public ce que je pense du livre, tout particulier et très original, dont vous m’envoyez les bonnes feuilles. C’est une préface que vous voulez et vous croyez qu’il est piquant de savoir ce que l’administrateur de la Comédie-Française peut penser des marionnettes. Je les ai toujours beaucoup aimées. Au temps jadis, j’ai raconté dans le Diogène — un vaillant petit journal que vous avez connu — comment, encore collégien et, les jours de sortie, je faisais jouer Ruy Blas, alors interdit, par des acteurs minuscules sur un petit théâtre de marionnettes acheté passage Jouffroy. J’avais pour spectateurs des collégiens du voisinage et des fillettes amies de ma sœur, parmi lesquelles une jolie enfant à la chevelure rousse — un Titien de huit ans — qui est devenue depuis une des reines de notre Paris républicain. Je ne me doutais guère alors que je jouerais, sur un autre théâtre — et quel théâtre! — ces drames de Victor Hugo que je savais par cœur et qui, sur la scène comme au collège, étaient, pour notre génération, du fruit défendu. J’aimais donc, par instinct, et le théâtre et les marionnettes. Et comment ne pas les aimer? La marionnette, c’est l’acteur modèle. Le plus grand comédien, comme le plus grand homme, a des pieds d’argile. Vos Pupazzi n’ont point ce défaut, et pour la meilleure des raisons, c’est qu’ils n’ont point de pieds. Mais ce n’est pas parce que les marionnettes me semblent très près de la perfection que je les aime; elles auraient tous les défauts de notre humanité que je les adorerais encore. Je suis un peu de l’hu meur de Charles Nodier, dont le fameux article sur Polichinelle, inséré dans le Livre des Cent et Un serait pour votre volume la plus char-