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Anne-Marie DOLY

Mieux enseigner, mieux apprendre


à l'école :

MÉTACOGNITIONet MÉDIATION

Préface de Philippe MEIRIEU


professeur de Sciences de l'éducation
à l'Université Louis Lumière - Lyon Il
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CRDP d'Auvergne
15,rue d'Amboise
63037 Clermont-Ferrand Cedex 1
Tél. : 73 98 09 50
Fax : 73 98 09 60

Édition du CRDP d'Auvergne


Dépôt légal n°43, juin 1996
ISBN 2-86619-149-8
ISSN 1258-0929

Directeur de la publication
Pierre Danel
Inspecteur d'Académie
Directeur du CRDP d'Auvergne

Directeur de l'Édition
Jacques Salins

Auteur
Anne-Marie Doly
Professeur agrégé
IUFM de Clermont-Ferrand

Réalisation et impression
CRDP d'Auvergne

Madame Anne-Marie Doly a donné une conférence lors de l'Université d'été des
8et 9juillet 1994 tenue à l'Université de Provence sur le sujet «Comprendre et
Construire la Médiation». Celle-ci a été publiée dans les Actes édités par l'Université
de Provence et le CRDP de Marseille. Le présent ouvrage développe le thème de
cette intervention. Il est publié avec l'accord de l'Université de Provence et duCRDP
de Marseille que nous remercions vivement pour leur autorisation.
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PRÉFACE

Sans aucun doute la métacognition est-elle un des concepts qui, aujourd'hui,


s'avèrent les plus prometteurs pour l'avenir de la réflexion didactique et péda-
gogique. Il tend même, dans le cercle - il est vrai encore restreint - des forma-
teurs et des chercheurs, à devenir un nouveau «sésame», gage de sérieux et
de modernité, garantie, pour les uns d'une cohérence et d'une mise en pers-
pective nouvelle de pratiques déjà bien éprouvées comme la pédagogie diffé-
renciée ou la méthode des situations - problèmes, dernier gadgetjargonnant
pour les autres, apportant une complication inutile de plus à l'exercice d'un
métier déjà bien difficile.
C'est pourquoi le travail présenté ici par Anne-Marie Doly est si important : il
devenait essentiel de faire le point et de proposer au lecteur une synthèse
éclairée, tant sur le plan philosophique que psychologique, des travaux sur la
métacognition. Il devenait aussi essentiel de dire en quoi la métacognition
n'est en rien une nouvelle «technique» qui viendrait résoudre miraculeuse-
ment le problème de l'échec scolaire : la métacognition, cela a toujours existé
et les bons élèves l'ont toujours pratiquée, comme nous autres, anciens bons
élèves si oublieux de nos difficultéspassagères maintenant que nous sommes
installés dans la position du «sujet-supposé-savoir». Toute véritable réussite
d'une entreprise humaine suppose, on le sait depuis bien longtemps, une prise
de distance que les chercheurs ont tenté de définir et dont on pourrait discer-
ner des exemples dans la «prudence» aristotélicienne, la «faculté de juger»
chez Kantoula «décentration» chez Piaget. Rien de très nouveau, donc, dans
la métacognition, si ce n'est l'effort pour identifier exactement la nature des
opérations mentales quipermettent au sujet de contrôler ses propres appren-
tissages, d'en observerle parcours et d'enjauger l'efficacité. Rien de nouveau
que ceux quiréussissaient ne faisaient déjà plus ou moins, sans trop le savoir,
comme la prose de Monsieur Jourdain... «La belle affaire ! dira-t-on alors. Et
que voilà de bien savants traités pour ramener de telles évidences !» Certes,
certes ! Mais la question n'est pas là. La question est que nous sommes
aujourd'hui affrontés à un nouveau défi qui vient singulièrement compliquer
nos affaires : la nécessité de faire réussir ceux qui ne savent pas faire, avant
d'arriverà l'école, ce que l'école requiertd'euxpourqu'ils réussissent. Et, quand
il s'agit de faire effectuer des opérations métacognitives à ceux dont l'environ-
nementsocial a été insuffisammentstimulant, ceux qui ont toujours vécu dans
l'immédiateté, ceux quin'ontjamais réfléchi avec les adultes de leurentourage
à la manière dont on pouvait planifier une action, en réguler la démarche, en
évaluer les résultats... bref, quand il s'agit de ne plus se contenter de laisser
réussir les enfants qui réussiraient parfaitement sans nous, il nous faut bien
tenterde comprendre «commentça marche», par quelle alchimie mystérieuse
apparaît cette prise de distance qui fait du sujet le véritable acteur de ses
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apprentissages. En ce sens, les recherches sur la métacognition sont indis-


pensablespourquinese résignepas à ce quel'école, selon la célèbre formule
de Bourdieu, «transforme des différences en inégalités par son indifférence
aux différences».
Làoùles chosesse compliquentunpeu, c'est quandonfaitremarquer, àjuste
titre, quel'investigation surlesprocessus mentauxpeut, assez vite, prendre la
formed'unesorte detraquepsychologiquequichercheàs'emparerdelacons-
cience d'autruiet, sousprétexte de faire son bien, circonscritsa liberté. Carle
soupçon est toujours là et ilpèse irrémédiablementsurle pédagogue : à vou-
loir tout contrôler, même avec les meilleures intentions du monde, même au
nomd'un idéal dejustice sociale, mêmeavec cette tendresse pourl'enfant et
l'enfance qui nous fait refuser tout dressage, ne risque-t-on pas de basculer
dans un fantasme de toute puissance particulièrement dangereux ?
Certains connaissent peut-être ces expériences américaines, qui commen-
cent à s'exporteraujourd'hui en Europe, et oùl'on utilise la technique dumar-
quage nucléaire des globules rougespourrepéreren temps réelles mécanis-
mesd'apprentissage. Lesenfantssontplacés, pendantuncoursdemathéma-
tiques, parexemple, toutàla foissousperfusion et électro-encéphalogramme.
Derrière eux, en face duprofesseur, un écran de télévision par élève permet
d'observer quelles sont les zones d'activité cérébrale qui sont irriguées. Sa-
chant qu'il existe une forte corrélation entre l'irrigation cérébrale et l'activité
mentale, ilpeut ainsi vérifier que c'est bien la zone des activités logiques et
non celle des activités affectives quiest activée. Onpourrait mêmeimaginer,
si l'on quittait le domaine de «l'expérimentation psychologique» pour entrer
dans celui de la science-fiction en ses utopies les plus noires, qu'un pupitre
permette aussi à l'enseignant de réveiller, par une impulsion électrique, les
élèves récalcitrants et dont le téléviseurindiquerait qu'ils ne sont absolument
pas connectés surle cours demathématiques !Biensûr, le dispositifreste fort
imparfaitdansl'étatactueldenos connaissancespuisque, sil'élève calcule ce
quiluireste d'argent depoche pourle week-end, ilpeut facilement donnerle
change au professeur de mathématiques. Il n'en reste pas moins vrai que
cette invraisemblable expérience témoigne d'un fantasme sans doute fonda-
teurdela fonction enseignante :implanterdes connaissances dans l'esprit de
l'élève et contrôleren tempsréel son obéissance, son assujettissementàl'en-
seignement qu'il reçoit. Iln'en reste pas moins vrai que, dans l'imaginaire en-
seignant, ce serait cela la véritable efficacité... Etilest évidentque le contrôle
dela métacognificationconstitueraitunesorte d'accomplissementmerveilleux
de ce projet. Par la métacognition onpourrait, enfin, pénétrer dans «la boîte
noire», savoir et rectifier ce qui se passe dans la tête de l'autre, suivre sa
progression et intervenir à temps, avant le résultat final, le devoirraté ou la
leçon non sue. Ondépasserait enfin le seul contrôle des corps, de cette «at-
tention» si souvent quêtée en dépit de la connaissance que nous avons tous
duprodigieux savoir-faire des élèves quicontinuent si facilementà nousper-
suaderqu'ils sont «pendusà nos lèvres» alors qu'ils sont, enréalité, toutà fait
ailleurs. Nouspourrions enfin, dépasser les apparences et pénétrer la cons-
cience del'élève, poursonplusgrandbien, pourréaliserson instruction, favo-
risersa réussite sociale, voire même- et nousserions capables delejustifier !
- son accès à l'autonomie.
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Maiscen'estpas cela qu'Anne-MarieDolynouspropose ici. Enaucuncas elle


ne participe de cette fantasmatique... sans renoncer, pour autant, à mettre
touten œuvrepourfavoriserla réussite des élèves dans leurtravail. Saposi-
tionpeut, ainsi, apparaîtreinconfortable. Maisc'estlaseulepositionpédagogi-
quepossible :s'obstinerà comprendre ce quise passe dans la tête del'élève
et commentonpeutmettre enplace des dispositifs quicontribuentà sa réus-
site... et prendre acte, commeune chance et non commeune limite, de cette
«opacitéincontournabledela conscienced'autrui» dontHusserlnousrappelle
si vigoureusementle caractère insurmontable. «Onn'agitpas surles êtres» :
telle est la maximefondatrice delapédagogie quiveutse libérerdela fantas-
tique démiurgique. Mais on peut agir sur les choses, créer des dispositifs,
mettre en place des espaces, prévoir des moments où les êtres puissent se
mettre enjeu eux-mêmes. Onne déclenche pas les apprentissages comme
ondéclenchele décollage d'une fusée à CapCanaveral: onouvredespossi-
bles, on fait circulerdes objets et des questions, on suspend l'évaluation, on
crée unerelation deconfianceparunregardpositifet onfournitles outilsdont
l'autre peuts'emparer. Onouvre une brèche dans la mécanique tropsouvent
implacable des tâches scolaires qui s'enchaînent. On ouvre une brèche où
l'autrepeutse retournerverslui-mêmeet déciderdeprendredesrisquesintel-
lectuels, dejugerdelapertinencedeses actes... onnes'obstine surles dispo-
sitifs queparce qu'on sait qu'ils sont des en aucun cas des
dudéveloppementdel'homme.
Parce qu'ilss'inscriventdansleparadigmed'une «pédagogiedes conditions»,
parcequ'ilsallientl'éruditionpertinenteetl'observationempathique,parcequ'ils
sontsusceptibles deredonnerespoiraux enseignants et courage auxélèves,
les travaux d'Anne-MarieDolysont exemplaires. Ilfautl'en féliciteret souhai-
terqu'ils inspirentde très nombreuses et fécondes autres recherches.
Philippe MEIRIEU
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+Savoir ce qu'on sait, comment on fait pour savoir, prendre cons-


cience de ce que l'on fait pour le contrôler et en assurer plus de succès,
c'est ce que les psychologues appellent la métacognition qui apparaît
aujourd'hui comme un facteur essentiel de réussite scolaire dans la
mesure où elle favorise la maîtrise des apprentissages, leur transfert et
l'autonomie du sujet à travers la capacité à l'autoévaluation qu'elle dé-
veloppe.
Mais au-delà de la promesse d'une réussite technique aux appren-
tissages, l'utilisation pédagogique de la métacognition comme outil pour
apprendre, et sa nécessaire confrontation aux savoirs scolaires, en ré-
vèlent toute la signification. Des élèves qui apprennent de façon
métacognitive, non seulement se découvrent comme constructeurs de
connaissances et moyen de leur propre progrès, mais développent une
vraie motivation à apprendre qui les rend entreprenants, persévérants
et autonomes : «la signification de la métacognition est dans la chance
qu'elle donne aux élèves de conquérir un statut de sujet épistémologi-
que où la culture, qui est gage de liberté, devient objet de sa construc-
tion en même temps que de son désir» (A.-M. Doly).
Cette attitude métacognitive, cependant, n'est pas spontanée. Elle
exige la médiation experte d'un maître qui puisse viser à la fois l'acquisi-
tion de savoirs scolaires et l'apprentissage de compétences
métacognitives.
C'est, d'une part à définir la métacognition dans sa nature et son
fonctionnement puis la médiation nécessaire à sa mise en œuvre péda-
gogique, d'autre part à décrire des réalisations dans les classes et à
analyser leurs résultats que ce livre est consacré.
, agrégée de philosophie, enseigne les sciences
de l'éducation à l'IUFM de Clermont-Ferrand. Elle effectue une recher-
che sur le rôle de la métacognition dans les apprentissages scolaires
sous la direction de Michel Develay, professeur en sciences de l'éduca-
tion à l'Université Lumière-Lyon 2. Elle apublié dans la mêmecollection :
«Problèmes d'enseignement, problèmes d'apprentissage : enseignerpour
que les élèves apprennent» (1994).
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