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Entretien avec:

La Péniche

Aurèle CREON
Antoine CHEVALIER
LP MPE
Nous nous sommes intéressé à La Péniche, ancienne salle de concert de la métro-
pole lilloise fermée fin 2016.
Sa condition de bâteau ainsi que de salle privée la rendait distincte du reste du
paysage culturel lillois.
De plus, sa fermeture soulève des questions. Nous avons donc cherché à en savoir
plus en contactant une personne de l’équipe.

Présentation:
Située aux abords de l’esplanade, la Péniche se situe au delà du vieux lille, loin du “centre gares”
lillois. Anciennement un café théâtre, c’est AGDL qui récupère les lieux pour en faire un “labora-
toire musical”. Loin des Maisons Folie et des zéniths, la salle tenait en quelques mots:
privée, petite jauge, bâteau.
Pendant sept ans, AGDL a tenu à proposer une programmation de qualité à petit prix.

Située aux abords de l’esplanade, la Péniche se situe au delà du vieux lille, loin du “centre
gares” lillois. Anciennement un café théâtre, c’est AGDL qui récupère les lieux pour en faire un
“laboratoire musical”. Loin des Maisons Folie et des zéniths, la salle tenait en quelques mots:
privée, petite jauge, bâteau.
Pendant sept ans, AGDL a tenu à proposer une programmation de qualité à petit prix.

Ce qui nous interpelle, plus loin que son originalité, c’est sa condition de salle privée dans
un paysage culturel lillois où associations (Lille3000 / Aeronef), la MEL et la région ont une
grande importance. Plus loin que l’éternelle “contrainte des subventions” à laquelle les acteurs
habituels du marché doivent faire face (sans compter les acteurs privés de grande envergure),
nous voulions apercevoir ce que cela changeait fondamentalement pour une petite salle avec
une jauge de 100 personnes d’être justement “privés” au milieu des SMAC.
De plus la Péniche ayant fermée, peut-on en conclure à une difficulté d’apparaître dans le
paysage lillois? Cela est-il directement lié à leur statut d’acteur privé ?
La Péniche existe toujours sous le nom de La Vague, est-ce changer de modèle par contrainte
ou par envie ?

Nous avons donc contacté Eugénie Verbecke, ancienne attachée de production à


la Péniche, le mousse dans cette équipe de trois personnes. Elle a bien voulu répondre à nos
questions concernant la salle, son intégration régionale, et ce que cela impliquait.
Entretien:
- Bonjour Eugénie ! Pour commencer, peut-tu te présenter rapidement, ainsi que ton parcours ?
- Bonjour les garçons! Alors je suis Eugénie Verbecke, j'ai 25 ans et je suis attachée de production, c'est à
dire que je travaille dans l'organisation de dates de concert, gérer toute la logistique et préparer l'arrivée des
artistes. J'ai commencé par une formation classique après mon BAC en intégrant une école de commerce sur
Amiens, spécialisée dans le management et le marketing. Après ma licence j'ai décidé d'enfin sauter le pas en
entrant en Master, en production de spectacle. Par la suite, j’ai fait mes armes à la Péniche. Je suis restée là-bas
deux ans, mon contrat s'est arrêté en même temps qu'elle.

- La péniche, en quelques mots ?


- La Péniche c’est un sacré lieu! J’ai encore du mal à en parler au passé car pour moi (et pour beaucoup) c’était
un lieu unique dans la métropole lilloise, voire même régional, atypique à souhait et de grande qualité. En
quelques mots la Péniche c’est un laboratoire musical. Petite salle de concert de 100 personnes, qui permettait
de voir des artistes prometteurs mais dont la notoriété est encore trop confidentielle pour se produire dans
d’autres salles. C’est un lieu de découverte, le rendez-vous de tous les amoureux de la musique rock indé et
électo. C’est surtout un lieu bon enfant où tout le monde y trouve son compte.
La Péniche c’est un projet lancé par A GAUCHE DE LA LUNE, grande boîte de pro-
duction reconnue nationalement pour ses événements tel que Les Paradis Artificiels, Le
Festival Ground Zéro ou encore la Fête de L’Humanité. L’occasion du coup pour AGDL
de faire découvrir ses nouveaux artistes sur les planches du bateau mais également de
laisser la main à au programmateur, Yann, pour créer la nouveauté.
- La différence entre la péniche et les autres salles ?
- Pour moi des différences il y en a plein ! La programmation marchait principalement au coup de coeur plus
qu’à la tendance, comme peuvent le faire certaines autres salles. La grande différence c’est sa jauge, 100 per-
sonnes. Plutôt rare dans la région. Et puis il ne faut pas l’oublier, le simple fait d’être une péniche fait claire-
ment la différence!

- La péniche est un lieu privé ? Ca change quoi pour vous ?


- Comme dit précédemment, La Péniche est né d’un projet plutôt ambitieux d’AGDL. Etre un lieux privé c’est
top parce qu’on ne dépend de personne et on fait un peu comme «on veut». Vu qu’on est soumis à aucune
subventions et aucun budget de la ville, on a pas doit de comptes à personnes. La grande différence va se
jouer sur l’aspect financier concrétement. Dans le privé, c’est la liberté qui prévaut. On est soumis à moins de
responsabilités territoriales mais du coup c’est des fonds en moins... Pour contrer ça nous nous sommes lan-
cés dans la privatisation de La Péniche en proposant des packs séminaire d’entreprise, location en tout genre
pour particuliers ou entreprise. Un bon moyen de mettre du beurre dans les épinards. A la base ce n’était pas
un choix. Plusieurs années de suite nous avions envoyé des dossiers de subventions, nous voulions vraiment
nous instaurer de façon pérenne dans le paysage culturel de la ville, mais en vain. C’est un peu ça aussi qui
nous à obligé à fermer prématurément.
- Justement, ces subventions, ça ne vous rend pas plus fragiles que d’autres dans la métropole ?
- C’est certain, mais on avait plutôt de la chance de ne pas vraiment être en concurrence directe: on avait une
toute petite jauge, on était très atypiques... Du coup on se battait pas au niveau de la programmation avec les
autres salles: on ne peux pas comparer un concert à la Péniche d’un concert à l’Aéronef!
Donc oui on était fragiles et on a du s’adapter, mais par rapport au territoire et pas par rapport aux autres
acteurs du marché.
-En 7 ans d’existence, vous avez eu à faire à des changements de politiques à cause de la ville ?

- Oui nous avons toujours été les premiers impactés par tout ça. Pourquoi? parce qu’on ne voulait pas fer-
mer et donc on restait irréprochables en toutes circonstances. Mais ça a toujours été la bataille. La foire en
septembre et leur autorisation de stationner sur «notre» berge, impossible donc d’accueillir comme il se le
doit notre public ou les tour bus des artistes. Nous avons du également changer nos heures de fermeture, nos
restrictions sonores, impossible également d’accueillir plus de 50 personnes sur la terrasse du bateau... Pleins
de petites choses qui au quotidien nous handicapaient quelque peu. Surtout que sans subventions, entretenir
une péniche et y faire des modifications légales tous les quatre ans à cause des politiques... C’est ce qui était le
plus compliqué.

- Justement, avec les gouvernements successifs lvous avez ressenti des changements ?

- Oui bien-sûr. Je n’étais pas là depuis le début mais mes collègues en parlaient régulièrement. Les politiques
locales et les nouveaux projets d’ensemble ont parfois fait de l’ombre à notre activité, nous privant de certaines
libertés au détriment d’autres entités. Quand on travaille dans le spectacle, c’est souvent le bras de fer avec les
collectivités. Nous faisons partie du paysage culturel mais nous ne sommes pas reconnus comme tel car nous
étions une Péniche justement. Ils se renvoyaient la balle régulièrement avec Les Voies Navigables de France,
pour savoir qui régissait notre entité.

- Et quelle est votre intégration par rapport à la région ?

- Dans notre cas c’est un peu particulier. Nous ne pouvions faire partie «du club» des salles de spectacle
lilloises car nous étions référencé comme «navire» et non comme salle, et de l’autre côté, aucune association
n’a été formé par les voies navigables de france pour les péniches/concert. A notre initiative nous avons voulu
contrer tout ça et nous avons organisé un festival de péniches sur Béthune, réunissant toutes les péniches/
concerts de la région. Tous ces changements nous on poussé à faire entendre notre voix, et donc à monter de
nouveaux projets! En parallèle, il est certain que nous sommes de loin intégrés grâce à un public fidèle.

- L’après péniche c’est quoi ?

- AGDL n’a pas lâché l’affaire et à lancé un nouveau projet: La Vague. Ceci fait bien sur référence à la Péniche.
On garde le même staff ou presque, la programmation est plus tournée du côté
d’AGDL mais toujours sur les même conditions: faire découvrir et faire venir des
coups de coeur en petit comité. Aujourd’hui c’est le Splendid qui nous accueille.
Le public Péniche est toujours fidèle et ça fait toujours très plaisir de les revoir aux
événements, ça montre bien que l’aventure n’est pas fini. Et plus besoin de se sou-

- Le rayonnement de la péniche, c’était grâce à la région ?


Ou c’était contraint par celle-ci ?
- Notre cas de figure était assez atypique en tous points ,surtout au niveau de la structure. Donc compliqué
de répondre à toutes les normes et de s’instaurer dans le cercle culturel de la région. En parallèle, même si les
différentes politiques ont pu nous impacter, grâce à notre condition de «privé» nous ne réfléchissions pas en
terme de région ou de ville. C’était à la fois notre chance, nous de devions de comptes à personne, mais aussi
notre point faible. Car nous étions seuls dans cette aventure! Donc je dirais ni l’un ni l’autre.
Conclusion:
Suite à cet entretien, nous pouvons mieux cerner les spécificités de ce lieu. Acteur
privé, la salle jouissait d’une quasi totale liberté. Peut-être autant impactés que
d’autres salles en termes de politiques culturelles, la Péniche tire sa révérence à
cause d’un modèle économique trop incertain. Cependant, la relève est déjà
assurée sous une autre forme, sans lieu fixe. La fermeture de la Péniche n’est donc
pas à voir comme un risque pour d’autres acteurs culturels lillois, même s’il est
évident que le paysage tend à se métamorphoser.

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