L’Herne

Cahier dirigé par Éliane Kaufholz

Karl Kraus
CONTRIBUTEURS : Martin Jahoda TEXTES DE
Werner Kraft KARL KRAUS :

Karl
Helmut Arntzen Ernst Krenek
Henri Barbusse Kurt Krolop Aphorismes
Otto Basil Paulus Lenz-Medoc Morale et criminalité
Walter Benjamin Adolf Loos La torture en Autriche
Jean-Jacques Brindejont- Georg Lukács Le monde des affiches
Offenbach Thomas Mann Le manteua de castor
Elias Canetti Heine et les conséquences

Kraus
Friedrich Pfäfflin
Nicole Casanova Marcel Ray Auguste Strindberg
Max Deutsch Les derniers jours de l’humanité
Friedrich Schalk
Ferdinand Ebner L’oiseau qui souille son propre nid
Paul Schick
Hermann Broch Révélation de Kerr
Charles Schweitzer
Albert Ehrenstein Michel Siegert
Ludwig von Ficker Manés Sperber
Sigmund Freud Ernst Stein
Dr Alfred H. Fried Gerald Stieg
Lucien Goldmann Eugène Susini
Willy Haas Richard Thieberger
Hans Heinz Hahnl Friedrich Torberg
Ludwig Harig Franz Wefel
Edwin Harlt Stefan Zweig
Paul Hatvani
Max Horkheimer

La tragédie tire son

origine du refus
Forschungsinstitut Brenner-Archiv, Karl Kraus – Sammlung Friedrich Pfäfflin

d’obtempérer.
L’Herne
L’Herne K. Kraus

33 € – www.lherne.com

www.lherne.com 33 € – www.lherne.com

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Karl Kraus

Ce Cahier a été dirigé par

Éliane Kaufholz
 Ce Cahier a bénéficié du soutien
de la Région Île de France

Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays.

© Éditions de L’Herne, 1975, 2024

55 rue Pierre Charron, 75008 Paris
lherne@lherne.com
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Sommaire
9 Citations

11 Éliane Kaufholz
Avant-propos

13 Repères biographiques

I – Textes de Karl Kraus

19 Aphorismes
26 Morale et criminalité
37 La torture en Autriche
39 Le monde des affiches
43 Le manteau de castor
47 Heine et les conséquences
57 August Strindberg
59 Les Derniers Jours de l’humanité
64 L’oiseau qui souille son propre nid
68 Révélation de Kerr

II – Études
73 Walter Benjamin
Karl Kraus
91 Lucien Goldmann
Un grand polémiste
95 Paul Hatvani
Karl Kraus et la satire totale
99 Manés Sperber
Grandeur et misère de la satire
103 Hans Heinz Hahnl
Karl Kraus et le théâtre
107 Michel Siegert
Karl Kraus et le sionisme
112 Elias Canetti
Karl Kraus école de la résistance
119 Ludwig Harig
Citations de Karl Kraus
II – Témoignages
123 Werner Kraft
Qui était Karl Kraus ?
126 Friedrich Schalk
Actualité de Karl Kraus
130 Eugène Susini
Karl Kraus et nous
132 Paul Schick
De la pensée à la création
139 Friedrich Torberg
Karl Kraus en son temps
141 Edwin Harlt
Polémiques contre Karl Kraus
144 Otto Basil
Parcours
147 Max Deutsch
Souvenirs d’un ami
149 Max Horkheimer, Georg Lukács, Ferdinand Ebner, Ernst Krenek
Florilège
151 Marcel Ray, Henri Barbusse, Willy Haas, Jean-Jacques Brindejont-Offenbach
Karl Kraus a 60 ans
154 Thomas Mann, Adolf Loos, Albert Ehrenstein, Hermann Broch,
Franz Wefel, Stefan Zweig
Sur Karl Kraus
158 Martin Jahoda
Karl Kraus et son imprimeur

II – Karl Kraus et ses contemporains

163 Ernst Stein
La Vienne de Die Fackel
166 Kurt Krolop
Karl Kraus et Bertolt Brecht
170 Paulus Lenz-Medoc
Karl Kraus et les philosophes du Brenner
176 Gerald Stieg
Karl Kraus et Georg Trakl
179 Helmut Arntzen
Karl Kraus et Hugo von Hofmannsthal
191 Richard Thieberger
Oskar Jellinek et Karl Kraus
196 Friedrich Pfäfflin
Karl Kraus et Arnold Schönberg
212 Nicole Casanova
Les lettres de Karl Kraus à Sidonie Nádehrny von Borutin
222 Sigmund Freud
Lettre à Karl Kraus
224 Dr Alfred H. Fried, Ludwig von Ficker, Charles Schweitzer
Autour des Derniers Jours de l’humanité

228 Contributeurs
Citations

Sa vie lui fut dictée par ses adversaires. Il s’accordait trop d’importance pour trouver le temps de l’être.
André Heller

Karl Kraus est descendu en enfer pour juger les vivants et les morts.
Oskar Kokoschka

Il distillait un poison très pur.

Rainer Maria Rilke

Karl Kraus, école de la résistance.

Elias Canetti

Il se tenait sur le seuil du jugement dernier.

Walter Benjamin

Lorsque le siècle porta la main sur soi, il fut cette main.

Bertolt Brecht

Karl Kraus, le briseur de chaînes ! Qui brise les chaînes de l’esprit et rit aux éclats.
Der Knockabout, juin 1914

Karl Kraus ou le dalaï lama, prêtre de l’ombre.

Robert Muller

Karl Kraus, l’outsider qui en était quand même.

Friedrich L. Brassoff

Ézéchiel, le nouveau venu.

F. Wittels

Nul n’échappa entièrement à son influence ; nul ne le pouvait, d’ailleurs, s’il avait lu un seul cahier de Die
Fackel.
J.W. Brügel

Il est des choses contre lesquelles on ne peut lutter parce qu’elles durent trop, qu’elles sont trop importantes, sans
commencement ni fin : Karl Kraus et la psychanalyse.
Robert Musil

… un étrange mélange de théorie réactionnaire et de pratique révolutionnaire.

Walter Benjamin

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Le visionnaire aveugle.
F. Raddatz

Il nous a appris à lire ; il est l’un des plus grands maîtres de la lecture qui aient jamais existé.
Karel Čapek

Karl Kraus, l’épigone, le tard venu.

Karl Kraus, le contempteur de la science.
Il se moque des faits et des opinions. Il intervertit la cause et l’effet, l’événement et sa publication. Mais toutes
ses prises de position expriment une position fondamentale […] la position entre les origines et le déclin.
Hans Mayer

Die Fackel fut écrite par un poète, par un journaliste, un pamphlétaire, un satirique, un possédé, un fou, un
prophète juif ; elle fut écrite par Jésus, mais pas par un politique.
Wolfgang Koeppen

Le singe de Zarathustra.
Alfred Kuh

Le salut par la critique du langage.

Erich Heller

Son seul but fut de fondre dans l’art toute stupidité malfaisante, insurmontable, impénétrable qui est une
offense constante à l’intelligence éthique et esthétique.
Erich Heller

Cet ennemi de l’Aufklärung, cet ami des despotes s’est acquis dans certaines de ces œuvres des mérites de réfor-
mateur de premier plan.
Hermann Kesten

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Avant-propos
Ce Cahier n’existerait pas sans la ténacité
– toute krausienne – de Caroline Kohn. Bien
avant le centenaire de Karl Kraus qui allait être
célébré en 1974, elle entreprit de battre le rappel
afin d’organiser un hommage à cet auteur très
mal connu en France. Kraus est pourtant l’une
des grandes figures de la Vienne du premier tiers
de ce siècle. La violence des polémiques et de la
satire tout au long de son œuvre lui a valu sans
doute autant d’admirateurs inconditionnels que
d’ennemis irréductibles. Les polémiques à son
sujet ne sont toujours pas éteintes : on a pu le
constater lors de la « semaine Karl Kraus » orga-
nisée à Vienne en avril 1974.
Pour de nombreux Viennois qui ont vécu
l’époque de la grande activité de Kraus ou pour
certains spécialistes, il est resté le monument
qu’il leur revient d’éclairer de la lumière de leurs
impressions d’alors. Sans hésiter, ils expriment un
point de vue irrévocable dès qu’ils sont sollicités.
Négatif, il a la dureté des verdicts sans retour ;
positif, il témoigne d’un respect et d’une fidélité
émouvants. On retrouvera certains de ces témoi-
gnages ici même. Mais l’image de Kraus n’est pas
du tout la même pour ceux que n’anime ni la
piété, ni la rancœur à l’égard de l’homme, qui
ne sont d’aucune chapelle et abordent l’œuvre
– qui est importante – dans une perspective
simplement critique. Ils n’échappent pas pour
autant aux controverses – ce n’est pas facile lors-
qu’il s’agit de Kraus –, ils admirent ou rejettent
bien des aspects du personnage inconfortable
que l’on rencontre à toutes les pages. Mais tous
reconnaissent que Kraus est bien le produit – et
le révélateur – de la civilisation austro-hongroise,
carrefour de l’Europe intellectuelle et artistique
d’alors. Il ne s’est jamais lassé pendant plus d’un
quart de siècle de fustiger les défauts et les erreurs
Éliane Kaufholz
d’une société et d’une « culture » qui se précipi-
taient vers ce qui, à ses yeux, ne pouvait être que
le déclin. La société, Kraus ne la trouverait guère
améliorée s’il revenait parmi nous, malgré les
progrès dont elle aime se vanter. La « culture »,
enrichie, bouleversée certes, mais souvent plus
que jamais à la remorque des idéologies. C’est
en cela qu’une lecture de certains textes de Kraus
dépasse pour nous le simple intérêt historique
et documentaire. Le recul du temps nuance
les jugements que l’on peut porter sur l’auteur
fanatiquement attaché à des principes, trop
moralisateur. Mais, comme hier, une voix qui
appelle à la vigilance, qui convainc de lâcheté
quiconque ferme ne serait-ce qu’un œil durant
un seul instant devant la moindre manifestation
de l’injustice, de l’arbitraire et de la corruption –
où que ce soit – mérite qu’on l’écoute et qu’on
reconnaisse sa force. Quant à ses conceptions sur
l’art, le théâtre en particulier, il n’est pas éton-
nant que dans une ville où tous les modes d’ex-
pression étaient en train de se modifier de fond
en comble il ait eu des idées que ne renierait pas
l’avant-garde actuelle.
Les témoignages et études que réunit ce
Cahier de L’Herne, souvent contradictoires,
parfois polémiques, sont à l’image même de
l’homme qui a trop méprisé la prudence pour
faire jamais l’unanimité sur lui. Ils sont d’hier et
d’aujourd’hui et ont moins pour but de faire de
ce Cahier une commémoration que de permettre
aux lecteurs français de voir comment a évolué la
réception de Kraus à travers une bonne trentaine
d’années. C’est une tentative d’introduction à
la lecture d’un auteur jusqu’ici peu accessible
en français et, à travers lui, à une société, à une
époque tout entière.
À l’exception d’aphorismes et de quelques
11
textes brefs, rien n’a encore été traduit de l’œuvre
importante que constitue Die Fackel. Le choix
des textes présentés ici vise surtout à montrer
l’infatigable lutteur aux prises avec certains scan-
dales de la vie sociale – ainsi le divorce-masca-
rade au début du siècle dans « Morale et crimi-
nalité » –, des scandales politiques – comme dans
« La torture en Autriche » –, ou des polémiques
littéraires – comme dans « Heine et les consé-
quences ». La frénésie de justice et la passion de
la langue entraînent souvent Kraus à être injuste,
ou même carrément méchant, ainsi à l’égard
de Heine. Il n’était pas question de dissimuler
ici ce trait d’un écrivain qui se voulait provoca-
teur, qui, souvent avec maladresse, mettait trop
de lui-même dans tout ce qu’il entreprenait et
avait la naïveté de croire qu’éthique et politique
doivent forcément se rejoindre. Walter Benjamin
a décelé dans ses écrits, que la critique contem-
poraine entreprend à peine de situer à leur vraie
place, un « étrange mélange de théorie réaction-
naire et de praxis révolutionnaire ». Il reconnaît
aussi que Kraus resta jour et nuit, « avec un
rare dévouement à son poste pour défendre des
causes pourtant perdues ». C’est pour cela qu’il
ne cesse de fasciner.

Il va sans dire que je dois des remerciements à tous ceux qui ont si généreusement apporté leur concours
à la réalisation de ce Cahier. Et je remercie tout particulièrement Gerald Stieg pour ses précieux conseils et son
aide infatigable et perspicace.

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