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Cours de SOCIOLOGIE DU TRAVAIL ET DE L'EMPLOI

Partie II – Lionel Thelen

Séance 10 (17/05/2005)
A la suite des deux derniers cours consacrés aux stratégies GRH et à leurs travers possibles, nous allons clore avec
l'exposition de l'application effective (ou non) de toutes ces stratégies au sein des entreprises reprises dans les MSE de
Sainsaulieu et alliés.

Petit récapitulatif de la mainmise sur les stratégies d’entreprise


Nous allons maintenant aborder le travail comme élément majeur de socialisation et de constitution identitaire. Pour ce faire,
nous allons exposer les différents types d'identité au travail et leurs spécificités propres. En gardant à l'esprit ces différents
types d'identité, nous examinerons plus avant deux contributions concernant le bonheur au travail :

L’identité au travail : une expérience partagée

Le travail est un des principaux intégrateurs de socialisation au sein de nos sociétés. Ainsi que le rapporte Dubar,
l’expérience des rapports de travail entraîne une double transaction avec soi-même (l’identité pour soi) et avec les autres
(l’identité attribuée). Sainsaulieu rapporte, lui, 4 grands types d’identité au travail :

- l’identité hors-travail : celle-ci concerne des immigrés ou des jeunes qui occupent des postes non qualifiés. Ils
appréhendent le travail uniquement comme nécessité économique
- l’identité de classe : concerne les anciens qui ont conquis leurs acquis au travers de la lutte collective avec des
valeurs de camaraderie et de loyauté
- l’identité promotionnelle : tournée vers l’ascension sociale comme mobile d’implication au travail
- l’identité de métier : concerne des ressources d’expertise fondées sur un rapport dominant qui nourrit un rapport
structurant au travail sur un plan cognitif et affectif

Le bonheur au travail : quelle réalité pour quels travailleurs?

1. Hochschild The Time Bind. When Work Becomes Home and Home Becomes Work

Hochschild défend une approche renouvelée du travail en s'intéressant aux entreprises US s'auto-définissant comme family
friendly. Celles-ci, soucieuses de conserver leur personnel – souvent très qualifié – leur offre un tas d'avantages extra-
légaux comme une salle de gym, un service de shopping sur internet et livraison à la maison, une blanchisserie et des tas
d'autres aménagements qui font que, finalement, le collaborateur ne soit pas, d'une part, tenté d'aller voir ce que la
concurrence offre mais aussi, d'autre part, ce dernier soit poussé à travailler plus et plus longtemps pour la firme. Les
employés interrogés confirment la réussite de la stratégie entrepreneuriale puisque nombre d'entre eux se sentent mieux sur
leur lieu de travail que chez eux, et, surtout, chez elles car ce sont les femmes qui font état de la plus grande satisfaction.
Face – des activités domestiques nombreuses et qu'il faut gérer de plus en plus sur un mode managérial, le travail et sa
relative quiétude est ressenti comme un refuge. Il reste toutefois que ce genre de stratégie a un effet dommageable dans le
sens où il est évident que ce qui ne manque pas de pâtir de cette nouvelle donne, c'est la vie de famille proprement dite.
Hochschild montre comment ce mouvement tend lui-même à réduire le temps consacré à la famille. Pour satisfaire aux
exigences d’un plus grand investissement temporel de leurs employeurs, les employés « volent » ces heures à leurs enfants.
Ces derniers réagissent face à cette rareté du temps qui leur est consacré, et les parents doivent gérer ces émotions. Or
cette gestion prend du temps. Ainsi se dessine le cercle vicieux de la diminution du temps familial. Comme le dit Hochschild,
la solution doit venir du monde du travail et non des parents. Tant que les entreprises ne proposeront pas de mesures
valables, les travailleurs seront condamnés à se sentir coupables du manque de temps accordé à leur famille.

2. Baudelot & Gollac Travailler pour être heureux. Le bonheur et le travail en France

Pour faire bref, l'innovation majeure de cet ouvrage consiste à montrer, au fil des entretiens et statistiques à l'appui, que le
nouveau management entrepreneurial basé sur la mise en place des stratégies GRH ne convient pas d'égale manière à tous
les travailleurs et que si ce management semble convenir à merveille aux cadres et cadres supérieurs, s'il est accepté sans
grand enthousiasme par les employés et/ou cadres moyens; dits de maîtrise, par contre il est probant qu'il ne convient pas
du tout aux travailleurs de base.

Bibliographie séance 10

Baudelot, Christian et Gollac, Michel (sous la direction de) (2003), Travailler pour être heureux. Le bonheur et le travail en
France, Paris, Fayard.
Hochschild, Arlie Russell (2001 [1997]), The Time Bind. When Work Becomes Home and Home Becomes Work , New York;
Owl Company.
MSE; Sainsaulieu et alliés; op. cit.

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