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L'analyse économique

Le succès ou l'échec de toute entreprise dépend non seulement du bien-fondé des décisions de
gestion relatives aux produits, aux marchés et aux processus de production, mais aussi d'une
bonne anticipation des conditions économiques. Un analyste financier devrait toujours vérifier
que les décisions de gestion sont adaptées aux conditions économiques courantes et futures.
L'ampleur d'une analyse économique, ainsi que la période sur laquelle elle porte, varient
généralement selon l'horizon temporel de la décision financière considérée. Par exemple, lors
d'une décision d'investissement de fonds de retraite sur le marché des actions, on s'intéresse
aux tendances portant sur une ou deux décennies à venir : c'est-à-dire, bien au delà du cycle
économique courant. À l'opposé, lorsqu'un client est accepté avec effets à recevoir (paiement
à 90 jours), ce sont les trois mois à venir qui sont primordiaux. Il est certes souhaitable
d'éviter d'accorder des comptes avec effets à recevoir à des clients susceptibles de faire faillite
dans un an ou deux, mais ce serait conduire une politique commerciale timorée que de rejeter
des transactions en raison d'incertitudes lointaines : un crédit doit être approuvé tant qu'il n'y a
aucune raison de suspecter un client de ne pas être capable d'honorer le paiement dans les 90
jours. Dans ce cas présent, ce qu'il est important de savoir, c'est si des changements radicaux
des conditions économiques se produiront dans les trois prochains mois au point que le client
se retrouve dans l'incapacité de payer.

L'analyse économique est à la base de l'analyse sectorielle duChapitre 14 et de l'analyse


indiciaire des chapitres précédents. En comparaison, l'effort d'analyse économique est
probablement de moindre ampleur que celui d'analyse sectorielle, mais c'est déjà une partie de
l'analyse de l'entreprise. Un analyste n'a pas à conduire une analyse économique en partant de
zéro à chaque fois qu'il s'intéresse à une entreprise. Normalement chacun devrait déjà avoir
connaissances des grandes tendances économiques, de l'état actuel de l'économie, des
politiques monétaire et fiscale suivies, et des principaux projets de loi. En outre, on devrait
exercer une surveillance continue des indicateurs, qui annoncent un changement dans les
conditions économiques, et entraînent une modification des prévisions. Ensuite l'analyse
économique représente moins de travail pour l'analyste lui-même puisqu'il peut se référer à de
nombreux spécialistes en sciences économiques et politiques parfaitement bien informés, et
désireux d'échanger leurs opinions dans les médias. Le gouvernement publie également les
principales données économiques sensibles régulièrement. En revanche, il est beaucoup plus
difficile d'obtenir des opinions d'experts concernant un produit, une entreprise ou un secteur
en particulier.

Cependant, le volume disponible d'informations économiques pertinentes trompe la vigilance


de nombreux professionnels qui, se croyant suffisamment informés, ne décèlent pas certains
revirements et interprètent mal des tendances. C'est pourquoi, il est conseillé de faire une mise
à jour complète, systématique et régulière (disons, une fois par semaine) des conditions
économiques à partir des données et d'événements rendus public récemment. Il faut aussi
considérer que les prévisions économiques sont un exercice périlleux. Même les plus grands
économistes sont connus pour faire des erreurs. Et l'approche très répandue qui consiste à se
baser sur des prévisions reconnues, n'est en aucun cas l'assurance de ne pas se tromper. Une
erreur reste de la responsabilité de l'analyste : c'est lui qui décide de faire confiance à une
opinion ou à une autre.Le meilleur conseil qu'on puisse donner est de faire soi-même tout ou
partie de l'interprétation des données et de la prévision. Cela ne signifie pas qu'un analyste
doive être également un économiste qualifié et y consacrer une quantité considérable de son
temps. Comme nous le montrerons dans les sections suivantes, seuls quelques aspects
essentiels doivent faire l'objet d'une attention particulière. En fait, ce chapitre est le plus court
de ce cours. Les choses ont été restreintes à un minimum réaliste, non parce qu'elles sont sans
importance, mais parce que beaucoup ont déjà été décrites ailleurs. Il y a abondance de cours
et de manuels qui peuvent être consultés à ce sujet. Nous nous limiterons donc à présenter le
strict nécessaire à l'analyse financière.

Ce chapitre comporte trois sections.

A- les grandes tendances économiques


B- les cycles économiques
C- les prévisions économiques pour les analystes financiers

Une grande partie du chapitre précédent a été consacrée aux conséquences sur les ventes d'un
secteur des changements de revenu du consommateur au cours d'un cycle économique . Et,
comme il se doit, la plus grande partie de ce chapitre est consacrée à la description ainsi
qu'aux méthodes de prévision des cycles économiques. Malgré ces mouvements cycliques, la
demande des consommateurs croit à un rythme régulier, parallèlement au revenu et au produit
national. La demande des consommateurs varie également sur le long terme sous l'influence
de tendances sociales, politiques, culturelles et économiques, qui sont à la source de
l'innovation. C'est à ces tendances de long terme que nous nous intéresserons en premier lieu.

A- Grandes tendances économiques

Il y a deux types différents de grandes tendances économiques auxquelles un analyste


s'intéresse : la croissance globale qui affecte pratiquement l'ensemble de l'activité économique
et les caractéristiques socio-économiques à long terme qui affectent différemment les divers
secteurs d'activité et entreprises. Ce sont les mêmes variables que celles employées dans
l'analyse de sensibilité du chapitre précédent.

1) Taux de croissance du revenu national

Les revenus des consommateurs ont toujours augmenté au rythme du produit intérieur brut et
on peut s'attendre à ce qu'il en soit de même à l'avenir si aucun des principaux facteurs de
croissance n'est perturbé. Le produit économique mondial augmente à un taux régulier
compris entre 2% et 5% en moyenne, mais les pays en voie de développement connaissent des
taux de croissance parfois plus élevés. Au siècle dernier l'économie américaine s'est
développée au rythme d'un taux de croissance moyen réel de 2,9%. Pour la période 1960-
1988, le taux de croissance réel annuel du produit intérieur brut se montait à 3,3% pour les
Etats-Unis, 4,4% pour le Canada, 3,7% pour la France, 3,1% pour l'Allemagne, 4,0% pour
l'Italie, 6,5% pour le Japon et 2,5% pour le Royaume-Uni. Ceci correspond à une moyenne de
3,9% pour ces sept pays. Plus récemment, la croissance a ralenti : pour la période 1978-1998
le taux moyen de croissance économique des Etats-Unis n'était que de 2,74%.

Tableau T-15.1 : la célèbre liste des sources de la croissance aux Etats-Unis par Dennison,
éditée en 1985.

Tableau T-15.1

Sources de croissance aux Etats-Unis pour 1929-1982

Augmentation de la quantité de travail 32%


Augmentation de la productivité du travail 68%
Progrès technologique 28%
Quantité de capital 19%
Education et formation 14%
Economies d'échelle 9%
Meilleure répartition des ressources 8%
Restrictions légales et
-9%
environnementales

Les économistes expliquent la croissance économique par une augmentation de la main-


d'oeuvre, des gains de productivité, les effets positifs du commerce international et des
politique de concertation à l'échelle mondiale visant à réduire ou à éviter des conflits. Pour
établir des prévisions du taux de croissance, chacun de ces éléments doit faire l'objet d'une
analyse. Les deux derniers facteurs cités (concernant le commerce international et les
politiques extérieures) sont le résultat de l'attitude de chaque pays, et on ne peut pas
raisonnablement supposer qu'à l'avenir ils se démarquent significativement de ce qu'ils ont été
ces 50 dernières années. Si de nets signes de tensions internationales devaient apparaître,
(espérons que ce ne soit pas le cas dans les années à venir), la croissance devrait ralentir en
conséquence. (Lors des manifestations anti-mondialisation lors de la réunion de l'Organisation
Mondiale du Commerce à Seattle en 1999, certaines revendications étaient préoccupantes,
mais rien ne prouve qu'elles reflètent l'avis de la majorité de la population, ni que les
gouvernements aient l'intention d'épouser ces points de vue.)

La croissance de la main-d'oeuvre est attribuée à une plus grande proportion de femmes


actives et à la croissance de la population. Pour les pays occidentaux, la proportion de femmes
dans la population active atteint le même niveau que pour les hommes. (En 1995, ce taux était
en fait légèrement plus élevé: 94% pour des femmes contre 93,8% pour les hommes. Ce
changement est intervenu assez rapidement puisque, par exemple, ce taux pour les femmes
ayant des enfants de moins de 6 ans est monté de 18,6% en 1960 à 61,7% en 1994.) Dans
l'avenir il ne faudra donc pas espérer beaucoup d'une augmentation du nombre de femmes
actives. En ce qui concerne la croissance de la population dans les pays d'Europe occidentale,
elle a fortement diminué et se rapprochait de zéro à la fin du 20ème siècle, se montant en
moyenne à juste 0,2%, voire à moins de zéro pour certain pays. Aux Etats-Unis, le taux de
croissance de la population avait également chuté, mais il continue de tourner autour de 1%
depuis plusieurs décennies et on peut s'attendre à ce qu'il en soit de même dans un futur
proche.

Ainsi, la majeure partie de la croissance économique à long terme est attribuable aux gains de
productivité : deux tiers pour les Etats-Unis (68% pour être précis, selon l'analyse de
Dennison présentée dans le Tableau T-15.1), et beaucoup plus pour certains pays de l'OCDE
dont la population stagne. Les gains de productivité sont attribuables au progrès
technologique pour les biens durables, à une augmentation de capital, aux économies
d'échelle, à une meilleure répartition des ressources et à une amélioration de la qualification
de la population active. Mais ils ont été inférieurs à ce qu'ils auraient pu être, du fait d'un
renforcement des réglementations (coûteuses mais nécessaires) dans le domaine de la sécurité,
de la lutte contre la pollution, et autres entraves à la production.

Au cours du siècle dernier, la qualification de la main d'oeuvre s'est considérablement


améliorée à en juger par les progrès de l'instruction dans la population. Par exemple, aux
Etats-Unis, le nombre de personnes ayant fini le lycée est passé de 13% au début du 20ème
siècle, à plus 86% moins d'un siècle plus tard. Dans beaucoup de pays en développement, les
taux d'instruction approchent ou dépassent les 90%. La qualification de la population active
est donc susceptible de poursuivre son amélioration à l'avenir, mais à un rythme plus lent que
par le passé. Quant à l'investissement net de capital, il s'est avéré régulier autour de 10% du
produit national brut réel ces 50 dernières années. Les économies d'échelle semblent être un
peu plus prometteuses, au moment où la mondialisation des marchés et les fusions au niveau
international se développent de plus en plus.

Mais le plus grand facteur de croissance économique repose sur le progrès technologique.
Plus abordables, plus compacts et plus rapides, les ordinateurs transforment tous les secteurs
de l'économie, en particulier grâce à la facilité d'accès à l'information qu'ils procurent. La
propagation d'Internet assure que le progrès technologique continuera de contribuer
sensiblement à la croissance de la productivité dans un avenir proche.

Les remarques précédentes concernant les différents facteurs des gains de productivité nous
conduisent naturellement à nous demander si le taux de croissance économique peut être
facilement anticipé. Ces différentes remarques suggèrent que la tendance globale devrait
demeurer sensiblement la même que par le passé, mais en marquant un léger ralentissement.
Prévoir l'ampleur de ce ralentissement n'est en aucun cas évident, il est donc nécessaire de
s'intéresser à certaines données qui peuvent apporter un peu de lumière au problème. Le
tableau T-15.2 présente les gains de productivité des Etats-Unis. La productivité est mesurée
par la valeur ajoutée rapportée par heure et par personne. (Rappelons que la somme de toutes
les valeurs ajoutées forme le PIB). Puisque le produit agrégé est aussi la variable qui
détermine les fluctuations économiques, il apparaît évident que la productivité par heure et
par personne soit cyclique. Pour la période 1978-1998 son taux de croissance moyen s'élevait
à 1,7% par an.

Pour prévoir le taux de croissance annuel du PIB des Etats-Unis au début du 21ème siècle, il
suffit donc d'ajouter à la récente croissance annuelle de la productivité (1,7%) le taux annuel
de croissance de la population (1%) estimé. On obtient alors un total de 2,7%, ce qui est
légèrement inférieur aux 2,74% des vingt dernières années. En 1999, les prévisions de la
Banque Mondiale pour la période 1999-2003 se montaient à 3,9%. Et tandis que nos
prévisions de 2,7% peuvent paraître un peu pessimistes en comparaison, il est aussi très peu
probable que la croissance réelle d'une année donnée soit exactement égale à ce taux, puisque
l'économie est cyclique, et que les conditions socio- économiques sont fortement susceptibles
de changer. Pour affiner des prévisions, deux approches sont possibles : l'une met en oeuvre
des simulations économétriques et l'analyses de séries chronologiques (présentées dans le
chapitre précédent), l'autre consiste en une ré-estimation de chacun des facteurs de gain de
productivité discutés plus haut. Ce qui reviendrait à s'intéresser aux sources de la croissance
démographique, de l'augmentation de la population active, du progrès technologique, de
l'automatisation, de la motivation à une meilleure formation et à l'esprit d'entreprise. Une telle
analyse n'est plus du ressort de la finance ou des sciences économiques, mais de la sociologie
et la psychologie. Ainsi, nous nous limiterons à indiquer des pistes pour des analyses plus
approfondies, plutôt que de chercher à traiter un sujet qui va bien au delà de l'objet de ce
cours.

A- Grandes tendances économiques

Il y a deux types différents de grandes tendances économiques auxquelles un analyste


s'intéresse : la croissance globale qui affecte pratiquement l'ensemble de l'activité économique
et les caractéristiques socio-économiques à long terme qui affectent différemment les divers
secteurs d'activité et entreprises. Ce sont les mêmes variables que celles employées dans
l'analyse de sensibilité du chapitre précédent.

1) Taux de croissance du revenu national

Les revenus des consommateurs ont toujours augmenté au rythme du produit intérieur brut et
on peut s'attendre à ce qu'il en soit de même à l'avenir si aucun des principaux facteurs de
croissance n'est perturbé. Le produit économique mondial augmente à un taux régulier
compris entre 2% et 5% en moyenne, mais les pays en voie de développement connaissent des
taux de croissance parfois plus élevés. Au siècle dernier l'économie américaine s'est
développée au rythme d'un taux de croissance moyen réel de 2,9%. Pour la période 1960-
1988, le taux de croissance réel annuel du produit intérieur brut se montait à 3,3% pour les
Etats-Unis, 4,4% pour le Canada, 3,7% pour la France, 3,1% pour l'Allemagne, 4,0% pour
l'Italie, 6,5% pour le Japon et 2,5% pour le Royaume-Uni. Ceci correspond à une moyenne de
3,9% pour ces sept pays. Plus récemment, la croissance a ralenti : pour la période 1978-1998
le taux moyen de croissance économique des Etats-Unis n'était que de 2,74%.

Tableau T-15.1 : la célèbre liste des sources de la croissance aux Etats-Unis par Dennison,
éditée en 1985.

Tableau T-15.1

Sources de croissance aux Etats-Unis pour 1929-1982

Augmentation de la quantité de travail 32%


Augmentation de la productivité du travail 68%
Progrès technologique 28%
Quantité de capital 19%
Education et formation 14%
Economies d'échelle 9%
Meilleure répartition des ressources 8%
Restrictions légales et
-9%
environnementales

Les économistes expliquent la croissance économique par une augmentation de la main-


d'oeuvre, des gains de productivité, les effets positifs du commerce international et des
politique de concertation à l'échelle mondiale visant à réduire ou à éviter des conflits. Pour
établir des prévisions du taux de croissance, chacun de ces éléments doit faire l'objet d'une
analyse. Les deux derniers facteurs cités (concernant le commerce international et les
politiques extérieures) sont le résultat de l'attitude de chaque pays, et on ne peut pas
raisonnablement supposer qu'à l'avenir ils se démarquent significativement de ce qu'ils ont été
ces 50 dernières années. Si de nets signes de tensions internationales devaient apparaître,
(espérons que ce ne soit pas le cas dans les années à venir), la croissance devrait ralentir en
conséquence. (Lors des manifestations anti-mondialisation lors de la réunion de l'Organisation
Mondiale du Commerce à Seattle en 1999, certaines revendications étaient préoccupantes,
mais rien ne prouve qu'elles reflètent l'avis de la majorité de la population, ni que les
gouvernements aient l'intention d'épouser ces points de vue.)

La croissance de la main-d'oeuvre est attribuée à une plus grande proportion de femmes


actives et à la croissance de la population. Pour les pays occidentaux, la proportion de femmes
dans la population active atteint le même niveau que pour les hommes. (En 1995, ce taux était
en fait légèrement plus élevé: 94% pour des femmes contre 93,8% pour les hommes. Ce
changement est intervenu assez rapidement puisque, par exemple, ce taux pour les femmes
ayant des enfants de moins de 6 ans est monté de 18,6% en 1960 à 61,7% en 1994.) Dans
l'avenir il ne faudra donc pas espérer beaucoup d'une augmentation du nombre de femmes
actives. En ce qui concerne la croissance de la population dans les pays d'Europe occidentale,
elle a fortement diminué et se rapprochait de zéro à la fin du 20ème siècle, se montant en
moyenne à juste 0,2%, voire à moins de zéro pour certain pays. Aux Etats-Unis, le taux de
croissance de la population avait également chuté, mais il continue de tourner autour de 1%
depuis plusieurs décennies et on peut s'attendre à ce qu'il en soit de même dans un futur
proche.

Ainsi, la majeure partie de la croissance économique à long terme est attribuable aux gains de
productivité : deux tiers pour les Etats-Unis (68% pour être précis, selon l'analyse de
Dennison présentée dans le Tableau T-15.1), et beaucoup plus pour certains pays de l'OCDE
dont la population stagne. Les gains de productivité sont attribuables au progrès
technologique pour les biens durables, à une augmentation de capital, aux économies
d'échelle, à une meilleure répartition des ressources et à une amélioration de la qualification
de la population active. Mais ils ont été inférieurs à ce qu'ils auraient pu être, du fait d'un
renforcement des réglementations (coûteuses mais nécessaires) dans le domaine de la sécurité,
de la lutte contre la pollution, et autres entraves à la production.

Au cours du siècle dernier, la qualification de la main d'oeuvre s'est considérablement


améliorée à en juger par les progrès de l'instruction dans la population. Par exemple, aux
Etats-Unis, le nombre de personnes ayant fini le lycée est passé de 13% au début du 20ème
siècle, à plus 86% moins d'un siècle plus tard. Dans beaucoup de pays en développement, les
taux d'instruction approchent ou dépassent les 90%. La qualification de la population active
est donc susceptible de poursuivre son amélioration à l'avenir, mais à un rythme plus lent que
par le passé. Quant à l'investissement net de capital, il s'est avéré régulier autour de 10% du
produit national brut réel ces 50 dernières années. Les économies d'échelle semblent être un
peu plus prometteuses, au moment où la mondialisation des marchés et les fusions au niveau
international se développent de plus en plus.

Mais le plus grand facteur de croissance économique repose sur le progrès technologique.
Plus abordables, plus compacts et plus rapides, les ordinateurs transforment tous les secteurs
de l'économie, en particulier grâce à la facilité d'accès à l'information qu'ils procurent. La
propagation d'Internet assure que le progrès technologique continuera de contribuer
sensiblement à la croissance de la productivité dans un avenir proche.

Les remarques précédentes concernant les différents facteurs des gains de productivité nous
conduisent naturellement à nous demander si le taux de croissance économique peut être
facilement anticipé. Ces différentes remarques suggèrent que la tendance globale devrait
demeurer sensiblement la même que par le passé, mais en marquant un léger ralentissement.
Prévoir l'ampleur de ce ralentissement n'est en aucun cas évident, il est donc nécessaire de
s'intéresser à certaines données qui peuvent apporter un peu de lumière au problème. Le
tableau T-15.2 présente les gains de productivité des Etats-Unis. La productivité est mesurée
par la valeur ajoutée rapportée par heure et par personne. (Rappelons que la somme de toutes
les valeurs ajoutées forme le PIB). Puisque le produit agrégé est aussi la variable qui
détermine les fluctuations économiques, il apparaît évident que la productivité par heure et
par personne soit cyclique. Pour la période 1978-1998 son taux de croissance moyen s'élevait
à 1,7% par an.

Pour prévoir le taux de croissance annuel du PIB des Etats-Unis au début du 21ème siècle, il
suffit donc d'ajouter à la récente croissance annuelle de la productivité (1,7%) le taux annuel
de croissance de la population (1%) estimé. On obtient alors un total de 2,7%, ce qui est
légèrement inférieur aux 2,74% des vingt dernières années. En 1999, les prévisions de la
Banque Mondiale pour la période 1999-2003 se montaient à 3,9%. Et tandis que nos
prévisions de 2,7% peuvent paraître un peu pessimistes en comparaison, il est aussi très peu
probable que la croissance réelle d'une année donnée soit exactement égale à ce taux, puisque
l'économie est cyclique, et que les conditions socio- économiques sont fortement susceptibles
de changer. Pour affiner des prévisions, deux approches sont possibles : l'une met en oeuvre
des simulations économétriques et l'analyses de séries chronologiques (présentées dans le
chapitre précédent), l'autre consiste en une ré-estimation de chacun des facteurs de gain de
productivité discutés plus haut. Ce qui reviendrait à s'intéresser aux sources de la croissance
démographique, de l'augmentation de la population active, du progrès technologique, de
l'automatisation, de la motivation à une meilleure formation et à l'esprit d'entreprise. Une telle
analyse n'est plus du ressort de la finance ou des sciences économiques, mais de la sociologie
et la psychologie. Ainsi, nous nous limiterons à indiquer des pistes pour des analyses plus
approfondies, plutôt que de chercher à traiter un sujet qui va bien au delà de l'objet de ce
cours.

2) Tendances socio-économiques à long terme

Les changements socio-économiques sont importants dans notre analyse, car ils affectent le
taux d'épargne, les motivations face au travail, l'attitude vis à vis de l'emploi, l'esprit
d'entreprise, la prise de risque, la fiscalité et les dépenses du gouvernement. Autant de
facteurs qui, eux même, se répercutent sur la croissance économique et le revenu national. De
ce fait, un analyste devrait toujours étudier les grandes tendances socio- économiques
discutées plus loin, pour s'assurer qu'un changement dans les prévisions des taux d'intérêt, ou
de la croissance des ventes dans l'industrie est justifié. Mais, c'est surtout parce que les
tendances socio-économiques sont déterminantes lors de prévisions (traitées à la fin de ce
chapitre), qu'il est essentiel de s'y intéresser.

Pour déterminer quelle invention scientifique aura une application commerciale, il est
nécessaire d'étudier les caractéristiques sociales et de déduire dans quelle direction les
différents secteurs devraient concentrer leurs efforts de recherche et développement. De
nouveaux produits sont introduits sur le marché parce que les consommateurs en ont besoin
(encore que de nombreux lancements se traduisent pas un échec, parce que les
consommateurs ne sont pas encore prêts à les accepter, par exemple). Mais les innovations
modifient à leur tour les comportements de ceux qui les utilisent (voyez par exemple,
comment le courrier électronique et le e-commerce ont modifié les habitude de
communication et de travail). Ces modifications des comportements peuvent parfois aller au
delà de l'individu, et affecter toute une famille, une entreprise ou un secteur d'activité.
L'histoire de la science et des inventions montre comment un enchaînement de cause à effet
explique chaque nouveau développement technologique.

A un point donné dans le temps, le cadre de notre vie en société semble être parfaitement
établi et stable. Il fait partie de la vie à laquelle nous sommes accoutumés. Mais, en réalité, il
évolue en continu, et c'est cette évolution qui provoque des changements dans les produits et
les services que la société désire. Ainsi, la tâche d'un analyste est de pointer l'évolution des
tendances, d'en étudier les causes, de déterminer si cette évolution est susceptible de cesser ou
au contraire de se poursuivre, et de déduire les nouveaux besoins qu'elle pourrait impliquer
pour la société.

Voici une liste parmi d'autre des tendances démographiques, auxquelles un analyste devrait
s'intéresser.
- population totale
- taux de natalité
- taux de mortalité
- taux de croissance de la population
- structure par âge de la population
- proportion de jeunes et d'enfants
- proportion de personnes âgées
- longévité
- proportion de femmes en âge de procréer
- structure familiale
- nombre moyen d'années de scolarisation
- niveau d'étude par discipline
- proportions de la population selon le niveau d'éducation
- même analyse selon la race
- même analyse selon le sexe
- mouvements migratoires
- mouvements migratoires par pays
- mouvements migratoires régionaux à l'intérieur du pays
- exode rural
- mouvements migratoires des villes vers les banlieues
- raisons sanitaires des mouvements migratoires
- raisons culturelles des mouvements migratoires
- raisons économiques des mouvements migratoires

Prenons la dernière tendance par exemple: elle a caractérisé les immigrés arrivant aux Etats-
Unis. Les immigrés d'aujourd'hui sont plus instruits et plus aisés, mais peuvent ne pas avoir la
même volonté de surmonter les difficultés.

Les mêmes listes de tendances peuvent être établies dans des domaines comme :
- les priorités politiques
- les conséquences sociales de la croissance des revenus
- les conséquences familiales de la croissance continue de la population mondiale
- l'utilisation des ressources naturelles
- les conséquences d'une vitesse et d'une facilité croissante dans le transport et la
communication
- les conséquences de l'augmentation des échanges culturels et marchands

B- Cycles économiques

B- Description des cycles économiques


S'il est bien connu que les cycles économiques se caractérisent par une succession de phases
de croissance et de récession économique, il n'est pas inutile de distinguer au cours de chacun
d'eux, deux voire trois phases. En effet la fin d'une période de croissance est très différente de
son commencement, de même en ce qui concerne la période de récession. Ainsi, après un
creux, l'économie commence par se rétablir lentement, avant d'entrer en phase de croissance
proprement dite, et de finir en surchauffe. De même après un pic, l'économie ralentit, avant de
se contracter, et de finir en récession. Nous avons déjà vu dans la section D du chapitre 13
comment les cycles économiques affectent presque tous les secteurs de l'économie. C'est une
de leurs caractéristiques importantes : ils se répandent dans pratiquement l'ensemble de
l'économie, et s'autogénèrent. Nous avons déjà vu qu'il existait des cycles spécifiques à
certaines régions, certains processus industriels ou certains produits. Les cycles économiques
affectent, quant à eux, tout un chacun au sein d'une économie, mais parfois à des degrés
variables et des périodes différentes.

1) - Histoire des cycles économiques aux Etats-Unis

Le graphique G-15.1 représente la courbe des cycles économiques aux Etats-Unis sur la
période de 1929 à 1998, à partir des données provenant de publications du Secrétariat
Américain au Commerce.

Graphique G-15.1
A partir des données de ce graphique, on se rend compte que l'économie américaine a
effectivement connu des fluctuations économiques mais que leur sévérité et leur longueur se
sont modifiées dans le temps. On remarque entre autres que les cycles ont été moins
prononcés ces dernières années. Le Tableau T-15.1 présente les données relatives à la
longueur des phases d'expansion et de contraction, ainsi que le niveau de chômage durant ces
phases.

Tableau 15,1
Phases de contraction et d'expansion sur la période 1919-1990
Contraction Expansion
Taux de Taux de
Creux Pic Mois Mois
chômage chômage
Décembre 1914 Août 1918
Mars 1919 Janvier 1920 7 10
Juillet 1921 Mai 1923 18 22
Juillet 1924 Octobre 1926 14 27
Novembre 1927 Août 1929 13 21 3,2
Mars 1933 Mai 1937 43 24,9 50 20,1
Juin 1938 Février 1945 13 14,6 80 1,9
Octobre 1945 Novembre 1948 8 3,9 37 5,3
Octobre 1949 Juillet 1953 11 45 5,3
Mai 1654 Août 1957 10 39 4,4
Avril 1958 Avril 1960 8 24 5,5
Février 1961 Décembre 1969 10 106 4,5
Novembre 1970 Novembre 1973 11 4,9 36 4,9
Mars 1975 Janvier 1980 16 8,5 58 5,8
Juillet 1980 Juillet 1981 6 7,1 12 7,6
Novembre 1982 Juillet 1990 16 9,7 92 5,6
Mars 1991 8 6,8 100 4,5
Moyenne des cycles en temps de paix
1854-
22 29
1919
1919-
20 26
1945
1945-
11 43
1991
Avenue 19 29
Source: Statistical Abstracts of the United States 1999, page 569, National Bureau
of Economic Research, non publié

Le Tableau T-15.1 montre une durée moyenne des cycles économiques de 48 mois. Il y a de
grandes différences dans la longueur des phases de récession (6 à 43 mois) et de croissance
(10 à 106 mois). Il est encourageant d'observer que la longueur des phases de récession a
diminué de 22 mois avant 1919 à moins de 11 mois après la deuxième guerre mondiale. Ce
signe est d'autant plus encourageant, que dans le même temps les phases d'expansion sont
passées de 29 mois avant 1919 à 57 mois après 1945.

3) - Politiques monétaires et fiscales au cours du cycle économique

Dans notre description du cycle économique, nous avons volontairement omis toute
intervention de l'état. Au 19ème siècle, les cycles économiques étaient particulièrement
prononcés, notamment les périodes de crise qui causaient la faillite de très nombreuses
entreprises, et entraînaient des niveaux de chômage très élevés. Les gouvernements (en
particulier aux Etats-Unis et au Royaume Uni) se sont vus obligés d'intervenir pour essayer
d'aplanir les difficultés lors de récessions graves. Puisque l'excès de crédits était la cause des
faillites bancaires, aussi bien que des faillites d'entreprises de biens et de services, les banques
centrales ont dû mettre en place des politiques monétaires de manière à résoudre ces
problèmes.

Malheureusement, au début du 20ème siècle, les politiques gouvernementales ont souvent


consisté en l'inverse de ce qui était nécessaire et ont ainsi contribué à aggraver l'ampleur des
cycles économiques. Par exemple, le gouvernement des Etats-Unis s'était fait un devoir moral
d'équilibrer son budget, et a ainsi commencé par augmenter les impôts lors de la grande
dépression des années 30. Les théories de John Maynard Keynes et de ses successeurs ont
apporté de grandes améliorations dans les politiques fiscales. Le New Deal sous le président
Franklin D. Roosevelt a été la première application concrète de la théorie keynésienne, qui
recommandait une augmentation des dépenses publiques. Toujours aux Etats-Unis, le
Employment Act de 1946 engageait le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour
prévenir tout chômage excessif. Celui-ci a bientôt été abandonné, car les crises d'après la
deuxième guerre mondiale se sont avérées beaucoup plus modérées qu'auparavant et le taux
de chômage aux Etats-Unis n'a plus jamais atteint les 10% comme il l'avait fait par deux fois
dans le passé. Dans les années 60, les économistes ont même cru un temps qu'ils pourraient
diriger l'économie avec suffisamment de précision pour éviter les récessions.

Mais il n'en fut pas ainsi. Les théories économiques keynésiennes avaient négligé la politique
monétaire, qu'elles ne considéraient utile que pour soutenir la politique fiscale. Pour faciliter
les emprunts de l'état, la Banque Centrale américaine dut intervenir. Les emprunts du
gouvernement se sont alors substitués à ceux du secteur privé, ce qui a retardé le
rétablissement de l'économie. Parallèlement, la masse monétaire pouvait croître sans
restriction aucune en période d'expansion, entraînant de fortes tendances inflationnistes qui
ont accéléré la surchauffe de l'économie et l'ont poussée vers la récession. Une amélioration
de la politique monétaire n'a pas été envisagée jusqu'à ce que les théories de Milton Friedman
soient reconnues dans les années 80. Une croissance lente et régulière de la masse monétaire
est alors apparue comme un facteur essentiel de stabilité économique. Depuis, les cycles
économiques semblent modérés comme ils ne l'ont jamais été, et les phases d'expansion sont
beaucoup plus longues.

4) - Explication des cycles économiques

Trouver une cause aux cycles économiques a été l'objet du travail des plus grands
économistes, et à l'origine de théories économiques majeures durant la première moitié du
20ème siècle. (Depuis, l'intérêt des économistes pour ce sujet semble avoir été en diminuant).
Nous nous limiterons ici à présenter les théories les plus communément discutées. Nous
commençerons par la plus ancienne mais aussi la plus simpliste explication du phénomène.

a) Le déséquilibre des prix : Puisque les prix tendent à être élevés au sommet, et bas au
creux du cycle, le cycle économique a d'abord été considéré comme un processus normal
d'ajustement des prix vers l'équilibre. Un équilibre est difficilement atteint instantanément.
Cela peut prendre plusieurs ajustements d'augmentation et de réduction de la quantité offerte
pour y parvenir. Pendant ce temps, les conditions de la demande ont changé puisque le prix
d'équilibre lui-même a été modifié, ce qui exige une nouvelle dynamique du processus
d'ajustement.

b) Les facteurs exogènes: Des événements étrangers à l'économie peuvent être à la source
d'une augmentation des chiffres d'affaires :
- innovations
- découvertes de nouveaux gisements
- réduction des entraves au commerce international
- dépenses militaires accrues
- rendements agricoles exceptionnels
ou au contraire, entraîner une diminution des revenus :
- catastrophes naturelles
- réductions des dépenses publiques
- restriction des échanges et du commerce
- rendements agricoles faibles
Nous avons déjà mentionné certains de ces facteurs, comme pouvant affecter un secteur
d'activité. Les théories des cycles économiques reconnaissent que ces facteurs sont également
capables d'entretenir la dynamique des fluctuations économiques, mais seulement quand
plusieurs apparaissent simultanément.

c) La sous-consommation : Cette théorie s'intéresse en particulier à la différence entre les


salaires du travail et les revenus des entrepreneurs. Le groupe des salariés consacre plus de
revenu à la consommation que celui des entrepreneurs. Si une plus grande proportion des
revenus est affectée aux bénéfices, le niveau global de la consommation s'abaisse. Ceci
entraîne une récession. Ventes et bénéfices fondent comme neige au soleil.
Proportionnellement au total des revenus, la part des salaires augmente. Les salariés
consomment ce qui pousse l'économie vers la croissance de nouveau.

d) Le surinvestissement : Quand les taux d'intérêt sont bas, de nombreux projets sont lancés,
car ils apparaissent rentables : cela engendre une croissance économique. Quand les taux
d'intérêt augmentent du fait de l'inflation et de prêts excessifs, les projets sont de moins en
moins rentables, et un certain nombre sont abandonnés : la récession commence. Quand les
taux d'intérêt chutent, les investissements sont de nouveau rentables, et l'économie re-décolle.

e) Les innovations : Des inventions apparaissent sans arrêt, mais leurs applications
industrielles ou commerciales, c.-à-d. les innovations, sont plus sporadiques. Les innovations
sont mises en oeuvre quand les conditions économiques sont favorables, c'est à dire que les
ventes sont importantes. A ce moment, investissements et créations d'entreprises apparaissent
rentables, et une phase d'expansion en résulte. Les nouveaux outils de production sont plus
efficaces que par le passé, ce qui pousse les entreprises obsolètes vers la faillite, et entraîne
l'économie vers la récession. Les maigres perspectives de vente freinent toutes innovations
jusqu'à la reprise.

f) Les explications psychologiques : Le surinvestissement des entreprises trouve sa cause


dans un optimisme exagéré lorsque les conditions économiques semblent prometteuses. Par
conséquent, de nombreux produits similaires sont lancés sur le marché. Cet optimisme
exagéré est donc à la source de la surchauffe de l'économie, puis de la récession qui suit et qui
entraîne des fermetures d'usines importantes, du fait de capacités de production excessives. Ce
même optimisme résulte à la fois d'un manque d'informations sur les projets des concurrents
que du désir de trop de personnes de se fier, au même moment, à des signes encourageants. Le
pessimisme prend place quand les projets superflus sont abandonnés et que la récession
s'installe.

g) L'épargne forcée : En période d'expansion économique, ce sont les biens durables qui,en
premier lieu, font l'objet de surinvestissement, puisque ce sont eux qui sont à la base de la
production des biens de consommation. Ceci entraîne une pénurie de biens de consommation,
et donc de l'inflation. Inflation qui se traduit par de l'épargne forcée sous la forme de profits
d'entreprises non distribués, et cause un ralentissement de la consommation et, par là même,
une contraction de l'économie. La consommation ne reprend que quand l'inflation est
maîtrisée, que la production de biens durables ralentit, et que les producteurs de biens de
consommation dégagent de nouveau des revenus substantiels.

h) L'accélérateur : Une fluctuation relativement petite dans le secteur des biens de


consommation peut affecter celui des biens durables (nécessaires à la production des biens de
consommations) proportionnellement beaucoup plus fortement. Ainsi, le secteur des biens
durables est très instable et entraîne le reste de l'économie dans des fluctuations économiques.
Il existe également une version de l'accélérateur à partir du niveau des stocks, qui est tout
aussi populaire.

i) Le multiplicateur d'investissement : Une faible variation dans l'investissement des


entreprises ou dans les dépenses du gouvernement entraîne une variation démultipliée de la
production et du revenu agrégé. Cela vient du fait que la propension marginale à consommer
est inférieure à un. Lorsqu'une économie est en phase de croissance, le niveau
d'investissement et celui des dépenses publiques nécessaires à l'équilibre change. On assiste
donc à des fluctuations tant que le niveau courant d'investissement et des dépenses n'est pas
parfaitement égal au niveau requis.

j) Les prêts excessifs des banques : Quand leurs réserves sont abondantes, les banques sont
enclines à prêter. Les crédits qu'elles accordent permettent de faire décoller les ventes et ainsi
de réduire les stocks. Quand leurs réserves sont épuisées, les banques cessent de prêter, ce qui
entraîne une récession.

k) Mauvaises politiques de la banque centrale: Pour soutenir les politiques fiscales de


relance de l'économie, on favorise une rapide croissance de la masse monétaire. Mais cette
croissance de la masse monétaire finit par entraîner de l'inflation, que la banque centrale va
s'efforcer de combattre en limitant la création de monnaie. Les banques voient alors leurs
réserves diminuer, les prêts sont plus difficiles à obtenir, et l'économie tombe en récession.
L'alternance de politiques monétaires inflationnistes puis de lutte contre l'inflation, est à
l'origine des cycles économiques, ou du moins les amplifie.

Si la liste ci-dessus ne devait pas suffire, il existe de nombreuses autres théories. Il y a celles
qui se focalisent sur la productivité du travail et sur l'unité de coût de la main d'oeuvre.
D'autres s'intéressent exclusivement à la propagation internationale des cycles économiques à
partir du commerce international et des fluctuations des taux de change. Il existe même des
théories basées sur le rôle des syndicats. Et naturellement, il y a une version marxiste des
cycles économiques.

Notre objectif n'est pas ici de porter un jugement sur ces théories. Mais il faut bien reconnaître
que les contributions des Keynésiens et celles des monétaristes pour améliorer les politiques
monétaires et fiscales surpassent les autres théories. Le fait qu'il y ait tant d'explications
logiques des cycles économiques, nous fait prendre conscience qu'il s'agit d'un processus
complexe, et qu'il faut s'intéresser à de nombreux facteurs pour éviter de commettre des
erreurs dans l'analyse de l'état actuel ou futur de l'économie. On peut en tirer une deuxième
conclusion : les forces en présence sont très nombreuses et on peut très facilement se tromper
en croyant que les choses vont demeurer telles quelles sont. Comme nous l'avons mentionné
plus haut, dans les années 60, les économistes ont cru que les cycles économiques avaient
disparu. A l'inverse, dans les années 30, les Américains ne voyaient plus de fin à la
dépression. Il est tout aussi dangereux de se laisser leurrer par la prospérité prolongée à
laquelle on assiste depuis le début du 21ème siècle aux Etats-Unis.

C- Prévisions économiques
Puisque tous les secteurs de l'économie sont affectés par les fluctuations conjoncturelles, un
analyste doit avoir une idée précise de l'état de l'économie pour les un à deux ans à venir.
Certains secteurs sont particulièrement sensibles aux variations du revenu disponible des
ménages, ou même à un ralentissement mineur de la croissance (comme l'a montré la crise des
voyagistes en 1994 alors que le taux de croissance de l'économie faisait simplement une pause
à 3,4%). Quand on est confronté à des projets dont les rendements s'étalent sur plusieurs
années, toute prévision devient d'autant plus un défi que l'horizon de temps s'éloigne. Et pour
ceux qui négocient titres et actions, la prévision d'un retournement de tendance est encore plus
cruciale. Les fluctuations des marchés financiers précèdent celles de l'économie : pour éviter
des pertes de capital, un investisseur doit vendre toute action sensible aux fluctuations
conjoncturelles avant qu'un marché à la baisse entraîne tous les cours vers le bas, et acheter
avant qu'un marché à la hausse ne fasse monter les cours.

Comme nous l'avons évoqué dans l'introduction de ce chapitre, les prévisions économiques
sont nombreuses et variées. Un analyste n'est pas toujours tenu d'effectuer une prévision
entièrement nouvelle. Mais la seule compréhension des différences d'une prévision à l'autre
représente déjà un travail considérable, tout comme tenir compte de ces différences de
manière à comprendre les futures conditions économiques.

1) - Modèles économétriques

Plusieurs universités (par exemple Wharton, l'université du Michigan, ou l'institut de


Brookings) et plusieurs institutions financières (comme la Chase Manhattan Bank) ont
construit des modèles économétriques pour simuler ce qui se passera dans l'économie à partir
d'un ensemble d'hypothèses et d'estimations de variables clés. Le modèle peut se composer de
6, 20, 50 équations ou plus qui expliquent tout ou partie des principaux agrégats économiques
tels que la consommation, l'investissement, le produit intérieur brut, les bénéfices, les rentrées
fiscales, le revenu disponible, l'épargne, la masse monétaire, les importations, et ainsi de suite.
Pour chaque variable endogène, des hypothèses sont émises pour déterminer les variables
spécifiques qui les expliquent le mieux, et des régressions sont utilisées à partir de données du
passé pour estimer les coefficients des variables explicatives. Par exemple, on peut supposer
que la consommation Ct de l'année t s'explique par la consommation C t-1 de l'année précédente
et par le revenu disponible courant Y t. Une régression par la méthode des moindres carrés
ordinaires telle que nous l'avons expliquée dans la section E du chapitre 5 peut donner des
coefficients comme
C t = a + 0,75 C T-1 + 0,25 Y t

Les variables clés qui ne sont pas expliquées par le système des équations, c.-à-d. les variables
exogènes, et pour lesquelles des estimations sont utilisées, peuvent être, par exemple, le ratio
courant des réserve des banques, le taux d'escompte moyen actuel de la Banque Fédérale, le
volume des exportations, la population active, les dépenses du gouvernement pour l'année à
venir telles qu'elles sont prévues par le budget... Ces estimations des variables exogènes
reflètent les conditions les plus récentes . Dans certains modèles, on trouve parmi ces
variables exogènes, des variables d'attitude du consommateur. On se souviendra ici de la
section E du chapitre 14 . Il s'agit de variables compilées à partir de diverses analyses du
Conference Board et de l'université du Michigan. L'ensemble du système d'équations
simultanées est résolu sur une ou plusieurs périodes au delà de la période de référence pour
parvenir à des prévisions sur une ou plusieurs années futures.

Les modèles économétriques ont l'avantage de permettre, non pas une prévision unique, mais
un ensemble de prévisions en faisant varier les hypothèse ou les valeurs prises par les
variables exogènes. Chaque système doit cependant maintenir une logique interne et ne doit
pas se baser sur des hypothèses contradictoires. Des simulations répétées peuvent produire un
ensemble de valeurs à partir desquelles il est possible de trouver la valeur la plus probable.
Dans l'analyse finale, la qualité de l'approche dépend principalement de l'adéquation des
hypothèses avec la réalité à venir.

Ce qui suit est un exemple de système économétrique connu sous le nom de modèle révisé de
Klein-Goldberger tel que présenté par Michael Evans . Il est considéré comme un modèle
relativement petit avec seulement 20 équations et 34 variables. Pour une plus grande clarté,
les écarts type des équations estimées sont omis mais peuvent être retrouvé à la page 498 de
l'ouvrage de Michael Evans "Macroeconomic Activity".

Les équations estimées sont :

C d - 0,7 C d-1 = 0,230 (Y - 0.7y -1 - 0,105 C d-1 /SUB> - 4,51


C NS = 0,228 Y + 0,752 C ns-1 - 1,468
I h = 0,0517 Y - 0.04ì s-1 + 0.3í h-1 - 1,853
J'I = -.137(X-dI i) + 0.396i i-1 - 24,702
F i = 0.0284x - 10.14(p i - p) + 0.463f i-1 - 0,942
(X - (W g / p)) - 0.95(x-w g / p)) -1 = 0.364(i p + I h) +3.532((n W - N g + N s) -
0.95(n W - N g + N s)) + 1.335(h - 0.95h -1 -6,483
h = -0.450dw - 1.996(n L - N W - N s) + 1,157
((W - W g /p) = 0.413(x - (W g / p)) + 0.282((w-w g /p) -1 - dw
10,607 = -1.697(n L - N W - N s) + 1.116(d I de p) -1 +
0,184 L = 0.157i s + 0.835(i L) -1 +0,335
RE = 0.788(p ch - T c) -0.667(p ch - T c - AU SUJET) de -1 - 0,148
PB = 0.0107pX + 0.89(pb) -1 + 0,674
RI = 0,0623 p(I p + I h) - 0.0230di L + 0.938(ri) -1 + 0,394
I p - 0.9ï p-1 = 0.0656(x-w g) -1 - 2.11(i L) -1 - 0.590i p-1 + 9,329
D = 0.0492(p 0 (I p + I h) 0 +... + p 20 (I p + I h) 20 + 0.0856d u +1,411
I s = 1.14ï d - D u de 0.815rr -1 + 0,533 - 0,511
X = C d + C m + I p + I h + dI i + G + F e - F i
pY = pX - D - T i - RE - T c - T
P ch = pX - D - T i - W - RI - PB
W = whNW
Définitions des variables :
C d = consommation de biens durables, milliards de dollars de 1954
de C NS = consommation de biens non durables et de services, en milliards de dollars
de 1954
D = amortissement (dépréciation), en milliards de dollars de 1954
Du = variable binaire : 0 pour 1929- 1946 ; 1 pour 1947-1962
Fe = exportations, en milliards de dollars de 1954
Fi = importations, en milliards de dollars de 1954
G = achats de biens et de services par le gouvernement, en milliards de dollars de
1954
h = index des heures travaillées par semaine, 1954 = 100
I d = taux d'escompte moyen à toutes les banques fédérales de réserve, en pourcentage
I h = construction résidentielle, en milliards de dollars de 1954
j'I = stocks selon les inventaires, en milliards de dollars de 1954
i L = rendement moyen sur les obligations de société (Moody's), en pourcentage
I p = investissement dans des bâtiments et de l'équipement, en milliards de dollars de
1954
i s = rendement sur billets de trésorerie de quatre à six mois, en pourcentage
de N g = fonctionnaires, en millions
N L = population active, en millions
N s = professions indépendantes, en millions
p = déflateur du PNB, 1954 = 100
100 = revenus immobiliers, en milliards de dollars courants
Pch = bénéfices des entreprises comprenant les ajustements d'inventaire, en milliards
de dollars courants
pi = déflateur des prix aux importations, 1954 = 100
RE = revenus gelés comprenant les ajustements d'inventaire, en milliards de dollars
courants
RI = revenu d'intérêt net de location en milliards de dollars courants
rr = rapport en fin d'année des excès bancaires sur les réserves exigées
T = imposition sur les personnes + contributions pour la sécurité sociale - transfert de
paiement du gouvernement et des entreprises - intérêt sur la dette de l'état, milliards
de dollars courants
T c = impôts sur le bénéfice des entreprises, milliards de dollars courants
T i = mesure d'ajustement du produit national net avec le revenu national, en milliards
de dollars courants
W = salaires, honoraires et suppléments, milliards de dollars courants
W = salaire horaire annuel de tous les employés, milliers de dollars par an
W g = masse globale des salaires des fonctionnaires, milliards de dollars courants
X = PNB, milliards de dollars de 1954
Y = revenu disponible personnel, milliards de dollars de 1954

C- Prévisions économiques
Puisque tous les secteurs de l'économie sont affectés par les fluctuations conjoncturelles, un
analyste doit avoir une idée précise de l'état de l'économie pour les un à deux ans à venir.
Certains secteurs sont particulièrement sensibles aux variations du revenu disponible des
ménages, ou même à un ralentissement mineur de la croissance (comme l'a montré la crise des
voyagistes en 1994 alors que le taux de croissance de l'économie faisait simplement une pause
à 3,4%). Quand on est confronté à des projets dont les rendements s'étalent sur plusieurs
années, toute prévision devient d'autant plus un défi que l'horizon de temps s'éloigne. Et pour
ceux qui négocient titres et actions, la prévision d'un retournement de tendance est encore plus
cruciale. Les fluctuations des marchés financiers précèdent celles de l'économie : pour éviter
des pertes de capital, un investisseur doit vendre toute action sensible aux fluctuations
conjoncturelles avant qu'un marché à la baisse entraîne tous les cours vers le bas, et acheter
avant qu'un marché à la hausse ne fasse monter les cours.

Comme nous l'avons évoqué dans l'introduction de ce chapitre, les prévisions économiques
sont nombreuses et variées. Un analyste n'est pas toujours tenu d'effectuer une prévision
entièrement nouvelle. Mais la seule compréhension des différences d'une prévision à l'autre
représente déjà un travail considérable, tout comme tenir compte de ces différences de
manière à comprendre les futures conditions économiques.

2) - Prévisions entrée-sortie

Les tableaux d'entrée-sortie sont des matrices de coefficients qui montrent comment chaque
secteur de l'économie est relié aux autres. Ces tableaux incluent naturellement les secteurs
industriels, mais également un secteur pour le gouvernement et un secteur de la
consommation privée. Le ministère du commerce des Etats-Unis a publié des tableaux
comprenant jusqu'à 370 secteurs. La particularité de cette approche, c'est qu'elle permet
d'étudier comment certaines conditions connues dans un ou plusieurs secteurs affecteront
d'autres secteurs, voire l'ensemble de l'économie. Pensons aux conséquences d'une pénurie
inattendue d'une matière première donnée (par exemple le pétrole); il ne devrait pas être trop
difficile de déterminer son impact sur un secteur industriel en particulier comme le transport
de fret par voie terrestre. (voir l'exemple d'une analyse de l'impact sur l'industrie dans la
section E du chapitre 14 ). Mais un secteur, le transport de fret par voie terrestre, en affecte
beaucoup d'autres: la production, le commerce de gros, de détail, etc. Mesurer les effets de
l'onde de choc d'un secteur à l'autre devient terriblement complexe, sans parler de calculer les
conséquences sur l'ensemble du PIB ou du revenu disponible. Mais avec les tableaux entrée-
sortie, ça devient tout ce qu'il y a de plus simple. Il faut garder en mémoire que le calcul de
ces tableaux est une tâche gigantesque à laquelle seul le gouvernement ou de larges
conglomérats peuvent s'attaquer. Les tableaux d'entrée-sortie ont été l'outil principal de
planification dans les pays socialistes, mais ils ne sont que peu employés dans les pays
occidentaux.

3) - Analyse des séries chronologiques

En matière de prévision, l'extrapolation est la méthode la plus simple, la mieux connue et la


plus couramment utilisée. C'est ce que nous avons fait lorsque nous avons calculé une
estimation de la croissance économique à venir de 2,7% dans la section A-1 de ce chapitre.
Pour améliorer notre approche simpliste, un diagramme de dispersion ou une régression par la
méthode des moindres carrés avec la variable temps comme variable exogène peut facilement
donner la tendance (comme dans l'exemple de Timken de l'analyse des ventes dans la section
E du chapitre 9 ), tendance qui peut ensuite être projetée dans le futur. Pour des modèles plus
complexes, on peut utiliser des équations non linéaires, polynomiales, exponentielles, ou
logarithmiques pour s'adapter à la nature des données.

Cependant cette méthode ne se prête pas aux variables économiques qui ont un comportement
cyclique. Dans ce cas, la méthode (décrite dans de la section F du chapitre 5 ) requièrt
plusieurs étapes: d'abord toute saisonnalité est extraite de la série chronologique; ensuite on
détermine la tendance comme expliqué plus haut, et on en mesure les résidus; troisièmement
on exclut les points aberrants (c.-à-d. des valeurs exceptionnelles); enfin les résidus sont
analysés. Pour capturer les modèles cycliques, on utilise des équations autorégressives, des
analyses spectrales et des moyennes mobiles. Les méthodes de Box-Jenkins et d'ARIMA
(AutoRegressive Integrated Moving Average) sont typiques de cette approche. Elles exigent
des compétences mathématiques. Les prévisions ainsi obtenues reflètent bien mieux les
données fondamentales. Ces méthodes donnent des résultats très supérieurs à ceux obtenus
par extrapolation linéaire, et souvent même à ceux des modèles économétriques les plus
complets. Mais ce ne sont toujours que des extrapolations. Leur exactitude dépend avant tout
de la pertinence de l'hypothèse fondamentale à toute prévision : le contexte de la prévision ne
va pas subir de changements significatifs à l'avenir. En outre, ces méthodes n'incorporent pas
les changements récents des variables d'attitude et des politiques gouvernementales. Ceci
limite leur utilisation aux seules prévisions de court terme.

4) - Prévisions au jugé

Tandis que la plupart des économistes voudraient ramener leur science à l'équivalent de la
physique ou de la chimie (comme les trois premières approches de prévisions décrites en sont
la preuve), le sujet de leurs recherches - l'homme - a un comportement qui est loin d'être
mathématique. En fait, des variables importantes telles que l'attitude vis à vis du futur, la
préférence d'un design de produits sur d'autres, sont souvent à caractère qualitatif et
émotionnel, et ne peuvent pas être mesurés. Pour évaluer ce qui n'est pas quantifiable, la seule
possibilité est de demander l'opinion des personnes le plus directement impliquées dans le
processus étudié, c'est à dire des experts. Pour les ventes dans le commerce ce peut être des
commerciaux, des chefs de produit, des designers, des distributeurs, et en premier lieu des
clients. Concernant le revenu national, ce serait des économistes, des administrateurs
directement impliqués dans la collecte de données statistiques, des politiciens et des cadres
commerciaux, des leaders syndicaux et autres individus impliqués dans les décisions affectant
l'activité économique. Naturellement, les " experts " doivent être bien choisis. Un grand
nombre est toujours préférable, mais pose des problèmes de logistique pour solliciter et traiter
les réponses de chacun. Parfois, un seul expert est interrogé.

La technique introduite dans la section H du chapitre 5 consiste à déterminer la distribution


des probabilités des différentes valeurs possibles des variables qui font l'objet de la prévision.
Au moyen d'un questionnaire, on peut demander la valeur minimum, maximum, et celles les
plus probables. Ces valeurs sont ensuite agrégées en une moyenne, ce qui donne un plus grand
poids à la valeur centrale. Quand on dispose de questionnaires en grand nombre, on peut
calculer une moyenne de l'ensemble des réponses. Cette technique est connue sous le nom de
PERT, c.-à-d. Program Evaluation and Review Technique (évaluation et technique de révision
des progammes). Par exemple, quand un processus implique une séquence d'événements
(disons l'introduction d'un nouveau produit dans un magasin test, puis dans une région entière,
suivie d'une campagne publicitaire avec ventes promotionnelles, et finalement, l'introduction
du produit au niveau national), le questionnaire peut porter sur les résultats à chaque étape, de
manière à construire un arbre de probabilité, qui permet à son tour de calculer la moyenne de
la distribution.

Une autre technique consiste à informer les participants à l'étude des résultats partiels obtenus
par les autres participants. Cette méthode encourage la convergence des opinions vers un
consensus de la prévision. Pour palier les problèmes liés aux valeurs extrêmes, on utilisera de
préférence la médiane à la moyenne comme résultat de la prévision. Cette méthode est connue
sous le nom de processus Delphi.

Les prévisions au jugé ont l'avantage de refléter implicitement toutes les données les plus
récentes et les plus sensibles dans l'opinion des experts, et ainsi de permettre une multitude de
suppositions, ce que ni les modèles économétriques ni l'analyse de séries chronologiques ne
peuvent refléter de manière systématique. Cependant, les prévisions au jugé manquent de
l'apparente rigueur des hypothèses théoriquement démontrées et explicitement exposées.

5) - Indicateurs économiques

Reconnaissant qu'il est important de connaître les conditions économiques futures, le


gouvernement des Etats-Unis publie depuis 1938 une liste de mesures et d'indices, indicateurs
de la situation passée, présente et à venir. Ce sont les indicateurs avancés, coïncidents et
retardés mentionnés dans la section D-3 du chapitre 1 Les indicateurs avancés sont ceux qui
précèdent le cycle ; habituellement ils atteignent leurs maxima tout comme leurs minima
avant le reste de l'économie. Ils sont donc utilisés pour prévoir les revirements dans
l'économie (revirements souvent considérés comme essentiels). Les indicateurs coïncidents
nous informent de l'état présent de l'économie. Les indicateurs retardés sont ceux qui viennent
après un revirement; ils servent à confirmer la fin d'une phase du cycle économique. Le
Tableau T-15.2 montre les listes d'indicateurs de chaque groupe.

Tableau T-15.2
Listes des indicateurs avancés, coïncidents et retardés
Indicateurs avancés
Créations nettes d'entreprises
Indice des permis de construire
Indice boursier du cours des actions
Licenciements dans l'industrie en %
Variation en % d'un échantillon de prix représentatifs
Variation en % des liquidités
% des entreprises indiquant des livraisons plus lentes
Temps de travail hebdomadaire moyen dans l'industrie
Variations nettes des stocks
Nouvelles commandes d'usines et de biens d'équipements
Entrées des commandes dans les entreprises de biens de
consommation et d'équipement
Masse monétaire
Indicateurs coïncidents
Indice de la production industrielle
Salaires (hors agriculture)
Revenus des ménages hors transferts sociaux
Ventes dans l'industrie et le commerce
Indicateurs retardés
Indice du coût de la main-d'oeuvre
Ratio endettement-revenu des ménages
Taux de base des banques
Durée moyenne du chômage
Stocks dans l'industrie et le commerce
Emission de prêts à l'industrie et au commerce
Source: Bureau de l'analyse économique des Etats-Unis, Analyse des
conditions économiques présentes

Le tableau T-15.3 présente les indices (1992 base 100) des trois indicateurs sur la période
1970-1997, ensuite représentés dans les graphiques G-15.2, G-15.3 et G-15.4.

Tableau T-15.3
Indices des indicateurs sur la période 1970- 1997 (base 100=1992)
Indicateurs avancés Indicateurs coïncidents Indicateurs retardés
197
68 61 84
0
197
74 61 78
1
197
81 66 78
2
197
86 71 90
3
197
80 70 101
4
197
75 64 92
5
197
85 69 86
6
197
90 74 89
7
197
94 80 95
8
197
94 83 102
9
198
89 80 104
0
198
91 80 101
1
198
90 75 98
2
198
105 76 90
3
198
110 84 99
4
198
112 87 106
5
198
119 89 110
6
198
126 91 109
7
198
129 96 113
8
198
130 99 118
9
199
99 100 107
0
199
100 100 100
2
199
101 106 100
4
199
101 110 104
5
199
102 113 104
6
199
104 116 105
7

Le graphique G-15.2 représente l'évolution de l'indicateur avancé sur la période 1970-1997, et


montre dans l'ensemble que cet indicateur porte bien son nom, sauf au milieu des années 90
où il s'est révélé faible comparé à un contexte économique globalement sain.

Graphique 15,2

Le graphique G-15.3 présente les variations de l'indicateur coïncident sur la période 1970-
1997. Il confirme que l'indicateur mérite son nom puisqu'il suit très étroitement les
changements dans l'économie globale. .

Graphique G-15.3
Le graphique G-15.4 présente les variations de l'indicateur retardé sur la période 1970-1997.
La courbe de l'indicateur suit clairement les changements du PIB. Une exception apparaît en
1990, lorsque l'indicateur était à la hausse, tandis que l'économie se dégradait.

Graphique G-15.4

Les prévisions à partir des indicateurs économiques ne sont en fait qu'une variante des
prévisions au jugé. La majeure partie du travail est déjà faite pour nous : il semble facile de
déterminer si l'économie est ou juste avant ou juste après un tournant grâce aux indicateurs
avancés et retardés. Mais tous les indicateurs ne se comportent pas ainsi, et des signaux
contradictoires peuvent conduire à une interprétation erronée. Les prévisions à un an sont
fiables. Mais de là à conduire des prévisions à plus d'un an ou à prévoir l'amplitude d'un
changement, c'est presque impossible. Et pourtant, les modèles économétriques n'ont pas
grand succès quand il s'agit de prévoir les retournements de l'économie, et les tableaux
d'entrée-sortie encore moins. C'est là où les indicateurs économiques se distinguent. Comme
nous l'avons indiqué plus tôt (par exemple dans la section D-2 de chapitre 4 pour les titres) la
prévision correcte de retournements est très profitable aux traders. En ce sens ces indicateurs
sont d'une grande aide. Malheureusement (ou heureusement), tous les investisseurs ont accès
simultanément à l'information en même temps, et il est impossible pour quiconque de réaliser
de grands bénéfices sur le marché des actions sur la base des seuls indicateurs. Un analyste
doit donc se fier à ses propres qualités pour examiner et comprendre les données économiques
avant quiconque.

6) - Prévisions des taux d'intérêt

Les prévisions des taux d'intérêt sont étroitement liées aux prévisions des cycles conjoncturels
puisque les théories, comme l'histoire, montrent que les variations des taux d'intérêt ne sont
pas uniquement parallèles aux cycle économiques, mais bien une des causes principales des
changements dans le crédit, et donc, de la croissance et de la récession. Historiquement, il y a
eu des exemples de taux d'intérêt élevés lors de récessions, comme en 1980 et 1982. Mais la
cause majeure était l'inflation (liée à la crise pétrolière): on parlait alors de stagflation. Cela
montre que les prévisions des taux d'intérêt exigent une analyse de chacun des six composants
catalogués dans la section D du chapitre 2 (inflation, non-utilisation de l'argent ou de la
demande d'investissement, préférence pour la liquidité, composante temporelle, politique
monétaire, et prime de risque). Nous pouvons ignorer la prime de risque et la composante
temporelle, comme spécifiques aux capitaux privés, bien que certaines stratégies (par exemple
augmenter la courbe de rendement tel que décrit dans la section D-2 du chapitre 4 ) se
concentrent spécifiquement sur ces aspects.

Pour simplifier l'analyse, certains seraient tentés de négliger l'inflation puisque les décisions
financières se basent généralement sur les taux réels et non nominaux. Mais l'inflation a un
double effet : d'abord elle représente une perte de pouvoir d'achat de l'argent, mais c'est aussi
la cause d'une politique monétaire restrictive. Et une telle politique va à terme conduire à une
hausse des taux d'intérêt réels. Ainsi il est inévitable de s'intéresser à l'inflation. Initialement
définie comme une augmentation générale des prix, l'inflation est parfois liée à une demande
excessive (par exemple à cause d'une augmentation du revenu disponible), parfois à des
goulets d'étranglement dans la production ou les canaux de distribution des marchandises, et
souvent à un mécanisme de transfert des coûts de production (salaires, matières premières ou
énergie). Récemment l'inflation a été considérée comme un phénomène entièrement monétaire
lié à une création monétaire excessive. Puisque c'est bien la création monétaire que la
politique monétaire est censée contrôler, la présence d'inflation traduit une décision
discrétionnaire de la banque centrale. Prévoir la politique de la banque centrale est très
difficile du fait des ramifications politiques (voir la note N-15.1 . Parmi les pays occidentaux,
le volume des réserves des banques peut indiquer la nécessité d'agir pour la banque centrale,
mais les prévisions sont difficiles (bien que ce soit devenu plus facile dans la deuxième moitié
du siècle passé où l'inflation était modérée).
Pour les pays où les banques centrales sont incapables de maîtriser l'inflation, les prévisions
sont aussi risquées que la roulette russe. Dans ces pays, la source principale d'inflation
élevée est lié au financement par le gouvernement de son déficit budgétaire. Bien que
d'autres raisons soient parfois présentées, telles que des importations excessives et d'autres
problèmes de devises, la cause principale est le déficit budgétaire dû aux dépenses du
gouvernement. Dans ces cas-là, l'extrapolation de la tendance à co

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