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Cours 5 

: Le romantisme

Le mot :

Le terme romantique vient de l’anglais romantic est apparu en France à la fin du XVII° siècle.
Il avait alors le sens romanesque est désignait ce qui tient du roman (aventure, personnage)
par son caractère chimérique ». A la fin du XVIII° siècle, le mot finira par se distinguer du
mot romanesque.

Comme l’écrit d’ailleurs Senancour dans son roman L' Oberman (1804) : « le romanesque
séduit les imaginations vives et fleuries, le romantique suffit seul aux âmes profondes, à la
véritable sensibilité ».

A la fin du XIX° siècle, et grâce à l’influence allemande, le mot romantique désigne


désormais un nouveau courant littéraire, le romantisme qui s’opposera de par ses
caractéristiques au classicisme.

Les origines historiques :

Le romantisme est un vaste mouvement de sensibilité et d’idées qui a profondément touché la


littérature. On y trouve toutes les formes d’art (musique, peinture, gravure, sculpture …) ;
ainsi que l’histoire, la philosophie et la politique. La grande époque du Romantisme littéraire
commence en 1820 avec le succès foudroyant des Méditations, de Lamartine et s’achève en
1843 avec l’échec de la pièce de Victor Hugo, Les Burgrave. Mais bien évidemment, ces
dates ne sont que des points de repère, on a été romantique bien avant 1820, à l’image de
Jean-Jacques Rousseau, et il le fut bien après 1843. Il est à rappeler que le romantisme n’est
pas né en France, il s’est développé en Angleterre au XVII° siècle avant de migrer vers
l’Allemagne. En France, les premières manifestations du Romantisme apparaissent vers 1760
en particulier dans les œuvres de Jean-Jacques Rousseau Les Rêveries d’un promeneur
solitaire, Les Confessions, La Nouvelle Eloïse.

Les caractéristiques du romantisme :

a- Un retour sur soi :


« Un matin[…] le vint du ciel comme un éclair : JE SUIS MOI, qui dès lors ne me quittait
plus, mon moi s’était vu lui-même pour la première fois et pour toujours ». Cette phrase
du poète allemand Jean-Paul Richter est emblématique de l’expérience romantique, de
cette conscience de soi qui procède à un culte nouveau de la singularité personnelle qui est
l’axe majeur du romantisme. Si le XIX° siècle tout entier parle à la première personne,
c’est parce que les identités sociales et personnelles sont menacées par les
bouleversements consécutifs aux révolutions politiques et économiques. Les individualités
trouvent difficilement leur place dans une société morcelée et mobile et dans l’anonymat
des grandes villes. On espérait que la révolution de 1830, cette halte au milieu du siècle
comme la qualifiait Lamartine, apporterait quelques espoirs. Hélas, elle ne fit que figer la
société en lui imposant plus fortement l’ordre bourgeois et la tyrannie de l’argent. Dans ce
monde bouleversé et pas encore reconstruit, le Moi reste la seule certitude. Faisant appel à
la sensibilité plus qu’à la raison, des romantiques montrent l’être humain sous ses aspects
les plus variés, dans toute sa complexité et surtout dans toute sa singularité.

b- Un moi insatisfait :

Le romantique est avant tout insatisfait de qu’il est et de ce qu’il vit. Ce sentiment n’est pas
neuf n’a jamais été aussi envahissant. La souffrance est souvent considérée par les
romantiques comme un signe de distinction, le triste privilège des âmes élevées, étrangères à
un monde qui ne les comprend pas. On parlera donc de l’exaltation du moi : ou
l’omniprésence de l’écrivain dans son œuvre, d’où le développement des œuvres
autobiographiques.

c- Le rapport à la nature :

C’est vers la nature que les romantiques se tournent, elle est la confidente de leurs plaintes
mélancoliques, c’est elle que Lamartine invoque comme mémoire de son amour défunt dans
son poème Le Lac, in Méditations :

« Ô lac ! l’année à peine a fini sa carrière,


Et près des flots chéris qu’elle devait revoir,
Regarde ! je viens seul m’asseoir sur cette pierre
Où tu la vis s’asseoir ! »

[….]
« Ô lac ! rochers muets ! grottes ! forêt obscure !
Vous, que le temps épargne ou qu’il peut rajeunir,
Gardez de cette nuit, gardez, belle nature,
Au moins le souvenir ! »

Les écrivains ne se sentant plus à leur aise dans la société se réfugient dans la nature parce
qu’elle est immuable, pure et fidèle. Ils recherchent dans la nature ; la purification qui donne
naissance à un homme naturel, originel, qui vit en harmonie au sein de la société et, surtout,
en accord avec lui-même.

d- L’exaltation des forces du mal :

Enfin, le mal constitue pour le romantique une forme d’exotisme supérieur, le moyen ultime
d’échapper à l’ennui. Ce courent inaugure le fantastique et l’onirisme (ce qui relève du rêve).
L’atmosphère frénétique est complètement morbide. Il y est question de prison, de guillotine,
de bourreau, de profanation et de vampire. A l’image de Mary Shelley avec son œuvre Le
Frankenstein, ou encore Edgar Allan Poe avec son recueil Les Nouvelles extraordinaires.
L’esthétique romantique privilégie volontiers l’anormal, le difforme, l’étrange, le hors-norme,
tel Quasimodo, le bossu amoureux d’Esméralda dans Notre Dame de Paris, de Victor Hugo.
De ce fait, le fantastique et le pittoresque seront mis en évidence dans le texte.

On pourrait donc affirmer que ces différents critères laissent croire que le romantisme est une
littérature destinée à faire plaisir et non la morale. Elle fait appel aussi à la réalité, à
l’exactitude historique et à l’esprit novateur.

Les précurseurs de ce courant :

Selon J.J. Rousseau les initiateurs du romantisme sont Chateaubriand et Mme De Staël en
France ; Novalis, Goethe et Schiller en Allemagne ; Lord Byron et Walter Scott en Grande
Bretagne ; Gogol et Pouchkine en Russie. Par ailleurs, ce courant a atteint son apogée en
France avec Lamartine, Georges Sand, Alfred de Vigny, Stendhal, Balzac et Dumas père.

En musique, Beethoven ouvre la voie à Schumann, Berlioz, Chopin et d’autres artistes.

En peinture, on verra un agencement différent des couleurs avec des artistes tels que :
Delacroix, Goya et Gros. La sculpture aussi a épousé les critères du romantisme chez Rude et
ses pairs.
Application 4 : Extrait du Lac, de Lamartine.
Consigne : Lisez attentivement le texte suivant puis analysez-le en mettant en exergue la
manière dont Lamartine met en scène la nature.

Le Lac

Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages,


Dans la nuit éternelle emportés sans retour,
Ne pourrons-nous jamais sur l'océan des âges
Jeter l'ancre un seul jour ?

Ô lac ! l'année à peine a fini sa carrière,


Et près des flots chéris qu'elle devait revoir,
Regarde ! je viens seul m'asseoir sur cette pierre
Où tu la vis s'asseoir !

Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes,


Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés,
Ainsi le vent jetait l'écume de tes ondes
Sur ses pieds adorés.

Un soir, t'en souvient-il ? nous voguions en silence ;


On n'entendait au loin, sur l'onde et sous les cieux,
Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence
Tes flots harmonieux.

Tout à coup des accents inconnus à la terre


Du rivage charmé frappèrent les échos ;
Le flot fut attentif, et la voix qui m'est chère
Laissa tomber ces mots :

" Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !


Suspendez votre cours :
Laissez-nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours !

[…]

Ô lac ! rochers muets ! grottes ! forêt obscure !


Vous, que le temps épargne ou qu'il peut rajeunir,
Gardez de cette nuit, gardez, belle nature,
Au moins le souvenir !
Qu'il soit dans ton repos, qu'il soit dans tes orages,
Beau lac, et dans l'aspect de tes riants coteaux,
Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages
Qui pendent sur tes eaux.

Qu'il soit dans le zéphyr qui frémit et qui passe,


Dans les bruits de tes bords par tes bords répétés,
Dans l'astre au front d'argent qui blanchit ta surface
De ses molles clartés.

Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire,


Que les parfums légers de ton air embaumé,
Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire,
Tout dise : Ils ont aimé !
Application 5  : Extrait du Rouge et le Noir¸ de Stendhal.
Consigne : Lisez attentivement le texte suivant puis analysez-le en mettant en vous
focalisant sur la description que Stendhal fait de la rencontre entre Julien Sorel et
Madame de Rênal.

"Julien Sorel, fils de paysans, vient d'être engagé par M. de Rênal comme précepteur de ses
enfants. Il se présente à la porte de la famille des Rênal.

Avec la vivacité et la grâce qui lui étaient naturelles quand elle était loin des regards des
hommes, Mme. de Rênal sortait par la porte-fenêtre du salon qui donnait sur le jardin, quand
elle aperçut près de la porte d'entrée la figure d'un jeune paysan, presque encore enfant,
extrêmement pâle et qui venait de pleurer. Il était en chemise bien blanche, et avait sous le
bras une veste fort propre de ratine violette.

Le teint de ce petit paysan était si blanc, ses yeux si doux, que l'esprit un peu romanesque de
Mme. de Rênal eut d'abord l'idée que ce pourrait être une jeune fille déguisée, qui venait
demander quelque grâce à M. le maire. Elle eut pitié de cette pauvre créature, arrêtée à la
porte d'entrée, et qui évidemment n'osait lever la main jusqu'à la sonnette. Mme. de Rênal
s'approcha, distraite un instant de l'amer chagrin que lui donnait l'arrivée du précepteur.
Julien, tourné vers la porte, ne la voyait pas s'avancer. Il tressaillit quand une voix douce lui
dit tout près de l'oreille:

- Que voulez-vous ici, mon enfant ?

Julien se tourna vivement, et frappé du regard si rempli de grâce de Mme. de Rênal, il oublia
une partie de sa timidité. Bientôt, étonné de sa beauté, il oublia tout, même ce qu'il venait
faire.

Mme. de Rênal avait répété la question.

- Je viens pour être précepteur, madame, lui dit-il enfin, tout honteux de ses larmes qu'il
essuyait de son mieux.

Mme. de Rênal resta interdite ; ils étaient fort près l'un de l'autre à se regarder. Julien n'avait
jamais vu un être aussi bien vêtu et surtout une femme avec un teint si éblouissant, lui parler
d'un air doux. Mme. de Rênal regardait les grosses larmes, qui s'étaient arrêtées sur les joues
si pâles d'abord et maintenant roses de ce jeune paysan. Bientôt elle se mit à rire, avec toute la
gaité folle d'une jeune fille ; elle se moquait d'elle-même et ne pouvait se figurer tout son
bonheur. Quoi, c'était là ce précepteur qu'elle s'était figuré comme un prêtre sale et mal vêtu,
qui viendrait gronder et fouetter ses enfants !

- Quoi, monsieur, lui dit-elle enfin, vous savez le latin ?"

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