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CAUSES COMMUNES
bimestriel des Socialistes Ville de Genève n° 18
février - mars 2010

Dossier

Sécurités ?

Editorial

L’arbre qui cache la forêt


Les socialistes, en défendant la redistribution des Traiter la cause, pas (seulement) les conséquences
richesses et le respect des droits humains réalisent une De ces différents éclairages ressort une position socialiste :
politique fondée sur la sécurité pour toutes et tous. il s’agit de traiter les causes de ce qui se prolonge avec
Félicien Mazzola Une sécurité basée sur des conditions de vie dignes de réelles conséquences catastrophiques.
pour tous les êtres humains, quelle que soit leur prove-
nance et leur milieu socio-économique. N’est-ce pas la Ces causes ne sont pas inéluctables, mais résultent de
meilleure sécurité possible ? choix politiques faits en toute conscience par les partis
La sécurité, thématique omniprésente de l’automne de droite et d’extrême-droite, dans le seul but d’assurer
politique électoral, est toujours abordée de façon Multiples facettes et d’accroître le pouvoir et la richesse des plus nantis de
réductrice. Cantonnée au problème de la délinquance, Dans ce numéro nous abordons les multiples facettes de ce canton et des actionnaires de la planète.
on finit par oublier l’essentiel : c’est la pauvreté, les l’insécurité : les questions du droit à l’alimentation ou
inégalités, les conflits armés et les catastrophes naturelles de la politique écologique sont aussi centrales que celles Les solutions existent
qui créent l’insécurité. des politiques sociales et de santé ou de la protection du Pour contrer cela, et pour tous ceux et toutes celles
travail. Les socialistes, engagés sur le terrain, constatent qui souffrent d’insécurité ou de pressions diverses, des
Epidémie saisonnière chaque jour les dégâts engendrés par la crise financière, solutions existent. Certaines sont présentées dans
Depuis novembre et les élections cantonales, quelques par une économie basée sur les fluctuations boursières ce numéro, d’autres - nombreuses - sont encore à
mois ont passé et il faut croire que la crise de « sécurite » particulièrement désécurisantes ou encore par des promouvoir et à préciser. Mettons-nous donc au
aigue est passée. Il semblerait que les dealers aient politiques culpabilisantes envers les sans emploi. travail, dès maintenant !
disparu des Pâquis, que la « petite délinquance » se soit
évaporée avec l’arrivée d’une nouvelle cheffe à la tête du La question du rôle de la police, et en particulier la
département de la police. Peut-être ... présence nécessaire d’une véritable police de proximité,
démantelée par les politiques de droite, est également Points forts
Ou peut-être que le problème n’est pas là où on l’imagine au cœur de nos préoccupations. Pour en parler, nous
de prime abord. Ce numéro de Causes communes est avons rencontré un policier de profession, socialiste de Cause toujours / Brèves p.2
consacré à cette thématique particulièrement complexe. conviction, qui illustre bien le quotidien de la police,
qui doit autant viser à prévenir qu’à punir. Actualités municipales p.3
Quels sont les facteurs qui créent le sentiment de sécu-
rité ? Au-delà de la montée de la pauvreté provoquée Dossier : Sécurités ? p.4-9
par la crise financière, il faut rappeler que la sécurité Enfin, pour illustrer cette thématique complexe, nous
a été de tout temps essentielle au développement des avons eu la chance de pouvoir travailler avec le photo- Grand Angle : Regard sur Haïti / Cetim p.10
sociétés humaines : sécurité du logement, du travail, graphe Eric Roset, connu pour son travail autour des
p. 11 p. 3
sécurité sociale, système de santé performant, sécurité migrants - roms entre autres. Il nous propose un regard Comme une cause : l’Association Partage p.11
militaire, assurances sociales, protection des travailleurs, transversal et décalé, avec un brin d’ironie permettant p. 10
des travailleuses, protection de l’enfance… de prendre le recul nécessaire. Portrait : Virginie Studemann-Wathier p. 12
p.12
CAUSE TOUJOURS / BRÈVES CAUSES COMMUNES
2
Promesses permanentes Mirage politique Recension
« Le développement durable est la priorité des priorités « Chevrolet, dans son rêve d'exécutif de la Ville, est
des Nations Unies pour 2010 », a déclaré le 11 janvier crédible », assure Pascal Décaillet dans « La Tribune » La ville et la sécurité
le Secrétaire général de l''ONU, Ban Ki-moon, qui du 21 janvier. Ouais. Sylvain Thévoz - Paul Landauer est architecte, ensei-
a appelé à la « mobilisation pour réaliser les Objectifs A propos, quelqu'un des nouvelles de la pétition gnant à l’Ecole d’architecture de la ville et des territoires à
du Millénaire pour le développement », proclamé il y lancée par Chevrolet et les milieux immobiliers Marne-la-Vallée.
a déjà dix ans. pour la construction de 20'000 logements « tout de Dans ce bref ouvrage, il
C'est pas le développement qui est durable, c'est le suite » à la Praille ? plaide pour une nouvelle
compréhension de l’espace
discours sur le développement durable.
urbain afin de ne plus
Parc à bourges envisager la sécurité comme
La menace de voir implanté dans le périmètre relevant uniquement de la
Praille-Acacias-Vernets un quartier « haut de gamme » police mais des architectes,
(un parc à bourges, en clair) est un « fantasme » qui, des paysagistes et des urba-
« né dans l'esprit torturé de certains » , n'a « jamais nistes. Il tire tout d’abord
un bilan lucide et critique
existé officiellement », a assuré Mark Muller après la
des aménagements visant
conclusion d'un projet d'accord sur ce périmètre à gérer les flux des person-
entre ses services et les opposants au projet initial. nes et ses conséquences :
On pourrait ironiser bêtement sur le fait qu'il ait l'imposition d’une mobi-
fallu lancer un référendum pour que ce « fantasme » lité maximale dans la ville
se dissipe ou sur le léger pléonasme qui consiste à afin d’éviter les rassemblements de foule et donc les points
proclamer qu'un « fantasme » n'ait « jamais existé », de contact perçus comme a priori risqués.
DR
ce qui après tout est le lot commun des fantasmes, Dénoncer le découpage
mais on se contentera de faire observer que la peur Il illustre sa réflexion par l’exemple des stades, des
4x4 de grands chemins du vote populaire est le commencement de la aéroports qui, à ses yeux, sont devenus les modèles de gestion
Défendant dans le magazine patronal « L'Extension » courante et poussent à l’invention de zones privées,
sagesse urbanistique.
son projet de parking souterrain aux Eaux-Vives, exclusives, séparées où certaines classes de citoyen-ne-s
n’entrent même plus. Il dénonce ces découpages, car ils
l'increvable bagnolard Jean de Toledo précise que
la sortie dudit parking se situerait « dans le jardin La raie du milieu augmentent paradoxalement la menace que représente tout
autre venant d’ailleurs. Ils portent aussi en eux le risque de
anglais ». Il y a un siècle, Alphonse Allais voulait « UBS commence à remonter la pente », nous annonce faire disparaître tout espace public, et que des villes hyper-
construire la ville à la campagne. Aujourd'hui, de le « Courrier » du 10 février. Ouais. sécurisées soient soumises à des systèmes de protection qui
Toledo veut faire sortir les bagnoles du parking dans Même que c'est nous qui avons payé le tire-fesses... les enferment et créent de l’insécurité.
un jardin public. Ouvrir l'espace
On progresse. Ensuite, il plaide avec intelligence pour des aménagements
Pourris à tout prix où la meilleure sécurité est la présence des autres portée
« Est-ce qu'un homme politique peut utiliser n'importe par une nouvelle pratique des espaces publics et de leurs
Big father quel débat de société pour marquer des points ? », mobiliers, et dont l’ouverture est le maître mot. Reprenant
Affichettes du « Matin »: « Antonio Hodgers filmé par se demande, à propos (par exemple) de l'initia- une intuition d’Aaron Betsky selon qui : « faire de l’architecture
un détective privé »... ne signifie pas seulement édifier mais donner vie à l’espace
tive « antiminarets » l'avocat libéral Alexandre de
qui nous entoure et à nos relations sociales », il permet à ses
Quand même, Ueli, t'exagères... Senarclens, dans « La Tribune de Genève » du lecteurs de rêver une ville nouvelle et un vivre ensemble
29 janvier... permettant de vaincre la peur et d’habiter véritablement
une ville commune.

Eric Roset : Brèves


photographe
Photographe indépendant et auto- Décoder la vidéosurveillance
didacte, Eric est un passionné d’image Grégoire Carasso - Quelle différence y a-t-il entre la
depuis sa jeunesse. Dès lors, la photo- vidéosurveillance contemporaine et la vidéosurveillance à
graphie l'accompagnera à travers son papa ? La première, dans sa réalité genevoise, coûte 2 millions
parcours professionnel dans l'animation par année et 6 millions d'investissements, pour 8 caméras.
socioculturelle et sa passion pour la La seconde, au Grand-Saconnex, a représenté une somme
montagne. unique de 200'000 francs, pour 60 caméras. Dans ce cas,
Eric publie ses premières photographies les caméras ont été placées dans des lieux très délimités
en 2004 et collabore rapidement avec pour dissuader de commettre des déprédations mineures
la presse suisse romande ainsi qu'avec mais coûteuses.
diverses institutions. Il vit de la photo Dans l'autre, des techniciens sont 24h/24h derrière une
depuis 2007 et mène en parallèle depuis multitude d'écrans pour opérer un contrôle en temps réel
plusieurs années un travail autour des de l'espace public. Cette vidéosurveillance active (et sans
migrants - Roms en particuliers. résultats démontrés) prive la collectivité de moyens pour
renforcer une police de proximité, présente dans les rues,
Pour ce numéro, il nous propose un avec des postes dans les quartiers. Ainsi, il faut s’y oppo-
regard transversal, pluriel et décalé sur ser, quelles que soient les convictions de chacun et chacune
la thématique de la sécurité. dans l'arbitrage entre sécurité et libertés individuelles.
© Eric Roset

CAUSES COMMUNES - Bimestriel édité par le Parti socialiste de la Ville de Genève - 15, rue des Voisins
- 1205 Genève - www.ps-geneve.ch - courriel: felicien.mazzola@ps-geneve.ch - Coordination rédactionnelle:
Causes Communes directement dans
Félicien Mazzola, Virginie Keller, Sylvain Thévoz. Ont collaboré à ce numéro : Luc Broch, Isabelle Brunier, votre boîte aux lettres tous les deux
Grégoire Carasso, Pascal Holenweg, Ninian Hubert van Blyenburgh, Vincent Gall, Laurence Fehlmann-Ri- mois pendant 1 an?
elle, Aloys Lolo, Christian Lopez Quirland, Liliane Maury Pasquier, Danièle Mazzola, Roger Michel, Jean- Seulement 10 francs!
Charles Rielle, Nicolas Roguet, GuillaumeMandicourt, Sandrine Salerno, Virginie Studemann-Wathier, Manuel Abonnez-vous en écrivant au PSVG!
Tornare, Alberto Velasco, Nicole Valiquer.
par courriel: psvg@ps-geneve.ch |
Graphisme, maquette et mise en page : www.atelierssud.ch. Impression sur papier recyclé : cyclus offset,
www.ps-geneve.ch, rubrique journal |
Imprimerie Nationale, Genève. Tirage : 3000 exemplaires.
ACTUALITÉS MUNICIPALES
Les Socialistes Ville de Genève
3

Budget 2010

Indexation des subventions


Lors du vote du budget 2010 de la Ville de Genève, les Socialistes ont fait voter, grâce aux soutiens des membres de l’Alternative, une
indexation au coût de la vie pour l’ensemble des subventions aux associations sociales, sportives et culturelles.

Le tissu associatif: (électricité, loyers, notamment). Sans lors, il s’agit de reconnaître les moyens
un rôle primordial à Genève une adaptation régulière, les associa- dont ces acteurs de terrain ont be-
Christian Lopez-Quirland, Cela fait plusieurs années que les so- tions voient par conséquent leur pou- soin pour réaliser leur travail dans les
Conseiller municipal cialistes prônent et se battent pour voir d’achat diminuer d’année en an- meilleures conditions.
que le principe de l’indexation soit née, pénalisant ainsi leur mission.
adopté aussi bien au niveau cantonal Reconnaissance du travail accompli
que communal. En effet, les organi- Des besoins bien réels et égalité de traitement
Une victoire et une première, tant à
sations du monde associatif jouent un Dans ces conditions, on ne peut pas Il est exclu pour les socialistes d’avoir
Genève qu’en Suisse.
rôle central dans la cohésion sociale, accepter le principe d’une subvention des associations de première et de
Le mécanisme d’indexation proposé
dans la construction du vivre ensem- sans accepter qu’un jour ou l’autre on deuxième classe. Celles pour qui l’in-
par le Parti socialiste repose sur l’aug-
ble et contribuent sans aucun doute à puisse indexer le montant alloué. Si dexation est de l’ordre de l’évidence et
mentation cumulée au coût de la vie
la qualité de vie. tel devait être le cas, nous nous trou- toutes les autres, la grande majorité,
sur ces 5 dernières années, soit 3.09%,
verions dans un système « de subven- qui devraient se débrouiller comme
ceci simplement afin de maintenir le
Baisse constante tion caritatif ». En tant que socialistes, elles le peuvent pour boucler les fins
«pouvoir d’achat» des associations à
Depuis de nombreuses années, le mon- au contraire, nous sommes d’avis que de mois.
un niveau équivalent. Celles-ci doi-
de associatif tire la sonnette d’alarme lorsqu’une subvention est octroyée,
vent en effet faire face à des dépenses
et demande à ce que les montants al- c’est parce qu’il existe un réel besoin, L’indexation proposée par les socia-
qui augmentent sans cesse, avec l’in-
loués puissent être renégociés. Cette une nécessité, voire une urgence. Les listes en Ville n’est que justice et re-
flation, tandis que, situation fort in-
demande est légitime étant donné prestations et services accomplis par le présente une avancée certaine vers la
juste, les subventions reçues restaient
que le coût de la vie augmente et que monde associatif sont complémentai- reconnaissance et l’égalité de traite-
au même niveau.
les charges fixes prennent l’ascenseur res à l’action des pouvoirs publics. Dès ment.

Ville de Genève

Un nouveau statut
pour le personnel
· la modernisation du Statut du point
Sandrine Salerno de vue des droits du personnel et de
Conseillère sa gestion
administrative · le progrès social
· le dynamisme des rapports de
travail, dans la garantie des droits
En 2010, la Ville de Genève et du personnel
ses employé-e-s devraient disposer · la lisibilité par une simplification de
d’un nouveau statut du person- la réglementation
nel : moderne, social, transparent · l’équilibre de la réforme
© Eric Roset
et plus juste. Le projet est sous toit.
Revalorisation des petits salaires définitivement ancré dans le Statut. évidemment aux victimes potentielles
Il a été transmis aux conseillers et Le résultat est à la hauteur des Par ailleurs, le nouveau Statut propose d’être mieux protégées.
conseillères muncipales qui doi- espérances. La refonte du Statut beaucoup plus de clarté : une grille et
vent encore l’approuver et mettre est d’abord une réforme sociale et un règlement d’application uniques Transparence, partenariat social
un point final à ce travail de Si- progressiste. Avec à la clé, une reva- permettent une meilleure lisibilité des et égalité
syphe. lorisation du salaire des premières droits et devoirs de chaque employé-e Ce nouveau statut constitue une
classes de traitement et l’intégration et de l’employeur. avancée sociale indéniable. Les prin-
des actuelles augmentations extra- cipes qui nous sont chers ont été in-
Le projet a pris du temps. Beaucoup
ordinaires dans une grille salariale Une réponse cohérente et solide aux troduits : transparence, partenariat
de temps même. Le Statut actuel-
unique. Le nouveau Statut vise aussi problématiques actuelles social et égalité. Celui-ci fera de
lement en vigueur date de 1926, les
à rendre la fonction publique de la Tout en consacrant la liberté syndicale l’administration municipale une
derniers changements d’importance
Ville plus attractive en proposant une et le rôle des organisations représen- administration exemplaire dans
de 1986 et le début des travaux sur
meilleure rémunération des employés tatives du personnel, le texte favorise ses rapports avec ses employés et
la refonte de 1997…. Entre décembre
et employées en début de carrière. la mobilité des collaborateurs et employées ! Il était temps !
2007 et juin 2009, quarante séances
se sont déroulées. Au cours de ces collaboratrices en améliorant la
dernières, l’ensemble du Statut, arti-
cle par article, a été discuté, débattu,
Un effort particulier a été consenti
pour les familles. Une allocation
formation continue. Les procédures
de licenciement ont été clarifiées.
L’engagement ne
revu et finalement approuvé par tous
mensuelle supplémentaire de cent
francs a été accordée et, outre une
Après la période d’essai, le licencie-
ment ne pourra être prononcé que
nuit pas à la santé
les partenaires.
amélioration du congé maternité, un pour un « motif objectivement fondé ». www.ps-geneve.ch/
congé paternité de quatre semaines En outre, une nouvelle procédure de adhesion
5 objectifs
a été introduit. Le principe d’égalité plainte a été introduite en cas d’at-
Au début de la négociation, le Conseil
entre hommes et femmes au sein teinte à la personnalité (mobbing, psvg@ps-geneve.ch |
administratif s’est fixé cinq objectifs :
de l’administration municipale est harcèlement sexuel). Cela permettra 022 338 20 78 |
DOSSIER CAUSES COMMUNES
4

Genève (XVIe-XIXe siècles)

L’obsession sécuritaire
Isabelle Brunier nous éclaire sur les processus de sécurités architecturaux programme de démolition, qui suscita une
forte opposition, fut néanmoins réalisé
et la nécessité de défendre Genève contre un extérieur menaçant depuis en dix ans et les anciens quartiers se virent
le XVIe. La sécurité peut prendre diverses formes : longtemps, pour notre graduellement remplacés par des bastions,
ville, elle a été synonyme d’une enceinte parfaite, mettant les biens et les ces éléments polygonaux avancés, reliés
personnes à l’abri d’attaques surprises ou de sièges. entre eux par des courtines, murailles
basses et épaisses renforcées de remparts
de terre. Ce nouveau type de fortification,
constitués, souvent à proximité d’un inventé en Italie, devait résister aux atta-
établissement religieux comme le couvent ques d’une artillerie à boulets de fer, lancés
Isabelle Brunier, de Palais, celui de Saint-Victor ou encore par des canons toujours plus puissants.
Historienne, l’église paroissiale de Saint-Léger. Sur
Conseillère municipale la rive droite, en revanche, Saint-Jean- Commencé dans les années 1530, le
hors-les murs restait isolé. chantier dura, en plusieurs étapes, jusqu’aux
Genève, ville ouverte années 1750 environ, engloutissant
La cité-forteresse durablement des sommes gigantesques, DR
Au Moyen Age, et jusqu’aux années
1530, Genève, comme toutes les cités Dès 1530 cependant, six ans donc avant les forces des artisans et l’énergie des de Savoie successifs, avec toutefois des
d’Europe, s’abritait derrière une haute l’adoption officielle de la Réforme, les habitant-e-s astreint-e-s aux corvées périodes plus calmes et moins suspicieuses.
et mince muraille ponctuée de tours autorités prirent la décision de renfor- pour aider à la construction. Et ceci Quel que soit le climat psychologique,
rondes ou carrées, et percée de portes qui cer les défenses de la ville en choisissant sans compter les énormes quantités de les paysans savoyards apportaient leurs
pouvaient être fermées la nuit ou en cas une méthode radicale : la destruction matériaux (pierres, chaux et sable pour le denrées quotidiennement au marché,
de danger particulier. Ces accès étaient totale des faubourgs extérieurs. Ceci en mortier, terre) qu’il fallait trouver, trans- et les propriétaires genevois montaient
nombreux puisqu’on en comptait huit vue de dégager l’espace suffisant pour porter, assembler. Hommes, femmes, passer l’été dans leurs maisons de cam-
sur la rive gauche et trois pour le bourg la construction d’une vaste enceinte enfants, surtout issus des classes laborieuses pagne... L’unique tentative, on le sait, se
de Saint-Gervais. De plus, à l’extérieur de bastionnée, elle-même précédée d’une puisque les riches pouvaient compenser concrétisa par la fameuse Escalade dont
ces portes, le long des voies principales, zone non aedificandi destinée à contrôler leur travail en argent, se succédèrent pour l’échec fut immédiatement qualifié de
des faubourgs s’étaient progressivement l’approche d’éventuels ennemis. Ce ces rudes tâches, qui, rémunérées, assu- « miraculeuse délivrance » renforçant ainsi
raient pourtant également leur existence. l’image de la cité élue de Dieu ! Le pro-
Des besognes d’utilité publique en somme. gramme de fortification se poursuivit
De nombreux experts furent consultés, cependant jusqu’au milieu du XVIIIe
français d’abord, hollandais ensuite, don- siècle avant d’être finalement interrompu
nant des avis parfois contradictoires sur au nom, entre autres, des impératifs
ce que devaient être les solutions les plus budgétaires... Il fallut encore un siècle
efficaces. pour que James Fazy et les radicaux réus-
sissent à convaincre leurs concitoyens de
Une seule et unique attaque démolir cette énorme ceinture pour dés-
Des rumeurs entretenaient constamment enclaver la ville, la développer et l’ouvrir
l’angoisse de l’attaque de la part des ducs physiquement au monde !

tandis que la croissance démographique provoque la mort d’un enfant de


battait des records. Le pourcentage des moins de dix ans toutes les 5 secondes ?
personnes sous-alimentées dans les pays Autant de meurtres comme le précise
en voie de développement passait de 33% Jean Ziegler, rapporteur spécial de l’ONU
en 1969, à 16% en 2006. du droit à l’alimentation.

La déroute du système de marché Pour une véritable politique agricole


© Eric Roset dérégulé de proximité
Mais la spéculation sur les prix agricoles En Suisse, l’UDC défend depuis toujours
et la crise financière ont radicalement d’un côté ce marché international qui dé-
Sécurité alimentaire inversé ces tendances : en 2009, plus d’un truit les petits producteurs à l’étranger, et

A quand une sécurité élémentaire milliard d’êtres humains souffrent de


sous-alimentation. Ces chiffres, pas plus
de l’autre un soutien financier aux petits
agriculteurs suisses. Et pour masquer ce
que les images – émeutes ou migration – paradoxe, ce parti ajoute comme onction
Balayer d’un revers de la main les préoccupations des habitant-e-s de la faim, ne semblent pouvoir faire face idéologique la souveraineté alimentaire,
dans le domaine de la sécurité n’est certainement pas une voie à suivre. à une indifférence croissante. bien comprise comme une condition
Focaliser le message socialiste sur cette seule thématique non plus, car nos d’une politique de réduit national.
La Déclaration universelle des droits de
réponses - police de proximité, lutte contre les inégalités, qualité de vie l’homme, le Pacte international sur les Pour les Socialistes, le sens du soutien à
et création de perspectives sociales - s’inscrivent dans un projet de société droits économiques, sociaux et culturels une agriculture de proximité ne repose
qui intègre toutes les facettes de la sécurité. ou les objectifs du millénaire pour le pas sur le critère national, mais sur le
développement n’y feront rien tant que local et le global. Sur le local pour l’emploi,
monde laisse à n’importe qui un espoir le système commercial international en les liens, la qualité de vie et l’environne-
Grégoire Carasso, de survie plus long que la privation d’eau général – et celui des denrées alimentaires ment ; et sur le global pour que ces sou-
Conseiller municipal et de nourriture. Pourtant, l’insécurité en particulier – continuera à reposer sur tiens ne détruisent pas ailleurs d’autres
Président PS Ville alimentaire gagne à nouveau du terrain. une logique économique de quantité et réalités locales. Un bateau qui transporte
de Genève
de prix. d’un bout à l’autre du monde des ton-
Jusqu’à récemment, l’Organisation des nes de blé génère une pollution et une
Nations unies pour l’alimentation et Le meurtre d’un enfant toutes concurrence insoutenable pour la région
Une denrée vitale l’agriculture (FAO) pouvait faire valoir les 5 secondes où il déversera ses tonnes d’aliments. La
L’une d’elle, tellement élémentaire, est la une situation en progression : entre la La planète produit suffisamment réalité de ces « coûts » environnementaux
sécurité alimentaire. Qui peut remettre fin des années 1970 et le milieu des an- d’aliments pour nourrir 12 milliards et sociaux n’est jamais intégrée dans les
en question que sans une quantité suffi- nées 1990, le nombre de personnes sous- d’habitant-e-s. Avec une population jolis modèles économiques sur les échan-
sante d’eau et d’aliments, la vie n’est pas alimentées dans le monde avait légè- mondiale de 6 milliards, comment peut- ges internationaux. La planète et les êtres
possible ? Le quartier le plus violent du rement diminué (878 à 825 millions) on défendre un marché agricole qui humains en paient le prix chaque jour.
DOSSIER
Les Socialistes Ville de Genève
5
Investir dans une politique de cohésion sociale

Diminuer les coûts de la politique sécuritaire de demain


Lorsqu’on évoque le thème de l’insécurité, on pense en premier aux agressions, aux incivilités, aux dealers, aux vols à l’astuce, etc. mais on oublie
souvent que l’insécurité c’est aussi une situation de chômage, un problème de logement, une mauvaise intégration sociale. Combattre l’insécurité est
un travail quotidien qui demande les forces de chacune et chacun et le développement de politiques publiques volontaristes.

depuis plus de 10 ans ; la demande de Au niveau sportif, la Ville de Genè- démunis peuvent se nourrir au chaud et
places en espaces de vie enfantine est ve développe une politique sportive être aidés. On peut encore mentionner
Manuel Tornare, aujourd’hui satisfaite à 62% contre 31% sur l’ensemble du territoire cantonal. les nombreuses manifestations organi-
Conseiller administratif seulement en 1999. Cette politique Genève compte plus de 75 associations, sées tout au long de l’année : la fête des
permet à de nombreuses femmes de re- plus de 800 clubs et près de 115’000 voisins, le festival livre et petite enfance,
trouver le monde de l’emploi pendant sportifs licenciés, sans compter les la soirée citoyenne, la fête du sport, le
Il y a deux aspects qui influencent de que les enfants apprennent à vivre en milliers d’adeptes qui pratiquent le festival arbres et lumières, etc…
manière directe le niveau de sécurité, société et s’intègrent dans des groupes sport, de manière individuelle et plus
la prévention et la répression. J’évoque multiculturels. souple, sans être affiliés à un club. Cette Toutes ces actions et prestations de
dans cet article le premier, la prévention, Puis l’enfant grandit et d’autres politique permet l’intégration par le proximité en faveur de l’ensemble de
qui est au centre de l’action du dépar- prestations lui sont offertes, les sport de milliers de jeunes, de seniors, la population genevoise permettent
tement que j’ai la responsabilité de restaurants scolaires, les ludothèques, les d’étrangers, de personnes en situation de favoriser la cohésion sociale et de
diriger, celui de la cohésion sociale, de activités développées par les maisons de handicap. renforcer le lien social dans les quartiers.
la jeunesse et des sports de la Ville de et espaces de quartier, les colonies, les La prévention est le premier pilier qui
Genève. écoles de sports, etc. Pour les personnes plus fragiles, il existe permet de lutter contre l’insécurité. Or
des aides individuelles, des prestations comme chacun le sait, moins il y a de co-
Nous fournissons de nombreuses presta- Les seniors ne sont pas en reste avec complémentaires pour lesquelles je hésion sociale, plus l’insécurité grandit.
tions de qualité à la population, des plus des lieux tels que la Cité seniors ou les continue à me battre. Nous développons Investir aujourd’hui dans une politi-
jeunes aux plus âgés. Pour commencer clubs d’aînés, de nombreux cours et une un soutien aux jeunes en rupture. que de cohésion sociale, c’est diminuer
par les plus jeunes, une politique active pléthore d’activités qui leur sont Nous gérons des logements d’urgence le coût de la politique sécuritaire
de la petite enfance a été pratiquée proposés. ainsi que des clubs sociaux où les plus de demain.

Vers une sécurité écologique

Droits et devoirs pour


l’écologie
l’air, l’utilisation excessive de l’eau,
Christian Lopez Quirland, le tri des déchets domestiques, le
Conseiller municipal gaspillage des matières premières
ou l’isolation des immeubles afin de
garantir une meilleure utilisation
énergétique.

Trop souvent réduite aux personnes, L’écologie est partout,


la notion de sécurité est mal- elle nous concerne tous et toutes
menée par la droite qui cristallise à Au cours de ces dernières années, la © Eric Roset

travers elle bon nombre des craintes prise de conscience citoyenne sur ces
questions s’est fortement renforcée déchets, utilisation de la voiture, Souvenez-vous de la proposition pour
de nos concitoyen-ne-s. Or, bien notamment. Le deuxième pilier l’introduction d’un péage urbain
et des efforts considérables ont été
que l’intégrité individuelle soit un menés, aussi bien par les individus que qui favorise la sécurité écologique afin d’atténuer les effets de la voiture
élément important de la sécurité, par les collectivités publiques. Pourtant, est le développement des nouvelles et ainsi faire baisser les taux de pol-
pour nous, socialistes, la sécurité à l’heure de l’échec de Copenhague, technologies, plus propres, plus lutions néfastes pour la santé de nos
doit être comprise dans sa globa- d’une destruction plus accélérée de respectueuses de l’environnement. Sur concitoyens ! Rappelez-vous de la
nos ressources naturelles, de l’incapa- cette question, nous devons renforcer Motion visant à interdire les bouteilles
lité avec ses dimensions sociale,
cité à attendre un changement radical nos investissements afin d’adapter, par en PET lors des événements organisés
économique, sanitaire, écologique. exemple, nos bâtiments aux critères ou subventionnés par la Ville. Il s’agit
qui puisse inverser cette situation,
la question est de savoir si l’écologie d’économies d’énergie. Enfin, et nous d’aller encore plus loin, de construire
La « sécurité écologique » un enjeu ne pourrons pas y échapper, la sécurité sur ce qui a déjà été accompli et de
est un droit à part entière, au même
de société écologique nécessite une dose de coer- s’investir toujours plus dans cette
titre que le droit social ou économique.
Fonte des glaciers, destruction de la cition, notamment par des règlements question de société.
A cette question, la réponse est
forêt tropicale, pollution des mers… et des lois qui précisent les droits et
indiscutablement OUI.
qui n’en a pas entendu parler ? Réali- devoirs de chacun. Ce troisième pilier Agir aujourd’hui
tés tragiques considérées bien souvent de la politique est le plus difficile à Ne pas agir aujourd’hui c’est mettre
Des paroles aux actes
comme trop lointaines, à tel point mettre sur pied et celui qui comporte en danger la vie des futures géné-
Pour passer à l’action, il est nécessaire
qu’elles finissent par en être abstraites le plus de réticences étant donné qu’il rations. C’est pourquoi pour nous,
d’élaborer une politique sur la base
pour beaucoup. est impopulaire. Pourtant, nous serons socialistes, l’écologie est une dimen-
de trois piliers. Le premier, celui de
l’information afin d’influer sur les obligés de réfléchir à cette question si sion essentielle de notre action. Mais
Pourtant, la sécurité écologique, à nous souhaitons rester cohérents. ne nous trompons pas, il n’y aura pas
comportements. A ce titre, la Ville
notre échelle, celle de la Ville ou de de sécurité écologique sans une forte
doit renforcer sa capacité à commu-
notre région, englobe des domaines D’ores et déjà, les socialistes se sécurité sociale et économique.
niquer sur tous les aspects : tri des
très concrets comme la pollution de sont impliqués à bien des niveaux.
DOSSIER CAUSES COMMUNES
6

Sécurité au rabais

Protégeons la police des pyromanes


Les attaques de la droite contre la police et le laisser faire de leurs des quartiers et que la population appréciait du Grand Conseil des visiteurs des lieux de
politiques qui prétendent augmenter la sécurité ont fait et continuent pour la sécurité républicaine que ceux-ci im- détention, de voir un écriteau sur la porte :
primaient. C’est dans ce même contexte, en Poste de police fermé entre 12h et 14h. A la
de faire exactement le contraire. Ces politiques contribuent à créer appliquant des recettes libérales, que le groupe demande des députés concernant les raisons
l’insécurité. de la police chargé de sévir en matière de res- qui avaient conduit à un tel affichage, on
pect de l’environnement fut aussi supprimé. nous répondit que c’était la conséquence du
manque d’effectifs.
pour dévier l’attention de ceux qui souffrent
Une sécurité au rabais
Alberto Velasco, du manque de logement, de la vie chère et du
Quelles étaient ces recettes libérales ? Les Conclusions
Constituant chômage. Effectuant des coupes dans les bud-
milieux d’Halte aux déficits, de droite, avaient Si la droite est tellement éprise de l’esprit
gets afin de réduire l’Etat à sa portion congrue
soumis au vote du peuple une initiative sécuritaire, pourquoi a-t-elle, lors des vo-
et l’empêcher de réaliser les tâches républicai-
demandant un audit des dépenses et de la tes budgétaires, continuellement limité les
nes qui créent la sécurité sociale et civile, les
gestion de l’Etat. Le résultat de l’audit fut dépenses de l’Etat, et concrètement coupé sur
politiques de droite fabriquent de l’insécurité.
Une droite manipulatrice la recommandation d’appliquer les recettes le budget de fonctionnement ?
Souvenez-vous, lors des élections présidentielles dites NPM (New Public Management), dont Pourquoi, pendant la législature 2001-2004,
Des économies de bouts de chandelles
en France, la droite brandissait la ques- les recettes consistent, en résumé, à faire une motion déposée par la gauche et qui de-
En effet, cela fait bien longtemps que la
tion sécuritaire au point de mettre en scène maigrir l’Etat en réorganisant ses tâches afin mandait l’arrêt des fermetures des postes de
gauche à Genève a dénoncé, à maintes
l’incendie de la caravane d’une vieille de réduire ses dépenses. En ce qui concerne la police dans les divers endroits du canton et la
reprises, le manque de moyens et de structures
personne vivant humblement dans celle-ci. police, ce furent les fermetures des postes de réouverture des postes de police de quartiers
de la police. Car c’est dans la période cor-
Les pleurs de cette personne avaient ému la quartiers et de villages, la concentration des fut rejetée ?
respondant à la législature 1993 à 1997, où
France entière et la gauche perdit les élec- gendarmes sur deux ou trois sites cantonaux. Pourquoi, à chaque fois que nous sommes
M. Ramseyer était Conseiller d’Etat en char-
tions. L’enquête démontra par la suite que le Cerise sur le gâteau, afin d’augmenter la sécu- intervenus en commission des finances afin
ge de la police, que les postes de police de
coup avait été monté. Et par qui, je vous le rité, les horaires des postes furent modifiés ! de doter la police de moyens en personnel et
quartiers furent supprimés ! Rappelez-vous,
donne dans le mille ! Cette petite digression En effet, à partir de ce moment les postes pour augmenter les postes de quartiers, on
à cette époque, les quartiers de St-Jean, Eaux-
illustre le fait que la question sécuritaire a n’ouvraient que pendant une certaine plage nous a toujours rétorqué qu’il fallait ration-
Vives, Champel avaient tous leurs postes de
toujours été le fond de commerce de la droite horaire et la nuit ils étaient, et sont toujours, naliser la police dans ces tâches ?
police qui étaient insérés dans la vie sociale
fermés ! Quel sentiment de sécurité peut avoir Oui, chers citoyens et citoyennes, ceux-
le citoyen quant il voit un poste de police fer- là même qui crient à l’insécurité l’ont
mé ? Eh bien, il doit se dire : pourvu que l’on créée en déconstruisant l’Etat par les cou-
m’agresse pendant les heures d’ouvertures ! pes budgétaires et les baisses successives
d’impôts. D’abord on met le feu, ensuite
Dans ce registre, quelle ne fut ma surprise, on crie au feu et à la fin on se cherche un
l’année passée, visitant en tant que député le pyromane... st-ce véritablement cela, une
poste de police d’Onex avec la commission
politique augmentant la sécurité ?

une fois, deux fois, six fois, sans que les faisaient signe à leur voisin de jeter un
collègues qui font le tournus 24 heures se coup d’œil à leur appartement. Mainte-
parlent entre eux. On va relever la dame, nant, ils ont peur de le faire ! La qualité
mais sans donner l’information à un du lien social s’est appauvrie et cela fait
service social qui pourra prendre le relais monter le sentiment d’insécurité. Quand
et assurer le suivi. La police arrive dans on ne connaît pas les gens qui vivent
l’urgence et une fois que le problème autour de soi, forcément on se sent seul.
est réglé, elle va ailleurs. On n’est que
quarante-deux pour tout le canton Les rues sont vides dis-tu, elles sont
la nuit, et du coup on ne peut pas se aussi surveillées par des caméras. N’y
© Eric Roset permettre de passer trop de temps avec a-t-il pas un effet pervers du sécuri-
une personne non plus. tarisme qui crée paradoxalement de
l’insécurité ?
Quelle est ton analyse de L.B. : Oui, et il faut lire cela en regard
l’insécurité sur les dernières années ? d’un véritable projet de société. Est-ce
Pour une police sociale de proximité L.B. : Il y a deux choses, la perception de que les gens veulent deux mille policiers

Prévenir avant de punir


l’insécurité par les gens (parce que c’est en plus ? Est-ce qu’ils veulent vraiment
mal éclairé, parce que certaines personnes un flic à tous les coins de rue ? Qu’est-
font du deal, des jeunes traînent le soir, ce qui fonde vraiment la sécurité d’une
Luc Broch est policier et socialiste. Il jette un regard d’expert sur les etc.) et le manque réel de sécurité. Il faut manière durable ? Si l’on ne mène pas une
créer des liens entre les habitant-e-s et les vraie politique d’intégration et d’explica-
questions d’insécurités et fait la distinction entre le sentiment d’insécurité jeunes, mettre en place des dynamiques tion, les gens vont tout mettre dans le
et l’insécurité réelle. Il lie le problème de l’insécurité au manque de lien afin que les uns aillent vers les autres. Ce même pot et sur le dos des étrangers. La
social, à la précarité et à l’isolement. n’est pas parce que des jeunes traînent présence d’un îlotier rassure les gens, car
le soir que ce sont des délinquants. Il ils ont en face d’eux quelqu’un qui a du
Propos recueillis par Sylvain Thévoz Quelles sont les actions pour lesquelles y a donc une perception de l’insécurité temps, un nom. C’est une personne de
tu es le plus mobilisé, au quotidien ? qui est liée à des préjugés ou des peurs. référence avec un numéro de téléphone.
Tu es policier depuis 13 ans et as L.B. : Outre l’aspect police pure (amendes, Statistiquement, par exemple, il n’y a pas
adhéré au Parti Socialiste, pourquoi ? répression), il y a tout un côté de notre plus de risques de se faire agresser à Cité La sécurité n’est donc pas une
Luc Brodi : J’ai 35 ans et trois enfants. J’ai travail qui est relationnel. On fait beau- Jonction qu’à Cologny ou à Champel ! question de répression ?
adhéré au Parti Socialiste en juin 2009. coup de travail de médiation pour des L.B. : Pas seulement, en effet. Au contraire
Lorsque des policiers de droite ont pris la conflits de voisinage, mais aussi pour Quelles seraient tes solutions pour même, c’est de la présence, du dialogue.
parole comme représentant la profession. des violences familiales récurrentes, des faire face aux insécurités ? La solution viendra des citoyens et de
Je me suis demandé alors ce qui m’empê- problèmes de drogue ou d’alcool. En L.B. : Les genevois se sont désappropriés leur capacité à se parler, à créer du lien.
chait de faire part de mes convictions. J’ai fait, une grande part de notre travail est leurs quartiers. Avant, ils animaient leurs Il faut à mon avis éviter à tout prix de
participé, avant d’être policier, à plusieurs un travail de prévention. On intervient rues. Aujourd’hui, il ne s’y passe plus glisser vers l’intolérance ou l’indifférence
manifestations et j’ai été surpris de voir le d’ailleurs de plus en plus pour sauver les rien, ils ne font plus qu’y passer. Grâce radicale.
côté très oppressant et militaire de cette gens d’eux-mêmes. Mais le grand défi de aux fêtes des voisins et d’autres mani-
police qui était pourtant censée défendre la police de demain c’est de faire le lien festations ça a un peu changé, mais les La version longue de cet entretien est visible
les droits civiques des citoyens. Cela a été avec les services sociaux. Il y a de plus en gens sont beaucoup plus isolés. Avant, sur http://www.ps-geneve.ch
un déclencheur pour mon engagement. plus de personnes à domicile qui chutent quand les gens partaient en vacances, ils
DOSSIER
Les Socialistes Ville de Genève
7

Sécurité, prévention et promotion de la santé

Un travail de proximité !
La FEGPA (prévention de l’alcoolisme) et le CIPRET (prévention du tabagisme) interviennent dans leurs domaines respectifs en se fondant sur le
principe que l’on doit sensibiliser la population aux risques liés à la consommation et agir sur le cadre de vie de nos concitoyen-ne-s.

et à la détente que procure l’usage tangible. De même, la loi interdisant de suivre les efforts afin que les communes
Laurence Fehlmann Rielle, de ces produits. C’est pourquoi, nous vendre de l’alcool pendant la nuit a éga- s’approprient la prévention avec le sou-
Secrétaire générale de la avons eu recours à l’émotion comme la lement été confirmée par le peuple en tien des professionnels, en encourageant
FEGPA, ancienne Députée campagne « Bébé non fumeur » lancée 2005. Il est évident que les débats sur les bonnes pratiques. Les préoccupations
dans les crèches, il y a quelques années. le plan international ont influencé les sont souvent les mêmes : gestion de la
Afin de trouver de nouveaux ambas- opinions publiques s’agissant du tabac consommation d’alcool sur l’espace pu-
Dr Jean-Charles Rielle,
sadeurs et de nouvelles ambassadrices et que la consommation inquiétante de blic, gestion des grandes manifestations,
Médecin responsable
de la prévention, nous avons soutenu boissons alcooliques observée chez les etc. Les réponses doivent être trouvées
du CIPRET,
Conseiller national un grand nombre de manifestations adolescent-e-s en Europe occidentale a en fédérant les partenaires concernés,
sportives et culturelles, ainsi que des obligé les milieux politiques et les pro- non seulement les travailleurs sociaux
clubs et des sportif et sportives et cela fessionnel-e-s entourant les jeunes à agir. et éducateurs avec le soutien des auto-
Dans le domaine des drogues légales depuis une quinzaine d’années. Nous rités mais aussi les commerçants qui
telles que l’alcool et le tabac, la santé avons ainsi développé le marketing Travailler en partenariat, chacun doivent prendre leurs responsabilités.
publique a été confrontée à un véritable social et le sponsoring éthique. prenant ses responsabilités
déni qui s’explique d’une part par la A la dîme de l’alcool s’est associé le Une action cohérente et de proximité
forte intégration de l’alcool et du tabac Des résultats tangibles fonds tabac permettant de financer des La prévention peut être efficace si l’on
dans notre quotidien et d’autre part par Ce travail de fond a été payant. Il a projets de prévention dans les cantons associe actions de proximité, où chaque
la puissance des lobbies économiques. permis de contribuer à modifier les et les communes. Le plan national al- acteur peut trouver sa place, et cohérence
représentations du public face à la cool commence aussi à déployer ses des messages. Une politique de santé
Mettre en avant les risques, prévention, naguère perçue comme effets. Néanmoins, sans relais au niveau publique peut ainsi participer d’un sen-
sans culpabiliser rébarbative et donneuse de leçons, et à local, ces initiatives resteront lettres timent de sécurité en dosant de manière
Depuis bientôt deux décennies, nos éveiller un sens critique à propos de ces mortes. Il est donc essentiel de pour- judicieuse prévention et contrôle.
associations avec d’autres partenaires, substances. Cette politique de proximi-
se sont efforcés de sensibiliser la po- té a permis notamment de faire passer
pulation en mettant en évidence les des informations capitales au sujet de
risques reconnus scientifiquement en la fumée passive. Le plébiscite (proche
évitant toute culpabilisation. Mais des des 80%, à deux reprises) de la loi pour
informations purement rationnel- l’interdiction de fumer dans les lieux
les ne peuvent suffire face au plaisir publics et fermés en constitue un signe

Sécurité et santé

Un couple inséparable
De notre point de vue, la sécurité au
Liliane Maury Pasquier, travail et ses conséquences sur la santé des
Conseillère aux Etats travailleuses et travailleurs sont cruciales.
Le travail, c’est la santé, dit-on, mais les
polluants menacent certains corps de
métiers, de l’amiante dans le bâtiment à
Sécurité rime avec santé, ce n’est pas un la fumée passive dans la restauration. A © Eric Roset
Genève, une étude de Gubéran et Usel
hasard : la sécurité est indispensable
l’a montré : douze fois plus de personnes populaire récemment lancée contre la Améliorer la qualité des soins
à la santé, et le système de santé doit se retrouvent invalides parmi les ouvriers prise en charge obligatoire de l’avor- En plus de l’accès aux soins, la qualité de
fonctionner de manière sûre pour semi-qualifiés et non-qualifiés que dans tement, qui pose le vrai risque d’une ceux-ci est, bien sûr, gage de sécurité. Elle
toutes et tous. Démonstration. les professions libérales et scientifiques. médecine à deux vitesses. En 2008, exige d’améliorer les conditions de travail
La sécurité au travail n’est donc pas la l’article constitutionnel amorçant une du personnel hospitalier et la formation
La sécurité sociale, c’est la santé même pour tout le monde et contre ces privatisation de la santé a heureusement des professionnel-le-s de la santé. Car
L’existence d’un solide système de sécurité inégalités nous, socialistes, devons nous été mis en échec par le peuple, notam- la quantité d’offre médicale, en soi, ne
sociale est nécessaire à la santé de la société battre ! ment grâce à l’engagement des socialistes. garantit pas la sécurité de la santé :
dans son ensemble. Selon la Constitu- De manière plus générale, l’insécurité Nous nous battons aussi pour que les pensez à la pléthore de conseils médicaux et
tion fédérale, « la force de la communauté ressentie au travail sous forme de stress, primes-maladie finançant l’accès aux de médicaments disponibles sur internet.
se mesure au bien-être du plus faible de ses largement dû à l’obsession de productivité soins soient proportionnelles au revenu, Pas facile, ni très sûr de faire le tri entre
membres ». D’où la nécessité pour nous, de l’économie néolibérale mondialisée comme le demandait l’initiative populaire bons et mauvais remèdes !
socialistes, de lutter afin de préserver les et à la précarisation des conditions de tra- pour la caisse unique.
acquis en matière de retraite, d’assurance vail, est facteur de morbidité, comme l’a On le voit, la sécurité est un élément clé
chômage et d’AI. Si la santé des individus prouvé une étude du SECO. La santé pour toutes et tous de la santé. Sécurité sociale pour parer
qui composent la société dépend de tous Les socialistes s’engagent pour que toutes les aux coups durs de l’existence. Sécurité
ces éléments, elle est plus particulière- La sécurité de la santé personnes en situation de grande précarité dans la rue, à la maison et au travail pour
ment liée au système de santé : nous y Le système de santé lui-même doit être puissent accéder aux soins, qu’elles soient garder son intégrité et la pleine maîtrise
reviendrons. sûr, dans le sens où chacun-e doit pou- affiliées ou non à une assurance-maladie. de sa vie. Sécurité de la santé, pour que
voir accéder aux soins, au bon endroit et Un défi particulier pour Genève réside dans chacun et chacune accède à des soins de
La sécurité, c’est la santé au bon moment. Or, ce principe est loin l’accès aux soins des sans-papiers, afin que qualité. Solidarité, humanité, équité :
Mais avant, voyons en quoi la sécurité est es- d’être acquis. Nombreuses sont les tenta- ne se reproduisent pas des cas comme celui tout l’engagement socialiste se concen-
sentielle à la santé. A contrario, l’insécurité tives de la droite de rayer certaines presta- de ce bébé hospitalisé en 2005, qui a frôlé tre dans cette conception du couple
porte atteinte à la santé, raison pour laquelle tions de l’assurance de base et d’en exclure, la mort et gardé de graves séquelles parce inséparable « sécurité-santé » !
les socialistes s’engagent pour plus de sécurité de fait, celles et ceux qui n’ont pas les que sa mère, sans statut légal, avait tardé
dans la rue, et contre la violence domestique. moyens de payer. Témoin, l’initiative à le faire soigner de peur d’être expulsée.
DOSSIER CAUSES COMMUNES
8

La sécurité au travail

Conditions de travail de qualité et protection de la liberté syndicale


L’ensemble des conditions de travail ont des effets sur l’état de santé des tions de vie au travail, à laquelle la Suisse a visant à modifier les heures d'ouverture des
participé pour la première fois en 2005, magasins.
travailleurs et travailleuses. Nicole Valiquer rappelle ici que la sécurité
sous la forme de 1040 entretiens, si 91% • contre les discriminations injustifiables
au travail passe par des conditions de travail de qualité et la garantie des des actifs sont satisfaits de leurs condi- en matière de sécurité sociale et dire non à
libertés syndicales. tions de travail, il n’en demeure pas moins l’âge de la retraite des femmes à 65 ans et
que 31% affirment que leur travail porte à la baisse des rentes du 2ème pilier. Faut-
européennes récentes, les problèmes de atteinte à leur santé et 19% déclarent avoir
santé liés au travail occasionnent beaucoup il rappeler que les salaires des femmes
Nicole Valiquer, été absents pour des raisons de santé au
Conseillère municipale plus de souffrances et d’absences - donc demeurent inférieurs de plus de 20% à
cours des 12 mois précédents. Le nombre ceux des hommes et que leurs perspectives
engendrent des coûts plus importants - moyen de jours d’absence pour des
que les accidents et les maladies profes- professionnelles sont moindres ? Près de
raisons de santé liées au travail (accidents 50% des femmes âgées ont pour unique
sionnels traditionnellement reconnus ou maladie) est de 4 par travailleur et par
au sens du droit des assurances. Selon revenu l’AVS, alors que cette proportion
Améliorer les conditions de travail an, ce qui représente plus de 15 millions de
une étude du SECO (Secrétariat d'Etat s’élève à 15,3% chez les hommes. Les
L’exposition à toutes sortes de nuisances, journées de travail perdues. Les problèmes
à l'Economie) sur les coûts du stress en femmes sont donc doublement victimes.
l’organisation du travail, la communi- de santé le plus souvent signalés sont les
cation, les horaires (horaires flexibles, Suisse, on estime à un minimum de 310 maux de dos (18%), le stress (17%) et les • pour l’interdiction des licenciements
travail posté, de nuit, sur appel), le mode millions de francs les coûts des atteintes douleurs musculaires aux épaules, au cou antisyndicaux et le rétablissement dans
de rétribution (à l’heure, au mérite), les à la santé mentale et à un minimum de et aux membres (13%). Les expositions leurs droits des délégué-e-s syndicaux, en
discriminations liées au sexe et au statut 620 millions de francs ceux des maladies aux risques physiques (bruits, vibrations, adaptant le dispositif légal aux Conven-
de séjour, la sécurité de l’emploi, l’âge, cardio-vasculaires engendrées par le stress produits dangereux ou polluants) et une tions de l’OIT en matière de protection
etc. soit l’ensemble des conditions de au travail. mauvaise conception des postes de travail des délégué-e-s syndicaux.
travail ont des effets sur l’état de santé des demeurent également très importantes
travailleurs et travailleuses. L’amélioration Souffrances au travail (42% des travailleurs sont exposés à des Réinventer le travail
des conditions de travail est un axe Selon une enquête de la Fondation euro- mouvements répétitifs, 22% à des bruits Comme le souligne Christophe Dejours,
essentiel puisque selon plusieurs enquêtes péenne pour l’amélioration des condi- intenses, 35% ont des positions de travail professeur titulaire de la chaire de psy-
douloureuses ou pénibles). chanalyse-Santé-Travail au Conservatoire
National des Arts et Métiers: «Ce qui est
Lutter pas à pas nouveau donc, c’est qu’un système qui pro-
Il n’y a donc pas de petit combat ! duit et aggrave constamment souffrances,
Chaque petite victoire pour l’amélioration injustices et inégalités, puisse faire admettre
des conditions de travail de l’ensemble ces dernières pour bonnes et justes. Ce qui est
des travailleurs et travailleuses contribue nouveau, c’est la banalisation des conduites
à l’amélioration de l’état de santé de la injustes qui en constituent la trame. (…)
population et à son bien-être général. Le travail, dans la mesure où il implique la
C’est dans ce contexte que se situent coopération volontaire des gens, convoque
les actions spécifiques d’Unia durant aussi ceux qui travaillent à investir la
2010 sur la problématique de la sécurité construction de règles qui ne jouent pas un
au travail. rôle seulement vis-à-vis du travail, mais
C’est dans cette perspective qu’il faut, du vivre-ensemble. Car travailler, c’est non
aux côtés des organisations syndicales, seulement se livrer à une activité, c’est aussi
s’engager résolument: établir des relations avec autrui» .
• contre les graves conséquences du travail Toutes et tous, réinventons ensemble le
de nuit et du dimanche et contre la loi plaisir !

© Eric Roset

Les raisons de l’émotion des dégâts qui se traduisent par des arrêts nature évaluative de nos émotions fait de
cardiaques, des défaillances immunitaires, nous des êtres facilement manipulables.
Un peu de peur ça va, trop des dépressions nerveuses ou des accidents
cérébraux. Et où trouve-t-on les situations
La propagande joue là-dessus. Les nazis
l’avaient bien compris. Les partis populis-

bonjour les dégâts ! les plus difficiles à fuir? Dans la famille et,
surtout, au travail  ! Des spécialistes estiment
que le harcèlement moral sur le lieux de
tes recourent à la même technique. Seul un
sens critique particulièrement bien affûté
permet de résister à la propagande. Mais on
Essayez d’imaginer une personne qui ne ressentirait ni la faim, ni la travail occasionne pas moins de 20% de nos ne possède pas spontanément cette qualité.
soif. Une personne qui serait totalement insensible à la douleur et aux dépenses de santé ! C’est dans les milieux où Elle se cultive. A voir le lavage de cerveau
nous passons le plus de temps que la peur pratiqué aujourd’hui par certains médias,
agressions, qui ne mesurerait pas le danger ou qui n’éprouverait aucune occasionne le plus de dégâts. La vague de nous n’en prenons pas vraiment le chemin.
joie ou peine dans ses relations aux autres. Cette personne serait suicide chez France Télécom en constitue
dépourvue d’émotions, elle n’aurait que peu de chances de survivre dans un exemple particulièrement dramatique. Vers une communication efficace
Notre problème à nous les socialistes, c’est
ce monde... Peur d’avoir peur? que nous avons à faire passer un message
d’expériences émotives positives et néga- Alors que les plus grandes peurs sont dues à critique qui demande un effort. Alors
Ninian Hubert van tives. Ces émotions sont utiles et nécessai- notre entourage immédiat, on réussit à nous qu’une communication efficace passe par
res. Elles donnent du «goût» à l’existence. faire croire que le danger vient d’ailleurs. les canaux de l’émotion ! C’est la quadrature
Blyenburgh,
Nous orientons avant tout notre existence Les étrangers, les frontaliers, la sécurité, le du cercle. Le défi que nous avons à relever,
Anthropologue
en fonction de nos émotions et non pas en changement climatique, les catastrophes c’est de communiquer efficacement des
fonction de la raison. Qu’on se le dise ! naturelles, les OGM sont de grands pour- valeurs et des idées sans (pouvoir) recourir
voyeurs de peurs. Pourtant, la probabi- aux techniques de la propagande. Il y a là
Des émotions évaluatives
La souffrance au travail lité qu’un de ces risques nous atteigne dans un véritable défi, qu’il est urgent de relever
Les émotions sont les garantes de notre
Tout serait pour le mieux dans le meilleur notre santé est proche de zéro. Alors si nous voulons continuer à être entendus
survie et donnent du sens à notre existence.
des mondes si nous pouvions être heureux pourquoi ces risques nous font-ils peur ? dans la cacophonie cynique et démagogique
Elles sont aussi par nature «évaluatives»,
sur commande et fuir quand c’est nécessai- Toujours à cause de la nature évaluative de actuelle. André Malraux écrivait « L’huma-
c’est-à-dire qu’elles sont associées à des
re. Mais la réalité n’est pas aussi arrangeante. nos émotions. De la même manière que nisme, ce n’est pas dire : « Ce que j’ai fait,
expériences vécues dont le souvenir est
Alors qu’un danger occasionnel provoque nous associons des émotions à des situations aucun animal ne l’aurait fait », c’est dire :
conservé dans notre mémoire. On se
un stress qui affûte nos capacités de fuite, réelles, nous associons aussi des émotions à « Nous avons refusé ce que voulait en nous la
souvient d’autant mieux d’un événement
l’individu acculé vit dans un état de stress des situations qui sont seulement évoquées. bête, et nous voulons retrouver l’homme par-
que l’émotion qui lui est associée était
permanent. Si cette situation perdure - si Il suffit de suggérer la peur, pour qu’elle soit tout où nous avons trouvé ce qui l’écrase. »»
forte. Notre vie est faite d’une accumulation
la fuite est impossible - l’organisme subit vraiment ressentie. Comme au cinéma. La
DOSSIER
Les Socialistes Ville de Genève
9

Entendre les minorités

Genève, capitale des droits humains ?


Genève, capitale des droits humains ! Quelle jolie maxime de carte postale. La présence du siège du Haut Commissariat aux droits de l'Homme sur
le territoire genevois n'est cependant pas garante du respect de ceux-ci. Il suffit de se pencher quelques minutes sur les quotidiens romands pour le
constater: arrestations musclées, attaques ciblées sur les étrangers, votations anti-minarets, l'Eldorado suisse semble bien entamé. Etat des lieux du
respect des minorités.
pour une Genève forte en raison de la des dynamiques de la ville. Garantir mo-phobie, soutenues par la Ville de
Nicolas Roguet diversité de sa population, et contre les droits les plus élémentaires, tels que Genève, la création d'un poste de délégué
les discriminations qui sont autant ceux à la vie et aux libertés personnelles, à l'égalité et à la diversité le démontre.
d'obstacles à l'amélioration de la qualité les libertés d’opinions et d’informations Le Parti Socialiste se doit d'empêcher
de vie des genevois comme à l'intégra- ainsi que l'égalité, doit être un com- le retour à l'état de nature et soute-
tion de ses minorités. Avec les socialistes, bat placé au cœur de l'action du Parti nir le contrat social en protégeant ses
Une Genève plurielle une Genève solidaire, multiculturelle, Socialiste. Garantir les droits des mino- minorités, que ce soit en proposant des
Bien plus que toutes les autres parties soucieuse d'égalité, respectueuse de son rités et lutter contre les discriminations améliorations des dispositifs légaux de
prenantes à la vie de la société, les environnement a commencé réellement dont elles sont victimes est, au-delà du sanctions des violations portant atteintes
minorités, quelles que soient leurs à se développer. Faut-il se contenter de devoir, un engagement fondamental aux droits des personnes, en proposant
appartenances ethniques, sexuelles ou ce bilan somme toute assez positif  ? pour tout socialiste attaché aux acquis la création d'un poste d'ombudsmann/
religieuses sont régulièrement victimes sociaux et à la bonne marche des affaires ombudswoman ou encore par voie
de discriminations, d'abus en tout genre Les droits des minorités de la cité. politique, en prenant la parole pour
et parfois même de violences portant La réponse est double: les socialistes dénoncer les abus et affirmer haut et
atteintes à ce droit fondamental qu'est peuvent s'en féliciter, mais doivent Une responsabilité socialiste fort un soutien clair aux minorités. Qui
la sécurité. cependant viser plus haut. Cette Pour que Genève devienne une ville mieux que les socialistes sont à même
Le Parti Socialiste Ville de Genève, ascension vers un idéal que porte chacun exemplaire, il est fondamental de de relever le défi ? La gauche n’a sans
par l’action de ses deux magistrats et d'entre nous se fera notamment par des stimuler l'ouverture vers l'autre et doute pas le monopole du cœur, mais
des conseiller-ère-s du conseil muni- prises de positions fortes en faveur des l'instauration d'un dialogue entre tous elle a tous les outils et la légitimité pour
cipal, a tenu ses engagement de 2007 minorités, qui sont parties intégrantes les genevois. Les assises contre l'ho- le faire triompher.

Droits des homosexuel-le-s

Une passerelle entre


les communautés
Dialogai s'engage depuis 1982 premier plan pour la prévention du
pour la santé, la qualité de vie VIH et des autres infections sexuel-
lement transmissibles (IST), particu-
des hommes gays de Genève et la
lièrement à destination des hommes
défense de leurs droits. Sise au ayant du sexe avec les hommes. En
cœur des Pâquis, l’association 2000, Dialogai a lancé le Projet santé
se veut une passerelle entre la gaie en collaboration avec l'Université
communauté gay et la société. de Zürich, avec à la clé deux grandes
Causes Communes a souhaité offrir enquêtes sur la santé des hommes gays
de Genève. Checkpoint et Blues-out
un espace à Guillaume Mandicourt,
sont deux projets nés dans ce cadre. © Eric Roset
pour présenter l'association.
Dialogai-Checkpoint est une structure de services gay and lesbian friendly, Engagement collectif
médicalisée qui offre un conseil adapté questionnaire d’autodiagnostic, service Parce que ce combat n’a de sens que
aux problématiques de santé des online de question/réponse personna- s’il est collectif, Dialogai milite au sein
hommes qui ont des rapports sexuels lisée, ligne d’écoute, Blues-out est un la Fédération Genevoise des Associa-
avec des hommes, qu’ils s’identifient programme complet qui ambitionne tions LGBT aux côtés des associations
Dialogai propose aux gays des espaces d’informer les gays et les lesbiennes Lestime, Think Out et 360. Point
de convivialité et de loisirs. En mai comme gays ou pas. Une équipe
de professionnels et de volontaires sur les problèmes de santé mentale d’orgue de cette collaboration, la mise
2009, elle inaugure son Café OFF, pour lesquels ils sont particulièrement en place, en septembre 2009, des
un espace culturel et communau- propose des tests VIH à résultat rapide,
des diagnostics pour les MST, des à risque et de les aider à trouver la premières Assises contre l’homo-
taire libre, un lieu de rencontre et de prise en charge la plus adaptée. phobie à Genève où plus de six cents
partage, ouvert sur la ville, et qui conseils de prévention, dans un cadre
non-jugeant et confidentiel. personnes du milieu associatif, de la
propose des activités ludiques et socia- Lutte contre l'homophobie recherche, de l’éducation, des autorités
lisantes comme des ateliers théâtre ou Dialogai participe également à la politiques ont travaillé sur les moyens
danse, des soirées jeux, des concerts, Limiter les risques
Les enquêtes du projet Santé gaie ont lutte contre l’homophobie. Elle de combattre plus efficacement
une bibliothèque, des conférences. assiste les gays victimes de discrimi- l’homophobie et d’apprendre à mieux
Ce lieu se veut l’écrin de l’expression montré que les gays de Genève ont
d’autres problématiques de santé que nations et travaille à une meilleure vivre la diversité.
artistique et culturelle de la scène gaie acceptation de l’homosexualité par le
de Genève et un havre pour les gays. le VIH/sida. Ils souffrent notamment
deux fois plus de dépression que la grand public. Elle éduque les acteurs
Un endroit de discussion et de lien, de la santé ou du social aux difficultés Dialogai
d’ouverture au monde et à soi. population générale et ont 5 à 7 fois
rencontrées par les homosexuels. Elle Association homosexuelle et
plus de risques de tenter un suicide.
exige des autorités la protection due Antenne de l’Aide suisse contre le sida
Rôle historique Le projet Blues-out, réalisé en colla- Navigation 11-13,
boration avec Lestime, association à chaque citoyen et œuvre pour que
Unique antenne homosexuelle de soit explicitement inscrite dans la loi Pâquis, Genève
l'Aide suisse contre le sida, Dialogai des lesbiennes de Genève, est né de
la protection de toute discrimination 022 906 40 40
joue historiquement un rôle de ce constat. Site Web d’information
liée à l’homosexualité. www.dialogai.org
et d’orientation, liste de médecins et
GRAND ANGLE CAUSES COMMUNES
10

Présent et futur d’Haïti

Séisme en Haïti : remodeler l’espace villes l’a rendue insalubre. Avec ses rues jon- mêmes difficultés que la capitale en
La destruction de Port-au-Prince et d’Haïti par le séisme du 12 janvier
chées d’ordures et d’immondices de toutes matière d’urbanisme.
2010 a soulevé d’innombrables questions. Roger Michel porte un sortes, des canalisations inexistantes pour
regard d’expert et de citoyen touché par la catastrophe sur les possibilités l’évacuation des eaux usées, des problèmes Réunir toutes les forces, toutes
et les difficultés d’une reconstruction en profondeur et à long terme d’un d’insécurité croissants, de pollutions de l’air, les compétences
des conditions de déplacements pénibles, L’implication de la diaspora haïtienne dans
nouvel Haïti. d’encombrements des trottoirs par des petits la mise en œuvre de ce plan est capitale. Elle
lan des destructions massives en vies humai- commerces ambulants, Port-au-Prince avait lui permettrait aussi de renouer avec Haïti
nes et en biens, la nécessité du retour d’une atteint son agonie juste avant le séisme et on sur de nouvelles bases. Une grande partie de
Roger Michel, peut souscrire à la nécessité de sa reconstruc- l’élite intellectuelle, les médecins, les cadres
Dr Agroéconomiste partie de la population dans les campagnes
dans une perspective de reconstruction de la tion selon un plan d’urbanisme bien défini. professionnels engagés dans sa construc-
et géographe aménagiste, tion l’ont quitté et depuis cette période le
Conseiller municipal capitale pèse très lourd dans le débat.
Manque d'infrastructures élémentaires pays vit sans véritable repère socioécono-
Un mouvement récurrent D’autres questions continuent de se poser. mique pour continuer son développement.
En règle générale et selon nos observations, Elles portent tout d’abord sur l’accueil des L’exode, débuté dans les années soixante,
Avant même le séisme, la vie dans la capitale nouveaux réfugiés dans les villages. Même et qui continue encore aujourd’hui, risque
l’abandon de cette capitale par certains de ses
y était devenue presque impossible, tant la si leur retour est volontaire, compte tenu encore d’être amplifié à la suite de ce séisme,
habitants qui sont tous des migrants n’est pas
densité de la population était forte. Conçue de la pauvreté en milieu rural à travers tout et de marquer sérieusement l’avenir du pays.
un acte courant, mais récurrent en période
pour accueillir environ 250 000 à 300 000 le territoire, ils vont constituer une charge
de crises ou de grands bouleversements. En
habitants, elle en comptait plus de 2 millions énorme pour les personnes qui vont les Stimuler une croissance endogène
1993, par exemple, la mise d’Haïti sous un
inégalement répartis sur un territoire exigu accueillir et aussi pour l’environnement déjà Jusqu’à présent, la contribution de la
embargo international avait fait fuir plus
avec extension permanente de nouveaux bi- en voie de dégradation accélérée. En fait, les diaspora se résume à des transferts d’argent
de 500.000 habitants de la capitale vers les
donvilles et autres zones d’habitations non zones rurales haïtiennes sont dépourvues de très importants mais qui n’entrent pas dans la
zones rurales. Actuellement, avant même la
appropriées à son écosystème. Comme ce toutes commodités. Elles sont dépourvues promotion économique du pays, et servent
présentation d’une esquisse de projet de re-
processus qui modifie en permanence la des infrastructures les plus élémentaires et uniquement de soutiens à la consommation
construction de Port-au-Prince, on signale
configuration de la capitale n’était pas prêt leurs habitants sont constamment en proie des produits importés principalement de
déjà une forte marée humaine sur les routes
de s’arrêter, des voix se sont élevées de toutes à l’exode pour assurer leur survie. Dans un l’étranger (USA, République Dominicaine,
du retour dans les campagnes et les villes de
parts pour demander de le freiner ou tel contexte, au cas où ce retour n’est pas Canada, Chine, etc.) Devenu moribond, le
provinces non touchées par le séisme.
même de déplacer la capitale dans un site bien accompagné, tant du point de vue de système éducatif ne parvient pas à assurer la
plus approprié. l’encadrement social que financier et écono- relève des cadres partis à l’étranger. Dans les
Reconstruire pour mieux vivre
Pour les urbanistes, ce départ est une aubaine. mique, on verra se reproduire une très forte villes, les enseignements primaire, secondaire
Après la catastrophe migration vers la capitale, dès l’annonce de et supérieur sont perpétuellement en crise
Il pourrait permettre de reconstruire la
Au lendemain du séisme, les mêmes questions sa reconstruction. par manque de structure et de personnel
capitale dans de meilleures conditions de
continuent de se poser, mais de manière qualifié. En effet, tous les secteurs de la vie
salubrité, car la multiplication des bidon
beaucoup plus émotionnelle cette fois. Le bi- Mettre en place un véritable plan publique et privée sont encore frappés par
de développement cette crise. Même les Fermes écoles instal-
Les personnes qui se précipitent pour lées dès les années 30 dans certaines zones
quitter Port-au-Prince d’une manière spon- rurales et les cadres techniques qui super-
tanée afin de se retrancher dans les campagnes visaient la production des denrées ont
connaissent bien les conditions de vie dans disparu des campagnes.
celles-ci. Il faut comprendre que ce retour
est temporaire et que seul un programme La diaspora haïtienne doit être consciente
de développement national, un « plan de cette situation pour, dès aujourd’hui, se
Marshall », en quelque sorte, peut être rendre utile à la reconstruction du pays. Elle
un motif pour l’éviter. Ce plan devra devra, pour cela, combiner son effort avec
alors englober l’ensemble du territoire les haïtiens de l’intérieur en vue de mieux
national et redonner au monde rural sa réorienter le développement économique
raison d’existence. En matière de stratégie et social du pays, rééquilibrer son système
de reconversion de la société haïtienne, politique, valoriser sa culture et lui donner
ce plan est indispensable. Il pourrait, sur une bonne base juridique pour la protection
une période de 30 ans, donner une di- des personnes et des biens, assurer son ave-
mension acceptable à chaque entité géo- nir écologique gravement menacé par des
graphique d’Haïti dont la plus grande risques de nouvelles catastrophes naturelles.
partie reste marginalisée. Un remodelage Ainsi les pays riches, « amis d’Haïti » qui
de ce territoire qui compte 562 entités préconisent de mettre en œuvre ce « plan
© Eric Roset géographiques érigées en communes doit Marshall» doivent tenir compte du rôle
être envisagé pour qu’un projet de recons- moteur que doivent jouer tant la diaspora
Aide au développement truction de la capitale d’Haïti réussisse. que les Haïtiens de l’intérieur dans sa mise
Cela concerne également presque toutes en œuvre pour une reconstruction durable
Porter les regards plus loin les villes de provinces confrontées aux et réussie de ce pays.

sortir du cercle vicieux que peut être l’aide des discours réactionnaires ou nationalistes Sortir de la dépendance
au développement, flux paralysants du nord opposés à toute aide au développement, « En finir avec la dépendance à l’aide »,
Félicien Mazzola vers le sud, prolongeant la dépendance et développe la position libérale tradition- second ouvrage, est la traduction fran-
rendant l’émancipation impossible. nelle d’un développement économique çaise d’un livre de Yash Tandon. Celui-ci
gagnant-gagnant pour le sud et le nord. développe une position plus militante, mais
Désintéressée ? A l’opposé, le CETIM déconstruit tout non moins argumentée et construite avec
« Efficace, neutre, dés- d’abord ce discours puis propose des rigueur. Largement illustré de situations
Le CETIM (Centre Europe-Tiers intéressée ? » est un pistes pour la concrètes, Yash Tandon développe dans
Monde) publie deux ouvrages afin de ouvrage collectif placé construction d’une celui-ci les arguments en faveur d’une sortie
sous la direction de politique de coopéra- de la dépendance à l’aide du nord, tout en
réfléchir sur les contenus de l’aide au Julie Duchatel et tion et de solidarité, en décortiquant les processus et structures,
développement. Florian Rochat. Il intégrant les diffé- trop souvent obscurcies de bons sentiments.
s’agit d’une réponse rents axes d’un déve- L’ouvrage se termine par un cheminement
Ces deux ouvrages portent donc un regard à un article de Jean- loppement véritable en sept étapes nécessaires pour appliquer
critique sur l’« aide » et se rejoignent sur le Michel Severino, (économique, social, cette sortie de l’aide et l’esquisse d’un
constat qu’elle est fort mal nommée. Ils directeur de l’Agence environnemental). possible futur au développement.
proposent entre autres des solutions pour française de développement. Celui-ci, loin
COMME UNE CAUSE
Les Socialistes Ville de Genève
11
Lutte contre les précarités sociales

Partage : la sécurité alimentaire pour tous


Partage (Partenariat alimentaire Genevois) est une association qui existe depuis 2005. Partant du constat de l’augmentation de la précarité
dans les villes et voyant simultanément des stocks de nourriture détruits quotidiennement, l’association s’est créée sur le principe simple de
transport du surplus à celles et ceux qui en avaient besoin. Le champ d’application de ce principe gagnant-gagnant à plusieurs niveaux paraît
aujourd’hui sans limites en utilisant des marchés que les entreprises privées ne trouvent pas assez rentables.
Propos recueillis par sentait, en valeur, plus de 5 millions de Notre effort porte donc sur ceux qui Face aux multiples fragilités et à la
Sylvain Thévoz francs. Si l’on n’était pas là, des fonds ont des chances de retrouver du travail. dureté du monde du travail, ne man-
publics auraient dû payer une grande Nous avons développé les prestations de que-t-il pas aujourd’hui de niches, des
partie de ces 5 millions. Nous devons service que nous rendons aux com- espaces d’emplois qui ne relèvent pas
donc gagner de l’argent pour tourner. munes, aux entreprises, et cela nous purement et simplement de l’ordre du
Comment ? Les associations viennent permet de financer les parties de salaires marché où les niveaux de concurrences
se servir directement et gratuitement que l’Etat ne paie pas. sont très élevés ?
à Partage, sauf pour celles qui n’ont V.G. : Pour nous, il n’y a pas de niches.
pas de véhicules et qui souhaitent être Ainsi on peut dire à nos employés : c’est A Partage, nous créons des emplois
livrées. L’objectif de Partage n’est pas votre travail qui paie votre salaire, vous dont le coût n’est pas rentable pour une
de diviser la misère ou de partager un n’êtes pas des assistés. Humainement, entreprise privée, car ils ne dégagent pas
Vincent Gall, vous êtes l’un des petit gâteau mais d’augmenter le gâteau. c’est très important. En cela, on est de marges bénéficiaires. Les plus gros-
fondateurs et le président actuel de Les entreprises nous paient pour venir novateurs. ses critiques à notre système viennent
l’association Partage. Pouvez-vous nous ramasser leurs déchets, et tout ce qui de l’extrême gauche et de l’entreprise.
dire comment fonctionne Partage ? n’est pas consommable, nous le leur Partage, c’est donc beaucoup plus Les uns par opposition « bête », et les
Vincent Gall : La base de Partage, c’est facturons. En conséquence, ils trient que la distribution de denrées autres parce que, à leurs yeux, on fait
d’être une banque alimentaire. En 2005, mieux leurs déchets. alimentaires ? du dumping de boulot avec des fonds
quand on a inventé Partage, c’était une V.G. : Oui, c’est un projet global. Le publics. Mais un travail de communi-
réponse à un constat de développement Vous avez un exemple précis d’un choix institutionnel de Partage est de cation qui a été fait, et cela va mieux.
de la précarisation. Il y avait quotidien- de ces « petits » contrats ? dire : toutes nos activités doivent déga- Partage c’est un principe de réalité fort
nement 1300 personnes qui étaient V.G. : Oui. Dans le vieux Carouge, il y a ger des marges afin que le côté banque et une philosophie qui prend en compte
nourries gratuitement pour des raisons toujours eu des problèmes de ramassage alimentaire marche bien. Suivant nos les contraintes de la société telle qu’elle
sociales à Genève (en plus de celles dont des déchets en lien avec la topographie. statuts : Partage soutient les personnes est. Les développements possibles sont
s’occupait l’Hospice Général). Simulta- Nous avons donc proposé à la ville un les plus en difficultés. On soutient donc immenses, il s’agit de faire preuve de
nément, il y avait des surstocks alimen- mandat pour ramasser les déchets des
taires qui étaient jetés tous les jours. 58 restaurants du vieux Carouge. Tout
Qu’est-ce qui manquait pour amener ce que l’on ramassait d’avarié allait à la
la nourriture aux gens qui en avaient poubelle et ce qui était consommable
besoin ? Il fallait convaincre les services terminait dans nos frigos pour finir le
qui s’occupaient des chômeurs en fin de soir même dans plusieurs associations.
droit, les entreprises alimentaires et les Avec nos triporteurs, nous pouvions
associations de jouer le jeu, et trouver aller dans les lieux où les camions pas-
un véhicule pour aller chercher la nour- saient mal. Quand la ville a vu que nous
riture. Comme l’on touchait à des den- faisions du bon travail, ils nous ont
rées alimentaires, il fallait une structure proposé le ramassage du carton et des
professionnelle pour qu’il n’y ait pas de ordures. Résultat ? La ville est plus pro-
risques. On a donc créé une association pre. Avec trois triporteurs électriques et
avec un fonctionnement d’entreprise. autant de personnes qui pédalent, on
Le résultat en 2009 : une récupération ramasse plus qu’un camion de la voirie
de plus de 1000 tonnes de nourriture. avec trois hommes dedans ! Et ce n’est
Aujourd’hui, toutes les associations (56) pas un boulot marginal, on fait les pou-
qui viennent à Partage en sont statutai- belles du vieux Carouge !
rement membres, tout comme les en-
treprises alimentaires que l’on fait payer Mais on va être obligé de grandir. Soit DR
pour nous donner la nourriture, les ser- on stagne et l’on maintient les person-
vices sociaux, et les services publics avec nes dans le statut des Emplois De Solida-
qui l’on est partenaires. rité (EDS), soit on croît afin de salarier directement les associations qui les créativité. Nous avons pour objectif
des gens et les sortir de la précarité. A soutiennent ; et puis on embauche des d’être un service associatif privé du can-
Quel est le principe de base de Partage ? nos yeux, le retour à l’emploi des plus chômeurs en fin de droits. Partage est ton. La dépendance est là, alors autant
V.G. : Très simple; il est de faire partici- pauvres passe par une croissance de nos aussi une entreprise d’insertion profes- la revendiquer, car elle n’empêche pas
per les entreprises à la redistribution de activités. sionnelle et nous serons bons dans cette notre autonomie. Nous souhaitons
leurs surstocks pour nourrir des gens en insertion si l’entreprise fonctionne. Je donc être dépendants de tout le monde,
difficultés et d’employer des gens sans Il y aurait donc un effet tremplin pour n'accepte pas le discours de certains qui de nos autorités, des entreprises alimen-
emplois pour cela. Relevons qu’aucune les gens qui travaillent à Partage ? disent que Genève a les moyens de payer taires et des associations qui ont besoin
des entreprises approchées n’a refusé V.G. : De toute façon, ils doivent partir, 1500 personnes à ne rien faire. Genève de nous. Le potentiel d’emplois dans
d’intégrer Partage. c’est l’objectif. Ces gens ont des EDS, ils a les moyens de payer 1500 personnes le recyclage des déchets et des aliments
ont donc quatre ans de chômage derrière pour faire quelque chose qu’aucune pour de petites entreprises est immense.
D’où viennent les financements ? eux. Un tiers ont la capacité de retrou- entreprise ne fera parce que ce n’est pas
V.G. : Partage a un budget de plus de ver du travail pour autant qu’ils puis- suffisamment rentable ! Pour nous, il n’y PARTAGE
3 millions pour 2010. Notre objectif, sent reprendre un rythme. Pour l’autre a pas de travail occupationnel ni de faux Avenue du Cardinal-Mermillod 13
pour 2011 : un budget de 4 millions. tiers, ce sera plus difficile. Quant au boulots. S’il y a peu de tournus dans 1227 Carouge GE
Nous sommes une entreprise avec une tiers restant, ils ne retrouveront pas de notre équipe, c’est que les gens y Tél +41.22.301.11.78
travail. Ce n’est pas très politiquement trouvent leur compte. Fax +41.22.300.60.58
réalité sociale. L’ensemble de la nourri-
centrale@partage.ch
ture que l’on a distribué en 2008 repré- correct de dire cela, mais c’est la réalité.
http://www.partage.ch/
PORTRAIT CAUSES COMMUNES
12
Entretien Virginie Studemann Wathier

Militer pour une politique au cœur des quartiers


Pour beaucoup de socialistes l’engagement au niveau local est essentiel. Améliorer les conditions de vie dans les quartiers, développer les
solidarités et renforcer les liens sociaux sont au centre de la politique de la ville. Virginie Studemann Wathier est fortement impliquée dans son
quartier et au parti socialiste. Rencontre.
femmes à Genève le 6 mars prochain ! La
Propos recueillis par Ville et le Canton organisent un événement
Virginie Keller pour fêter cet anniversaire « 50 ans déjà ? 50
ans seulement ? »
Où as-tu passé ton enfance ?
VSW : Je suis née à Paris en 1968, j’ai grandi Le parti socialiste traverse-t-il une crise ?
en banlieue parisienne puis à Paris. Ma VSW : Je ne crois pas à l’idée d’une crise du
maman était infirmière et mon papa parti, c’est le monde entier qui est en crise !
travaillait comme indépendant dans le L’économie a changé, l’ultra-libéralisme a
domaine de l’électro-mécanique. pris le dessus, il faut en prendre acte. Nous
devons réaffirmer nos valeurs : la justice
Comment est né ton intérêt pour sociale, la répartition des richesses, le rôle de
la politique ? l’Etat, de la société civile, du monde associatif.
VSW : Nous parlions politique à la Le parti doit donc être très clair sur ses po-
maison, cela faisait partie des sujets favoris sitions et s’en tenir là. Par exemple, lors du
du dimanche midi. Nous votions en famille, débat sur la baisse d’impôt, le bouclier fiscal
nous lisions la presse, ma sœur plus âgée pour les très grosses fortunes aurait dû être
de 9 ans m’emmenait dans les lieux où on dénoncé de manière forte pour réaffirmer
débattait. J’ai eu très vite le goût du débat ! nos priorités.
Et puis, il y a l’Histoire... DR

À l’âge de 13 ans j’ai vécu l’élection de Après ton diplôme, tu as fait quoi ? quand j’ai eu le droit de vote, en 2006, je Il manque peut-être une cohérence interne,
Mitterrand et l’euphorie collective place de VSW : J’ai été embauchée par une société me suis engagée au parti socialiste. les socialistes sont parfois divisé-e-s ?
la Bastille sans comprendre vraiment ce qui d’études, de sondages et d’analyses de VSW : Le grand écart entre les positions
se passait mais il y avait une énergie incroya- discours. On travaillait essentiellement Tu t’engages très rapidement et fortement ne simplifie pas la vie… cette diversité
ble, le partage, l’émotion et l’espoir d’un pour les pouvoirs publics et les collectivités dans la section de la Ville de Genève, tu d’opinions est une de nos forces et une
vrai changement. locales. Durant cinq ans j’ai eu l’occa- vas au Comité puis au Bureau, tu assumes de nos faiblesses. Mais il y a un moment
sion de collaborer avec des municipalités une année de vice-présidence, tu deviens où il faut trancher, sinon cela donne une
Ce goût pour la politique s’est socialistes. présidente du groupe égalité en 2008, mosaïque, qui est certes très démocratique,
exprimé pendant tes études ? tu aimes l’engagement politique ? mais pas très claire politiquement.. Tous
VSW : En 1986, quand je suis entrée à la fac Comment es-tu arrivée à Genève ? VSW : Oui, c’est ce que j’aime faire dans la les partis ont leurs incohérences : les Verts
il y avait les grèves contre les lois Devaquet VSW : L’amour ! J’ai rencontré mon vie. La politique a toutes les qualités, c’est à font venir les Hedge Funds et parlent de
et son projet de privatisation de l’Université. compagnon, un genevois, il avait un la fois théorique et concret, cela concerne décroissance… Ils votent des baisses
J’ai fréquenté les amphis et découvert les enfant à Genève donc j’ai pris la décision de l’échelle mondiale, nationale, locale, la vie d’impôts alors que l’Etat devrait investir
syndicats étudiants, j’ai vécu mes premières déménager. Je suis arrivée en 1999. J’arrive du quartier, cela touche tous les aspects dans la mobilité douce, l’écologie et les
manifestations. La conscience politique se aux Pâquis et en attendant mon permis de de la vie humaine, c’est être ensemble et énergies renouvelables !
construit aussi à travers les études, l’histoire, travail, je tombe enceinte…. Très vite, j’ai construire collectivement !
le droit, l’économie, la sociologie. ressenti le besoin de m’ancrer dans mon Alors comment se positionner ?
quartier. Tu es également impliquée pour l’égalité VSW : Nous ne devons pas nous contenter
Tu as fait quelles formations ? entre les femmes et les hommes, c’est quoi de gérer les crises et les effets pervers de l’éco-
VSW : J’ai fait une licence d’administration Quel est ton engagement dans être féministe chez les socialistes ? nomie libérale. Qui a dit « cessons de changer
économique et sociale puis une maîtrise en ton quartier ? VSW : Ce n’est pas être contre les hommes, le pansement, pensons le changement » ? Se dis-
sciences politiques et un 3e cycle en com- VSW : Associatif ! Je me suis engagée au ce n’est pas que pour promouvoir les tancer d’une logique dite pragmatique mais
munication, politique et animation locales. comité du jardin d’enfant de ma fille. J’ai femmes… l’égalité fait avancer toute la qui masque une logique libérale et proposer
J’avais un stage à faire, j’ai choisi l’échelle été secrétaire aux Créateliers, une associa- société, les femmes et les hommes. Nous de véritables changements. La loi Long-
locale, une municipalité. tion et un lieu d’expression, membre du devons continuer à motiver les candidatures champ sur le chômage était inacceptable, à
comité de la Maison de quartier des Pâquis. des femmes, à les accompagner et enrichir nous, aujourd’hui, de faire des propositions.
Pourquoi l’échelle locale ? Aujourd’hui, je suis membre de comité de le débat sur la parité et les quotas. Nous Sur le territoire de la Ville, il est urgent de
VSW : J’ai travaillé sur les questions liées à l’association de parents d’élèves. Je participe devons aborder les thématiques de fond, préserver la mixité sociale dans les quartiers,
la citoyenneté et la démocratie locale. Les à la coordination des associations des intervenir sur les questions d’actualité Genève ne doit pas devenir une ville pour
rapports entre le pouvoir politique et les Pâquis, je représente aussi l’association comme le démantèlement des Etudes genre à les privilégiés. La clé, c’est le logement.
habitant-e-s sont passionnants. Il fallait pour tout ce qui est sécurité piétonne et l’Université et surtout, lutter contre les
vraiment inventer une nouvelle manière aménagement. A travers mes activités attaques telles que l’initiative contre le On sent ton attachement à la ville.
de communiquer, sortir de la logique associatives, je suis tout le temps en lien avec remboursement de l’IVG lancée par un VSW : Genève, c’est la diversité culturelle,
publicitaire, construire le participa- les problématiques municipales. comité inter parti composé notamment les langues et les modes de vie du monde
tif. J’ai fait mon stage de trois mois au d’évangélistes et d’UDC. Rien n’est acquis entier, elle est très urbaine mais proche de
cabinet du Maire de Vitrolles, un socia- Quand as-tu rejoint la section pour les droits des femmes. la nature. On a une offre culturelle très
liste, il y avait une forte menace du Front Ville du parti socialiste ? importante, un territoire exigu qui donne ce
National. Deux ans plus tard, Megret a VSW : Je vivais mal le fait de ne pas pouvoir Mais il y a des victoires quand même ! sentiment de proximité particulier. A nous
gagné les élections et la gauche a perdu voter, de ne pas être une citoyenne à part VSW : Oui, heureusement, on va fêter de nous engager pour qu’elle reste vivante
cette mairie. J’ai aussi milité contre le FN. entière. J’ai demandé ma naturalisation et le 50e anniversaire du droit de vote des et ouverte.

D É J À ? 5 0 A N S SEULEMEéliNgiTbilit?é PROGRAMMreEdes portes et performance « De l’aesutdaremescô: té de l’i


soloir »

50 ANS yaient le droit


de vote et d’
tro e et de de la polic 16h00 Ouvertu officielles de
M
de Genève
, les électeurs de
notre canton oc de la sécurité, nu e et allocutions in ist ra tive de la Ville
Le 6 mars 1960 niv ers air e, le département fin an ce s et du logemen
t
16h30 Bi en ve
o, co ns eil lèr e ad m
Pour célébrer ce
t an nt de s lern
aux femmes. et le départeme us inviter le : Sandrine Sa Etat
, conseillère d’
nè ve (D SP E) pla isir de vo
t du Canton de
Ge nève ont le
l’environnemen de la Ville de Ge Isabel Rochat y, conseillère fédé
rale
- 1ère représen
tation
2010 y- Re
samedi 6 mars nevoises ? »
Ca lm
Micheline le s fe mm es ge lo ir »
en t l’i so
à 16h00 17h00 « De
quoi se plai
gn
« De l’autre
côté de
ème représentation
performance ises ? » - 2
au Palais Eynard Ve rre de l’amitié et fe m m es ge ne vo
ix-Rouge 18h00 plaignen t le s
4 rue de la Cro « De quoi se etat.ge.ch
1204 Genève 19h00 tation à egalite@
ur e la de ux ième représen
20h00 Clôt première ou
rformances sable pour la
Spectacles et pe vation indispen
Réser

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