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D Il n¶y a que tr s rarement de relation directe entre cette peur de l¶agression et la violence vécue
par soi-même ou ses proches » Quelle que soit sa validité, fonction des modalités de l¶enquête qui
y conduit, cette th se introduit au sentiment d¶insécurité comme fantasme, c¶est celui qu¶on
éprouve sans qu¶aucun danger objectif ne se profile nécessairement, mais qui est induit et
dramatisé par l¶éventuelle insécurité objective, tout en le précédant et le débordant
Ce sentiment émane de sources profondes, voire archaïques, c¶est le cas du sujet qui, tôt dans son
histoire personnelle, singuli rement dans son enfance, a connu des expériences traumatisantes :
guerre, disparition des parents, violences dues à ceux-ci ; accidents, maladies, drames, etc En
outre, il est développé actuellement de mani re paradoxale par l¶insistance, si justifiée puisse-t-
elle sembler, aupr s des enfants et des adultes Alors, le sentiment d¶insécurité s¶installe de
mani re chronique et devient une sorte de hantise, une préoccupation permanente, qui déborde
infiniment ce qui pourrait le susciter A la limite, s¶il prend une dimension pathologique, il
caractérise la « névrose d¶angoisse », telle que Juliette Boutonnier l¶a analysée En outre, il
acquiert une dimension collective et peut s¶emparer de toute une population Il est amplifié
aujourd¶hui, intensément, par la violence objective et l¶exploitation médiatique dont celle-ci est
l¶objet
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Il n¶est plus seulement fonction des avatars de la vie personnelle, mais il tient à une raison
beaucoup plus profonde et inéluctable : l¶insécurité est en effet le propre de l¶Homme, en tant
qu¶il n¶est pas le maître souverain de sa destinée et qu¶il ignore son avenir Il est donc une
expression de sa précarité, de sa mortalité Il exprime la condition humaine en tant que telle et
a, à cet égard, un statut véritablement anthropologique Il s¶agit ici de l¶inquiétude
métaphysique Et, si celle-ci se combine à celle qu¶a entraînée l¶histoire personnelle, on se
trouve face à une angoisse qui revêt un caract re pathologique
D Ces registres sont particuli rement illustrés par la façon dont l¶être humain vit l¶expérience
de la nuit, qui est en effet l¶objet de ressentis distincts et parall les à ceux que nous venons de
différencier
D L¶on peut éprouver d¶abord de la peur dans la nuit, par une estimation des risques auxquels
elle expose, en ce sens que celle-ci renforce les dangers objectifs ; ainsi, elle favorise la
dissimulation, notamment celle des cambrioleurs (« Minuit, l¶heure des crimes ») C¶est
pourquoi on a l¶habitude, à l¶approche de la nuit, de fermer portes et volets, comme de se
méfier des agressions, en évitant de circuler seul ou de rentrer apr s qu¶elle soit tombée
D L¶inquiétude métaphysique, qui proc de de ce que la nuit est la symbolique confuse de
l¶incertitude et du caract re imprévisible de l¶avenir et, au total, de la mort Elle correspond
ici au statut anthropologique, à la destinée de l¶homme en ce qu¶elle a de mystérieux
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D Les travaux d¶ordre psychanalytique, les recherches de Bettelheim comme, d¶une autre mani re, la
théorie de l¶attachement de Bowlby ont mis en évidence le rôle déterminant des premiers mois de la
vie et des premi res expériences relationnelles Ce sont elles qui, selon la mani re dont elles
s¶organisent, auront suscité l¶adoption d¶une certaine attitude devant autrui, devant la vie, devant le
monde extérieur, perçu comme fonci rement insécurisant ou comme accueillant à l¶homme Ce sont
elles aussi qui auront provoqué et cultivé un sentiment écrasant de peur de soi et de sa propre
faiblesse, entrant en composition avec la peur d¶autrui et la crainte de la force menaçante de l¶adulte,
ou au contraire une saine évaluation de ses propres capacités et de sa propre force
D éanmoins, les expériences ultérieures, spécialement celles de la vie scolaire, pourront renforcer
cette expérience initiale : se sentir victime des agressions des camarades, par exemple le racket, ou
de la violence, physique ou symbolique, de l¶enseignant ou, tout simplement, se voir immergé dans
une conjoncture élitiste et sélectionniste, où l¶emporte la lutte pour la vie, cela va accroître le
sentiment d¶insécurité Maria Montessori a beaucoup insisté sur ce point, en montrant comment
l¶école, lorsqu¶elle est
et brutale, creuse un sentiment d¶insécurité, dont l¶enfant va se
défendre par l¶agressivité, comme pour prévenir et précéder le danger dont il se sent l¶objet
D Enfin, une expérience tr s précoce, tr s violente ou tr s frustrante de l¶insécurité peut donner lieu à
des troubles d¶ordre névrotique, qui requi rent une approche proprement psychothérapique On
rencontre ici le lien complexe entre psychothérapie et éducation Il faut donc se méfier d¶une vision
essentiellement rationaliste, qui estimerait que tout sentiment d¶insécurité peut être contrecarré par
l¶approche éducative Sans doute celle-ci n¶est-elle pas tout à fait vaine car elle peut aider l¶intéressé
à maîtriser sa peur Mais sa portée demeure parfois réduite C¶est donc là que l¶éducation formelle a
le rôle le plus limité