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ANALYSE CRITIQUE
CHAPITRE IV- ANALYSE CRITIQUE
Afin d'établir un état de référence des données disponibles, il a été procédé à une recherche
documentaire et à quelques interviews de personnes ressources pour identifier les documents
(inventaires, rapports, études, thèses, mémoires, articles, analyses etc.) concernant les
polluants organiques persistants au Maroc.
La préoccupation du Maroc par les problèmes environnementaux causés par les POP ne date
pas d’aujourd’hui. Des établissements publics ou semi-publics ont commencé un certain
nombre d’inventaires et de programmes de gestion écologique des pesticides et des PCB
depuis une dizaine d’années.
Cette partie met le point sur les études et démarches antérieures faites par des différents
intervenants dans le domaine des pesticides en général et en particulier les pesticides POP.
Avant d’analyser les travaux antérieurs sur les pesticides POP, il est intéressant, dans un
premier temps, de donner un aperçu sur l’importance et les domaines d’utilisation des
pesticides au Maroc.
Cependant, malgré l’importance de la superficie agricole utile (SAU) mobilisée, qui avoisine
les 8 millions d’hectares8, la superficie traitée est estimée à 800 000 ha. La consommation du
Maroc en pesticides repose en grande partie sur les produits finis (87%). Les produits
formulés localement représentaient 13% de la consommation nationale en 19929. Cette
disproportion est due en particulier aux taxes élevées appliquées sur les produits entrant dans
la formulation. Les dernières statistiques du Ministère de l’agriculture font état d’une
évolution régulière de la consommation10 (voir tableau suivant) :
Tableau N°6 : Evolution des importations des pesticides (de 1995 à 1999)10
Année
Catégorie
1995 1996 1997 1998 1999
Insecticides (t) 3 710,7 4 604,7 4 482,6 5 297,4 6 248,7
Fongicides (t) 3 239,2 3 716,7 4 295,2 3 017,2 3 692,8
Herbicides et
794,7 1 238,6 1 181,2 1 076,0 1 721,0
Divers (t)
Total (t) 7 744,6 9 560,0 9 959,1 9 390,6 11 662,5
Pour la distribution, ces firmes sont relayées par des revendeurs, des distributeurs, des
agences régionales et les coopératives. Certaines quantités sont livrées directement aux
organismes étatiques. Le nombre de ces antennes dépasse les 700 revendeurs et sont
concentrés dans les zones agricoles irriguées et bours favorables10.
a) En Agriculture
L’utilisation des pesticides ne couvre pas systématiquement toutes les régions du Maroc.
L’usage est concentré dans les périmètres irrigués gérés par les offices de mise en valeur
agricole du Molouya (ORMVAM), Gharb (ORMVAG), Loukous (ORMVAL), Tadla
(ORMVAT), Doukkala (ORMVAD), Haouz (ORMVAH), Souss Massa (ORMVAS) ou les
Directions provinciales de l’agriculture (DPA).
b) En santé publique
Les pesticides sont également utilisés pour lutter contre les vecteurs de maladies comme le
paludisme, la schistosomiase et les leishmanioses. L’usage comprend surtout des
organochlorés (OC), des carbamates et pyrethrinoides. Cette consommation est à base de
DDT essentiellement. Depuis 1984 les organochlorés font objet d’interdiction d’usage et
d’importation sauf pour le DDT qui a reçu une dérogation pour l’hygiène publique.
c) Autres usages
Des évènements à caractère de fléaux nécessitent un usage intensif de pesticides comme c’est
le cas pendant l’invasion des criquets pèlerins. Différentes catégories d’insecticides sont
utilisés (Organochlorés pendant les années 80, organophosphorés, carbamates et
perythrinoides) actuellement.
Au Maroc, les études et inventaires sur les pesticides POP sont très rares. On peut citer à cet
égard :
A cause de l’incertitude relative aux aléas climatiques et surtout aux invasions des criquets, le
Maroc a toujours constitué un stock de pesticides pour être en mesure de répondre à ces
impératifs. Cependant, le stockage des pesticides a engendré dans beaucoup de cas leur
détérioration. Cette situation s’est aggravée avec l’interdiction des organochlorés en 1984. Les
données sur les quantités de pesticides POP ne sont pas précises et souvent, ils sont
inventoriés avec des pesticides obsolètes non POP. Ainsi, dans la note sur le secteur des
pesticides, élaborée par la DPVCTRF 9,10, le tonnage des produits et matériel contaminés par
les pesticides serait de 9 000 tonnes, dont 700 sous forme de pesticides périmés, répartis dans
225 sites à travers le Maroc, 5 000 et 3 300 tonnes de sol contaminé à hautement contaminé10
respectivement.
Dans le rapport sur l’évaluation des Besoins nationaux pour une Gestion Ecologiquement
rationnelle des POP au Maroc, on relève que des suivis réguliers des pesticides sont effectués
par l’Office national de l’Eau Potable (ONEP) dans le cadre de ses prérogatives liées à la
qualité de l’eau destinée à la consommation12.
L’ONEP suit régulièrement un certain nombre de produits POP parmi une liste de pesticides
variée (voir tableau suivant). Les autres laboratoires réagissent ou font des dépistages des
POP selon les circonstances.
Des études menées par l’Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II, dans le cadre de
mémoires de fin d’études ou de thèses ont été consacrées aux résidus des pesticides
organochlorés qui forment l’ossature des produits POP. Ainsi, ces produits on été détectés
dans des produit d’origine végétale comme les céréales 13,14 , d’origine animale comme le lait,
les œufs et la viande15,16,17. D’autres études se sont penchées sur le côté environnemental. Ces
travaux ont analysé les taux de pollution dans les eaux du littoral atlantique et
méditerranéen18,19, l’accumulation18,19 dans les organismes marins et d’eau douce ainsi que
dans les sédiments20.
À notre connaissance, les seuls inventaires de PCB à l’échelle nationale qui ont été réalisés à
ce jour sont :
L’ONEP, s'est intéressé dès 1985 à la planification d’une gestion rigoureuse des PCB et ce
après l’incident survenu en Janvier 1985 à Reims (France), suite à l’explosion d’un
transformateur électrique dans le sous-sol d’un immeuble. Une étude a été lancée pour
identifier les actions appropriées à mettre en œuvre dans les installations de l’office pour
prévenir et éviter tout risque d’accident ou de pollution.
L’ONEP avait ainsi mis en place, dès 1985, un cadre réglementaire préventif interne et
entrepris plusieurs actions visant à mieux gérer ses PCB. Les principales recommandations du
plan d’action issues de ce règlement sont :
La mise en place de mesures d'urgence, listées ci-après, en vue de prévenir et d'éviter tout
risque de pollution à froid par le pyralène des transformateurs a été achevée en 1990:
Etiquetage des transformateurs à PCB au moyen d'une pancarte très apparente portant
la mention "PYRALENE" (répondant aux normes de signalisation de danger au point
de vue dimensions et couleurs) afin d'avertir tout intervenant sur ces postes MT/BT de
la présence du diélectrique.
Rassemblement et stockage dans des endroits abrités avec signalisation de tous les
transformateurs de secours ou déposés contenant du PCB.
En 1990, lors d’une étude réalisée avec la participation d’un expert d’Electricité De France
(EDF) afin d’auditer les dispositions prises par l'ONEP et les compléter si nécessaire pour
répondre aux Directives mises en place par la France et la CEE dans ce domaine, les
dispositions mises en place par l’ONEP ont été validées car elles se rapprochent de la
réglementation mise en œuvre en France ou au niveau européen.
Au début des années 90, CGE Maroc (actuellement Alcatel-Nexans) fut la seule entreprise
locale qui se soit montrée intéressée et compétente pour prendre en charge les appareils
réformés en vue de leur réhabilitation et de la destruction en toute sécurité du pyralène. A
cette époque, la solution privilégiée consistait en un reremplissage du transformateur avec de
l’huile minérale. Les PCB recueillis étaient conditionnés et expédiés vers un centre agréé.
Le retour d’expérience sur cette méthode a montré qu’en aucun cas elle n’a permis de
reclasser un transformateur contenant initialement des PCB purs parmi les appareils à huile
minérale présentant un taux de PCB inférieur à 50 ppm. Les transformateurs ainsi
« réhabilités » ne peuvent donc être considérés comme des matériels sans PCB et entrent dans
la catégorie des transformateurs à huile minérale contaminée.
Une opération pilote de destruction du pyralène menée par CGE-MAROC a débuté en 1992 et
a concerné un lot de 13 transformateurs. L’ONEP a pu réhabiliter 11 autres unités à PCB
avant que CGE-Maroc ne rencontre fin 1994 des difficultés liées à la réglementation
internationale à laquelle notre pays n’avait pas encore adhéré. Il est à noter que ces entraves
au transport du PCB (de l’ONEP) pour destruction ont été à l’origine de la ratification de la
convention de Bâle par le Maroc en 1996.
Dix ans après la première expertise, l’ONEP commande une seconde mission pour faire le
point sur ses pratiques et leurs résultats. Une étude sur la gestion des transformateurs
contenant du pyralène ou des huiles minérales contaminées par les PCB a été alors réalisée en
l’an 2000 avec la participation d’un expert EDF.
Parmi les transformateurs à huile minérale, l’expertise note qu’il faut s’attendre à en trouver
au moins 20% (soit plus d’une centaine) qui se révéleront contenir des PCB avec une teneur
supérieure au seuil de 50 ppm.
L’étude a aussi rapporté que le recensement des transformateurs à pyralène a été réalisé par
l’ONEP et est régulièrement mis à jour pour tenir compte des opérations menées à terme
(dépose, remplacement, mouvement, destruction…) ainsi que des nouveaux appareils entrant
dans le parc de l’ONEP suite à la prise en gérance des installations de régies municipales.
Cependant, à ce jour, hormis les transformateurs « réhabilités » par reremplissage, ceux dont
l’huile minérale est polluée par plus de 50 ppm de PCB ne sont pas identifiés.
Cet inventaire qui concerne environ 500 transformateurs, doit viser en priorité les appareils
les plus anciens, car les plus susceptibles de contenir des PCB et/ou d’avoir été contaminés
lors d’opérations de maintenance. A l’inverse, les transformateurs fabriqués et mis en service
après 1995, ou ceux qui n’ont subi aucune intervention avec contact possible avec l’huile,
peuvent raisonnablement être considérés comme non contaminés.
- Absence de réglementation spécifique sur la gestion des PBC, il n’y a pas de lois
claires obligeant les détenteurs des PCB à prendre des précautions particulières pour
leur gestion écologique.
Les différentes tâches réalisées dans cette phase sont décrites ci-après.
a) Formation
b) Sensibilisation
c) Collecte de données
Les informations obtenues sur les équipements à PCB ont pu être collectées par :
La répartition du taux de réponse obtenu pour quelques catégories de détenteurs, est donnée
dans le tableau suivant.
Les enquêtes menées ne se sont pas limitées au seul recensement des appareils électriques à
base de PCB mais elles ont aussi concerné quelques appareils et déchets contaminés : les
plastifiants, à base de PCB, utilisés dans l’industrie des peintures et vernis, les déchets des
analyses antérieures des PCB, les fusibles, les sols pollués, etc.
Une quinzaine d’analyses d’huiles de transformateurs, censés être dépourvus de PCB, a été
également rapportée et a montré que la plupart des échantillons analysés présentaient un fort
taux de contamination.
671 transformateurs
548 condensateurs
Sol contaminé 58 kg
Déchets de nettoyage et analyse 1 fût
Huile contaminée 900 kg
PCB 6 352 litres
Fusibles 3 unités
Cette étude a permis de constituer une base de données intéressante à plusieurs titres.
Plusieurs types d’informations concernant les appareils à PCB peuvent être consultés : les
Cette étude a permis aussi de présenter la répartition des transformateurs par catégorie de
détenteur et la répartition géographique des PCB sur le territoire national telle que présentée
ci-dessous :
Un autre type d’information utile pour la présente étude est celui concernant les détenteurs.
L’inventaire a montré que les principaux détenteurs sont constitués par quelques opérateurs
dont :
l’ONE,
l’ONEP,
l’Armée de l’Air,
l’OCP et
la station d’émission de la RTM à Had Gharbia (sud-Est de Tanger).
L’ONEP et l’OCP étant les détenteurs dont la répartition géographique des appareils à PCB
est la plus étendue. A l’opposé, le site de la RTM (sud de Tanger) représentant la
concentration la plus élevée en appareils à PCB.
Par ailleurs, cet inventaire a identifié 4 principaux fabricants de transformateurs sur le sol
national et rapporté l’origine et la date de fabrication de chaque transformateur et
condensateur recensé.
Le principal produit de cette phase est le plan national d’action qui se présente sous forme
d’un ensemble d’actions visant la gestion durable et écologique des PCB dans le respect des
directives de la convention de Stockholm.
D'un point de vue méthodologique l'approche pour la collecte d’information sur les travaux
d’études réalisés pour le volet dioxines et furannes s'est déroulée en trois phases :
1. Recherche sur Internet en utilisant les moteurs de recherche les plus efficaces et sur les
bases de données on-line (Ministères, journaux).
2. Il n'y a jamais eu d'inventaire relatif aux sources d'émission des dioxines et furannes
au Maroc.
3. Le suivi des émissions des dioxines et furannes se fait uniquement dans quelques
cimenteries avec une fréquence d’une fois tous les six mois.
4. Aucune étude ne semble avoir été menée par un département officiel sur ce thème à
l'exception, bien sûr, de celle menée par le MATEE-Département de l'environnement
en collaboration avec le PNUD dans le cadre du projet MOR/02/G31.
"L'incinérateur qui dérange" tel fut le titre avec lequel le journal AL BAYANE du
13/8/2003 a relaté la lutte des habitants d'un quartier de Rabat qui se sont mobilisés
pour obtenir la fermeture et le transfert d'un incinérateur appartenant au Centre
National de Transfusion Sanguine, par crainte de la pollution à la dioxine. Ce dernier a
finalement été transféré à Tit Mellil en milieu rural.
Les interviews avec les personnes ressource ont donné les résultats suivants :
a) Institut national d'hygiène (INH) : Une visite à cet institut et la rencontre de deux
enseignants chercheurs de cet organisme nous ont confirmé qu'au niveau de l'INH aucune
étude n'a été réalisée concernant les dioxines et qu'il n'y avait pas un intérêt particulier
actuellement pour cette catégorie de produits.
b) L'Institut Scientifique de Rabat (ISR) : Le chef de département de biologie et zoologie
rencontré a déclaré qu'à sa connaissance cet institut ne s'était encore jamais intéressé à la
problématique des dioxines.
c) Le centre anti-poison : Une visite et l'interview d'un responsable de ce centre a montré
qu'il n'y avait pas de recherche systématique ou une vigilance particulière pour cette
catégorie de polluants.
En conclusion, la recherche documentaire et les interviews menées ont montré qu'il n'y avait
pas parmi les scientifiques et les responsables sanitaires marocains un intérêt appuyé pour la
problématique des dioxines. Par contre, au niveau de la presse, malgré une certaine
méconnaissance scientifique des POP et des processus de pollution associés, cette dernière
fait preuve de beaucoup de vigilance et se mobilise régulièrement pour mettre à l'index les
installations suspectes ou les produits douteux.