Vous êtes sur la page 1sur 4

Politique de l'eau : osons la décroissance !

Cette année, la crise de l'eau défraye la chronique. En


effet, si par nature les conditions climatiques sont
incertaines, la crise engendrée par la sécheresse était
prévisible. Cette situation n'est pas que conjoncturelle,
elle se renouvellera, elle combine plusieurs phénomènes,
déficit pluviométrique des années précédentes, printemps
sec, sécheresse estivale, augmentation des températures
et changement climatique, milieux naturels fragilisés et
déficitaires, croissance des consommations. Ressource
renouvelable, en partie, l'eau n'est pas un bien de
consommation comme les autres. Elle dépend de
ressources naturelles soumises aux aléas et aux pressions
des usages. Le Schéma d'aménagement et de gestion des
eaux des nappes profondes de Gironde, SAGE, impose d'ici
2015 une diminution des prélèvements de 30 millions de
m3 sur 150 prélevés chaque année. Pour mémoire, lors de
la canicule, les prélèvements pour la Communauté Urbaine
de Bordeaux sur la seule nappe Eocène, nappe en sursis,
sont passés de 8 millions m3 en 2002 à 14 millions de m3
en 2003. Qu'en sera t-il cette année ?

Il faut diminuer les prélèvements dans les milieux naturels


notamment ceux de l'irrigation, mais également mettre en
œuvre à confort égal un plan national de maîtrise de la
consommation. Le financement de la politique de l'eau doit
encourager les économies et non les profits, comme on
peut malheureusement le constater sur la CUB avec la
Lyonnaise des Eaux.
Face à cette situation des mesures concrètes s'imposent
sur le long termes mais également en temps de crise.
Ces décisions ne dépendent pas de la conjoncture
internationale comme on voudrait nous le faire croire par
ailleurs pour le pétrole, où la démagogie a pris le dessus
avec la TIPP, mais principalement des pouvoirs politiques
locaux, nationaux et de chaque citoyen.

On a pu constater cet été l'incapacité des pouvoirs publics


à prendre des décisions courageuses et solidaires alors
que la sécheresse était annoncée comme sans précédent.
Pour preuve, l'incohérence des arrêtés des cellules
sécheresse des différentes préfectures, très révélateurs
des tensions et du lobbying de tous poils qui s' y
exerçaient, où d'ailleurs les associations de
consommateurs et d'environnement ne sont pas
représentés, alors que les intérêts agricoles et industriels
y sont notamment très présents,

Cette crise a révélé une incapacité organique dans les


administrations préfectorales mais également de la part
des élus locaux à se saisir de la crise pour prendre des
décisions où primerait l'intérêt écologique. Au contraire, le
maïs a pu être irrigué dans bien des cas, mais le carré de
pelouse était interdit d'arrosage. Face au lobby des
sportifs, les terrains de foot et les golfs étaient autorisés.
Il y eu même débats pour l'arrosage de la terre battue des
tennis ! Le lavage de la voiture était interdit au nom de la
lutte contre le gaspillage, mais les stations de lavage
commerciales étaient autorisées au nom de l'intérêt
économique.
Y a t il eu une campagne nationale pour informer sur la
nécessité d'économiser l'eau ?
Quels étaient les moyens de la police de l'eau pour faire
respecter les arrêtés ?
Pourtant dès le mois de MARS le Ministère informait les
Préfets des risques de pénurie d'eau dans certains
départements.

Pas un élu de renom n’a pris la défense de


l'environnement au nom du développement durable ou de
l' alter mondialisme, pourtant ce ne sont pas les colloques
ou la phraséologie qui ont manqué ces derniers mois sur
ces sujets ! L'occasion était belle pour faire la critique de
la marchandisation de l'eau, du double langage du
gouvernement, du lobbying agricole, sportif et touristique.
Peu de positions courageuses pour dénoncer l'absence
d'anticipation de la crise de la part des pouvoirs publics et
de moyens pour la gérer et informer le grand public.

Dans tout cela, quelle attitude devait adopter le citoyen


consommateur d'eau ?

Face à la crise de l'eau, le langage de la vérité s'impose.


Nous devons réfléchir à utiliser l'eau de façon différente.
Il faut ré- orienter l'aménagement urbain, touristique et
sportif. Privilégions dans la conception des « espaces
verts », des essences et des végétaux plus rustiques,
moins gourmands en eau, par exemple pour les arbustes
(Abelia, Viburnum, Ceanothes…) le fleurissement
(cinéraires, sauges, ricin, tabac, cardons ) ou les Gazons
(fétuques rouges et ovines, Cynodon dactylon).
Ce n’est pas en concevant de nouvelles réserves d’eau
comme Charlas qui déséquilibreront l’écosystème que
l’agriculture va sortir de sa dépendance au maïs irrigué.
L’agriculture doit faire sa révolution culturelle et revenir à
des céréales d’automne ( blé, avoine, colza, orge,) et à des
prairies pérenne qui associent graminées et légumineuse
pour l’alimentation du bétail (luzerne, trèfle).
L'eau est un patrimoine commun et un Droit avant d’être
un bien. Elle doit être gérée en service public de façon
intégré et global. Les intérêts économiques des acteurs de
l'eau tous statuts confondus doivent être indexés sur les
enjeux environnementaux notamment la préservation de
la ressource et le dérèglement climatique. Le prix de l'eau
et son financement doit induire le coût de sa gestion dans
le temps. Le développement durable ne se limite pas à la
nécessaire lutte contre le gaspillage ou à l'arrêt du robinet
quand on se brosse les dents ! Notre société de
consommation doit modifier radicalement son "rapport à
l'eau".

En matière d'écologie la politique de "l'eautruche" doit


laisser la place à de nouveaux comportements, économes,
responsables, solidaires. Comme nous devrions le faire dès
aujourd' hui pour le pétrole et l’énergie, engageons nous
vers une politique plus sobre de notre consommation
d'eau. Cette politique porte un nom, la décroissance !

Gérard CHAUSSET
Adjoint (VERT) au Maire de Mérignac,
Vice Président de la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX

Vous aimerez peut-être aussi