du gonocoque a très atraumatique). Elle peut éventuellement être Prise en charge thérapeutique
fortement régressé. Quant aux mycoplasmes effectuée en ambulatoire, surtout si l’on a recours
(Ureaplasma urealyticum et Mycoplasma hominis), aux nouvelles techniques de microlaparoscopie. À
transmissibles par voie sexuelle, leur rôle pathogène chaque fois que le diagnostic d’IGH n’est pas évident, ‚ Principes thérapeutiques
direct est toujours discuté. En cas de suspicion de la cœlioscopie est indispensable, préalablement à
MST, des prélèvements vulvo-urétraux pourront tout traitement, comme le résume l’arbre décisionnel Le traitement peut être réalisé en ambulatoire, à
être effectués, ainsi que des prélèvements chez le ou (fig 1). domicile, mais le repos est indispensable. Compte
les partenaires. tenu des difficultés à isoler tous les pathogènes, il est
Les études sérologiques ont un intérêt limité pour nécessaire d’avoir recours à un traitement
affirmer le caractère actuel de l’infection. Le dosage
des immunoglobulines (Ig)G anti-Chlamydia
trachomatis, s’il trouve un taux moyen (entre le 1/64
et 1/128) traduit une cicatrice sérologique qui peut

Évolution

‚ Complications aiguës [5]


probabiliste actif vis-à-vis des principaux pathogènes
attendus. Le traitement doit être assez long
(3 semaines en moyenne), accompagné d’une
surveillance clinicobiologique qui devra se
être ancienne. Les IgG peuvent être en revanche poursuivre plusieurs mois après la fin du traitement.
Des complications peuvent apparaître, soit
négatifs en cas d’infection très récente. Leur
apparemment d’emblée, soit après quelques
positivation à deux prélèvements à 15 jours ‚ Protocoles antibiotiques [4]
semaines d’évolution. Les principales sont les abcès
d’intervalle, permet seule d’affirmer le caractère
pelviens (pyosalpinx et abcès ovarien principa- D’innombrables protocoles antibiotiques ont été
actuel de l’infection. La présence simultanée de
lement) et la pelvipéritonite. Le traitement sera alors proposés. Nous n’en retiendrons qu’un certain
plusieurs MST n’étant pas exceptionnelle, il est
médicochirurgical, combinant une antibiothérapie nombre (tableau V) qui paraissent adaptés au
d’autre part logique de proposer que soient réalisées
prolongée par voie parentérale à un traitement traitement actuel en ambulatoire, tous associés à un
les sérologies du virus de l’hépatite C, de l’antigène
cœliochirurgical destiné à mettre à plat l’abcès anti-Chlamydia efficace (cycline, macrolide,
HBs et du virus de l’immunodéficience humaine.
pelvien. fluoroquinolone de type ofloxacine [Oflocett] ou un
Le bilan sanguin inflammatoire n’a, pour sa part,
que très peu d’intérêt, car les anomalies sont
inconstantes. 1 Arbre décisionnel de
L’échographie pelvienne ne fait habituellement prise en charge des infec-
Suspicion clinique d'IGH
pas le diagnostic direct de l’infection. Elle n’est tions génitales hautes.
éventuellement utile que pour éliminer une autre IGH : infections génitales
pathologie pelvienne ou rechercher un abcès
hautes.
Prélèvement bactériologique endocrinien
pelvien compliquant une IGH.

‚ Cœlioscopie
Diagnostic certain Diagnostic incertain ou forme compliquée
Elle est souvent indispensable pour confirmer le
diagnostic d’IGH. Il s’agit cependant d’une
exploration chirurgicale qui n’est pas dénuée de Cœlioscopie
risques opératoires et anesthésiques. Elle confirmera
l’existence d’une salpingite (remaniements tubaires :
trompes inflammatoires, congestives, œdématiées Diagnostic négatif Diagnostic confirmé
et éventuellement obturées ; lésions pelviennes :
adhérences annexielles, pseudokystes périto-
néaux...) mais pourra être normale en cas Antibiothérapie Antibiothérapie
d’endométrite isolée. Elle permet, en outre,
d’effectuer des prélèvements bactériologiques

2
Suspicion d’infection génitale haute - 3-1191

trachomatis, l’azithromycine (Zithromaxt : 2 g/j en


Tableau V. – Protocoles antibiotiques utilisables pour le traitement ambulatoire des infections gé- une prise unique) s’avère particulièrement adaptée à
nitales hautes non compliquées.
cette indication. On conseillera de plus les rapports
Anti-Chlamydia Autres antibiotiques sexuels protégés pendant plusieurs mois.

– Cycline (par exemple : Doxyt – Amoxicilline - acide clavulanique (Augmentint ou Ciblort 2 g/j)
2 x 100 mg/j
– Ofloxacine (Oflocett 2 x 100 mg/j) – Céfotétan (Apaceft 2 x 1 g/j IM) ou céfoxitine (Méfoxint
3-6 g/j IM)
– Pristinamycine (Pyostacinet 500 2 g/j)
– Clindamycine (Dalacinet 1,2 g/j)

Conclusion et prévention

Tous les traitements sont, sauf précision, par voie orale. IM : intramusculaire.
Les IGH actuelles sont volontiers paucisymptoma-
tiques, ce qui rend leur diagnostic particulièrement
autre antibiotique qui peut être soit un dérivé d’associer à l’antibiothérapie un anti-inflammatoire difficile, légitimant souvent la réalisation d’une
pénicilline [amoxicilline-acide clavulanique, non stéroïdien en début de traitement. cœlioscopie. Compte tenu du caractère volontiers
Augmentint ou Ciblort : 2 g/j], soit une Traitement cœliochirurgical des lésions polymicrobien de ces infections, une antibiothérapie
céphalosporine à large spectre injectable [céfotétan, pelviennes : un traitement limité des lésions à spectre large, prescrite de façon prolongée, sera
Apaceft : 2 x 1 g/j en intramusculaire]), ou à la pelviennes peut être effectué immédiatement dès la nécessaire pour limiter au maximum le risque de
pristinamycine (Pyostacinet : 2 g/j) ou à la cœlioscopie diagnostique. Cependant, en cas de séquelles pelviennes irréversibles, sources de stérilité
clindamycine (Dalacinet : 1,2 g/j). lésions tubopelviennes responsables d’une infertilité, et de grossesses extra-utérines. Les IGH concernent
le traitement chirurgical complet ne peut particulièrement les jeunes filles et les très jeunes
‚ Autres mesures thérapeutiques raisonnablement s’envisager que plusieurs mois femmes et il serait nécessaire de mettre en place une
Anti-inflammatoires : compte tenu du caractère après la fin complète du traitement médical. véritable politique de dépistage de Chlamydia
inflammatoire des lésions pelviennes, en particulier Traitement du ou des partenaires : un traitement trachomatis, en milieu scolaire notamment, grâce
en cas de Chlamydia trachomatis, il est logique sera systématique en cas d’infection à Chlamydia aux nouvelles méthodes de screening urinaire.

Philippe Judlin : Professeur de gynécologie-obstétrique,


clinique universitaire de gynécologie-obstétrique de la maternité régionale de Nancy, 10, rue du Docteur-Heidenreich, BP 4213, 54042 Nancy cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : P Judlin. Suspicion d’infection génitale haute.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1191, 1999, 3 p

Références

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3
3-1360

3-1360
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Urgences au cours de la grossesse

A Batallan, JL Benifla, P Madelenat


Introduction

Les urgences au cours de la grossesse englobent


Tableau I. – Épidémiologie de l’hypertension
artérielle gravidique et de ses complications.

HTA gravidique
Tableau II. – Indications actuelles du dépis-
tage des populations à risque par l’étude du
doppler utérin au deuxième trimestre.

surtout un éventail de pathologies obstétricales, Doppler utérin


10 à 15 % des grossesses
médicales et chirurgicales, qui seront développées 70 % des cas : HTA gravidique simple Intérêt au 2e trimestre (18-24 SA)
dans ce chapitre de façon non exhaustive. Parmi 20 % des cas : Prééclampsie
elles, c’est la notion d’urgence qu’il convient de 30 à 40 % de retards de croissance intra-utérin Population à haut risque (10 à 20 % des patientes)
cerner en fonction du terme de la grossesse, afin de (RCIU) RCIU
ne pas méconnaître un certain nombre de
Utilité clinique à sa
Prééclampsie HTA gravidique
réalisation systématique
diagnostics dont le retard à la prise en charge Prééclampsie
(HTA + protéinurie + œdème) VPN élevée > 95 %
pourrait être préjudiciable pour la mère et/ou pour le MFIU
fœtus. L’hypertension artérielle (HTA) gravidique, les 2 % des grossesses
90 % des cas : primipares ?
hémorragies antépartum et l’infection représentent Population à bas risque Non recommandé
6 % des cas : révélation par une complication
les principales causes de mortalité maternelle. actuellement
Le deuxième et le troisième trimestres de la Complications
grossesse représentent une période de bien-être et Éclampsie (1/1000) SA : semaine d’aménorrhée ; HTA : hypertension artérielle ; RCIU : retard
de croissance intra-utérin ; MFIU : mort fœtale in utero.
de plénitude pour la femme enceinte. C’est HELLP syndrome (10 à 15 %)
également une période où le fœtus devient un - œdème aigu du poumon
patient. Alors que les premiers mouvements actifs - insuffısance rénale aiguë préférée, avec l’utilisation de l’Aldomett. Une
sont ressentis par la patiente entre 18 et 21 - accident vasculaire cérébral bithérapie peut être par la suite nécessaire, et mise
semaines d’aménorrhée (SA), il apparaît aujourd’hui - hématome sous-capsulaire du foie en route en milieu obstétrical en cas d’instabilité
inacceptable de perdre un enfant après 29 ou 30 SA. RCIU tensionnelle malgré le traitement et le repos. Ce
Hématome rétroplacentaire (HRP) (2,5/1000) traitement a pour but de prévenir les complications
En effet, au deuxième trimestre de la grossesse, le
Mort fœtale in utero (MFIU) maternelles cardiaques et neurologiques liées à
taux de survie périnatale est de 30 % à 24 SA, dont Souffrance fœtale aiguë (SFA)
un quart présentera un handicap majeur, alors qu’il l’HTA. Sa mise en route doit être progressive et
est de plus de 95 % après 30 SA. C’est dire modérée, sans à-coups. La surveillance
HTA : hypertension artérielle.
l’importance qu’il faut accorder à certains signes échographique doit être renforcée afin de
d’alerte survenant durant cette période : tension rechercher l’apparition d’un RCIU, et doit
artérielle limite et HTA débutante, apparition de retard de croissance intra-utérin (RCIU) et de mort comporter l’étude des dopplers (ombilical et utérin).
métrorragies antépartum, modifications cervicales et fœtale in utero (MFIU). Le HELLP syndrome L’altération du doppler ombilical est le témoin d’une
menace de fausse couche tardive (FCT), perte de représente une entité clinique particulière de la souffrance fœtale chronique. L’altération du doppler
liquide amniotique (LA), syndrome fébrile, et prééclampsie, associant une hémolyse, une cytolyse utérin est le témoin d’un défaut de perfusion
syndrome abdominal aigu (urgences chirurgicales). hépatique et une thrombopénie. placentaire. Réalisée au deuxième trimestre de la
grossesse, l’étude des dopplers utérins représente un
moyen de dépistage des patientes à risque, dans
Bilan standard d’une HTA au cours de


Tension artérielle limite une population ciblée (HTA gravidique,
la grossesse prééclampsie, RCIU) (tableau II). L’aspirine à faibles
et hypertension artérielle
débutante ✔ Numération formule sanguine doses (100 mg/j) est actuellement considéré
(NFS) et plaquettaire. comme un traitement préventif, surtout vis-à-vis du
L’HTA au cours de la grossesse est définie par des ✔ Albuminurie. RCIU, chez des patientes à risque (antécédents de
chiffres de pression artérielle supérieurs ou égaux à ✔ Dosage des ASAT (aspartate- RCIU, de prééclampsie, de MFIU, et d’HRP). Ce
140/90 mmHg mesurés au repos, à deux reprises et aminotransférases) et ALAT traitement est habituellement débuté à la fin du
à 6 heures d’intervalle. Il n’y a pratiquement jamais premier trimestre (entre 12 et 16 SA), et arrêté vers
(alanine-aminotransférases).
d’indication à une hospitalisation en urgence avant 36 ou 37 SA.
20 SA.
✔ Uricémie.
– L’hospitalisation en urgence (tableau III) est
Il peut s’agir d’une HTA antérieure à la grossesse, ✔ Ionogramme sanguin, indiquée essentiellement en cas de protéinurie, de
ou d’une HTA induite par la grossesse (on parle alors créatininémie. signes fonctionnels associés, témoins de gravité
de toxémie gravidique) (tableau I). La toxémie ✔ Échographie obstétricale avec (céphalées, obnubilation, hyperréflexivité rotulienne,
gravidique fait intervenir des lésions d’ischémies dopplers ombilical et utérin au douleurs épigastriques), de PAD supérieure à
placentaires déjà constituées dès la fin du premier deuxième trimestre. 110 mmHg, de diminution des mouvements actifs
trimestre de la grossesse (entre 8 et 12 SA), mais fœtaux, de l’existence d’un RCIU, d’un doppler
dont les manifestations cliniques sont inéluctables, ombilical nul et/ou de métrorragies devant faire
retardées, et apparaissent le plus souvent aux ‚ Conduite à tenir suspecter un HRP.
© Elsevier, Paris

deuxième et troisième trimestres. Ainsi, l’apparition – Si la pression artérielle diastolique (PAD) est L’évaluation du retentissement fœtal de l’HTA et
d’une protéinurie représente un facteur de gravité supérieure ou égale à 90 mmHg à plusieurs reprises, la surveillance fœtale font appel cliniquement à la
et définit la prééclampsie. Cette dernière exposera malgré le repos (arrêt de travail obligatoire), il est mesure de la hauteur utérine et à la prise en compte
alors aux risques vitaux d’éclampsie, de HELLP légitime de mettre en route un traitement des mouvements actifs fœtaux. L’échographie
syndrome, d’hématome rétroplacentaire (HRP), de antihypertenseur. Une monothérapie sera d’abord obstétricale, avec biométrie fœtale, dopplers utérin

1
3-1360 - Urgences au cours de la grossesse

Tableau III. – Indications de l’hospitalisation Tableau IV. – Étiologies des métrorragies ante Les facteurs de risque sont
en milieu obstétrical en cas d’HTA. partum chez la femme enceinte.
essentiellement l’antécédent de PP, les
Protéinurie Éliminer d’abord une étiologie cervicale cicatrices utérines, les malformations
Pression artérielle diastolique (PAD) > à 110 mmHg Ectropion utérines, la grande multiparité et les
Signes fonctionnels d’HTA Polype accouché par le Frottis cervicovaginal grossesses gémellaires.
- Céphalée col recommandé au premier
- Obnubilation Cervicite trimestre
- Hyperreflexivité rotulienne Cancer du col L’examen clinique montre un utérus souple,
- Barre épigastrique parfois contractile, mais ayant un bon relâchement
Existence d’un RCIU Placenta praevia
Menace de fausse couche tardive utérin et les métrorragies sont de sang rouge. Les
Doppler ombilical nul
Accouchement prématuré signes de toxémie gravidique sont absents (pression
Signes évocateurs d’HRP
- Diminution des mouvements actifs Mort fœtale in utero artérielle normale, pas d’œdèmes ni de protéinurie).
- Métrorragie Hématome rétroplacentaire La présentation fœtale est souvent haute ou
- Hypertonie utérine Rupture utérine considérée comme dystocique (siège, transverse). Un
Thrombopénie < à 100 000/mm3 Grossesse extra-utérine décollement placentaire est parfois associé, dans
± Hyperuricémie > à 60 mg/L (360 µmol/L) Môle hydatiforme 10 % des cas. L’échographie par voies abdominale
et endovaginale permet de confirmer le diagnostic et
HTA : hypertension artérielle ; RCIU : retard de croissance intra-utérin ; particulier la GEU interstitielle ou la GEU le type de PP.
HRP : hématome rétroplacentaire. hétérotopique, représente une éventualité La mortalité périnatale est principalement due
exceptionnelle à laquelle il faut penser devant une aux hémorragies fœtomaternelles, à la prématurité
et ombilical (voire cérébral), ainsi que le monitoring métrorragie associée à des douleurs pelviennes, spontanée ou iatrogène, aux RCIU, et aux
cardiaque fœtal pluriquotidien, constituent des surtout dans un contexte de fécondation in vitro. procidences du cordon qui sont plus fréquents dans
paramètres essentiels de surveillance et de décision ‚ Localisation praevia du placenta cette situation. Les risques maternels sont surtout liés
éventuelle d’extraction fœtale. En milieu obstétrical, à l’existence de placenta accreta, voire percreta, en
Le placenta praevia (PP) est défini par son
une maturation pulmonaire fœtale est généra- particulier chez les patientes porteuses d’utérus
insertion basse, en général sur le segment inférieur
lement débutée dès 26 SA, par des cures cicatriciels, et aux conséquences de l’anémie
de l’utérus, et selon sa situation par rapport à l’orifice
hebdomadaires de corticoïdes (Celesténet chronique : infections et complications
interne (OI) du col, on distingue plusieurs types. Les
sous-cutané, 6 mg matin et soir, pendant 48 heures). thromboemboliques péripartum.
placentas bas insérés (types I et II selon la
– L’HTA grave (PAD supérieure à 200 mmHg,
classification échographique de R Bessis) au
constante malgré une thérapeutique d’urgence Conduite à tenir (fig 1)
deuxième trimestre, sont susceptibles de provoquer
antihypertensive) survenant de façon exception-
quelques métrorragies sans gravité, mais – En présence d’une hémorragie de moyenne
nelle, impose une interruption de la grossesse sans
généralement « remontent » au troisième trimestre. abondance, sans retentissement maternel ni fœtal,
délai.
En revanche, les PP symptomatiques (types III et IV), le traitement fait appel au repos associé à une
encore appelés PP recouvrants, imposent à chaque tocolyse en cas de contractions utérines, et à une


épisode une hospitalisation en urgence : « qui a supplémentation martiale. Les transfusions
Métrorragies ante partum saigné, saignera ! ». maternelles ne sont indiquées qu’en cas de

1 Conduite à tenir obsté-


Elles surviennent généralement au-delà de 20 SA Hospitalisation
tricale en cas d’hémorra-
Évaluation de l'abondance de l'hémorragie
et sont rencontrées dans 2 à 4 % des grossesses. gie ante partum : placenta
Vérifier la vitalité fœtale (activité cardiaque [AC])
Devant toute métrorragie de la grossesse Pose d'une voie veineuse et traitement symptomatique praevia et hématome rétro-
(tableau IV) il faut, dans un premier temps, évaluer Recherche d'anomalies biologiques de l'hémostase placentaire.
l’abondance du saignement et éliminer une origine
cervicale : ectropion, lésion maligne cervicale
(situation rare). En général, ce type d’hémorragies Placenta praevia (PP) Hématome rétroplacentaire (HRP)
Saignement abondant Saignement peu abondant
est très fréquent chez la femme enceinte au Sang rouge Sang noir
deuxième trimestre, et survient le lendemain d’un Utérus souple Contracture utérine
rapport sexuel. En dehors de cette situation, il faut Pas d'hypertension artérielle Hypertension artérielle
évaluer le retentissement maternel (pouls, tension Pas de protéinurie Protéinurie
artérielle, signes de choc), s’abstenir du toucher
vaginal, et mettre en œuvre une hospitalisation en
urgence quelle que soit l’abondance de
l’hémorragie. L’examen clinique, en particulier le < 36 SA > 36 SA AC négative AC positive
palper utérin, l’auscultation des bruits cardiaques
fœtaux, et l’aspect des métrorragies permettent une
orientation diagnostique qui sera confirmée en
milieu obstétrical par une échographie indispen-
sable. L’examen prudent au spéculum met en
Déclenchement Césarienne
évidence un saignement d’origine endocervicale. Tocolyse
Plusieurs facteurs sont susceptibles de favoriser
des métrorragies durant cette période : contractions
utérines (menace de FCT, menace d’accouchement
prématuré [MAP], perte de LA), rupture prématurée PP recouvrant PP non recouvrant
des membranes (RPMb), modification cervicale,
localisation praevia du placenta, HRP, rupture
utérine. Ces trois dernières représentent les étiologies
Césarienne Voie basse licite
d’urgence les plus fréquentes qui peuvent mettre en
Présentation céphalique
jeu le pronostic vital maternel. Membranes accessibles
Au tout début du deuxième trimestre de la Travail spontané
grossesse, la grossesse extra-utérine (GEU), en

2
Urgences au cours de la grossesse - 3-1360

mauvaise tolérance à l’anémie associée travail amenant à une évacuation utérine par voie facteurs de risque ont également été décrits :
généralement à un taux d’hémoglobine inférieure à basse peut être envisagé sous couvert d’une hypoplasies utérine chez les patientes de mères
7 g. La prophylaxie de l’immunisation Rhésus sera dilatation cervicale rapide et d’une surveillance traitées par Distilbènet pendant la grossesse,
systématiquement réalisée chez toutes les patientes régulière de l’hémostase au cours du travail. antécédents de curetages endo-utérins répétés,
à Rhésus négatif. Une maturation pulmonaire fœtale L’existence de troubles majeurs de l’hémostase amputation du col, conisation chirurgicale, existence
est généralement débutée, pour toute hospitali- impose une extraction fœtale par hystérotomie sans de malformations utérines.
sation jusqu’à 34 SA, par des cures hebdomadaires délai, même en cas de mort fœtale.
de corticoïdes (Célestènet sous-cutané, 6 mg matin – Si le fœtus est vivant et estimé viable (plus de ‚ Conduite à tenir
et soir, pendant 48 heures). 23-30 SA), l’extraction par césarienne doit être – Le cerclage préventif du col utérin, généra-
– Une extraction fœtale en urgence par réalisée en extrême urgence. Le risque d’atonie lement effectué vers 14 SA, a prouvé aujourd’hui son
césarienne ne sera guidée que par l’existence d’une utérine par inertie est particulièrement important du efficacité dans le traitement préventif de la FCT sur
souffrance fœtale aiguë et/ou la persistance d’une fait des troubles de la coagulation souvent associés. une population ciblée (antécédent de FCT à
hémorragie abondante avec retentissement La ligature des artères hypogastriques sera réalisée répétition, antécédent d’accouchement prématuré
maternel malgré le traitement symptomatique. en cas d’hémorragie peropératoire, après échec des sévère à moins de 32 SA à répétition, béance
– À proximité du terme, c’est le type de PP qui thérapeutiques utérotoniques (ocytociques, cervico-isthmique prouvée à l’hystérosalpingo-
conditionnera la voie d’accouchement. Schémati- analogues des prostaglandines, en l’absence de graphie et/ou à l’hystéroscopie). La technique de
quement, en cas de PP recouvrant, la césarienne est contre-indications). L’hystérectomie d’hémostase cerclage généralement utilisée en France est celle
systématique et doit être programmée vers 37-38 subtotale est décidée en dernier recours, quand la d’un faufilage du col par un fil non résorbable
SA. ligature artérielle a échoué. (technique de Mac Donald). Une prévention de
– En cas de placenta bas inséré non recouvrant, l’immunisation Rhésus anti-D sera systématique. Le
l’accessibilité des membranes à une rupture ‚ Rupture utérine décerclage doit être réalisé à 37 SA.
artificielle va conditionner les possibilités Par définition, il s’agit d’une déchirure de la paroi – Cependant, de nombreuses patientes enceintes
d’accouchement par voie basse. L’effet compressif utérine au niveau du corps ou du segment n’ont jamais eu d’exploration de leur cavité utérine
de la présentation permet, dans ce cas, d’arrêter les inférieur, pouvant survenir soit pendant la grossesse en dehors de leur grossesse, malgré l’existence
saignements pendant le travail, et peut légitimer un (au troisième trimestre), soit surtout pendant le d’échecs de reproduction (FCT à répétition). C’est dire
accouchement par les voies naturelles. travail. Les cicatrices utérines non obstétricales, après l’importance de la recherche d’une modification
Généralement, cette situation est autorisée chirurgie pelvienne (chirurgie proximale tubaire, cervicale chez ces patientes au deuxième trimestre.
uniquement lorsque la présentation est céphalique. myomectomie, perforation utérine, plastie utérine En dehors d’un contexte infectieux, l’existence d’une
pour malformation), les cicatrices de césarienne modification récente du col (raccourcissement et
‚ Hématome rétroplacentaire (HRP)
(segmentaire transversale et corporéale), la grande ouverture), entre 18 et 24 SA, avec parfois
L’HRP est une grande urgence obstétricale, car il
multiparité, et les malformations utérines (en perméabilité sur tout son trajet et perception de la
met en jeu le pronostic vital à la fois maternel et
particulier les cornes rudimentaires), représentent les présentation, rend licite de réaliser un cerclage de
fœtal, et il évolue toujours vers l’aggravation rapide.
principaux facteurs de risque de rupture utérine. deuxième intention.
Rencontré dans moins de 1 % des grossesses, l’HRP
Exceptionnellement, la rupture utérine survient sur – La constatation au spéculum d’une poche des
correspond à un décollement prématuré du
un utérus sain. eaux intravaginale impose, seule, l’hospitalisation en
placenta, interrompant la circulation mater-
Le tableau clinique évocateur associe, chez une urgence, afin de réaliser, si la grossesse est
nofœtale. Ainsi, il existe un arrêt brutal des échanges
patiente en état de choc, des douleurs abdominales, normalement évolutive, un cerclage de sauvetage
fœtomaternels, entraînant une anoxie fœtale, et le
des métrorragies de sang rouge, et des contours en l’absence de contexte infectieux associé. Un
plus souvent la mort fœtale in utero (dès que la
utérins difficiles à cerner à la palpation abdominale, traitement antibiotique (antibioprophylaxie
surface du décollement placentaire dépasse un tiers
avec la perception d’un utérus atone non contractile. chirurgicale) et tocolytique (anti-inflammatoire non
de la surface d’insertion). Souvent, les HRP de grande
stéroïdien) sera débuté quelques heures avant la
taille retentissent sur l’hémodynamique maternelle, Le pronostic maternel et fœtal (en l’absence de
réalisation du cerclage, et poursuivi quelques jours
et apparaissent rapidement des troubles de MFIU) est lié à la rapidité d’extraction. La
après. En général, il n’apparaît plus légitime de
coagulation. laparotomie doit donc être réalisée en extrême
cercler après 27 SA dans cette situation. D’autre part,
Parmi les différents facteurs de risque, l’HTA urgence. Une fois l’extraction fœtale réalisée, le
une menace de FCT dans un contexte infectieux,
gravidique représente le principal facteur retrouvé traitement conservateur ou radical (hystérectomie
avec fièvre et contractions utérines douloureuses,
dans plus de 50 % des cas. Plus l’HTA est sévère et d’hémostase) sera décidé en fonction du type de
témoin d’une chorioamniotite, impose l’interruption
précoce, plus l’incidence de l’HRP est élevée. Les rupture utérine, des possibilités de réparation
sans délai de la grossesse.
traumatismes abdominaux, la surdistension utérine chirurgicale, et de la parité.
– Dans une série personnelle de 34 patientes
(hydramnios, gémellité), la malnutrition, et la La prévention repose essentiellement sur l’étroite
ayant bénéficié d’un cerclage de deuxième intention
toxicomanie (en particulier la cocaïne), représentent direction du travail chez les patientes porteuses
pour modifications cervicales ou de sauvetage pour
les autres causes décrites d’HRP. d’utérus cicatriciels. Un traitement conservateur
menace de FCT sévère (poche des eaux bombante,
La forme clinique typique associe une douleur après rupture utérine impose obligatoirement une
col effacé inférieur à 6 cm), la survie néonatale
pelvienne de survenue brutale correspondant à une césarienne itérative à la grossesse ultérieure. Dans ce
globale était de 86,5 %, avec une prolongation
contracture utérine permanente, à des métrorragies cas, il est habituellement recommandé d’attendre un
moyenne de la grossesse de 14 semaines.
de sang noir peu abondantes. La palpation délai de 6 mois après une rupture utérine avant
abdominale retrouve un mauvais relâchement d’entreprendre une nouvelle grossesse.


utérin (utérus de bois) chez une patiente présentant
initialement une pression artérielle élevée et une Perte de liquide amniotique
protéinurie. L’hospitalisation en milieu obstétrical est
urgente et indispensable. Le pronostic, tant maternel
que fœtal, sera lié à la rapidité de l’évacuation
utérine.

Modifications cervicales
et menace de fausse couche
tardive (FCT)
La FCT est le principal mode de révélation d’une
Les deux grands risques de la RPMb, surtout avant
26 SA, sont l’hypoplasie pulmonaire qui conduit à la
mort néonatale par hypoxie, et les déformations des
Conduite à tenir (fig 1) béance ou d’une incompétence cervico-isthmique. membres ou de la face dues à la compression fœtale
– L’évaluation du retentissement maternel et de La symptomatologie est souvent muette, sans provoquée par l’oligoanamnios. Ainsi, la quantité de
la vitalité fœtale vont guider la conduite à tenir. contraction utérine, avec quelques métrorragies au LA restante représente le seul facteur pronostique des
L’évacuation utérine décidée en urgence et le deuxième trimestre, aboutissant rapidement à RPMb très précoces. En anamnios complet, le taux de
traitement symptomatique du retentissement l’expulsion d’un fœtus vivant non viable. Des mortalité néonatale est de plus de 90 % dans
maternel seront menés parallèlement. modifications cervicales, associant un raccourcis- certaines séries de RPMb avant 26 SA. Lorsqu’il
– En cas de MFIU, ou en l’absence de viabilité sement et une ouverture du col, représentent donc persiste du LA dans la cavité ovulaire (oligoamnios
fœtale (moins de 23-30 SA), un déclenchement du un signe d’alerte de la menace de FCT. D’autres modéré), ce taux de mortalité n’excède pas 10 %.

3
3-1360 - Urgences au cours de la grossesse

Ainsi, la quantification du LA par échographie, facteur grossesse expliquent les tableaux cliniques et
pronostique de la RPMb précoce, est capitale pour Tableau V. – Étiologies des syndromes fébriles biologiques rencontrés abâtardis ; souvent
envisager une conduite à tenir. chez la femme enceinte. trompeurs, ils sont source d’hésitation, d’erreur
Le diagnostic est le plus souvent posé par diagnostique, et parfois de retard thérapeutique. La
Savoir y penser tou-
l’anamnèse (antécédents répétés de RPMb, Les plus fréquentes gravité de la pathologie sous-jacente et le délai de
jours !
antécédents de curetage endo-utérin, geste invasif prise en charge vont conditionner les pronostics
intraovulaire récent), et l’examen au spéculum met en Infection urinaire ++ Appendicite et Cholé- maternel et fœtal.
évidence un écoulement clair d’origine endocervicale. cystite
Pyélonéphrite ++ Paludisme ++ Si l’appendicite représente la pathologie
En cas de doute, et en l’absence de saignement chirurgicale la plus fréquente au cours de la
Angines Pneumopathie
associé, le test à la diamine oxydase (test au DAO) Listériose (1/1000 ba- Tuberculose grossesse (1 à 2 ‰), son diagnostic est rendu difficile
permet de confirmer le diagnostic. Le toucher vaginal cille à Gram +) Phlébites des membres au-delà du premier trimestre par l’ascension du
est dangereux et inutile, car il augmente le risque inférieurs ++ cæcum, amenant l’appendice au-dessus de la crête
infectieux. L’échographie permet de confirmer
Les risques d’atteinte fœtale iliaque en fin de grossesse. La mortalité fœtale est de
l’existence d’un oligoamnios, mais elle n’exclut pas le
35 % en cas de forme perforée : c’est dire
diagnostic de RPMb si la quantité de LA est normale. Rubéole l’importance d’un diagnostic et d’un traitement
Le décollement placentaire est souvent plus fréquent Toxoplasmose
Cytomégalovirus ++ chirurgical précoces. La pathologie hépatobiliaire
en cas de RPMb. Le délai entre la RPMb et
Parvovirus B19 ++ (cholécystite, lithiase biliaire, pancréatite), les causes
l’accouchement est généralement inversement corrélé
Varicelle gynécologiques (torsion d’annexe, kyste ovarien) en
à l’âge gestationnel. Cependant, le problème majeur
Herpès virus représentent les autres étiologies.
est souvent représenté par la réalité diagnostique de la
perte de LA chez la femme enceinte. Dans la plupart
‚ Conduite à tenir


des cas, il s’agit d’une fuite inconsciente d’urine prise
pour une perte de LA. Dans cette situation, et en Syndrome fébrile L’ensemble des auteurs s’accordent pour
particulier sur le caractère non répétitif de la perte de incriminer l’hésitation diagnostique et le retard
liquide, l’échographie permettra de rassurer. En thérapeutique comme facteurs essentiels de
revanche, dans un contexte postamniocentèse, où le L’hospitalisation est généralement recommandée morbidité et de mortalité maternofœtales. Ainsi,
taux de complications est généralement estimé entre lorsque la fièvre paraît persistante et supérieure à toute suspicion de pathologie chirurgicale au cours
0,5 % et 1 % malgré un opérateur entraîné, toute 38,5 °C, associée à des frissons. Cette hospitalisation de la grossesse impose l’hospitalisation en urgence
perte de liquide doit faire suspecter une rupture ou obligatoire en milieu obstétrical permettra d’éliminer en milieu obstétrical.
une fissuration de la poche des eaux, souvent de bon le diagnostic différentiel grave : la chorioamniotite L’exploration chirurgicale est classiquement
pronostic. ou l’infection ovulaire. Dans cette circonstance, le réalisée par voie laparotomique. Longtemps
syndrome fébrile est toujours associé à des contre-indiquée pour beaucoup aux deuxième et
‚ Conduite à tenir contractions utérines douloureuses, témoins d’un troisième trimestres de la grossesse, en raison du
Toute suspicion de perte de LA impose début du travail. L’évacuation utérine est la seule risque fœtal lié à l’hyperpression abdominale, à
l’hospitalisation en urgence en milieu obstétrical mesure thérapeutique dans ce contexte. l’utilisation du dioxyde de carbone (CO2), et au risque
afin de confirmer ou d’infirmer le diagnostic. Le tableau V représente les autres principales de blessure utérine en cours d’intervention, un
La persistance du LA à l’échographie, en étiologies des syndromes fébriles chez la femme certain nombre d’endoscopies (plus de 200 sans
particulier après amniocentèse est de bon pronostic ; enceinte. L’infection urinaire et la pyélonéphrite aucune complication fœtale et obstétricale) ont
grâce au repos strict avec une surveillance sont les causes les plus fréquemment rencontrées. cependant été rapportées dans ce contexte. Il
échographique régulière, elle permet d’envisager la La listériose, due à un bacille à Gram positif (Listeria semble aujourd’hui que cette technique soit dénuée
prolongation de la grossesse. monocytogenes) est une urgence thérapeutique, car de risques maternofœtaux, à condition de respecter
Dans le cas contraire, quand il existe un elle met en jeu uniquement le pronostic vital fœtal un certain nombre de précautions opératoires.
oligoamnios sévère, voire un anamnios complet, en (MFIU). L’antibiothérapie (ampicilline) commencée
Au-delà de 20 SA, le fond utérin atteint
particulier au deuxième trimestre avant 24-26 SA, avant le résultat des hémocultures, doit être
généralement l’étage mésocolique, et celui-ci est
l’interruption médicale de grossesse (IMG) est prolongée 2 à 3 semaines. D’autres agents
systématiquement repéré en préopératoire à l’aide
malheureusement la seule possibilité à envisager et pathogènes peuvent être responsable de fièvre,
d’un crayon dermographique, éventuellement aidé
à proposer au couple. mais exposent surtout aux embryopathies et aux
par l’échographie abdominale. Le pneumopéritoine
En cas de RPMb au troisième trimestre, les fœtopathies (rubéole, toxoplasmose, cytomégalo-
est crée par l’introduction d’une aiguille de Palmer
principaux risques fœtaux sont représentés par virus, parvovirus B19). D’autres affections faisant
courir un risque maternel doivent systématiquement dans l’hypochondre gauche, sur la ligne
l’immaturité pulmonaire et surtout par l’infection
être recherchées et éliminées : appendicite, médioclaviculaire, à 2 ou 3 cm sous le rebord costal.
ascendante dont les conséquences neurologiques
pneumopathie, phlébite, paludisme. La crise de Le trocart de 10 mm, destiné au laparoscope, est
semblent actuellement bien établies, avec une
paludisme est généralement envisagée chez les alors introduit à mi-chemin entre l’appendice
fréquence accrue de leucomalacies périventricu-
laires. La prise en charge en milieu hospitalier migrantes et chez les patientes revenant récemment xiphoïde et le repère cutané du fond utérin. Les
nécessite la recherche répétée de facteurs infectieux d’une zone d’endémie palustre. autres trocarts sont introduits sous contrôle de la
déclenchants (cytobactériologie urinaire, vaginale, vue, en tenant compte du volume utérin, de la
amniotique), la mise en place d’une antibiothérapie localisation et du type de la pathologie présentée.
prophylactique (amoxicilline), et l’administration Les gestes opératoires endoscopiques sont réalisés


hebdomadaire par voie intramusculaire chez la de façon habituelle, en évitant toute manipulation
Syndrome abdominal aigu utérine. Un enregistrement du rythme cardiaque
mère, de cures de corticoïdes, dont on sait qu’ils (urgences chirurgicales)
diminuent la survenue de maladies des membranes fœtal est réalisé en pré- et postopératoire, ainsi
hyalines, d’entérocolites ulcéronécrosantes, et qu’une tocolyse parentérale par bêtamimétiques.
d’hémorragies périventriculaires. La mise en place Les urgences abdominales chirurgicales au cours Ainsi, devant un syndrome abdominal ou pelvien
d’une tocolyse est généralement indiquée en de la grossesse sont peu fréquentes, estimées entre aigu persistant, chez une femme enceinte, le recours
l’absence de souffrance fœtale et de chorioam- 6 et 8 ‰ grossesses. Dans les deux tiers des cas, la à la cœlioscopie peut paraître justifiée afin ne pas
niotite, dans le but de réaliser un transfert in utero femme enceinte subira une laparotomie pour une méconnaître une pathologie chirurgicale et de
dans un centre comportant à la fois une maternité suspicion d’appendicite. Les modifications de préserver l’évolution obstétricale, grâce à un
et une réanimation néonatale. l’organisme maternel observées au cours de la diagnostic précis et un traitement rapide et adapté.

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Urgences au cours de la grossesse - 3-1360

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Agnès Batallan : Chef de clinique-assistant.


Jean-Louis Benifla : Praticien hospitalier.
Patrick Madelenat : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Service de gynécologie-obstétrique, hôpital Bichat, 170, boulevard Ney, 75018 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : A Batallan, JL Benifla, P Madelenat. Urgences au cours de la grossesse.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1360, 1999, 5 p

5
3-1350

3-1350
AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine

Urgences gynécologiques

C Rongières-Bertrand

L es métrorragies et les douleurs pelviennes dominent les demandes de consultation en urgence en gynécologie.
Bien qu’une approche médicale ou conservatrice soit le plus souvent proposée, la grossesse extra-utérine
(GEU) reste toujours un diagnostic à éliminer. L’amélioration des examens complémentaires et les nouvelles
thérapeutiques permettent en général une approche conservatrice.
© 1999 , Elsevier, Paris.


Introduction

Les urgences gynécologiques sont dominées par


Tableau I. – Facteurs de risque de la grossesse extra-utérine.

Multiplication du risque de
GEU en présence de facteur
Proposition de cas
attribuables au facteur (%)
les métrorragies du premier trimestre de la grossesse Facteurs de risque établis dont le
et les douleurs pelviennes. L’amélioration de l’image rôle causal est confirmé
échographique, la standardisation de certains - Infections pelviennes 5,0 40
examens biologiques et l’apparition de la dont infection à Chlamydiae 5,0 25
cœlioscopie ont bouleversé certaines prises en trachomatis
charge. Nous insisterons sur les principales urgences - Tabagisme
0 à 20 cigarettes 1,5 13
gynécologiques, en prenant soin de conjuguer les
> 20 2,5 7
différentes prises en charge, de décrire les - Chirurgie tubaire 3,0 4
démarches diagnostiques et thérapeutiques, sans - Antécédents de GEU 10,0 10
oublier les problèmes moins fréquents mais - Induction de l’ovulation 4,0 2
néanmoins aigus. par le clomifène
Facteurs de risque associés
à un risque faible et/ou

‚ Grossesse extra-utérine

Métrorragies du premier
trimestre de la grossesse
dont le rôle est discuté
- Douches vaginales
- Antécédents d’appendicectomie
- Âge maternel > 35 ans
1,5
1,5
4,0
-
-
-
- Fausses couches à répétition ≥ 2 2,0 -
- Antécédents d’IVG 1,5 -
Signes cliniques et examens complémentaires
C’est le premier diagnostic à éliminer devant des GEU : grossesse extra-utérine ; IVG : interruption volontaire de grossesse.

métrorragies au premier trimestre de la grossesse.


petit que ne le voudrait l’âge de la gestation. Tout
On appelle GEU l’implantation du blastocyste en La progestérone synthétisée par le corps jaune
peut se voir dans l’association de ces signes, et c’est
dehors de la cavité utérine. La localisation est tubaire dans les 8 premières semaines de la gestation reste
à l’aide des dosages biochimiques et de
dans 95 % des cas. La fréquence des GEU a doublé stable durant cette période et paraît être en rapport
l’échographie que l’on s’orientera, voire que l’on
ou triplé dans la plupart des pays industrialisés au avec l’évolutivité de la grossesse. Un taux supérieur à
confirmera le diagnostic.
cours des 20 dernières années. Les facteurs de risque 25 ng/mL peut exclure une GEU avec une sensibilité
de GEU sont, par ordre décroissant : les antécédents ¶ Dosages biochimiques de 97 %. Lorsque le taux est inférieur à 5 ng/mL, on
d’infections pelviennes hautes, le tabac, les chirurgies Ce sont les β-hCG et la progestéronémie. Le temps peut exclure une grossesse évolutive. C’est quand les
tubaires, les antécédents de GEU et l’induction de de dédoublement, toutes les 48 heures, peut être taux se situent entre 5 et 25 ng/mL que les
l’ovulation par le clomifène (Clomidt) (tableau I). faussement rassurant, mais il est souvent nécessaire conclusions sont plus difficiles. La prise exogène de
Les symptômes cliniques sont variables et parfois d’effectuer deux, voire plusieurs dosages de β-hCG progestérone (Duphastont, Utrogestant), en
trompeurs. Dans 90 % des cas, il existe une douleur pour apprécier l’évolutivité de la grossesse. particulier chez les patientes suivant une induction
pelvienne plus ou moins importante. L’aménorrhée Deux éléments donnés par le dosage des β-hCG de l’ovulation, peut induire une erreur
est présente dans 70 % des cas mais non reconnue sont importants : d’interprétation.
par la patiente du fait de métrorragies. À l’examen – le dosage qualitatif confirme que la patiente est
¶ Échographie
© Elsevier, Paris

clinique, on peut retrouver un abdomen douloureux, enceinte ;


latéralisé vers une fosse iliaque. Au spéculum, les – le dosage quantitatif supérieur à 1 000 UI/L, Elle prend toute sa valeur quand l’échographiste
saignements sont d’origine intra-utérine et le toucher correspond normalement à un âge gestationnel où connaît le doute diagnostique du clinicien et le taux
vaginal peut déclencher ou accentuer une douleur, la performance de l’échographie transvaginale de β -hCG. L’échographiste va rechercher
retrouver une masse latéro-utérine et un utérus plus permet d’identifier un sac gestationnel intra-utérin. successivement cinq points.

1
3-1350 - Urgences gynécologiques

Différentes localisations
Tableau II. – Score indiquant un traitement médical (d’après H Fernandez, C Lelaidier, V Thouve-
nez, R Frydman). Il est des localisations inhabituelles qui présentent
des particularités non pas tant cliniques que
1 2 3 thérapeutiques. Les GEU cornuales (sur moignon
Terme (jours d’aménorrhée) > 49 ≤ 49 ≤ 42 restant), interstitielles (partie intramurale de la
b-hCG mUI/mL ≤ 1 000 ≤ 5 000 > 5 000 trompe) ou angulaires (fond de la corne utérine)
Progestéronémie (ng/mL) ≤5 ≤ 10 > 10 présentent des avantages à être traitées plutôt par
Douleur Nulle Provoquée Spontanée injection in situ de MTX. La chirurgie nécessite
Hématosalpinx (cm) ≤1 ≤3 >3 souvent encore une laparotomie, peut être très
Hémopéritoine (mL) ≤ 10 ≤ 100 > 100
hémorragique et laisse une cicatrice utérine
potentiellement fragile en cas de grossesse
Non-visualisation d’un sac gestationnel intra-utérin élevés (supérieurs à 10 000 UI/L), même chez une ultérieure [1].
Elle prend toute sa valeur quand le taux de β-hCG patiente asymptomatique, d’un important La GEU ovarienne nécessite souvent un
se situe entre 350 et 1 000 UI/L (et plus). hématosalpinx (supérieur ou égal à 4 cm), ou d’une traitement chirurgical avec ovariectomie, au mieux
activité cardiaque de l’embryon repéré, on conseille partielle. Un traitement médical par MTX par voie
Caduque intramusculaire peut être proposé s’il n’existe pas
une cœlioscopie.
Son absence définit son expulsion. Si les taux de d’hémopéritoine.
β -hCG ne décroissent pas, c’est un signe ¶ Traitement chirurgical La GEU abdominale impose une intervention par
pathognomonique de GEU. Si en revanche elle est Il est cœlioscopique, sous anesthésie générale. La
cœlioscopie ou par laparotomie en fonction de
encore présente, des taux de β-hCG persistants laparotomie doit être réservée aujourd’hui aux cas
l’avancement de la grossesse et de son lieu
peuvent aussi signer une grossesse intra-utérine non extrêmes définis par une instabilité hémodyna-
d’insertion ; le risque hémorragique peut être
évolutive mais trop petite pour être vue. mique. La salpingectomie est effectuée en cas de
majeur.
rupture de la trompe, d’un mauvais état de la trompe
Corps jaune Dans tous ces cas difficiles, l’association de MTX
(hydrosalpinx) ou d’un résultat de traitement
Son repérage est important puisque la GEU est par voie intramusculaire peut être proposée comme
conservateur non satisfaisant. Un traitement
presque toujours à son voisinage immédiat. une aide thérapeutique au traitement chirurgical.
conservateur par salpingotomie est utilisé dans les
Enfin, il faut toujours garder à l’esprit, chez des
Masse annexielle anormale autres cas. Il nécessite une surveillance de la
patientes traitées par induction de l’ovulation,
Après repérage du corps jaune, l’analyse de décroissance des β-hCG. Si ceux-ci ne régressent pas
qu’une grossesse hétérotopique peut exister. C’est
l’annexe homolatérale permet le diagnostic d’une selon des courbes préétablies, il faut proposer une
l’association d’une GEU et d’une grossesse
masse à moins de 1 cm de l’ovaire : injection de méthotrexate (MTX) en intramusculaire
intra-utérine. La GEU, souvent non soupçonnée, se
– sac gestationnel typique avec couronne (1 mg/kg).
complique ultérieurement par des symptômes
trophoblastique et lacune centrale, visualisation de la ¶ Traitement médical : le méthotrexate évocateurs de GEU. Le traitement peut être d’emblée
vésicule vitelline voire de l’embryon ; Il est proposé pour des scores inférieurs à 13. Les chirurgical pour une salpingectomie, ne lésant pas la
– masse échogène hétérogène correspondant à taux de réussite sont de 70 % à 90 %. Si le sac grossesse intra-utérine évolutive. On peut aussi
un hématosalpinx. gestationnel est visible, une seule injection de MTX à utiliser, en cas de GEU interstitielle, une injection in
1 mg/kg in situ est admise, sous échographie situ de KCl, préféré au MTX pour des raisons
Hématocèle et hémopéritoine
transvaginale et sans anesthésie préalable. Si le sac évidentes de toxicité potentielle pour l’autre
L’hématocèle est une masse hétérogène à
gestationnel n’est pas visible ou difficilement embryon.
distance de l’ovaire ou en arrière de l’isthme.
accessible, l’injection de MTX se fait en
L’hémopéritoine est souvent minime mais peut
intramusculaire à la dose de 1,5 mg/kg. La ‚ Fausses couches spontanées précoces
devenir un facteur péjoratif s’il est important ou s’il
surveillance de ce traitement se fait par le dosage L’incidence des fausses couches spontanées (FCS)
évolue d’un examen à un autre.
des β-hCG. Les β-hCG s’élèvent d’abord jusqu’à 40 % précoces est de 15 % dans la population générale.
Arbre décisionnel et stratégie thérapeutique [6] de leur taux initial avant de décroître. C’est pourquoi Elle augmente avec l’âge, pouvant aller jusqu’à 50 %
il n’est pas nécessaire de pratiquer un dosage de au-delà de 40 ans. Elle est définie comme un arrêt de
Il est parfois difficile d’avoir un diagnostic précis
β-hCG avant le cinquième jour postinjection. La la grossesse avant 15 semaines d’aménorrhée (SA),
dès la première consultation. Si la patiente est pas ou
décroissance se fait lentement, dès que l’on atteint mais cette datation n’est pas très claire puisque
peu symptomatique et que les taux de β-hCG sont
une diminution des β-hCG de plus de 30 % des taux certains jugent qu’après 10 SA, il s’agit plutôt d’une
faibles, un deuxième dosage de b-hCG, avec une
initiaux ; une surveillance tous les 8 à 10 jours est mort in utero, l’embryogenèse étant terminée (fig 2).
nouvelle échographie, peut permettre un diagnostic,
suffisante jusqu’à la négativation des taux. Le
peut montrer une diminution naturelle des taux de Signes cliniques et examens complémentaires
contrôle échographique est nécessaire en cas de
β-hCG amenant ainsi à proposer une abstention
nouveaux signes cliniques ou de stagnation, voire La symptomatologie est proche de la GEU. Elle est
thérapeutique avec surveillance de la décroissance
d’augmentation des taux de β-hCG. Sinon, il est peu dominée par les métrorragies chez une patiente en
des β-hCG, d’autant que la GEU n’est pas visible à
contributif car la récupération anatomique ne se fait début de grossesse, celle-ci étant le plus souvent au
l’échographie.
pas dans les mêmes temps. Si l’image échogra- courant de sa grossesse. Ces métrorragies restent le
Un score peut être établi pour décider d’une
phique s’est aggravée, les signes cliniques se sont motif principal des consultations en urgence de ces
thérapeutique en fonction de tous les éléments vus
accentués et/ou les taux ne diminuent pas, une patientes très inquiètes. S’associent souvent des
ci-dessus (tableau II).
deuxième injection de MTX en intramusculaire peut douleurs pelviennes d’intensité variable à type de
¶ Cœlioscopie être nécessaire. Il s’agira d’un échec partiel. Un échec contractions, de douleurs de règles. Parfois, la
On décide d’une cœlioscopie d’emblée avec complet sera défini par une cœlioscopie malgré un patiente décrit un arrêt des signes sympathiques de
salpingectomie chez des patientes ayant des traitement médical (5 %). D’après nos derniers grossesse. La FCS peut rester asymptomatique et se
antécédents de GEU et/ou de plastie tubaire sur la résultats, l’injection in situ de MTX permet plus de découvrir lors d’une échographie systématique. Elle
trompe homolatérale. Dans les autres cas, la 90 % de succès. La tolérance au traitement est peut entraîner une hémorragie abondante, voire
cœlioscopie sera indiquée si le score est supérieur à excellente (fig 1). Il faut cependant rappeler que quel cataclysmique, nécessitant une aspiration en
13 ou si la clinique l’emporte, c’est-à-dire l’existence que soit le traitement, la fertilité ultérieure ne dépend urgence surtout si l’œuf reste coincé dans le col.
d’une douleur spontanée violente, de troubles que de l’âge et de l’existence ou non de facteurs La patiente a déjà en sa possession un test de
hémodynamiques. En cas de taux de b-hCG très d’infertilité antérieure à la GEU index. grossesse positif, des β-hCG plasmatiques

2
Urgences gynécologiques - 3-1350

PROGESTÉRONÉMIE β-hCG QUANTITATIFS

Progestéronémie > 25 ng/mL Progestéronémie > 5 ng/mL mais < 26 ng/mL Progestéronémie < 5 ng/mL
ou ou
β-hCG > 100 000 nUI/mL Concentration anormale de β-hCG

GIU évolutive Échographie transvaginale Curetage endo-utérin ambulatoire


ou
Expectative

GIU évolutive Pas de villosité

Diminution des β-hCG β-hCG stables


ou augmentation

GEU Villosités choriales


par le curetage Fausse couche GEU
spontanée

Fausse couche Sac > 4 cm Sac < 4 cm


Sac > 4 cm Sac < 4 cm spontanée

Traitement MTX
Traitement chirurgical
MTX
chirurgical

1 Arbre décisionnel en cas de suspicion de grossesse extra-utérine.


GIU : grossesse intra-utérine ; GEU : grossesse extra-utérine ; MTX : méthotrexate.

d’un embryon sans activité cardiaque, d’un œuf clair


2 Démarches thérapeuti- défini par une couronne trophoblastique sans
Grossesse arrêtée ques en cas de fausse cou-
Œuf clair embryon. L’aspect hypotonique de l’œuf, la
che spontanée précoce.
présence d’une vésicule vitelline trop importante
SA : semaines d’aménor-
rhée. pour le terme, peuvent être des aides au diagnostic.
> 9 SA < 9 SA Il est parfois difficile de conclure en cas d’image
évoquant une grossesse plus jeune que le supposent
les dernières règles et ce d’autant que la patiente a
Exceptionnellement RU 486 ® 3 x 200 mg à j1 des cycles irréguliers. En cas de bilan non concluant,
Cytotec ® 1 à 4 x 200 mg à j3
Antalgiques il est toujours possible de doser les β-hCG au moins
48 heures plus tard et de refaire une échographie
1 semaine après pour juger de l’évolutivité de la
grossesse.
Échographie de contrôle à j8

Thérapeutiques proposées [4]

Rétention Vacuité utérine Le traitement chirurgical par aspiration est


toujours possible. Il est recommandé dans les
grossesses de plus de 9 SA et nécessaire en cas
d’hémorragie abondante. Il est efficace et rapide
ASPIRATION Contraception orale (Ovanon®) 1 mois mais nécessite une anesthésie générale et peut être
Antibiotique 5 jours si métrorragies
source de complications et d’infertilité par les
persistantes
possibles synéchies qu’il entraîne. C’est pourquoi, le
traitement médical est préféré en première
intention. L’association la plus fréquemment
quantitatifs, voire une ancienne échographie L’échographie met en évidence une grossesse retrouvée dans la littérature est le RU 486t
décrivant une grossesse intra-utérine évolutive. intra-utérine. Il peut s’agir d’un œuf avec présence (mifépristone) et le Cytotect (misoprostol).

3
3-1350 - Urgences gynécologiques

Le RU 486t est donné à la dose de 600 mg en Spasfont) et éventuellement un progestatif 400 mg/j) peuvent remplacer les tétracyclines
une prise; soit trois comprimés, puis 48 heures après, (Utrogestant 4 à 6 comprimés/j en intravaginal). Une avantageusement en offrant une action sur des
le misoprostol est donné à la dose de 400 mg surveillance par échographie est recommandée tous bacilles à Gram négatif résistant à l’Augmentint et
renouvelable toutes les 4 à 6 heures, soit deux les 8 à 10 jours, jusqu’à amélioration des signes sur les germes intracellulaires. Mais ils sont source de
comprimés, ou à la dose de 800 mg en une fois, soit cliniques et de l’image échographique. tendinites parfois extensives. Le traitement
quatre comprimés. Le traitement par Cytotect peut antibiotique sera réajusté en fonction des résultats
se donner soit en hospitalisation, soit à domicile. La bactériologiques et sera donné 10 à 15 jours pour
patiente est prévenue des douleurs pelviennes que Dans tous les cas de métrorragies en l’Augmentint et 3 semaines pour les tétracyclines ou
cela entraîne et doit avoir un traitement antalgique cours de grossesse, il est absolument les quinolones. Une mise sous contraceptif oral pour
associé. L’absorption peut être vaginale ou orale. Il nécessaire de connaître le groupe un blocage de l’ovulation permet la mise au repos
est décrit dans la plupart des publications des sanguin et le Rhésus des patientes des ovaires. Cela diminue les réactions
vomissements et des diarrhées, significativement présentant des métrorragies. Une inflammatoires et le risque d’adhérences.
moins importants en cas d’absorption vaginale. Les injection systématique Toute la polémique se situe autour du geste
taux de succès sont de plus de 90 %. L’aspiration est d’immunoglobulines anti-D pour les opératoire. L’indication de la cœlioscopie est
toujours possible en cas de rétention. Il est important patientes Rhésus négatif sera faite. On indiscutable en cas de collection (pyosalpinx, abcès
de ne pas laisser évoluer des expulsions conçoit qu’elle ne soit pas absolument de l’ovaire). Elle permet un drainage-lavage qui,
incomplètes. Pour cela, un suivi échographique nécessaire avant 6 SA. associé au traitement antibiotique, permet la
comportant au moins une échographie à 1 semaine guérison de la patiente. Si la patiente n’est plus en
du traitement paraît obligatoire. La prise en charge âge de procréer et en dehors d’une collection


psychologique, bien que sans dramatisation, doit pelvienne, la cœlioscopie n’est pas indispensable.
être effective. Ces femmes se sentent souvent seules Fièvre et pathologies pelviennes Pour des patientes plus jeunes, l’absence
devant un deuil non reconnu. d’amélioration clinique après 48 heures de
traitement antibiotique nécessite une cœlioscopie.
‚ Môle hydatiforme [8] ‚ Salpingite aiguë et endométrite [9]
C’est une dégénérescence trophoblastique, La salpingite aiguë concerne le plus souvent les
infiltrant le muscle utérin. La majorité des môles est femmes jeunes ayant de multiples partenaires. Il est en revanche important, chez
non embryonnée. L’incidence est de 2,48 pour L’utilisation du préservatif systématique comme toute patiente désirant une grossesse,
1 000 naissances et de 1,84 pour 1 000 grossesses. protection de l’infection du virus de l’immunodéfi- d’effectuer une cœlioscopie de contrôle
Dans 70 % des cas, les patientes présentent des cience humaine (VIH) a permis une régression des à froid (2 à 3 mois après l’épisode)
métrorragies, associées à des kystes lutéaux dans maladies sexuellement transmissibles (MST) dans pour évaluer la qualité tubaire et
15 à 25 % des cas. Ces kystes sont en général son ensemble. Les gestes endo-utérins, en particulier effectuer une adhésiolyse plus ou
volumineux (70 mm de diamètre en moyenne) et dans un bilan d’infertilité (hystérographie, moins importante.
peuvent se compliquer d’une torsion. Classiquement hystéroscopie), peuvent entraîner des infections
l’utérus est plus gros que ne le voudrait le terme. Le parfois graves chez des patientes ayant déjà
Il est formellement contre-indiqué chez ces
dosage de β-hCG très élevé pour le terme théorique développé une infection génitale haute à bas bruit.
patientes de faire ou de refaire une hystérographie
(+ 2 déviations standards) fait suspecter la môle Elle n’existe pas chez la femme vierge, en dehors
pouvant réchauffer une infection ancienne et
hydatiforme. À l’échographie pelvienne, on retrouve de la tuberculose pelvienne qui emprunte la voie
compléter la destruction des trompes déjà
une image échogène hétérogène qui occupe toute la hématogène. Le principal diagnostic différentiel est
endommagées (fig 3) [5].
cavité, en général sans embryon décelable ou sans l’appendicite aiguë.
L’endométrite [3] est, dans ses signes cliniques, peu
activité cardiaque le cas échéant, et qui au doppler Les signes cliniques d’une infection pelvienne
différente de la salpingite. Elle admet une non-
est très vascularisée. haute sont : une fièvre supérieure à 38 °C, une
atteinte ou une atteinte minime des trompes. Elle se
Le traitement est chirurgical par une aspiration douleur pelvienne diffusée à tout le pelvis parfois
rencontre plutôt en post-partum ou en post-abortum
et un curetage doux, au mieux sous échographie, associée à des signes d’irritation péritonéale et il peut
et se traite plutôt par une mono- ou une bithérapie
pour vérifier la vacuité utérine et surveiller le geste s’y associer des métrorragies minimes. À l’examen,
orientée sur des germes banals.
car une perforation est toujours possible sur ce on retrouve des leucorrhées d’aspect sale, prélevées
La présence d’un dispositif intra-utérin (DIU) dans
muscle utérin fragilisé. Le produit de curetage est en vue de recherches bactériologiques (Chlamydiae
toutes ces circonstances impose son retrait.
adressé en anatomopathologie. Le suivi se fait trachomatis, Neisseria gonorrhoeae, germes banals
toutes les semaines jusqu’à négativation des β-hCG le plus souvent bacilles à Gram négatif et ‚ Abcès de l’ovaire
puis tous les mois pendant 1 an. La patiente est mise anaérobies). Le toucher vaginal est douloureux dans
sous contraception efficace. Si les taux stagnent ou son ensemble. L’échographie pelvienne peut C’est une entité plus rare qui souvent fait suite à
remontent (15 % des cas), il faut penser à une môle retrouver du liquide dans le cul-de-sac de Douglas, un geste chirurgical. On en retrouve après ponction
invasive ou à un choriocarcinome. La patiente sera voire des images de collection évoquant un de kyste de l’ovaire ou après ponction de follicules
adressée au spécialiste pour discussion d’une pyosalpinx. Il existe une hyperleucocytose et une en vue d’une fécondation in vitro. Le traitement
chimiothérapie. élévation de la C reactive protein (CRP) et de la associe une bithérapie visant les bacilles à Gram
vitesse de sédimentation (VS). négatif et une cœlioscopie de drainage.
‚ Grossesse intra-utérine évolutive Le traitement est avant tout médical avec une


Les métrorragies au début d’une grossesse biantibiothérapie parentérale dans les formes graves
évolutive sont possibles. Il s’agit le plus souvent de ou simplement per os dans les formes banales. Le Douleurs pelviennes (fig 4)
métrorragies de sang rouge. Elles peuvent être des traitement se base sur les germes les plus
signes avant-coureurs de FCS. À l’échographie, on fréquemment retrouvés avec une pénicilline type
retrouve un œuf tonique avec un embryon et une Augmentint (3 g/j) agissant sur les Cocci à Gram ‚ Nécrobiose aseptique de fibrome
activité cardiaque. Il existe parfois un hématome positif, les bacilles à Gram négatif et les anaérobies,
et torsion de fibrome
visible donnant l’impression d’un décollement et une tétracycline type Vibramycinet (200 mg/j) En dehors de pathologies chroniques
trophoblastique. Le traitement est symptomatique. Il agissant sur les germes intracellulaires type (compression, douleurs, ménorragies) que peuvent
associe le repos allongé et les antispasmodiques Chlamydia et mycoplasme. Les quinolones de entraîner ces fibromes, on peut rencontrer des
(Spasmavérinet suppositoires ou comprimés, troisième génération (Oflocett 200 mg/j, Péflacinet douleurs aiguës nécessitant une prise en charge

4
Urgences gynécologiques - 3-1350

ALGIES PELVIENNES

Fièvre Écoulement cervical purulent


Métrorragies Douleur à la mobilisation utérine : Anamnèse
Pertes vaginales - sensibilité annexielle Facteurs de risque
- masse annexielle

- Prélèvement vaginal BIOLOGIE NFS, CRP, hémocultures


BACTÉRIOLOGIE Sérologie Chlamydiae
- ECBU
β-hCG quantitatifs

ÉCHOGRAPHIE Diagnostic différentiel


(appendicite aiguë)
Diagnostic certain Diagnostic possible

Formes sévères Formes modérées Âge > 38 ans Âge jeune


sans collection Sans désir de grossesse Désir de grossesse
Sans masse pelvienne Masse pelvienne
Récidive

Traitement médical

Pas d'amélioration Cœlioscopie diagnostique


Cœlioscopie thérapeutique Amélioration
(+ thérapeutique)

Poursuite du traitement même si traitement chirurgical avec blocage de l'ovulation


Traitement du ou des partenaires
Contrôle de guérison et bilan tubaire à distance par cœlioscopie

3 Infections génitales hautes : stratégies et schémas thérapeutiques.


ECBU : examen cytobactériologique des urines ; NFS : numération-formule sanguine ; CRP : C reactive protein.

rapide. La nécrobiose en général aseptique de post-partum ou le postabortum, le risque infectieux pédicule lombo-ovarien. Elle peut être diminuée ou
fibromes se rencontre en cas d’ischémie du myome, est majeur, et il faut ajouter de façon systématique accentuée dans différentes positions. Au début, la
ce d’autant qu’il est volumineux ou que la patiente des antibiotiques (Augmentint et/ou aminosides). À patiente est apyrétique, mais une fébricule à 38 °C
est enceinte. Cela engendre une augmentation et un distance de l’épisode, il faudra discuter d’une peut apparaître. Il n’existe pas de métrorragies.
ramollissement du volume du fibrome dus à intervention chirurgicale (myomectomie ou L’examen clinique est paradoxalement pauvre par
l’œdème inflammatoire réactionnel et à la nécrose. hystérectomie), à décider en fonction de l’âge de la rapport à l’importance de la douleur. L’abdomen est
La douleur est violente, aiguë, s’associant à une patiente et de son désir de grossesse. souple à la palpation. Au toucher vaginal, on peut
fièvre pouvant aller jusqu’à 39 °C et des La torsion d’un myome sous-séreux pédiculé retrouver une douleur exquise. Après élimination
métrorragies noirâtres possibles. La patiente entraîne un syndrome abdominal aigu identique à d’une GEU (β-hCG négatifs ou grossesse intra-utérine
connaît l’existence de ces fibromes la plupart du une torsion d’annexe. Un traitement chirurgical évolutive), l’échographie retrouve un kyste ou un
temps et à l’échographie pelvienne, on retrouve une s’impose avec détorsion et myomectomie. gros ovaire permettant d’évoquer la torsion. Le
image de liquéfaction au centre du myome avec un doppler peut mettre en évidence un arrêt de
remaniement hétérogène évocateur de nécrobiose. ‚ Torsion d’annexe [2, 7] perfusion net correspondant au lieu de la torsion. Il
La salpingite aiguë peut être un diagnostic C’est une affection aiguë intervenant en général n’existe pas de liquide intrapéritonéal dans un
différentiel. Dans cette période aiguë, le traitement sur une annexe présentant une masse (kyste de premier temps, mais il n’est pas toujours facile
est médical, d’autant plus si la patiente est enceinte. l’ovaire, kyste paratubaire [hydatide], gros ovaires d’éliminer une rupture de kyste. La douleur est mal
Il associe des antalgiques (Di-Antalvict, paracétamol, hyperstimulés...), chez une patiente en âge de calmée par les antalgiques et ne disparaît pas
voire dérivés morphiniques) et des anti- procréer mais également chez l’adolescente ou totalement. Dans le doute, il est indispensable
inflammatoires non stéroïdiens (Profénidt, l’enfant. C’est une douleur aiguë, violente, associée d’effectuer une cœlioscopie de contrôle. Le risque de
Indocidt) jusqu’à disparition des symptômes. On parfois à des signes d’irritabilité péritonéale (nausées, nécrose de l’annexe peut grever l’avenir de
évitera une chirurgie d’emblée, surtout si la patiente vomissements). Cette douleur est accentuée par la reproduction de la patiente d’autant plus qu’il s’agit
est enceinte. En cas de nécrobiose dans le flexion du tronc en avant mettant en tension le d’une jeune fille. La cœlioscopie permet de donner le

5
3-1350 - Urgences gynécologiques

DOULEURS PELVIENNES

Fébriles Non fébriles

Salpingite QS Anamnèse :
Examens complémentaires
Nécrobiose aseptique de fibrome - contraception
β-hCG
Endométrite - date des dernières règles
Appendicite - jour du cycle
ECBU
Pyélonéphrite - métrorragies
- pathologies gynécologiques connues
Échographie pelvienne
- antécédents gynéco-obstétricaux
Bilan préopératoire
- intensité de la douleur et sa durée
- pathologie digestive associée
ASP

β-hCG négatifs β-hCG positifs

Troubles digestifs Troubles urinaires GEU


FCS
Abdomen douloureux GIU
toucher vaginal ; douleur masse Torsion d'annexe
Pathologie digestive
Colite
Infection urinaire
Occlusion

Chirurgical Médical

Endométriose

Torsion d'annexe Ovulation douloureuse


Rupture de kyste hémorragique Dysménorrhée

4 Conduite à tenir devant des algies pelviennes non fébriles.


ECBU : examen cytobactériologique des urines ; ASP : radiographie de l’abdomen sans préparation ; GEU : grossesse extra-utérine ; GIU : grossesse intra-utérine ;
FCS : fausse couche spontanée.

diagnostic, d’effectuer une détorsion et de vérifier pelvienne montre une image liquidienne plus ou est le blocage de l’ovulation par une contraception
l’intégrité de l’annexe avec une reprise de sa moins importante dans le cul-de-sac de Douglas et la orale efficace, sauf en cas de désir de grossesse.
vascularisation. Certaines études ont montré qu’un présence éventuelle d’un ou plusieurs kystes de
traitement conservateur de l’annexe est possible l’ovaire. Les patientes présentant un syndrome des
dans 50 % des cas, malgré un aspect de prime abord
défavorable. Une cœlioscopie de contrôle montre
une récupération complète et dans ce deuxième
temps, une chirurgie radicale est toujours possible.
ovaires polykystiques (oligoménorrhée ± acné ±
hirsutisme ± obésité) ont plus fréquemment ce type
de problèmes.

Métrorragies en dehors
de la grossesse (fig 5)

‚ Métrorragies sur pathologies


La cœlioscopie est rapidement effectuée en cas
‚ Rupture de kyste hémorragique de signes de gravité ou de diagnostic difficile. Le intracavitaires
et douleurs d’ovulation traitement chirurgical permet d’effectuer l’hémostase La consultation en urgence de ces patientes est
La rupture de kyste hémorragique se voit chez du kyste rompu et un lavage soigneux. S’il n’existe souvent le fait de métrorragies très abondantes ou
des patientes en activité génitale. Elle est plus pas de signes de gravité, on peut alors pallier à la de ménométrorragies : soit la patiente saigne depuis
fréquente chez la femme jeune. La douleur est douleur par un traitement symptomatique type longtemps (plus que ses règles habituelles), soit les
violente, aiguë, associée à des signes d’irritation Pro-Dafalgant en intraveineux (3 g/24 h), voire des saignements sont cataclysmiques. À l’interrogatoire,
péritonéale sans fièvre. L’abdomen à la palpation dérivés morphiniques. Si la rupture n’est pas la patiente connaît l’existence de fibromes ou de
présente une défense, le toucher vaginal est hémorragique et que la douleur s’estompe en polypes (plus rares), elle est déjà sujette à des règles
douloureux. À l’interrogatoire, la patiente n’est pas quelques jours, elle n’est pas forcément synonyme abondantes, elle peut être porteuse d’un DIU. Il ne
sous contraceptif et se trouve en général en milieu d’un traitement chirurgical. Dans ce cadre, il est faut pas oublier de demander les traitements
de cycle. Le tableau clinique peut être inquiétant plutôt question d’ovulation douloureuse. Les médicaux actuels pouvant jouer sur la crase
avec des signes de choc. Le diagnostic différentiel ovulations douloureuses touchent le plus souvent sanguine : Aspirinet, Ticlidt, Persantinet et les
principal est la rupture d’une GEU. Les β-hCG négatifs les jeunes filles, juste après le début de la puberté. traitements hormonaux. À l’examen clinique, on
font la différence, bien qu’une rupture de kyste Chez certaines patientes, ce type d’incident peut se peut retrouver au spéculum, un polype accouché par
puisse survenir en cours de grossesse. L’échographie répéter à chaque cycle. Le traitement à long terme le col. S’il existe un DIU en place, il est préférable de

6
Urgences gynécologiques - 3-1350

tumeurs malignes du col de l’utérus, surtout si elles


sont déjà volumineuses, ou les ectropions, éversions
MÉTRORRAGIES de l’endocol, peuvent saigner spontanément ou
après traumatisme, rapports sexuels ou toucher
vaginal par exemple.
β-hCG positifs Examen β-hCG négatifs
Échographie Il existe des saignements abondants après
Biologie rapports sexuels dus à une déchirure vaginale d’un
cul-de-sac qui peuvent être impressionnants et
nécessiter des points d’hémostase, sous anesthésie
Signes de gravité
générale le plus souvent.
Les traumatismes du vagin entraînent des
Môle Traumatismes du col
saignements abondants. Ils sont souvent le fait d’une
masturbation avec un objet contondant ou d’une
FCS Traitement Fonctionnelles
Postménopausiques automutilation dans la recherche d’un avortement
GEU chirurgical
Polypes par exemple. Un traitement chirurgical par points
GIU Fibromes d’hémostase est nécessaire, ainsi qu’une prise en
charge psychologique.
Pathologies associées
Traitement
(kyste, infection, pathologie
médical
cervicale) Dans tous les cas de gestes
traumatisants non contrôlés
Traitement médicalement, une mise à jour de la
chirurgical vaccination antitétanique doit être
à distance
systématique.
5 Démarches diagnostiques et thérapeutiques devant des métrorragies.
FCS : fausse couche spontanée ; GEU : grossesse extra-utérine ; GIU : grossesse intra-utérine.

le retirer. Le toucher vaginal peut retrouver un gros


utérus en général sans douleur associée. À
l’échographie pelvienne, on peut faire un diagnostic
particulier chez des patientes sous traitement
antiagrégant plaquettaire et nécessiter un traitement
chirurgical urgent. Chez des jeunes filles, il faut

Bartholinite

d’utérus fibromateux, les polypes intracavitaires sont rechercher une anomalie de la crase sanguine C’est une infection de la glande de Bartholin. La
plus difficiles à voir surtout si la cavité utérine est congénitale, avec entre autre un déficit en facteur de patiente présente une douleur au niveau d’une des
hémorragique. À distance de l’épisode hémorra- Willebrand. grandes lèvres proche de la fourchette. Cette douleur
gique aigu, une hystéroscopie diagnostique doit être peut être pulsatile, insupportable au stade de
pratiquée pour un diagnostic précis et un traitement ‚ Thérapeutiques l’abcédation. Une fièvre est parfois associée. Il existe
adapté. une tuméfaction visible, rouge, inflammatoire, très
Après élimination d’une grossesse, le traitement douloureuse rénitente à la palpation. Avant
‚ Hémorragies postménopausiques sera fonction du degré d’urgence. Un bilan sanguin l’abcédation, un traitement médical est possible avec
Il est rare que ces hémorragies soient très est effectué de façon systématique avec une bain de siège bétadiné et Pyostacinet per os. Au
abondantes, mais elles sont sources d’inquiétude numération-formule sanguine, des plaquettes, une stade d’abcès, il est incontournable de faire un geste
chez ces patientes ménopausées depuis longtemps hémostase complète, un groupe sanguin Rhésus et chirurgical consistant à inciser en regard de l’abcès,
pour certaines. En période périménopausique, il est une recherche d’agglutinines irrégulières dans de vider, laver à la Bétadinet sans refermer l’incision.
difficile de les distinguer de règles irrégulières. Le l’éventualité d’une transfusion sanguine. Le traitement médical associe, après, des soins
premier diagnostic à évoquer est l’adénocar- Si l’hémorragie est cataclysmique, une locaux bétadinés plusieurs fois par jour, gardant la
cinome de l’endomètre, que les patientes soient ou intervention chirurgicale s’impose allant du curetage cicatrice toujours propre et sèche. Une récidive est
non sous traitement hormonal substitutif. Une hémostatique à l’hystérectomie d’hémostase. Si les toujours possible.
pathologie intra-utérine bénigne comme un polype saignements semblent maîtrisables et que la
ou une atrophie de l’endomètre peut exister ou patiente est stable, un traitement médical est justifié


coexister avec une tumeur maligne. Un bilan par du Prémarint (œstrogènes conjugués) en
exhaustif doit être effectué, une pathologie peut en
Demande de contraception
intraveineux 20 à 60 mg/j, Exacylt (acide en urgence
cacher une autre (cf adénocarcinome de tranexamique) en intraveineux ou per os jusqu’à
l’endomètre). 6 g/j, en respectant les contre-indications (terrain
thromboemboliques, insuffisance cardiaque ou Cette demande peut rentrer dans un contexte de
‚ Métrorragies fonctionnelles rénale...). rapports sexuels non prévus ou d’un viol. Il faut
Elles surviennent chez des patientes sans lésion Un bilan en dehors des métrorragies ou en répondre à cette demande quel que soit le jour du
intracavitaire reconnue. Il s’agit le plus souvent d’une période plus calme doit être effectué. On propose cycle, car il n’est pas admissible de risquer une
hyperplasie ou d’une aplasie de l’endomètre une hystéroscopie diagnostique et une échographie, grossesse. La patiente a 72 heures pour faire cette
parfois consécutive à un traitement hormonal mal voire une hystérosonographie. demande. Le traitement contraceptif est un
équilibré. L’échographie montre une hyperplasie œstroprogestatif de première génération comme le
(supérieure à 10 mm) ou une atrophie (inférieure à Stédirilt (éthinylœstradiol et norgestrel) avec deux
‚ Hémorragies cervicales
4 mm) de l’endomètre, mais c’est l’hystéroscopie comprimés en une prise puis 2 comprimés toutes les
diagnostique qui permettra un diagnostic définitif Devant toutes « métrorragies », un examen 12 heures, une à deux fois. Ce traitement entraîne
avec élimination d’une lésion intracavitaire. Ces soigneux sous spéculum est nécessaire pour des nausées et des vomissements limitant son
métrorragies peuvent être cataclysmiques, en rechercher une lésion cervicale ou vaginale. Les efficacité. Sur des rapports datant de moins de

7
3-1350 - Urgences gynécologiques

5 jours, on peut poser un stérilet. Il est important de – ne pas omettre d’éliminer ou d’affirmer une – penser à la torsion d’annexe en cas de douleur
prévoir des β-hCG 15 jours après et de discuter d’une grossesse par un test de grossesse urinaire au moins violente, malgré un examen clinique pauvre ;
contraception efficace ultérieure en prescrivant au ou des β-hCG plasmatiques quantitatifs ; – prévoir une thérapeutique ou une prise en
mieux une contraception orale dès les prochaines charge à long terme pour éviter un nouvel épisode
– ne pas oublier l’injection d’immunoglobulines
règles aigu.
anti-D chez des patientes enceintes présentant des
métrorragies ; La prise en charge de ces patientes ne doit pas


Conclusion

Les urgences gynécologiques sont largement


– utiliser l’échographie pelvienne pour étayer ou
surveiller une pathologie ;
– vérifier à distance l’efficacité des thérapeutiques
être uniquement ponctuelle. Il est important
d’élaborer avec elles un suivi sérieux qui permettra
après la période aiguë de réfléchir sur les objectifs de
la patiente. Ainsi, pourront être mis en place des
utilisées (dosage de β-hCG, échographie de
dominées par les métrorragies et les douleurs moyens préventifs d’une récidive et une
contrôle) ;
pelviennes. Il faut toujours garder en tête la possible thérapeutique adaptée à chaque patiente en
grossesse même si elle paraît impossible. Quelques – traiter les partenaires en cas d’infections fonction de l’âge, de la pathologie et du projet
points sont fondamentaux : génitales hautes ; parental.

Catherine Rongières-Bertrand : Chef de clinique-assistant,


service de gynécologie-obstétrique, hôpital Antoine-Béclère, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92141 Clamart, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : C Rongières-Bertrand. Urgences gynécologiques.
Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 3-1350, 1999, 8 p

Références

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tory findings with laparoscopic findings. Obstet Gynecol 1997 ; 89 : 184-192

8
¶ 3-1335

Virus d’immunodéficience humaine


et gynécologie
B. Guyot

On estimait en 2005 qu’environ 21 000 femmes étaient infectées par le virus d’immunodéficience
humaine (VIH). Tout clinicien soignant des jeunes femmes doit envisager le VIH dans le diagnostic
différentiel de nombreux signes et symptômes, offrir des recommandations sur le VIH, un dépistage et des
conseils de réduction des risques, et doit également être prêt à participer à la prise en charge de patientes
VIH positives. Le clinicien peut également être confronté à des difficultés reproductives, ou un désir de
grossesse, associés au VIH. Cet article propose une mise à jour sur les informations concernant
l’épidémiologie du VIH féminin, décrit les signes et symptômes gynécologiques associés au VIH en
insistant sur les co-infections par papillomavirus, et discute le rôle du médecin dans le diagnostic, la prise
en charge, ainsi que dans l’évaluation d’un impact du VIH sur la reproduction et la périménopause.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Gynécologie ; Séropositivité des femmes ; VIH ; Complications du VIH ; Papillomavirus humain ;
Infections virales tumorales

Plan « Mme B. Y. est âgée de 33 ans, sa séropositivité est connue


depuis 7 ans et a été découverte lors d’une première grossesse.
Elle a élevé seule son premier enfant. Elle est suivie en unité de
¶ Introduction 1
maladies infectieuses tous les trois mois, son compte de CD4 est
¶ Rappel épidémiologique 1 stable, sa charge virale est basse sans médicaments antirétrovi-
¶ Risques plus élevés de contamination 2 raux. Elle pense avoir été contaminée par son ami de l’époque.
¶ Manifestations cliniques du VIH et du sida : Elle s’est retrouvée seule avec sa fille, aujourd’hui elle a une
des risques féminins particuliers 2 relation stable, est mariée depuis plus de deux ans, son conjoint
Risques gynécologiques 2 est séronégatif, et le couple envisage d’avoir un second enfant ».
Dysplasie du col 2 Dans les pays où les traitements antirétroviraux hautement
Néoplasies et infections 3 efficaces sont disponibles, la mortalité et l’incidence de nouvel-
Troubles des règles 3 les maladies définissant le sida ont diminué de façon remarqua-
ble chez les personnes infectées par le virus d’immunodéficience
¶ Difficile suivi du traitement 3
humaine. L’infection par le VIH est devenue une maladie
¶ VIH et désir de grossesse 3 chronique d’évolution longue. En France, la proportion de
¶ Traitements moins bien tolérés 4 femmes parmi la population atteinte n’a cessé d’augmenter :
alors que l’on comptait 1 femme pour 5 hommes au début des
¶ Situations de périménopause et ménopause
années 1990, on notait déjà 1 femme pour 2,8 hommes en
devant être évoquées 4
2001. Cette évolution est allée de pair avec une augmentation
¶ Prévention 4 de la fréquence de la transmission du VIH par les rapports
¶ Conclusion 4 hétérosexuels, mode de contamination actuellement le plus
fréquent (49 % des cas en 2004). Initialement cantonnée aux
homosexuels et aux toxicomanes, l’infection s’est ainsi répan-
due chez les femmes. Parmi ces dernières, les trois quarts ont été
■ Introduction contaminées par voie hétérosexuelle, ce qui est le cas de moins
d’un tiers des hommes.
« Mlle A. Z. a été revue en consultation, elle est en bon état
général. Néanmoins elle signale des leucorrhées prurigineuses
(antécédent d’infection génitale à mycoplasmes en novembre
■ Rappel épidémiologique
2004 traitée par azithromycine). Un examen gynécologique avec La prévalence de l’infection par le VIH en France en 2005 est
contrôle de frottis a été réalisé en mars 2005 et les frottis estimée à 97 000, avec un intervalle plausible de 70 000 à
montrent une lésion malpighienne intraépithéliale de bas grade 130 000, en utilisant la méthode du rétrocalcul qui consiste en
avec des condylomes et des signes de mycose. Une colposcopie un retour en arrière du présent au passé (Tableau 1). Elle
est prévue avec traitement des condylomes par laser CO2. En s’appuie sur le fait selon lequel le nombre de nouveaux cas de
attendant, une prescription d’antimycosique lui est remise. sida est la résultante des nombres de sujets précédemment
Actuellement, il n’y a pas d’indications pour débuter un infectés par le VIH après une durée d’incubation donnée. La
traitement antirétroviral ». durée d’incubation dépend de l’âge et, de façon majeure, de

Traité de Médecine Akos 1


3-1335 ¶ Virus d’immunodéficience humaine et gynécologie

Tableau 1.
Prévalence en France du VIH chez les femmes hétérosexuelles non toxicomanes [1].

Effectif Prévalence observée Nombre de personnes VIH IC à 95 %


(IC à 95 %) positives
Antécédents d’IST 16-69 ans N = 144 800 1,3 % (0,4-2,6 %) N = 2 000
Pas d’antécédents d’IST 18-44 ans N = 11 271 400 0,165 % (0,099-0,24 %) N = 18 600 12 400-24 600
45-69 N = 7 462 600 0,002 % (0,00005-0,011 %) N = 200 0-400
Total femmes VIH positives N = 20 800 14 400-27 200
IST : infections sexuellement transmises ; IC : intervalle de confiance.
La taille de la population est estimée à partir des données de l’INSEE 1996. Dans le monde le nombre de femmes contaminées est supérieur à 17 millions, dont 13 millions au
moins en Afrique subsaharienne.

l’introduction des multithérapies hautement efficaces depuis


1996. Ce modèle prend en compte la mortalité avant sida des
patientes infectées. Les femmes représentent près de la moitié
des nouveaux diagnostics d’infection par le VIH (43 %), et la
moitié d’entre elles sont étrangères et originaires d’un pays
d’Afrique subsaharienne. L’âge moyen au moment du diagnostic
est de 37 ans, les femmes sont en moyenne plus jeunes (34 ans)
que les hommes (39 ans) [2].
Le dépistage de l’infection par le VIH est réalisé devant
l’apparition de signes cliniques (33 %), à la suite d’une prise de
risque (17 %) ou dans le cadre d’un bilan (prénuptial, préopé-
ratoire, etc.) (12 %).
La proportion des personnes contaminées par rapports
hétérosexuels est en augmentation nette dans toutes les sources
de données. Il s’agit principalement de femmes originaires
d’Afrique subsaharienne.

■ Risques plus élevés


de contamination
Les risques de contamination au cours d’un rapport hétéro-
sexuel sont nettement plus élevés pour la femme que pour Figure 1. Lésions malpighiennes intraépithéliales de haut grade (CIN
l’homme sans qu’il soit possible de chiffrer précisément ce III) circonférentielles étendues depuis l’exocol vers l’endocol, avec atteinte
risque. Cette vulnérabilité particulière des femmes est liée à des récessus glandulaires chez une patiente VIH positive co-infectée par le
divers facteurs : VHC.
• la concentration virale, beaucoup plus élevée dans le sperme
que dans les sécrétions vaginales ; survient lors de la séroconversion, mais aussi des années plus
• la fragilité du col de l’utérus, surtout au cours des règles, en tard avec la perte progressive de l’immunité cellulaire. La
cas de MST (maladie sexuellement transmissible) ou de petites candidiase vulvovaginale récidivante et résistante au traitement
lésions traumatiques ; est très fréquente.
• la surface de muqueuse exposée (col et vagin) est plus
importante, et le sperme stagne plusieurs heures dans le
vagin.
Dysplasie du col
La dysplasie du col est plus fréquente chez ces femmes,
probablement du fait d’un risque accru d’exposition au papillo-
■ Manifestations cliniques du VIH mavirus (HPV) transmis sexuellement, et d’une diminution de
capacité de répondre à ce type d’infection. Entre 20 et 40 % des
et du sida : des risques féminins femmes séropositives ont des lésions du col de l’utérus pouvant
particuliers évoluer vers un cancer [4] (Fig. 1). Ces lésions ne sont observées
que chez 3 % des femmes séronégatives. Ces dysplasies (lésions
précancéreuses), sont d’autant plus fréquentes qu’il existe une
Risques gynécologiques immunodépression, et ont moins tendance à guérir spontané-
L’infection par le VIH s’accompagne de risques gynécologi- ment chez les patientes séropositives (20 % contre 60 % en cas
ques qui imposent une surveillance étroite. Les manifestations de séronégativité). Dans une méta-analyse de 21 études contrô-
présentées ici sont spécifiques aux femmes et aux jeunes filles, lées, Mandelblatt et al. ont rapporté un odds ratio combiné
et peuvent être des conditions de découverte du VIH. La liste 4,9 fois plus élevé (IdC [intervalle de confiance] à 95 % : 3-8,2)
des diagnostics définissant le sida a été redéfinie à plusieurs de développer une néoplasie cervicale chez les femmes infectées
reprises. En 1993, une des modifications incluait le diagnostic par le VIH que chez des femmes non infectées [5]. Les personnes
spécifique et féminin du cancer du col utérin. La pneumonie à infectées par le VIH ont une prévalence élevée d’ADN HPV.
Pneumocystis carinii est la pathologie la plus fréquente définis- Plusieurs travaux ont montré que les personnes infectées par le
sant le sida dans les deux sexes. L’œsophagite à candida et VIH ont également une prévalence accrue de lésions malpi-
l’infection chronique par herpes simplex seraient plus fréquen- ghiennes intraépithéliales du vagin et de l’anus. L’hypothèse a
tes chez les femmes. été évoquée qu’un traitement antirétroviral hautement efficace
Plusieurs situations gynécologiques courantes sont plus aurait le potentiel, par une reconstitution de l’immunité de
agressives, plus graves et plus persistantes, ou à risque plus élevé l’hôte, de modifier l’histoire naturelle de l’infection à HPV et
de récidive chez les femmes atteintes du VIH [3] . On peut des lésions intraépithéliales malpighiennes, et par là de dimi-
rencontrer des jeunes femmes présentant ces symptômes tôt nuer le risque de néoplasie cervicale intraépithéliale (CIN) et
dans la maladie, souvent en association avec la chute initiale de son évolution vers un cancer invasif. Les données sur les
la fonction immunitaire (mesurée par le compte des CD4), qui traitements les plus efficaces sont peu nombreuses et les études

2 Traité de Médecine Akos


Virus d’immunodéficience humaine et gynécologie ¶ 3-1335

ont rapporté des résultats mitigés. En analyse multivariée, une d’experts recommande de débuter une trithérapie associant
limite de résection par conisation ou d’électrorésection ne deux IN (inhibiteur nucléosidique) et un IP (inhibiteur de
passant pas en zone saine est associée à un risque élevé de protéase) pour la prévention de la TME et de poursuivre, chez
récidive de tout type de CIN (risque relatif RR = 3,5 ; IdC à les femmes traitées avant leur grossesse, le traitement antirétro-
95 % : 1,2 à 9,8) et un risque de récidive de lésion de haut viral s’il est efficace et bien toléré en évitant l’association
grade (RR = 9 ; IdC à 95 % : 2,2 à 36,5). Le taux de CD4 infé- d4T-ddI et éfavirenz.
rieur à 200 cellules/mm3 était associé à un risque de récidive de La prise en charge des couples dans le cadre d’une assistance
tout type de CIN (RR = 9,4 ; IdC à 95 % : 2,7 à 32,7). Un médicale à la procréation (AMP) s’est beaucoup améliorée au
traitement antirétroviral très efficace a un effet protecteur sur la cours des deux dernières années. Une réflexion doit porter sur
récidive de tout type de CIN (RR = 0,3 ; IdC à 95 % : 0,1à 0,7) la mise en place d’un registre des grossesses à risque viral prises
et également des CIN de haut grade [6-9]. Le suivi après traite- en charge en AMP. Plus de 1 000 couples se sont adressés aux
ment est indispensable à cause du caractère multifocal des différents centres ayant mis en place des structures d’accueil
lésions. pour la prise en charge des couples par AMP, incluant les
couples sérodifférents où l’homme est séropositif, ceux où la
Néoplasies et infections femme est séropositive, et les couples où les deux partenaires
sont infectés. La mise en place des activités d’AMP est trop
Les condylomes acuminés vulvovaginaux et anaux sont plus récente pour établir un bilan complet et exhaustif, mais il est
fréquents et plus difficiles à traiter. La néoplasie malpighienne déjà possible d’affirmer que près de la moitié des couples
intraépithéliale anale est décrite chez les femmes pratiquant la éligibles où l’homme est séropositif peuvent espérer voir leur
sodomie mais est aussi possible autrement [10], et des néoplasies projet parental se réaliser et qu’à ce jour, aucun cas d’infection
intraépithéliales vulvaires ont même été décrites chez des de l’enfant n’a été rapporté [12, 13].
adolescentes infectées. Les infections utéro-annexielles (salpin- Il est cependant nécessaire que la prise en charge ne débute
gites) sont plus fréquentes chez les femmes infectées par le VIH pas trop tardivement.
et ces infections ont plus de risque de récidiver ou d’être La prise en charge des femmes séropositives fait apparaître
compliquées de pyosalpinx et d’abcès tubo-ovarien. Les mala- des problèmes de fertilité. En effet, la fertilité féminine baisse
dies génitales ulcérées telles que l’herpes simplex, la syphilis ou avec l’âge et en particulier après 35 ans, et celle-ci est accentuée
le chancre mou sont plus fréquentes également, plus étendues, par l’AMP. Il est également possible que les traitements antiré-
et peuvent avoir des présentations atypiques. troviraux altèrent les spermatozoïdes [14]. Il est donc recom-
mandé de ne pas trop retarder un projet d’enfant envisagé par
Troubles des règles un couple.
Des troubles des règles peuvent être observés, en particulier
chez les femmes thrombopéniques du fait du VIH ou du
traitement, et certains saignements importants peuvent nécessi-
ter un traitement hormonal. Une oligospanioménorrhée voire
une aménorrhée peut apparaître en cas de dénutrition
“ Points importants
importante. Conditions de prise en charge des couples à risque
Un examen gynécologique annuel complet avec frottis viral pour le VIH (d’après l’arrêté du 10 mai
cervical, et si possible colposcopie, est recommandé chez toute
2001 du Journal officiel)
femme séropositive quels que soient son âge et son traitement
Remplir les conditions réglementaires d’accès à l’AMP :
antirétroviral. Il peut être réalisé en ville ou à l’hôpital. Une
attention particulière doit être portée aux femmes d’origine • couple stable, marié ou ayant une vie commune depuis
africaine qui sont probablement moins bien suivies. plus de deux ans ;
• évaluation du projet d’enfant au cours d’entretiens avec
les psychologues de l’équipe ;
■ Difficile suivi du traitement • les deux membres du couple doivent être vivants et en
âge de procréer.
La situation économique a inévitablement des répercussions Proposition préalable des alternatives sans risques (adoption,
médicales.
sperme de donneur) :
En effet, 40 % des femmes VIH positives rapportent des
difficultés financières importantes. Ces difficultés financières • engagement du couple à une sexualité protégée ;
affectent leur vie quotidienne puisque 28 % des femmes (et • prise en charge par une équipe multidisciplinaire
17 % des hommes) déclarent ne pas pouvoir s’alimenter habilitée à valider la demande.
correctement par manque de moyens (pas de viande ou de Femme séropositive pour le VIH-1 :
poisson tous les deux jours, ou absence de repas complet • ayant un suivi régulier, traitée ou non, sans maladie
pendant une journée dans les quatre dernières semaines pour évolutive ;
un membre du foyer par manque d’argent). • CD4 > 200/mm3 à deux reprises dans les quatre mois
Les difficultés d’observance sont essentiellement liées aux précédents ;
situations de précarité, parfois extrêmes. D’une manière géné- • ARN-VIH plasmatique stable, sans augmentation >
rale, un logement, une prise en charge sociale et des revenus
0,5 log10 dans les quatre mois précédents ;
suffisants sont des éléments plus importants pour la réussite du
traitement que le niveau d’études. À facteurs sociaux égaux, • informations pour l’aide à la décision qui prendra en
l’observance serait similaire chez les hommes et les femmes [2]. compte le risque de contamination de l’enfant à naître et
les risques potentiels des thérapeutiques pendant la
grossesse ;
■ VIH et désir de grossesse • prise en charge de la grossesse et de l’enfant à la
naissance par des équipes spécialisées.
Le taux de transmission du VIH de la mère à l’enfant (TME) Homme séropositif pour le VIH :
est actuellement en France de 1 à 2 % sous traitement. Le
cf. rapport Delfrayssi 2004, page 224.
rapport bénéfice-risque est clairement en faveur du traitement
préventif, mais il persiste un certain nombre d’interrogations sur
la toxicité à moyen terme des traitements antirétroviraux
donnés durant la grossesse [11]. Les femmes VIH positi- Des techniques d’assistance médicale à la procréation per-
ves enceintes ou ayant un désir de grossesse doivent avoir une mettent d’éviter la transmission à l’enfant du VIH ou du virus
information aussi complète et objective que possible [11]. Le groupe des hépatites.

Traité de Médecine Akos 3


3-1335 ¶ Virus d’immunodéficience humaine et gynécologie

Le désir d’enfant est une demande de plus en plus exprimée VIH chez la femme (comme chez l’homme) reste le préservatif
par les couples concernés par le VIH. Il est légitime de répondre (condom ou fémidom). Cependant, le préservatif n’étant pas le
à ces demandes, y compris en cas de problèmes d’infertilité meilleur moyen de contraception, il est conseillé de lui associer
masculine ou féminine [15]. Une information doit pouvoir être une méthode de contraception efficace telle que la pilule, les
donnée à ces couples sur les modalités de prise en charge et leur implants hormonaux ou le stérilet. À l’inverse, pilule, implants
efficacité. et stérilet n’offrent aucune protection contre le VIH. Dès la
Une douzaine de centres spécialisés en assistance médicale à prévention les femmes sont placées dans une situation particu-
la procréation peuvent prendre en charge ces demandes. lière. Savoir comment dire non, comment imposer le préserva-
Près de la moitié des couples éligibles ayant eu recours à tif, comment être assez sûre de soi pour ramener la relation
l’AMP ont vu leur projet parental se réaliser, même si ce fut sexuelle dans une situation à bas risque sont des problèmes
parfois après de longs délais. spécifiques aux femmes, quelle que soit leur origine. Après un
L’auto-insémination peut être envisagée chez la femme rapport sexuel non protégé et suspect (par exemple en cas
séropositive pour prévenir l’infection du partenaire. d’agression sexuelle), l’administration urgente d’une trithérapie
Il est indispensable de bien documenter les dossiers médicaux préventive peut diminuer de façon importante le risque de
concernant les co-infections VHC (virus de l’hépatite C) ou VHB transmission du VIH.
(virus de l’hépatite B).

■ Traitements moins bien tolérés ■ Conclusion


D’une manière générale, les femmes sont plus exposées que Les soignants s’occupant de soins médicaux et de la santé de
les hommes aux risques d’effets secondaires des antiviraux. C’est la reproduction devraient être familiarisés avec les développe-
le cas en particulier pour le Videx® (ddI) qui entraînerait trois ments récents des soins du VIH ou avoir le soutien de praticiens
fois plus de réactions indésirables chez les femmes. Souvent les ayant une expérience en maladies infectieuses et traitement du
effets sont différents. VIH. Ils devraient connaître les ressources communautaires
Ainsi, les lipoatrophies (fonte des graisses), qui creusent les disponibles dans leur bassin de vie (réseau ville-hôpital,
joues, s’observent plutôt chez les hommes, tandis que les consultation de dépistage anonyme et gratuit [CDAG], associa-
femmes présentent souvent une augmentation du volume du tions etc.). Les médecins et sages-femmes travaillant dans les
tronc et des seins. Par ailleurs, le Norvir® (ritonavir) provoque- services de gynécologie-obstétrique, de planning familial-IVG et
de surveillance prénatale, peuvent être amenés à soigner des
rait plus de paresthésies autour de la bouche chez les femmes
patientes dont le responsable du suivi du VIH est ailleurs. Une
mais davantage de diarrhées chez les hommes.
communication étroite, écrite, et une coordination des soins
Enfin, il est important de savoir que les antiprotéases et les
sont importantes.
analogues non nucléosidiques (autres antiviraux) diminuent
l’efficacité des contraceptifs oraux. .

■ Références
■ Situations de périménopause
[1] Desenclos JC. La prévalence de la séropositivité VIH en France. Bull
et ménopause devant être Epidemiol Hebd 2005;no 11:41-4.
[2] Delfrayssi J. In: Prise en charge thérapeutique des personnes infectées
évoquées par le VIH. Recommandations du groupe d’experts. 2004. p. 280.
Les femmes représentent 30 % des patients, leur nombre est [3] Jean-Emans S, Goldstein D. Human immunodeficiency virus in young
en augmentation faible depuis 1999 (28 %). Parmi les 40 348 women. In: Pediatric and adolescent gynecology. Philadelphia:
patients ayant au moins un suivi enregistré en 2002, un homme Lippincott-Raven; 1998. p. 531-52.
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l’ensemble de la morbidité chronique commence à se manifester and HIV coinfection and the risk of neoplasias of the lower genital tract:
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fréquemment dans la population générale [16, 17]. L’évaluation
[5] Mandelblatt JS, Fahs M, Garibaldi K, Senie RT, Peterson HB. Associa-
du risque cardiovasculaire fait partie du suivi VIH, avec en
tion between HIV infection and cervical neoplasia: implications for
particulier l’évaluation des habitudes tabagiques, principal clinical care of women at risk for both conditions. AIDS 1992;6:173-8.
risque, mais aussi de l’activité physique. On devrait proposer des [6] Heard I. Les lésions cervicales liées au Papillomavirus humain chez des
interventions atténuant l’effet des facteurs de risque modifia- femmes séropositives pour le VIH. Contracept Fertil Sex 1999;27:
bles. Il convient de rappeler, en particulier chez les femmes 681-6.
ménopausées après 42-43 ans, la contre-indication du traite- [7] Heard I, Palefsky JM, Kazatchkine MD. The impact of HIV antiviral
ment hormonal de la ménopause en prévention des maladies therapy on human papillomavirus (HPV) infections and HPV-related
cardiovasculaires [18-20]. Les traitements les mieux tolérés en cas diseases. Antivir Ther 2004;9:13-22.
de symptômes climatériques très gênants (bouffées de chaleur, [8] Heard I, Potard V, Foulot H, Chapron C, Costagliola D,
sueurs nocturnes, troubles du sommeil, etc.) semblent être Kazatchkine MD. High rate of recurrence of cervical intraepithelial
l’œstradiol transcutané avec un progestatif dérivé de la proges- neoplasia after surgery in HIV-positive women. J Acquir Immune Defic
térone chez les femmes ayant leur utérus. La combinaison Syndr 2005;39:412-8.
œstrogène et progestérone micronisée semble dépourvue d’effet [9] Heard I, Tassie JM, Kazatchkine MD, Orth G. Highly active
cancérigène, tout du moins à court terme. Le RR est estimé à antiretroviral therapy enhances regression of cervical intraepithelial
0,9 (intervalle de confiance à 95 % : 0,7-1,2), et est significati- neoplasia in HIV-seropositive women. AIDS 2002;16:1799-802.
vement inférieur à celui de la combinaison œstrogène et [10] Piketty C, Darragh TM, Da Costa M, Bruneval P, Heard I,
progestatif de synthèse. Ce résultat inédit reste à confirmer pour Kazatchkine MD, et al. High prevalence of anal human papillomavirus
des durées de traitement supérieures à 4 ans [21]. infection and anal cancer precursors among HIV-infected persons in the
Par ailleurs les femmes en péripostménopause ne se sentent absence of anal intercourse. Ann Intern Med 2003;138:453-9.
[11] Riley LE, Yawetz S. A 34-year-old HIV-positive woman who desired to
plus à risque de grossesse et nombre d’entre elles n’utilisent pas
become pregnant. N Engl J Med 2005;353:1725-32.
de préservatif, or c’est le seul vrai moyen préventif des maladies
[12] Mandelbrot L. SIDA et procréation. In: Fernandez H, Chapron C,
sexuellement transmissibles à l’heure actuelle. Ce groupe à Pouly JL, editors. Traité de gynécologie. Paris: Flammarion Médecine
risque, même s’il est petit en nombre, ne fait cependant pas Sciences; 2005. p. 427-40.
l’objet des campagnes d’information. [13] Mandelbrot L, Heard I, Henrion-Geant E, Henrion R. Natural concep-
tion in HIV-negative women with HIV-infected partners. Lancet 1997;
■ Prévention [14]
349:850-1.
Dulioust E, Du AL, Costagliola D, Guibert J, Kunstmann JM, Heard I,
Les vaccins contre le VIH étant encore à la phase de recher- et al. Semen alterations in HIV-1 infected men. Hum Reprod 2002;17:
che, le principal moyen de prévention transmission sexuelle du 2112-8.

4 Traité de Médecine Akos


Virus d’immunodéficience humaine et gynécologie ¶ 3-1335

[15] Minkoff H, Santoro N. Ethical considerations in the treatment of [20] White C. HRT does not prevent chronic disease after menopause. BMJ
infertility in women with human immunodeficiency Virus Infection. N 2004;328:912a [abstract].
Engl J Med 2000;342:1748-50. [21] Fournier A, Berrino F, Riboli E, Avenel V, Clavel-Chapelon F. Breast
[16] Saves M, Chene G, Ducimetiere P, Leport C, Le Moal G, Amouyel P, cancer risk in relation to different types of hormone replacement
et al. Risk factors for coronary heart disease in patients treated for therapy in the E3N-EPIC cohort. Int J Cancer 2005;114:448-54.
human immunodeficiency virus infection compared with the general
population. Clin Infect Dis 2003;37:292-8.
[17] Thiebaut R, Saves M, Mercie P, Cipriano C, Chene G, Dabis F. Pour en savoir plus
Epidemiology of atherosclerotic cardiovascular risk in HIV-1 infected
patients. Presse Med 2003;32:1419-26. Association AIDES http://www.aides.org/.
[18] Hulley SB, Grady D. The WHI estrogen-alone trial--do things look any Association SIDA info services http://www.sida-info-service.org/.
better? JAMA 2004;291:1769-71. Agence Nationale de Recherche contre le SIDA et les hépatites http:
[19] The Women’s Health Initiative Steering Committee. Effects of //www.anrs.fr/.
conjugated equine estrogen in postmenopausal women with Le Programme Commun des Nations Unies Sur le VIH/SIDA (ONUSIDA)
hysterectomy: The Women’s Health Initiative Randomized Controlled http://www.dz.undp.org/hiv-aids/HIV-AIDS.html.
Trial. JAMA 2004;291:1701-12. Site du National Institute of Health http://aidsinfo.nih.gov/.

B. Guyot (bguyot@chi-poissy-st-germain.fr).
Unité de gynécologie, Département de gynécologie obstétrique, biologie de la reproduction, Professeur Y. Ville, CHI Poissy-Saint-Germain, 10, rue du
Champ-Gaillard, 78300 Poissy, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Guyot B. Virus d’immunodéficience humaine et gynécologie. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Traité de
Médecine Akos, 3-1335, 2007.

Disponibles sur www.emc-consulte.com


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