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La procédure en matière des

accidents de la route au Maroc


Chapitre Premier :
La procédure d’indemnisations des victimes des accidents de circulation
Le contentieux des accidents de la circulation est l’un des principaux litiges qui se présentent
fréquemment devant les tribunaux marocains, vu le nombre très élevé des accidents de la route
que connaît notre pays.
Dans ce chapitre on parlera de la procédure suivie en cas d’un accident de la route (Section I),
pour arriver à la question des indemnisations des victimes (Section II ).
Section I : La procédure suivie en cas d’un accident de la circulation
Lorsqu’aura lieu un accident de la circulation, la victime a tout intérêt à la déclarer immédiatement
aux intéressés. Il passera ensuite à la phase de la constitution d’un dossier de l’accident. Ce dernier
sera utilisé le long de la procédure de règlement à l’amiable, ou devant le tribunal.
Nous traiterons dans cette section la déclaration d’un accident de la route et l’assistance juridique,
en outre on éclaircira les documents indispensables des victimes d’accidents de la circulation.
A / La déclaration d’un accident de circulation
Selon mon expérience de stagiaire dans un cabinet d’avocat durant deux mois, j’ai remarqué qu’il
faut toujours déclarer l’accident de circulation par lettre recommandée à l’assureur de la victime. Il
faut aussi pensez à garder des preuves. Ainsi pour constituer un dossier d’un accident de circulation,
l’avocat de la victime a besoin du maximum d’éléments qui seront autant de preuves des
circonstances de l’accident pour établir avec exactitude les différentes responsabilités. En effet, il
est impératif de garder le maximum d’indices qui permettront de reconstituer ce qu’il s’est passé,
car souvent existent des discussions sur les responsabilités qui n’ont pas de raison d’être. C’est pour
cela, il faut essayez, dans la mesure du possible de :
• relever l’existence de témoins (prendre les nom et prénom, l’adresse, le numéro de
téléphone).
• prendre des photos.
• notifier les éventuels obstacles (exemple : d’autres véhicules qui ont peut-être joué un rôle).
• exiger si possible la venue de la police ou de la gendarmerie.
• insister sur la vérification de l’état d’ivresse du conducteur le plus tôt possible, etc. En effet,
si le conducteur responsable présente une ébriété évidente (haleine alcoolisée, déséquilibre)
ou un état physique diminué par la prise de stupéfiants ou de médicaments dangereux pour
la conduite (pupilles dilatées, odeur de cannabis, présence de joints dans la voiture), il faut
le signaler à la police, en trouvant un ou plusieurs témoins pour le remarquer également.
Si la responsabilité de l’accident est établie et que vous êtes conducteur non responsable, votre
indemnisation est alors à la charge du responsable. Alors que lorsque la responsabilité de l’accident
est connue et que vous êtes conducteur seul responsable, vous ne pouvez prétendre à aucune
indemnisation, sauf au cas où vous auriez eu la prudence de vous assurer par une assurance tout
risque.
Il est à notez que les responsabilités peuvent également être partagées. C’est pourquoi, il est
très important de bien se défendre
B/ L’assistance juridique
1/L’assurance
L’assurance du victime ou l’assurance du véhicule dans lequel elle était en qualité de passager au
moment de l’accident a obligation d’exercer le recours pour lui , c’est à dire qu’elle doit contacter
l’assureur adverse pour programmer les expertises médicales, obtenir des provisions et obtenir
l’indemnisation des différents préjudices.
2/ L’avocat
L’assistance d’un avocat indépendant et spécialisé dans la défense des victimes d’accident de la
circulation est primordiale pour assister la victime tout au long des démarches d’indemnisation. La
victime a le choix entre l’avocat de l’assurance et un avocat indépendant. L’avocat de l’assurance a
pour seul client l’assurance qui le rémunère et non la victime.
Rétribué par l’assurance sur des bases contractuelles, il disposera de peu de temps à consacrer à la
victime.
De plus, la demande d’indemnisation concernant la victime sera établie sur des barèmes fournis
par les compagnies d’assurances et en fonction des instructions de l’assurance. L’avocat de
l’assurance peut être utile pour faciliter les démarches quand la marge de manœuvre indemnitaire
est réduite, c’est à dire quand les préjudices sont peu importants. Par contre, dans le cas de
blessures graves pouvant entraîner des répercussions à long terme sur la vie quotidienne de la
victime et sur sa vie professionnelle, le choix d’un avocat indépendant s’impose.
Section II: Documents indispensables pour les victimes
A- Le certificat médical initial
Le médecin qui va procéder au premier examen médical de la victime, dans les suites
immédiates de l’accident, au moment de son admission aux urgences de l’hôpital va rédiger un
certificat dit « certificat médical initial ». Il va dresser un bilan des différentes lésions, et le certificat
doit être le plus détaillé possible, et dresser un état descriptif précis de toutes les blessures y
compris celles qui peuvent apparaître minimes lors du premier diagnostic .
L’indemnisation ne prendra en compte que les séquelles en lien direct et certain avec
l’accident. C’est pourquoi il ne faut pas hésiter à demander la rédaction d’un nouveau certificat
médical initial si des lésions ont été oubliées en raison de la gravité de l’état initial de la victime. Ce
document doit aussi mentionner une durée d’I.T.T. (Incapacité Temporaire Totale) ou D.F.T. (Déficit
Fonctionnel Temporaire) prévisible. La durée d’I.T.T. est unélément de grande importance car elle
conditionne la nature et la qualification de l’infraction qui pourra être retenue à l’encontre de
l’auteur de l’accident.
B- Le dossier médical
La victime d’un accident de circulation doit demander la transmission de son dossier médical ( en
particulier les comptes rendus opératoires et les comptes rendus d’hospitalisation, ainsi que les
radiographies réalisées à son admission ). Ces différents documents serviront à déterminer
l’étendue de son préjudice corporel. Il est aussi important d’obtenir un document mentionnant tous
les examens et en particulier les radiographies réalisées à l’admission du victime dans
l’établissement hospitalier.
C- Le procès verbal
A la suite d’un accident, la police ou la gendarmerie établit un procès verbal qui rassemble tous les
éléments objectifs permettant d’obtenir la manifestation de la vérité : plans du lieu de l’accident et
de la position des véhicules impliqués, photographies, auditions de témoin. Ce document est d’une
importance capitale car il va permettre d’établir les responsabilités, et déterminer le droit du
victime à indemnisation. La victime ne peut avoir accès à aucune information pendant la durée de
l’enquête. A l’issue de l’enquête, le procès verbal est transmis au procureur du roi et aux assureurs.
Pour obtenir ce document qui détermine les responsabilités, la victime peut le demander à son
assureur ou à celui du responsable de l’accident, ou si il a déposé plainte en écrivant au parquet du
tribunal concerné.
Chapitre Deuxième : L’indemnisation des victimes
L’indemnisation des victimes des accidents de la circulation se fait à la lumière des principes
généraux (section I). Elle suit aussi une méthode bien déterminée pour être évaluée (section II) .
Section I : Principes généraux de l’indemnisation
A- Le bénéficiaire d’une indemnisation
Dans la pratique, le piéton, le cycliste ou le passager transporté sont toujours indemnisés. Par
contre si la victime commis une faute volontaire grave, et que cette faute est à l’origine exclusif du
dommage, son droit à indemnisation peut être contesté.
Pour les conducteurs, le droit à l’indemnisation peut être exclu ou limité si une faute de conduite a
été mise en évidence, et si cette faute est à l’origine de l’accident, ou en a aggravé les conséquences
(par exemple absence du port de la ceinture de sécurité ou absence de port du casque pour les
motards).Le conducteur sera indemnisé en toutes circonstances s’il bénéficie d’une assurance
garantie conducteur.
B- Le responsable de l’indemnisation
La victime d’un accident de la circulation est indemnisée par l’assureur du véhicule dont le
conducteur fautif est à l’origine de l’accident, ou par l’assureur du véhicule dans lequel elle se
trouve comme passager. Dans le cas d’absence d’assurance du conducteur fautif, c’est le Fonds de
Garantie des Accidents Automobiles (FGA) qui indemnisera les victimes, de la même façon qu’un
assureur classique.
Si la victime d’un accident de la circulation est conducteur et avait un accident seul, par défaut
de maîtrise du véhicule par exemple, elle ne sera indemnisée que si elle possède une assurance
garantie conducteur. L’absence de poursuite pénale à l’encontre de l’auteur de l’accident n’a pas de
répercussion sur le droit des victimes à indemnisation.
Il est à noter qu’en cas d’un auteur non assuré, non identification de l’auteur d’un accident ou en
cas d’insolvabilité de l’auteur identifié, la victime sera indemnisée par le FGA.
C- Les moments de l’indemnisation
1- Les provisions
L’indemnisation des préjudices ne pourra intervenir qu’au moment de la consolidation
des blessures, c’est-à-dire plusieurs mois ou années après l’accident.
Dans l’attente de cette consolidation, l’assureur est obligé de verser à la victime des provisions à
valoir tant sur ses différents frais engagés en relation avec l’accident, ses pertes de salaires ou de
revenus mais aussi sur le préjudice corporel prévisible.
l est important de constituer un dossier en gardant tous les justificatifs des frais engagés
(factures de téléphone, de déplacements pour la victime et les membres de sa famille, frais
médicaux non remboursés, achats de vêtement pour la rééducation , etc.).
2- La consolidation des blessures
L’indemnisation définitive ne pourra intervenir que lorsque la victime sera déclarée consolidée.
La consolidation ne veut pas dire guérison. On estime que l’état de la victime est consolidé quand
elle ne bénéficie plus de soins susceptibles d’améliorer son état ( soins médicaux, kinésithérapie ou
ablation prochaine de matériel d’ostéosynthèse …) et que ses séquelles ne doivent plus évoluer à
court terme.
L’intérêt des victimes est d’obtenir une consolidation le plus rapidement possible, en tenant
compte bien entendu de la gravité des blessures. En effet, avec le temps, leurs corps vont s’habituer
aux séquelles et elles leur paraîtront moins importantes au cours de l’évaluation finale.
Section II : Méthode et évaluation des indemnisations
Tous les chefs de préjudices pris en compte dans l’expertise donnent lieu à une indemnisation.
C’est la raison pour laquelle, il ne faut jamais se rendre seul aux expertises médicales.
Dans cette section l’accent sera mis sur la méthode d’indemnisation (A), et l’évaluation du
préjudice subi par les victimes des accidents de la circulation(B).
A- Méthode d’indemnisation
L’indemnisation doit se faire dans un cadre amiable avec l’assureur ou dans un cadre judiciaire,
civil ou pénal, si des poursuites sont exercées contre le responsable de l’accident. Il faut réserver la
voie judiciaire, plus longue et plus complexe, pour les cas graves, par exemple en cas de décès de la
victime. Si le préjudice corporel est léger la victime peut choisir une indemnisation à l’amiable entre
les compagnies d’assurance.
Dans la grande majorité des cas, il est conseillé de choisir la voie de la transaction amiable et
contradictoire avec la compagnie d’assurance du responsable de l’accident. Avec l’aide d’un avocat
spécialisé la victime obtiendra au moins autant qu’avec une procédure judiciaire. Elle obtiendra
beaucoup plus facilement le versement de provision et réduira considérablement le délai de
l’indemnisation finale après consolidation.
La transaction amiable est une démarche beaucoup plus souple qui permet d’obtenir des
provisions rapidement. Le montant de l’indemnisation finale sera identique à celui que la victime
aura obtenu par la procédure judiciaire, à condition bien entendu d’être conseillé et aidé dans cette
transaction amiable. Dans de nombreux cas, les victimes obtiennent des sommes supérieures à
celles qui auraient été accordées par les tribunaux. La raison est simple : les assurances préfèrent
que le montant de la transaction reste confidentiel pour ne pas faire jurisprudence.
En ce qui concerne le montant de l’indemnisation, il dépend de l’importance du préjudice et de
ses répercussions sur la vie quotidienne et professionnelle du victime d’un accident de la
circulation. C’est l’expertise médicale qui va permettre l’évaluation des séquelles et des différents
préjudices causés aux victimes.
B- Evaluation des préjudices subis
1- L’Incapacité Temporaire Totale (I.T.T.) ou Déficit Fonctionnel Total (D.F.T.)
L’I.T.T. (Incapacité Temporaire Totale ) ou D.F.T. ( Déficit Fonctionnel Temporaire ) se définit
par la période antérieure à la consolidation, pendant laquelle, du fait des conséquences des lésions
et de leur évolution, la victime est dans l’incapacité totale de poursuivre les activités habituelles qui
sont les siennes, qu’elle exerce en outre, ou non, une activité rémunérée.
L’I.T.T. ou le D.F.T. pourra être suivie d’une I.T.P. ( Incapacité Temporaire Partielle ) ou d’un D.F.P.
( Déficit Fonctionnel Partiel ) avant la consolidation de la victime.
L’I.T.T. ou D.F.T. correspond aux périodes d’hospitalisation de la victime, mais aussi à la perte de
qualité de vie et à celle des joies usuelles de la vie courante que rencontre la victime pendant la
maladie traumatique, à savoir :
• La séparation de la victime de son environnement familial et amical durant les
hospitalisations,
• La privation temporaire des activités privées ou des agréments auxquels se livre
habituellement ou spécifiquement la victime,
• Le préjudice sexuel pendant la maladie traumatique, etc.
Ainsi la détermination de l’I.T.T. ou D.F.T. est variable selon la situation dans laquelle se trouve
la victime, et doit être évaluée, que la victime exerce ou non une activité professionnelle rémunérée
privée ou publique.
Si la victime exerce une activité rémunérée, l’incapacité temporaire totale, ou le déficit
fonctionnel temporaire correspond à la période d’indisponibilité pendant laquelle, pour des raisons
médicales, en relation certaine, directe et exclusive avec l’accident, elle n’a pu exercer ses activités
habituelles.
Si la victime exerce une activité non rémunérée, l’Incapacité Temporaire Totale, ou le Déficit
Fonctionnel Temporaire correspond à la période d’indisponibilité pendant laquelle, pour des raisons
médicales, en relation certaine directe et exclusive avec l’accident, elle n’a pu exercer ses activités
habituelles.
Si la victime est demandeur d’emploi, l’incapacité temporaire totale, ou le déficit fonctionnel
temporaire correspond à la période d’indisponibilité pendant laquelle, pour les mêmes raisons que
précédemment, elle n’a pu exercer un emploi favorable qui s’adapte à ses compétences.
L’incapacité temporaire totale ou le déficit fonctionnel temporaire correspond à la période où la
victime est totalement dépendant: hospitalisations, séjours en centre de rééducation,
hospitalisation à domicile, etc. L’I.T.T. ou D.F.T. permet le remboursement des éventuelles pertes de
salaire, déduction faite des indemnités journalières versées par la sécurité sociale et à
l’indemnisation des troubles dans les conditions d’existence pendant cette période.
En général, deux types de préjudices sont reconnus et soumis à indemnisation.
2- Types de préjudices
Pour la victime elle-même:
a- Les préjudices à caractère personnel :
• Souffrances endurées qui correspondent à l’importance des douleurs physiques et morales
ressenties à la suite de l’accident
• incapacité permanente partielle : préjudice physiologique restant
• préjudice esthétique
• préjudice d’agrément telle la diminution de la qualité de vie, avant et après consolidation
• préjudice sexuel (disparition de toute possibilité de vie sexuelle)
• préjudice d’établissement comme l’impossibilité de fonder un foyer
b- Les préjudices patrimoniaux :
• frais matériels restés à votre charge (médicaux, pharmaceutiques, d’hospitalisation) et
autres
• matériel paramédical : appareillages, aides techniques, aménagement du véhicule et du
logement
• préjudice économique et professionnel : perte de revenus, perte d’emploi, obligation de
reclassement, perte de chance de promotion ou d’évolution de carrière, pénibilité accrue du
travail….
• habitat adapté ou comment prévoir les aides et un aménagement de l’habitat de la victime
• frais futurs
Pour les proches de la victime :
• frais de déplacements et autres (hébergement): pour rendre visite à la victime hospitalisée,
effectuer des démarches pour elle, la conduire pour ses déplacements….
• préjudice moral d’affection en cas de décès ou blessures graves de la victime.
• préjudice d’accompagnement, en cas de victime gravement handicapée.
• en cas de décès : les conjoints et enfants subissent un préjudice économique direct qui sera
calculé par leur avocat.
Il faut comprendre donc l’importance de conserver le maximum d’éléments et de se faire
défendre par un avocat compétent, pour mieux être indemnisé !
Conclusion :
En guise de conclusion, cette étude a pour but de savoir les démarches nécessaires pour
obtenir les dédommagements en cas d’un accident de la circulation.
Un dernier mot à dire à propos des accidents de la circulation : Les accidents de la route ne sont
jamais le fait du hasard. Ils ne sont pas non plus le fait d’une seule cause. Ce sont bien la
conjonction de divers facteurs qui conduit aux accidents. C’est donc en diminuant le risque lié à
chacune des composantes qui peuvent intervenir dans l’accident que le progrès est possible. Pour
remplir cette mission en collaboration avec tous les départements ministériels concernés, la
sécurité routière doit orienter son action vers les trois composantes que sont le conducteur, la
route, le véhicule. Formation, mobilisation, prévention, et répression visent à améliorer le
comportement du conducteur.
L’adoption d’une stratégie capable d’inciter les usagers à un meilleur comportement, par le
respect plus strict de la législation en harmonisant les sanctions et leur crédibilité, en faisant de la
formation continue, en renforçant les contrôles routiers et en encourageant des campagnes visant
la modification des connaissances, des attitudes et du comportement de l’usager, devient
aujourd’hui une nécessité pour une meilleure sécurité routière au Maroc.
Par : Mohammed El Janati Docteur en Droit

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