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MICHAEL NEAL
Professeur et président du département de pharmacologie et toxicologie, École de médecine et de dentisterie
de l’Hôpital Guy et St Thomas (UMDS). Département de pharmacologie, Hôpital St Thomas, Londres.
ISBN : 978-2-8073-0611-0
www.deboecksuperieur.com
Pharmacologie
médicale
Chez le même éditeur
BAYOT D., FARON G., Pharmacologie pour les sages femmes. 2e éd.
SUTTON R., ROCKETT B., SWINDELLS P., Chimie pour les étudiants en médecine…
et pour tous ceux qui ne seront pas chimistes
Michael J. Neal
Pharmacologie
médicale
6e édition
Traduction de la 8e édition anglaise par Paul Depovere
Professeur émérite à l’UCL-Bruxelles
et à l’université Laval (Québec)
Ouvrage original
Cet ouvrage est la traduction en français de Medical Pharmacology at a glance,
Eighth Edition, by Michael J. Neal, published by Wiley-Blackwell, 2016.
This edition first published 2016 © 2016 by John Wiley & Sons, Ltd.
All Rights Reserved. Authorised translation from the English language edition published by
John Wiley & Sons Limited. Responsibility for the accuracy of the translation rests solely with
De Boeck Superieur s.a. and is not the responsibility of John Wiley & Sons Limited. No part
of this book may be reproduced in any form without the written permission of the original
copyright holder, John Wiley & Sons Limited.
Imprimé en Belgique
Dépôt légal :
Bibliothèque nationale, Paris : mai 2017
Bibliothèque royale de Belgique, Bruxelles : 2017/13647/077 ISBN 978-2-8041-0611-0
Préface
Ce livre s’adresse tout particulièrement aux étudiants en médecine, chapitres, l’auteur s’est toutefois efforcé d’expliquer les mécanismes
mais il sera également utile pour les étudiants et les scientifiques tra- d’action des médicaments et leurs usages.
vaillant dans d’autres disciplines qui souhaiteraient une initiation élé- Dans cette 8e édition, tous les chapitres ont été mis à jour. Cer-
mentaire et concise à la pharmacologie. taines rubriques, par exemple les médicaments permettant de traiter le
Dans cet ouvrage, les textes ont été réduits au minimum pour per- SIDA, ont été réexaminées et les substances qui agissent sur le système
mettre une meilleure compréhension des figures. Dans chacun des urinaire ont été rajoutées.
Remerciements
Je remercie le Professeur J.M. Ritter pour ses conseils et commentaires aide au niveau des chapitres cardio-vasculaires ainsi qu’au professeur
utiles sur les études de cas et sur les questions soulevées. Ma reconnais- C. Stanford pour ses avis et commentaires concernant les médica-
sance s’adresse également au professeur P. Chowienczyk pour son ments à usage psychiatrique.
Autres ouvrages
Pharmacologie – Des cibles à la thérapeutique The Goodman & Gilman’s manual of pharmacological therapeutics
Y. Landry et J.-P. Gies Goodman et Gilman
Dunod, 3e édition (2014) McGraw-Hill, 11e édition (2006)
Pharmacologie British National Formulary.
Y. Cohen et C. Jacquot British Medical Association et The Royal Pharmaceutical Society
Elsevier/Masson, 6e édition (2008) of Great Britain, Londres, (environ 1 000 pages). Le BNF est réac-
tualisé deux fois par an.
Pharmacie clinique et thérapeutique
J. Calop, S. Limat, C. Fernandez et G. Aulagner Pharmacology
Elsevier/Masson, 4e édition (2012) Rang, H.P., Dale, M.M., Ritter, J.M., Flower, R.J. et Henderson,
G. Churchill Livingstone, Édimbourg (829 pages), 7e édition (2011)
Atlas de poche de pharmacologie
H. Lüllmann, K. Mohr et L. Hein Clinical Pharmacology
Médecine Sciences Publications, Lavoisier, Paris, 4e édition (2010) Bennett, P.N., Brown, M.J. et Sharma, P.J.
Churchill Livingstone, Édimbourg (2012)
Pharmacologie
M. Moulin et A. Coquerel
Elsevier/Masson, 2e édition (2002)
1
Introduction :
1 principes de base de l’action pharmacologique des médicaments
Certains
Terminaisons médicaments Hormones
Transmetteurs nerveuses inhibent les
étapes suivantes Cellules des glandes ENDOCRINE
Acétylcholine endocrines Insuline
Noradrénaline Lévothyroxine
Capture du
Dopamine Cortisol
précurseur P
Sérotonine P Aldostérone
Acide g-amino- P Testostérone
butyrique (GABA) P Synthèse Enzymes Estradiol
ri e
Glutamate
nd
Enzymes LOCAL
ho
es
Stockage Histamine
c
ym
Mito
La pharmacologie médicale étudie les interactions entre les médica- nistes ( ). Certains médicaments appelés antagonistes ( ) interagis
ments et les tissus du corps humain. On distingue classiquement la sent avec les récepteurs mais sont incapables de déclencher une réponse
pharmacodynamie qui a pour objet l’étude de l’action exercée par les biologique. Les antagonistes réduisent la probabilité de liaison du
médicaments sur l’organisme et la pharmacocinétique qui étudie le sort transmetteur (ou d’un autre agoniste) au récepteur, diminuant ou blo-
des médicaments dans l’organisme au cours du temps (absorption, dis- quant ainsi son action.
tribution, métabolisme et excrétion).
Les réponses biochimiques et physiologiques déclenchées à la suite
de l’activation des récepteurs par un agoniste ou une hormone font
Les principes généraux des modes d’action les plus fréquents des intervenir des mécanismes de transduction (en bas de la figure) qui
médicaments sont illustrés dans la figure. Pour certains médicaments impliquent souvent (mais pas systématiquement) des molécules appe-
(par ex. charbon actif, diurétiques osmotiques), l’action relève de leurs lées « seconds messagers » ( ).
propriétés physico-chimiques. On parlera alors d’action non spéci-
fique. D’autres médicaments agissent comme des faux substrats en L’interaction du médicament avec le site de liaison du récepteur
inhibant les mécanismes de transport (en bas à droite) ou les activités dépend de la complémentarité « clef-serrure » des deux molécules.
enzymatiques (en bas à gauche). Plus cette complémentarité « clef-serrure » est importante et plus le
nombre de liaisons (généralement non covalentes) est élevé, plus
Pour la plupart des médicaments cependant, leur action est la
grande sera la force d’attraction entre ces molécules, d’où une meil-
conséquence de leur fixation à des protéines spécifiques généralement
leure affinité du médicament pour le récepteur. La capacité des médi-
présentes au sein de la membrane cellulaire. Ces protéines appelées
caments à se lier à un type particulier de récepteurs est appelée la
récepteurs ( ) répondent normalement à des substances endogènes.
spécificité. Aucun médicament n’est totalement spécifique mais de
Celles-ci peuvent être des transmetteurs synaptiques (en haut à
nombreux médicaments exercent une action relativement sélective sur
gauche, ) ou des hormones (en haut à droite, ). Par exemple, l’acé-
un type de récepteurs donné.
tylcholine est un transmetteur libéré par les terminaisons des nerfs
moteurs ; ce transmetteur stimule les récepteurs présents dans les Les médicaments sont prescrits pour exercer des effets thérapeu-
muscles squelettiques et engendre une série d’évènements qui se tra- tiques mais, souvent, des effets secondaires indésirables sont associés à
duisent par la contraction musculaire. Des substances (par ex. l’acétyl- cette activité (chapitre 46). Le degré de gravité de ces effets secondaires
choline) ou des médicaments qui, par leur liaison à des récepteurs est variable. Il peut s’agir d’effets secondaires bénins (par ex. nausées)
spécifiques, déclenchent une action biologique, sont appelés des ago- mais aussi parfois d’effets très graves (par ex. anémie aplasique).
2
Introduction : principes de base de l’action pharmacologique des médicaments
3
2 Interactions médicament-récepteur
Réponse tissulaire
Réponse tissulaire
Réponse tissulaire
l’affinité partiel
estplus
Les agonistes faible
partiels déclenchent
une réponse maximale
moins importante
Forces
intermoléculaires Complexe agoniste/ Complexe agoniste/
Agoniste Récepteur récepteur Transducteur récepteur/transducteur
Électrostatiques
Ponts hydrogène k+1
van der Waals A + R A R + T A R T Réponse
Hydrophobes k–1
Efficacité
Affinité (KA) intrinsèque
(KAR = affinité du complexe AR
pour le transducteur)
Lorsqu’ils sont exposés à des agonistes, les tissus du corps humain Un antagoniste compétitif ne présente pas d’efficacité intrinsèque.
montrent seulement certains types de réponse (par ex. contraction En se liant à un certain nombre de récepteurs, il diminue la concentra-
musculaire, sécrétion glandulaire). La relation quantitative entre ces tion de ceux qui sont disponibles. Ceci provoque un déplacement de la
effets physiologiques et la concentration de l’agoniste peut être éva- courbe log dose-réponse vers la droite (en haut à droite, ) sans abais-
luée grâce à des tests biologiques. La première étape de l’interaction ser la réponse maximale. Par contre, les antagonistes irréversibles dimi-
médicament-récepteur, la liaison du médicament à son récepteur, peut nuent la réponse maximale (en haut à droite, ). Cependant, aux
être analysée séparément grâce à des tests de liaison. faibles concentrations, un déplacement parallèle de la courbe log dose-
Les données expérimentales ont montré, pour de nombreux tissus réponse peut se produire sans diminution de la réponse maximale (en
et agonistes, que lorsque les réponses sont rapportées en fonction de la haut à droite, ). Puisqu’un antagoniste irréversible épuise en fait les
concentration du médicament, on obtient une courbe hyperbolique récepteurs du système, il n’est évidemment pas nécessaire que tous les
(courbe dose-réponse, en haut à gauche). En pratique, il est préférable récepteurs soient occupés pour déclencher une réponse maximale (vu
de rapporter la réponse en fonction du logarithme de la concentration qu’il existe des récepteurs en réserve).
en agoniste (courbe log dose-réponse, en haut au milieu). En admettant
que l’interaction entre le médicament (A) et le récepteur (R) (figure du
bas) obéit à la loi d’action des masses, la concentration du complexe Liaisons des médicaments aux récepteurs
médicament–récepteur [AR] peut être fournie par l’équation suivante :
Forces intermoléculaires
[RO] [A] En présence de récepteurs, les molécules de médicaments sont d’abord
[AR] = attirées par des forces électrostatiques s’exerçant à des distances rela-
KD + [A]
tivement grandes. Ensuite, pour autant que la molécule présente une
où [RO] = la concentration totale en récepteurs, [A] = la concentration conformation adaptée pour se fixer au site de liaison du récepteur, ce
en agoniste, KD = la constante de dissociation, et [AR] = la concentra- sont des ponts hydrogène et des forces de van der Waals qui vont entrer
tion des récepteurs occupés. en jeu. Les antagonistes irréversibles, quant à eux, se lient aux récep-
Comme cette équation correspond à une hyperbole, la forme de la teurs par l’entremise de solides liaisons covalentes.
courbe dose–réponse peut être expliquée si la réponse est directement
proportionnelle à [AR]. Toutefois, cette théorie élémentaire ne permet Affinité
pas d’expliquer tous les résultats expérimentaux. Certains agonistes, L’affinité est une mesure de la force de liaison du médicament à son
appelés agonistes partiels, ne peuvent induire la même réponse maxi- récepteur. Elle se caractérise par une constante de dissociation (KD),
male que provoquent les agonistes complets, même s’ils possèdent la résultant d’un équilibre exprimé par le rapport entre les constantes de
même affinité pour le récepteur (en haut à gauche et au milieu, ). vitesse de la réaction inverse (k–1) et de la réaction directe (k+1) qui
Un agoniste possède donc, en plus de son affinité pour le récepteur, interviennent dans la liaison du médicament au récepteur. L’inverse de
une propriété appelée efficacité intrinsèque qui est responsable de la KD est appelé la constante d’affinité (KA) et correspond à la concentra-
réponse biologique consécutive à sa liaison au récepteur (figure du tion en médicament qui produit une réponse égale à 50 % de la réponse
bas). maximale (en absence de récepteurs de réserve, voir plus loin).
4
Interactions médicament-récepteur
5
3 Absorption, distribution et excrétion des médicaments
B+
pK du médicament pH 8 molécules ionisées Cp = Co e–kél t
H
90% des
+
et du pH du milieu PB
molécules H+ +B BH + Veine porte B + P La plupart des
BH
Un médicament non non ionisées 1 : 10 PB Médicament médicaments
+
ionisé est bien plus B + H+ BH+ B BH+ Ordre un
lié aux t1/2 t1/2
liposoluble qu’un Foie BH+ protéines
médicament ionisé B Compartiment B Tubule Temps (t)
+ rénal
vasculaire B H kél t
Les proportions relatives B B Log Cp = Log Co –
Excrétion de la 2,303
(pour une base faible) Réabsorption de plupart des
Log Cp
sont données par la plupart des Log Co –kél
Tractus Métabolisme médicaments Pente =
la formule : médicaments sous 2,303
biliaire de premier forme non ionisée sous forme
BH+ passage
log = pKa – pH Urine ionisée
B
Absorption Distribution Excrétion
Temps (t)
La plupart des médicaments sont administrés par voie orale et doivent du médicament ; voir à droite, en haut du graphique). Au début, on
passer la barrière gastro-intestinale pour atteindre la circulation san- observe souvent une diminution rapide de la concentration qui tend à
guine (à gauche sur la figure, ). Ce mécanisme d’absorption peut se ralentir progressivement. Ce type de courbe est une exponentielle. À
dépendre de nombreux facteurs (à gauche) mais il est habituellement chaque moment, une fraction constante du médicament présent est éli-
proportionnel à la liposolubilité des médicaments. Ainsi, l’absorption minée par unité de temps. La chute exponentielle de la concentration
de molécules non ionisées (B) est facilitée parce que celles-ci sont plus plasmatique de nombreux médicaments peut s’expliquer par le fait
liposolubles que les molécules ionisées (BH+) qui sont entourées d’une que les processus d’élimination sont eux-mêmes habituellement pro-
« couche » de molécules d’eau. L’absorption du médicament se fait portionnels à la concentration plasmatique du médicament. Les diffé-
principalement au niveau de l’intestin grêle en raison de sa grande sur- rents processus impliqués sont :
face de contact. C’est le cas des acides faibles (par ex. l’aspirine) qui ne
1 Élimination urinaire par filtration glomérulaire (à droite, ).
sont pas ionisés dans le milieu acide (HCl) de l’estomac. Les médica-
ments absorbés par le tractus gastro-intestinal pénètrent dans la circu- 2 Métabolisation, le plus souvent hépatique.
lation portale (à gauche, ) et certains sont massivement métabolisés 3 Capture par le foie et élimination subséquente au niveau de la bile
lorsqu’ils passent dans le foie (métabolisme de premier passage). ( , ligne verte à partir du foie).
Les médicaments qui sont suffisamment liposolubles pour être Une réaction qui dépend d’une concentration donnée à chaque
facilement absorbés par voie orale sont rapidement distribués dans les moment obéit à un ordre un ; la plupart des médicaments présentent une
compartiments aqueux du corps ( ). De nombreux médicaments ne telle cinétique d’élimination. Si l’enzyme responsable du métabolisme
sont que faiblement liés à l’albumine plasmatique et il existe un équi- médicamenteux est saturée, le processus d’élimination répondra alors à
libre entre la forme plasmatique liée (PB) et la forme libre (B). Le une cinétique d’ordre zéro, car les taux d’élimination seront caractérisés
médicament lié aux protéines plasmatiques se trouve confiné dans le par une vitesse constante, sans être affectés par une augmentation de la
système vasculaire et ne peut donc pas exercer son activité pharmaco- concentration en médicament (par ex. éthanol, phénytoïne).
logique.
Lorsque le médicament est administré par injection intraveineuse,
il pénètre directement dans la circulation sanguine et est rapidement Voies d’administration
distribué dans les tissus. En prélevant régulièrement des échantillons Les médicaments peuvent être administrés par voie orale ou par voie
de sang, il est possible d’évaluer la diminution de la concentration parentérale (c’est-à-dire par une voie différente de la voie gastro-intes-
plasmatique au cours du temps (c’est-à-dire la vitesse d’élimination tinale).
6
Absorption, distribution et excrétion des médicaments
La voie orale. En raison de ses aspects pratiques, la voie orale litres) indiquent une large distribution dans les compartiments aqueux
constitue la voie la plus fréquemment utilisée pour l’administration de de l’organisme ou une concentration dans certains tissus. Le volume
la plupart des médicaments. Cependant, certains médicaments (par ex. de distribution peut être utilisé pour calculer la clairance (clearance en
la benzylpénicilline, l’insuline) sont sensibles aux enzymes ou à l’aci- anglais, NdTr.) du médicament.
dité de l’estomac et doivent être administrés par voie parentérale. La clairance constitue un concept important en pharmacociné-
L’injection intraveineuse. Le médicament passe directement dans tique. Elle se définit comme le volume sanguin (ou plasmatique)
la circulation sanguine sans devoir traverser les barrières d’absorption. débarrassé du médicament par unité de temps. La clairance plasma-
Cette voie est utilisée : tique (Clp) est donnée par l’équation suivante :
• lorsqu’un effet rapide est requis (par ex. le furosémide dans les Clp = VD kél
œdèmes pulmonaires) ;
• pour des administrations continues (perfusions) ; Le taux d’élimination = Clp × Cp. La clairance totale est la somme des
• pour administrer des volumes importants ; clairances individuelles. On peut donc admettre l’équation suivante :
• pour des médicaments qui induisent des dommages tissulaires Clp = Clm (clairance métabolique) + Clr (excrétion rénale). Contraire-
locaux lorsqu’ils sont administrés par d’autres voies (par ex. les ment au t½, la clairance apporte une indication sur la capacité du foie
médicaments cytotoxiques). et du rein à éliminer le médicament.
Le dosage des médicaments. Les valeurs de clairances peuvent être
Les injections intramusculaires et sous-cutanées. Les médicaments utilisées pour déterminer la posologie du médicament. Idéalement, au
en solution aqueuse sont habituellement absorbés assez rapidement. cours d’un traitement médicamenteux, la concentration plasmatique
Toutefois, l’absorption peut être ralentie si le médicament est adminis- stationnaire (Cps) doit être comprise dans une marge thérapeutique
tré sous forme d’ester (par ex. les préparations-dépôts de neurolep- bien déterminée. La concentration à l’équilibre est atteinte lorsque la
tiques ; voir chapitre 27). quantité de médicament atteignant la circulation systémique par unité
Les autres voies. Celles-ci incluent l’inhalation (par ex. d’anesthé- de temps est égale à la quantité éliminée dans le même intervalle de
siques volatils ou de certains médicaments utilisés dans l’asthme) et temps. Les vitesses de perfusion sont égales à Cl × Cps. Cette équation
l’administration locale (par ex. d’onguents). Les administrations sublin- peut s’appliquer à une perfusion intraveineuse car la dose entière
guales et rectales évitent la circulation portale. Les préparations admi- pénètre dans la circulation à une vitesse connue. Pour les administra-
nistrables par voie sublinguale sont particulièrement indiquées pour tions orales, l’équation devient :
les médicaments dont le métabolisme de premier passage est impor-
tant. F × dose
= Clp × Cp, en moyenne
intervalle de dose
Distribution et excrétion
La distribution du médicament dans l’organisme n’est possible que où F = biodisponibilité du médicament. La valeur de t½ du médicament
lorsque le médicament a atteint la circulation. La pénétration tissu- est utile dans le choix d’un intervalle de dose permettant de ne pas
laire du médicament est alors indispensable à son action. avoir des concentrations trop élevées au pic (taux toxiques) et trop
Le temps de demi-vie (t1/2) est le temps nécessaire pour que la basses au creux (taux inefficaces).
concentration plasmatique du médicament diminue de moitié par rap- La biodisponibilité est un terme utilisé pour décrire la proportion
port à sa concentration initiale (à droite, graphique du haut). Les du médicament qui atteint la circulation systémique. À la suite d’une
mesures de t1/2 permettent de calculer les constantes de vitesse d’élimi- injection intraveineuse, la biodisponibilité est de 100 % (F = 1). Toute-
nation (kél) en utilisant la formule : fois, les médicaments sont habituellement administrés par voie orale,
de sorte que la proportion qui atteint la circulation systémique varie
0,69 non seulement en fonction du médicament mais aussi selon le patient.
kél = Les médicaments susceptibles de subir un métabolisme de premier
t passage important sont généralement inactifs lorsqu’ils sont adminis-
où kél est la fraction du médicament présente à chaque moment qui trés par voie orale (par ex. la trinitroglycérine ou la lidocaïne).
sera éliminée par unité de temps (ex. kél = 0,02 min–1 signifie que 2 %
du médicament présent est éliminé en 1 minute). Excrétion
La courbe exponentielle de la concentration plasmatique (Cp) en L’excrétion rénale. Cette voie est responsable de la dernière étape de
fonction du temps (t) est donnée par l’équation suivante : l’élimination de la plupart des médicaments. Ceux-ci se retrouvent
dans le filtrat glomérulaire mais, s’ils sont liposolubles, ils peuvent être
Cp = C0 e–kélt
facilement réabsorbés par diffusion passive au niveau des tubules. En
où C0 = la concentration plasmatique initiale apparente. En prenant fait, le métabolisme des médicaments produit souvent un composé
les logarithmes, on peut transformer la courbe exponentielle en une moins liposoluble, ce qui facilite son excrétion rénale (voir chapitre 4).
droite (à droite, graphique du bas) à partir de laquelle on peut déter- Le pH intratubulaire affecte l’ionisation des acides et des bases
miner directement C0 et t1/2. faibles. La modification du pH urinaire peut parfois permettre d’aug-
Le volume de distribution (VD). C’est le volume apparent dans menter l’excrétion rénale. Par exemple, l’administration de bicarbonate
lequel se distribue le médicament. Après une injection intraveineuse, alcalinise l’urine ; ceci ionise l’aspirine, la rendant moins liposoluble,
ce qui a pour effet d’augmenter son taux d’excrétion.
dose Les acides et les bases faibles sont activement sécrétés dans les
VD = tubules proximaux. Les pénicillines, ainsi que les diurétiques thiazidés
C0
et la morphine, par exemple, sont éliminés par cette voie.
Une valeur de VD < 5 litres indique que le médicament a été retenu L’excrétion biliaire. Certains médicaments (par ex. le diéthylstil-
dans le compartiment vasculaire. Une valeur inférieure à 15 litres sug- bestrol) sont concentrés dans la bile et excrétés dans l’intestin où ils
gère que la distribution du médicament est limitée au compartiment peuvent être réabsorbés. Cette circulation entérohépatique augmente
extracellulaire. Des volumes de distribution plus grands (VD >15 la durée pendant laquelle le médicament est présent dans l’organisme.
7
4 Métabolisme des médicaments
Le métabolisme des médicaments a deux conséquences importantes : tés rapidement par le rein sont rendus plus hydrophiles dans le foie par
1. Le médicament devient plus hydrophile, ce qui accélère son excré- conjugaison avec des composés endogènes (centre de la figure).
tion par le rein (à droite, ), car le métabolite moins liposoluble L’administration répétée de certains médicaments (en haut) aug-
est plus difficilement réabsorbé par les tubules rénaux. mente la synthèse de cytochromes P450 (induction enzymatique). Ceci
2. Les métabolites sont habituellement moins actifs que le médica- accélère le métabolisme du médicament responsable de l’induction, de
ment parental. Toutefois, ce n’est pas toujours le cas, car parfois même que celui d’autres médicaments métabolisés par cette même
les métabolites sont tout aussi actifs (voire plus actifs) que la molé- enzyme (en haut à droite). À l’inverse, certains médicaments peuvent
cule originale. Par exemple, le diazépam (un médicament indiqué inhiber l’activité des enzymes microsomales (en haut, ), ce qui a
dans les troubles de l’anxiété) est métabolisé en nordiazépam et pour effet d’exalter l’action des médicaments métabolisés par ces
oxazépam, lesquelles molécules sont toutes deux actives. Les pro- enzymes (en haut à droite, ).
médicaments sont inactifs jusqu’à ce qu’ils soient métabolisés en En plus de ces interactions entre médicaments, le métabolisme de
médicaments actifs dans l’organisme. Par exemple, la lévodopa, ceux-ci peut dépendre de facteurs génétiques (pharmacogénétique), de
un antiparkinsonien (chapitre 26) est métabolisée en dopamine, l’âge, ou de l’existence de certaines maladies, en particulier celles qui
alors que la méthyldopa, un médicament hypotenseur (chapitre 15), affectent le foie.
est métabolisée en α-méthylnoradrénaline.
8
Métabolisme des médicaments
9
Table des matières
108
MICHAEL NEAL
Pharmacologie médicale propose une synthèse claire des
POINTS CLÉS : notions fondamentales de la pharmacologie thérapeutique.
Tous les domaines essentiels y sont abordés : des anti-
1 Les concepts fondamentaux biotiques aux anesthésiques, des médicaments anticancéreux
de la pharmacologie aux intoxications ou aux abus de substances, chaque chapitre
médicale : administration s’attache à présenter, en double page, les mécanismes d’ac-
des médicaments, modes tion des médicaments, leurs usages et les effets secondaires
d’action, effets secondaires possibles grâce à d’indispensables schémas en couleurs et à
2 Des schémas clairs leurs explications détaillées.
et en couleurs Cette nouvelle édition, entièrement mise à jour, propose un
3 Une présentation nouveau chapitre consacré aux médicaments agissant sur
pratique et agréable le système urinaire. D’autres sujets, comme les traitements
4 Des études de contre le sida, ont été révisés en profondeur pour refléter les
cas pour tester avancées scientifiques les plus récentes.
ses connaissances Destiné essentiellement aux étudiants, aux enseignants
et aux professionnels du médicament, cet ouvrage permet
également au lecteur de tester la bonne intégration des con-
MICHAEL NEAL
Professeur et président du département de pharmacologie et toxicologie, École de médecine et de dentisterie
de l’Hôpital Guy et St Thomas (UMDS). Département de pharmacologie, Hôpital St Thomas, Londres.
ISBN : 978-2-8073-0611-0
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