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Kayla Wolf
Elle resta dans la chambre un long moment après son départ. Elle
avait l’impression d’avoir l’esprit complètement vidé. Son corps était
toujours sous l’effet de ce qu’ils avaient fait ensemble, et maintenant cela lui
semblait tellement loin d’elle, comme si son corps entier appartenait à
quelqu’un d’autre. Une autre version d’elle-même, une manifestation idiote et
naïve de sa psyché, qui croyait vraiment que quelque chose de bon pouvait
lui arriver.
Avant, elle pensait savoir ce qu’était la trahison. D’une certaine façon,
elle savait que c’était ce que lui avait fait sa mère – elle les avait trahis,
comme n’importe qui pouvait trahir quelqu’un en partant. Elle avait
abandonné son âme sœur et sa fille dans un nouvel environnement hostile, les
laissant rassembler les morceaux de leur vie en son absence… comment
appeler ça autrement ? Elle n’avait pas particulièrement bien géré cette
trahison, pensa Quinn avec amertume en se repassant le film des décennies
d’évitement, à ne pas y penser, à lui chercher des excuses : elle n’était pas
partie, on l’avait kidnappée, on l’avait forcée, elle les attendait quelque part,
tout s’expliquerait… non, elle avait été abandonnée. Quittée. Trahie. Et cent
ans plus tard, elle traversait exactement la même épreuve.
Au moins, il y avait du progrès : elle avait demandé à David de partir.
Elle n’avait pas attendu qu’il la quitte – elle avait découvert ce qu’il y avait à
savoir sur lui, découvert son secret, et l’avait chassé. Mais était-ce vraiment
un secret ? Il lui avait volontiers donné l’information… mais elle avait
beaucoup trop mal pour écouter cette petite voix rationnelle. Elle avait le
contrôle de la situation, de l’atroce martèlement des battements de son cœur,
et de la brûlure intense derrière ses yeux. Tout était sous contrôle. Alors
pourquoi se sentait-elle aussi mal ? Pourquoi cette partie d’elle-même, faible
et perfide, ne voulait-elle rien d’autre que balancer les couvertures, ôter la
chaise de la porte, courir après lui et se jeter dans ses bras ? Pour lui
pardonner ?
Non. Elle ne pourrait jamais lui pardonner ce qu’il avait fait. Et plus
encore, elle ne pourrait jamais pardonner à son père. Une colère nouvelle
surgit en elle en pensant à ces yeux verts et brillants. Son père lui avait dit à
plusieurs reprises que leur vieil ennemi, William, avait des yeux vert
émeraude. Pourquoi n’avait-elle pas fait le lien ? Et pourquoi lui ne l’avait
pas fait ? Ils devaient forcément se ressembler dans cette famille, non ?
Même sous leur forme humaine, les dragons héritaient de certaines
caractéristiques : elle avait les cheveux noirs de son père, par exemple, et un
peu de sa mâchoire ferme, même si le reste de son visage était définitivement
celui de sa mère, d’après ce qu’il lui avait dit. Et, bien entendu, les yeux. La
couleur des yeux se transmettait par la lignée maternelle chez les dragons.
Ses yeux gris-bleu, les mêmes que son père, provenaient de sa mère. Ce qui
signifiait que David et William avaient les yeux de sa mère.
Voilà qui était intéressant, pensa-t-elle tristement, se repassant les
informations qu’elle avait trouvées au sujet de David sous ce nouveau jour.
David lui avait dit que sa mère était partie, tout comme la sienne. Elle ne
pouvait pas vraiment la blâmer d’avoir quitté un dragon tel que William.
Mais comment avait-elle pu tomber amoureuse de lui au départ ? C’était
encore une preuve que le concept même d’âmes sœurs était profondément
vicié.
Bon sang, il y avait une autre chose à prendre en compte. Elle était
mal à l’aise en repensant à la conversation qu’ils avaient eue, quand ils
avaient failli évoquer l’idée d’être âmes sœurs. Mais avait-elle eu vraiment
tort d’y penser ? Ils avaient eu un lien si fort, si étroit, dès le départ… et leur
alchimie physique était complètement incroyable aussi, pensa-t-elle en
rougissant. Elle n’avait aucune raison de douter du fait qu’il y avait quelque
chose entre eux, qu’ils étaient faits pour être ensemble. Était-il encore
possible qu’ils soient des âmes sœurs ? Elle secoua la tête pour chasser cette
idée. Bien sûr que non. Quelle idée stupide. Il était le fils de son pire ennemi,
l’héritier de sa maison familiale, celle qui lui revenait de droit. Il était son
ennemi. Il était l’un des dragons que son père et elle devraient vaincre s’ils
voulaient récupérer leur terre.
Recroquevillée en une boule de rumination dans son lit, elle se
redressa d’un coup ; voilà la leçon qu’elle devait tirer de tout ça. Toutes ces
idioties au sujet des âmes sœurs – l’amour, le romantisme, le sexe – tout ça
n’était qu’une distraction. Une distraction séduisante, certes, mais une
distraction quand même, qui l’empêchait de se concentrer sur ce qui était
vraiment important. L’important, c’était sa famille. Elle et son père – ils
étaient tout l’un pour l’autre, pour faire face à un monde qui semblait
déterminé à les détruire. Et son père n’était pas un homme très entreprenant,
alors il lui incombait à elle de les protéger. Cela lui convenait très bien.
La première étape, c’était de gérer les coyotes. Caleb était vaincu pour
le moment, mais elle savait qu’il n’allait pas rester éloigné bien longtemps.
Une chose était sûre, ils étaient en danger ici. Raison de plus pour repartir
pour le Colorado au plus tôt. En ce qui la concernait, les coyotes pouvaient
tout aussi bien garder ce territoire. Enfin, peut-être pas tout. Elle voudrait
emmener les poules. Elle s’était beaucoup trop habituée à avoir des œufs frais
chaque matin. Mais il y avait quelque chose de dangereux chez Caleb, une
soif de vengeance… elle craignait qu’ils ne veuillent plus que leur terre. Ils
pourraient vouloir se venger. Eh bien, qu’ils viennent s’ils le voulaient. Ces
derniers temps, elle et son père s’étaient comportés en fermiers pacifiques,
mais elle savait se battre, et lui aussi. On verrait si des petits chiens
bagarreurs faisaient le poids face à deux dragons adultes.
Évidemment, la seconde étape, c’était de récupérer leur terre. Une
partie d’elle-même avait envie de s’envoler directement pour le Colorado,
d’aller voir le roi, et plaider leur cause. Mais elle savait qu’il serait bien trop
dangereux de laisser son père ici sans défense. Et s’ils y allaient tous les
deux ? Alors c’est la ferme qui resterait sans défense… et la pierre sacrée
aussi, qu’elle ne voyait pas du tout comment enlever. Non, elle aurait besoin
de son père à ses côtés s’ils devaient retourner chez eux et plaider leur cause
pour récupérer leur terre. Et ce serait une longue discussion. Peut-être que si
elle expliquait la trahison de David, et mettait l’accent sur la difficulté de leur
situation ici ?
Cette pensée l’inquiétait. Et si son père ne voyait pas l’acte de David
comme une trahison ? Il était tout à fait le genre de dragon à pardonner ce
genre de choses, pensa-t-elle, agacée ; elle le connaissait suffisamment bien
pour prédire ses réactions. Mais même lui devait se rendre compte de
l’escalade de la situation avec les coyotes. Charles aussi devait avoir des
doutes sur leur avenir dans cet endroit. Elle devrait lui parler. Trouver une
nouvelle approche, le convaincre qu’ils avaient besoin de changement. Et de
toute façon, ils pourraient toujours reconstruire ce qu’ils avaient fait ici, non ?
Elle commença à tracer les grandes lignes de son argumentation, jouant
mentalement les deux rôles dans la conversation. Le problème avec cette
attitude, c’était que sa version de Charles était toujours plus raisonnable et
facile à convaincre que le vrai.
Frustrée, elle se leva, se passant la main dans les cheveux. La pièce
entière sentait le parfum de David, et malgré sa fureur et sa douleur, elle
constata avec dégoût qu’elle trouvait toujours cette odeur agréable. Il n’y
avait qu’une seule chose à faire pour remédier à ça : la chambre devrait être
purgée. Cela pourrait avoir des vertus thérapeutiques pour elle aussi. Pendant
longtemps, ils avaient fait leur lessive à la main, jusqu’à ce que, dans les
années 1970, Quinn craque et s’envole vers la ville pour aller acheter une
machine à laver. Il avait fallu bricoler un peu pour s’adapter, mais elle lavait
tous leurs vêtements et leurs draps parfaitement.
Elle remit ses affaires de la veille, puis se tourna pour défaire le lit,
travaillant rapidement et brusquement. C’était vraiment bon, d’arracher toutes
les preuves de sa présence ici. Elle ramassa les draps, résistant à l’envie de les
respirer une fois encore, puis éloigna la chaise de la porte d’un coup de pied,
et avança dans la maison. Elle s’attendait presque à se retrouver face à David,
mais à son grand soulagement (et avec une petite pointe de regret qu’elle
s’efforça d’ignorer), le salon était vide. Très bien. Avec un peu de chance, il
était à mi-chemin de chez lui à cette heure. Elle se précipita vers la machine à
laver, faisant fi des larmes brûlantes qui lui montaient aux yeux. Elle était
simplement stressée, c’est tout.
Elle fourra les draps dans la machine, rajoutant une dose
supplémentaire de lessive pour faire bonne mesure. En regardant la machine
se remplir d’eau, elle fut envahie d’un sentiment de satisfaction. Il lui faudrait
plus de temps pour se débarrasser de la mémoire de ses mains sur elle, mais
c’était un bon début. Elle retourna dans sa chambre, essayant d’apaiser la
tension dans ses épaules. Elle avait lavé les taies d’oreiller et la housse de
couette, mais en ce qui concernait les oreillers et la couette… elle les
rassembla et les emmena dehors à côté du fil à linge. Le soleil était bien haut
maintenant, et elle savait que quelques heures à l’air libre seraient plus que
suffisantes pour bannir les dernières traces de David, à qui elle avait vraiment
beaucoup de mal à ne pas penser.
De retour dans la chambre d’amis, elle ouvrit les rideaux et la fenêtre
en grand, laissant entrer le vent du désert. Puis elle se tint dans l’embrasure
de la porte, les mains sur les hanches, satisfaite de son travail. Un lit nu, une
pièce vide… bientôt, toute trace de son passage aurait disparu. De cette pièce,
au moins. Mais que pouvait-elle faire de ses souvenirs de lui ?
Bon, pour commencer, elle pourrait prendre une longue douche
chaude. Elle avait l’impression que son odeur persistait dans ses cheveux, et
elle plissa le nez de dégoût en se dirigeant vers la salle de bain près de sa
chambre. Rien de tel qu’une longue douche, bien chaude, pour rendre une
fille heureuse – n’est-ce pas ce qu’ils disent dans les chansons ? Débarrasse-
toi de son odeur dans tes cheveux ? Elle frotta chaque centimètre de son
corps sous l’eau bouillante (elle avait toujours eu un faible pour les douches
très chaudes), et par précaution, se lava deux fois les cheveux. Quand elle
entra dans le salon avec des vêtements propres et les cheveux humides, elle
se sentait beaucoup mieux. Pas très bien, mais quand même mieux.
Concrètement, il y avait des corvées à accomplir, mais elle s’en
fichait un peu. Alors après avoir étendu les draps fraîchement lavés, elle se
blottit sur le canapé, avec le livre qu’elle essayait de lire depuis une semaine.
C’était une distraction bienvenue, mais elle n’arrivait pas à retenir les phrases
qu’elle lisait – son esprit ne cessait de revenir à David, la torturant avec les
souvenirs de la nuit qu’ils avaient passée ensemble. C’était sûrement normal,
pensa-t-elle, serrant les dents de frustration en recommençant le même
paragraphe pour la dixième fois. C’était tout récent, tout frais, et ce n’était
pas comme si elle s’était déjà sentie aussi liée à quelqu’un. Elle allait
sûrement devoir passer par tout un processus de deuil, non ? Au moins, elle
ne reverrait jamais David. Au bout d’un moment, la douleur et la colère
s’estomperaient, et ces quelques jours horribles ne seraient plus qu’un
lointain souvenir.
Quinn se renfrogna encore un peu en pensant à l’avenir. Elle était
déterminée à retourner chez eux avec son père. Mais n’était-ce pas là où
vivait William ? Pour le coup, il était évident que David y serait aussi. Elle
devrait le revoir. Traîtreusement, une bouffée de joie l’envahit à cette
pensée… qu’elle étouffa immédiatement. Revoir David n’était pas une bonne
idée. Mais elle devrait faire avec. Après tout, elle n’allait pas le laisser
l’empêcher de récupérer sa terre, si ? Bien sûr que non. Il devrait rester en
dehors de son chemin, c’est tout.
Quelqu’un s’éclaircit doucement la gorge, l’arrachant à ses réflexions
agacées, et elle leva les yeux pour voir son père qui se tenait à quelques pas,
l’inquiétude se lisant dans ses yeux bleus. Elle cligna des yeux – il portait ses
vêtements de travail habituels, et elle se sentit un peu coupable. Charles
s’était occupé de tout pendant qu’elle se morfondait, nettoyait en profondeur
la chambre d’amis, et essayait de gérer ses sentiments. Elle n’aurait qu’à se
rattraper en travaillant deux fois plus dur demain, ou quelque chose comme
ça.
— Désolée, papa, commença-t-elle en reposant son livre. Je vais
bientôt me mettre au travail, j’avais juste…
— Tout est fait, répondit simplement Charles en agitant la main. Ne
t’inquiète pas.
— Tout ? Mais tes corvées à toi ?
— C’est fait aussi. Ne t’inquiète pas, ma chérie.
Elle fronça le nez en entendant ce surnom. Cela faisait très longtemps
qu’il ne l’avait pas appelée comme ça. D’habitude, il n’utilisait ce genre de
petits noms que quand il s’inquiétait pour elle. Savait-il ce qui s’était passé
entre elle et David ? Ce ne devait pas être très compliqué à deviner.
L’inquiétude s’empara d’elle. Elle espérait que cela ne raviverait pas trop les
souvenirs de sa mère.
Il lui demanda gentiment, la tête penchée sur le côté :
— Comment vas-tu ? Comment te sens-tu ?
— Bien, répondit-elle prudemment, sans y penser. Mais il se
rapprocha, s’assit au bout du canapé. Son langage corporel montrait qu’il
était clairement mal à l’aise, mais elle ne voyait pas comment l’aider. Cela
faisait bien longtemps qu’elle n’avait pas parlé sérieusement à son père au
sujet de ses problèmes, ses sentiments. La plupart du temps, ses
préoccupations tournaient autour de son envie de rentrer à la maison, et il
évitait ce sujet depuis tellement longtemps… mais cette fois, au moins, ils
pouvaient parler d’autre chose. Elle renonça, fermant les yeux une minute.
— Je ne vais pas bien. Pas bien du tout.
— David, dit simplement Charles. Vous deux…
— Oui, nous deux, répondit-elle, les mâchoires serrées. J’ai été
complètement idiote.
— Pas idiote, répliqua Charles aussitôt, posant une main sur sa
cheville.
Elle s’allongea sur le canapé, s’étirant pour poser ses pieds sur les
genoux de son père comme elle le faisait étant petite – il eut un petit sourire,
le souvenir lui revenant aussi, et il lui tapota le pied.
— Ce n’est pas idiot de se soucier des gens, Quinn…
— Ça l’est quand il s’agit de son pire ennemi, balança-t-elle, de
nouveau pleine de rancœur et de frustration. (Peut-être que la séance de
ménage n’avait pas été aussi efficace qu’elle l’avait espéré ; son cœur battait
la chamade dans sa poitrine.) Papa, c’est le fils de William ! Son fils ! C’est
la famille qui nous a tout pris, qui a détruit notre vie, qui…
— Je sais, dit doucement Charles. Je le sais.
Elle le fixa. Ce n’était pas une découverte pour lui. Un terrible
soupçon prit naissance en elle.
— Depuis combien de temps le sais-tu ?
Le vieux dragon soupira, soutenant son regard.
— Quinn, j’ai fréquenté William pendant des centaines d’années. J’ai
vu ces yeux émeraude chaque jour de ma vie pendant longtemps, très
longtemps. Tu penses vraiment que je serais passé à côté d’une telle
ressemblance ?
— Mais pourquoi ne m’as-tu rien dit ?
Elle avait l’impression de voir son monde s’écrouler. Mais
étrangement, même si elle s’attendait à ressentir de la colère envers son père,
ce n’était pas le cas. Ça lui ressemblait, d’éviter un sujet tel que celui-ci. Bien
sûr, il ne lui avait rien dit. Mais pourquoi l’aurait-il fait ? Cela aurait
débouché sur une dispute, et s’il y avait bien une chose pour laquelle Charles
était doué, c’était pour éviter les conflits. Même les disputes les plus
importantes, les plus primordiales, le genre de conflit qui faisait bouger les
choses et les rendait meilleures.
— Je ne voulais pas que tu le détestes avant d’avoir pu apprendre à le
connaître, dit Charles doucement. Quinn… tu ressembles beaucoup à ta mère.
Elle n’en revenait pas. D’aussi loin qu’elle s’en souvienne, son père
avait toujours évité de parler de sa mère. Et maintenant il abordait le sujet de
lui-même ? Cette journée enchaînait décidément les chocs. Quand est-ce que
ça s’arrêterait ?
— Comment ça ?
Elle était consciente que son père pourrait basculer dans une de ses
humeurs pensives et refuser de développer son propos. Malgré la forte charge
émotionnelle, la promesse d’une information, aussi ténue soit-elle sur sa mère
était passionnante.
— Tu es incroyablement forte, répondit-il simplement. Tu es une
force de la nature, Quinn. Comme une vague, comme une tempête. Tu es
l’une des personnes les plus fortes que je connaisse. Tu m’impressionnes un
peu, pour être honnête. Tout comme ta mère m’impressionnait. Elle était forte
comme toi. Certains diraient même têtue. Elle avait un très bon instinct, elle
jugeait rapidement les gens, et s’y tenait sans hésitation ni équivoque. C’était
une grande force… mais aussi une faiblesse. Les choses changent, Quinn. Le
monde n’est pas noir ou blanc, nous contre eux, les alliés et les ennemis. Ta
mère… n’était pas très douée pour voir les nuances de gris. J’ai l’impression
que tu as hérité de son aveuglement.
— Alors je suis aveugle ? répondit Quinn. Le fils de notre pire
ennemi vient s’installer avec nous, et c’est moi la méchante parce que je ne
l’accueille pas à bras ouverts quand je découvre qui il est ?
Charles ouvrit les mains.
— Quinn, il n’est pas son père. Je veux dire… à quel point tu es
comme moi ?
Elle ne put s’empêcher de sourire malgré son agacement.
— Ben… nous aimons la même musique.
Il rit.
— Exactement. Je ne voudrais pas que mes fautes, mes crimes, mes
erreurs de jugement, mes faiblesses te soient reprochés. Alors quand j’ai
rencontré David, que j’ai compris qui il était… je lui ai appliqué la même
gentillesse dont je voudrais que mes ennemis fassent preuve avec toi.
Elle plissa les yeux.
— Mais il ne m’a pas dit qui il était. Il a menti…
— Il ne savait pas ce que son père a fait.
— Comment le sais-tu ? demanda Quinn en se rasseyant. Comment
sais-tu qu’il n’est pas venu ici pour voler la pierre ?
— Je n’en sais rien, répondit simplement Charles. C’est la vérité. Je
n’ai pas toutes les réponses, Quinn, même si j’aimerais bien. Mais j’ai
quelques informations concordantes. D’une, il a volé jusqu’ici sur une
intuition, juste parce qu’on lui a dit que nous pourrions avoir besoin d’aide.
De deux, il nous a protégés de Caleb, il s’est mis en danger, il s’est battu pour
nous. De trois… il t’aime.
Elle eut l’impression de recevoir un coup de poing en pleine face.
Quinn recula.
— Quoi ?
— J’ai déjà vu ce regard. Je sais ce qu’il signifie. Je lui ai parlé ce
matin, Quinn. Je n’ai jamais vu un homme aussi dévasté. Il t’aime, chérie. Ce
que tu décideras à ce sujet, c’est ton choix, mais c’est la vérité.
— Je ne… ça n’a aucune importance, murmura-t-elle, embarrassée
par la puissance des battements de son cœur. Je m’en fiche.
— Tu n’es pas obligée de le voir, dit Charles. Mais je lui ai demandé
de rester. Les coyotes…
Elle le regarda.
— Non. Pas question. Il ne remettra pas les pieds dans cette maison…
— Il restera dehors, répondit rapidement Charles en levant les mains.
Tu n’auras pas à le voir. Mais les coyotes sont sur le sentier de la guerre,
nous ne pouvons pas nous permettre de refuser de l’aide. Il sait se battre.
Nous avons besoin de son renfort.
Elle serra les dents. Ce qu’il disait était parfaitement sensé, c’était
complètement logique. Trois dragons seraient beaucoup plus utiles que deux
face à une attaque. Et en plus, elle n’avait pas envie de se disputer avec son
père. Pas aujourd’hui.
— Très bien, dit-elle enfin, et Charles soupira de soulagement. Ça ne
me plaît pas, mais très bien. Mais papa, nous devons y retourner. Nous ne
pouvons pas rester ici. Nous devons aller trouver le nouveau roi, et essayer de
récupérer notre terre. S’il te plaît.
— Tu as raison, lui répondit doucement Charles, et elle sentait ce que
cet aveu lui coûtait. J’ai aimé cet endroit, mais ce n’est pas notre maison.
Mais nous ne pouvons pas partir, pas maintenant. Si l’un de nous s’en va, les
coyotes en profiteront pour passer à l’attaque. Et nous ne pouvons risquer de
nous retrouver sans foyer.
— Je sais, répondit-elle. Je vais réfléchir à une solution. Nous
trouverons quelque chose. Bon sang, quelle horrible journée.
Elle faillit en rire, enfouissant sa tête dans ses mains.
Il pressa ses chevilles de ses mains, tout doucement, dans un geste
étrangement réconfortant.
— On va s’en sortir, ma chérie. Nous pouvons nous épauler. C’est
suffisant.
Elle sourit, sentant les larmes lui monter aux yeux pour la centième
fois ce jour-là – mais cette fois-ci pour une raison bien différente. Si rien
d’autre ne devait sortir de toute cette douleur, elle était au moins
reconnaissante de se sentir plus proche de son père.
Ils trouveraient une solution. D’une façon ou d’une autre, ils
rentreraient chez eux.
Chapitre 13 - David
*****
LA FIN
À propos de Kayla Wolf
Kayla Wolf est une mère de deux enfants, une lectrice obsessionnelle et une
amoureuse de romance paranormale. Des métamorphes sexy, des femmes
impertinentes, des rencontres torrides et des ennemis dangereux : voilà ce qui
la pousse à rester debout toute la nuit. Chaque fois qu'elle y pense, il faut
absolument qu’elle se lève et qu’elle les écrive immédiatement… Rejoignez-
là et gâtez-la bête qui sommeille en vous.
Livres par The Wolf Sisters
* * *
« Les Ours de Bear Caves » est une série de romance paranormale composée
de romans indépendants qui connaissent tous une fin heureuse et qui sont
reliés à travers les ours qui vivent dans le village.
Sous les Ordres de l’Ours
Désirée par l'Ours
Kidnappée par l'Ours
* * *