Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Get HOW FAITH COMES WORKBOOK: DISCIPLESHIP SERIES 1st Edition Michael Yeager PDF Full Chapter
Get HOW FAITH COMES WORKBOOK: DISCIPLESHIP SERIES 1st Edition Michael Yeager PDF Full Chapter
https://ebookmeta.com/product/faith-based-outcome-
independent-1st-edition-dr-michael-h-yeager/
https://ebookmeta.com/product/guidelines-family-ministries-
support-families-for-faith-and-service-1st-edition-board-of-
discipleship/
https://ebookmeta.com/product/unfuck-your-boundaries-workbook-
faith-g-harper/
https://ebookmeta.com/product/primary-mathematics-3a-hoerst/
Emotionally Healthy Relationships Workbook Discipleship
that Deeply Changes Your Relationship with Others Peter
Scazzero Geri Scazzero
https://ebookmeta.com/product/emotionally-healthy-relationships-
workbook-discipleship-that-deeply-changes-your-relationship-with-
others-peter-scazzero-geri-scazzero/
https://ebookmeta.com/product/when-faith-turns-ugly-
understanding-toxic-faith-and-how-to-avoid-it-1st-edition-brian-
harris/
https://ebookmeta.com/product/derivatives-workbook-cfa-institute-
investment-series-1st-edition-pirie/
https://ebookmeta.com/product/the-mixed-methods-research-
workbook-1st-edition-michael-d-fetters/
https://ebookmeta.com/product/bad-faith-mason-ashford-thriller-
series-book-1-1st-edition-nick-stevens/
Another random document with
no related content on Scribd:
offre successivement, afin de nous adoucir, des poignées de
fromage en poudre, du zamba, de la viande séchée. Nous refusons,
et il reste là, marmottant des prières. Son émotion lui donne une
étonnante activité de cuisinier, car il ne cesse de puiser dans les
sacs, d’enfoncer de la glace dans les petits pots placés devant le
feu, de mélanger la farine et le beurre dans l’eau chaude, et il nous
paraît qu’il gâte les sauces. Il mange avec ses doigts de petites
boulettes, il boit à petites gorgées cette mixture de beurre rance et
d’eau chaude.
Cela continue longtemps, sans qu’il cesse de murmurer des
« Om mané padmé houm » et de nous considérer d’un petit œil où le
moins observateur lirait une vive inquiétude.
Nous nous amusons un instant de son embarras, puis nous
engageons conversation quand tout notre monde est là. On lui
explique que si nous voulons des chevaux, c’est parce que plusieurs
de nos gens ne peuvent plus marcher et que nous ne voulons rien
prendre sans le payer généreusement. Nous l’appelons appa,
popeunn, c’est-à-dire père, frère, et il approuve en levant les pouces.
Nos chiens, qui courent sur lui avec des intentions malveillantes
lui causent un véritable effroi, et il nous supplie de les éloigner. Nous
le rassurons en lui expliquant qu’ils ne mordent pas ceux que nous
appelons « frères ». Puis nous l’apprivoisons avec du sucre, et
lorsqu’il le goûte, il ne cache pas sa joie ; puis c’est du raisin, des
abricots : il exulte, et il nous qualifie de « frères » à son tour.
Puis nous montrons des iambas et nous marchandons son
cheval. Et, pour prouver que nos intentions sont bonnes, nous
rendons la liberté à son compagnon, en lui permettant d’emporter sa
pelisse. Celui-ci est à peine à cent pas qu’il se sauve vers la
montagne, abandonnant son chef sans la moindre vergogne. Peut-
être que la consigne est de fuir.
Sur ces entrefaites arrive un cavalier ayant un fanion rouge au
canon de son fusil. Il se dit propriétaire de moutons fusillés par
Rachmed, et immédiatement nous lui offrons le thé, mais il le boit
dans sa propre tasse, qu’il tenait enfouie sous sa pelisse. Ainsi le
veulent la coutume et le rite religieux : un Tibétain ne doit pas
apposer ses lèvres à la même place que des lèvres impures. Vous
comprenez que les lèvres impures sont les lèvres des autres.
Pendant ces réflexions on a tiré du sac un lingot d’argent, on le
montre au Tibétain propriétaire, qui demande à l’éprouver. Il le frotte
sur une pierre, le regarde, y remarque un cachet, et nous lui disons
que c’est le cachet de Péking. « Pétsin ! Pétsin ! » Il est rassuré.
Néanmoins, lorsqu’on lui a pesé le prix de ses agneaux, il
examine encore l’argent ; puis, satisfait, il l’enferme dans un petit sac
pendu à son cou. Nous lui faisons cadeau d’un petit miroir : il n’en
sait pas l’usage, et d’abord ne voit pas son image reflétée. Notre
prisonnier, soumis à la même épreuve, se reconnaît et éclate d’un
rire presque idiot. Il donne avec volubilité des explications à son
congénère, lequel se regarde à nouveau et rit beaucoup en voyant
son nez et son bonnet en face de lui. Comme la nuit approche, il
nous salue et part en riant.
Notre prisonnier est parfaitement apprivoisé, et il n’hésite pas à
nous demander l’autorisation de dormir à la place où il se trouve. Il
supplie qu’on le défende de nos chiens, et exprime le désir de
posséder un petit miroir. Nous lui promettons cela pour demain.
Dès ce soir, nous lui payons son cheval, que nous attachons près
de nos tentes, où nous transportons une panoplie de fusils à mèches
et de sabres appartenant aux fuyards.
Toute la nuit nos chiens aboient, et, dans le lointain, d’autres
chiens leurs répondent. A l’heure où commence cette demi-obscurité
qui précède les jours d’hiver, des hurlements de loups éclatent dans
le silence. Ils sont, de l’autre côté du lac, toute une bande, à nous
donner le plus lugubre des concerts. Je sors de la tente à ce
moment et je trouve Rachmed déjà debout.
« Rien de nouveau ? dis-je.
— Rien ; tout va comme hier, hommes et bêtes. »
A peine suis-je rentré dans la tente qu’il arrive, et, très triste, dit :
« Imatch vient de mourir. »
Hier encore, à l’arrivée au camp, je lui ai demandé s’il allait
mieux. « Mieux », avait-il répondu. Il avait bu du thé avec plaisir. Il
est vrai que son souffle était haletant, sa figure enflée. C’était pitié
de le voir étendre vers le feu ses doigts rouges et gonflés, qu’il
promenait sur la flamme sans les pouvoir réchauffer. Pourtant il
s’intéressait encore à ce qu’on faisait dans la tente ; je l’avais vu
poser des argols dans le foyer par habitude de vieux Kizaï, véritable
homme de steppe. Placé à l’entrée de la tente, à l’endroit qu’il
préférait, on l’avait soigneusement enroulé dans sa pelisse et ses
couvertures, et il s’était étendu pour dormir.
Lorsqu’on lui avait demandé s’il désirait quelque chose, il avait
dit : « Merci. » Nul ne croyait que sa mort fût proche. Nous
demandons à Rachmed des détails sur la dernière heure de ce
brave homme. « Quand les loups ont hurlé, Imatch a appelé :
« Parpa, aka (frère aîné), donne-moi de l’eau ; Parpa, aka, j’ai soif. »
Parpa a répondu : « L’eau est gelée, mais je vais allumer du feu, je
fondrai la glace et tu boiras. » — « C’est bien. » Puis, l’eau prête,
Imatch l’a bue sans aide, mais avec peine, et en se réjouissant
d’étancher la dernière soif. Ensuite il s’est étendu, et s’est mis à
gémir doucement. Soudain il s’est dressé, il est sorti de la tente sur
ses genoux afin de satisfaire un besoin et il est revenu à sa place.
Nous préparions le thé, on lui a offert la première tasse prête ; il a pu
la tenir. Il a essayé de boire, mais il a dû rejeter la gorgée qu’il avait
dans la bouche. Il a rendu la tasse, et se couchant il nous a
appelés : « Hé ! Timour, Iça, Abdoullah, Parpa, Rachmed. » Nous
l’avons entouré. S’étant soulevé péniblement sur son coude, il a dit,
séparant les paroles par des soupirs : « Je n’arriverai pas. Allah ne
veut pas me porter plus loin. Adieu. Je suis content de vous tous,
vous m’avez bien soigné. Adieu. Je suis mort. » Il est retombé sur le
dos, et d’un seul coup l’âme est sortie de son corps. »
Tel est le récit que nous écoutons à la lueur de notre lanterne, car
le jour n’est pas levé.
« Dès qu’il fera clair, dis-je à Rachmed, nous l’enterrerons.
Cherche un creux dans les fondrières. Il y en a d’assez grand pour y
coucher un homme. »
Imatch nous avait suivis depuis Djarkent, depuis la frontière de
Sibérie. Tous nous l’aimions, car s’il était rude en paroles, il était
bon, courageux, travailleur. Il soignait fort bien ses chameaux, qu’il
avait autrefois possédés en partie. Étant tombé dans les griffes d’un
usurier, il avait dû lui vendre ses bêtes avec lesquelles il transportait
des marchandises, et de propriétaire qu’il était, il était devenu le
serviteur de son créancier. Celui-ci nous avait vendu les chameaux
deux fois au moins le prix qu’il les avait achetés et Imatch avait suivi
la fortune de ses bêtes. Les gages que nous lui payions étant très
élevés, il comptait faire des économies, pouvoir acheter des
chameaux à son retour, et redevenir libre, « redevenir Imatch comme
devant », ainsi qu’il disait lui-même. Mais Allah en a décidé
autrement. Le pauvre Kirghiz ne reverra plus sa steppe.
On l’étend au fond d’un trou, enveloppé du feutre qui lui servait
de lit. On lui tourne la face vers le sud-est ; il nous regardera partir et
verra la ville sainte par-dessus les océans qui embrassent le
Nouveau Monde. Les uns apportent des pierres dans le pan de leur
pelisse, les autres de la terre dans des sacs, afin de recouvrir le
mort. Puis les prières sont récitées avec des sanglots.
On fait les préparatifs de départ pour le Namtso, qui serait de
l’autre côté d’un chaînon s’allongeant en travers de notre chemin, au
dire de notre prisonnier.
Nous lui rendons la liberté, et nous lui remettons des cadeaux
ainsi que les armes prises la veille. A peine sommes-nous partis que
les fuyards d’hier apparaissent. Ils nous guettaient du haut de la
montagne, nous les voyons trotter vers leur chef.
La certitude que le Tengri Nor, que le Namtso, comme disent les
Tibétains, est là, nous donne un regain de vigueur. Nous regrettons
que nos chevaux soient incapables de nous suivre ; nous les tirons
par la bride ; ils se traînent derrière nous, car ils ne peuvent plus
nous servir qu’à porter notre selle, nos sacoches et notre manteau.
A mesure qu’on avance vers le sud, le lac semble s’élargir et
grandir aussi dans la direction du sud-ouest, et, comme la brume
nous empêche de voir sa fin, il prend l’immensité d’une mer sans
rivage. Mais la brume évanouie, on voit bien que ce n’est qu’une
petite mer, qu’un grand lac emprisonné dans les montagnes.
Le soleil du soir frappant la glace en fait jaillir des pierreries
superbes, des diamants énormes, des parures pour géants, et, entre
toutes ces merveilles d’une joaillerie féerique, éclate, isolé, un
brillant ayant les dimensions d’une colline. Nous nous souvenons
alors que nous avons devant nous le « Lac du Ciel », et cette
fantasmagorie ne nous surprend plus, un tel lac pouvant offrir tous
les spectacles. Le soleil descend, il se pose sur le sommet des
collines, et le diamant extraordinaire ne jette plus de feux : il devient
un bloc de glace, et l’écrin magique étalé devant nous semble une
eau limpide qu’aucun vent ne ride. Puis tout est rose. Le soleil
plonge derrière la chaîne ; il verse un ruissellement d’or en fusion à
l’extrémité du lac, et le paysage se silhouette en offrant ce
contraste : à notre droite, c’est-à-dire au nord, d’où nous venons, ce
sont des lignes douces, et au sud, du côté de Lhaça, ce ne sont que
lignes brisées, que crêtes menaçantes, toute une traînée de pics
semés à dessein dans le but d’élever une insurmontable barrière.
Le temps de me demander si l’on a mis le Ningling Tanla à cette
place pour nous empêcher de passer, et la nuit tombe. Les loups
poussent des hurlements lamentables.
CHAPITRE IX
LES GENS DE LHAÇA
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
(SUITE.)