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Paul Dorveaux

Les délibérations de la compagnie des marchands apothicaires-


épiciers de Paris (suite) (1768-1769)
In: Revue d'histoire de la pharmacie, 19e année, N. 73, 1931. pp. 101-112.

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Dorveaux Paul. Les délibérations de la compagnie des marchands apothicaires-épiciers de Paris (suite) (1768-1769). In: Revue
d'histoire de la pharmacie, 19e année, N. 73, 1931. pp. 101-112.

doi : 10.3406/pharm.1931.11416

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pharm_0035-2349_1931_num_19_73_11416
Les Délibérations de la Compagnie

des Marchands Apothicaires^- Epiciers de Paris

(Suite)

1768, 15 mars.

Réimpression du recueil des arrêts et règlements.

Le quinze mars mil sept cent soixante huit, en l'assemblée des


anciens Gardes Apothicaires Epiciers convoquée par billets en la
manière accoutumée, les Gardes ont dit qu'ils ont désiré pour leur
entière tranquillité qu'il fut fait par nous vérification et examen
de l'espèce de Collection d'arrêts et règlements communs aux deux
Compagnies dont la réimpression vient d'être terminée (au désir et
selon la charge que nous leurs en avons donnée, dès le mois de jan
vier dernier passé) ; qu'ils ont, d'après les avis et le travail du pro
cureur de notre Compagnie, rédigé et corrigé avec ledit sieur procu
reur, tant les titres ou intitulés desdits règlements, que supprimé
dans ces nouveaux exemplaires le préambule et les vu des pièces, de
ces arrêts, pour n'en avoir que les prononcés, ce qui forme environ
quarante sept pages d'impression; nous ont prié de remarquer que
le dernier Recueil imprimé dans une année de préséance des Epiciers
en 1755 étoit bien plus volumineux; qu'il y auroit cependant encor
trois ou quatre arrêts qu'il seroit à propos d'y joindre par la suitte,
en ce qu'ils concernent le débit des poisons et autres marchandise?
nuisibles ou prohibées.
Nous soussignés, après avoir soigneusement examiné le tout, les
voix recueillies selon l'usage, avons touts approuvé et approuvons
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laditte réimpression et changements faits sur l'avis du procureur, et


arrêté que nos dits Gardes veuillent bien pendant le cours de cette
année de notre préséance sur les Epiciers, veiller à ce qu'il ne soit
rien imprimé que sur le vu et l'examen de nos dits Gardes pour
obvier à ce que M" les Epiciers ne se fassent nommer ou inscrire les
premiers pendant la ditte présente année contre le droit de notre
Compagnie, corne ils l'ont fait au frontispice du- Livre d'office de
Saint-Nicolas, imprimé chés Prault O), 1768, dont un exemplaire est
actuellement sous nos yeux, quoique leur année de préséance soit
finie dès décembre 1767. Avons pareillement examiné et approuvé
l'imprimé de la sentence de police du 26 février 1657 rendue par
M. Seguier, cottée au haut des pages 56, 57, 58, pour être substituée
de l'avis de nos Gardes et du nôtre au lieu et place de la transaction
du vingt-neuf mars mil six cent quarante, pour L'usage des garçons et
des jeunes maîtres auxquels laditte transaction concernant notre jar
din seroit inutile ou étrangère; icelle transaction n'étant imprimée
qu'à l'usage des Gardes et anciens Gardes des deux Compagnies. Fait
en notre bureau les susdits jour et an. Et ont signé.
(Signé :) Mayol, C. Pia, Taxil, Poullain, Gillet, Pia, Terrier, Le Bel,
Julliot, Bert, Lapierre, Bellier, Richard. Contrôlé à Paris le quatre
juin 1768. Reçu treize sols. (Signé :) Langlois.
(Ibidem, f° 52 v'.)

1768, 6 avril.

Réponse aux menaces des épiciers.

En l'assemblée générale des Anciens Gardes Apothicaires-Epiciers


convoquée par billets en la manière accoutumée, les Gardes en charge
ont dit que les saisies faittes chés des Epiciers qui se sont trouvés
contrevenans aux règlements et notamment à l'arrêt du 11 juillet

(1) Un exemplaire de ce « Livre d'office » se trouve à la bibliothèque de la


Faculté de Pharmacie.
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1764, ont seules rendu notre administration odieuse aux Epiciers,


par quoy ils ont tentés touts les moyens de s'en vanger et se sont
mesme portés à des excès qui sont sans exemple. La conduitte qu'ils
ont tenue à cet effet et notamment la plainte impérieuse dont
M' Ferry fils aîné vous a fait lecture dans l'assemblée des 2 Compag
niesdu 9 mars dernier, les menaces de chasser l'un de nos Gardes,
la nécessité (ont-ils dit) de nous conduire à coups de gourdins, le
désespoir que leurs a causée la seule lecture de nos arrêts et règle*
mens réimprimés tout récemment (comme vous l'avez- sçu), tout
enfin nous annonce de leur part autant de passion et témérité que de
foiblesse dans leur entreprise.
L'arrêt d'aoust 1678 sur lequel ils se fondent pour empêcher
qu'aucune affaire ne s'entreprenne aux frais de la bourse commune
sans avoir pris d'abord leur avis, cet arrêt, dis-je, est leur seul titre;
mais ils n'ont pu voir qu'il n'a aucun trait aux Gardes en charge co
l ectivement (soit Apothicaires-Epiciers, soit Epiciers) : il concerne
deux particuliers (Heron et Lacoste) qui avant d'être promus à la
garderie avoient soutenu divers procès en leur propre et privé noms
par le ministère de Dohin, procureur du Corps, et en soutenoient
encor d'autres actuellement contre le gré et après le désaveu des
quatre autres Gardes. Au reste, M", nous deffendons dans cette ins
tance comme dans les autres dont vous avés été informés. Notre
intention n'est cependant pas de plaider longtems, mais de contrain
dre dans le cours de cette année nos ennemis à un accommodement
utile et solide.
Nous desirons aujourdhuy sçavoir, Messieurs, si vous autorisés
toutte notre conduitte passée, les S" Gardes Epiciers se flattant hau
tement que nous n'avons pas votre consentement. Au reste, Mess
ieurs, si vous donnés votre approbation à tout ce qui s'est passé et
que vous desiriés nous authoriser à continuer, nous aurons soin»
eomme nous l'avons fait jusques icy, de profiter de vos avis dans les
comités particuliers et au besoin, afin de marcher d'autant plus sûre
ment.
Mais considérés, Mr', qu'avec tout le bon droit et les peines imagi-
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nables, nous n'obtiendrons rien de certain que nous n'ayions d'abord


abattu et anéanti ce rocher presque insurmontable qui a été construit
et qui se fortifie de jour en jour des deniers de touts les récipien
dairestant Apothicaires-Epiciers que simples Epiciers, et qu'on
appelle bourse particulière ». Nous vous proposons de la faire verser
en entier dans la grande bourse commune du Corps pour l'acquit de
ses dettes; c'est à quoy nous allons nous occuper très sérieusement
avec le secours de vos avis au besoin, comme le seul moyen de rete
nirpar la suitte les Epiciers dans de justes bornes.
La matière mise en délibération, Messieurs les Anciens Gardes ont
authorise les Gardes présentement en charge à poursuivre les procès
encommencés par le ministère des Officiers de Justice de notre Comp
agnie, et qu'au surplus les Gardes appelleront en comité tel nombre
d'anciens qu'il leur plaira pour aviser aux opérations à entreprendre
et référer du tout à l'assemblée prochaine de touts les anciens gardes
de notre ditte Compagnie. Et ont signés en notre bureau les dits
jour et an.
(Signé :) Poullain, C. Pia, Gillet, Cessac, Le Bel, Terrier, Couzier,
Demoret, Mayol, Richard, Lapierre, Bert, Pia, Bellier, B. Julliot, Bat
aille.
(Ibidem, f° 53 r°.)

1768, 29 avril.
Réparation des conduites d'eau du Jardin des apothicaires.

Vu les refus des trois. Gardes Epiciers de concourir aux dépenses


de la Bourse commune qu'ils se sont interdit (disent-ils) par délibé
ration de la fin de décembre dernier, en l'assemblée des Anciens
Gardes de l'Apothicairerie-Epicerie convoquée par billets en la man
ière accoutumée le vendredi vingt neuf avril mil sept cent soixante
huit, les Gardes ont dit que, voyant depuis plus d'un mois que le
tuyau de conduite des eaux d'Arcueil n'en apporte pas une goutte
à leur réservoir de leur maison et jardin du faubourg Saint-Marcel,
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par la rupture et le mauvais état des dits tuyaux occasionnés par la


force extraordinaire des gelées du mois de janvier dernier passé;
que ce malheur attire d'autant plus leur attention que la culture
des plantes est totalement interrompue dans le tems où les Etu
diants abondent audit jardin, et que, de plus, en cas d'accident d'in
cendie en laditte maison ou à ses environs, ce réservoir qui est tot
alement vuide ne seroit d'aucun secours, au grand risque du voisinage
qui sçait qu'il y a toujours en laditte maison provision d'ëau d'Ar~
cueil et un dépôt des sceaux de la Ville tenant audit réservoir, comme
on a eu le malheur de l'éprouver tout récemment dans l'incendie
arrivée au Monastère de la Présentation, que d'ailleurs le puits du
jardin d'en bas ne fournit plus d'eau à cause de sa destruction ou de
son mauvais état ; pourquoy vu l'urgence des réparations et réfection
tant de laditte conduitte de tuyaux de plomb que du dit puits, ils
auroient promptement pris les avis tant de Mr Sirbaut, inspecteur
des fontaines de cette ville, que Monsieur Egresset, architecte de la
police, comme gens les mieux connoissants, lesquels estiment lesdits
ouvrages d'entretien non susceptibles de marché mais de valeur ordi
naire, et lesquels, s'il vous plaît, Messieurs, d'autoriser les Gardes
Apothicaires-Epiciers à cet effet, veilleront à ce que le tout soit réta
blipour le mieux avec la plus grande économie.
A quoy touts les assistans consentent et donnent touttes authori
sations, le tout conformément à l'arrêt de la Cour de mars 1640, et
engagent et recommandent aux S" Gardes la plus grande célérité
pour les raisons susdittes tant de la seureté publique que de l'u
rgence de la culture des plantes qui dépérissent journellement. Et ont
signé les dits jour et an.
(Signé :) Gillet, Ricjiard, Terrier, Mayol, Le Bel, Couzier, Lapierre,
Bert, Pia, Bellier, Bataille, B. Julliot.
(Ibidem, f 53 V.)
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1768, 13 juin.
L'affaire des épiciers et l'affaire de la Faculté de Médecine, qui veut
empêcher le cours de botanique chez les apothicaires.

Le lundi treize juin mil sept cent soixante et huit, M" les anciens
Gardes de l'Apothicairerie-Epicerie assemblés suivant la convocation
faitte et la manière accoutumée ont approuvés l'obtention faitte par
les Gardes en charge vendredi dix du courant de deux arrêts de la
Cour de Parlement, l'un qui évoque toutte la procédure pendante
par devant Monsieur le Lieutenant de police sur les plaintes insul
tants faittes contre nos dits Gardes par les Gardes Epiciers aussi
en charge, pour être jugée en la Tournelle, l'autre qui permet d'assi
gner la Faculté de Médecine pour plaider sur l'opposition par elle
faitte à notre Cour de Botanique, et cependant ordonne que ledit
cours sera continué avec nouvelle apposition d'affiches pour avert
irles Elèves; voulants et permettants les anciens soussignés que
Mr Sohier, procureur en laditte Cour, continue et fasse touttes pour-
suittes selon sa sagesse et prudence et conformément aux avis de
Monsieur Babile notre avocat relativement auxdits deux arrêts.
(Signé :) Poullain, C. Pia, Gillet, Richard, Le Bel, Taxil, Terrier,
Couzier, Pia, Mayol, Bert, Lapierre.
(Ibidem, f° 54 r".)

1769, 13 février.

Règlement de dépenses contesté par les épiciers.

Les Gardes et anciens Gardes de l'Apothicairerie-Epicerie en leur


assemblée convoquée par billets en la manière accoutumée, après le
rapport fait par les Gardes en charge de la communication par eux
donnée (dès le mois de février mil sept cent soixante huit aux trois
autres Gardes Epiciers leurs collègues dans les séances ordinaires
du bureau qui se tient touts les vendredi) des ouvrages d'entretien
alors indispensables à faire en notre maison rue de l'Arbaleste, la-
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qu'elle manquoit totallement d'eau par le dépérissement du puits et


des tuyaux de conduitte des eaux d'Arcueil,
Vu aussi notre délibération du 29 avril dernier dans laquelle sont
encor consignés les refus réitérés des dits Epiciers de nous entendre
et leur obstination à ne vouloir que les deniers d'une bourse qui est
commune entre eux et nous, ne servent doresnavant à acquitter au
cun marchés ny dépenses mesme d'entretien de notre ditte maison
et jardin, se fondants (disent-ils) sur un écrit fait et concerté en-
tr'eux seuls le trente décembre mil sept cent soixante sept qu'ils
qualifient de délibération, et imaginants qu'il est à leur arbitre de
renoncer ainssi tout à coup aux délibérations1 précédemment faittes
et signées par les deux Compagnies assemblées, et notamment à celle
du seize janvier mil sept cent soixante cinq, et d'anéantir de leur
pleine authorité l'arrêt de la Cour du vingt neuf mars mil six cent
quarante après son exécution constamment suivie jusqu'à ce jour,
Le tout mûrement réfléchi et examiné, il a été arrêté d'avis una
nime que sur les demandes des ouvriers et jardinier pour être payés
de ce qui leurs est dû pour les ouvrages et réparations dont est ques
tion pour l'année dernière 1768, nos Gardes en charge donneront
tout consentement au payements à faire des deniers de la bourse
qui est commune entre les Epiciers et nous, tels que de raison et
après les taxes de M' Egresset, expert précédemment nommé par
Monsieur de Sartine, et de manière que les deffaut et retards de
payement ne nous puissent être imputés et que les officiers de justice
attachés à notre Compagnie feront sur ce tout ce qui sera de leur
ministère. Et cependant à l'avenir et jusqu'à ce qu'il en soit autr
ement ordonné, la transaction et l'arrêt du 29 mars 1640 qui l'homo
logueseront provisionnellement exécutés comme ils l'ont été depuis
cent vingt sept ans, et nonobstant l'arrêté fait à notre préjudice par
les Epiciers seuls le 30 décembre 1767 qu'ils nous opposent contre
touts leurs engagements précédens. Il a été convenu de plus et pour le
bon ordre seulement que, quoique les Epiciers ayent par leur dit
arrêté de décembre 1767 renoncé et abdiqué touts usages, règlements
et délibérations contraires à leurs nouvelles prétentions, nos Gardes
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continueront comme ils l'ont fait en 1768 de communiquer et détail


ler aux 3 autres Gardes le bureau tenant les articles d'entretien et
des réparations utiles et nécessaires de notre ditte maison et jardin
et mesme en prendront acte s'il est nécessaire et en cas de refus des
dits S" Gardes Epiciers de faire les dittes réparations, leur nécessité
sera constatée par l'architecte de la Police, et que quant aux addi
tions ou constructions nouvelles s'il s'en présentoit à faire aux dits
lieux; ils en sera auparavant référé à Monsieur le Lieutenant Général
de Police de la mesme manière que lors de la délibération du Corps
du 16 janvier 1765; le goût naturel de ce Magistrat pour la perfec
tiondes sciences et arts,- son amour pour les citoyens de cette capi
tale et la bienveillance particulière dont il nous a honoré jusqu'icy
nous persuadant qu'il nous fera toujours justice en de pareilles occa
sions et en toutes autres. Et ont signé.
(Signé :) C. Pia, Taxil, Demoret, Julliot, Mayol (etc.).
(Ibidem.)

1769, 5 juin.
Subvention accordée à la nouvelle Ecole gratuite de dessin.

Le lundi cinq juin mil sept cent soixante neuf en l'assemblée des
Anciens Gardes de l'Apothicairerie-Epicerie convoquée par billets en
la manière accoutumée, les Gardes en charge, M' Julliot portant la pa
role, ont dit que l'exercice d'une des parties essentielles de la Méd
ecine, qui nous est confié et qui nous occupe touts entier ne nous a
pas permis jusques icy de connoitre par les détails touts les avan
tages que la société retire de l'Ecole Gratuite de Dessein qu'il a plû
à S. M. d'établir en cette capitale par lettres patentes du vingt octo
bremil septcent soixante sept, que néantmoins la simple lecture de
ces lettres qui sont icy sous nos yeux, et la voye du public, nous ont
suffisamment instruit que cet Etablissement, en secondant les talens
et l'industrie dans les professions d'arts et métiers, ne pouvoit que
rendre le commerce de plus en plus florissant et procurer tout à la
fois le bien de l'Etat et la félicité des peuples.
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Que nous avons été singulièrement frappés du vray principe de


grandeur et de bienfaisance qui en a insinué et mesme dicté le projet,
lequel tend à prester une main secourable à une infinité de familles
infortunées chargées d'enfans dont les dispositions naturelles ou les
talens innés seroient restés inconnus, fautte d'estre par ce nouveau
moyen tirés de l'obscurité et secondés comme il convient.
Que l'autheur de cet Etablissement a été bientôt décelé par le choix
que le Souverain a fait du Magistrat (à qui la sûreté et la salubrité
des citoyens de cette ville sont confiés) pour présider à cette Ecole,
qu'à la simple réflexion que l'on fait sur le noble principe d'human
ité qui en a fourni la première idée et sur les peines que prend ce
Magistrat pour conduire son ouvrage à sa perfection, nous pensons
qu'il n'y a aucun Corps, mesme parmi ceux qui n'auroient pas encor
eu occasion de réclamer et de ressentir les effets de sa bonté, qui ne
doive s'empresser d'y concourir; ce sera mesme en quelque sorte en
partager l'honneur et se rendre de plus en plus dignes de la consi
dération, surtout pour une Compagnie telle que la nôtre, qui unique
mentoccupée de l'objet de la conservation de la santé pouroit peut-
être au premier abord regarder l'accroissement des connoissances
et des talens dans les arts méchaniques et dans les métiers comme
une chose qui lui seroit étrangère, mais qui s'étant fait en touts
temps un devoir de ne diriger sa conduitte et son interest personel
que par la loy de l'intérêt général de la société, regarde cette nouv
elle entreprise comme l'une des plus utiles et des plus glorieuses.
Que cette mesme bienfaisance qui (fait) tant d'honneur à l'au
theur, étant aussi le guide de ceux qui s'occupent de la pharmacie et
qui depuis longtemps ont donné toutte sorte de preuves de leur zèle
pour l'instruction gratuite de leurs élèves, ce seroit de notre part
oublier en quelque façon le principe constitutif de notre état, que de
ne pas faire encor de nouveaux efforts pour le service du public et
pour coopérer autant qu'il est en nous au soutien des leçons dont il
s'agit. Si la conservation de la santé dont nous nous occupons, Mess
ieurs, est surtout prétieuse aux indigens, mettons les à portée d'en
jouir plus favorablement en se rendant utiles à eux-mesmes et à leur
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famille. Aydons les à proffiter constamment de l'éducation gratuite


qui leur est offerte; ce seroit trop peu que de nous en tenir à remp
lir nos seulies obligations d'état. Il suffît mesme que Monsieur
de Sartine ait imaginé le projet et qu'il le prenne à coeur pour que
nous nous faisions un vray devoir et un honeur de participer à l'en
treprise d'un Magistrat qui nous a donné tant de fois des marques
de son attachement à notre Compagnie.
A cet effet, nous vous proposons, Messieurs, d'agréer et consentir
de votre part (sauf à M" les Epiciers à en délibérer de leur côté)
qu'il soit fourni chaque année des deniers de la bourse qui est com
mune entr'eux et nous, une somme de deux mil livres pour contri
buerau nom du Corps à l'établissement et au soutien de l'Ecole
royale gratuite de dessein dont il vient d'être parlé, laquelle somme
de deux mil livres sera payée à l'époque, de la manière et à telle
personne que le Magistrat aura indiqué, et employée, sous son bon
plaisir, dans les dépenses du receveur comptable sur le mandement
des Gardes qui seront alors en charge ; laquelle somme sera prise cha
que année, comme dit est, sur les deniers communs, notamment sur
le produit des revenus des dix sols par millier pezant de marchand
ise et autres que le Corps est authorise à percevoir par Lettres pa
tentes du neuf décembre mil sept cent quarante cinq,
La matière mise en délibération et après que chacun des Mess
ieurs présents a mûrement réfléchi et examiné, touts d'une voix
unanime ont agréés et accueillis entièrement les propositions faites
par les Gardes en charge, et les acceptent dans tout le contenu cy
dessus, et, afin qu'elles ayent leur exécution, ont priés lesdits sieurs
Gardes en charge d'en conférer avec les sieurs Epiciers leurs collè
gues et de tacher de les engager à se réunir au plus tôt pour terminer
cette fondation dans une assemblée des deux Compagnies.
Délibéré en notre Bureau, Cloître Sainte-Opportune, les jour et an
cy devant dits.
(Signé :) B. Julliot, Bataille, Cozette (etc.).
(Ibidem, f 55 r\)
LES DÉLIBÉRATIONS DES MARCHANDS APOTHICAIRES-ÉPICIERS DE PARIS 111

1769, 21 août.

Opposition de la Compagnie à l'octroi d'un privilège pour l'exploi


tationde deux remèdes secrets par le sieur Agiront

En l'assemblée des Maîtres et anciens Gardes de l'Apothicairerie


convoquée par billets en la manière accoutumée en conformité de
l'art. 29* des Statuts, et en exécution d'un arrêt de la Cour du Parle
ment en datte du treize juillet dernier passé par lequel la Cour
entr'autres choses ordonne que les dittes Lettres patentes seront
aussi communiquées aux Maîtres du Corps et Communauté des Apo-
thicaires de cette ville, convoqués et assemblés en la manière accou
tumée pour donner leur consentement à l'enregistrement et exécu
tiondes dittes Lettres patentes ou y dire autrement ce qu'ils avise
rontpour le tout fait rapporté et communiqué au Procureur Général
du Roy être par lui pris telles conclusions et par la Cour ordonné ce
qu'il appartiendra, etc., ledit arrêt et les pièces y jointes signiffié aux
Maîtres et Gardes le dix sept du présent mois d'aoust par Jarry. Les
Gardes en charge ont représenté à l'assemblée qu'il s'agit d'enregi
strement en la Cour demandé par le nommé Barthélémi Agironi, se
disant botaniste, de Lettres patentes par lui obtenues le 21 juin der
nier passé à l'effet du privilège exclusif de la composition et du débit
du Baume odorifique et d'un Remède antivénérien pendant l'espace
de 15 années par toutte l'étendue du royaume..
Sur quoy la matière mise en délibération, les voyes recueillies selon
l'ordre du tableau, il a été arrêté unanimement que les Gardes en
charge formeront opposition à l'enregistrement des dittes lettres pour
causes à déduire. Fait les jour et an que dessus.
(Signé :) Poullain, Gillet, Richard, Le Bel (etc.).

1769, 11 décembre.
Acceptation d'un arbitre pour la solution du conflit avec les épi
ciers.

En l'assemblée des Gardes et Anciens Gardes des Apothicaires-


112 REVUE D'HISTOIRE DE LA PHARMACIE

Epiciers convoquée par billets en la manière accoutumée, Mr Julliot


a fait lecture d'une lettre de Monsieur le Lieut. Général de Police,
qui luy a été remise le neuf du même mois, par laquelle il paroit
que ce Magistrat seroit infiniment flatté de pouvoir rétablir la paix
et la bonne intelligence entre notre Compagnie et celle de M" les
Epiciers ; que pour ce il luy paroit que le moyen le plus simple seroit
de nommer de part et d'autre deux Commissaires qui redigeroient
des Mémoires sommaires sur les points qui les divisent et qu'ils se
communiqueroient respectivement, et sur lesquels il seroit arrêté
ce qui seroit convenable dans des conférences auxquelles le Magistrat
veut bien offrir de présider.
La Compagnie, sensible aux offres obligeantes faittes par un Mag
istrat aussi bienveillant, désirant lui donner des marques de sa sou
mission à ses volontés, a nommé pour Commissaires deux de leurs
anciens Gardes, Monsieur Richard, ancien Consul de cette ville et
Administrateur des Hôpitaux, et Monsieur Demoret, aussi Consul de
Paris, qu'elle a priés de vouloir bien se mettre en état de seconder
le plus tôt possible les vues généreuses du Magistrat; et luy prouver
notre satisfaction de l'avoir pour conciliateur; en attendant, les Gar
des en charge sont priés de se retirer vers Monsieur de Sartine pour
luy témoigner notre reconnoissance et l'assurer que notre Compag
nie accepte, avec la plus grande satisfaction, sa médiation. Ainsi
arrêté d'un avis unanime les susdits jour et an. Et ont signé.

(Signé :) Gillet, Cessac, Richard, Le Bel, Tâxil, Terrier, Mayol,


Bellier, Bert, Julliot, Lapierre, Cozette, Demoret, Bataille.

(Ibidem, f 56 r°.)
(A suivre.)

Le Gérant : E.-H. Goitard Imprimer!» SpécUle 4e L S. H. P., Toulouie.

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