La Grande Époque

EpochTimes.com
ÉDITION 160
WWW.LAGRANDEEPOQUE.COM UN REGARD NOUVEAU SUR UN MONDE EN ÉVOLUTION 16 – 31 JUILLET 2009 • BIMENSUEL

► P. 14 Santé ► P. 9 Nouveau regard ► P. 10 Environnement

Visualisation Du comique Watson, pirate
pendant la au tragique au au grand coeur
grossesse cinéma

Le « grand emprunt » français Chine

Une histoire de
P. 16

est-il justifié ? non-violence

Philippines P. 2
Les députés
veillent au
grain

Les bureaux du ministère de l’Economie, des Finances et de l’Emploi à Paris 12e.
S
uite au lancement réussi le 17
juin dernier par l’entreprise EDF
d’un emprunt sur 5 ans à 4,5 %,
qui a permis de récolter une somme de
2,5 milliards d’euros, le président de la
République Nicolas Sarkozy a lancé le
22 juin, devant le Congrès de Versailles,
l’idée d’un « grand emprunt national »
en 2010.
Le chef de l’État a insisté sur la néces-
sité « d’inventer le nouveau visage de
notre modèle de croissance. Il s’agit de
réfléchir aux domaines d’excellence de
la France à 20 ans ». Le Premier minis-
Mexique P. 3
Élections
législatives :
Hanna Szmytko/La Grande Epoque
lourde défaite du
parti au pouvoir
tre François Fillon a ensuite précisé le
vers des investissements à long terme, ce que doivent être les priorités natio-
28 juin qu’il ne servira ni à financer les
a de quoi séduire. En effet, il permet de nales pour l’avenir. Cette concertation
dépenses courantes ni un deuxième mobiliser la population française vers doit avoir lieu jusqu’en octobre prochain,
plan de relance, mais qu’il pourrait finan-
un projet commun, et de lui redonner et les conclusions seront présentées mi-
cer des « secteurs stratégiques » commela motivation nécessaire pour envisager novembre au Gouvernement. Les prio-
l’avenir avec confiance, ce dont elle a
« les biotechnologies, l’énergie du futur, rités et modalités de l’emprunt seront
les voitures électriques », ainsi qu’« un
bien besoin en ce moment. alors soumises au vote du Parlement,
certain nombre de secteurs dans le Pour définir les caractéristiques de cet « soit par une loi de finances rectifica-
domaine alimentaire ou la santé, l’édu-emprunt, le chef de l’État souhaite un tive, soit par une loi de programmation,
cation en général, l’enseignement supé-débat national. Il a désigné Alain Juppé qui sera votée au début de l’année pro-
rieur et la recherche ». et Michel Rocard, anciens Premiers chaine ». L’emprunt sera lancé à l’issue
ministres, pour présider une commission de ce processus.
Concertation préalable composée de représentants des parte-
L’idée d’un emprunt national, orienté naires sociaux, et réfléchir ensemble à Lire la suite page 7

OUTRE-MER SOCIÉTÉ BIEN-ÊTRE ART DE VIVRE Nigeria P. 8

Le ka, identité culturelle de la
Guadeloupe.
Page 12
Page 2 ................ International
Page 3 ................ International
Page 4 ........................... Chine
Suicides, malaise dans les
prisons ?
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Page 5 .............................. Chine
Page 6 .............................. Chine
Page 7 ....................... Économie
Les bienfaits d’une bonne
posture.
Page 14
Page 8 ................... Droits humains
Page 9 .................. Nouveau regard
Page 10 .................. Environnement
Des villes plus proches de la Shell sous
nature.
les feux de la
Page 15 critique
Page 11 ................................. Petites annonces Page 14 ............. Santé et bien-être
Page 12 .............................................. Outre-mer Page 15 ....................... Art de vivre
Page 13 ................................................... Société Page 16 ......................... Reportage

Epoch Times Paris Genève Bruxelles Londres Berlin New York Dublin Lima Taipei Tokyo... 1 700 000 exemplaires
2 International
Les députés philippins veillent au grain
Importations de riz et réchauffement climatique
D
’anciens responsables du minis-
tère de l’Agriculture philippin et des
parlementaires dont les sénateurs
de l’opposition Loren Legarda et Fran-
cis Escudero accusent le gouvernement
d’avoir acheté à un prix déraisonnable 1,5
million de tonnes de riz au Vietnam.
Pour les deux sénateurs qui s’expri-
maient dans les colonnes de l’Inquirer, des
hauts-responsables du ministère de l’Agri-
culture et de l’autorité nationale de l’agroa-
limentaire auraient profité à titre personnel
de cette transaction déséquilibrée, qui
remonte au mois de décembre 2008.
Les Philippines auraient payé 550 dol-
lars la tonne de riz alors que les cours du
marché étaient alors aux alentours de 380
dollars - soit 45 % de trop, un chiffre que
le secrétaire à l’agriculture philippin Arthur
Yap refuse de confirmer, affirmant que
c’était « à ce moment là une bonne tran-
saction. »
Le 10 juillet, parlant sous couvert d’ano-
nymat, d’anciens responsables du minis-
tère de l’Agriculture philippin ont indiqué
aux journalistes du Manila Bulletin que les
accords inter-gouvernementaux se négo-
cient et se signent toujours sur une base
de bénéfice mutuel, allant jusqu’à utiliser
des bateaux des deux pays pour mener les
exportations de grain afin de ne pas favo-
riser l’une des deux marines marchandes
par rapport à l’autre. Pourtant, en décem-
bre 2008, seuls des navires vietnamiens
ont été utilisés, ce qui ajoute une anoma-
lie à celle déjà soulevée par l’agence Reu-
ters, qui a déclenché la tempête par une
de ses dépêches.
Vers une enquête
La sénateur Loren Legarda, qui préside
le comité sur l’agroalimentaire du Sénat
philippin, demande déjà une enquête, affir-
mant devant l’Inquirer : « ce n’est pas seu-
Remaniement cosmétique pour
Cristina Kirchner en Argentine
Mauvais démarrage à la tentative de séduction des
investisseurs internationaux
A
près sa défaite cinglante aux élec-
tions législatives du 28 juin, la pré-
sidente argentine Cristina Kirchner
a nettoyé la moitié de son cabinet minis-
tériel, sans pour autant convaincre l’op-
position et les analystes de la réalité du
changement opéré.
Parmi les entrants notables au gouver-
nement, le nouveau ministre de l’Écono-
mie, Amado Boudou. Celui-ci va devoir
s’atteler à réformer l’INDEC, outil de
mesure de l’inflation nationale dont la
rigueur est largement mise en doute.
La réouverture des négociations sur les
taxes agricoles, point majeur de discorde
avec l’opposition, est également prévu.
Le porte-parole de l’AFIP, l’administra-
tion des impôts, le confirme indirectement
à Bloomberg en disant que « même si les
taxes à l’export font partie de notre politi-
que de distribution des richesses, toutes
les questions de taxes dans le domaine
agricole feront partie du dialogue. »
Un point crucial si on se souvient qu’en
2008, les fermiers argentins ont provoqué
des pénuries alimentaires nationales par
plusieurs mois de grève musclée contre
ces taxes.
À San Miguel de Tucumán où elle par-
ticipait le 10 juillet à une cérémonie de
commémoration de l’indépendance de
l’Argentine, Cristina Kirchner a exprimé
le souhait de renouer le dialogue : « Nous
devons faire démarrer une nouvelle étape
pour notre pays, basée sur les princi-
pes d’économie, de démocratie et de
société » a-t-elle déclaré, reprise par le
Buenos Aires Herald. « Le dialogue doit
exister dans tous les domaines de l’éco-
nomie et pas seulement avec les entre-
preneurs. Il n’y a plus de place pour les
petites discussions isolées : le monde
traverse une crise profonde. Sa conva-
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Le riz, nouvel or blanc, protégé par des soldats philippins.
lement une question de surcoût, qui serait
un nouvel exemple de la gargantuesque
corruption du gouvernement. Il y a aussi
le besoin à long-terme pour les Philippines
de ne plus être dépendantes des importa-
tions alimentaires ».
Les importateurs philippins accusent,
eux, le gouvernement de devenir un com-
pétiteur au lieu de simplement assumer
DANIEL GARCIA/AFP/Getty Images
Le maquillage gouvernemental de
Cristina Kirchner ne fait pas effet.
lescence demandera un immense effort
d’échange d’idées de tous les secteurs.
Je soutiens donc une politique de dialo-
gue ouvert, et pas la simple écoute des
lobbyistes. »
Mais pour Michael Soltys, analyste au
Buenos Aires Herald, la modification du
gouvernement « ne change presque rien,
ou alors pour le pire. » La nomination
d’Amado Boudou est par exemple d’après
lui un signal dangereux, le nouveau minis-
tre de l’Economie ayant « complètement
ruiné la confiance économique » en met-
tant la main sur les fonds de pension pri-
vés en novembre 2008.
Une analyse largement partagée par la
banque d’investissement Barclays Capital
sa mission, qui est de garantir 30 jours
de stock de riz pour les situations d’ur-
gence. Parallèlement l’autorité nationale
de l’agroalimentaire n’aurait jamais res-
pecté sa mission d’acheter chaque année
10 % de la production nationale.
Pour les responsables du ministère de
l’Agriculture cependant, rien n’est à leur
reprocher. Ils s’appuient pour cela sur
pour qui la composition du nouveau gou-
vernement « confirme que les Kirchner
ont ignoré la demande de changement :
les nominations suggèrent objectivement
qu’ils continuent à sa baser sur leur cer-
cle intérieur et que Nestor Kirchner, bien
loin de s’éloigner des décisions économi-
ques et politiques, continuera à agir en
coulisses ».
Le nouveau Premier ministre, Ani-
bal Fernandez, ne rassure pas l’opinion,
d’autant que les portefeuilles les plus
stratégiques restent aux mains du clan
Kirchner – via Julio de Vido, ministre de
la Planification, et via Guillermo Moreno,
secrétaire au commerce, tous deux accu-
sés de la manipulation de l’INDEC.
Les cours des valeurs sud-américai-
nes ont plongé en bloc après l’annonce
du remaniement. L’Argentine, rejetée
des marchés créditaires mondiaux pour
ne pas avoir honoré plus de 100 mil-
liards de dollars de dettes 2002, tente
de rétablir la confiance. Mais les mesu-
res économiques du parti péroniste au
pouvoir ne convainquent pas. Il a perdu
le 28 juin sa majorité dans les deux par-
lements argentins, et fait face à des pres-
sions de plus en plus fortes de la part des
gouvernements provinciaux qui exigeant
une part plus importante des ressources
nationales.
AURÉLIEN GIRARD
16 – 31 JUILLET 2009 ● La Grande Époque
la sécurité alimentaire du pays. Parmi les
huit pays contactés pour répondre à l’ap-
pel d’offre philippin, seul le Vietnam avait
répondu.
« Le Secrétaire à l’Agriculture voulait
éviter une pénurie, et il rejette farouche-
ment tout accusation de surprix », indiquait
à la sortie du palais présidentiel le secré-
taire de la présidence Eduardo Ermita, cité
par le Philippine Star. « Toute personne
impliquée dans les importations prend de
grandes précautions, conscient de l’atten-
tion du public et en particulier des médias.
Je crois aux explications du Secrétaire
Yap », ajoutait-il.
Les Philippines se sont déjà trouvé vic-
times d’émeutes liées aux pénuries de
riz en janvier 2008, période où les pays
exportateurs eux-mêmes avaient blo-
qué les ventes pour préserver leur pro-
pre approvisionnement. D’après l’Oxfam,
la production mondiale de riz doit baisser
de 10 % pour chaque degré d’augmenta-
JASON GUTIERREZ/AFP/Getty Images
tion de la température moyenne du globe.
Pour cette raison et du fait de la politique
agricole locale, cette production baisse-
rait aux Philippines de plus de 50 % d’ici
l’opinion écrite du ministère de la Jus- à 2020. Les importations de riz potentielle-
tice qui considère la transaction comme ment surpayé sont donc, pour l’opposition,
légale. une preuve de l’abandon des agriculteurs
Le 9 juillet, le président philippin a par le gouvernement philippin, qui s’était
accepté les explications données par le engagé l’année dernière à une réforme
secrétaire à l’agriculture Arthur Yap, qui agraire massive incluant prêts à taux pré-
a tenté de démontrer que la transaction férentiels et accès facilité aux fertilisants et
avait été réalisée aux cours du marché, et équipements de production.
dans les quantités nécessaires à assurer AURÉLIEN GIRARD
DON EMMERT/AFP/Getty Images
Le siège des Nations unies à New-York.
Rénovation du
siège de l’ONU : le
personnel déménage
D ans le cadre de la rénovation du siège de l’ONU à New York, un premier grand
groupe du personnel des Nations unies a déménagé le week-end dernier dans
des bureaux temporaires, hors du siège actuel de l’organisation.
En tout, deux cent cinquante membres du personnel seront localisés dans un
immeuble loué par les Nations unies et situé à l’adresse Albano Building 305 East
46th Street. Le bâtiment qu’ils intègrent accueillera au final, environ 700 personnes,
a précisé la porte parole au Secrétaire général, Michèle Montas, lors de son point de
presse quotidien fin de semaine dernière.
Tous les week-ends jusqu’à la fin du mois d’octobre, presque 400 personnes quit-
teront les bureaux qu’ils occupent actuellement pour s’installer dans des locaux
loués principalement dans la zone Est du quartier de Manhattan, dans les bâtiments
annexes comme « DC1 et DC2 », et dans des bureaux temporaires construits sur la
pelouse nord du siège, a indiqué Mme Montas.
Au total, plus de 6.000 employés seront touchés par cette délocalisation qui repré-
sente le plus grand exercice que l’Organisation ait jamais entrepris en ce domaine.
Le retour du personnel dans le nouveau siège rénové commencera durant la
seconde moitié de l’année 2012.
Centre de Nouvelles de l’ONU
La Grande Époque ● 16 – 31 JUILLET 2009
Élections législatives au Mexique : lourde défaite du parti
au pouvoir
L
e dépouillement de la totalité des
bulletins de vote confirme que l’his-
torique Parti Révolutionnaire Insti-
tutionnel (PRI) a remporté les élections
législatives du 5 juillet et que les Mexi-
cains ont passé facture au président
Felipe Calderon et à son Parti de l’Ac-
tion Nationale (PAN, conservateur) pour
la crise économique, la grippe A et l’insé-
curité générée par les gangs de la drogue.
Le principal parti de gauche du Mexique
subit aussi une lourde défaite.
Depuis qu’en 2000 le PAN repoussa
dans l’opposition le jusqu’alors invincible
PRI, au pouvoir pendant 71 années con-
sécutives, les PRIistes ne se sont jamais
senti aussi proches d’un retour à la prési-
dence du pays après l’élection des 500
députés fédéraux, de six gouverneurs
d’État et de 549 maires. La présidence
et le renouvellement du Sénat se joueront
en 2012 pour un mandat de six ans. La
Chambre des députés, elle, est renouve-
lée tous les trois ans.
Le PRI, dont le populisme s’étend du
centre gauche au centre droit, a remporté
aisément les législatives avec 36,68 % des
suffrages, contre 27,98 % au PAN gouver-
nemental et à peine 12,2 % au Parti de la
Révolution Démocratique (PRD, gauche),
autre grand vaincu du scrutin. Le PRI a en
outre triomphé dans cinq des six élections
de gouverneurs, dans les États de Cam-
peche, Colima, Querétaro, Nuevo Leon y
San Luis Potosi. Le 6e État en jeu, celui
Le Procureur de la Cour Pénale
Internationale en République
Démocratique du Congo
«
Je suis venu ici pour écouter la popu-
lation. Cette visite n’a d’autre objectif
que de me permettre de comprendre
les besoins des victimes et de voir com-
ment exercer au mieux le mandat de pour-
suivre les auteurs des crimes qui m’a été
confié afin d’aider les communautés tou-
chées à reconstruire leur vie », a déclaré
le Procureur de la Cour pénale internatio-
nale (CPI), Luis Moreno Ocampo, à son
arrivée mercredi 8 juillet dans la région
de l’Ituri, en République démocratique du
Congo (RDC).
Lors de cette visite de trois jours, le Pro-
cureur a rencontré des dirigeants et des
représentants de toutes les communautés
et plusieurs réunions-débats doivent être
organisées pour lui permettre d’engager un
dialogue avec des victimes, des représen-
tants de la société civiles et la population
locale, précise la CPI dans un communi-
qué.
« Nous poursuivons les personnes qui
de Sonora, revient au PAN.
La nouvelle Chambre compte plus de
240 députés du PRI, soit largement plus
du double de ses 106 élus en 2006. En
y ajoutant les élus de leurs alliés du Parti
Vert Ecologiste du Mexique (PVEM), les
PRIistes contrôleraient la majorité abso-
lue des 500 députés.
De troisième force à la Chambre, le PRI
en devient la première. À droite, le PAN
gouvernemental dégringole de 206 à 147
députés et, à gauche, le PRD tombe en
chute libre de 127 à 72 élus.
Dans le District fédéral de Mexico, fief
du PRD, ce dernier recule mais l’emporte
encore dans 12 des 16 arrondissements
(appelés « délégations ») et continue à
dominer l’Assemblée législative du dis-
trict.
« Les bons résultats du PRI ont sans
doute une explication multiple et, comme
d’habitude, la paternité du succès sera
disputée, en l’occurrence entre Beatriz
Paredes [présidente du PRI], le séna-
teur Manlio Fabio Beltrones et les gou-
verneurs. Néanmoins, celui qui pourrait le
mieux capitaliser le bond en avant et se
convertir en candidat à la présidence [de
la République] en 2012 est le gouverneur
de l’État de Mexico » estime le politologue
mexicain Mario Campos. [NDLR - L’État
de Mexico, à ne pas confondre avec le
District fédéral que forme la capitale du
Mexique, est gouverné par Enrique Peña
Nieto, jeune loup de 43 ans].
portent la responsabilité la plus lourde pour
les crimes commis en Ituri, mais notre mis-
sion consiste aussi à mettre fin à l’impunité
et empêcher ainsi que de nouveaux cri-
mes soient commis », a également affirmé
Moreno Ocampo, en soulignant les résul-
tats obtenus par la CPI dans le procès de
l’ancien chef de milice Thomas Lubanga
Dyilo, et le démarrage de ceux de Ger-
main Katanga et Mathieu Ngudjolo en sep-
tembre.
« Ces procès permettent de lever le voile
sur la souffrance des victimes et peuvent
aider toute une population frappée par la
guerre à panser ses plaies », a rappelé le
Procureur avant d’ajouter que « la justice
n’a pas vocation à assouvir une vengeance,
mais bien à permettre à tous les citoyens de
coexister ».
Le Procureur a ouvert la toute pre-
mière enquête de la CPI en RDC le 23 juin
2004. Elle portait sur les crimes graves qui
auraient été commis dans ce pays depuis le
Beatriz Paredes, présidente du PRI et grande gagnante du scrutin.
La perspective de la prési-
dentielle en 2012
Au PAN, les mauvais résultats ont fait
rouler la tête de son président, German
Martinez. Nommé voici à peine deux ans,
il vient de démissionner. Compte tenu à
la fois de ces résultats et de l’interdic-
tion constitutionnelle d’une réélection, la
seconde moitié du mandat présidentiel
qu’entame maintenant Felipe Calderon
1er juillet 2002 et s’est concentrée dans un
premier temps sur ceux perpétrés dans la d’années par le gouvernement norvégien et
région de l’Ituri.
Centre de Nouvelles de l’ONU tionale pour le renforcement des institutions
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enlineadirecta.info
ressemblera à un long adieu au pouvoir.
Tandis que les partis ouvrent les prépara-
tifs de la course à la présidence de 2012,
beaucoup donnent pour acquise la sortie
du PAN de la résidence présidentielle de
Los Pinos, vu l’inexistence d’une majorité
gouvernementale au Congrès (Parlement)
et la déception des Mexicains à la suite
d’une série d’échecs, d’épisodes de mal-
chance et de mauvais calculs.
Vers une gouvernance
palestinienne renforcée ?
D
e récentes mesures visant à dimi-
nuer les restrictions aux déplace-
ments dans les territoires palestiniens
indiqueraient-ils que le gouvernement israé-
lien avance vers la création d’un État palesti-
nien ? Les mesures prises pendant les deux
dernières années sont aujourd’hui renforcée
par un retrait massif des barrages routiers et
des checkpoints entre l’Ouest du Jourdain et
l’Est d’Israël, le West Bank.
La zone, habitée et gouvernée par les
palestiniens, et sous contrôle strict de l’ar-
mée israélienne.
Israël prend également des mesures pour
faciliter l’accès de son territoire aux hommes
d’affaires et VIPs palestiniens, indique le
ministère des Affaires étrangères israélien.
Dans un document officiel soumis au
Comité de Liaison Ad Hoc (AHLC) pendant
une réunion à Oslo les 6 et 7 juin, le gouver-
nement hébreu dit « soutenir les efforts de la
communauté internationale dans la promo-
tion du développement de la Palestine ».
L’AHLC a été établi il y a une quinzaine
participe à la coordination de l’aide interna-
de l’autorité palestinienne. Côté israélien,
les mesures récemment prises incluent
l’augmentation du nombre de palestiniens
employés dans des entreprises israéliennes
et la facilitation des échanges commerciaux
avec les territoires palestiniens.
Daniel Ayalon, vice-ministre des Affaires
étrangères d’Israël, indique que même si les
négociations pour un accord de paix sem-
blent dans l’impasse, Israël « va de l’avant »
dans les approches qui doivent devenir le
fondement d’une coexistence pacifique :
contacts politiques, construction d’infrastruc-
tures, progrès économique.
« Ce gouvernement croit que, malgré
Paris Genève Londres
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Selon les analystes, les possibilités des
PANistes de demeurer au pouvoir sont
réellement faibles et, sous peine d’un
châtiment plus dur encore que pourraient
infliger les électeurs en 2012, la nouvelle
législature devrait déboucher ces pro-
chains mois sur des accords produisant
les changements dont le pays a besoin
pour croître à un taux annuel supérieur à
5 % et créer des emplois.
Jesus Ortega, leader du PRD, l’autre
grand perdant des élections, déclare qu’il
expulsera ceux de son parti qui ont appelé
à voter pour d’autres formations. Ce mes-
sage vise sans le nommer Andres Manuel
Lopez Obrador, ancien candidat à la prési-
dence du Mexique qui n’avait pas accepté
en 2006 sa défaite face à Felipe Calde-
ron. Sans renoncer au PRD, Lopez Obra-
dor a soutenu avec un succès relatif deux
autres partis de gauche pour les élections
du 5 juillet, le Parti du Travail (3,56 % des
voix) et le Parti Convergence (2,36 %).
Des candidats de ces partis s’opposaient
au PRD.
Stoppant sa chute, la participation élec-
torale atteint aux législatives 44,68 %,
deux points de plus qu’en 2003. En
hausse, la proportion de bulletins nuls se
chiffre à 5,39 %, le double du taux moyen
des six dernières élections nationales.
Dans le District fédéral de Mexico, cette
proportion culmine à 10,8 %.
NORMA DOMÍNGUEZ
LatinReporters.com
tout le respect que l’on doit aux conféren-
ces, événements de presse, dialogues à
haut niveau, si les gens sur le terrain ne sen-
tent pas de changement dans leur vie, les
discours ne servent à rien. Pour avoir une
approche enracinée et partant de la base,
Israël a pris des mesures fortes pour stimu-
ler l’économie palestinienne. »
La richesse pour la paix, donc. En paral-
lèle, Israël et les États-Unis tentent de don-
ner à l’autorité palestinienne les moyens de
lutter plus efficacement contre le terrorisme.
L’économie ne fait pas tout.
GIDON BELMAKER
ET BEN KAMINSKY
LA GRANDE EPOQUE
JÉRUSALEM
New York Berlin
Montréal Genève...
4 International
Xinjiang : les médias internationaux en panne
d’esprit critique ?
Quand les violences ont éclaté
dans la région autonome du
Xinjiang, qui abrite la mino-
rité musulmane des Ouïghours,
les médias chinois officiels se
sont empressés de rappor-
ter le sujet, phénomène rare et
trop rapidement interprété par
les médias occidentaux comme
une « ouverture » du droit à l’in-
formation. De façon supre-
nante au vu des informations
accessibles via la communauté
ouïghoure, les plus grands
organes de presse ont parfai-
tement collé à la ligne officielle
chinoise sur les événements.
«
Les affrontements entre l’ethnie
musulmane ouïghoure et l’ethnie
han majoritaire en Chine, dans le
Xinjiang, ont fait plus de 150 morts, mar-
quant une nouvelle phase dans la région
plus habituée aux bombes et aux assas-
sinats par des militants séparatistes qu’à
des manifestations de masse », écrivait
l’Associated Press (AP) le 6 juillet 2009.
« Le nombre de morts suite aux vio-
lentes émeutes dans la province du Xin-
jiang, dans l’ouest de la Chine, s’élève à
156, et les policiers lundi ont dispersé
des “émeutiers” dans une seconde ville,
selon l’agence officielle Xinhua mardi
matin », rapporte l’agence Reuters.
« Des milliers de Ouïghours ont atta-
qué des Hans, l’ethnie majoritaire en
Chine, avec des couteaux, des bâtons
ou à coups de pied, ont indiqué des habi-
tants, faisant au moins 140 morts, selon
un bilan officiel, qui “risque de s’alourdir”,
a souligné Chine Nouvelle [Xinhua] »,
rapporte Agence France-Presse.
Pour plusieurs experts des médias
comme pour les militants ouïghours, les
médias chinois officiels manipulent les
faits en faveur du régime, stratégie qu’un
spécialiste basé à Hong Kong qualifie de
« Contrôle 2.0 » (en référence au Web
2.0, un concept d’Internet où les usagers
créent eux-mêmes le contenu).
« En sortant l’information, les autorités
peuvent faire en sorte que les “médias
périphériques” (les portails de nouvel-
les influents et les journaux commer-
ciaux) travaillent pour eux », écrit David
Bandurski, rédacteur pour le site China
Media Project Web.
« Ces médias se basent sur les dépê-
ches de Xinhua, amplifiant leur effet.
C’est ainsi que ces dépêches, avec des
ajustements mineurs la plupart du temps,
deviennent des dépêches AFP, Reuters
et AP. »
Bandurski prend pour exemple les
émeutes de Shishou au mois de juin,
pour lesquelles les plus grand journaux
ont repris les informations des agences
de presse occidentales qui elle-mêmes
n’avaient fait que se calquer aux médias
officiels chinois.
Au Xinjiang, les médias d’État chinois
ont dépeint les émeutes comme étant une
insurrection ouïghour violente menée par
des terroristes et des forces anti-chinoi-
ses d’outre-mer qui ont attaqué les Chi-
nois d’ethnie han. Freedom House, une
ONG américaine œuvrant pour l’expan-
sion des libertés, affirme que les repor-
tages font partie des efforts du régime
pour gérer la couverture médiatique des
troubles. L’organisme a demandé aux
médias gouvernementaux de cesser ce
genre de pratique car elle attise les ten-
sions interethniques.
Si peu de médias ont donné du poids
à la suggestion de manipulation des
ouïghours par des militants aux États-
Unis et en Allemagne, plusieurs ont suivi
l’angle du régime de même que sa sug-
gestion que l’ethnicité est la cause pre-
mière du conflit.
C’est particulièrement vrai pour les
médias qui dépendent des agences de
presse. Les principaux journaux cana-
diens et les sites comme cyberpresse.ca
ont tous publié des dépêches de ce
genre.
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Le 10 juillet, les Ouïghours ont protesté devant les ambassades chinoises à travers le monde pour demander l’arrêt du massacre de leur
peuple par le gouvernement chinois.
Mais, cette fois, le régime chinois est
allé un pas plus loin pour modeler le mes-
sage. Durant les émeutes au Tibet, Pékin
avait provoqué l’ire des médias interna-
tionaux en leur interdisant l’accès à la
région. Au Xinjiang, la stratégie inverse
a été utilisée : tous les grands médias
ont été invités à effectuer des visites gui-
dées et autorisés à interviewer des habi-
tants – toujours avec la présence proche
des autorités.
« Ils deviennent plus sophistiqués. Ils
apprennent de leurs erreurs passées », a
déclaré au New York Times Xiao Qiang,
un professeur en journalisme à l’Uni-
versité de Californie, qui suit de près le
contrôle médiatique exercé par Pékin. Il
affirme que la nouvelle tactique vise à
garder le contrôle sur les médias étran-
gers.
La plupart des experts des médias chi-
nois, incluant M. Xiao, ont qualifié les
efforts du régime de bloquer toutes les
communications dans la région comme
une tentative d’empêcher que du con-
tenu non censuré – comme les preuves
d’attaques contre les Ouïghours – soit
diffusé à l’extérieur, comme ce fut le cas
au début des troubles. Lorsque la répres-
sion a commencé, les habitants d’Urumqi
ont publié sur le web des vidéos prises
avec des téléphones portables et des
caméras numériques montrant les évè-
nements se déroulant dans la ville.
Tala Dowlatshahi, avec Reporters
Sans Frontières à New York, indique
par exemple que plus de 50 forums
ouïghours sur Internet ont été fermés
le 7 juillet et que les autres moyens de
communication, comme Twitter, ont été
coupés.
« Les gens de cette région sont com-
plètement coupés du monde », indique-t-
elle. « Je n’ai pas beaucoup de réponses
à vous fournir, mais je peux vous dire que
l’on ne sait pas toute la vérité. »
Les Ouïghours en Europe et en Amé-
rique du Nord disent que leurs amis et
les membres de leur famille ont disparu
des services de messagerie instanta-
née, et ne répondent lus au téléphone ni
aux courriels. Ils affirment de plus que la
police est passée de porte en porte pour
arrêter les hommes ouïghours. Cette allé-
gation a été répétée par une foule com-
posée de femmes ouïghours au Xinjiang
qui ont demandé la libération de leurs
proches à la police, alors que des journa-
listes étrangers étaient à proximité.
En résumé, les articles sur le Xinjiang
des grands médias occidentaux pêchent
en omettant d’indiquer que les sources
officielles chinoises sur lesquelles ils se
basent sont généralement considérées
comme des outils de propagande du
régime communiste.
« Les médias devraient être grande-
ment préoccupés par la justesse d’un
reportage (quel qu’il soit) provenant des
médias chinois officiels parce qu’ils ne
rapportent qu’une version des faits »,
pointe Mme Dowlatshahi, expliquant que
toutes les dépêches servent les intérêts
politiques du régime.
Pas de recherche de la
cause des émeutes
L’histoire du Xinjiang est remarquable-
ment similaire à celle du Tibet, bien que
moins connue. Les deux régions étaient
habitées d’ethnies distinctes possédant
leurs propres langues et traditions reli-
gieuses. Le Xinjiang, appelé Turkestan
oriental par les Ouïghours, a lutté à tra-
vers l’histoire contre la domination chi-
noise, faisant tantôt partie de certaines
dynasties chinoises, ou étant indépen-
dant, ou sous un autre contrôle.
Lorsque le Parti communiste chinois
a pris le pouvoir en 1949, le nouveau
régime s’est efforcé de rapidement écra-
ser toute indépendance dans la région.
Amnesty International affirme que de
graves violations des droits de l’homme
y sont survenues depuis.
Dans un effort d’effacer les caractéris-
tiques ethniques de la région, le régime
chinois a réprimé les traditions culturel-
les et religieuses. Il a également travaillé
d’arrache-pied pour attirer au Xinjiang
des Chinois de l’ethnie majoritaire Han
tout en déplaçant la minorité ouïghour.
Selon Amnesty International, en 1949,
la population d’ethnicité turque locale,
dont la majorité était ouïghour, comp-
tait pour au moins 93 % de la population.
Aujourd’hui, la moitié de la population
est Han.
Les restrictions imposées à la région
ont augmenté vers la fin des années
1990 et les Ouïghours ont vu leurs droits
sociaux, économiques et culturels s’éro-
der constamment.
« Le développement économique
dans la région a largement laissé pour
compte la population ethnique locale,
16 – 31 JUILLET 2009 ● La Grande Époque
qui a fait face à des restrictions grandis-
santes. Cette tendance a exacerbé des
tensions ethniques de longue date entre
les Ouïgours et les Chinois han dans la
région, contribuant à l’escalade de la vio-
lence », mentionne Amnesty.
Des récentes mesures administratives
forcent les familles ouïghours à envoyer
leurs enfants dans des écoles en régions
chinoises, et les jeunes femmes sont
obligées d’aller travailler dans les gran-
des villes à l’Est.
Très peu de ces femmes reviennent, et
les militants ouïghours affirment qu’elles
sont forcées à se prostituer.
« Avec les années, les tentatives
des Ouïghours d’exprimer leurs griefs
et d’exercer pacifiquement leurs droits
les plus fondamentaux ont fait face à la
répression », souligne Amnesty, ajou-
tant que cette répression a augmenté
les tensions.
Il est intéressant de noter que ce
modèle de résistance est commun à tra-
vers la Chine. Des rapports officiels ont
noté que les « incidents de masse »
avaient augmenté de manière exponen-
tielle ces dernières années, atteignant
87.000 par an en 2005.
L’action populaire est généralement
écrasée par les forces de l’ordre, tan-
dis que l’injustice n’est pas réglée. La
réaction musclée des autorités provoque
alors d’autres manifestations, dont cer-
taines deviennent violentes. C’est à ce
moment que la colère cible plus particu-
lièrement le régime et que des véhicules
de police ou des bureaux gouvernemen-
taux sont attaqués, voire incendiés.
Des scénarios d’émeutes de ce genre
sont survenus dans la ville de Shis-
hou, province de Hubei, en juin dernier,
et dans la ville de Longnan, province
de Gansu, en novembre dernier. Les
Ouïghours affirment que c’est la même
chose qui s’est produite à Urumqi.
« La plupart des médias ne reprennent
que la version des faits de Pékin et pren-
nent les photos des médias chinois »,
estime Rukiye Turdesh, président de la
Uighur Canadian Society. Les médias
officiels chinois se sont concentrés sur
les Chinois han, dit-elle, et ont présenté
les Ouïghours comme attaquant violem-
ment les Chinois han. Les médias occi-
dentaux ont emboîté le pas.
« Ils ne montrent pas de photos sur la
manière dont les Ouïghours sont tués. Ils
Sean Gallup/Getty Images
ne disent rien sur les Ouïghours ni sur
ce qui leur est arrivé, ils disent juste que
les Chinois ont été battus, que des Chi-
nois ont été tués. Qu’est-ce que c’est ça,
ce n’est pas juste, n’est-ce pas ? Ils ne
font que recopier les médias chinois »,
lance-t-elle.
« Les Ouïghours sont désemparés, ils
n’ont pas de soldats, ils n’ont pas d’ar-
mes, ils n’ont rien. Les Chinois ont tout et
ils bloquent l’information, nous ne savons
pas ce qui se passe là-bas actuellement.
Même si la Chine les tuait tous, massa-
crait tous les Ouïghours, on n’en sau-
rait rien. »
Comme les Tibétains, les Ouïghours
sont constamment présentés comme
étant « barbares, paresseux et stupi-
des », complète Alim Seytoff.
Le fait que les Ouïghours soient
musulmans embrouille davantage l’af-
faire, estime D.J. McGuire, cofondateur
du China e-Lobby et auteur de Dragon
in the Dark: How and Why Communist
China Helps Our Enemies in the War on
Terror (Dragon dans la nuit : Comment et
pourquoi la Chine communiste aide nos
ennemis dans la guerre contre le terro-
risme.)
« Le problème est que les gens sont
déjà conditionnés à ne pas croire ce
que les cadres [communistes] disent
sur le Tibet, donc on trouvait de ça dans
les reportages sur le Tibet », croit M.
McGuire, en référence au fait que les
reportages sur le Tibet étaient plus sym-
pathiques à la cause tibétaine.
« Mais ils ne comprennent pas autant
cela avec ce qui se passe à Urumqi [capi-
tale du Xinjiang] », ajoute-t-il.
« Après le 11-septembre, il a été beau-
coup plus facile de faire passer la résis-
tance musulmane comme étant terroriste
et antioccidentale, alors que c’est plus
difficile à faire avec la résistance au
Tibet, donc c’est ce qui ressort des repor-
tages », explique-t-il.
Pour M. McGuire, la situation se
résume à ceci : toute couverture média-
tique qui ne remet pas en question les
dires du régime chinois est irresponsa-
ble. « Jusqu’à ce que nous puissions
obtenir les commentaires de gens qui ne
craignent pas les représailles du régime
communiste, il sera très difficile de savoir
ce qui s’est vraiment passé. »
MATTHEW LITTLE
LA GRANDE ÉPOQUE
La Grande Époque ● 16 – 31 JUILLET 2009
Les écoles de langue de Pékin font un lavage de cerveau
aux élèves à l’étranger
Derrière Confucius, Marx et Mao Zedong
D
e nombreux « Instituts Confucius
» chinois ont été établis dans le
monde par le biais d’une coopéra-
tion avec des instituts de recherche sur
l’Asie ou avec des centres de langue chi-
noise dans les universités étrangères.
Créés afin de « promouvoir la langue et la
culture chinoises », ces Instituts « propo-
sent des cours de langues, des séminai-
res sur la Chine ancienne ou actuelle ainsi
que des activités culturelles » indique le
site de l’Institut Confucius hébergé par
l’Université René Diderot à Paris. Au nom-
bre d’environ 60 à ce jour, ils devraient se
multiplier pour atteindre les 500, et comp-
tent parmi leurs étudiants aussi bien des
responsables gouvernementaux que des
consultants influents. Les programmes
d’enseignement, pourtant, tendent à subs-
tituer Marx à Confucius et Mao Zedong à
Sun Tseu.
Le patriotisme à la chinoise
Les supports d’enseignement de l’Ins-
titut Confucius sont largement adop-
tés par les écoles chinoises à l’étranger.
Tous émanent du siège social des Insti-
tuts, à Pékin. Pour M. Yao Zhe, profes-
seur de chinois aux Etats-Unis, les choses
sont clairs : « A travers les supports d’en-
seignement, Pékin propage son idéologie
de patriotisme pour le Parti communiste et
pour la Chine, sa culture autocratique, et
son nationalisme. Presque toutes les éco-
les de chinois aux Etats-Unis qui ensei-
gnent les caractères chinois simplifiés
adoptent les outils de l’Institut. » Il s’agit,
pour Mme Yao, d’une « douce guerre
froide » ou d’un « champ de bataille sans
armes ».
Chine, Pékin : une école de Confucius dans une banlieue de Pékin.
Espions derrière un mas-
que d’enseignant
Mme Yao explique avoir commencé
comme journaliste pour des médias chi-
nois aux Etats-Unis, avant de devenir
enseignante de chinois parce qu’elle avait
vu comment Pékin contrôlait les médias à
l’étranger.
« Colonies idéologiques », les éco-
les d’enseignement de langues doivent
ainsi agir de façon discrète sur les dias-
poras chinoises qui envoient leurs enfants
apprendre la langue de leur pays d’ori-
gine, afin d’en faire graduellement des
relais idéologiques. Un membre du comité
linguistique de Chine indique que des
conseillers du président Hu Jintao lui ont
directement suggéré d’établir des Instituts
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Peter PARKS/AFP
Confucius et, sous l’enseigne de l’appren-
tissage de la langue chinoise, de véhiculer
l’idéologie communiste.
« Je suis chinois, pas amé-
ricain »
Le journaliste chinois Li Gong a noté
lors d’une interview en 2007 avoir vu un
professeur de chinois d’une école publi-
Chine 5
que aux Etats-Unis enseigner à ses
élèves à dire : « Je suis chinois, pas amé-
ricain ». Il s’agit pour lui purement et sim-
plement d’infiltration culturelle, exploitant
le dispositif Startalk.
Startalk est un programme visant à sti-
muler l’enseignement de langues d’im-
portance stratégique qui ne sont pas
suffisamment enseignées aux Etats-Unis,
par exemple l’arabe et le chinois.
Li Gong dit avoir appris par un res-
ponsable de la Section des Langues du
département de la sécurité Intérieure
que l’arabe est une langue stratégique
pour prévenir le terrorisme, et le chinois
pour prévenir l’espionnage. La CIA a ainsi
demandé au public de dénoncer tout pro-
fesseur de chinois soupçonné d’espion-
nage.
Propagande en doses
mesurées
Le site de propagande du Parti com-
muniste déclare avec une admirable fran-
chise que les écoles de langue sont l’un
des « trois piliers » des efforts de propa-
gande du Parti au niveau international.
Un professeur de chinois d’un Insti-
tut Confucius, qui souhaite rester ano-
nyme, dit que les clients des Instituts ne
sont pas conscients des méthodes pro-
ches du lavage de cerveau présentes
dans les manuels d’enseignement. Les
enfants reçoivent des devoirs consistant à
faire des recherches sur la vie des leaders
communistes, sur les mérites du commu-
nisme, etc.
Témoignage de cet « esprit », le contenu
de la page 93 du volume 3 du Contempo-
rary Chinese par Dangdai Zhongwen, uti-
lisé en 2008 aux Etats-Unis.
« Aller voir le Dieu Marx »
Dans cette page, aller voir dieu est
associé au fait d’aller voir « Ma Kesi »,
sans que le sens de « Ma Kesi » soit expli-
cité. Il s’agit en fait de la phonétique chi-
noise pour Karl Marx.
Le Hanban, le professeur de chinois
qui révèle ces passages d’enseignement,
explique que le déclencheur a pour lui
été sa rencontre inattendue avec un étu-
diant il y a quelques années. Quand il lui
a demandé quelle université cet étudiant
voulait intégrer, ce dernier a répondu :
« Je ne veux aller dans aucune université
en Amérique, ni même à Tokyo. Je veux
aller à l’université à Pékin, parce qu’ils
enseignent le communisme là-bas. Je ne
comprends pas pourquoi on n’enseigne
pas le communisme en Amérique. »
Ce professeur conclut : « Ils sont très
loin de savoir la vérité, ils ne connaissent
par la vraie histoire du Parti ! »
Les Instituts Confucius et autres écoles
de langues créées par Pékin comme troi-
sième pilier de la machine de propagande
du Parti communiste chinois, ont de beaux
jours devant eux avec une présentation
de l’histoire contemporaine de Chine qui
ignore la Grande famine, la Révolution
culturelle et les pire cas de répression.
L’image d’une Chine nouvelle est offerte,
prétendument devenue paradis sur terre
grâce à l’action du parti communiste. Les
diasporas, devant ce cocktail de patrio-
tisme et de propagande communiste, se
satisfont du patriotisme …et ferment les
yeux sur la propagande.
YUAN MEI,
LIU FEI ET ROBIN KEMKER
6 Chine www.lagrandeepoque.com
Des bébés « non-autorisés »
retirés à leurs parents
L P
e 3 juillet 2009, le quotidien de Sanqin a rapporté
que le département des affaires civiles du canton
Zhenyuan de la province de
Guizhou a pris leurs enfants aux « S’ils ne peuvent payer,
familles incapables de payer les
amendes de non-respect de la règle nous prenons les enfants
de l’enfant unique.
Le département des affaires civi- en compensation. Une
les a qualifié les enfants d’« en-
fants abandonnés » et les a rendus
fois qu’ils sont là, ils y
accessibles pour adoption à des restent ou bien ils sont
familles occidentales. Depuis 2001
adoptés. »
dans le canton, 80 enfants ont été
retirés de leurs familles et adoptés
par des familles américaines ou européennes.
Les enfants sont pris à leur famille dans les trois pre-
miers mois de leur vie. Shi Guangying, ancien dirigeant
ÉDITORIAL NEUF COMMENTAIRES
Suite du septième commentaire
La Révolution culturelle a été la période de gauche qui
virait le plus à la frénésie. Tuer était devenu une façon
compétitive de démontrer sa position révolutionnaire
et les moyens utilisés pour éliminer les « ennemis de
classe » étaient cruels et brutaux à l’extrême.
La politique de « Réforme et d’ouverture » a fait pro-
gressé la circulation de l’information, ce qui a permis à
des journalistes étrangers d’être témoin du massacre de
la place Tiananmen, et de diffuser les images montrant
des tanks écrasant des étudiants vivants.
Dix ans après, le 20 juillet 1999, Jiang Zemin a lancé
sa répression contre le Falun Gong. Fin 2002, des sour-
ces provenant du gouvernement chinois ont confirmé
que le nombre de morts non déclarées se chiffraient à
plus de 7 000 dans les centres de détention, les camps
de travaux forcés, les prisons et les hôpitaux psychia-
triques avec une moyenne de 7 personnes tuées cha-
que jour.
Aujourd’hui le PCC semble tuer beaucoup moins
que dans le passé lorsque des millions, voire des dizai-
nes de millions de personnes étaient assassinées. Il y a
deux raisons à cela. Premièrement la culture du PCC a
déformé l’esprit des Chinois, ils sont devenus résignés
et cyniques. Deuxièmement, à cause de la corruption
excessive et des fraudes parmi les fonctionnaires du
gouvernement chinois, l’économie chinoise est devenue
une « économie sous perfusion » qui dépend des capi-
taux étrangers pour assurer sa croissance économique
et la stabilité sociale. Les sanctions économiques qui ont
suivi le massacre de la place Tiananmen restent gravées
dans la mémoire du PCC et ils savent que le fait de tuer
ouvertement provoque le retrait des capitaux étrangers
et risque de mettre en danger leur régime totalitaire.
En réalité le PCC n’a jamais cessé de massacrer les
gens, la différence est que maintenant il ne ménage
aucun effort pour en cacher les preuves sanglantes.
II. Des moyens de tuer extrêmement cruels
Tout ce que fait le PCC ne sert qu’un seul but : obtenir continuait à marquer le rythme essayant de faire en sorte
et conserver le pouvoir. Tuer est pour le PCC un moyen que le chant ne s’arrête pas ; mais sa cloche tintait dans
essentiel pour conserver le pouvoir. Plus de gens étaient le chaos.
tués et plus cruelles étaient les méthodes, plus cela pou-
vait parvenir à terrifier les gens. Une telle terreur a com-
mencé avant même la guerre sino-japonaise.
1. Les massacres dans le nord de la Chine pendant la
guerre sino-japonaise
China Photos/Getty Images
du bureau de contrôle des naissances, explique que per-
sonne ne peut payer les amendes, qui sont de 40.000
yuans (4.210 euros). « S’ils ne
peuvent payer, nous prenons les
enfants en compensation. Une fois
qu’ils sont là, ils y restent ou bien ils
sont adoptés. »
Le nouveau dirigeant du bureau
de contrôle des naissances du
canton Zhenyuan indique devant
la presse locale : « Nous avons
trouvé des preuves irréfutables que
ces bébés ont été pris de force,
emmenés dans des orphelinats et
adoptés par des étrangers ». L’enquête en cours viserait
en particulier six responsables locaux.
SOH
7.203.313 Chinois ont démissionné
5 du Parti après avoir lu les Neuf
commentaires sur le Parti Commu-
niste. Ce mouvement de démissions
reste pour le peuple un moyen d’ex-
pression non violent, apolitique et sans
précédent dans la société chinoise.
La Grande Époque publie un extrait
traduit de cette série éditoriale chinoise
dans chacun de ses numéros.
Quand il a recommandé le livre Enemy Within (L’en-
nemi à l’intérieur) du père Raymond J. De Jaegher et de
l’auteur américaine Irene Corbally Kuhn, Hoover, l’an-
cien président des Etats-Unis, a expliqué que le livre
montrait de manière très crue la terreur des mouvements
communistes. Il le recommandait à toute personne dési-
rant comprendre ce que représentait une telle force per-
verse dans ce monde.
Dans ce livre, De Jaegher et Kuhn relataient des his-
toires sur la manière dont le PCC utilisait la violence
pour terrifier les gens et les amener à se soumettre. Par
exemple, un jour le Parti communiste a exigé que cha-
cun se rende sur la place du village. Les professeurs ont
emmené les élèves sur la place. Le but de ce rassemble-
ment était de regarder l’exécution de 13 jeunes patriotes.
Après avoir annoncé les accusations fabriquées contre
les victimes, le PCC a ordonné à la professeur terrifiée
de faire chanter aux enfants des chants patriotiques. Sur
la scène pour accompagner les chants il n’y avait pas de
danseurs, mais un bourreau tenant à la main un couteau
aiguisé. C’était un jeune soldat communiste impitoyable
et fort, avec des bras musclés. Le soldat s’est dirigé der-
rière la première victime, a rapidement levé son grand
couteau et frappé vers le bas. La première tête est tom-
bée. Le sang a giclé comme d’une fontaine pendant que
la tête roulait sur le sol et le chant hystérique des enfants
a fini dans un chaos de cris et de pleurs. L’enseignante
Pour en savoir plus : « Les neuf commen-
taires sur le Parti communiste » à l’adresse :
www.lagrandeepoque.com
Version audio disponible sur le site de la radio Son
de l’Espoir : www.sondelespoir.org
16 – 31 JUILLET 2009 ● La Grande Époque
AUJOURD’HUI EN CHINE
Nouvelles des correspondants de la radio Son de l’Espoir
(Sound of Hope Network : www.sohnetwork.com)
Un pasteur condamné à un an de
travaux forcés
U n pasteur de la province de Henan et sa femme ont été reconnus coupables de « ras-
semblement religieux illégal » et condamnés à un an de travaux forcés. Dou Shaowen et
sa femme Feng Lu de l’église Pan Se dans la ville de Zhengzhou ont été arrêtés le 14 juin.
Mme Feng Lu a eu sa peine convertie en assignation à résidence pour pouvoir prendre soin
de sa fille de 12 ans. « Mon mari m’a dit que c’était épuisant, ils travaillent de 6 heures du
matin jusqu’à minuit et sont plus de 40 par cellule », explique-t-elle. Cinq autres membres de
l’église ont été arrêtés et condamnés à des amendes de 800 à 900 yuans.
Pour Chang Mingshuan, leader des églises chinoises familiales, les autorités chinoises ont
effectué d’autres arrestations dans les provinces de Jiangsu, Sichuan et Henan.
Une « Tour de Pise » à Shanghai
L e 27 juin 2009, un nouvel immeuble de 13 étages de la périphérie de Shanghai s’est
enfoncé sur un de ses côtés tout en restant debout et presque intact.
Les propriétaires des appartements ont demandé le remboursement des avances faites
ainsi qu’une compensation pour leurs pertes. Devant les responsables municipaux, la tension
a monté à un tel point que les fonctionnaires ont dû battre en retraite.
Les manifestants, porteurs de banderoles et aux cris de « révocations des contrats » ont
été dispersés par la police.
Le réservoir Kama proche de
l’effondrement
lusieurs jours de pluies torrentielles ont causé de graves inondations dans le Sud de la
Chine. Des centaines de milliers de personnes ont dû fuir leur domicile et, de source
officielle, 75 sont décédées.
Dans la province de Guangxi, le réservoir d’eau Kama serait proche de l’effondrement.
D’après des habitants de la ville de Huaiqun, en aval du réservoir, celui-ci n’a pas été entre-
tenu depuis des années. La plupart des habitants ont donc fui la ville, le niveau d’eau du
barrage étant à plus de 200 mètres au-dessus de celui des routes de Huaiqun.
Les médias chinois indiquent déjà que le 2 juillet au soir, treize mètres du mur du réser-
voir se sont effondrés, à moins de quatre mètres des fondations du barrage.
Manifestations massives de chômeurs à
Foshan
L e 6 juillet 2009, des centaines de chômeurs ont attaqué la cour de justice du district Nan-
hai de la ville de Foshan. Une notice officielle envoyée par les autorités à la presse locale
informe que 200 ouvriers de l’usine Lingnan ont attaqué la cour de justice pour des motifs
« déraisonnables ». L’entreprise en faillite aurait été vendue au tiers de sa valeur conduisant
à la colère des employés mis au chômage sans compensation. La police locale a arrêté 17
personnes et blessé une vingtaine de manifestants.
Pollution chimique dans le Hunan
L es scandales de pollution chimique
se multiplient dans la province de
Un homme de 56 ans récemment
décédé a eu le luxe d’une autopsie, qui
Hunan. Deux personnes de l’usine chi- a révélé des concentrations extrême-
mique de Xianghe sont récemment décé- ment élevées de cadmium et d’autres
dées d’un empoisonnement au cadmium. éléments métalliques.
Les autorités locales refusent cependant « Depuis la fin juin 2009, nous tou-
d’aider les habitants proches de l’usine à chons 12 yuans par jour (1,26 euro) pour
trouver un autre endroit pour vivre. nous aider. Mais cela n’a rien à voir avec
Un habitant indique, sous couvert ce que nous subissons, nous voulons un
d’anonymat, que l’usine est fermée mais endroit sain pour aller y vivre », indique
que tous les environs sont pollués et que un villageois.
plus aucune plante ne pousse. Les vil- Depuis 2003, l’usine Xianghe aurait
lageois pauvres ne peuvent s’offrir de deversé du cadmium, de l’indium et
soins médicaux et meurent. Les enfants d’autres métaux lourds dans la nature :
de la région montrent des signes d’em- des fûts contaminant la rivière Liuyang
poisonnement et ne se développent pas et causant un désastre environnemen-
« normalement ». tal.
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La Grande Époque ● 16 – 31 JUILLET 2009 www.lagrandeepoque.com Économie 7
Le dilemme du « grand emprunt » français
Le « grand emprunt » pour financer des investissements publics est-il justifié ?
Les emprunts d’État fran-
Suite de la première page çais auprès des particuliers
depuis 1945
Les comptes de l’État dans le
rouge 1946 - Emprunt 3 % de la Caisse nationale
Une controverse s’engage cependant par-delà de l’énergie : emprunt émis pour indemniser
les partis politiques entre les partisans de la rigu- les actionnaires des compagnies de gaz et
eur budgétaire et ceux d’un projet politique natio- d’électricité, et indexé sur le chiffre d’affaires
nal ambitieux. En effet, malgré les engagements d’EDF-GDF. Son cours de remboursement
officiels de la France de revenir en dessous du fut multiplié par 40.
seuil de 3 % du PIB défini par le traité de Maas- 1952 - Emprunt Pinay 3,5 %, renégocié
tricht, le déficit du budget de l’État est de 3,4 % en à 4,5 % en 1973 : emprunt émis pour réta-
2008, alors qu’il n’est en moyenne que de 1,5 % blir la confiance des Français et rapatrier les
en Europe. La charge de la dette de la France, capitaux placés à l’étranger, dans un con-
c’est à dire le coût annuel de son remboursement, texte de forte croissance économique. Il était
est actuellement de 54 milliards d’euros pour un indexé sur l’or, et exonéré d’impôt. Il fut rem-
budget national de 341 milliards d’euros et repré- boursé par anticipation, avec un cours multi-
sente le troisième poste de dépenses publiques. plié par 15.
Comme l’État français a refusé de réduire ses 1973 - Emprunt Giscard 7 % de 6,5 mil-
dépenses lors des périodes de croissance, il n’a liards de francs sur 15 ans : lancé pour com-
plus aucune marge de manœuvre budgétaire pour penser la chute de la TVA après le premier
faire face à la crise économique actuelle, et ne choc pétrolier, et indexé à partir de 1978 sur
devrait pas s’endetter plus. le cours du lingot d’or. Il a coûté 92 milliards
C’est pourquoi Philippe Seguin, premier pré- à l’État en 1988, en grande partie à cause
sident de la Cour des Comptes, a solennelle- de la dévaluation du franc, dont la valeur fut
ment rappelé le 23 juin aux députés que « cette divisée par 3,5.
année 2009, le déficit de l’État sera de 120 mil- 1977 - Emprunt Barre 8,8 % de 8 milliards
liards d’euros, soit la moitié de ses recettes… ». de francs sur 15 ans : émis pour aider les vic-
Bien que la signature de la France soit encore times de la sécheresse de 1976, il bénéficiait
très bien notée par les agences de notation, la d’un abattement fiscal de 1.000 francs par an
dette publique augmente actuellement au rythme sur les intérêts, mais n’a guère profité de sa
d’un milliard d’euros par jour. Les projections fai- garantie fondée sur l’écu.
tes jusqu’en 2018 par Philippe Seguin montrent 1983 - Emprunt Mauroy 10 % de 14 mil-
que « la France aura alors une dette publique liards de francs sur 2 ans : plus qu’un
équivalente à 100 % du PIB » (soit près de 2.000 emprunt, il s’agit d’une contribution forcée
milliards d’euros). Le résultat de cette politique Hanna Szmytko/La Grande Epoque auprès des contribuables payant plus de
laxiste entreprise depuis plus de 30 ans entraî- Les bureaux du ministère de l’Economie, des Finances et de l’Emploi à Paris 12e. 5.000 francs d’impôts. Il fut créé pour mar-
nera alors une charge de la dette de 160 mil- quer la politique de rigueur du gouverne-
liards d’euros par an, soit plus que la collecte de tes publics. Selon les esti- le « paquet fiscal » voté au ment Mauroy, puis intégralement remboursé
la TVA ! mations de Philippe Seguin, La charge de début de son mandat, puis en 1985.
l’effort financier est colos- en augmentant les prélè- 1993 - Emprunt Balladur 6 % de 110 mil-
Vers un réel changement ? sal : 72 milliards d’euros ! la dette de la vements obligatoires des liards de francs sur 4 ans : émis pour finan-
Lancer un emprunt national dans ces conditions Le président n’a pas le catégories favorisées. cer les travaux publics et soutenir l’emploi, à
s’apparente donc plutôt à la quadrature du cercle choix : il devra en même
: l’État doit en effet attirer l’épargne des Français temps réduire les dépenses
France est de Les risques sont énor-
mes, car les capitaux
l’époque où Nicolas Sarkozy était ministre du
Budget, il fut remboursé pour partie (90 mil-
avec des conditions plus avantageuses que les et augmenter les recettes.
autres placements, mais sans être taxé de favori- Diminuer les dépenses ne
54 milliards peuvent fuir le pays, les
fonctionnaires lancer une
liards), le reste ayant été reconverti dans des
actions (pour partie gratuites) d’entreprises
tisme par ceux qui n’ont pas d’argent à placer, et pourra se faire qu’en rédui- grève générale, et la para- privatisées (30 milliards). Au total, l’emprunt
tout en les persuadant que les finances publiques sant le champ d’interven- pour un budget lysie gagner l’économie. a finalement coûté 4,3 milliards de francs à
vont s’assainir. Or l’histoire des derniers emprunts tion de l’État, c’est-à-dire en Une répartition équita- l’État.
réalisés depuis 1945 (voir encadré) et qui étaient cédant une large partie de national de ble de l’effort financier est
assortis de conditions fiscales très attractives ses prérogatives au secteur indispensable pour garan-
tend plutôt à démontrer qu’ils ont eu des effets privé, donc en réduisant le
désastreux pour les finances publiques. nombre de fonctionnaires.
341 milliards tir le succès de l’emprunt et
le redressement à terme de
ser l’intérêt national au-dessus des lobbys ou des
corporations, et qui ont su fédérer leur pays vers
Nicolas Sarkozy ne pourra pas se contenter de L’augmentation des recet-
lancer cet emprunt sans, en parallèle, assainir tes, quant à elle, ne pourra
d’euros. la France. Les grands pré-
sidents sont ceux qui ont
un projet qui le transcende. Nicolas Sarkozy est-
il de ceux-là ?
énergiquement les dépenses courantes des comp- se faire qu’en revenant sur eu le courage de faire pas- PATRICK C. CALLEWAERT

Placements : prudence sur les actions, mais rendements

attractifs sur les obligations
Entretien avec Philippe Richard.
LGE : Pouvez-vous expliquer en
quoi consiste votre métier de l’inter-
médiation financière ?
Philippe Richard : Cette activité con-
siste à trouver un acheteur et un vendeur
afin d’effectuer des opérations en bourse.
Les valeurs du marché des actions sont
cotées sur un marché électronique et les
opérations s’effectuent durant toute la
journée, par exemple à Paris entre 9h et
17h30. Sur d’autres marchés, comme les
obligations par exemple, il n’existe pas
de marché électronique. Aussi, lorsqu’il
a un ordre d’achat, l’intermédiaire doit
trouver un vendeur et les opérations cor-
respondantes s’effectuent au téléphone.
Les intermédiaires offrent des services
d’analyse financière ou de conjoncture
qui leur permettent de conseiller leurs
clients.
LGE : La crise financière semble
finie avec les bourses qui se portent
mieux, le pétrole qui remonte… Com-
ment percevez-vous cette situation de
l’optimisme de la sphère financière et
la réalité économique ?
Philippe Richard : Dire que la crise
est finie reste un vœu pieux qui n’est
pas forcement réalisable. En fait, depuis
mars 2007 les informations souvent trop
optimistes ont été en règle générale
démenties par la réalité. Au début de la
crise les intervenants n’ont pas ressenti
l’importance du choc. La crise prenant
forme, certains l’ont même niée, et main-
tenant on pense qu’elle est finie ? Les
marchés restent très volatils, ce qui tra-
duit un manque de conviction de la part
des intervenants. Le démarrage d’une
reprise pourrait se faire par le dyna-
misme des pays émergents. La difficulté
est de savoir si ces pays pourront tirer
vers le haut les économies occidentales.
LGE : Depuis quelques semaines,
les places boursières sont entrées
dans une phase d’attentisme et de
prudence. Quelles sont vos anticipa-
tions quant à leur évolution ?
Philippe Richard : Nos anticipations
restent prudentes sur le marché des
actions. Cependant il est toujours pos-
sible d’investir sur le marché des obli-
gations. Les obligations d’entreprises sur
une période de 2 à 3 ans offrent des ren-
dements attractifs de l’ordre de 6 % pour
un risque limité.
LGE : Les entreprises sont venues
massivement sur le marché obliga-
taire, alors que celui-ci est surtout
réservé aux investisseurs institution-
nels. Comment un particulier peut-il
participer à ce marché ?
Philippe Richard : Depuis le début de
l’année les émissions des grandes entre-
prises (Saint-Gobain, Lafarge, PPR,
Schneider….) ont atteint un niveau his-
toriquement élevé en termes de montant
émis et procurent actuellement des taux
de rentabilité attractifs. Ces obligations
sont réservées en grande partie aux ins-
titutionnels. En fait le marché obligataire
est un marché de « gros ». Pour donner
une échelle il est possible d’acheter une
action comme Alstom pour un montant
de 40 euros. Pour les obligations la taille
se situe à tout autre niveau de l’ordre
de 350.000 euros par ligne d’obligation.
Aussi pour les particuliers il est possible mentation des loyers est liée à la hausse hybrides ont un intérêt et sont classés
de regrouper leurs ordres afin d’atteindre de l’indice de la construction qui est le selon trois types : les obligations conver-
ce montant critique. Par exemple si 10 principal élément servant au calcul des tibles, dites à profil « actions », qui ont le
clients disposant de 30.000 euros cha- loyers. Il est admis qu’un locataire reste même comportement qu’une action ; les
cun souhaitent investir sur une obligation solvable si son loyer n’excède pas 30 % obligations « mixtes » qui rapportent un
par regroupement de leurs ordres, il sera de ses revenus. Sur le seul poste du coupon souvent supérieur à celui du divi-
possible d’accéder à ce marché. Enfin, il logement locatif l’inflation représente au dende de l’action et suivent en partie la
est toujours possible Les obligations moins 3 % ! D’un autre hausse ou la baisse de l’action support ;
de souscrire des parts coté, en économie, il enfin, les obligations convertibles de type
de fonds gérés par d’entreprises sur est admis que la créa- « taux » qui ont un comportement identi-
des établissements une période de tion de monnaie qui que à celui d’une obligation. Les obliga-
spécialisés (banques, s’est produite lors des tions convertibles nouvellement émises
sociétés de gestion 2 à 3 ans offrent injections massives appartiennent à la classe « mixte ».
de portefeuille). Dans des rendements de liquidités en 2008 Selon l’évolution du titre support elles
ce cas l’investisseur et 2009 a eu pour passent durant leur vie d’une classe à
devra veiller aux dif- attractifs de effet de créer de l’in- l’autre. Par exemple si le cours monte
férents frais liés au l’ordre de 6 % flation qui génère une fortement elles deviennent de type action
fonds (droit d’entrée et remontée des taux. La et si le cours de l’action baisse fortement
de sortie, frais de ges- pour un risque question est de savoir elles passent dans la classe taux.
tion, pénalités en cas limité. quand une tension sur LGE : Quels conseils en matière
de sortie anticipée). les taux interviendra. de placement donnez-vous aux épar-
Les produits collectifs Pour ma part je n’ai gnants ?
procurent souvent une rentabilité infé- pas de réponse. Philippe Richard : Nous ne formulons
rieure à celle que l’on peut obtenir sur LGE : Les obligations convertibles pas de conseils généraux, car chaque
un portefeuille dont les actifs sont ache- en actions ont également vu un regain investisseur est un cas particulier. Cette
tés en direct. d’intérêt cette année. Quelle est votre particularité se manifeste sur son horizon
LGE : Avec la remontée des anti- opinion en ce qui concerne cette de placement, son goût ou son aversion
cipations inflationnistes et la hausse classe d’actifs ? au risque et bien sûr la répartition de son
des besoins de financement publics, Philippe Richard : Le regain d’intérêt capital. Ne jamais oublier que les mar-
pensez-vous que les taux monteront des obligations convertibles provient des chés sont ouverts tous les jours et que la
rapidement ? nouvelles émissions qui contrastent avec précipitation n’est pas un acte raisonna-
Philippe Richard : Pour ma part le un manque qui perdurait depuis de nom- ble de gestion.
concept d’inflation reste un mystère. Le breuses années. La dernière émission PROPOS RECUEILLIS
mystère provient de l’indice choisi pour sur les obligations convertibles françai- PAR HANNA SZMYTKO
déterminer le niveau de l’inflation. A titre ses remontait à juin 2008 avec Vilmorin.
d’exemple, actuellement l’indice d’infla- En 2009 le spectre s’est élargi avec en Pour en savoir plus :
tion est à un niveau bas alors que le prix particulier Maurel&Prom, Peugeot, Arce- Finance Fi, intermédiaire financier indé-
des loyers, par exemple, a subi une aug- lor, Eurazeo (Danone), Nexans, Cap pendant, tél. : 01 44 79 94 80
mentation de 10 % en 2008. Cette aug- Gemini, Unibail et Publicis. Ces titres dits www.financefi.fr
8 Droits humains
Guinée : la junte au pouvoir viole
les droits humains
« Le nouveau gouvernement a
eu six mois pour prouver qu’il
était sérieux dans sa promesse
d’améliorer le respect des droits
humains en Guinée », a déclaré
Corinne Dufka, chercheuse
senior pour l’Afrique de l’Ouest à
Human Rights Watch. « Il n’y a
plus de temps à perdre. Le Gou-
vernement doit mettre un terme
aux violations des droits humains
et organiser des élections libres,
justes et transparentes dans les
plus brefs délais. »
U
n groupe d’officiers militaires
dénommé Conseil national pour la
démocratie et le développement
(CNDD) a pris le pouvoir quelques heures
seulement après le décès, le 22 décembre
2008, de Lansana Conté, président de la
Guinée depuis 24 ans.
Au moins 16 militaires, dont un ancien
commandant de l’armée, ont été arrêtés.
D’après des sources militaires, certains
d’entre eux ont subi des mauvais traite-
ments pendant leur détention. Tous sont
encore emprisonnés, bien qu’aucun d’en-
tre eux n’ait fait l’objet de chefs d’accusa-
tion. Human Rights Watch a fait état de
nombreux cas d’attaques violentes per-
pétrées par l’armée sur la population gui-
néenne, mais aucun militaire n’a été tenu
responsable pour ces actes. Par ailleurs,
les dirigeants semblent avoir toléré le
règne de la justice populaire.
Attaques et autres cas de
violations des promesses
faites par les dirigeants du
coup d’État
Des membres de l’ONG Amnesty International tiennent des pancartes devant une station service de la
compagnie anglo-néerlandaise Royal Dutch Shell, le 30 juin 2009 à Paris, lors d’une opération symbolique
de nettoyage de la station pour exiger de Shell de nettoyer les zones d’exploitations pétrolifères polluées
au Nigéria. Amnesty publie un rapport intitulé Nigeria, pétrole, pollution et pauvreté dans le delta du Niger
dans lequel elle donne 100 jours au nouveau président de Shell, Peter Voser, pour changer ses politiques
en actions.
Nigéria : le mouvement Ogoni
satisfait, mais critique Shell
L 3
e mouvement nigérian pour la survie
du peuple Ogoni (Mosop) s’est féli-
cité de l’accord financier conclu aux
Etats-unis par la multinationale Shell pour
éviter un procès sur la mort par pendaison
en 1995 de l’écrivain et militant écologique
Ken Saro-Wiwa.
Interrogé par l’AFP, un responsable
du Mosop a toutefois insisté pour que la
compagnie anglo-néerlandaise répare les
dégâts environnementaux causés selon lui
par Shell dans le delta du Niger.
Nous sommes satisfaits de cette com-
pensation de 15,5 millions de dollars pour
la mort de Ken Saro-Wiwa et huit autres diri-
geants Ogoni, mais Shell doit s’attaquer au
problème de la pollution et de la dégradation
du pays Ogoni (sud du Nigeria), a déclaré
Bariara Kpalap, porte-parole du Mosop.
Lundi, les plaignants avaient annoncé
www.lagrandeepoque.com
À la fin du mois de décembre et au
début du mois de janvier 2009, 12 offi-
ciers militaires chargés de la sécurité du
défunt président, Lansana Conté, ont été
arrêtés par le CNDD. Les militaires inter-
rogés par Human Rights Watch à Conakry
ont déclaré que les 12 personnes arrêtées
ont été soumises à un interrogatoire de la
gendarmerie une seule fois, peu après leur
arrestation et qu’elles n’ont toujours pas
été autorisées à rencontrer leurs avocats
ou été inculpées. Ces prisonniers qui ne
pouvaient pas recevoir de visites de leur
famille pendant une période de trois mois
restaient dans un centre de détention non
officiel, situé dans le quartier général du
CNDD au camp militaire Alpha Yaya Diallo
de Conakry.
Un deuxième groupe composé de trois
militaires au moins a été arrêté fin avril,
après une tentative présumée de coup
d’État contre le capitaine Moussa Dadis
Camara, le président du CNDD.
Dans l’après-midi du 26 mai, des dizai-
nes de membres des forces de sécu-
rité ont tabassé, attaché et arrêté Kader
Doumbouya, un ancien commandant sous
le régime de Lansana Conté avant de piller
sa résidence à Conakry. Il est détenu
depuis lors au « PM3 » de Conakry, un
centre de détention de la gendarmerie,
sans aucune accusation. Des sources ont
révélé à Human Rights Watch qu’il recevait
actuellement des soins pour une côte frac-
turée pendant l’incident.
L’emprisonnement prolongé de ces per-
sonnes sans accusation, sans accès à un
avocat ou mise en examen par un juge
indépendant constitue une détention arbi-
traire et une violation des engagements de
la Guinée envers le droit international [...].
Absence d’un méca-
nisme de responsabilisa-
tion pénale des militaires
que Shell, accusée de complicité dans l’éli-
mination de Saro-Wiwa, avait accepté de
payer 15,5 millions de dollars pour régler
le litige devant la justice américaine. Marco
Simons, un des avocats des plaignants, a
précisé qu’une partie de l’argent irait à ses
clients et une autre à un fonds de soutien
au peuple Ogoni, une fois les honoraires
payés.
« Shell a infligé beaucoup de souffran-
ces au peuple Ogoni. En tant que fermiers
et pêcheurs, nous avons été privés de notre
gagne-pain à cause de la pollution », a pour-
suivi Bariara Kpalap.
Shell avait été contraint de se retirer
du pays Ogoni en 1993 après des émeu-
tes. Des centaines de militants du Mosop
avaient manifesté devant le siège de la mul-
tinationale à Port-Harcourt (Etat de Rivers)
mais le rassemblement avait été sévère-
16 – 31 JUILLET 2009 ● La Grande Époque
BRÈVES D’ESPOIR
Avec l’agence d’informations Reporters d’Espoirs
auteurs de crimes
Depuis lors, Human Rights Watch a fait Emmanuelle Laborit : porte-
état de plusieurs cas de vol et de violence
commis par les militaires contre des hom- parole de la culture sourde
mes d’affaires et des citoyens notamment
des vols de biens, de voitures et aussi de
cas d’extorsion commis par les soldats aux
postes de contrôle à Matoto et Bonfi près
E mmanuelle Laborit dirige le théâtre de l’IVT, une école de langue des
signes, une maison d’édition de livres bilingues ainsi qu’une compagnie
professionnelle de théâtre. A Paris, c’est LE centre de diffusion de la culture
de Conakry. Dans un incident flagrant, un sourde. Emmanuelle Laborit : « Nous ne travaillons pas autour de l’accessi-
homme d’affaires guinéen qui venait de bilité du théâtre pour le public sourd, précise-t-elle, mais bien sur la culture
rentrer de l’étranger a raconté que le 30 de la langue des signes. » Enrichi par la mixité entre les comédiens sourds
mai dernier, deux soldats armés l’ont jeté et entendants, le travail de création artistique y est unique. Tous travaillent
par la fenêtre du troisième étage après ensemble grâce à leur corps et leurs mains.
avoir volé ses biens et l’avoir aspergé de Pour en savoir plus : www.ivt.fr
gaz lacrymogène. Les soldats ont ensuite
volé sa voiture. Il s’en est sorti avec le dos,
deux jambes et deux bras cassés.
L’appel lancé en faveur de
la justice populaire nuit aux
principes de l’État de droit
L’appel en faveur de la justice popu-
laire lancé par un haut responsable des
forces de l’ordre du CNDD pour punir les
présumés voleurs, a sérieusement com-
promis le respect de l’État de droit en Gui-
née. Au moins une personne aurait été
assassinée par ces justiciers. Pendant
une réunion tenue le 2 juin avec les gou-
vernements locaux et les dirigeants com-
munautaires et largement relayée par
les médias nationaux et internationaux,
le capitaine Moussa Tiegboro Camara
(aucun lien avec le président du CNDD,
Dadis Camara), qui est le ministre chargé
de la lutte anti-drogue et contre le grand
banditisme a exhorté les jeunes à mettre
en place des brigades de surveillance en ALAIN JULIEN/AFP
leur tenant les propos suivants : « Si vous Des acteurs de la compagnie allemande Mainhattan/Stage
prenez un voleur en flagrant délit, mettez jouent une pièce de théâtre Seven days en langue des signes,
de l’essence sur lui et brûlez-le vivant ! » à Reims, lors du festival européen Clin d’oeil, qui explorait la
avant d’ajouter qu’il n’y avait plus de « culture sourde » basée sur la langue des signes, notamment
place dans les prisons guinéennes pour à travers le cinéma et le théâtre.
accueillir ces criminels [...]
Human Rights Watch Hédé : éco-lotissement vôtre
E n 2002, la municipalité de Hédé décide la création d’un éco-lotissement, « Les
Courtils », le terrain est vendu au prix attractif de 63 euros/m² (contre 80 euros
en moyenne), en échange de quoi le futur propriétaire s’engage à construire un
logement respectueux de l’environnement.
22 maisons individuelles et 10 logements locatifs sont sortis de terre en 2006.
Ces derniers sont destinés à de jeunes ménages, à des personnes âgées, à des
personnes seules ou, encore, aux jeunes du centre d’aide par le travail de la com-
mune.
Pour en savoir plus : Bernard Menguy E-mail : bernardmenguy@wanadoo.fr
En Serbie, un centre culturel pour
oublier les conflits
L e Sandjak est une région historique de l’ex-Yougoslavie où les deux popu-
lations majoritaires sont les bosniaques, de confession musulmane, et les
Serbes orthodoxes. « Mais il y a un fossé entre les deux communautés qui
est encore plus exacerbé par les partis politiques locaux », explique Samid
Sarenkapic, coordinateur de projet chez Damad. C’est pour faire face à cette
situation que le centre Damad s’est rapidement focalisé sur la nécessité de
diffuser les valeurs du « vivre ensemble » parmi les jeunes générations. L’ob-
jectif n’est pas d’être un simple centre de loisir mais de sensibiliser au res-
PHILIPP GUELLAND/AFP
pect entre les peuples lors de chaque activité proposée. Ainsi, s’ils veulent
pouvoir frapper dans la balle ou pianoter sur un clavier, les enfants doivent,
en parallèle, participer à des ateliers sur le thème de la démocratie. « Nous
organisons des débats autour de la non-violence, continue Samid. Et nous
les informons également sur leurs droits et leurs devoirs de citoyens grâce à
des jeux et des pièces de théâtre ».
1 9 6
ment réprimé par les forces de l’ordre nigé-
rianes.
Pour une paix durable en pays Ogoni, 1 9 4 2
Shell doit changer d’attitude : nous trai-
ter comme des êtres civilisés et non nous
exploiter, a encore déclaré le porte-parole 8 4
du Mosop.
Le mouvement non-violent avait été fondé 3 8 9 6
par Ken Saro-Wiwa en 1993, du temps de la
dictature du général Sani Abacha, pour 4 6
dénoncer la pollution du delta du Niger par
les grandes compagnies pétrolières étran- 3 1 5 7
gères. Pour les Ogoni, il était clair, après la
pendaison deux ans plus tard de leur leader, 5 4
que la multinationale anglo-néerlandaise et
le régime militaire avaient partie liée. Shell a
pour sa part toujours nié toute collusion avec 1 4 7 2
la dictature du général Abacha pour proté- Solution
ger ses intérêts pétroliers en pays Ogoni. page 11 2 7 6 9
Icra International

NOUVEAU REGARD
WWW.LAGRANDEEPOQUE.COM
►Chronique d’un observateur du 7
Du comique au tragique au cinéma en passant par l’humour
L
e cinéma italien d’antan revient sur
les écrans. L’été est sans doute une
occasion de retrouver des œuvres,
un moment oubliées, qui ont fait rêver des
générations entières.
Ce cinéma avait atteint des sommets
avec Roberto Rossellini, Voyage en Ita-
lie (1953) - le spécialiste du documentaire
néoréalisme qui avait développé son art
en l’intégrant dans ses fictions -, Visconti le
magnifique - l’esthète à la finesse à fleur de
peau - et Pasolini, le conteur de fables aci-
des pour bousculer la société immobile dans
ses certitudes. Dans Théorême (1968), il
excelle. Vittorio de Sica, l’artiste jusqu’au
bout des ongles et son magnifique Le jar-
din des Finzi-Contini (1971) et Le Voleur
de Bicyclette (1948) ont révolutionné le
cinéma mondial.
Le cinéma italien, clé du
prestige
Ce n’est évidemment pas une histoire
du cinéma italien que nous cherchons ici
à évoquer, mais simplement un climat qui
a accompagné l’éclosion libératrice d’un
cinéma étouffé par des mœurs intouchables,
verrouillé par une bourgeoise sclérosée par
son histoire, endormie sur les lauriers de la
certitude. Rome était lointaine, mais le vent
de son histoire soufflait en souvenir. Les
studios de cinéma Cinecittà, à neuf kilomè-
tres du cœur de Rome, avaient longtemps
tourné des péplums pour renforcer un passé
qui animait l’histoire et renforçait le conser-
vatisme.
La Dolce Vita et la comédie
italienne
Une armée de cinéastes ont tourné en
dérision les institutions, les mœurs et ont
donné leurs lettres de noblesse à la comédie
italienne. Parmi les plus talentueux, citons
Dino Risi et Les Monstres (1964), Les
nouveaux Monstres (1978), Une poule,
un train et quelques monstres (1969), Le
Fanfaron (1963).
Ferreri et le cinéma naturel
Marco Ferreri, auteur de La Grande
Bouffe (1973), « l’authentificateur » du
cinéma italien, est le réalisateur qui ne vou-
lait pas introduire de trucages dans ses
films et ne voulait jamais abîmer ses ima-
Instant terrestre www.instanterrestre.com
Rideau de la pensée
Après la pluie incessante liée à la mousson et dans la touffeur tropicale, le sol imbibé libère son humidité
dans un lambeau de brume. C’est alors que la forêt dense du Tonkin, au Vietnam, se pare d’un voile coton-
neux, comme par pudeur, laissant cette impression agréable et légère d’avoir levé son intimité. Prenons soin,
comme la nature, de vivre d’instants présents car notre esprit est trop souvent envahi de souvenirs et préoc-
cupé par l’avenir. Nous sommes alors incapables de goûter la simplicité du monde alors qu’elle est toujours
présente derrière le rideau de la pensée.
La Grande Époque
UN REGARD NOUVEAU SUR UN MONDE EN ÉVOLUTION
e
ges par des effets spéciaux qui pourriraient
la vie réelle et sa représentation cinémato-
graphique.
Il ne faut pas oublier le film d’Ettore Scola
qui a l’art de pointer les détails sordides
qu’entraîne un aveuglement des institutions
sur la pauvreté qui enrichit la mafia plutôt
que de soutenir ses concitoyens en diffi-
culté. Cela mène vers une famille mutante
qui se nourrit de restes dans Affreux, sales
et méchants (1976). Ettore Scola réalise un
film marquant avec Nous nous sommes
tant aimés (1974).
Le cinéma italien est naturel-
lement politique
La réalité angoissante mais humoristique,
à un point jamais atteint, est de retour avec
ce souffle que dégage Le déjeuner du 15
août (2009) de Gianni Di Gregorio.
Le cinéma italien est un cinéma extrê-
mement efficace dans le domaine politique.
Avant même les années 50, il avait compris
l’enjeu de l’image face à un pouvoir qui pei-
nait à s’acheminer vers la démocratie. Très
vite en Italie le théâtre puis le cinéma, en
cheminant par le mime, sont devenus une
force de contestation contre le pouvoir.
Le cinéma politique avec Main basse sur
la ville (1963) de Francesco Rosi a fait bou-
ger les politiques prenant conscience de l’in-
telligence et de l’agilité d’un peuple qui s’était
réveillé d’un long sommeil.
Dans le même ordre d’idée la mafia est
toujours présente dans les esprits, même si
l’Opération « mains propres » n’a été que de
courte durée. Elle a pourtant créé la panique
dans le milieu des repentis, Gomorra (2008)
de Garrone, et dans celui de la corruption
des hauts fonctionnaires avec Il Divo (2008)
de Paolo Sorrentino.
Peut-on sérieusement oublier un homme
comme Federico Fellini sans lequel le
cinéma italien n’aurait pas connu un succès
aussi prestigieux ?
Avec La Dolce Vita (1959) – Anita
Ekberg, Anouk Aimée et Marcello Mas-
troianni – l’humour et le détachement des
conventions est parvenu à un niveau jamais
atteint. Un chroniqueur à la suite d’une dis-
pute avec sa maîtresse se mêle à Rome à
un milieu aristocratique. Fellini exprime sa
soif de changer son univers afin de créer
des œuvres.
Texte et photo de Stéphane Cabaret
EpochTimes.com
Le cinéma italien n’est pas prêt de quitter
les écrans, non seulement il est inventif, fin,
créatif mais aussi et surtout indispensable
grâce à ce ton inimitable de sincérité et de
détachement des contingences matérielles.
L’humour de Woody Allen
est une denrée indispensa-
ble
Whatever Works (2009), Vicky Cristina
Barcelona (2008) : de la légèreté sexuelle
attachée à la séduction et au faste des cou-
leurs et des environnements. Le retour d’un
grand metteur en scène se fait par le passé,
c’est-à-dire à reculons. Où serions-nous si
nos histoires étaient effacées ?
Les films de Woody Allen sont d’une
nécessité absolue pour qui veut rythmer
sa vie réflexive. Whatever Works confirme
les attentes. Il a une capacité d’abord à se
renouveler d’un film à l’autre, puis de se pla-
cer dans un contexte cinématographique
encombrant et incohérent, mais c’est la règle
de l’art pour qui veut montrer ses œuvres.
Là, Woody Allen ressort un scénario qu’il
a écrit une trentaine d’années auparavant et
qu’il avait mis de côté. En ouvrant un tiroir, il
a pris conscience de cette pépite qu’il pou-
vait utiliser en l’améliorant par de nouvelles
expériences. Depuis quarante ans, Woody
Allen fait ses films, et comme le cycle des
saisons, apparaissent de nouvelles histoires
qui nous font nous interroger sur le déroule-
ment nonchalant de notre vie...
Larry David, comique à la
télévision américaine
Larry David, comique de la même ori-
gine que Woody Allen, de la même école
d’humour new yorkais, joue le rôle de Boris
Yellnikoff qui, divorcé depuis longtemps vit
comme un célibataire endurci et rencon-
tre une jeune fille démunie qui s’installe
chez lui. Si le film avait été réalisé plus tôt,
Woody Allen aurait pu jouer le rôle. C’est
Larry David qui a débuté sa carrière assez
tard. Comique stand-up à la télé, il crée sa
propre émission qui en est à sa sixième sai-
son, Larry et son nombril. Depuis Scoop
(2006) Woody Allen collabore avec Larry
David. Il faut noter qu’il avait déjà joué dans
les films de Woody Allen, le grand Strom-
bini dans Scoop (2006), Radio Days (1987)
et New York Stories (1989). Whatever
Works est en réalité une sorte de prolonge-
ment du film fondamental de Woody Allen
qui lui a fait opérer un changement radi-
cal dans ses films : Annie Hall (1977). En
effet, il n’hésite pas à prendre les specta-
teurs comme témoins afin de parfaire son
œuvre et tenter de distribuer un peu de bon-
heur, si simple selon lui à attraper, comme
un papillon avec un filet où comme on cueille
une rose. Dans La Rose pourpre du Caire
(1984) le spectateur intègre le film et devient
lui-même acteur. Il semblerait que Woody
Allen ne se contente plus de ses acteurs
pour jouer ses films, il veut utiliser désor-
mais les spectateurs pour participer à son
bonheur de créateur.
Bancs publics ou rumeurs
Bruno Podalydès veut imiter Woody
Allen, empruntant des acteurs connus pour
les faire participer à ses films. Avec Bancs
publics (2009) Podalydès boucle son pro-
jet de réaliser une trilogie versaillaise qu’il
avait commencée avec Versailles rive gau-
che (1992) et Dieu seul me voit (Versailles
Chantier) (1998).
Dans Bancs publics, les situations
incongrues et absurdes rivalisent avec de
simples rencontres. L’étincelle fait parfois
des dégâts : explosions dans les supermar-
chés et sourires ironiques ravageurs. Poda-
lydès, qui utilise encore et heureusement
son frère Denis, que l’on avait vu en scé-
nariste dans Laissez-passer (2002) de Ber-
trand Tavernier, est excellent.
Dans une entreprise versaillaise, les
employés qui se répandent en rumeurs
les uns sur les autres aperçoivent sous la
fenêtre d’en face une inscription « homme
seul ». Tous jasent sur cet événement, veu-
lent en savoir plus et envoient une déléga-
tion de femmes menée par Florence Muller
pour tirer au clair cette affaire qui se répand
comme une traînée de poudre. Défilent les
voisins : Julie Depardieu, Micheline Dax,
Thierry Lhermitte. Le plaisir de ce film vient
aussi du fait que Podalydès nous fait effec-
tuer un voyage au pays de la dramaturgie :
Michel Aumont, Claude Rich, Vincent Elbaz,
Mathieu Amalric, Chiara Mastroianni, Benoît
Poelvoorde, Catherine Deneuve, Hyppolyte
Girardot et d’autres encore défilent.
En somme Bancs publics ce sont des
rumeurs avec des sketchs plus ou moins
bien agencés où le plaisir n’est pas si loin
lorsqu’on aime les acteurs. C’est un film sur
l’importance de l’acteur.
Dillinger et la dépression
Public Enemies (2009) de Michaël Mann
avec Johny Depp et Marion Cotillard conte
l’histoire de l’assassinat de Dillinger (1903-
1934).
Le réalisateur prend quelque liberté avec
la réalité. Il s’intéresse d’abord à la mytho-
logie du personnage qui transporte une
aura exceptionnelle. Le cinéma de gangs-
ter a été modelé fermement par l’apport de
ce héros, plus positif que négatif. Dans l’es-
prit de nombre de spécialistes et même du
public, Dillinger a voulu ressembler à Robin
des Bois en prenant aux riches pour donner
aux pauvres, par le biais des banques. Mais
de la part de Dillinger, c’était compter sans
la férocité des cowboys qui avaient massa-
ÉDITION 160
16 – 31 JUILLET 2009 • BIMENSUEL
cré les Indiens pour leur prendre leurs terres
et prostituer leurs enfants. Cette cruauté va
être mise au service, non pas de la justice,
mais du pouvoir, en particulier médiatique.
Se faire élire pour faits d’arme fonctionnait
même si les autorités locales n’approuvaient
pas les méthodes de justice utilisées par les
justiciers du révolver. La mise en scène est
efficace et évolue dans des décors splendi-
des qui illustrent une authenticité que l’on
aurait du mal à mettre en doute.
Sauf que Babyface Nelson est mort qua-
tre mois après une cavale en automobile qui
a pris fin avec les mêmes policiers assas-
sins de Dillinger.
Le film se situe pendant la grande dépres-
sion, à l’époque de Les Incorruptibles
(1987). Il faut revoir le film de Brian de Palma
et la série culte avec Robert Starck.
Bonnie and Clyde (1967) d’Arthur Penn
évoquait l’histoire d’un jeune homme qui sort
de prison et s’en va avec une jeune ser-
veuse de bar braquer des banques (War-
ren Beatty, Faye Dunaway et Michael J.
Pollard). D’autres versions très brillantes
ont été réalisées dont celle de Raoul Walsh
La Grande Evasion (High Sierra) (1941),
avec Humphrey Bogart, film plus proche de
l’histoire réelle de Dillinger qui est devenu un
psychopathe dans Dillinger (1945) de Max
Nosseck. Il devient un chef autoritaire dans
la version de 1957, L’Ennemi public (Baby
face Nelson) de Don Siegel avec Mickey
Rooney et Carolyn Jones. Enfin il ne faut
pas négliger pour faire bonne mesure le film
excellent de William Wellman The Public
Enemy (1931) avec James Cagney et Jean
Harlow.
Au revoir Karl Malden
Ce n’est pas très agréable de terminer
une rubrique sur une disparition, mais c’est
avec honneur que je rappelle à la mémoire
Karl Malden, acteur américain décédé le 1er
juillet 2009 à l’âge de 97 ans à son domi-
cile de Brent Wood à Los Angeles. Il était
né à Chicago d’une mère tchèque et d’un
père serbe. Mladen George Sekulovich
avait délaissé son travail d’ouvrier dans une
usine d’acier où il s’ennuyait pour s’inscrire
à un court d’art dramatique. Il avait entendu
des rumeurs selon lesquelles les femmes
tombaient comme des mouches dans les
bras des acteurs. Il ne voulait pas passer à
côté de l’amour alors il s’est accroché et est
devenu un excellent acteur. À peine débar-
qué à New York, il fait la connaissance d’un
metteur en scène de théâtre, Elia Kazan, qui
s’occupera de lui. Grec, il avait souffert de la
répression turque avant d’immigrer comme
Malden. Il le fit donc entrer dans sa troupe
en même temps que Marlon Brando, Julie
Harris, James Dean, Kim Hunter. Il avait
un visage un peu en désaccord avec les
poncifs esthétiques. Il disait qu’il était un
être humain et non un cliché qui traînait
dans toutes les séries et films fabriqués en
série. Il jouera en 1951 dans Un Tramway
nommé désir film de Tennessee Williams,
Sur les quais (1954) et Baby Doll (1956)
films d’Elia Kazan. En 1961, il jouera dans
La Vengeance aux deux visages film de
Michael Laurence. A partir de 1972, il fera
même de la télévision où il interprètera l’ins-
pecteur Mike Stone dans la série Les rues
de San Francisco de Quinn Martin.
Douceurs cinématographi-
ques au forum des images
Terminons par une bonne nouvelle :
pendant le mois de juillet 2009 nos lec-
teurs peuvent se rendre au forum des ima-
ges, gratuitement, pour regarder des films
toute la journée. Vous pouvez obtenir un
petit salon pour visionner des films à plu-
sieurs parmi un choix de six mille films. Dites
que vous venez de notre part et vous serez
bien reçu.
ALAIN PENSO
Pour en savoir plus :
Adresse : Forum des images
métro Les Halles Place Carrée http://
www.forumdesimages.net/fdi/Acces-et-
Horaires
10 Environnement
Une véritable ruée s’engage : des pays riches achètent les quotas de pêche des pays pauvres, voire leurs terres agricoles et ceci à l’échelle mondiale.
La surexploitation des pêches continue
L
es pêches constituent non seu-
lement une source de protéines
animales pour la consommation
humaine, mais elles offrent également
des emplois à quelque 200 millions de
personnes à travers le monde. Un rap-
port publié par l’Organisation des Nations
Unies pour l’alimentation et l’agriculture
(FAO) prévient cependant que 52 % des
stocks mondiaux de poissons sont plei-
nement exploités, et 28 % surexploités
ou déjà épuisés. Aujourd’hui, une étude
financée par l’UE et publiée dans la revue
Plos Biology offre aux lecteurs un aperçu
de l’impact des pratiques de gestion sur la
viabilité des pêches.
Analyses à partir des don-
nées de 1.200 experts des
pêches
Les résultats de l’étude s’inscrivent
dans le cadre du projet ECOFUN («Ana-
lysis of biodiversity changes on structural
and functional properties of marine eco-
systems under cumulative human stres-
sors»)1, financé à hauteur de 212.125
Paul Watson, le pirate au bon coeur
P
aul Watson est le fondateur, depuis
1977, de Sea Shepherd Conserva-
tion Society, une des associations
de protection de la biodiversité les plus
controversées au monde. Il fut cofonda-
teur de Greenpeace qu’il a quitté pour
vouer son temps à la protection de la vie
marine. Décision prise lors d’une rencon-
tre avec un cachalot qui se laissait glis-
ser dans l’eau pour mourir. Un échange
de regards de compassion de quelques
secondes a changé la vie de Paul pour
toujours qui a dès lors fait le vœu de défen-
dre toute sa vie les créatures marines.
Un pirate au grand cœur
Paul Watson traque, depuis trente
ans, les baleiniers dans toutes les mers
du globe. Ce capitaine de navire engagé
dans la lutte pour la protection des cétacés
en mer est un militant écologiste canadien,
âgé de 58 ans. C’est à bord du Steve Irwin,
où bat le pavillon à tête de mort des pira-
tes, qu’il écume les océans contre le bra-
connage en mer. Au cours de ses actions,
il s’est spécialement attaqué à des navires
baleiniers japonais illégaux dans l’Antarc-
tique afin de les éperonner. Il a approché
des dizaines de navires, et son équipage
a sabordé neuf bateaux baleiniers. L’opé-
ration Musashi lancée par l’association en
juin 2007 a pour but de mener une chasse
active contre la chasse à la baleine en
Antarctique.
Une action écologique et
surtout non violente
Son combat reste écologique et non
violent. L’association Sea Shepherd Con-
servation Society refuse d’être confon-
due à un mouvement de révolte, mais
entend bien garder l’application des lois
de protection de la mer approuvées par
les Nations unies. Il est intéressant de
savoir que, depuis la fondation de l’as-
sociation en 1977, jamais aucun de ses
membres n’a été condamné par la justice
ni n’a blessé qui que ce soit, car Paul Wat-
son n’utilise pas d’armes. Son arsenal ?
Des boules puantes et du beurre ranci,
premières batailles non toxiques de l’his-
toire ! Par contre, le capitaine Paul Watson
www.lagrandeepoque.com
euros au titre de l’action Marie Curie2.
Cette étude s’est penchée sur l’effica-
cité des régimes de gestion des pêches
mondiales en se basant sur des analy-
ses de 1.200 experts des pêches et en
les évaluant en association avec des don-
nées relatives à la viabilité de la produc-
tion des pêches. D’après le rapport, la
majorité de ces régimes ne sont pas à la
hauteur des normes établies par les orga-
nisations internationales. La transposition
transparente de participation de conseils
scientifiques en politiques aide à détermi-
ner la viabilité des pêches.
Aucun pays dans le monde
ne présente de particularité
satisfaisante
« Le résultat le plus surprenant de
notre étude est sans doute que pas un
seul pays dans le monde ne présente des
attributs de gestion satisfaisants », expli-
que le Dr Camilo Mora de l’université Dal-
housie au Canada et de l’université de De nombreuses initiatives
Californie à San Diego aux États-Unis. sans efficacité
« Ainsi, déterminer quels pays présentent Le Dr Mora fait remarquer que les
Paul Watson fondateur de l’association Sea Shepherd Conservation Society.
et son équipage d’irréductibles ont fait per-
dre plusieurs millions de dollars aux flottes
baleinières du Japon, de la Norvège et de
l’Islande, qui, elles, ne cessent de violer le
moratoire international sur la pêche com-
merciale des baleines.
Des baleines en voie de
disparition
Il existe des baleines franches, des
baleines à bosses, des baleines bleues. Il
existe à peu près treize espèces de balei-
nes à fanons dont sept sont menacées de
disparition. Entre 1925 et 1975, en 50 ans,
un million et demi de baleines ont déjà été
tués.
Pour le capitaine, le métier de la pêche
est actuellement l’activité humaine la plus
dévastatrice pour l’environnement. La
pêche illégale vide les océans et menace
d’extinction de nombreuses espèces de
poissons en rompant les équilibres natu-
rels. Plus intolérable encore, selon Paul
Watson, une bonne partie du produit de
la pêche finit en nourriture pour animaux
d’élevage dans les pays riches. « Ainsi, les
cochons sont devenus les plus gros pré-
de bons ou de mauvais résultats est une
question dont la réponse dépendra de l’at-
tribut spécifique examiné. »
Le Dr Mora poursuit en déclarant que
les pêches du monde entier sont l’un des
atouts naturels les plus importants de l’hu-
manité. « Malheureusement, une exploi-
tation excessive de la pêche a mené au
déclin ou à l’épuisement de nombreux
stocks », ajoute-t-il.
Pour sa part, le co-auteur de l’étude
professeur Boris Worm de l’université
Dalhousie ajoute : « Les conséquences
de la surexploitation des pêches dans le
monde sont inquiétantes non seulement
pour la sécurité alimentaire et le déve-
loppement socio-économique, mais éga-
lement pour les écosystèmes océaniques.
Nous comprenons aujourd’hui que la sur
pêche peut aussi mener à l’érosion de la
biodiversité et de la productivité des éco-
systèmes. »
dateurs des mers », souligne le capitaine.
Les gouvernements continuent à soutenir
la pêche illégale, particulièrement la pêche
à la baleine. Alors que faut-il faire ? Arrê-
ter de manger des poissons ? Selon Paul
Watson, chacun d’entre nous détient un
pouvoir énorme, il suffit pour cela d’éveiller
sa conscience. C’est une des raisons pour
lesquelles Sea Shepherd accueille à bord
de sa flotte tous les volontaires qui en font
la demande. Les bénévoles français sont
particulièrement bienvenus.
Rencontre avec Paul Watson à Saint-
Jean-Cap-Ferrat au mois de juin 2009,
lors du festival Courant d’ère – dont il est
le président d’honneur – de l’association
SOS Grand Bleu avec laquelle il collabore
depuis 20 ans.
La Grande Époque (LGÉ) : Rencon-
trez-vous des obstacles sur les eaux
territoriales ?
Paul Watson (P. W.) : Si nous nous
trouvons dans les eaux territoriales, nous
sommes en partenariat avec les gouverne-
ments, mais on travaille surtout en haute
mer. Sea Sherperd et Galápagos tra-
vaillent en partenariat avec la police fédé-
16 – 31 JUILLET 2009 ●
diverses conséquences socio-économi-
ques et écologiques relatives au déclin
des stocks halieutiques sont sources de
préoccupation partout dans le monde.
Diverses initiatives ont été mises en place
afin de s’assurer que « les pays amélio-
rent leur gestion des ressources mari-
nes », déclare-t-il.
« Parmi ces initiatives, citons le code
de conduite des Nations unies pour une
pêche responsable, la convention sur la
diversité biologique et l’évaluation des
écosystèmes pour le millénaire », déclare
le Dr Dora. « Bien que ces initiatives aient
été avalisées par la plupart des gouverne-
ments, aucune évaluation mondiale de la
mise en application et de l’efficacité réel-
les de ces idéaux n’a eu lieu. »
Les pays pauvres vendent
leur droit de pêche
Les pays riches disposent de capacités
scientifiques et coercitives supérieures à
celles des pays plus pauvres. Cependant,
ils font face aux répercussions négatives
des subventions excessives et d’une plus
Dan Levine/Getty Images
rale et les gardes du parc national. Mais en
Antarctique, c’est nous la loi. Vous savez
les îles Galápagos sont classées patri-
moine mondial de l’humanité à l’Unesco,
déclarées patrimoine en danger en 2007
et plus de 300.000 requins sont tués cha-
que année.
LGÉ : Les gens pays prennent-ils
conscience de votre combat ?
P. W. : En fait, cela dépend. Par exem-
ple, en Australie, nous avons un soutien
extraordinaire, les gens ont bien com-
pris l’approche et on a même du soutien
finalement en Islande, en Norvège et au
Japon, car il y a des personnes bénévo-
les avec nous.
LGÉ : La méthode de se mettre entre
les harpons et les baleines est votre
idée, non ?
P. W. : Oui, il est vrai que j’en suis arrivé
là. Car, même si nous nous trouvons au
milieu, cela ne les empêche pas de con-
tinuer à harponner. Je ne peux rester sur
mon bateau tout en restant impuissant, il
n’y a que par l’action que les choses peu-
vent prendre une importance. Je suis con-
vaincu que les baleines et les dauphins Pour en savoir plus : www.seashepherd.fr
La Grande Époque
Donald Miralle/Getty Images
grande capacité de pêche. Ce dernier fac-
teur est dû à la modernisation de leur
flotte nationale. Les pays les plus pau-
vres manquent de capacités scientifiques
et coercitives et disposent d’une capacité
de pêche moins importante. Par ailleurs,
ils ont vendu leurs droits de pêche de
manière disproportionnée à d’autres pays
ne souffrant pas de cet inconvénient,
montre l’étude.
À l’échelle mondiale, les flottes étran-
gères de l’UE, des États-Unis, du Japon,
de Corée du Sud et de Chine sont les
plus importantes en termes d’activités
de pêche.
Cordis Nouvelles
1
l’analyse des changements de la bio-
diversité sur les propriétés structurel-
les et fonctionnelles des écosystèmes
marins sous facteurs de stress cumula-
tif de l’homme.
2
bourse internationale destinée à la for-
mation de chercheurs en début de car-
rière. Elle est accordée pour une durée
maximale de 3 ans.
sont plus intelligents que les humains. Ils
ont un cerveau plus grand et plus com-
plexe. Ils ont cette intelligence écologique
de vivre en harmonie. Nous, les humains,
nous avons tendance à croire que nous
vivons tout seul. Notre survie dépend de
ces espèces. Or, nous sommes en train
d’assister à la destruction des océans et,
si les océans meurent, nous mourrons,
c’est aussi simple que cela.
LGÉ : Votre vie est-elle souvent en
danger ?
P. W. : Oui, bien sûr ! On m’a tiré des-
sus plusieurs fois. C’est assez dangereux,
je l’avoue. Je porte un gilet pare-balles.
Nous agissons souvent dans une région
du globe qui ressemble au Far West, il n’y
a pas de loi. C’est une question trop poli-
tique, alors personne ne veut procéder à
une enquête. Quand on me pose la ques-
tion : « Pourquoi risquez-vous votre vie
pour protéger les baleines ? », cela me fait
une sensation bizarre chaque fois, car on
ne demande jamais à un soldat américain
pourquoi il risque sa vie en Irak pour proté-
ger des puits de pétrole ? Vous ne trouvez
pas cela bizarre, vous ?
LGÉ : Quel est votre prochain grand
projet ?
P. W. : Notre prochain objectif est de
repartir en Antarctique. Le job, c’est six
mois en mer par an pour contrer les pré-
dateurs des baleines, requins, dauphins,
phoques et même concombres de mer.
Bientôt, nous allons nous occuper du thon
rouge de Méditerranée.
LGÉ : La liste d’attente est-elle lon-
gue pour faire partie des bénévoles ?
P. W. : En fait, la place sur le bateau
est limitée, mais nous sommes toujours
à l’écoute et nous essayons d’impliquer
le plus de gens possible. Pas besoin de
s’y connaître, nous sommes là pour vous
entourer. Nous recrutons des personnes
du monde entier. Sur chaque campagne,
nous avons huit à dix nationalités diffé-
rentes.
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12 Outre-mer www.lagrandeepoque.com 16 – 31 JUILLET 2009 ● La Grande Époque

Jean Kréber, un peintre féru de nature guyanaise

Du 14 novembre au 14 décembre 2008, Jean Kreber présentait ses aquarelles dans la galerie d’art de l’office de tourisme. Figure connue de Saint-Laurent du Maroni, l’artiste
n’est plus à présenter. Jean Kreber est un passionné de voyages et c’est cette passion qui le conduit en Guyane en 1980. Lors de ce premier contact avec le département,
il est émerveillé par la beauté immense et sauvage de cette nature restée vierge en grande partie. Il s’y installe définitivement en 1985 et se consacre quelques années plus
tard à sa deuxième passion, l’aquarelle. Paysages, natures mortes, scènes de la vie quotidienne, portraits... l’artiste exprime toute sa sensibilité sur la toile.

L
GE : Quand avez-vous commencé gnez la Guyane ?
la peinture ? Jean Kreber : Et oui, que la Guyane !
Jean Kreber : Très jeune, j’avais Je peins et je fais aussi de la gravure, de
14-15 ans ! la peinture sur verre. Je peins des pay-
LGE : Qu’est-ce qui vous a donné sages, des scènes de la vie de tous
envie de peindre ? les jours : le marché, le carnaval aussi.
Jean Kreber : J’aime la nature, les J’aime les couleurs, surtout les « toulou-
paysages, les plantes, les gens... lous² », qui sont si bien habillées.
LGE : Avez-vous été inspiré par des LGE : Vous êtes un artiste autodi-
peintres célèbres ? dacte ?
Jean Kreber : Oui, je dirais Gauguin, Jean Kreber : Oui, c’est venu tout seul,
Renoir, Van Gogh sont mes peintres pré- un cadeau du Bon Dieu (rires), enfin, j’ai
férés. quand même pas mal travaillé ! Dans la
LGE : Vous avez beaucoup voyagé famille, nous sommes tous un peu artis-
? tes : mon frère fait de la gravure en
Jean Kreber : C’est mon service mili- France. Au départ nous étions quatre
taire au Maroc et en Algérie qui m’a donné frères et nous savions tous dessiner. Et
le goût du voyage. J’ai dit : « Un jour, je puis il y a mon fils, qui est le chanteur du
quitterai la France » car cela m’a beau- groupe Sweet Way. La Grande Epoque
coup plu. Puis j’ai tourné en France, j’y ai LGE : Ils ont d’ailleurs reçu un prix
travaillé un peu et je suis récemment ? Gravures sur verre.
parti en Australie comme « Je peins ce que Jean Kreber : Oui, ils La Grande Epoque
immigrant. En Australie, ont obtenu le prix Lindor LGE : Où peut-on admirer ou acheter ▲ Le Camp de la transportation à Saint-Laurent du Maroni.
il fallait d’abord que je je vois avant tout, du meilleur duo de l’an- vos peintures ?
gagne ma vie. Je ne par- je n’invente pas, je née ! Jean Kreber : J’expose parfois à Saint- ▼ Pirogues sur le fleuve Maroni.
lais pas la langue. J’y ai LGE : En 25 ans, avez- Laurent du Maroni dans la galerie d’arts
très peu peint et au bout crée quand même vous remarqué des de l’office du tourisme. Sinon, on peut voir
de deux ans, j’ai été un puisque je copie changements dans les quelques unes de mes peintures sur le
peu découragé. Alors je paysages, la vie des site www.myspace.com/jeankreber.
suis parti en Calédonie ce que je vois. » gens ?
où je suis resté 15 ans. Jean Kreber : Les pay- ¹ Maripasoula est la plus grande com-
Là, j’ai vraiment commencé à peindre, sages ne changent pas, c’est juste le pro- mune de France située sur le fleuve
d’ailleurs à la fin, je ne faisais que ça… grès, le modernisme, plus de maisons, de Maroni. Ce fleuve amazonien qui est
Je peins ce que je vois avant tout, je n’in- routes... bordé d’autres petites communes consti-
vente pas, je crée quand même puisque LGE : Et les animaux ? tue la frontière naturelle entre la Guyane
je copie ce que je vois. Jean Kreber : J’aime bien mais j’en française et le Suriname.
LGE : Et la Guyane, comment y êtes- fais une peinture naïve, donc je laisse ce ² Les touloulous sont des femmes
vous arrivé ? type de peinture aux peintres animaliers . déguisées avec des costumes chamar-
Jean Kreber : La première fois, c’était LGE : Pourquoi de l’aquarelle ? rés qui les cachent totalement, ne laissant
en 1979. Je suis allé à Maripasoula¹, Jean Kreber : Je suis très sensible paraître la peau. Ce sont elles qui invitent
j’étais émerveillé de voir cette nature à l’aquarelle. On ne trouve guère mieux les hommes à danser dans les fameux
grandiose, et j’ai dit « je reviendrai ». pour exprimer les émotions, et surtout bals touloulous qui sont organisés pen-
Nous étions venus pour deux mois. En c’est très rapide, ça doit être terminé en dant toute la période carnavalesque.
1985, j’y suis revenu et cela va faire 25 une ou deux heures. Pour la toile, il faut FRÉDÉRIQUE PRIVAT
ans. prendre son temps, mais j’en fais quand LA GRANDE EPOQUE
LGE : Donc, depuis 25 ans, vous pei- même un peu. GUYANE
La Grande Epoque

Le gwo ka Un été aux couleurs du flamboyant

L L
angage musical et corporel créé par e mois de juin en Guadeloupe voit La route des Mamelles, qui traverse sont très répandus mais on peut aussi en
des esclaves au XVIIIe siècle, le gwo ka la floraison d’un des arbres les plus la Basse-Terre et permet de rejoindre la voir avec des fleurs jaunes. Il existe une
est un ensemble de rythmes et de dan- spectaculaires du monde. Sa pro- Côte sous le vent, est réputée pour son variété plus rare originaire d’Amérique du
ses qui représentait an tan lontan le moyen fusion de fleurs aux couleurs rouge ou allée de flamboyants qui fait le bonheur Sud et connue sous le nom de Jacaranda
de communication le plus subtil de l’époque. jaune annonce l’approche des grandes des touristes. (jacaranda mimosifolia). Sa floraison de
Ce langage permettait aux esclaves d’ex- vacances. Cependant, il est déconseillé de le couleur bleu lavande lui vaut souvent le
primer entre autre leurs souffrances. Originaire de Madagascar, le flam- planter trop près d’une maison en rai- nom de flamboyant bleu.
De nos jours, ce sont des rassemble- boyant (Delonix regia) peut atteindre 10 à son de son système racinaire très étendu L’ombrelle rougeoyante et lumineuse
ments d’individus qui chantent et dansent. 15 mètres de hauteur et est utilisé la plu- risquant d’endommager les construc- du flamboyant contraste avec la fraîcheur
Ces groupements culturels font partie inté- La Grande Époque part du temps comme arbre ornemental tions. Le flamboyant offrira une ombre et la pénombre qui à sa base est propice
grante de la vie guadeloupéenne au son des Un ka en préparation et un ka en raison de sa forme et de l’abondance très appréciable durant les grosses cha- au calme et à la méditation.
tambours appelés ka. terminé à l’atelier Gozié Aw (route de ses fleurs magnifiques. On le trouve leurs de l’été. MARION CASTELLI
de la Riviera, Gosier) aussi aux abords des routes car il est très En Guadeloupe, les flamboyants aux LA GRANDE EPOQUE
Il existe deux sortes de ka. résistant à la pollution atmosphérique. fleurs rouges de différentes nuances GUADELOUPE
Le boula. C’est un gros tambour au son
grave couché à terre. Le joueur monte des-
sus à califourchon et frappe les rythmes de
base.
Le maké. C’est un tambour plus petit avec
un son plus aigu. Le marqueur le tient entre
ses jambes et est assis sur un tabouret. Il
accompagne les danseurs. Un bon mar-
queur doit être capable d’anticiper sur la
façon dont les danseurs vont engager leurs
prochains rythmes.

Les sept rythmes de gwo ka sont kala-

dja, graj, woulé, menndé, léwoz, padjanbel
et tumblak.
Le woulé est un rythme sur trois temps
associé au travail dans les champs.
Le kaladja est un rythme lent et triste joué
aux veillées mortuaires
Le tumblak est un rythme de fête, pétillant
et rapide. La Grande Époque

Le groupe lévé ô ka lors d’une

N’oublions pas les chantè (chanteurs), et prestation dans un centre
les répondè (les choeurs) chantant souvent commercial.
les misères vécues.
Après plusieurs années d’interdiction, ces ques de fabrication sont en général gardées
soirées font de plus en plus d’adeptes toutes secrètes.
générations confondues. Un festival a main- Le gwo ka est comme un aphrodisiaque
tenant lieu chaque année durant la période pour l’âme du peuple. Aux premières frap-
estivale. pes, votre cœur chavire et vous êtes alors
Le ka trouve son origine dans un quart de transporté dans un monde brut sans fioritu-
tonneau servant à transporter de la viande et res, sans apparat, vrai...
autres matières premières. Il est fait de bois, JADE RÉNATA
de peau de cabris et de corde. Les techni- LA GRANDE ÉPOQUE GUADELOUPE
La Grande Époque ● 16 – 31 JUILLET 2009 www.lagrandeepoque.com Société 13
Suicides, malaise dans les prisons ?
Dix suicides de surveillants et 45 suicides de détenus depuis le début de 2009… des chiffres à la fois troublants et évocateurs de l’ambiance qui règne actuellement dans les
prisons.

A
u mois de mars dernier, un détenu
de la maison d’arrêt d’Angers con-
damné à une courte peine s’est
pendu dans sa cellule. Puis, un mineur de
17 ans s’est étranglé avec sa ceinture à la
maison d’arrêt de Moulins-Yzeure. Deux
jours plus tôt, c’est un détenu condamné
à une longue peine qui s’était pendu dans
sa cellule au centre de détention de Mont-
médy. Début mars, un prévenu de 45
ans se donnait la mort à la maison d’ar-
rêt d’Arras alors qu’il était en attente de
jugement.
A ce rythme, le chiffre de 115 sui-
cides recensés en 2008 devrait large-
ment être atteint, soit un mort tous les
trois jours. Pourtant, en mai 2008, l’ad-
ministration pénitentiaire croyait consta-
ter une « baisse des suicides en prison
depuis 2002 ». En réalité, mis à part une
chute notable en 2006 et 2007, le nombre
de suicides est stable depuis une dizaine
d’années. Mais ce nombre de suicides des
détenus reste inadmissible, puisque quasi
dix fois plus important qu’à l’extérieur.
Manque de place et augmenta-
tion du nombre des détenus
Une cause principale est le malaise
qu’entraîne la privation de libertés, mais
cela n’explique pas les suicides de sur-
veillants. Les 194 prisons de France
comptent actuellement 63.351 détenus
pour seulement 52.741 places opération-
nelles. On touche à l’épineux problème de
la surpopulation carcérale. Une promis-
cuité telle que les détenus n’ont aucune
intimité, même pour aller aux toilettes.
Ceci aggrave les relations humaines au
sein de l’établissement pénitentiaire,
créant conflits, violences et par là-même
désespoir... C’est donc le manque de
place qui expliquerait en partie le profond
malaise qui conduit des êtres humains,
privés ou pas de liberté mais évoluant
communément dans ces locaux, à ne plus
supporter de vivre…
Mais c’est aussi l’augmentation de près
de 25 % du nombre de personnes placées
sous écrou entre 2002 et 2008. En effet,
la durée moyenne sous écrou est passée
Les prisons françaises font actuellement face à une surpopulation qui n’est pas gérée par des moyens
humains, matériels et financiers nécessaires.
de 7,9 mois en 2002 à 9 mois en 2008.
Parallèlement, près de 75 % des person-
nes condamnées à de la prison ferme le
sont à des peines de moins de six mois,
tout cela conduisant à une augmentation
de cette population sans pour autant aug-
menter les moyens de les gérer.
Construire de nouvelles prisons
Depuis 2008, 12 nouvelles prisons ont
vu le jour en France mais ce n’est actuel-
lement pas suffisant pour désengorger
les établissements plus anciens. Le doc-
teur Louis Albrand, chargé d’un rapport
sur la prévention des suicides en pri-
son, dénonce la surpopulation carcérale
et réclame la construction de nouvelles
prisons. « La surpopulation crée un cli-
mat défavorable à une bonne prise en
charge sanitaire, sociale, éducative, du
détenu. Elle n’est pas favorable à la réin-
sertion. Donc la révolution pénitentiaire…
doit bien entendu commencer par la sup-
pression de la surpopulation. Et ne soyons
pas hypocrites, cela nécessite la construc-
tion de nouvelles prisons, plus modernes,
plus fonctionnelles, plus humaines, mieux
aménagées, et depuis le début de 2009,
plus à même de favoriser la réinsertion
sociale et professionnelle. »
Pour cela, le rapport se réfère à la loi
Chalandon de 1987 qui doit selon lui, être
réétudiée. Celle-ci a l’avantage de faire
appel à des capitaux privés et de soulager
l’État. De plus, la construction de nouvel-
les prisons créera des emplois en période
photos.com
de crise économique et elle seule, à son
avis, pourra mettre fin à la surpopulation
carcérale.
La longueur des délais de juge-
ment
Cependant, il semblerait qu’un autre fait
vienne se greffer à celui de la surpopula-
tion : celui des délais de jugement qui sont
parfois fort longs, puisqu’il y a un déséqui-
libre entre le nombre des dossiers à traiter
et le personnel judiciaire. Il faut noter que
la moitié des personnes qui mettent fin à
leurs jours n’ont pas encore été jugées,
et ce alors qu’elles ne représentent que
28 % de la population carcérale.
Le taux de suicide des prévenus est
ainsi deux fois supérieur à celui des con-
damnés. « Les moments à haut risque se
situent peu après l’incarcération, à cause
du choc, dans les moments qui entourent
le procès ainsi que lors des placements
en quartiers disciplinaires », explique
François Bès, coordonnateur de l’Obser-
vatoire International des prisons en Ile-de-
France. « Ces suicides sont une preuve
supplémentaire de la trop grande utili-
sation qui est faite de la détention provi-
soire. »
La prise en charge des détenus
« dangereux »
À cela, vient encore s’ajouter le pro-
blème de la prise en charge des déte-
nus dits « dangereux » qui se retrouvent
parfois en milieu carcéral ordinaire et qui
vont donc constituer une menace pour les
autres détenus. Par exemple, le meurtre
de ce jeune homme, égorgé par son codé-
tenu à la maison d’arrêt de Rouen, dans la
nuit du 10 au 11 septembre 2008.
Ce garçon de 26 ans, qui encourait
une peine légère (récidive de conduite en
état d’ébriété et port d’armes blanches), a
été mis en cellule avec un homme impli-
qué dans une affaire d’homicide, atteint
de troubles du comportement et qui avait
été placé à l’isolement en raison d’un com-
portement agressif envers ses codétenus.
Cette erreur fatale pose à nouveau le déli-
cat problème éthique des droits du détenu
car si la peine subie par un condamné est
l’enfermement et la privation de liberté,
une démocratie moderne se doit de garan-
tir l’intégrité physique de ses détenus.
En fin de compte, les prisons françai-
ses font actuellement face à une surpo-
pulation qui n’est pas adressée par les
moyens humains, matériels et financiers
nécessaires, entraînant alors un malaise
de la part des détenus mais aussi du per-
sonnel des prisons.
Mais en amont de cette augmentation
des cas d’emprisonnement ferme, ne fau-
drait-il pas tenter de comprendre les rai-
sons de la hausse des délits qui révèlent
plus qu’un simple malaise au sein de nos
sociétés occidentales ?
FRÉDÉRIQUE PRIVAT

Et si nous parlions retraite : 70 ans ?

Le chef de l’État annonce l’ouverture du chantier de grande réforme des retraites pour mi-2010. Les thèmes de débat préconisés tournent autour de l’âge de la retraite, de la
durée de cotisation et de la pénibilité. Ces mots nous renvoient à des références qui peuvent certes inquiéter les plus jeunes qui n’ont pas amorcé leur période d’activité pro-
fessionnelle, ou encore la grande majorité des demandeurs d’emploi, voire des chômeurs de longue durée : pourront-ils un jour prétendre à la retraite ?

D
ans notre société moderne française, un
homme vit en moyenne jusqu’à 76,7 ans et
une femme jusqu’à 83,8 ans. La part de la
population des plus de 60 ans par rapport à celle
des 20 à 59 ans, représentait 38 % de la popula-
tion française en 2000. Pour 2035, ce rapport est
estimé à 71 %. Ces chiffres importants traduisent
le taux de dépendance démographique : la portion
de la population qui perçoit les pensions de retrai-
tes sur celle qui contribue à leur financement. Plus
ce taux est élevé, plus le poids du financement
de ces retraites pèse sur la population des 20/59
ans. Notre système français, fondé sur le principe
de solidarité collective dit intergénérationnel, con-
siste en un financement par répartition : les actifs
cotisent pour les inactifs, ces derniers ayant déjà
cotisé durant leur période d’activité profession-
nelle pour les retraités des générations passées.
Les options du financement
Autre chiffre tout aussi important, le déficit chro-
nique de la sécurité sociale en général qui com-
prend la gestion de la branche vieillesse. D’où la
question chronique de son financement qui passe
par plusieurs facteurs : l’allongement de l’âge de
la retraite, l’augmentation des cotisations, la dimi-
nution des pensions de retraite. L’allongement de
l’âge de départ à la retraite permet d’enregistrer
l’augmentation des personnes pouvant cotiser et
la diminution de celles pouvant prétendre à une
pension de retraite.
Une autre démarche consisterait à augmen-
ter les cotisations prélevées, sans toucher à l’âge
du départ à la retraite. Mais très rapidement, en
tenant compte du taux de dépendance démogra-
phique, la population d’actifs aurait à gérer deux
générations de retraités. La troisième solution
consisterait à diminuer les pensions des retrai-
tés, mais cette dernière hypothèse reste pour le
moment une simple hypothèse car elle touche à
un domaine qui, au-delà de la solidarité, touche à
la prise en charge individuelle du financement des développement de l’éducation pour la santé font
retraites. Elle fait appel aux possibilités qui restent que les séniors bénéficient d’une bonne qualité
offertes à chacun de pouvoir souscrire une épar- de vie. L’espérance de vivre en bonne santé s’est
gne retraite, à titre individuel. Elle ne repose pas fortement allongée et c’est seulement vers 85 ans
sur la solidarité collective, base de la philosophie qu’apparaît une réelle dépendance qui demande
humaniste et socle de la sécurité sociale. souvent la prise en charge en établissement médi-
cosocial. Ces différents éléments sont intégrés au
La retraite, un concept récent débat sur l’âge du départ à la retraite.
Une approche bien technique pour un moment
de la vie, où chacun pourrait prétendre recevoir le Quel modèle adopter ?
fruit de son travail ou de sa contribution sociale. En Europe, voire dans les autres pays de
Car c’est bien de cela dont il s’agit. À une période l’OCDE, l’âge du départ à la retraite est plus tar-
de sa vie, l’individu, à sa manière, a contribué à dif. L’âge moyen du départ à la retraite est fixé à
la productivité nationale. Il appartient à la société 63 ans pour l’Union européenne. Certains pays
de prendre soin de tous ceux qui la composent. scandinaves, dont le Danemark, ont développé
A ce titre, à un âge défini, tous les le travail des séniors. Pour d’autres,
citoyens, ont droit à une pension qui comme l’Angleterre, ce travail sem-
devrait permettre une vie décente. Dans notre ble aller de soi.
La retraite telle que nous la con- société moderne Nous voyons que le débat de l’âge
naissons est un concept récent du française, un du départ à la retraite semble dépassé
milieu du XXe siècle. Auparavant, il homme vit en dans les autres pays. Ainsi en France
appartenait à chacun de préparer les selon le comité d’orientation des retrai-
conditions de l’arrêt ou pas de son moyenne jus- tes (COR) et la Mission d’évaluation
travail. Selon les conditions finan- qu’à 76,7 ans et et de contrôle de la sécurité sociale
cières de l’existence, l’entourage une femme jus- (MECSS), les pistes explorées se
familial, les personnes âgées béné- rapprochent beaucoup du modèle
ficiaient de conditions de vie plus ou
qu’à 83,8 ans. danois, avec un allongement effectif
moins précaires. Ainsi il était fréquent de l’âge de la retraite, mais une coti-
de voir plusieurs générations vivre ensemble : les sation et une pension retraite qui devrait préser-
grands-parents participant directement à la vie de ver le niveau de vie tant des séniors que de la
leurs petits enfants, les enfants prenant soin de population active. Alors que les différents sonda-
leurs parents. ges menés au niveau de la population montrent
De plus l’allongement de la durée de la vie que la majorité des Français privilégient le main-
ainsi que la qualité de cette dernière, ont marqué tien de l’âge du départ à la retraite et une augmen-
ces dernières années. Dans les années 1970, un tation des cotisations.
départ à la retraite était souvent synonyme de Notre système repose sur la solidarité collec-
décès, très peu de temps après l’arrêt de l’activité tive qui permet à tous de bénéficier de ce moment
professionnelle. À tel point que l’on laissait enten- privilégié où chacun peut prétendre à se retirer
dre que certains de ces décès étaient dus à la de la vie active pour profiter de la vie d’une autre
perspective de ne plus être utile à la société. manière.
Aujourd’hui, les progrès de la médecine, le EDWIGE ANSAH photos.com
14 Santé et Bien-être www.lagrandeepoque.com
La visualisation lors de la grossesse
Q
ue cela s’appelle la visualisation, qu’une femme qui visualise son accou-
l’image mentale, la pratique men- chement une ou deux fois par semaine,
tale, ou la répétition mentale, les soit un total de 30 à 60 répétitions, va se
recherches sur ce sujet depuis près d’un programmer un accouchement facile.
siècle ont prouvé avec certitude que « si « L’utilisation de la visualisation pour
vous réalisez quelque chose avec votre la préparation à la naissance et pendant
esprit, vous pouvez aussi Une femme qui le travail va aider la femme
le faire avec votre corps ». à rester calme pendant les
Cela se vérifie pour diffé- visualise son contractions. Ceci facilitera
rentes activités telles que accouchement l’ouverture du col de l’utérus
la performance sportive, le une ou deux fois et le passage du bébé », dit
self-defense (ou défense Arms, qui indique à ses lec-
personnelle), l’amélioration
par semaine et trices qu’elles peuvent accé-
de son leadership ou l’ac- se programme un lérer le travail à l’aide de
couchement. Pourtant, la accouchement l’image mentale. Elle con-
majorité des femmes encein- facile. firme : « C’est plus une ques-
tes ne connaissent pas cette tion d’esprit que de corps,
méthode et ne savent donc pas employer c’est-à-dire sortir du corps pour l’aider
la puissance de l’image mentale. activement ».
De plus en plus de livres sur l’accouche- Répéter mentalement comment votre
ment incorporent la puissance de l’image corps se sent dans un scénario imaginé
mentale et la visualisation comme tech- est la meilleure manière d’accomplir l’en-
niques permettant de soulager le travail. traînement mental selon Aidan P. Moran
Dans son ouvrage Immaculate Decep- dans son manuel Sport and Exercise Psy-
tion II: A fresh look at childbirth, Suzanne chology. Selon lui, il est préférable d’em-
Arms cite des études montrant que « les ployer tous ses sens et ses sentiments
athlètes qui font moins d’entraînement pour réussir à « susciter une plus grande
physique mais plus de visualisation sont activation physiologique », partant de l’hy-
les plus performants au cours des essais pothèse qu’une meilleure communication
olympiques ». Elle confirme que ces étu- entre cellules est provoquée par la répé-
des ont été répétées pour d’autres activi- tition mentale.
tés y compris avec des non-athlètes.
Fréquemment, les médecins et les Pratiquer l’image mentale
sages-femmes constatent à quel point il n’est pas difficile
est facile pour une femme d’accoucher Dans Better Birthing with Hypnosis, le
de son quatrième, cinquième ou sixième professeur Michelle Leclaire O’Neill décrit
enfant, car le corps de la femme est habi- ces images comme « une approche for-
tuée à l’expérience. Il semble donc logique malisée du rêve éveillé que nous avons
Les bien faits d’une bonne posture
T
out le monde s’est déjà entendu
dire ou a dit à quelqu’un « Tiens-toi
droit » ou « Ne sois pas voûté » ou a
reçu le compliment suivant : « Tu as une
belle posture. » Pourquoi est-ce important
et comment peut-on arriver et garder une
bonne posture ?
Dans un bel acte d’équilibre perma-
nent, la posture est le résultat de forces
dynamiques entre les muscles destinés
à maintenir notre squelette debout. Nous
ne sommes jamais au repos. Pour rester
debout, nous bougeons, nous nous dépla-
çons, même de manière imperceptible, à
chaque instant. Lorsque nos muscles sont
suffisamment forts, notre squelette est
bien maintenu.
Une bonne posture témoi-
gne d’une bonne santé
Une bonne posture permet de tirer un
avantage mécanique de la force conte-
Photos.com
nue dans notre système musculo-sque-
lettique. En effet, tout est lié : les os sont
maintenus en place par les muscles. Les
ligaments relient les os les uns aux autres
et les muscles sont attachés aux os par
Tout comme les athlètes de haut niveau peuvent améliorer leurs
performances grâce à la visualisation, une femme enceinte peut
améliorer son accouchement.
tous utilisé, que nous en soyons cons-
cients ou pas ». Non seulement l’image
mentale est utilisée pour créer votre nais-
sance idéale mais elle peut vous aider à
surmonter vos craintes quant à l’accou-
chement. O’Neill a utilisé la méthode de
l’imagerie Leclaire pour aider de nom-
breuses femmes à accepter leurs pen-
sées ou leurs émotions négatives sur la
grossesse, le travail, la naissance, et la
maternité. Souvent la femme enceinte
des tendons.
Des muscles sains garantissent une
bonne posture. Et la posture témoigne de
la bonne santé des muscles qui permet-
tent d’avoir des mouvements aisés. Si un
muscle est trop ferme ou pas assez, notre
capacité de mouvement est diminuée et
le risque de problèmes musculo-squelet-
tiques augmente considérablement. Des
muscles sains soutiennent bien le corps
et facilitent le mouvement par une gamme
de mouvement vaste et complète. Ils sont
flexibles, forts et capables de travailler
pendant de longues périodes sans se fati-
guer. Les félins sont un bon exemple.
Si un muscle est trop dur, il fera moins
car il contient trop de tension, il est comme
une bouteille pleine qu’on ne peut pas rem-
plir plus. Et de ce fait, la portée et la puis-
sance des muscles sont limitées. Dans cet
état, les muscles risquent la déchirure.
Inversement, si un muscle est trop mou,
il a la texture d’une nouille trop cuite. Le
soutien entre les os est diminué. Les arti-
culations et les surfaces de glissement
et de rotation sont compromises. Les
dommages aux cartilages et aux tissus
16 – 31 JUILLET 2009 ● La Grande Époque
lioration de la performance provient de la
visualisation, les images négatives auront
l’effet inverse. Malheureusement, dans
notre société d’aujourd’hui, un très grand
nombre de femmes imaginent l’accouche-
ment comme un moment fatiguant, fragili-
sant qui peut engendrer des complications
qui aboutissent à une prise de médica-
ments, voire à la chirurgie. Les accou-
chements vus à la télévision montrent
rarement des naissances faciles.
Ces images ont un effet curieux sur l’es-
prit humain, celui de tourmenter incons-
ciemment et de s’ajouter aux raisons qui
font que les États-Unis ont un des taux de
maternité les plus bas de tous les pays
développés. Près d’une femme sur trois
subit une césarienne. Un grand nombre
de femmes recevront des médicaments
pour provoquer l’accouchement. La péri-
durale est couramment utilisée pour ne
pas souffrir. Pourtant de plus en plus de
Photos.com voix s’élèvent pour dire que lorsqu’il n’y a
pas de complications, la majorité de ces
interventions sont totalement inutiles. Est-
il possible que ces séries télévisées, cette
chirurgie de prévention et l’idée latente
réussissait à renverser les effets négatifs dans notre société qu’un accouchement
de ces informations reçues. doit être difficile soient à l’origine de cette
La raison pour laquelle cette utilisation sinistre situation ?
particulière de la visualisation a une telle Comme certains philosophes accomplis
importance est que la plupart des femmes le proposent : « Soit vous créez les pen-
ont ouvertement peur de la mort en cou- sées de votre esprit, soit votre esprit sera
che ce qui procure des images négatives rempli des pensées inculquées. »
qui peuvent, grâce à ce travail de visua- JAMES GOODLATTE
lisation, se transformer en images posi- KIMBERLY NELLI
tives. Pour en savoir plus :
La même étude démontre que si l’amé- www.secretsofpainlesschildbirth.com
conjonctifs lors de simples tâches quoti-
positive, en communiquant un message
diennes peuvent les user prématurément
de confiance et de compétence. La pos-
et finalement les faire céder complète-
ture n’est pas seulement physique, elle
ment. La personne sera plus faible qu’elle
témoigne de l’humeur, de la force, de la
ne devrait l’être et il lui sera très difficile de
faiblesse, de l’intention et de la capacité.
maintenir une bonne posture. Les exercices pour le maintien mettent
Par ailleurs, une bonne posture soulage
l’accent sur l’équilibre du corps afin de
la pression sur les nerfs qui pourraient
parvenir à une posture saine et musclée.
être douloureux. Elle permet également
Il n’existe pas de muscle plus important
une meilleure circulation et le positionne-
qu’un autre. Les muscles du corps tra-
ment correct des organes. vaillent ensemble comme un orchestre, ce
Les dorsaux étirent la colonne verté-
n’est pas une performance en solo.
brale et lui fournissent un soutien pos-
Il est préférable d’éviter les exercices
térieur. Le dos permet d’exercer une
qui ne font travailler qu’un groupe de mus-
traction. cles et se concentrer sur le renforcement
Les muscles du tronc permettent de
du corps dans son ensemble. Le corps
se tourner ou de se pencher en avant. Ils
pousse, tire, fléchit, tourne et s’étend. Ne
donnent l’appui nécessaire à la colonne
concevez pas votre programme de fitness
vertébrale en collaboration avec les mus-
en fonction de la forme des muscles que
cles dorsaux et les muscles latéraux qui
vous voulez avoir. Quand les muscles sont
permettent de tourner et d’être stable. Les
en bonne santé, ils apparaissent naturelle-
muscles de la poitrine permettent d’exer-
ment comme ils doivent être.
cer des poussées. EMORY M. MOORE
Pour en savoir plus :
Une image positive et un contacter Emory M. Moore, expert en
message de confiance fitness et fondateur de la technique
Une bonne posture donne une image Emborà info@embora.com
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La Grande Époque ● 16 – 31 JUILLET 2009
La ville du futur : un lien entre la nature et l’homme ?
La nature dans la ville
Il existe dans les villes une flore insoup-
çonnée. Gino Müller, directeur des jardins
botaniques de Lausanne, explique : « Il y
a à Lausanne 1.364 espèces, soit un tiers
de la flore que l’on retrouve en Suisse et
70 % sont indigènes. Elles peuplent cette
ville comme elles le feraient en pleine
nature, par exemple un mur peut res-
sembler à une falaise. Dans une friche
on va retrouver des plantes pionnières,
rudérales. On recense une très grande
variété d’origines. Ces plantes provien-
nent de prairies maigres, de forêts, de
zones humides ». C’est ce qu’on appelle
la « vraie » nature avec laquelle le cita-
din doit se réconcilier et qui mérite d’être
protégée.
En ville, créer des espaces verts où la
nature reprend ses droits en laissant des
parcelles « sauvages » bouleverse nos
habitudes. Notre éducation citadine nous
incite à penser que l’endroit est aban-
donné. Il est donc nécessaire de sensibi-
liser la population et de l’informer sur les
actions menées en faveur de la biodiver-
sité pour que ces espaces soient appré-
ciés et protégés.
L’entretien différencié
Chaque espace vert est étudié avec
l’objectif de ramener la nature en ville. Les
jardins où il fait bon se promener en invité
de mère nature, les talus et cordons boi-
sés sont volontairement laissés à l’état
sauvage. Des plantes indigènes sont réin-
troduites et l’utilisation des herbicides et
des machines est minimisé. Des couloirs
biologiques pour la petite faune se créent
et on peut observer des plantes et des
insectes locaux dont certains sont rares.
Ces parcelles où la nature peut se régé-
nérer contrastent avec les jardins publics
« à la française » où de belles pelouses
vertes sont agrémentées de fleurs et de
légumes décoratifs.
La gestion des espaces verts en entre-
tien différencié permet également de
réduire les budgets : moins de désher-
bage, les feuilles et branches mortes sont
laissées, les herbicides ne sont plus uti-
lisés.
La ville de Luxembourg, placée sur une
des plus grandes nappes phréatiques
d’Europe, a décidé de ne plus traiter ses
espaces verts avec des pesticides. Elle a
invité la population à faire de même dans
les jardins privés et sur les balcons afin de
ne pas polluer la nappe phréatique.
La répartition habitation-
nature dans le futur
Chacun souhaite posséder sa maison
mais ce projet n’est pas réaliste car la
population urbaine ne cesse d’augmenter.
Il est préférable de construire des immeu-
bles écologiques, conçus de façon à ce
que chaque propriétaire se sente vraiment
L’éco-pôle des Charmilles
Les entreprises « classiques » et celles de l’économie sociale et solidaire dans le même panier
M
ettez dans un shaker l’espace
appelé La Ruche à Paris, l’incu-
bateur Alter Incub de Langue-
doc-Roussillon, une coopérative d’activité
et d’emploi (CAE) et une structure qui
La mairie de Paris travaille sur le projet Autolib qui permettrait aux
usagers de louer des véhicules.
chez lui, avec sa terrasse, des murs iso-
lés phonétiquement et des espaces verts
valorisés à partager. On espère égale-
ment que cela créera de nouveaux liens
sociaux qui font défaut actuellement.
La ville de Lausanne loue des parcel-
les de plantage de 5 à 15 m² localisées
dans différents quartiers densément habi-
tés. Le franc succès de ces petits lopins
de terre a encouragé la ville à aménager
d’autres plantages. Parmi les conditions
de mise à disposition, il est demandé de
faire un usage parcimonieux de produits
de traitement et d’engrais chimiques. Il
existe aussi les jardins
dit « ouvriers » ou « fami-
liaux » qui connaissent
Les avantages
des résultats concluants d’une agriculture
depuis des décennies.
de proximité sont
L’agriculture et
la ville indéniables :
Les avantages d’une
agriculture de proximité
qualité et sécurité
sont indéniables : qualité des aliments,
et sécurité des aliments,
économie d’énergie, économie
création d’emplois, santé
publique. Créer une rela- d’énergie,
tion harmonieuse entre
les paysans proches de
création
la ville et les citadins est d’emplois, santé
bénéfique. Cela se fait
déjà à travers certaines publique.
associations comme l’As-
sociation pour le Maintien d’une Agricul-
ture Paysanne en France ou les paniers
bio qui permettent aux citadins d’acheter
des légumes frais et bio à un prix tout à fait
raisonnable. Les paysans sont aussi satis-
faits car leur travail est revalorisé.
Le souhait de Joëlle Salomon Clavin,
urbaniste et chercheuse à l’université de
Lausanne va dans ce sens. Elle souli-
gne : « À l’heure actuelle, la majorité des
paysans proches des villes vendent leur
production aux supermarchés pour des
prix dérisoires et se plaignent du fait que
finance la création d’entreprises. Mélan-
gez. Le résultat, c’est l’éco-pôle des Char-
milles. Un espace que la Chambre de
l’économie sociale et solidaire de Genève
(organisation indépendante réunissant les
les gens promènent leur chien dans les
champs, y parquent leurs voitures, etc. Un
échange de ce type permettrait aux cita-
dins de travailler un peu dans les champs
et cette meilleure connaissance des uns
et des autres favorisera une cohabitation
harmonieuse pour le bénéfice de tous. »
La mobilité dans la ville
Les transports actuels montrent leur
limite, les routes sont saturées, les par-
kings envahis. Les urbanistes admettent
que les embouteillages, en plus de pol-
luer, font perdre beaucoup d’argent. Gérer
les transports efficace-
ment n’est pas facile et
demande des efforts de
la part de toute la com-
munauté.
La ville doit répon-
dre aux différents types
de besoins. Au vu de la
complexité du sujet, dif-
férentes propositions
sont envisagées :
- augmenter les trans-
ports en commun peu
polluants
- faciliter les déplace-
ments à vélo. La majo-
rité des déplacements se
font sur 3 à 5 kilomètres.
Le vélo a donc toute sa
place, dès lors que des
pistes lui sont réservées
et que des parkings à vélos sont créés en
nombre suffisant.
- permettre d’utiliser plusieurs moyens
de transports, par exemple le vélo et les
transports publics pour se rendre au tra-
vail. Le Velib serait une solution pour
autant que l’on puisse régler les problè-
mes d’incivilité et de logistique (bornes
défectueuses, facturation, etc.)
- l’idée germe de mettre à disposition du
public une Autolib à Paris. Ce serait une
voiture électrique qui fonctionnerait sur le
même principe que le Velib. Les Verts ont
différents acteurs du secteur) est en train
de créer en partenariat avec la commune.
L’idée : lancer un incubateur des-
tiné à accompagner la création d’entre-
prises de l’économie sociale et solidaire
www.lagrandeepoque.com Art de vivre 15
Si la ville actuelle est stressante, polluée et bruyante, il est possible
d’envisager que dans le futur, elle devienne un lieu où il fait bon vivre
avec autrui.
fait part de leur « scepticisme » et ont pré-
conisé l’auto-partage qui fonctionne déjà
bien. Le projet d’Autolib est déjà en place
à Lyon. En 2008, 830 conducteurs étaient
abonnés sur 22 stations.
- développer des éco-quartiers où l’ha-
bitant vit, travaille, consomme et se divertit
sans avoir à faire de grands déplacements
et où les activités sont respectueuses de
l’environnement. De nombreux critères
sont intégrés : la gestion de l’eau, le trai-
tement des déchets, la stratégie énergé-
tique, l’utilisation de matériaux locaux et
écologiques pour la construction, une poli-
tique de mixité et d’intégration sociale,
etc.
(ESS)... mais aussi des entreprises dites
traditionnelles. Les deux types de structu-
res, réunies dans un même espace : une
première ! De quoi créer des liens solides
entre deux mondes qui, trop souvent, ne
se connaissent pas. Et toutes les entrepri-
ses accompagnées
bénéficieront des
mêmes aides,
notamment cel-
les, financières, de
Fondetec, la fon-
dation communale
pour le développe-
ment des emplois
et du tissu écono-
mique en ville de
Genève.
« L’appui de la
ville, et bientôt du
Canton, est donc
essentielle dans
ce projet », précise Thierry Pellet, secré-
taire général de la Chambre de l’écono-
mie sociale et solidaire de Genève. « Elle
va par exemple restaurer entièrement et
aux normes du développement durable
une friche industrielle et la mettre à dis-
position de l’éco-pôle. » Sur ces 4.200 m²,
un tiers sera dédié à l’incubateur, un autre
tiers à l’hébergement d’entreprises ESS
Flickr.com
- la gestion du travail demande à être
développée au niveau des horaires et du
lieu de travail. Par exemple le télétravail
évite certains déplacements aux heures
de pointe. De même des horaires modu-
lables ont l’effet de diluer le trafic sur la
durée.
Le citadin a son rôle à jouer. Trou-
ver des solutions satisfaisantes qui con-
cilient satisfaction personnelle et respect
de l’environnement au sens le plus noble
demande à chacun de se remettre en
cause et de se responsabiliser pour que la
vie dans la ville de demain soit agréable.
CATHERINE KELLER
ou non en phase de lancement ; et le der-
nier, à des services mutualisés (cafétéria,
crèche, etc.) De quoi, en outre, dégager
des revenus qui permettront à la structure
de s’autofinancer en grande partie.
« L’aspect mixité du projet en fait tout
l’intérêt : on le
retrouve autant
dans le fait d’ac-
cueillir des entre-
prises classiques
ou de l’ESS que
dans le partenariat
public-privé qui
porte le projet, ou
encore dans l’ap-
pui dont il bénéfi-
cie tant au niveau
communal que
cantonal et peut-
être même fédé-
ral. » Un projet
d’une grande cohérence qui devrait être
sur pied d’ici 2012. L’incubateur, lui, sera
même prêt avant et devrait commencer
son activité dès l’année prochaine.
Reporters d’Espoirs
Pour en savoir plus :
Thierry Pellet, +41 22 807 27 97,
e-mail : info@apres-ge.ch
La Grande Époque ● 16 – 31 JUILLET 2009 www.lagrandeepoque.com Reportage 16

Une histoire de non-violence

Le 20 juillet 1999, la violente persécu- Parallèlement, le régime dit traiter les pratiquants
de Falun Gong « comme une mère traite ses filles »
tion du mouvement bouddhiste Falun en les éloignant des «superstitions qui empoison-
Gong par le Parti communiste chinois nent leur esprit. » Les victoires du PCC sont, dit-
(PCC) et la résistance pacifique des il, décisives puisqu’il réussit à « transformer 98 %
millions de membres du mouvement des pratiquants de Falun Gong avec succès » .
« Quand des pratiquants renoncent au Falun Gong,
ont commencé. le PCC demande toujours à ces personnes de

1
0 ans après, force est de constater que le
parti communiste a totalement échoué à éra-
diquer le mouvement spirituel, dont les for-
mes de résistance pacifique n’ont cessé de se
diversifier et de se renforcer, en même temps qu’il
essaimait à travers plus d’une centaine de pays.
En juillet 1999, une éradication rapide, prévue
en trois mois, était annoncée par les organes de
presse officiels chinois qui appelaient alors le peu-
ple chinois à « abandonner la superstition » pour
rejoindre le chemin du « développement scientifi-
que de la société communiste. » L’objectif était,
bien plus que d’interdire le groupe qui avait en
quelques années, rassemblé plus de 80 millions
de personnes, d’affirmer l’ancrage matérialiste de
la société chinoise. La lutte contre le Falun Gong
était une lutte « entre la croyance et l’athéisme, la
superstition et la science, l’idéalisme et le maté-
rialisme ».
Les observateurs internationaux prédisaient
alors la disparition rapide du Falun Gong, au
mieux sa survie clandestine.
De façon inattendue au vu des moyens de
répression déployés, ils ont eu tort : la grande sur-
prise pour ce régime, peu habitué à voir ses déci-
sions contestées sur une large échelle, a été de
voir les pratiquants du Falun Gong refuser l’inter-
diction, continuer de pratiquer leurs exercices de
méditation en plein air, et se rendre aux différents
niveaux du gouvernement pour demander d’annu-
ler l’interdiction, sans être intimidés par les mena-
ces de perte d’emploi et de prison.
Le régime chinois, pour appuyer sa campagne
s’est inspiré de Staline bien sûr avec ses gou-
lags et ses hopitaux psychiatriques pour dissi-
dents - il reconnaissait en 2001 y avoir envoyé
plus de 100.000 membres du Falun Gong - mais
aussi de rien moins que d’Hitler : le bureau 610,
organe extra-judiciaire coordonnant la répres-
sion du Falun Gong, récompensant ou punissant
la police fonction de ses « succès », est fonction-
nellement parlant la copie conforme de la Gestapo
allemande.
Dans les deux premières années de la persécu-
tion, le PCC a été capable de faire peser le poids
de la société tout entière sur les membres de
Falun Gong. Chaque élément de la société, des
ministères gouvernementaux aux quartiers, a été
Archives La Grande Époque
Une photographie de la famille Chen. Ils
ont tous disparu. Les six pratiquaient le
Falun Gong : Chen Yunchuan, le père
- Wang Lianrong, la mère - Chen Sulan,
la sœur aînée - Chen Aizhong, le fils
aîné, torturé à mort le 20 septembre 2001
- Chen Aili, le fils cadet, torturé à mort le 5
novembre 2004 - et Chen Hongping, la fille
cadette, torturée à mort le 5 mars 2003.
tourné contre ce nouvel « ennemi intérieur ». Les
pratiquants du mouvement, devenus parias, ont
été forcés à renoncer à leur croyance, renvoyés
de leur travail, expulsés de leurs écoles, privés de
leur licence de travail, expulsés de leurs foyers et
privés de leurs pensions et de leurs retraites.
Ceux qui ont refusé de céder à la pression poli-
tique et sociale ont été incarcérés, soumis à des
lavages de cerveau, torturés. Leur nombre, sans
qu’il soit possible de trouver une source fiable
pour le confirmer, dépasserait le million. Plus de
3.500 sont morts des suites de la répression, tan-
dis que le sort de dizaines de milliers d’entre eux,
devenus des matricules dans le système pénitenti-
aire des laogai chinois, est marqué d’un point d’in-
terrogation.
Si on en croit l’enquête des avocats canadiens
David Kilgour et David Matas, nombre d’entre eux
alimenteraient aujourd’hui encore le florissant tra-
fic d’organes chinois. « Coincïdence » parlante,
entre 1999, année de début de la répression du
Falun Gong, et 2003, le nombre de transplanta-
tions d’organes en Chine a été multiplié par 12.
Résolument pacifiques
La seconde immense surprise dans cette
répression a été la non-violence absolue qu’ont
maintenue les membres du Falun Gong. Elle
Archives La Grande Époque
Le 20 novembre 2001, 36 occidentaux
déploient sur la place Tian An Men de
Pékin une banderole sur laquelle on lit
« Authenticité-Compassion-Tolérance ».
s’explique, pour les analystes, par la cosmogo-
nie particulière du mouvement, qui envisage l’Uni-
vers comme une entité vivante représentée par les
caratéristique d’ « Authenticité, Bonté, Patience »
-- caractéristiques prohibant toute violence.
Face à cette attitude souvent comparée à celle
prônée par Martin Luther King et Gandhi, les auto-
rités chinoises ont sorti l’artillerie lourde de la pro-
pagande : en janvier 2001, l’immolation par le feu
de cinq personnes a été montée de toutes pièces
sur la place Tian An Men de Pékin afin de dia-
boliser le mouvement. Pierre angulaire de l’argu-
mentaire officiel pour la répression, l’événement
a rapidement été démonté par des observateurs
internationaux : « D’après notre enquête, seules
les autorités chinoises ont tué des gens », indi-
que le Programme International pour le Dévelop-
pement de l’Education des Nations unies. « Des
familles ont été déchirées parce que certains des
leurs ont été tués par le régime ; on a causé la
perte de nombreuses personnes, non pas par la
pratique du Falun Gong, mais par la torture, les
incarcérations en hôpitaux psychiatriques où ils
subissent des traitements extrêmement violents,
le travail forcé dans les camps et autres traite-
ments de ce genre [...] Le régime attire l’attention
sur une soi-disant immolation sur la place Tian An
Men le 23 janvier 2001, pour prouver que le Falun
gong est une ‘secte hérétique’. Cependant, nous
avons obtenu une vidéo de cet événement qui
nous prouve que la scène à été montée de toutes
pièces par le gouvernement. »
révéler toutes les informations sur les pratiquants
qu’ils connaissent pour les arrêter. En même
temps, il demande à ces personnes d’aller torturer
et transformer les autres pratiquants qui refusent
d’obéir », explique un chinois réfugié en Suisse.
« Avant d’arrêter un pratiquant, ils commencent
par bien le connaître », complète Guo Ping,
réfugié en Hollande. « Ils arrivent même à savoir
ce qu’il aime et ce qu’il n’aime pas par rapport
à la nourriture, aux vêtements, son milieu de
vie et ses transports. Ils connaissent bien ses
proches et ses amis. Puis ils lui tendent un piège
et l’arrêtent. À la toute première rencontre, ils lui
font peur et le menacent. Une fois craintif ils le
questionnent. S’il refuse, ils vont partager avec
lui les choses qu’ils ont rassemblées depuis
longtemps. Au cours de la conversation, il sent
qu’ils savaient déjà tout, même des choses
que très peu de personnes connaissent. »
Cependant, les pratiquants de Falun Gong ont
persisté dans ce que le langage chinois appelle
« clarifier la vérité » - informer les gens des faits
réels à propos de Falun Gong et susciter une prise
de conscience sur cette persécution. Pour le sino-
logue Benoit Vermander, « Falun Gong a montré
pour la première fois en Chine la capacité dont
dispose aujourd’hui une organisation déterritoria-
lisée, utilisant par exemple le cyberespace afin de
toucher le public chinois aussi bien que les com-
munautés émigrées tout en contournant les inter-
dits du PCC ».
Et pour la première fois aujourd’hui, la machine
de propagande du PCC a dû se taire. Probable-
ment car si elle continuait sa campagne de dif-
famation contre Falun Gong ouvertement, elle
enverrait le message que celui-ci est toujours
debout et que ses membres sont toujours pré-
sents et forts en Chine. Pour la première fois au
cours de sa longue histoire dictatoriale, le PCC a
dû rendre sa persécution clandestine et arrêter de
prétendre à d’autres « victoires décisives ».
La résistance pacifique du Falun Gong est,
à plusieurs égards, sans précédent en Chine.
Il n’est aujourd’hui pas rare de voir accolée au
mouvement spirituel l’expresssion chinoise « sur-
prendre les cieux et émouvoir les divinités », syno-
nyme de courage et de dévouement.
RÉMI BLEIBTREU

Persécutée dès son enfance

L
iang Yan est née en 1986. Son père, Liang Lijin
et sa mère Yang Xiuqin sont pratiquants de
Falun Gong. Avant la persécution, elle accom-
pagnait sa mère avec joie pour pratiquer les exer-
cices.
LGE : Comment a commencé la persécution ?
Liang : En avril 1999, de nombreux policiers ont
soudain fait irruption chez nous. Ils m’ont question-
née mais peu après, quelques compagnons de pra-
tique sont arrivés. Les policiers ont commencé à
enregistrer leurs noms. Ils ont fait de même sur notre
site de pratique. En juin, les policiers nous ont inter-
dit d’aller sur le site de pratique. Quelques jours plus
tard, de nombreux policiers sont venus chez nous
pour nous harceler. Comme ma mère amenait le lec-
teur de cassettes chaque matin sur le site de prati-
que, les policiers l’ont accusée d’être la coordinatrice
et ont commencé à la surveiller.
LGE : Comment avez-vous réagi ?
Liang : Le 20 juillet 1999, le PCC a commencé
la répression de tous les côtés. Ils ont arrêté les pra-
tiquants à grande échelle. Ma mère est allée faire
appel pour le Falun Gong au gouvernement de Fus-
hun et voulait dénoncer la persécution et expliquer
que la pratique est bénéfique aussi bien pour les
gens que pour le pays. Elle voulait les persuader de
libérer nos compagnons de pratique qui étaient déte-
nus là-bas. Les policiers ont arrêté ma mère et l’ont
libérée après minuit. Le jour suivant, ils ont fouillé
notre maison. Ils ont emmené tout le matériel. Je ne
savais pas ce qui se passait et j’avais si peur que je
me suis réfugiée dans les bras de ma mère.
LGE : Le Falun Gong était connu, comment le
peuple a-t-il pu accepter cette persécution ?
Liang : Le gouvernement a utilisé une propa-
gande calomnieuse pour que les gens rejettent le
Falun Gong. Par exemple, ma mère me disait que la
chaîne CCTV avait rapporté qu’un mineur de Fushun,
dans la province de Liaoning, avait refusé de prendre
des médicaments parce qu’il pratiquait Falun Gong
et est ensuite décédé. Ma mère et un autre compa- arrêtée et envoyée en prison. Ma grand-mère, mon
gnon de pratique pensaient que ce rapport était faux, oncle, ma tante, quelques autres proches, et moi-
que c’était pour calomnier Falun Dafa. Ils ont décidé même, sommes allés lui rendre visite. Nous avons vu
de vérifier les faits de cette histoire et ont décou- qu’elle avait beaucoup maigri et je l’ai à peine recon-
vert que ce n’était pas vrai. L’épouse de la personne nue. Je ne pouvais pas m’arrêter de pleurer.
décédée a montré à ma mère un reçu de l’hôpital, qui Je ne voulais pas voir les regards froids et étran-
disait que le jeune frère de la personne décédée avait ges de mes compagnons de classe. Je ne voulais
monté l’affaire pour calomnier Falun Gong, parce plus entendre les dirigeants de l’école me demander
qu’il voulait soutenir les dirigeants du parti commu- de couper les liens avec ma mère. Je détestais aller
niste chinois. À cause de cette découverte ma mère à l’école. Je détestais voir les visages froids de mes
a été de nouveau arrêtée et interrogée pendant une copains et de mes professeurs. Je ne pouvais plus
journée. Lorsqu’ils l’ont relâchée, ils lui ont dit qu’il lui supporter une telle pression mentale et je me suis
était interdit de contacter ou de rencontrer d’autres presque effondrée. Ma seule option était d’arrêter
pratiquants. Après cela, ils sont souvent venus à d’aller à l’école. Pendant ces journées, à part me ren-
notre domicile et nous ont harcelées. Chaque jour, ils dre au camp de travaux forcés Masanjia pour rendre
envoyaient quelqu’un pour nous surveiller. visite à ma mère, je ne faisais presque rien.
LGE : Votre mère s’est-elle alors résignée ? LGE : Votre mère a encore été arrêtée à plu-
Liang : Non, en septembre 1999, ma mère est allée sieurs reprises jusqu’à ce qu’elle puisse quit-
à Pékin faire appel au nom du Falun Gong et clarifier ter le pays. À ce moment, votre père a aussi été
la vérité. Elle m’a ramené deux cartons de nouilles, arrêté et toute la famille a eu des problèmes car
m’a laissé 300 yuans et m’a dit qu’elle ne savait pas la police cherchait votre mère, qu’est-ce que vous
quand elle pourrait revenir. J’ai pleuré pendant toute avez fait ?
une journée et toute une nuit. Je savais qu’elle était Liang : Les policiers venaient constamment chez
en train de faire une bonne chose. Dafa était diffamé. nous pour nous harceler et disaient qu’ils allaient
Notre Maître était illégalement listé comme personne m’arrêter. Je n’osais pas rentrer à la maison. Je ne
‘recherchée’. Nous devions sauvegarder Dafa et cla- pouvais aller nulle part et je devais errer dans les
rifier les faits pour que tous ceux qui le souhaitent rues. Je ne pouvais pas voir mes proches ni ren-
puissent en bénéficier. Je devais soutenir ma mère, Clear Harmony trer à la maison. J’ai dû trouver un emploi pour sur-
je l’ai donc accompagnée à la gare. Je pleurais en Liang Yan est née en 1986. Elle n’avait vivre. J’ai dû vivre sans abri alors que je n’avais que
marchant, ignorant quand elle reviendrait. que 13 ans quand la persécution a 16 ans. À cause des mensonges du gouvernement,
commencé en 1999. de nombreux Chinois ne connaissaient pas la vérité.
LGE : Que vous est-il arrivé ? Dans certains endroits, les gérants de magasins
Liang : Je ne comprenais pas pourquoi culti- là de bons amis, ont commencé à m’éviter. Moi qui étaient très méchants. Lorsqu’ils ont vu que je cher-
ver la bonté nous valait d’être arrêtés et surveillés. étais d’habitude joyeuse et optimiste, je suis deve- chais un emploi à un si jeune âge et ont compris que
Depuis le jour où la persécution de Falun Dafa a com- nue déprimée et ne voulais plus parler à personne. j’étais une pratiquante de Falun Gong, ils ne m’ont
mencé, la paix a quitté notre foyer. Le commissariat Je n’avais plus que des larmes et la solitude dans pas donné d’argent pour le travail que j’avais effec-
a entraîné les voisins à raconter des histoires der- ma vie. tué et m’ont chassée.
rière notre dos et à nous regarder de haut. Les diri- Après que ma mère soit partie à Pékin, mon père L’histoire se termine bien pour Liang et sa famille
geants et les enseignants de mon école me faisaient a dû trouver un deuxième emploi pour faire vivre la car ils ont tous pu quitter le pays mais beaucoup
souvent venir pour parler avec eux. Je passais cha- famille. Je pleurais souvent jusque tard dans la nuit n’ont pas cette chance et sont toujours les victimes
que pause entre les cours dans le bureau d’un pro- avant de m’endormir. Un mois plus tard, j’ai finale- de cette persécution absurde.
fesseur. Mes copains de classe, qui étaient jusque ment reçu des nouvelles de ma mère. Elle avait été RÉMI BLEIBTREU