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Entrent la grande prêtresse de Diane et ses prêtresses. Elles sont suivies par un groupe de
jeunes filles qui portent sur leurs têtes des paniers remplis de roses Des prisonniers grecs
escortés par quelques Amazones en armes.
LA GRANDE PRÊTRESSE.
Eh bien, jeunes vierges en fleurs, bien-aimées,
Montrez-moi le fruit de votre promenade.
Ici, où jaillit solitaire la source écumante,
A l'ombre de ce pin nous sommes en sûreté :
Ici, déversez votre cueillette.
UNE TROISIÈME.
Et moi celle-ci !
UNE QUATRIÈME.
Et moi tout ce printemps abondant !
LA GRANDE PRÊTRESSE.
Cela fleurit comme à la cime de l'Hymette !
Quel jour béni, ô Diane !
Ton peuple n'a jamais connu pareille profusion.
Les mères et les filles me comblent de présents ;
Eblouie par ce double éclat,
Je ne sais qui je dois remercier le plus. -
Mais est-ce là tout votre butin, mes enfants ?
LA GRANDE PRÊTRESSE.
Alors vos mères se sont montrées plus acharnées.
LA GRANDE PRÊTRESSE.
Allons, quand Penthésilée le fera tomber,
Tu lui donneras la rose royale.
Prends soin d'elle jusqu'à ce qu'elle revienne.
LA GRANDE PRÊTRESSE.
En es-tu sure ? – certes, si tu le crois,
-As-tu déjà regardé les roses dans cette idée ?
-Au printemps prochain, quand elles refleuriront,
Tu pourras te chercher le jeune homme dans la mêlée.
- En attendant, les cœurs joyeux des mères s'impatientent :
Tressez vite les couronnes de roses !
LA TROISTEME (à la quatrième).
Viens, Charmion!
LA TROISIÈME.
Et nous, ma soeur - celle de Parthénion : c'est Athénaïs
Et son bouclier frappé de la méduse qu'elle va s'attacher.
LA PREMIÈRE AMAZONE.
Ils disent qu'ils n'ont besoin de rien, vénérable.
LA SECONDE.
Ils sont mécontents de nous.
LA TROISIÈME.
Quand on s'approche d'eux
Ces brutes obtuses se détournent avec dédain.
LA GRANDE PRÊTRESSE.
Eh, s'ils sont mécontents, par notre déesse,
Contentez-les ! Mais aussi pourquoi les avoir
Frappés si violemment dans le combat ?
Dites-leur ce qui les attend pour les consoler
Ils ne seront pas inflexibles.
LA TROISIÈME.
Tu ne refuseras pas le jus d'une orange
Que je t'apporterai d'une main aimante ?
UN GREC.
En rien !
LA PREMIÈRE AMAZONE.
Etranges étrangers ! Qu'est-ce qui vous attriste ?
Qu'y a-t-il dans notre aspect qui vous épouvante,
Alors que nos flèches reposent dans nos carquois ?
Est-ce la peau de lion qui vous effraie ? -
Toi, l'homme à la ceinture, parle ! Que crains-tu?
LA PREMIÈRE AMAZONE.
Pour qui ? Pour vous ! Pour qui d'autre ?
LE GREC.
Pour nous ! Et vous l'avouez,
Inhumaines ! Voulez-vous nous conduire ornés de fleurs
Comme des bêtes qu'on immole à l'étal du boucher ?
LA PREMIÈRE AMAZONE.
Au temple d'Artémis ! Qu'allez-vous imaginer ?
Dans le sombre petit bois où vous attendent
Des délices sans mesure et sans borne !
SCENE 7
LA DIGNITAIRE.
C'est ici, vénérable, que je te trouve !
-Alors qu'à portée d'un jet de pierre
L'armée se prépare au sanglant combat !
LA GRANDE PRÊTRESSE.
L'armée ! Impossible ! Où ?
LA DIGNITAIRE.
Dans le lit
Que le Scamandre a creusé. Si tu veux bien
Ecouter le vent qui souffle des montagnes,
Tu entendras l'appel fulminant de la reine,
Le cliquetis des armes, le hennissement des chevaux,
Trompettes, tubas, cymbales et trombones,
L'énorme voix d'airain de la guerre.
UNE PRÊTRESSE.
Qui va vite me gravir cette colline ?
LA GRANDE PRÊTRESSE.
La reine ! - Non, parle ! Je ne peux pas le croire -
- Pourquoi, si la bataille fait rage encore,
A-t-elle ordonné la fête des roses ?
LA DIGNITAIRE.
La fête des roses - A qui en a-t-elle donné l'ordre ?
LA GRANDE PRÊTRESSE.
A moi ! A moi !
LA DIGNITAIRE.
Où ? Quand ?
LA GRANDE PRÊTRESSE.
Il y a quelques minutes à peine
Je me tenais à l'ombre de cet obélisque
Quand passèrent en coup de vent
Le Péléide et la reine sur ses talons.
Où vas-tu ? demandai-je à cette empressée.
A la fête des roses, cria-t-elle, tu le vois bien !
Et elle passe en flèche et d'une voix joyeuse :
Que pas une fleur ne manque, sainte prêtresse !
LA SECONDE PRÊTRESSE.
Elle aura voulu couvrir le retour de l'armée.
LA PREMIÈRE.
C'est aussi mon avis.
LA DIGNITAIRE.
Elle s'apprête au combat,
Je vous dis, elle est face au Péléide,
La reine, plus fougueuse que le persan
Qui la porte et se cabre dans les airs,
Jette des regards plus brûlants que jamais,
Respirant à grands traits, libre et joyeuse,
Comme si son jeune sein guerrier respirait
Pour la première fois l'air des batailles.
LA GRANDE PRÊTRESSE.
Par les dieux de l'Olympe que cherche-t-elle encore ?
Que peut-elle, alors que par milliers
Les captifs grouillent dans les forêts,
Vouloir de plus encore ?
LA DIGNITAIRE.
Ce qu'elle peut vouloir de plus ?
LES JEUNES FILLES (sur la colline).
Dieux !
LA PREMIÈRE PRÉTRESSE.
Eh bien ? Qu'y a-t-il ? L'ombre s'est enfuie ?
LA SECONDE PRÊTRESSE.
Parlez!
LA DIGNITAIRE.
Ce qu'elle peut vouloir de plus ?
LA GRANDE PRÊTRESSE.
Tombe sur qui ?
LA GRANDE PRÊTRESSE.
Qu'importe le Péléide à notre peuple ?
- Sied-il à une fille d'Arès, une reine,
De s'attacher à un nom dans le combat ?
(A une Amazone.)
Cours, Arsinoé, rejoins-la vite
Et dis-lui, au nom de Diane ma déesse,
Que Mars s'est soumis à ses fiancées :
Je lui ordonne, au risque de provoquer sa colère,
De conduire maintenant le dieu couronné à Thémiscyre
Et de célébrer sans tarder dans son temple
La fête sacrée des roses !
(L'Amazone sort.)
A-t-on jamais entendu pareille folie !
LA PREMIÈRE PRÊTRESSE.
Enfants ! Voyez-vous enfin la reine ?
LA PREMIÈRE PRÉTRESSE.
Où se montre-t-elle ?
LA JEUNE FILLE.
A la tête de nos vierges !
Regardez-la, étincelante dans son armure dorée,
Le désir de combattre la fait danser à sa rencontre !
Comme si, aiguillonnée par une jalousie brûlante,
Elle voulait dans son essor devancer le soleil
Qui baise ce jeune front ! O regardez !
Si elle voulait s'élancer vers le ciel
Pour s'égaler à ce soleil rival,
Son cheval, si docile à son désir, ne pourrait
S'élancer dans les airs d'un plus bel envol !
LA DIGNITAIRE.
Toutes les princesses se sont jetées
En travers de son chemin : ici même en ce lieu,
Prothoé a tenté l'impossible.
Toutes les ressources de l'éloquence
Pour la ramener à Thémiscyre furent épuisées.
Elle était comme sourde à la voix de la raison :
La plus venimeuse des flèches d'Amour,
Dit-on, a frappé son cœur juvénile.
LA GRANDE PRÊTRESSE.
Que dis-tu ?
LA DIGNITAIRE.
C'est ce que dit du moins la voix du peuple
Et Méroé me l'a confié à l'instant.
LA GRANDE PRÊTRESSE.
C'est effroyable !
L'Amazone revient.
LA PREMIÈRE PRÊTRESSE.
Eh bien ? Quelle nouvelle ? Parle !
LA GRANDE PRÊTRESSE.
As-tu transmis mon ordre ? As-tu parlé à la reine ?
L'AMAZONE.
Il était trop tard, très sainte, pardonne.
La foule des femmes qui l'environnait
Me la cachait et je n'ai pu l'atteindre.
Mais j'ai pu, un instant, rencontrer
Prothoé et lui dire ta volonté ;
Mais elle a répondu - un mot, je ne sais
Si dans la confusion j'ai bien entendu.
LA GRANDE PRÊTRESSE.
Eh bien, quel mot ?
L'AMAZONE.
Elle avait arrêté son cheval
Et regardait, les yeux en larmes, me semblait-il,
La reine. Et quand je lui ai dit combien
Tu étais scandalisée que cette insensée
Prolonge encore le combat pour une seule tête,
Elle m'a répondu : retourne à ta prêtresse
Et dis-lui de se mettre à genoux et prier
Pour que cette seule tête tombe dans le combat ;
sans quoi, il n'y aurait pas de salut pour elle et nous.
LA GRANDE PRÊTRESSE.
O elle descend le chemin vertigineux de l'Orcus!
Et ce n'est pas l'adversaire, si même elle le rencontre,
Mais l'ennemi en son sein qui la fera sombrer.
Elle nous entraîne toutes vers l'abîme ;
La quille qui nous porte en Hellade enchaînées,
Parées de rubans dérisoires,
Déjà je la vois fendre l'Hellespont.
LA PREMIÈRE PRÊTRESSE.
Vous voyez ? Déjà s'avance la funeste nouvelle.