N°8 DECEMBRE 2010

B O U L / C OT
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L’INSTITUT FRANÇAIS
ET LA PROMOTION DE LA LANGUE
Contributeurs
LYONEL TROUILLOT FREDERIC
FRANCAISE DANS LE MONDE Son mot préféré, la disponi- BOUILLEUX
bilité, qu’il soit prononcé Avec la langue française et
Tous les grands pays à forte tradition ou vécu, en français ou en la diversité culturelle et lin-
culturelle disposent d’un organisme qui créole. Né en Haïti et y guistique ce département
développe, à travers une enseigne unique, vivant encore aujourd’hui, de l’OIF, dirigé par Frédéric
des activités culturelles et linguistiques l’écrivain Lyonel Trouillot FRANCOIS Bouilleux, a pour mission
à l’étranger : le Goethe Institute, le British constate qu’il a vu le jour
Council depuis 1947, les Instituts Cervantès
TAILLANDIER de défendre les expressions
dans un pays où règnent culturelles dans toutes leurs
créés 1990 ou plus récemment les Instituts les inégalités sociales. Si hier les élites conver- différences. Une Convention,
Confucius. Avec l’Institut français, créé Mais que ce pays lui a saient en français dans le adoptée en octobre 2005 à VALERIE BARAN
par la loi du 27 juillet 2010, la France donné beaucoup. Et il croit monde entier, aujourd’hui l’UNESCO, a souhaité créer Un théâtre pour mieux
va également se doter d’une agence qui à l’idée très forte qu’il a notre langue s’est enrichie, un environnement favorable comprendre le monde,
puisse porter ses valeurs de diversité « quelque chose à restituer ». métissée, nourrie d’apports pour que cette diversité c’est là le rôle que se sont
culturelle, favoriser la coopération extérieurs et on ne peut que puisse s’affirmer et se assignés le Tarmac et sa
internationale, promouvoir sa langue s’en réjouir. Mais il faudrait renouveler, en tissant un lien Directrice Valérie Baran.
et ses artistes à l’étranger. aller encore plus loin entre culture et développe- Et ce peut être aussi la
en incitant ceux qui s’appro- ment. Et a ainsi contribué à vocation des artistes qui

EI
n créant l’Institut français, nouvel
opérateur du Ministère des Affaires
étrangères pour l’action culturelle,
l’objectif est de rassembler au sein
d’un établissement public les activi-
tés à l’étranger en matière d’échan-
ges artistiques, de cinéma, de livre
et de débats d’idée. Une enseigne unique qui
intègrera au 1er janvier la structure associative
Culturesfrance, elle-même issue de la fusion
de l’AFAA, responsable depuis 1922 de l’action
artistique à l’étranger et de l’ADPF, l’association
pour la diffusion de la pensée française.
La nouvelle agence travaillera en étroite
collaboration avec les 150 instituts et centres
culturels existants dans le monde ainsi qu’avec
les 800 Alliances françaises, avec des moyens
renforcés et des missions élargies, apportant
aides à projets et soutien professionnel.
Parmi les missions nouvelles de l’Institut français,
se trouvent la promotion et la diffusion de la
langue française. Souvent cœur de métier des
instituts à l’étranger depuis le début du siècle
dernier (le seul institut français de Londres, créé
en 1910, accueille par exemple 8000 adultes qui
apprennent le français), l’apprentissage du
« français langue étrangère » est la clé de la
constitution des réseaux francophiles, des publics
qui aiment la littérature, la cinématographie ou la
musique françaises. Dans un monde où la langue chent du français, franco- la création d’un Fonds inter- s’y produisent car ils ont la
anglaise devient prééminente comme langue philes ou francophones, national pour la diversité faculté de porter un regard
d’affaire ou de communication et dans des pays apprenants ou enseignants, culturelle, un fonds volon- original sur les sociétés et
où il est de plus en plus difficile de défendre à relier la langue à sa taire multidonateurs qui a vu de mieux les faire connaitre
l’apprentissage du français à l’école, ce vivier culture, à son histoire, le jour le 18 mars 2007. à un public avide de savoirs.
d’apprenants de français doit être apprécié et prône l’écrivain François
Débats ou polémiques,
son extension encouragée. Car l’anglais vient Taillandier, pour qu’elle
échanges ou transmission,
à vous, alors qu’on choisit le français. trouve au milieu des langues
toutes les formes d’expres-
du monde, et pas seulement
sion ont droit de cité dans
L’Institut français fédèrera deux types de en rivalité avec l’anglais,
ce lieu où la francophonie
projets pour appuyer cette nouvelle mission : une place qui lui est propre
donne à voir et à entendre.
les activités de diffusion, d’une part ; les activités et qui la fait reconnaître
Comme le précisait l’écri-
de modernisation des outils et des méthodes comme une langue avec
vain sénégalais, Boubacar
d’enseignement, d’autre part. La « démarche laquelle il faut compter.
Boris Diop : « La culture
qualité », par exemple pour garantir des outils
est le plus court chemin
pédagogiques performants et homogènes ou
d’un peuple à l’autre ».
une certification de haut niveau, sera appuyée
par des actions de formation nouvelles.
Sommaire
L’accès aux technologies d’aujourd’hui sera XAVIER DARCOS ★ Edito P.2 LYONEL TROUILLOT ★ Un écrivain haïtien P.11
stimulé ; la réflexion sur les plateformes
CLAIRE HEDON ★ La reconstruction de l’Hôpital en Haïti P.4 FREDERIC BOUILLEUX ★ Convention de l’UNESCO P.12
d’apprentissage en ligne accélérée.
FRANCOIS TAILLANDIER ★ La France et son VALERIE BARAN ★ Le Tarmac P.13
Le lien entre langue et culture a fait, patrimoine linguistique P.5 MICHEL CHOUERI ★ Association des libraires francophones P.14
dans l’histoire, la richesse de notre influence MARIE-ANNE PAGE ★ Des chefs francophones P.6 CEDRIC KALONJI ★ RFI et Mondoblog P.15
dans toutes les régions du monde : à l’Institut ALEXANDRE WOLFF ★ La langue française en 2010 P.7 JOSE-MANUEL BARROSO ★ Un Européen francophone P.16
français de renouveler ce pacte créateur
C.POISSON/F.POUSSIN ★ Les petits francophones VICKY SOMMET ★ Des dictionnaires à Kinshasa P.17
de valeurs partagées.
de New-York P.8 CHRISTIAN VALENTIN ★ Histoire de la francophonie P.18
Xavier DARCOS CLAUDINE LEPAGE ★ L’ancrage de la francophonie P.9 LA FRANCOPHONIE EN BREF ★ P.19
Président du futur Institut français DOMINIQUE BURG ★ Conseils de presse francophones P.10 FRANCAIS OU ENGLISH ★ P.20

2 Francophonie /décembre 2010 décembre 2010 / Francophonie 3


Stéfanie Schuler
LA RECONSTRUCTION
DES HÔPITAUX EN HAÏTI
Dans ce pays de 10 millions d’habitants, les 3/4 de la population
vivent en-dessous du seuil de pauvreté, c'est-à-dire avec moins de
deux dollars par jour. Et dix mois après le séisme, 1 million et demi de
personnes sont toujours sans abri, dont la plus grande majorité réside
dans la capitale. Dans ce contexte, l’accès aux soins reste très difficile.
S
urtout quand on
sait que près de 2/3
des hôpitaux sont
privés et que plu-
sieurs d’entre eux
ont été détruits totalement ou en
partie. C’est le cas de l’Hôpital
de l’Université d’Etat, le grand
CHU de Port-au-Prince, où le
bloc de chirurgie, l’école d’infir-
mières, le service de pédiatrie se
sont écroulés après le séisme.
Les patients ont été installés
sous des tentes, sur des lits de
camp, pendant plusieurs mois,
avant d’être transportés dans
des structures en préfabriqué.
Le Directeur de cet Hôpital,
le Dr. Alix Lassègue, se réjouit
de la promesse faite par le pré-
sident Sarkozy, lors de sa venue
en Haïti, d’aider à la reconstruc-
tion des bâtiments détruits,
mais son souci est également
de trouver des financements
pour payer les frais de fonction-
nement : salaires des médecins,
4 Francophonie /décembre 2010
médicaments, électricité…
Il constate que « les bailleurs
de fonds sont allergiques à
l’idée de payer des salaires. Ils
ont pour habitude de bâtir des
services ultra équipés avec tout
le matériel nécessaire, des murs
superbes mais lorsqu’il s’agit
des ressources humaines,
ils disent clairement, « nous
pouvons tout financer sauf
les salaires. »
Alors, avec des rémunérations
dérisoires comment, attirer les
médecins dans les hôpitaux
LES FRÉQUENCES RFI EN HAÏTI
Cap haïtien 100.5 FM
Gonaïves 90.5 FM
Jacmel 96.9 FM
Jeremie 92.7 FM
Les Cayes 106.9
Port-au-Prince 89.3 FM
publics ? Nombreux sont
ceux qui sont partis exercer au
Canada et aux Etats-Unis,
ou encore dans les ONG qui
proposent des salaires bien
plus attractifs. Au Ministère
de la Santé, on se demande
d’ailleurs si la présence des
ONG ne va pas déstabiliser
davantage les structures de
santé. La coordination de l’aide
étrangère est primordiale mais
n’est pas toujours facile à mettre
en œuvre. Lors de la
Conférence des donateurs, fin
mars à New York, les Etats se
sont engagés à donner près de
10 milliards de dollars pour la
reconstruction d’Haïti : l’Union
Européenne arrive en tête avec
une promesse de don de 1,6
milliard de dollars, les Etats-Unis
avec 1,1 milliard. Mais au vu de
ces montants, quelles sont les
sommes réellement distribuées ?
De nombreux Haïtiens se
plaignent encore de ne pas
voir arriver cette aide, particuliè-
rement dans les zones les plus
défavorisées. Tout récemment,
la première pierre du CHU a été
posée et la construction de
l’hôpital commencera réellement
début mars. Une promesse
qui sera donc tenue !
RFI-Claire HÉDON
QUE GAGNE-T-ON A S’APPAUVRIR ?
«Vous les Français, vous traitez votre langue comme un jardin que l’on n’entretient plus».
Le chauffeur de taxi parisien qui (je jure que c’est vrai) m’a un soir tenu ce propos, ignorait quelle était ma
profession. Il était en outre originaire du Kenya, c’est-à-dire a priori non francophone. Il avait soigneusement
appris notre langue et employait le subjonctif imparfait avec une fierté visible.
J
e crois n’avoir jamais entendu diagnostic plus
juste. Oui, les Français se conduisent en héritiers
dilapidateurs d’un patrimoine légué par les siècles,
par les œuvres, souvent par le génie populaire.
Et je parle de ces Français qui, parce qu’ils ont
le plus d’instruction, et parce qu’ils sont décideurs,
et se considèrent à ce double titre comme les élites.
L’élite économique, bien sûr, qui, sous prétexte de
compétitivité et de mondialisation, ne veut plus connaître
d’autre langue que cet anglais appauvri qui est une offense
à la langue anglaise. L’élite aussi des dirigeants de certaines
grandes écoles qui ont entrepris d’imposer peu à peu des
enseignements en anglais. L’élite politique, qui parle de plus
en plus mal (il suffit pour s’en convaincre de lire les propos
rapportés par les journaux), quand elle n’exprime pas
ouvertement son indifférence, voire son dédain pour une
préoccupation jugée archaïque. Une élite dite intellectuelle
enfin (on l’appellerait plus justement médiatique), qui
n’intervient sur le sujet que pour dénoncer une langue
française tantôt élitiste, tantôt jacobine, tantôt colonialiste,
tantôt symptôme d’un chauvinisme frileux et replié.
Mais au fait, pourquoi s’y accrocher, à notre langue,
lorsque tant de voix nous appellent à tous les abandons ?
Je répondrai : parce que (comme toute langue, d’ailleurs,
pour ceux qui la parlent), elle nous relie au passé déjà long
qui nous a fait ce que nous sommes, à tout ce que nous
avons pu comprendre et dire de l’homme et du monde.
Et j’ajouterai qu’il faut la connaître et l’aimer y compris
dans ses complexités ou ses bizarreries, grâce auxquel-
les nous sommes contraints à l’interroger, donc à nous
interroger. En effet, si l’on n’interroge pas les mots, ce
sont eux qui nous piègent, en nous faisant dire autre
chose que ce que nous pensions avoir dit. Chaque
langue est en ce sens une école de la vie.
A ceux que ces brefs arguments
laisseraient indifférents, je pose une
dernière question : dites-moi ce que
l’on gagne à s’appauvrir.
François TAILLANDIER
La langue française au défi.
Ed. Flammarion
 QU’EN EST-IL DE LA SITUATION DE
LA LANGUE FRANCAISE DANS LE MONDE ?
La réponse dépend encore trop souvent de « l’intime conviction » ou de l’humeur de la personne
interrogée, quand elle ne vise pas tout simplement à faire prévaloir une thèse ou un point de vue :
déclin inéluctable contre volontarisme plurilingue ; défense d’un passé mythifié contre pseudo modernité ;
agressivité antifrançaise contre nationalisme chauvin… pour ne citer que quelques-unes des postures
les plus couramment rencontrées dans la presse, les livres, les débats et controverses publiques.

millions de blogs en France, 60 millions d’internautes

A
yant la promotion de la langue française
au cœur de ses préoccupations-comme
en témoigne sa programmation-et souhai-
Alain Carin. tant développer une véritable réflexion
Jean-Jo el Bosen. stratégique sur la place et le rôle de la
Atelier Ferrandi.
langue française dans le monde - sujet dont les enjeux
sont décisifs à bien des égards - l’OIF s’est doté d’un
Observatoire de la langue française qui a une fonction
d’analyse, de veille et de proposition. L’ouvrage
La langue française dans le monde 2010 que
CUISINES EN DECALAGE HORAIRE l’Observatoire vient de publier peut fournir un cadre
aussi précis que possible aux discussions nécessaires
Ce livre, son esprit, son mode d’organisation, des produits du monde racontés par des chefs puis
sur le sujet. Cet outil fournira, aux débatteurs et
commentés par d’autres chefs à l’international, émane d’une démarche unique en son genre : un site
penseurs de bonne foi qui le souhaitent, l’occasion
Internet «villagedechefs.com » où des chefs, cuisiniers et pâtissiers francophones s’expriment en direct
de reprendre leurs échanges débarrassés des clichés
sur les cinq continents. Une tribune uniquement dédiée à des professionnels basés hors de l’hexagone.
ou approximations… car :
russes sur « vkontakte.ru »), même si le niveau de plu-
rilinguisme des sites institutionnels est peu satisfaisant ;
OUI, avec TV5MONDE, 2e réseau de télévision au
monde devant CNN, RFI, l’une des quatre grandes
radios internationales et une presse en langue fran-
çaise présente sur les cinq continents, la francophonie
médiatique est une réalité mondiale ;
NON, avec un réseau de coopération universitaire
fédérant, grâce à l’Agence universitaire de la
Francophonie (AUF), 750 établissements dans plus
de 90 pays dont l’Afrique du Sud, l’Algérie, le Brésil,
la Chine, le Mexique, la Russie ou la Syrie, la
Francophonie ne méconnait pas les enjeux planétaires
de la société de la connaissance ;
OUI, reconnu comme une langue officielle par 32
États et gouvernements, la plupart des organisations

C
Ce site émane de
l’association Le Club
des Chefs des deux
Hémisphères, créée
en 2007. A l’origine,
une amitié de longue date entre
moi, journaliste gastronomique et
ancienne expatriée, avec les chefs
José Martinez, installé à Sarasota
en Floride, ex-copropriétaire du
restaurant «Maison Blanche»
avenue Montaigne, et Didier
Corlou, basé depuis 17 ans à
Hanoi, Vietnam. Ce qui nous a
motivés ? Le fait qu’à l’époque, la
presse française s’intéressait bien
peu à l’international, du moins,
la presse professionnelle, pour
parler de ceux qui sont derrière
leurs fourneaux comme le disait,
à juste titre, José Martinez.
D’étude de marché en réflexions
sur la ligne éditoriale, le site s’est
développé entre ses trois
précurseurs, puis muté en asso-
ciation. Pas de pub, c’est dans
les statuts, mais la possibilité pour
chacun des adhérents, de se faire
connaître via un autre réseau, de
promouvoir et valoriser la culture
culinaire, les artisans d’un pays
d’accueil au travers de dossiers
thématiques, de fiches explicatives
comme dans Cuisines & Cultures
ou par des petites cartes postales
envoyées à travers le monde.
Village de chefs est en français.
Pas de cocorico dans cette
démarche mais justement l’in-
verse. Car il s’agit de faire valoir les
racines françaises ou francopho-
nes, en racontant des us et coutu-
mes au travers de la cuisine que
chacun des adhérents vit, aime
et pratique au quotidien sur les
cinq continents. 28 chefs cuisi-
niers et pâtissiers font aujourd’hui
partie de ce petit village à travers
le monde, aussi très attachés à
la transmission auprès des plus
jeunes. Pour exemple, 22 d’entre
eux sont venus à Paris en mars
dernier pour partager leurs
connaissances avec des ateliers
auprès de futurs professionnels
en hôtellerie-restauration et du
grand public.
Marie-Anne PAGE
Cuisines en décalage horaire
aux éd. Menu Fretin. 50 produits
racontés et cuisinés par
26 chefs des deux hémisphères
OUI, avec au minimum 220 millions de francophones
dans le monde et une dynamique africaine avérée,
on parle de plus en plus le français ;
NON, l’utilisation croissante d’un unique idiome de
communication internationale (qui s’éloigne de plus en
plus de la langue anglaise dont il est issu) ne favorise
pas une meilleure compréhension dans les organisa-
tions internationales ;
OUI, avec au moins 116 millions d’apprenants, le
français est l’une des seules langues à être enseignée
dans tous les pays du monde, même si le choix
d’une seule langue étrangère qui tend à s’imposer,
notamment en Europe, menace son avenir ;
NON, les usagers d’Internet ne renoncent pas à leur
langue comme en témoigne la diversité linguistique
toujours croissante des échanges qui se développent
sur la Toile notamment dans les réseaux sociaux (9
internationales, la Charte olympique et disposant d’un
statut privilégié dans certains territoires aux Etats-Unis,
en Inde ou en Italie, le français est une langue interna-
tionale ;
NON enfin, la création originale en langue française
n’est pas morte et donne à voir, à entendre et à lire
toutes les cultures de l’espace francophone comme
en témoignent le succès - parfois couronnés des
récompenses les plus prestigieuses comme le prix
Nobel de littérature ou le prix spécial du Jury de
Cannes - des écrivains, cinéastes, chanteurs, musi-
ciens, acteurs francophones.
OIF-Alexandre WOLFF
La langue française dans
le monde 2010 aux éd. Nathan

6 Francophonie /décembre 2010 décembre 2010 / Francophonie 7


UN NOUVEL AVENIR
FRANCOPHONE A NEW-YORK
New-York, ville cosmopolite ? Certes. New York, ville d’accueil
pour la communauté francophone ? Il n’y a pas si longtemps, on aurait
pu répondre non. Outre le Lycée Français et quelques écoles privées
ne convenant ni à toutes les bourses, ni à tous les goûts et aux
capacités limitées, il n’existait aucun programme permettant aux
familles de soutenir leurs enfants dans l’apprentissage de la langue
et de la culture françaises.
L
orsqu’en 2004, une
poignée de parents a
constitué l’association
Education Francaise
à New York (EFNY),
nous savions que la route serait
longue. La création de cours
de français “after-school” dans
les écoles publiques de la ville
de New York paraissait difficile
et celle de classes bilingues
un objectif inatteignable.
Quant à l’idée d’une option
bilingue au niveau du collège,
elle relevait de l’utopie.
Cinq ans plus tard, le bilan
nous étonne nous-mêmes :
une trentaine de classes FLAM
(Français Langue Maternelle, du
nom de la subvention du gou-
vernement français) proposent
aujourd’hui aux francophones
des cours de renforcement et
aux anglophones des cours
d’initiation, et une quinzaine de
8 Francophonie /décembre 2010
classes “dual language” sont
enseignées au niveau primaire
dans 4 des 5 grands quartiers
de la ville. Quant à la continua-
tion de ces programmes au delà
du CM2, nous y travaillons dès
maintenant. Et ce, avec le
soutien des services culturels de
l’ambassade de France et nos
bénévoles qui ont fait un travail
de terrain auprès des familles
francophones et francophiles.
Il semble que, soudain, tout le
petit monde dispersé des
expatriés, des “Francais améri-
canisés”, des familles biculturel-
les et des nombreux francopho-
nes à la tête de jeunes familles,
aient refusé le statu quo et
le monolinguisme.
La mobilisation et la détermina-
tion de ces nouveaux parents a
permis de convaincre quelques
chefs d’établissement que des
classes “dual language”
(composées pour une moitié
d’enfants francophones et pour
l’autre d’anglophones avec un
enseignement à 60% en anglais
et 40% en francais) seraient un
atout pour leur école. Aujourd’hui,
ces enfants se retrouvent tous les
trois mois dans la Gazouillette, le
journal des enfants d’EFNY.
Travailler en partenariat avec
le département d’éducation de
la ville est une des solutions qui
n’avait jusqu’alors pas été
explorées. EFNY place beau-
coup d’espoir dans une telle
collaboration et espère pouvoir
convaincre toutes les parties
concernées de l’intérêt de cette
démarche. Déjà, l’engouement
et la mobilisation des parents
new yorkais ont fait des petits.
A Boston, Dallas, Miami,
Houston, Seattle, San Francisco,
des modèles similaires sont
en cours de développement.
A terme, ce seront plusieurs
milliers d'enfants bilingues
qui, devenus adultes, rendront
encore plus vivante la
francophonie aux Etats-Unis.
Catherine POISSON
et Florence POUSSIN / EFNY
Venet d’Or 2009
LA FRANCOPHONIE,
UN COMBAT A MENER.. SANS CESSE
La francophonie ne se limite pas à la langue française que nous avons en partage, nous francophones.
Notre langue commune nous permet, bien davantage, d’appréhender des cultures de pays très
différents, de connaître des cultures francophones (québécoise, haïtienne, sénégalaise, libanaise, etc.)
qui se déclinent de manières très diverses et révèlent l’extrême richesse de la francophonie.
C
ar la francophonie est un tronc
commun qui se ramifie, de façon
autonome, à l’infini. Et j’aime à penser
que la langue française, sans laquelle la
francophonie ne pourrait se construire,
fédère le tout, cimente ces différentes cultures par
l’apport de ses valeurs humanistes et universalistes.
Sénatrice représentant les Français établis hors
de France, je voyage beaucoup à la rencontre des
Français expatriés de fraîche date ou profondément
enracinés sur leur terre d’accueil. Je ne me rends bien
évidemment pas que dans les pays francophones
mais, partout où je passe, je visite les écoles
françaises, et prends alors la mesure de ce réseau
de l’enseignement français à l’étranger, l’un des plus
denses à travers le monde. J’observe aussi la qualité
des Alliances françaises qui proposent, aux côtés des
centres culturels, des lieux d’échanges essentiels
où ont lieu des cours de langue française, des
expositions d’artistes francophones, des conférences
ou des lectures données par des écrivains
francophones en écho à des artistes locaux.
Toutes ces actions contribuent, par leur convivialité, à
la diffusion de cet esprit francophone et à sa richesse
d’expression. Cet ancrage de la francophonie dans la
vie tant économique, sociale ou culturelle de chacun
des pays, marque toute l’originalité des initiatives
menées par ses représentants et leur implication
auprès de leurs partenaires étrangers.
Les médias francophones, RFI, la pionnière, mais
aussi TV5, et plus récemment France 24, que je
connais bien pour avoir moi-même vécu 35 ans à
l’étranger et pour aujourd’hui parcourir le monde,
sont des vecteurs indispensables de la francophonie.
Ils accompagnent naturellement les Français établis
hors de France, soucieux de conserver ce lien
si précieux avec notre langue et notre culture,
mais aussi nombre de francophones ou francophiles,
amateurs de ces émissions de grande qualité.
Ainsi donc, nous le voyons tous les jours,
la francophonie, c’est aussi un combat à mener
sans cesse pour que vive son message de liberté,
d’égalité, de fraternité, de justice et de démocratie
dans un monde qui en a bien besoin.
Claudine LEPAGE
Sénatrice représentant les Français
établis hors de France
décembre 2010 / Francophonie 9
CONSEILS DE PRESSE EN FRANCOPHONIE
La France se sent parfois un peu seule parmi ses partenaires de la francophonie.
C’est le cas en matière de veille déontologique des médias, comme l’a constaté le séminaire organisé
en septembre dernier à Sofia par l’OIF et la Fédération internationale des journalistes, chargé de faire
le bilan des instances d’autorégulation francophones.
S
elon les pays, on les appelle conseil
de presse, observatoire de déontologie,
comité pour le respect de l’Ethique,
tribunal d’honneur…Mais, quel que soit
le système, et le nom de ces instances,
leur objectif est le même : débusquer les manque-
ments à la déontologie des journalistes ou de leur
hiérarchie, prononcer le cas échéant des sanctions
purement morales et donc améliorer la qualité de l’in-
formation. Cela sans intervention étatique ou politique.
C’est la profession elle-même, appuyée parfois par le
public, qui se charge de cette autorégulation.
Dans les vieilles démocraties, les journalistes
québécois, suisses ou belges ont inventé, dès les
années 70 pour les premiers, des conseils de presse
qui fonctionnent. Les nouvelles démocraties
européennes, elles, ont créé, après la chute du mur
de Berlin, des organes d’autorégulation, pour
accompagner l’arrivée du pluralisme de l’information,
dotés de codes d’éthique. Quant aux pays africains
francophones, ils ont, avant elles, partagé la même
préoccupation. Les années 90 ont vu naître des
dizaines de journaux, radios, qui peuvent pêcher
par un manque de professionnalisme. Aidés parfois
par des fonds extérieurs, notamment européens,
De gauche
à droite :
Tidiane Dioh (OIF),
Souleymane
Diallo (Guinée),
David Bongard (OIF).
10 Francophonie /décembre 2010
des journalistes ont donc mis sur pied des
instances qui se chargent, au minimum, d’un
monitoring de la presse : écoute des émissions
sensibles, lecture des journaux…
Le bilan est aujourd’hui contrasté. Ces organes
d’autorégulation – et pas seulement en Afrique –
manquent cruellement de moyens financiers et
humains. Et ils sont inopérants en période de crise,
ou de guerre, car « quand la société se fracture,
les journalistes suivent les lignes de fracture »,
pour reprendre la formule d’un confrère ivoirien.
Quant à la corruption de certains journalistes,
elle résiste à la condamnation de la profession.
Mais il reste cette foi inébranlable, même au
milieu des pires difficultés, en la nécessité pour les
journalistes et leurs entreprises de diffuser une bonne
information, garante d’une bonne démocratie.
Les journalistes français y croient aussi, ils ont des
médiateurs, mais ils rechignent toujours à se doter
d’un conseil de presse !
RFI - Dominique BURG
Médiatrice
IL FAUT SOUHAITER
QUE LES LANGUES VIVENT...
Lyonel Trouillot, quelle
est votre langue maternelle ?
Le créole qui est la langue première en
Haïti, et aussi le français. Le créole était la
langue de la nuit, du secret, de l’intimité, la
langue du peuple mais qui en même temps
était dévalorisée par la société parce qu’on
considérait que le français était la langue du
pouvoir public, celle du savoir et de
l’élégance. A l’école, quand on parlait
créole, on nous disait Exprimez-vous…,
je n’oublierai jamais cette expression assez
ridicule d’ailleurs ; que voulait dire exprimer ,
comme si en parlant créole, on n’exprimait
rien. Heureusement, beaucoup d’efforts ont
été entrepris par les écrivains dans les
années 50, le poète Félix Morisseau a écrit
une œuvre en créole très importante, puis
dans les années 60 avec les écrivains liés
au mouvement et dans les années 70-80,
quand ma génération a commencé à écrire,
c’était plus courant. Aujourd’hui, la plupart
des écrivains haïtiens écrivent librement en
créole et en français. Référence aussi à la
Constitution de 87 qui a fait du créole la
langue officielle d’Haïti où deux langues
officielles cohabitent désormais,
le créole et le français.
Vous avez suivi des études de droit
et vous avez opté au final pour la
littérature. Qu’est-ce qui a influencé
votre décision, sont-ce les mots d’esprit
plutôt que l’esprit des lois ?
L’esprit des lois, j’ai aimé, mais ma
mère a quitté Haïti m’entraînant avec elle
pour les Etats-Unis quand j’avais 14 ans
et à 19 ans j’ai choisi d’y revenir.
Mes parents avaient divorcé, mon père était
bâtonnier de l’ordre des avocats, et pour
rentrer au pays, le plus simple c’était de
faire semblant de rentrer dans l’ordre et de
faire une carrière comme mon père, hériter
du cabinet, etc..
Mais j’avoue que mon seul souci était de
découvrir mon pays et d’approcher la réalité
de la vie haïtienne. Et j’ai choisi d’écrire et
de participer au mouvement démocratique
qui se mettait en place, en cherchant à faire
tomber la dictature de Duvallier.
Vous abordez toutes les formes
d’écriture, la poésie, le roman,
la critique, la chanson, vous avez
un appétit d’écrire énorme.
J’écris les textes qui me sont nécessaires.
Même si je gagne ma vie avec ce que
j’écris, je ne fais pas le métier d’écrire ;
quand le texte vient, j’obéis à sa commande
mais pas à une commande éditoriale.
Quand j’ai commencé, le texte poétique
en créole fonctionnait, on ne le publiait pas,
on le récitait et le texte pouvait faire le tour
du territoire. Donc, la poésie était plus
efficace comme discours de libération et
comme discours de quête de soi.
J’avoue qu’à mes débuts, il y avait un côté
militant que je ne renie ni ne regrette.
décembre 2010 / Francophonie 11
Haïti est présente dans vos livres,
l’un d’eux s’appelle même « Je porte l’île
en moi comme la langue l’oxymore».
Je n’écris pas pour Haïti, j’écris avec Haïti,
avec le regard, et ce que je vois, c’est Haïti
or il n’y a pas de contradiction entre le
local et universel. Quand un écrivain parisien
écrit à partir de Paris, on ne lui dit pas que
son œuvre est nativiste. Tout le monde
connait sous “ le Pont Mirabeau, coule la
Seine” .. d’Apollinaire, un poème on ne peut
plus nativiste. Quand j’écris, je parle d’Haïti
et je parle du monde.
Etes-vous un écrivain francophone
ou de langue française ?
Ecrivain de langue française, c’est
l’expression que je préfère quand on parle
de littérature. Je n’ai pas de mépris pour
le terme francophone car il représente tout
locuteur de langue française. Mais souvent
la différence se fait entre les écrivains fran-
çais et ceux qui ne le sont pas. Ce n’est pas
parce que la langue française nous est
venue par les mauvais côtés de l’histoire
qu’elle n’est pas devenue une langue de
notre patrimoine. Mais quelque chose m’in-
quiète quand j’entend parler des valeurs de
la francophonie car la langue est un outil,
une langue dans laquelle on trouve les dis-
cours coloniaux, les discours racistes, et
aussi les Lumières, les paroles républicai-
nes, d’un côté Jaurès, de l’autre Thiers,
donc pas de fétichisme, la langue n’est pas
un être pur porteur de valeurs. Les langues
sont des outils d’expressions, de savoirs, de
sentiments, cela constitue une humanité
et c’est pour cela qu’il faut souhaiter
que toutes les langues vivent.
RFI – Entretien Vicky SOMMET
« L’amour avant que j’oublie »
aux éditions Actes Sud
ANNIVERSAIRE
Il y a 5 ans, à l'UNESCO...était adoptée la
Convention pour la protection et la promotion de
la diversité des expressions culturelles à la quasi
unanimité (deux Etats seulement ont voté contre)
dans un enthousiasme que justifiait sans doute
une mobilisation exceptionnelle due à la
conviction d'avoir remporté une vraie bataille.
EI
n effet, l'idée de cette convention
était née pour contrer le risque
d'uniformisation créé par le contexte
d'un monde de plus en plus globalisé,
où tout avait tendance à se traduire en
flux commerciaux dont l'Organisation
Mondiale du Commerce préconisait
la libéralisation généralisée. Si les pays riches, dotés
d'industries culturelles performantes, ont été les
premiers à souhaiter se défendre face à la concurrence
toujours plus pressante d'une seule super puissance,
c'est l'ensemble des pays qui ont compris l'enjeu que
représentait la sauvegarde de leurs capacités à
exprimer leurs cultures, c'est à dire leur identité,
et notamment ceux qu'une situation économique
précaire rendait plus vulnérables.
La Francophonie peut s'enorgueillir d'avoir, dès
l'origine, joué un rôle fondamental dans la négociation
de ce texte tant il est vrai qu'elle se veut, depuis sa
création il y a 40 ans, un espace de solidarité, fondé
par essence sur le principe de la diversité culturelle.
Cette Convention, entrée en vigueur dès 2007, premier
instrument juridique international à énoncer en droit
quelques principes fondamentaux comme l'égale
dignité de toutes les cultures et la nature spécifique
des biens et des services culturels ; la légitimité des
politiques culturelles menées par les Etats ou le
nécessaire rééquilibrage des échanges par l'intensifi-
cation des politiques de coopération et de dévelop-
pement. Un fonds pour la diversité des expressions
culturelles a été créé pour appuyer les projets struc-
turants contribuant à la réalisation des objectifs de la
Convention, même s'il est encore très modestement
doté. Mais beaucoup reste à faire et il faut faire vivre
la Convention.
Depuis 2005, une crise financière mondiale a fait
trembler les gouvernements et fait toucher du doigt
12 Francophonie /décembre 2010
AU TARMAC,
NOUS POURSUIVONS UNE UTOPIE
Unique théâtre français entièrement dédié à la création contemporaine des mondes francophones,
au Tarmac nous poursuivons une utopie, avec tout ce que cela signifie de générosité, de magie et de
mystère, l’utopie d’un vagabondage artistique à travers la planète.
De g. à droite, Lotfi Layouni,
Féthi Kharrat, Jacqueline Meido Madiot,
C
I
e théâtre du proche points névralgiques de la circulation pour se référer aux auteurs et artistes
Férid Boughedir, Charles Mensah, et du lointain, vivier de
Souad Houssein, Seipati Bulane Hopa,
mondiale des œuvres et des artistes de langue française hors de France,
création, est un creuset francophones. La langue ne se réduit en excluant les Français, ce qui est, je
Frédéric Bouilleux et Hassan Daldoul.
fertile d’influences, de pas à un simple code pour l’échange l’avoue, très paradoxal au regard du
croisements, d’enrichis- d’informations, elle peut véhiculer aussi sens premier du terme. Mais il existe
sement des cultures, un des valeurs, celles de l’humanisme un dispositif théâtral important en
au grand public les risques d'une mondialisation mal
trait d’union entre les cinq continents. par exemple. Elle permet surtout aux France qui leur est dédié, alors que
maîtrisée ; les conflits d'identité ne cessent de pren- Au cœur d’une société en mutation, individus qui la maîtrisent de confronter nous sommes quasiment seuls à le
dre plus de place dans l'actualité internationale.... questionnée par la diversité culturelle des points de vue différents, de les faire pour la Francophonie. Aussi nous
et pourtant l'enthousiasme pour la promotion de d’une population cosmopolite, c’est un tolérer et, dans le meilleur des cas, nous y consacrons exclusivement.
la diversité des expressions culturelles s'est émoussé. grand atelier d’artistes, un lieu de dia- d’atteindre une vérité partagée.
Comme si la Convention une fois entrée en vigueur, logue où des spectateurs de toutes ori- C’est ce que l’on appelle le dialogue Le TARMAC ne pouvait plus poursuivre
on pouvait passer à autre chose. Or la Convention gines socioprofessionnelles, économi- et qui semble cruellement manquer pleinement son évolution dans l’équi-
ques et culturelles, de toutes les clas- aujourd’hui dans nos sociétés. pement qui lui est actuellement confié
ne marque pas une fin mais constitue un outil qui doit
ses d’âge, partagent l’émotion d’une dans le Parc de la Villette. Aussi le
favoriser l’accès à une offre culturelle variée, basée pièce et la réflexion qu’elle suscite. Le monde francophone est donc au Ministère de la Culture nous offre en
sur une large circulation des artistes et des œuvres cœur de notre activité. Comme beau- 2011 de nous établir dans le 20ème
et proposée par un secteur professionnel structuré. Boubacar Boris Diop a dit la culture coup d’autres j’ai cherché pendant arrondissement de Paris, dans les bâti-
La production de biens culturels par des industries est le plus court chemin d’un peuple à longtemps, en vain, un autre terme ments du très historique Théâtre de
culturelles performantes contribue au développement l’autre. Chaque saison, nous nous pour rebaptiser cet ensemble géogra- l’Est Parisien. Dans ce TARMAC nou-
économique d'un pays en termes de revenus,
efforçons de raccourcir les distances phique mais surtout humain qui certes veau, plus grand et mieux accompa-
en conviant notre public à une explora- porte des valeurs communes, mais est gné, nous continuerons de défendre
d'emplois, d’équilibre social. Cette approche qui tion de la diversité scénique contempo- aussi souvent porteur d’une connota- l’idée que les œuvres artistiques parti-
suppose un développement de la coopération raine francophone. Théâtre, danse, tion très négative, aux relents post- cipent à la compréhension du monde,
internationale et des échanges culturels équilibrés marionnettes, contes…artistes afri- colonialistes. Il est vrai que l’expansion qu’elles nous invitent à l’aimer davan-
représente une chance peut-être unique pour les cains sub-sahariens, libanais, québé- du français au cours des siècles s’est tage en le connaissant mieux.
pays du Sud de faire enfin entendre leur voix. cois, haïtiens, laotiens, roumains, souvent réalisée aux dépens d’autres
maghrébins et tant d’autres, tous trou- langues. Au TARMAC, cet adjectif nous Valérie BARAN
vent une place sur notre plateau. permet d’éviter de longues périphrases, Directrice du TARMAC
La protection et la promotion de la diversité En produisant ou en coproduisant, et
des expressions culturelles ne se résument pas à en diffusant abondamment les œuvres
la défense des Droits de l'Homme ou du créées, nous apportons un soutien
développement durable, elles sont la condition de constant aux artistes.
l'établissement d'un nouveau dialogue des cultures,
facteur d’apaisement des conflits identitaires qui se Théâtre bigarré fourmillant de vie,
grouillant d’artistes de toutes discipli-
multiplient ; elles contribuent par ailleurs à la
nes, le TARMAC est une matrice
réalisation des Objectifs du Millénaire pour le fécondée par le monde qui enfante
Développement. De notre capacité à nous mobiliser des œuvres et assiste ses créateurs à
tous ensemble, organisations internationales, la délivrance. Tous ont en commun une
Etats, société civile, pour que la diversité culturelle ne langue, le français. Un proverbe arabe
soit pas un vain mot -une mode dont on se dit que La langue est un coursier qui
lassera comme les autres- dépend le succès de
vous porte dans les pays lointains.
Nous pouvons affirmer sans forfanterie
nos efforts pour que ce monde en pleine évolution que le TARMAC est aujourd’hui l’un des
soit à l'écoute de toutes les voix qui l'expriment.
OIF - Frédéric BOUILLEUX
Directeur de la langue française
et de la diversité culturelle et linguistique
 Librairie El Bourj. EN DIRECT DU MONDE ET EN VF
Réunis autour de la plate-forme Mondoblog (http://www.mondoblog.org), ils s'érigent en ambassadeurs
de leurs villes et villages sur Internet. Du Pérou à la Palestine, en passant par l'Allemagne ou encore

«
le Cameroun, une centaine de jeunes chroniquent le quotidien de citoyens ordinaires. Leur point commun :
la langue française. Mondoblog veut favoriser la production de contenus en langue française sur la toile
et faire émerger une jeune blogosphère francophone active. Porté par Radio France Internationale ( l’Atelier
des médias), ce projet est financé par l’OIF, la Fondation Varenne et l’ambassade de France au Sénégal.

Je ne suis pas homophobe, mais
je n’aime pas les homos ! » Le titre de
l’article du Camerounais Florian Ngimbis
est à la fois évocateur et provocateur ( 1).
En publiant ce billet, le jeune étudiant
en journalisme a soulevé un débat
passionné et quelque peu violent dans les com-
mentaires de son blog. Au Cameroun et dans
bon nombre de pays du continent africain,
DEFENDRE LA LANGUE FRANCAISE, l’homosexualité est encore considérée comme un
crime. Dans un tout autre registre, le Burkinabé
Loin du continent africain, Christelle Bittner convie
pour sa part à une visite virtuelle de Pichanaki, une
ville du centre du Pérou, à près de 400 kilomètres
à l’est de Lima. Ancienne journaliste de la presse
féminine, la jeune Française chronique le quotidien
des habitants de cette contrée. Elections locales,
guerre entre tradition et modernisme, popularité
de la médecine par les plantes, les sujets abordés
sur son Blog ( 3) ouvrent une fenêtre sur une région
très peu couverte par les médias traditionnels.

ET ESSAYER DE LA MAINTENIR, VOIRE MÊME Boukari Ouédraogo dresse le portrait de Virginie

Zerbo, la seule femme cireuse de chaussures de
DE LA DEVELOPPER … Ouagadougou( 2) . On y découvre une jeune femme
indépendante, qui excelle dans un métier tradition-
nellement réservé aux hommes.
Au-delà du besoin de s’exprimer sur l’univers
qui les entoure, les « mondoblogueurs » sont éga-
lement tentés par la possibilité de voyager sans
prendre l’avion. On en veut pour preuve la visite
de Manon Heugel dans un restaurant africain de

EI
est-ce vraiment le rôle des librairies
francophones ? En tant que libraire
francophone militant, je répondrai
bien entendu par l’affirmative ! Mais
est-ce là exclusivement leur rôle ?
En effectuant une tournée dans
plusieurs pays pour visiter des
libraires francophones, membres de l’AILF,
beaucoup de questions me sont venues à l’esprit,
et un même constat concernant les relations de
ces librairies avec les acteurs de la francophonie
qui s’y trouvent, à savoir les ambassades
francophones, les institutions françaises, comme
les lycées français, les Alliances françaises, etc...
Un autre constat, celui des frais de transport,
et des remises octroyées par les éditeurs et les
distributeurs français, sans compter pour certains
la censure, et les frais de douanes et les taxes.
Ceci pénalise le peu de lecteurs de ces régions,
qui doivent payer leurs livres bien plus chers qu’en
France malgré les efforts que font les libraires
pour limiter l’augmentation.
Les rencontres que j’ai eues avec des responsa-
bles de plusieurs de ces institutions, m’ont
confirmé que la plupart n’ont pas encore compris
que notre métier de libraire, bien qu’il soit com-
mercial, car il faut bien vivre de quelque chose,
reste un métier culturel, et particulièrement quand
nous sommes libraires francophones, dans un Berlin. « Sur mon chemin, je repère cette enseigne
pays très peu ou presque pas francophone. joyeusement lumineuse, Treffpunkt Relais de
Ils n’ont pas compris non plus que leurs missions Savanne, un restaurant africain… J’entre aussitôt,
et actions culturelles seraient à fond perdu s’il d’autant plus piquée de curiosité que je passe
n’y avait pas de libraires de langue française, actifs beaucoup de temps en ce moment à lire les
et dynamiques, qui prennent des risques commer- articles publiés sur Mondoblog, par mes confrères
ciaux, souvent incroyables, pour que la langue et consœurs du Mali, du Burkina ou du Sénégal »,
française et les cultures francophones puissent peut-on lire sur son Blog ( 4).
être bien exposées et se développer auprès des
lecteurs que ces institutions forment… Mondoblog s’appuie sur Internet et la langue
J’irais plus loin, en disant, que l’un des rôles française pour jeter un pont entre différents
importants de ces institutions, est de soutenir mondes. Une preuve qu’au-delà des frontières
et de collaborer étroitement avec les quelques et des barrières culturelles, il est possible de parler
librairies francophones de leurs régions. d’une seule et même voix.
Défendre la francophonie, c’est défendre toute la
chaîne, et la librairie francophone figure parmi ses Cédric KALONJI
maillons les plus importants. J’espère que l’OIF,
(1) http://kongossa.mondoblog.org
ainsi que les acteurs influents de la francophonie, (2) http://lemessagerdafrique.mondoblog.org
sauront soutenir et collaborer avec l’AILF pour (3) http://unautreperou.mondoblog.org
(4) http://generationberlin.mondoblog.org
qu’ensemble la langue française et les cultures
francophones puissent se maintenir, voire même
se développer. Vendeurs ambulants dans
l’enceinte de l’Université
Michel CHOUERI de Ouagadougou.
Président de l’AILF (Association internationale
des libraires francophones)

14 Francophonie /décembre 2010

« MON AMOUR
POUR LA LANGUE FRANCAISE …
A
je le dois à un grand professeur de Lisbonne et aux lbert Camus a écrit « ma patrie est
lectures que me proposaient mon père en dévorant la langue française » et Elie Wisel
Tintin, Spirou et Pilote où j’ai découvert Astérix ». « c’est cette langue qui m’a choisie ».
En citant ces deux phrases,
José-Manuel Barroso a expliqué aux
délégués des Alliances françaises
d’Europe, réunis à Bruxelles, ce que représentait pour
lui sa langue d’adoption et d’élection. « Je suis moins
attaché à la langue qu’aux valeurs de la francophonie
et je suis un fervent partisan du multilinguisme ».
Cet Européen convaincu parle le portugais,
le français parfaitement, l’italien et un peu d’allemand. «
La langue que je préfère, après ma langue
maternelle évidemment, c’est le français. Elle a été
ma langue d’ouverture au monde, à la culture » a-t-il
confié au journaliste de la Tribune. Il faut préciser qu’à
la Commission européenne, on trouve 23 langues
officielles, 3 alphabets, plus d’une dizaine de langues
régionales et 75 nationalités. Ceci pour répondre
à une vraie volonté politique : une Europe unie dans
la diversité. Avec un objectif pour les années à venir,
chaque citoyen européen devra parler au moins deux
langues étrangères. L’avenir du français est tributaire
de ces développements puisque 15 des états-mem-
bres européens adhèrent aussi à la Francophonie.
« C’est vital », a ajouté José-Manuel Barroso, « puis-
que l’Europe se partage entre trois capitales,
Luxembourg, Bruxelles et Paris ». Et de rappeler que le
français est la seule langue parlée sur tous les conti-
nents avec l’anglais et le portugais et que les locuteurs
français augmentent surtout dans les pays émergents.
« Mes années universitaires passées en Suisse
ont été les six meilleures années de ma vie » a avoué
le Président de la Commission européenne lorsqu’il a
été reçu comme Docteur Honoris Causa à l’Université
de Genève. Et de conclure : « Umberto Eco a dit que
la langue de l’Europe, c’est la traduction. C’est une
très belle phrase. Quand je pense à Bruxelles,
je pense toujours en termes de traduction. Quand
je vois un document, très souvent je me demande
comment cela se dit en anglais, en français, en
portugais. Parce que la langue, c’est plus que
la forme, c’est aussi la substance des choses ».
RFI – Vicky SOMMET
16 Francophonie /decembre 2010
500 000 DICTIONNAIRES POUR LA RDC
L
ors du XIIIème Sommet
de la Francophonie de
Montreux, le Ministre
de l’Education Nationale
de la République du Congo
a annoncé le lancement
d’une distribution massive
de dictionnaires français à la population d’ici
fin 2010. Une vaste opération, menée avec
l’aide de Hachette Livre International et de
l’OIF, qui cible les élèves et les enseignants
du primaire et les élites administratives.
Jean-Michel Ollé et Claude Coninckx,
Directeur éditorial et Directeur Afrique
chez Hachette décryptent cette action
menée à l’occasion du cinquantenaire de
l’indépendance de la RDC où le gouverne-
ment a fait de l’éducation l’un des cinq
chantiers de sa législature.
Que représente la francophonie
pour un éditeur ?
Pour nous, la francophonie est à la fois une
langue et notre matière première, mais
aussi notre fonds de commerce. Notre
public, ce sont les enfants du français lan-
gue d’enseignement (FLE), des enfants de
l’ordre de 150 millions dans le monde qui
reçoivent l’ensemble de leur éducation en
français. Or il est vrai que pour créer et ren-
forcer l’unité d’un pays, la langue est un
véhicule très important et le meilleur qu’on
puisse mettre à la disposition de cette lan-
gue, c’est bien évidemment un dictionnaire.
Quels sont, de manière plus détaillée,
les ouvrages que vous avez fournis
pour cette distribution ?
Les autorités congolaises nous ont confié
l’édition d’ouvrages spécifiques adaptés
au contexte congolais, un dictionnaire
Larousse destiné au grand public, un
Larousse de poche destiné aux élèves
de manière à ce qu’ils puissent améliorer
leur pratique du français et un dictionnaire
universel Afrique, destiné aux enseignants
qui sont les vecteurs de cette langue.
Le français, langue africaine avec
en 2050 un continent africain qui
comptera 85% des francophones de
la planète. 500 000 dictionnaires
c’est peu ou beaucoup ?
Un dictionnaire pour 100 personnes
c’est énorme. Nous ne sommes pas sûrs
qu’en France, il y ait un dictionnaire pour
100 personnes et l’initiative du Président de
la République est absolument remarquable
et unique. Cette opération est conçue
comme une sorte de déflagration, on va
donner à une personne sur 100 un accès à
la langue et au savoir. La RDC a gagné la
paix, elle a gagné à peu près le respect de
l’intégrité de son territoire et travaille à son
unité nationale,à la fierté d’appartenance à
un pays, et ça passe par une langue com-
mune, le français.
Le français langue d’ouverture,
langue de partage, les Français ne
s’en rendent pas assez compte.
En revanche, en Afrique c’est la langue
de communication privilégiée dans
la partie francophone ?
décembre 2010 / Francophonie 17
Nous croyons que la défense du français
a trop longtemps pâti de deux dangers,
l’un c’est le lyrisme, l’autre la politique.
Le français est la langue du présent en
Afrique, demain nous n’en savons rien mais
ce qui est certain, ce n’est plus la langue
du passé. Aujourd’hui, le chauffeur de taxi
à Kinshasa communique avec son client ou
avec quelqu’un du quartier suivant ou plus
loin dans le pays en français.
La RDC est le plus grand pays
francophone du monde, le restera-t-il ?
Nous l’espérons, à la fois pour la jeunesse
congolaise, pour le développement du
français, une langue qui cimente l’unité
du pays, mais aussi un espace économique.
J’en veux pour preuve le fait que la Guinée
équatoriale a récemment instauré le français
comme langue d’enseignement à côté de
l’espagnol, tout simplement parce qu’il
convenait d’intégrer l’espace économique
et francophone. Le français donne accès à
un autre monde que les langues véhiculaires.
En Afrique francophone, n’importe quel
jeune Africain parle, dès son plus jeune âge,
deux ou trois langues : la langue du village,
la langue de l’école, celle du quartier d’à
côté et le français vient s’inscrire là-dedans
avec simplement l’avantage de pouvoir
parler un peu plus loin que son village ou sa
ville.
RFI- Entretien V.S.
“UNE HISTOIRE DE LA FRANCOPHONIE” La en bref
Pourquoi pas l’histoire de la Francophonie ? Parce que je ne suis pas historien, même si j’ai vécu
pendant un demi siècle des faits d’histoire en Francophonie. J’ai traité cette histoire vécue en sept
chapitres. Je n’en retiendrai ici que deux qui me paraissent essentiels pour l’avenir de la Francophonie :
l’enseignement de la langue française et l’économie de la culture. “ LE TALISMAN BRISE ”

O
n dit généralement que le futur du
français est en Afrique. Oui, à condition
de refonder en Afrique francophone
son enseignement puisque la langue
française y est le vecteur accepté
par lequel se transmettent les connaissances et les
valeurs qu’elle porte. Héritage d’un passé colonial
révolu, l’enseignement du et en français ne répondait
plus aux exigences actuelles d’une école
démocratique et d’une éducation pour tous.
Devant la dégradation avancée du français
et de son enseignement, se sont réunis en 2003
« les Etats généraux de l’enseignement du et en
français en Afrique subsaharienne », qui ont conclu à
l’instauration d’un pacte linguistique entre les langues
natales et la langue française dont le statut sera
désormais celui d’une langue seconde. Ce qui sup-
pose des transformations profondes : c’est le bilin-
guisme qu’il faut organiser dans l’enseignement.
L’OIF a entrepris d’appuyer ses Etats membres pour
réaliser cette véritable révolution qui permettra
l’appropriation réelle de la langue française par le peu-
ple et pas seulement par les élites.
Le deuxième chantier des prochaines années
concernera l’économie de la Culture. Les industries
culturelles créent des richesses et des emplois.
Les pays du Nord en apportent la preuve.
Pourquoi pas ceux du Sud dont le potentiel culturel
est immense et reste largement inexploité ? Mais
il faut de la part de nos Etats une politique culturelle
qui en soit une, dynamique, encourageante,
avantageuse pour les entrepreneurs culturels.
En contrepartie, ceux-ci devront se soumettre aux
rigueurs d’une industrie multiforme d’un type
particulier : les filières de la musique, du livre, de l’arti-
sanat, des arts vivants, du cinéma et de la télévision
et d’autres obéissent à des règles qui, respectées,
permettront d’atteindre le plus grand nombre, tout en
valorisant les cultures par lesquelles on se reconnaît
pour s’estimer réciproquement et vivre en paix, et
par lesquelles on se fait connaître par les autres.
Tels sont les deux grands programmes qui
devraient donner à la francophonie des peuples et
à la Francophonie institutionnelle une vie nouvelle
et une pérennité accrue.
Christian VALANTIN
Une histoire de la Francophonie
Editions Belin/RFI
PRIX DES 5 CONTINENTS
La 9ème édition du Prix des 5 conti-
nents francophones a désigné son lau-
réat le 27 septembre dernier et a été
remis le 22 octobre, lors du Sommet
de la Francophonie de Montreux, à la
Roumaine Liliana Lazar pour son pre-
mier roman Terre des affranchis. Cette
édition a mis au travail quatre comités
de lecture, l’Association des écrivains
du Sénégal, l’Association du Prix du
jeune écrivain francophone,
l’Association Entrez lire de Belgique et
le collectif des écrivains de Lanaudière
de Québec. 10 finalistes ont émergé de
cette première sélection en provenance
du Canada, du Cameroun, de France
ou de Tunisie, soit 21 pays au total. En
présence d’un jury aussi prestigieux
que Le Clézio, Henri Lopes ou Paula
Jacques, le choix de cette année est
certainement un cru de qualité.
Promouvoir la langue française en
Afrique non-francophone est une mis-
sion que s’est assignée RFI et l’équipe
du site Langue française. Elle vient de
produire, avec le soutien de l’OIF, une
fiction bilingue destinée à sensibiliser le
public à notre langue, avec un dispositif
multimédia, multilingue et multicible. Ce
feuilleton radiophonique se déroule telle
une intrigue policière en 25 épisodes et
peut être mis au service d’apprenants et
de formateurs. L’histoire de Kwamé, un
jardinier non-francophone qui vivra une
dangereuse aventure au Burkina Faso
pour retrouver le Professeur Omar, plaira
aux plus jeunes comme aux adultes
francophiles ou francophones.
PRIX DECOUVERTES RFI
Avec pour mission de découvrir de
nouveaux talents, le Prix Découvertes
constitue, pour les artistes d’Afrique,
des Caraïbes et de l’Océan indien, un
appui pour leur avenir professionnel. Et
qui a permis l’émergence d’artistes tels
que Tiken Jah Fakoly, Didier Awadi ou
Amadou et Mariam et une reconnais-
sance internationale au bout du parcours
pour ces artistes en devenir. Le lauréat
2010, L‘ougandais Maurice Kirya, a reçu
son prix, accompagné d’une bourse
d’aide au développement de carrière,
d’une tournée en Afrique, d’un concert à
Paris et d’une programmation au Festival
des Musiques Métisses d’Angoulême.
Cette année, le Tchad a accueilli RFI et
son grand concert, une initiative soute-
nue par CulturesFrance, la SACEM, le
Ministère des Affaires étrangères et l’OIF.

DIRECTEUR DE LA PUBLICATION ★ Frédéric Bouilleux - John Maguire

DIRECTRICE DE LA COMMUNICATION ★ Françoise Hollman
RÉDACTRICE EN CHEF ★ Vicky Sommet assistée d’Erika Bernard
CRÉDITS-PHOTO ★ Arnaud Février/Flammarion- Eric Legrand- Bruno Nuttens/Actes Sud-
Bertrand Haecler- Anne-Danielle Naname- Cécilia Lerouge/Sénat- Dominique Burg RFI- Librairie El Bourj-
Boukari Ouédraogo- Igor Strauss- Dick Esalé/Rony Turlet- Jérôme Mazet- Caroline Lucas-
André-Joachim Wendler,Joshua Haviv,Xiaoma/Fotolia-Alex Max/iStockphoto
CONTACT ★ vicky.sommet@rfi.fr
RÉALISATION ★ didier.gustin1@sfr.fr

décembre 2010 / Francophonie 19

FRANÇAIS OU ENGLISH,
THAT IS LA QUESTION !

L
es Français sont des francophones comme les autres mais
le français est aujourd’hui majoritairement parlé par des personnes
qui ne sont pas françaises, avec plus de la moitié d’entre elles
qui sont africaines. Peut-être parce qu’en Afrique, parler français
est souvent un choix, puisque les habitants sont confrontés à un éventail
très large de langues à leur disposition.

En Algérie, en revanche, depuis l’indépendance, le français s’est vu

accorder le statut de langue étrangère. D’où une insuffisance de la qualité
du français écrit ou parlé mais une attention toute particulière est portée
dorénavant sur des objectifs spécifiques à atteindre pour répondre aux
besoins d’actualité professionnelle comme dans certains domaines identifiés
tels le tourisme, les médias, l’édition ou les finances qui représentent 56%
des actifs algériens.

Alors qu’au Rwanda, sept ans après que l’anglais soit venu rejoindre
le français comme langue officielle, tout l’enseignement bascule, depuis la
rentrée, dans cette langue jusqu’ici peu parlée dans cette ancienne colonie
belge. Une priorité accordée par le pouvoir en place pour dire que l’anglais
est plus utilisé dans les affaires et qu’il facilitera ainsi l’intégration du pays
dans la communauté d’Afrique de l’Est. Et parce que nombre de Tutsis
exilés en Ouganda sont rentrés au pays à 100% anglophones.

Mais l’anglais perd aussi du terrain, surtout chez ceux qui sont des
anglophones monolingues. Le monde des affaires londoniens préfère employer
des diplômés d’universités européennes parce qu’ils maîtrisent une langue
autre que l’anglais. De même, la domination de l’anglais sur Internet est en
baisse ainsi que pour tous les logiciels et matériaux informatiques alors que
le nombre d’apprenants d’anglais langue étrangère est estimé à plus d’un
milliard. Les bonnes nouvelles viennent d’Afrique et du Moyen-Orient
où ceux qui apprennent le français sont en constante augmentation. Enfin,
si l’enseignement du français est en progression au Canada et variable aux
Antilles, il régresse en Asie et en Océanie, et chose plus étonnante en Europe.

Le salut du français ne peut faire l’économie du continent africain où plus

de 62% de la population ont le français comme langue officielle. Mais
l’analphabétisme et la scolarisation en déclin vont à l’encontre de cette
affirmation. L’accès des Africains à l’éducation est donc bien une priorité
de la Francophonie.

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