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Le bassin méditerranéen 

: un espace de crises et de rivalités


internationales depuis la fin de la guerre froide
INTRODUCTION
CONTEXTE  : N’étant ni un État ni une nation, n’ayant pas d’existence juridique ou idéologique, le bassin méditerranéen a été
le berceau de nombreuses civilisations depuis les premiers établissements à Jéricho en 9000 av. J.-C. Pas d’hymne, pas de
drapeau, pas de devise, mais des peuples issus de trois continents qui y viennent se frôler, se frotter, se toiser, souvent se
combattre et plus souvent encore se mêler de leurs intérêts qui convergent et parfois divergent en suscitant de multiples
conflits pour le contrôle de la terre et des esprits.

DEFINITIONS  : LE BASSIN MEDITERRANNEEN désigne ainsi les pays et les régions proche de la Mer Méditerranée, Ceux qui
couvrent le Sud de l’Europe, le Proche Orient et le Maghreb, il est donc considéré comme un simple théâtre d’opération, dans
un contexte où aujourd’hui comme au temps de LA GUERRE FROIDE (1947-1991) il est hors de question, pour des puissances,
de se heurter de front ou sur leur propre territoire. Son histoire ne manque pas de CRISES étant une période de dépression ou
de stagnation durable de la conjoncture économique, ou de RIVALITES INTERNATIONALES désignant les concurrences se
prétendant aux mêmes avantages, éminemment géopolitique ce qui fait de cet ESPACE méditerranéen qui selon Jacques Lévy
« un objet social défini au minimum par trois attributs, la métrique (ici l’ensemble des pays qui bordent la Méditerranée),
l’échelle (ici internationale), la substance (qui est l’histoire de la religion et le peuple méditerranéen) » un point névralgique
animé par des tensions locales dont l’impact est parfois mondial.

INTERET DU SUJET  : Esquisser une géopolitique de la Méditerranée n’est donc pas sans intérêt puisqu’elle révèle une grande
mutation actuelle du pouvoir international dans laquelle se nouent des questions majeures :

QUESTIONNEMENT  :

PROBLEMATIQUE  : Le bassin Méditerranéen n’est-il pas un enjeu pour les grandes puissances et une opportunité de
projection de puissance ?

PLAN  : Afin d’y répondre, on rappellera les paramètres pérennes et les facteurs de tension ou de conflits. Ensuite, on
s’attachera, à examiner les perceptions, les objectifs et les stratégies mis en œuvre par les grands acteurs impliqués dans cet
espace avant de mesurer les risques et les menaces qui pèsent sur celui-ci et d’identifier les enjeux. La conclusion s’efforcera
d’apporter des pistes d’efforts visant à contribuer à l’émergence d’un espace de paix, de prospérité et de sérénité.

I- Le bassin méditerranéen : Un espace de tensions géopolitiques


Au carrefour de trois continents, la Méditerranée est un espace sous tension, qui a longtemps été investi d’enjeux stratégiques
importants : confrontation entre Arabes et Européens, rivalité entre puissances, colonisation, contrôle des détroits et du canal
de Suez. Elle reste un espace de confrontation entre grandes puissances, on l’a vu avec la question syrienne : des puissances
lointaines (États-Unis, Russie) continuent de s’y investir, y compris de nouveaux venus comme la Chine. C’est un axe de
passage entre l’Orient et l’Occident, caractérisé par une fragmentation économique, sociale et politique majeure, facteur de
crises, de déstabilisations régionales et de menaces transnationales par une interpénétration des trafics mafieux comme la
drogue, l’argent, les commerces illicites d’armements, le terrorisme

A- Grands enjeux et principaux défis


Espace commun fragile, la mer Méditerranée est également l’un des principaux axes commerciaux du monde. Véritable
cordon ombilical énergétique et économique entre Orient et Occident, les équilibres environnementaux, sécuritaires et
sociétaux y sont précaires. Préserver cet espace de vie, rendu particulièrement fragile par sa petitesse, tout en permettant à
chacun d’en vivre, tel est le dilemme auquel doivent répondre ses quelque vingt-trois États riverains. Région qui polarise, il
s’agit également d’une zone plus perméable que tout autre espace frontalier, du fait de son organisation physique, le pourtour
méditerranéen étant particulièrement sensible aux effets contaminants des crises. C’est également une zone de friction entre
les riches et les pauvres, entre une Afrique en plein boom démographique, un monde arabe sous tension et une Europe
tiraillée entre ouverture et protectionnisme. Aussi, l’instabilité chronique en Méditerranée orientale, la fébrilité politique et
sociale des sociétés d’Afrique du Nord et le risque migratoire Sud-Nord sont autant de motifs de vigilance, tout comme la
préservation indispensable de notre environnement commun : la mer Méditerranée met en effet cent ans pour se régénérer.

B- Un foyer permanent de crises


Les foyers de crise déclarés ou potentiels sont nombreux. Depuis près de trente années, le bassin méditerranéen connaît un
cycle crisogène qui a progressivement touché de manière directe ou indirecte une majorité de ses riverains. Les guerres dans
les Balkans et leur pénible sortie de crise, la guerre civile qui a ravagé l’Algérie dans la dernière décennie du XXe siècle, les
guerres par procuration en cours au Levant et les suites des « printemps arabes », notamment en Libye et en Syrie, sont à la
fois des métastases de crises plus lointaines et plus profondes et des laboratoires de rapports de forces où se joue le nouvel
équilibre des puissances globales et régionales. Un des enjeux pour les pays riverains, l’Europe et la France est de se
réapproprier la gestion de ses crises, en refusant la dépossession et l’instrumentalisation par des intérêts externes. La création
d’un multilatéralisme local, probablement subrégional tant les bassins orientaux et occidentaux de la Méditerranée sont
différents, est probablement une piste à creuser. L’intérêt régional milite pour un retour à la stabilité par le dialogue et la
coopération. De ce point de vue, le meilleur atout de l’Europe et de la France consiste à pouvoir parler avec tout le monde
sans tabou et de pouvoir agir comme un intermédiaire crédible et légitime dans la région. C’est d’autant plus important à
l’heure où les États-Unis de Donald Trump font monter la pression à l’encontre de l’Iran, menaçant de mettre le feu aux
poudres d’un conflit qui pourrait aisément impacter la sécurité de la Méditerranée orientale et de la mer Rouge. Cette
persistance de foyers de crises impose que la France, a minima, réfléchisse à la formalisation d’une stratégie cohérente,
coordonnée et interministérielle en direction des rives Sud (Maghreb) et Est (Machreck) de la Méditerranée. Cette stratégie
multivectorielle doit prendre en compte les espaces aéromaritimes adjacents (mer Adriatique, mer Égée et mer Noire) et
s’étendre en direction de la mer Rouge et de l’océan Indien de manière à protéger l’axe de communication maritime 13 vital
reliant l’Europe à l’Asie par la route la plus courte. Limiter la stratégie de la France à la seule Méditerranée « classique », c’est
se mettre des œillères en défendant son dernier périmètre de sécurité sans l’indispensable vision d’ensemble qui peut seule
assurer nos intérêts globaux. La partie « Mémoire stratégique » est là pour nous rappeler qu’à chaque soubresaut de l’histoire
récente, la Méditerranée reste un enjeu sécuritaire et géopolitique aussi bien pour les acteurs globaux que pour les acteurs
régionaux. Ses fondamentaux – son logiciel de base en quelque sorte – restent très similaires, qu’il s’agisse de l’euphorie liée à
la fin de la guerre froide et au processus de Barcelone en 1995, douchée par les attentats de 2001, la guerre en Irak de 2003 et
ses suites qui continuent d’impacter les équilibres régionaux. Aujourd’hui comme alors, ceux qui réfléchissent à la stratégie
développent les mêmes réflexes et se posent les mêmes questions.

C- Théâtre de nombreuses guerres

II- Le bassin méditerranéen : un espace de rivalités internationales


A- Dilemmes et ambitions des principaux acteurs
Cette zone d’intérêt majeur a donc besoin de coopération, mais elle est le lieu où se jouent les ambitions des grandes
puissances et de certains acteurs régionaux. Loin des rêves européens d’un monde post-historique pacifié, la Méditerranée
reste un espace géopolitique qui concentre les rivalités et les jeux d’alliances. Après une phase de flou stratégique liée à la fin
de la guerre froide, la Méditerranée est redevenue un lieu de concurrence entre les États-Unis, la Russie et bientôt la Chine qui
l’intègre dans sa vision stratégique de long terme. Pour les États-Unis, le bassin méditerranéen est à nouveau un espace
stratégique important. Malgré la disparition des enjeux pétroliers venant du Golfe, la rivalité stratégique avec la Russie,
l’endiguement de l’islam radical et le contrôle des flux économiques européens et asiatiques justifient une implication forte. La
Russie a retrouvé en Méditerranée, grâce à son implication dans le conflit syrien, son accès aux mers chaudes, sa posture de
grande puissance militaire et sa capacité de nuisance et donc d’influence sur les affaires européennes. A priori éloignée des
enjeux vitaux de la Chine, la zone méditerranéenne est une région de premier plan dans le cadre de ses nouvelles routes de la
soie. La sécurité de ces routes destinées à écouler ses productions sur le marché européen alors qu’elles doivent traverser les
zones les plus conflictuelles du moment, lui est indispensable. Le volet sécuritaire qui accompagne en filigrane les projets
portuaires en Méditerranée, en atteste. Grande absente du jeu des puissances, l’Union européenne a un positionnement
intéressant tant il est à la fois objet de dépendance et d’indifférence. Certains États-membres de l’Union – parfois les plus
fragiles – sont directement confrontés aux problématiques engendrées par cet espace et se sentent, à cause du manque de
réactivité de leurs partenaires, plus méditerranéens qu’européens. Enfin, les puissances régionales – alliées ou non aux États
occidentaux – jouent également des tensions méditerranéennes pour y accroître leur influence. Parmi elles, la guerre
souterraine entre l’Arabie saoudite et ses alliés émirati et égyptiens d’un côté, la Turquie et le Qatar associés parfois à l’Iran
d’un autre, est une force de clivage qui structure la rive Sud de la Méditerranée dont les effets seront, quels que soient les
vainqueurs, négatifs pour l’Europe. C’est pour cela qu’il est important de développer tous les outils intellectuels qui favorisent
la réflexion prospective, contribuant ainsi à l’anticipation stratégique

B- La fracture entre le Nord et le Sud

III- Mais aussi des tentatives de regroupements régionaux qui s’avère


cependant difficiles
A- UPM
B- Les stratégies de sécurité
Sur le plan stratégique, la sécurité des lignes de communications maritimes méditerranéennes constitue un enjeu non
seulement pour les pays du pourtour mais aussi pour l’ensemble des grands pôles économiques et énergétiques mondiaux
reliés par ce biais que sont l’Asie du Nord, le Moyen-Orient et l’Europe du Nord

C-

CONCLUSION
L’espace méditerranéen vient de connaître, à vingt ans d’intervalle, deux événements qui ont totalement bouleversé les
relations internationales dans cet espace : la fin de l’affrontement Est-Ouest en 1991 et les révoltes arabes en 2011. La région
apparaît comme incertaine, troublée, fragile et porteuse de crises. Placée sur les frontières sud de l’Union européenne, sa
sécurité et sa stabilité impactent forcément celles de l’Europe. Dans ces circonstances, la question des relations
internationales en Méditerranée et de la recherche de sécurité dans la région est toujours plus centrale

La Méditerranée connaît depuis plusieurs années une profonde évolution des enjeux et des rapports de force stratégiques. Les
« révolutions » arabes depuis 2011 ont redistribué bien des cartes : changements de régime, guerres civiles, fragmentation de
territoires, expansion du djihadisme. Au Maghreb, l’achèvement de la forte émergence militaire algérienne rend d’autant plus
critiques les incertitudes quant à l’avenir du système de pouvoir à Alger, qu’il s’agisse de sa stabilité ou de la pérennité de sa
posture de « non-alignement défensif ». Quant à la guerre civile en Libye, elle repose sur un millefeuille de lignes de fracture
pérennisant la déstructuration du pays et ses débordements djihadistes déstabilisateurs en Tunisie. La situation du Levant est
plus complexe encore. S’y confrontent les trois puissances régionales que sont la Turquie, à la situation géostratégique très
incertaine, Israël et l’Égypte, émergent à crédit. S’y exacerbe la confrontation entre « l’axe de résistance » constitué par l’Iran
et le Hezbollah, qui étend sa présence jusqu’aux rivages de la Méditerranée, et la coalition sunnite à la posture devenue plus
agressive sous le leadership saoudien mais au destin lui aussi incertain. La Syrie reste le premier enjeu de ces rivalités : la
victoire de Bachar el-Assad laisse place à un paysage fragmenté où la Turquie étend au Nord la lutte contre ses ennemis kurdes
et où se dessinent les divergences entre les deux sauveurs du régime de Damas, l’Iran et la Russie. S’affirme ensuite l’enjeu
énergétique maritime qui motive les rapprochements entre Israël, Chypre et l’Égypte face à la Turquie et les émergences
navales de l’ensemble de ces puissances. Dans ce contexte, la Russie consolide son rôle de puissance arbitre au Levant en
contrepoint des Occidentaux, adossée à une incontournable capacité militaire. Elle étend, en outre, sa présence économique
et son influence au reste du bassin. Celle des États-Unis tend à se réduire : si le Maghreb n’est pas une de leurs priorités, leur
retrait du Levant reste cependant peu probable à moyen terme car à la lutte contre Daech viennent s’ajouter l’endiguement
de l’Iran et la compétition stratégique avec la Russie. Enfin, se dessine le renforcement de la présence chinoise actuellement
économique, mais qui pourrait se renforcer à terme sur le plan sécuritaire. L’interconnexion du système méditerranéen en fait
aussi un centre névralgique des flux illicites aux effets très déstabilisants. Les trafics d’êtres humains, d’armes et de drogues se
fondent sur de véritables plates-formes de transit et sur des réseaux raccordés entre les trois continents et sont aggravés par
des facteurs socioéconomiques délétères dans des pays fragiles. Dans ce paysage, le gros de notre action, qui s’inscrit dans des
cadres multilatéraux, principalement européen, ou multinationaux (notamment le dialogue 5+5), vise surtout ces espaces
déstructurés et leurs effets entropiques. L’action sécuritaire se concentre sur la lutte contre les trafics de migrants et le
terrorisme. Cependant, au-delà des nombreuses initiatives sectorielles, ni la France, ni l’UE ne déploient de réelle stratégie
intégrale, une lacune aggravée par les divergences avec certains alliés, notamment l’Italie. Or, au-delà des défis de
déstructuration, la Méditerranée tend à redevenir l’espace de confrontation stratégique qu’elle a toujours été, une situation
que la prochaine crise économique ne devrait pas manquer d’accentuer. Ceci signifie pour la France un risque de « préclusion
stratégique » en fonction de la nature des crises à venir et des partenaires y prenant part. Sur le plan opérationnel, le risque
est de devoir opérer dans des environnements naval, aérien voire électromagnétique non permissifs. Ce risque est évident
dans le paysage géostratégique congestionné que constituent le Levant et la Méditerranée orientale. Il est aussi présent au
Maghreb. Dans ce contexte, la présente note recommande une adaptation des efforts de renseignement, la sollicitation de nos
alliés pour un accroissement de la présence navale et une meilleure exploitation du réseau de bases méditerranéennes, atout
stratégique majeur des Européens. Au-delà, ces risques plaident, une fois encore, pour l’adoption d’une stratégie capacitaire
de « compensation ».

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