Les procédés solgel De l'art du feu 4 la chimie douce Jacques Livage® professeur Summary: The sol-gel processes Act. Chim, (R) 1997, 10, 4-10 Sol-gel processes allow the synthesis of inorganic materials from solutions of molecular precursors. These pre cursors are mainly metal alkoxides. They lead to oxide materials such as glasses and ceramics. Sol-gel processes have been extensively studied during the past ffeen years. Based on inorganic polymerication reactions they allow the fabrication of materials at temperatures muck lower than usual glass and ceramic processes. Moreover, chemical syntheses and shaping can be performed in a single step directly from the sole tion leading to the povederless processing of films or fibres. Hybrid organic-inorganic materials have been syn thesized via these chimie douce reactions, even biomolecules can he encapsulated within sol-gel matrices. A whole range of novel hybrid compounds is emerging, opening a land of opportunity for materials science and technology: Mots clés = Matériaux, chimie douce, composés hybrides, optique sol-gel, films Key-words ; Materials, chimie douce, hybrid compounds, sol-gel optics, films. epuis des millénaires, les verres et les céramiques sont fabriqués a partir de poudres que l'on réagir & haute température, au-dessus de 1 000 °C, puis que I'on met en forme par fusion ov frittage, De nouvelles méthodes de synthése et d’élaboration se sont développées depuis uelques années. Connues sous le nom de « procédé sol-gel », elles mettent en jeu des réactions de chimie douce et ouvrent la voie 4 des applications originales et & des matériaux inédits. Des réactions de polymerisation minérale Le principe du procédé sol-gel esta priori ts simple. 1 s"apparente & la synthese des polymeres organiques et consiste a former un réseau d’oxyde par polymerisation de précurseurs moléculaires. On sat, par exemple, que a sice SiO, est constituée de tétratdres [SiO,] qui partagent des Somimets communs, Il devrait done étre possible de cons tmuire progressivement un tel réseau en assemblant chimi- dquement des entités monoméres téiraédriques en solution On forme ainsi des espces de plus en plus condensées qui condhisent 2 un réseau de slice. Selon la régularité de cet assemblage, on obtient de la siice crstallisée (quart) ou amomphe (verre). Entre la solution et Ie solide, on passe par des étapes intermédiaires constituges de colloides qui for- ment des sols ou des gels, d'od le nom du procédé « sol gel> (I) Lensemble des ces réuctions s'effectue en solution & température ambiante. I sufft ensuite d'un traitement ther + Univers Pee et Marie Curie, Mtéioux ievaaniques, URA 1466, Tour Sf, Sa age, 4, place Juteu, 75252 Pris Cadex 05. Tl 0144 37.38.68, Fox 01.44.27.47 69. Email IogeBeerusie se BEY creo ccrose v7 rique a température modérée pour réaliser le séchage et la densification. Le passage par un état « sol » ou « gel » dont Ja viscosité peut étre contralée, permet des opérations de mise en forme particuliérement intéressantes pour la réalisa tion de films ou de fibres {2} Les précurseurs moléculaires utlisés dans les procédés sol-gel sont essentiellement des composés métallo-orga~ niques, les aleoxydes M(OR),, od M est un métal et R-un groupement alkyl (R = CH,, C,H,..). Certains d'entie eux, tels que le tétraméthoxysilane, Si(OCH,), ou le tétraéthony- silane, Si(OC couramment utilisés dans indus. Les réactions de polymérisation se font en deux étapes [3] (encadré 1) * Une étape d’initiation, "hydrolyse, qui a pour but « engendrer une fonction réactive M-OH. >Si-OR +H,0 — >Si-OH + ROH * Une étape de propagation, la condensation, qui conduit 81a formation d'oxygdnes pontants avec élimination dune ‘molécule d'eau ou d’alcool selon les actions >Si-OH + HO-Sic > >Si-0-Sic + H,0 >Si-OH +RO-Sic + >8i-0-Sic + ROH‘A la fin de Vopération, tous les atomes d’oxygene devien- nent pontants et I’on a formé un réseau d'oxyde SiO, selon Ia réaction globale Si(OR), +4H,0 + Si(OH),+4ROH — SiO, +2H,0 Les alcoxydes et l'eau n’étant pas miscibles, ces réactions se font dans un solvant commun qui est en général I’alcool ccorrespondant ROH [3]. Encadré | - Formation d’un réseau d’oxyde par hydrolyse et condensation de précurseurs moléculaires Le procédé sol-gel met en jeu la polymerisation de précrseurs tmolgvlates tls que les aleoxydes. Ctte polymerisation ino fanique fit intervenir deux types de réactions chimiques * Une réaction diitiation >Si-OR +H,0 => >SLOH+ROH + Une action de propagation, la condensation >Si-OH+HOSic > >Si-0-Sic® >Si-OH + RO-Sic => >Si-0-Sic + ROH son, x01 (010 fe. ¢ Comenaton { Cese $0, A la fin de lopération, tous les atomes d’oxygene deviennent ‘pontantset Ion obtient un réseau d'oxyde SiO, selon la réaction alobale S\OR),+41,0 = Si(OH), +4 ROH = SiO, +-2H,0 Une nouvelle ingénierie moléculaire L'élaboration dun solide & partir de précurseurs molécu Iires permet de contrdler chimiquement chacune des étapes de la synthése et done de Porienter en fonction de lobjectif choisi. On a pu ainsi développer une véritable ingénierie moléculaire permettant de fabriquer des matériaux sur RECHERCHE — mesure particulitrement bien adaptés aux besoins de la tech- nologie moderne [4] Dans un alcoxyde M(OR),, le nombre de ligands OR est 6gal au degré d’oxydation z du cation métallique. Par contre, dans oxyde, la coordinence N du cation est généralement supérieure a son degré d’oxydation. De ce fait, au cours des réactions W’hydrolyse-condensation, le précurseur cherche 2 faugmenter sa coordinence pour atteinde celle de Poxyde et sa réactivité dépendra essentiellement de cette aptitude & augmenter sa coordinence N [4]. C’est ainsi que les alcoxydes de Si dont Ia coordinence est limitée & quatre sont ts peu réactifs, Is peuvent &tre manipulés sans pré caution particulidte mais par contre, la formation dun gel de silice par hydrolyse-condensation peut prendre plusieurs, jours, voire plusieurs semaines. I! faut done acesiérer les réactions par catalyse, ce qui se fait tes facilement en jouant, sur le pH de l'eau d'hydrolyse. En pH acide, on accélere plut6t hydrolyse tandis qu'en pH basique, c’est Ia conden- sation qui est favorisée. Le point remarquable est que la catalyse acide ou basigue ne joue pas uniquement sur la cinétique des réactions d'hydrolyse-condensation. Elle modifie aussi de fagon importante la morphologic des produits obtenus. En milieu acide, on forme des espaces peu ramifiées qui conduisent & des polyméres linéaires, tandis qu'en milicu basique on forme des espéces trés ramifiges qui conduisent a des part- cules colloidales denses. C’est le principe méme du procédé « Stéber » gui permet de fabriquer industriellement des billes de slice parfaitement calibrées et monodisperses (0,05 a2um), La plupart des alcoxydes autres que Si(OR), sont trés réactifs vis-t-vis de hydrolyse. Ils doivent étre manipulés avec précaution afin d”éviter la précipitation rapide de oxyde. Il faut alors ralentir ces réactions en complexant le cation métallique avant d’initier les réactions d'hydrolyse- condensation. On obtient ainsi de nouveaux précurseurs ‘moléculaires dont la structure, la réactivité surtout la fonc~ tionnalité sont complétement différentes. L’acétylacéione (CH,-CO-CH,-CO-CH,), par exemple, joue le role d'un ligand chélatant qui bloquc les réactions de condensation et diminue les possibilités de polymérisation (agent de termi naison). On réalise ainsi un vértable contréle chimique des, réactions de condensation qui permet d’optimiser 1a struc- ture et la morphologie du matéria final (figure 1). En jouant sur les taux respectifs de complexation et d'hydrolyse, on peut contrdler la taille des objets que I’on forme et obtenir des clusters moléculaires ou des particules colloidales (fi gure 2). Ce procédé a été développé récemment au Laboratoire de chimie de la matidre condensée & Paris pour la synthase de nanoparticules d’oxydes de ttane ou de zitco- nium de quelques nanometres de diam@tre [5]. Ces disper- sions colloidales stables ont &é ensuite utilisées & Montpellier, au Laboratoire des procédés membranai pour la réalisation de membranes eéramiques destinées ultrafiltration (6) (figure 3) La fabrication de poudres fines, de tulle et de morpholo- gic contrélées, est 'un des enjeux majeurs de nombreuses industries (céramiques, catalyseurs, pigments). Tl serait 1s important de pouvoir produire directement des poudres cuaréoano+ocose 77BEY 2 vsst crue occa v7 RECHERCHE Figure 1 Ingénierie moléculaire et procédé sol-gel. La réacivit des aleogides métallique peut dre conrdlee en compleant le ation mea Tique avon d'nier er réactons dhydrolye-condesation. L'aceplacé tone (CH,-CO-CH,CO-CH,) est wt ligand chlacant tandis que ls acé tater(CH,COO) jouent le de de igans portant, we x Figure 2- Contre chimique deta condensation, Par complexation des precurseursalconyde, on blogue les reactions de condensation et on dint fue les possibile de polymerisation (agen de terminavon). Par cone, Padditin d'eau cond Ia formation de groupements MOH qui favor sent les réaction de condensation. On réalice gins un viable conble ‘himigue des reactions de condenstion qui permet d'optimiser la sructure ft la morphologie du matériau final, Bx jowant sar Tes tus respecte de ‘omplesation ed yvolye, on peu conrOler la alle des objets que Ion forme et oben des clusters moléuiares, des paricalescollotiles ou des precipi fines, sans passer par les étapes de broyage qui sont longues et cotteuses. Les exemples qui viennent d’étre décrits mon- trent Ies possibilités qu’offrent les procédés sol-gel. Le pre- mier succes dans ce domaine a été la synthése, au MIT en 1982, de particules monodisperses de TiO, de quelques dixitmes de microns. L’opération ne durait que quelques ‘minutes et les poudres obtenues pouvaient étre frittées & 99 9 de Ia densité théorique par chauffage & 800 °C. ~ Support ALO, 4 Surface H0, Figure 3 Réalzation de membranes alrafiltation > poreuse de HfD, 15 wm pour naroitvaion sur support atumine. Linge laie permet de conrbler ls réactions de condensation et de Spruhdiser des sols stables de particules d'exydes métaliqus. Ces sols sont wists pour déposer un revtement daxyde meroporee Voareur ‘Cun tube céremigue La tlle des pores st lige @ celle des paricues folder, La sythese de pavicles fines dow le dlamotre est de ordre de (quelques nanomeires permet de réaiser des membranes daltraiiraion {dociment du Laboratoire des procédés membranalres) La synthése de céramiques multicomposants est cetane- ment Dun des débouchés les plus intressants pour le pro- cédé sol-gel. Son principal avantage est de permettre une repartition homogéne des consttuants par simple mélange des précurscurs en solution, L'enjeu chimique consiste a for- merle réseau d’oxyde M-O-M" au sein méme dela solution. La encore, la chimie sol-gel offre une solution élégante srice a existence d°hétéro-aleoxydes. C'est ainsi que ta synthtse sol-gel du niobiate de lithium LiNbO, a &€ décrice a Tuniversité d'Urbana aux Ftats-Unis et & Nagoya au Japon. Elle seffectue & partir du mélange des alcoxydes Li(OB}) et NH(OED, qui, par chauffage a reflux, conduisent A Phétro-alconyde LiND(OED, dans lequcl les liaisons Li- O-Nb sont déja formées. Par hydeolyse, on forme un gel mixte qui donne LiNbO, par chantfage 8 450 °C Des méthodes d’élaboration originales Les procédés sol-gel font actuellement l'objet Pun grand nombre de recherches fondamentales. Cependant le pro- blame des applications se pose a tous car ces procédé ‘veaux ne trouveront une réelle erédibilité que lorsqu’ils auront fait Ia preuve de leur intérét pratique. Pour ccla, faut qu’ils permettent soit d’élaborer des matériaux dé connus dans de meilleures conditions, soit de mettre sur le marché de nouveaux matériaux plus performants que leurs ‘concurtents,Le handicap majeur vient cependant du prix des précur- scurs alcoxydes et des problémes lis a 1a manipulation de ‘grandes quantités de solvants organiques auxquels 'indus- trie des verres et des céramiques n’est guére habituée. Les procédés sol-gel ne seront évidemment pas compéttifs pour Ja production de forts tonnages. Un kilogramme de verre «sol-gel » revient cent fois plus cher que le méme verre fait par « fusion-coulée ». Par contre, ils peuvent trouver des ceréneaux intéressents pour Ia fabrication de produits & forte valeur ajoutée. Le meilleur exemple est sans aucun doute le ddgp0t de revetements sur les vitrages pour le bitiment Dépét de films et de revétements est incontestablement dans ce domaine que les procé 4és sol-gel ont trouvé leurs principales applications. Le pre- rier brevet « sol-gel » a été déposé en 1939 en Allemagne par Schott Glaswerke pour la réalisation de rétroviseus. Ces sétroviseurs, commercialisés depuis 1959, ont été suivis de beaucoup d'autres produits tels que les revétements antire fets en 1964 et des revetements réfléchissants en 1969. Des revétements permettant d'accroitre le contraste optique des éerans cathodiques sont maintenant produits par plusieurs fabricants de téléviseurs. Le procédé de dépot le plus utilisé est sans conteste le trompage (dip-coating). Il consiste & plonger la pice & rev ir directement dans un bain d'alcoxyde. L'hydrolyse condensation se fait ensuite spontanément a ait. Cette tech- nique permet de réaliser en une seule opération des dépos sur les deux faces d'un vitrage de 12 mde surface. ‘Une autre application particulitrement originale a é1é ‘développée en France par une équipe du CEA av Centre «Etudes de Limeil-Vatenton [7]. Elle entre dans le cadre du projet Phébus de fusion contr6lée qui servira& la simulation des tirs nucléaires. Le probleme consiste 4 déposer des couches antireflets & la surface des optiques destinées au ‘guidage des faisceaux lasers de tx8s forte puissance (fi gure 4), Ces couches sont déposées par trempage sur des igure Elaboration de films et de revétemonts. ‘Les procedés sol-gel permttent de depose des revétemens de grande sur {face directement & partir dela solution de précursewrs. Catt tnsallation ‘es ullge pour le tratementantrefier sol-gel d'un eristal converisseur de {fréquence Le dp, réalisé par enducioncerrige, est obtemu en versant a soluion sur a surface dt erst. Le fim se forme par rotation du sup ‘port (lice CEA/Limei-Valenon) RECHERCHE lentiles dont le diamétre peut atteindre 80 em ou par centei- fugation sur des miroirs qui peuvent atteindre 110 em de diamatre, Fort de ce suce’s, le CEA, vient de développer, en partenariat avec un industriel allemand, une nouvelle tech nique de dép6t par enduction laminaire gui permet de revetir ‘niformément des substrats plans de formes variges Le procédé sol-gel est particulitrement simple & mettre en ceuvre. II permet aussi de réaliser des dépots sur des sup- ports trés vars : verres, c6ramiques, métaux, polyméres, ou plaquettes de silicium, Il ouvre, de ce fait, Ia porte & des applications urs variges, Compte tenu du a8s grand nombre de réalisations dans ce domaine, nous ne pouvons pas déiailler tous les travaux. Nous nous limiterons done & quelques exemples particuligrement significatts s principales applications des revétements sol-gel ont pour objet de modifier les proprisiés optiques des vitrages. Ce sont parfois de vértables nano-composites. C'est ainsi que les films réfléchissants produits par Schott Glaswerke (1iO,-Pd) ou Asahi Glass (TiO,-Au) sont formés d'une matrice de TiO, qui contréle la réfleetivité, dans laquelle sont dispersées des potites particules métalliques qui confé- rent les propricts dabsonption souhaitées, Parmi les déve- Joppements récents, citons le HUD (head up display) produit au Japon par Central Glass pour l'industrie automobile. On applique un film TiO,-SiO, d’envieon 0,2 jm d°épaisseur en haut du pare-brise. Ce dépOt sert d'écran pour visualiser les informations (vitesse, heure, kilométrage...) émises par un tube fluorescent. 150'000 dispositifs HUD ont été installés sur les voitures de In marque Nissan depuis leur commercia lisation en 1988. électronique offee elle aussi un débouché important pour les films sol-gel, Le procédé est compatible avee les technologies modemes et les dépéts sol-gel peuvent étre réa- lisés sur des plaguettes de silicium. II n'y a pas encore de réclle application industrielle, mais de nombreuses recherches se poursuivent actuellement dans le monde. Elles portent essentiellement sur les dépats céramiques tels que BaTiO, (iélectrique), LiNbO, (optique non linéaire), PZT (mémoire ferroélectrique), PMN (selaxors)... Citons une application tout a fait originale, développée en France par Kodak dans son usine de Chalons. Il s'agit de dorsales anti- statiques pour films photographiques déposées & partir de solutions collides d’ oxyde de vanadium, Les revétements protecteurs constituent eux aussi un mar- ‘ché potentiel important pour les procédés sol-gel. Des reve- tements anticorrosion (SiO,-Zr0,) peuvent &tre déposés sur les aciers, voire méme sur les matériaux composites & base Ge fibres de carbone ou de SiC (alumine, cordiérit... Des ements hydrophobes & base de produits fluorés sont déposés sur des pare-brise. Des barritres de protection contre la diffusion des alcalins ont 615 réalisées & partir de bbutylates de Sb, B, Ti et Al déposés & Mintéricur "ampoules lectriques. Des revétements anti-rayure & base de silice peuvent aussi protéger les optiques en matériau polymere. Fibres minérales En jouant sur les param@tres physico-chimiques, on peut synthétiser des gels dont la viscosité, & température am: biante, est adaptée A I’Elaboration de fibres. Ces fibres, obte- LEACTUALE CHIMUE coos is” EIBEBE] v1rt0mc1e cco ivr RECHERCHE rues par étirage ou extrusion, sont ensuite densifiées par cchauffage & quelques centaines de degrés. Le procédé sol- el permet d’élaborer 4 basse température, des fibres de matériaux réfractaires ce qui serait pratiquement impossible ‘en passant par Ia fusion, C'est ainsi qu’ Asahi Glass fabrique des fibres de silice pure a des températures inférieures & 1 000 °C alors que Ia silice Fond au-dessus de 1 700 °C. ‘La fabrication industrielle de fibres minérales s'appuie souvent sur des procédés étroitement ligs au sol-gel, Plusieurs firmes telles que 3M, Sumitomo, ICI et Asahi Glass fabri- quent actuellement des fibres de silice et d'alumine par de lels procédés, Les possibilités ne s'arrétent pas la, on trouve dans Ia littérature scientifique des fibres supraconductrices (Bi,Sr,CaCu,0,) qui préventent une température critique pou- vant atteindre 85 K. Plusieurs firmes étudient aussi la possibi« lité de fabriquer par sol-gel des préformes en silice de grande pureté, destinées & I"élaboration de fibres optiques. Des matériaux nouveaux Les aérogels Historiquement, les premitres recherches dans le domaine sol-gel coneemaient surtout Iélaboration de verres de slice, Cela permettait de réaliser directement, sans fusion nit polis- sage, Ia pide désirée en effectuant fa gélification dans un moule. Des pices aux formes variées ont ainsi pu étre réali- sées : verres plats, lentilles optiques, miroirs et méme des cylindres ereux en utilisant un movle rotatif. Cependant, il cst difficile d'éviter Ia formation de fissures lors du séchage du matériau et le procédé sol-gel n’est pas adapté a la fabri- cation de pidces massives de grandes dimensions. TL est par contre beaucoup plus intéressant d’essayer de ‘conserver le squclete trés ouvert du gel en retirant le solvant par séchage hypercritique, au-dessus du « point triple » du diagramme pression/température. Les matériaux obtenus de cette fagon sont appelés aérogels. Ils présentent une porosité tres importante qui peut atteindre 98 % [8] Putt es scientifiques, les aérogels constituent un maté- riau « fractal » idéal qui présente des propriétés tout & fait originales. Les physiciens du Laboratoire des matériaux vvitroux de Montpellier ont, en particulier, constaté que, dans un aérogel de silice, le son se propageait & une vitesse beau- ‘coup plus faible que dans le verre ou dans I'air. Une couche €'aérogel pourrait ainsi multiplier par cent l’énergie ultraso- nore émise par un systéme piézo-Clectrique. Les aérogels ont déja trouvé une application dans la pro duction de compteurs Cerenkov pour la détection de parti- cules de haute énergie. Ils sont utilisés au synchrotron DESY & Hambourg et au CERN & Genéve, Aujourd’hui, les applications visent plutat Visolation thermique et les cap- teurs solaires passifs. Les aérogels possédent des propriéiés isolantes remarquables. Un aérogel est cent fois moins condveteur de la chaleur qu'un verre classique et surtout cing fois moins que V’air. Le pouvoir d'isolation thermique, associé a la transparence dans le visible et 2 l'opacité dans Pinfrarouge, font des aérogels d’excellents boucliers ther- miques. Des plagues d’agrogel, en sandwich entre deux vitrages, permettraient de réduire considérablement les pertes thermiques dans le bitiment, Elles pourraient aussi Gviter les pertes par rayonnement infrarouge d'un mur noir recouvert d'aérogel pour produire un effet de serre. Des habitations solaires ont ainsi été ré et Tingen en Allemagne [8] lisées & Ardon en Suisse Les hybrides organo-minéraux La chimie douce mise en jeu dans les procédés sol-gel est compatible avec les réactions de la chimic organique. Il devient ainsi possible d’associer, au sein d'un méme maté riau, des espaces minérales et onganiques (91. Le développe- ‘ment de ces matériaux hybrides a été init, il y a une quin- zaine d’années, au Fraunhoffer Institut de Wurzburg en Allemagne. Ils connaissent aujourd'hui un développement, important et portent des noms variés tels que Ormosil (ORganically MOdified StLicate), ORMOCER (ORza- nically MOdified CERamic), Ceramer (CERAmic polyMER) ou Polyceram (POLYmer CERAMic). En France, de nombreux groupes tels que le Laboratoire de chi- mie de la matitre condensée 8 Paris et le Laboratoire des composés organiques du silicium de Montpellier ont déve- loppé de tels matériaux hybrides. ‘Ces matériaux peuvent étre obtenus & partir de précur- seurs mixtes tels que les organo-alcoxysilanes R’, ,Si(OR), qui comportent simultanément des fonctions hydrolysables, (Si-OR) et des fonctions organiques (Si-R’). On forme ainsi de véritables hybrides & I'échelle moléculaire. Les groupe rents organiques R’ restent fixés sur le squelette de silice qui se forme au cours des réactions d’hydrolyse-condensa- tion. De nombreux précurseurs R', ,Si(OR), sont au- jourd'hui disponibles sur le marché, + Les précurseurs trifonctionnels (x = 3) tels que (CH,)- Si-(OBD), conduisent, par simple hydrolyse des trois fonc~ tions $i-OR, 2 des gels puis des matériaux hybrides. Is per- ‘mettent d’introduire un groupement organique R’ (alcoy!, ary) qui modific les proprigtés du silicate (solubilité, plasti- cité, dureté) et peut méme conférer au gel de nouvelles fonc- tions (hydrophobe, optique, chimique...) + Les précurseurs difonctionnels (x = 2), tels que le dié- thoxydiméthylslane [DEDMS, (CH,),-Si(OC,H,),], ne for- ment que des cycles ou des chaines courtes. Associés & des alcoxydes M(OR), (M = Si, Zr..) qui assurent la réticula- tion, ils conduisent & une gamme de matériaux qui va d’un Tiguide huileux a un verre, + On peut encore associer un groupement organique poly: mérisable (vinyl, époxy, méthacrylate). On a alors une double réticulation, organique et minérale, qui conduit & de véritable copolymeres organo-minéraux. ‘La plupart des matériaux hybrides mettent en jeu des composés & base de silicium car la liaison covalente Si-C résiste bien & hydrolyse. Des travaux récents ont montré qu'il était aussi possible de réaliser des hybrides contenant ATautres éléments métalliques tels que le zirconium ou le titane [11] ‘Ces matériaux hybrides offrent toute une gamme de pos- sibilités nouvelles. Ils sc situent entre les verres et les poly. mitres organiques. Ils présentent la souplesse des polymeres, associée a la résistance des verres vis-t-vis des rayonne-ments UV, de la corrosion chimique ou de 1a chaleur. Les lemtilles coméennes constituent un excellent exemple pour illustrer les possibilités qu’offrent les hybrides organo-miné- raux. De telles lentilles ont &é fabriquées par voie sol-gel Pour cela, on moule une pice cylindrique de 10 cm de long et 2,5 em de diamétre obtenue & partir d’un mélange @’alcoxyde de silicium et de MMA (méthylmétacrylate). La polymérisation du précurseur organique est assurée par irra- Giation UV. Lorsque la pidce est durcie, on la découpe en disques que Mon usine ensuite a la forme désirée, De telles lentilles coméennes associent les avantages des polyméres rminéraux et des polyméres organiques. Les silicones présen- tent de bonnes propriétés mécaniques et une excellente per- méabilité & l'oxygéne. Cependant, elles sont trés hydro- phobes, d’oi I'idée d'introduire un groupement hydrophile ‘qui ne fixe pas les protéines des larmes de fagon & éviter le développement microbien. Le choix s’est porté sur un poxysilane commercial. Le groupe époxy est hydrolysé en fin de gélification de fagon a libérer un groupement glycol. Le matériau obtenu présente encore une mauvaise résistance 2a déchirure, Pour l'améliorer, on introduit un groupement organique susceptible de polymériser. Pour cela, on réalise une copolymérisation entre un méthacryoxysilane et un ‘méthacrylate. Cet exemple montre bien toutes les possibili- {és qu'offrent les hybrides pour l’laboration d'un matériau sur mesure en vue dune application donnée. Encapsulation de chromophores orgoniques Les matériaux hybrides peuvent aussi 6tre obtenus tres implement en mélangeant, dans un méme solvant, un com- pposé organique et un alcoxyde. On ajoute ensuite de eau qui provoque lhydrolyse et la condensation de "alcoxyde, La molécule organique reste piggée dans le réseau d’oxyde qui se forme autour d’elle, Dans ce domaine, la plupart des travaux consistent & encapsuler des chromophores orga- niques afin de séaliser des matériaux pour applications optiques. On utilise pour cela des matrices elles 1 hhybrides qui peuvent étre travaillées et polies de fagon & pré- senter une parfaite transparence optique. Selon la nature du chromophore organique, on obtient des propriétés de lum nescence laser (coumarines, rhodamines), de photochro- :isme (spiropyranes) et méme d’ optique non linéaire [12 es résultats tres intéressants ont été obtenus dans le domaine des matériaux laser par ’équipe de chimie du so- lide de "Ecole polytechnique avec Je Laboratoire d' optique Orsay. En quelques années, les performances des lasers sol-gel & colorants se sont considérablement améliorées, Les rendements de pompage alteignent pratiquement leur valeur théorique. Les énergies de pompe atteignent les 10 ml et les durées de vie dépassent le million d'impulsions dans le domaine du millijoule [13], Le domaine de l’optique non linéaire a lui aussi vu se développer de nouveaux matériaux sol-gel. LA encore des progres rapides ont été réalisés au cours des demigres années ten ce qui concerne les effets quadratiques. Des coefficients de second harmonique d,, de 150 pm/V ont été récemment obte- rus au Laboratoire de chimie de lz matitre condensée de Paris, Ils rendent les matériaux sol-gel ts compétitifs par rapport leurs concurrents minéraux ou polyméres [9] RECHERCHE Les iterations colorant-matrice jouent un rOle important dans tous ces matériaux hybrides. Elles peuvent ire mises 2 profit pour optimiser les propriété nées. C’est ainsi que des réponses tres rapides, de ordre de Ta seconde au lieu de I’heure, ont été obtenues en incluant des molécules photochromes (spiro oxazine) au sein de matrice fortement hydrophobes [14] ‘inclusion de molécules organiques au sein de matrices sol-gel poreuses conduit & la réalisation de capteurs chi- miques. Le colorant organique piégé dans les pores de la ‘matrice peut réagir avec de petites molécules présentes dans le milieu extéricur qui elles pouvent diffuser & travers la porosité ouverte de la matrice. On peut réaliser ainsi des cap- teurs chimiques ou biochimiques dont [a coloration est sen- sible 2 la composition du milieu extérieur. La fuisabilité du procédé a été démontrée pour des mesures de pH en utilisant Ja fluorescéine. Les chercheurs de luniversité de Dublin en Inlande réalisent des capteurs performants en déposant un film sol-gel & la surface d'une fibre optique [15]. Bioencapsulation au sein de matrices sol-gel ‘Au cours des demi ‘on a vu les procédés sol- gel s'ouvrir la biologie. En 1990, une équipe de Jérusalem a en effet montré qu'il était possible dencapsuler des, enzymes au sein d'une matrice de silice, Non seulement enzyme n'était pas dénaturée, mais elle conservait son acti- vité catalytique. I apparait méme parfois que Ia matrice sol- gel joue un r6le protecteur en augmentant la durée de vie de enzyme [16]. Depuis, ls bioencapsulation par voie sol-gel s'est beaucoup développée en vue de réaliser des bio-réac- teurs ou des bio-capteurs [17]. Le systéme le plus étudié est sans conteste Ia glucose ox dase, Cette enzyme qui catalyse l'oxydation du glucose ps oxygne joue un réle important dans le domaine alimentaire ct biomédical (diabéte). Plusieurs bio-capteurs ont été réalisés dans lesquels la présence de glucose est détectée par voie lectrochimique en dosant Poxygene consommé, Peau oxygé- née produite ow méme la réaction redox au niveau du site actif a aide d'un médiatcur tel que le ferocéne [18 Des essais menés avee des levures Saccharomyce cerivi- siae ont montré que la voie sol-gel permettait encapsoler des espaces biologiques encore plus complexes. Non seule- ‘ment la levure conserve son activité vis-i-vis de Ia dégrada- tion du sucrose pendant plusieurs mois, mais elle continue & se reproduire par bourgeonnement. De la méme fagon, la voie sol-gel a permis dencapsuler des cellules végétales et méme des organisme unicellulaires. La faisabilité du procédé a été mise en évidence avec des Leishmanies, protozoaires responsables d'une maladie, la leishmaniose, qui affecte de nombreuses régions du globe. L'intégrit€ cellulaire n’est pas affectée par encapsulation et les cellules conservent méme leur activité antigénique. Elles, Cont pu &tre utilisées pour la réalisation de tests immunolo- giques. Les anticorps, issus du sérum "un patient, diffusent A Vintérieur du gel oi ils se fixent spécifiquement sur les, ddéterminants antigéniques qui se touvent sur la membrane des cellules [19]. Des essais analogues ont été réalisés depuis afin de détecter la présence de cryptosporidies dans Ie traitement des eaux. vcuarécmoxs ocoreior INBBL] +110" omnes ocone 7 RECHERCHE ‘Tout récemment, on a encapsulé des flots de Langerhans, issus du pancréas de souris afin de les greffer sur une souris, diabétique. Des expériences effectuées in vitro et in vivo ont rmontré que ces cellules conservaient leur aptitude & produire de linsuline, I s'avere méme que, grice 2 la faible porosité du gel, les cellules sont protégées de Pagression des anti- comps produits par la souris greffée [20] Conclusion et perspectives Les procédés sol-gel remettent en évidence "importance de la chimie dans le domaine de I’élaboration des matériaux, Ts ont connu un grand développement au cours des dix der- nidres années. En fait, Ia premiére synthtse sol-gel a été publiée il y a 150 ans par un chimiste frangais, JJ. Ebelmen, {qui avait déja deviné I'importance que pourrait avoir ce pro- ccédé dans le domaine de optique. Des 1930, les alcoxydes avaient &1€ utilisés pour Ia préservation des pierres an- ciennes, mais il fallut attendre les années 60 pour que le développement industriel commence vraiment avec les reve tements produits par Schott en Allemagne. L’intérét scienti- fique a été encore plus tardif, le premier congrés intemnatio- nal ne s'est enu qu’au début des années 1980. Au début, 'essor des procédés sol-gel semblait lié essen: tellement a Ia possibilité d’élaborer des matériaux déja cconnus (verres, céramiques, fibres ou revétements) directe- ‘ment & partir du sol ou du gel sans passer par la poudre. L’optique a changé au cours des dernitres années avec apparition des hybrides organo-minéraux ou bio-inorga- niques. La chimie sol-gel offre maintenant la possibilité de synthétiser des matériaux totalement originaux qui sortent complétement des sentiers battus. References [1 Brinker C4. 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