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L’ère du tout-mégalo

Réforme territoriale
Va-t-on vers l’ère du tout-mégalo ?
Par Nicolas Stoquer

Un aspect méconnu de la réforme territoriale, version Nicolas Sarkozy, consiste à


sacrifier les campagnes et notre réseau de villes moyennes au profit d’énormes
mégapoles interconnectées entre elles à l’échelon international. Le projet de loi en cours
d’adoption au Parlement représente selon certains le triomphe du lobby urbain et de
la métropolisation. Les visées de la réforme sont en tous les cas pour le moins
mégapolistiques et monopolistiques. Celle-ci appelle de ses vœux l’avènement de
grandes oligopoles qu’elle confond avec les avancées de la modernité, sorte de
condensé européen de la côte Est et de la côte Ouest américaine, fusion délirante et
mégalomaniaque de New York et de Las Vegas.
La politique traditionnelle de coopération et de solidarité, dont l’Etat en France a fixé
les règles du jeu et assumé une fonction de régulation assurant un équilibre entre les
territoires très urbanisés et concentrés et des zones non denses, est ainsi menacée par
une réforme territoriale voulue par le gouvernement et censée répondre aux exigences et
aux objectifs de compétitivité de Lisbonne, qui poussent à la constitution de grandes
métropoles susceptibles de rivaliser avec les autres métropoles européennes ou
mondiales. C’est une nouvelle politique d’aménagement du territoire très agressive,
appliquant des principes de compétitivité et de concurrence condamnant les territoires
« non denses », puisque la systématisation idéologique de la concurrence pratiquée par
les autorités européennes les exclut, et en exclut les opérateurs économiques.

Les villes modernes, la Nation et l’émergence


d’une problématique d’aménagement territorial
L’Histoire moderne est née dans les villes. L’Homme a pu échapper dans ce nouvel
espace à la proximité cancanière comme à l’isolement propre aux petits villages. Par un
paradoxe apparent, la ville, occupation, habitation de la terre, s’est séparée du lieu qui
l’a vu naître. Originellement repaire, refuge d’un clan, d’une famille, elle est devenue
un repère géographique, un carrefour présidant aux échanges et au brassage entre les
groupes et les ethnies. Lieu de foire ou de marché mais carrefour de pèlerinage aussi !
Pensons aux routes de Compostelle ! Et les villes chemins de fer, aujourd’hui ville
TGV… Ajoutons enfin la ville qui s’émancipe totalement de la terre qui l’a vu naitre,
produisant des biens non agricoles, ville d’artisans et de bourgeois (habitants du
« bourg »), et au XIXème siècle, la ville industrielle autour de la mine, de l’usine.
La notion moderne de Nation est apparue dans ces villes qui avaient connu la
dissolution des liens sociaux enracinés dans la famille directe ou dans les matrices
symboliques traditionnelles quand, sous l’assaut de la modernisation, les institutions
sociales furent de moins en moins fondées sur une tradition naturalisée et de plus en
plus vécues comme relevant du contrat. On pourrait citer à ce titre les villes de l'Ouest
quelques années après la révolution, qui furent républicaines, tandis que leurs
campagnes environnantes restaient attachées, non pas à l'ancien régime, comme ont pu
le faire croire certains manuels d'histoire, mais à une organisation sociale traditionnelle
composée de la famille, du seigneur et du curé. Le fait que l’identité nationale est vécue
comme étant au moins minimalement naturelle, comme une appartenance fondée sur le

Par Nicolas Stoquer Président du Rassemblement Pour la France – http://www.r-p-f.org


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sang et le sol, et en tant que telle opposée à l’appartenance artificielle aux institutions
sociales proprement dites (Etat, profession) révèle le besoin pour l’ensemble de la
communauté d’une institution sociale naturalisée servant de socle commun neutre.
C’est dans ce cadre national que s’est inscrite traditionnellement la politique
d’aménagement du territoire en France cherchant à établir un équilibre entre zone
fortement urbanisée et zones rurales. La solidarité nationale était ainsi invoquée pour
assurer l’harmonie entre les territoires de la République. Il fallait corriger la
problématique de « Paris et son désert », la gouvernance des territoires ruraux
s’appuyant sur les cantons et les sous préfectures.

Les Métropoles et les espaces non denses


Depuis au moins les lois de décentralisation des années 80, les objectifs, confrontés à
une nouvelle réalité ont changé. Il faut maintenant assurer un équilibre entre un
phénomène de métropolisation généralisée, autour des grandes agglomérations, et une
interrogation sur la gestion de nouveaux espaces non denses qui ne se résument pas à
l'espace rural, mais intègrent aussi bourgs et petites villes. Ce sont les fameux
«territoires spacieux » (80 % de l’espace national et seulement 20 % de la population),
les territoires où il fait bon vivre aux dires mêmes d’une majorité de nos concitoyens,
car la France – cela fait partie aussi de son exception en Europe – a de l'espace, dans un
monde où il se raréfie.
Les exemples ne manquent pas de la réussite de cette politique d’aménagement du
territoire, la Bretagne a connu un fort développement depuis vingt ans, en s'appuyant sur
des investissements exceptionnels d'infrastructure, une pratique nouvelle de
développement territorial souvent en pointe par rapport aux autres régions et un réseau
de villes dynamiques. C’est le général de Gaulle qui lança le mouvement à la fin des
années 60, pour circonscrire les tentations séparatistes. Avec deux axes principaux : le
désenclavement qui est une particularité de la Bretagne avec des autoroutes qui,
construites depuis cette époque et c’est à noter, sont gratuites, et le développement
fondé sur les télécommunications (« Pleumeur-Bodou », première expérimentation du
Minitel et cet été même première région à basculer dans le tout-TNT). C’est ainsi l’Etat,
la Nation, et non la région comme cherche à le faire croire aujourd’hui une certaine
fable, qui sont les responsables du développement. Une volonté de l’Etat nation qui aura
réussi en s’appuyant – il faut être totalement juste – sur la grande qualité de la main
d’œuvre locale. Un Etat qui doit aussi savoir aujourd’hui composer avec une volonté
locale qui n’est pas toujours et pas seulement le fruit d’un intérêt particulier s’opposant
à l’intérêt général.
Autres exemples, autres lieux, le Limousin et l’Auvergne, avec la fin de leur
enclavement autoroutier, leur fort investissement dans le numérique et leurs politiques
d'accueil, sont aussi des régions qui ont commencé à constituer de tels « territoires
spacieux » qui attirent des populations nouvelles.
Longtemps la France, par ses soutiens politiques ruraux, notamment les conseils
généraux et ses agriculteurs, a pu résister aux phénomènes mondiaux et tendanciels de
métropolisation. La fragilisation du département avec l’apparition de conseils
territoriaux aux contours flous et à l’avenir incertain risque de briser cette résistance aux
effets les plus néfastes de la mondialisation. C’est le cœur de l’organisation
administrative de l’Etat qui est menacé sans que rien n’ait été prévu pour le remplacer.
C’est l’échelon de base, l’élément premier et constituant de la Nation qui
irrémédiablement va disparaître.
La ville enracinée dans la campagne est féconde, culturellement et économiquement ;
la ville déracinée en revanche est stérile. De même, nos agriculteurs se veulent des

Par Nicolas Stoquer Président du Rassemblement Pour la France – http://www.r-p-f.org


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acteurs économiques à part entière. Si c'est grâce à eux que nous avons encore une
agriculture, une vie rurale et des paysages de qualité, n’en faisons pas pour autant les
« jardiniers » des urbains. La campagne n’est pas un parc d’attraction pour gens de la
ville en promenade.

La réforme territoriale :
création des métropoles et des pôles métropolitains
L’article 5 du projet de réforme territoriale concerne la création des métropoles. « La
métropole est un établissement public de coopération intercommunale (EPCI)
regroupant plusieurs communes d'un seul tenant et sans enclave qui forment, à la date
de sa création, un ensemble de plus de 450.000 habitants et qui s'associent au sein d'un
espace de solidarité pour élaborer et conduire ensemble un projet d'aménagement et de
développement économique, écologique, éducatif, culturel et social de leur territoire
afin d'en améliorer la compétitivité et la cohésion ». Le projet prévoit le renforcement
des compétences économiques de la métropole (zones d'activités économiques,
promotion à l'étranger du territoire) et l’élargissement de ses compétences facultatives
exercées en lieu et place du département (action sociale en faveur des personnes âgées,
aide sociale à l'enfance, tourisme, culture, sport). Il est aussi prévu d’associer de plein
droit les métropoles aux schémas et documents de planification susceptibles de
concerner leur territoire et de permettre le renforcement de l'intégration financière des
métropoles par le transfert (avec possibilité de reversement) de la taxe foncière sur les
propriétés bâties et de la dotation globale de fonctionnement des communes membres.
Cette nouvelle structure qui se présente comme devant fonctionner peu ou prou sur le
modèle PLM (Paris Lyon Marseille) et disposerait de la clause générale de compétence
qui permet à toute collectivité, en dehors de ses domaines, prérogatives et compétences
réservés, de s'investir dans une mission de service public qu'il juge importante, va de
fait beaucoup plus loin et implique finalement l’hétérogénéité des territoires et des
structures au regard de l’actuelle remise en cause de l’échelon départemental dans le
cadre de la mise en place des conseils territoriaux aux compétences imprécises et à
l’avenir indécis. Coexisteraient dés lors sur un même territoire national des
départements affaiblis en milieu rural, et d'autres structures au fonctionnement et à
l'influence plus affirmée en milieu urbain! Rien n’est plus opposé à l’idéal de solidarité
nationale que de prévoir des administrations politiques locales à géométrie variable ou
ne prévaudrait plus l’égalité entre les territoires et ceux qui les habitent, ou la
péréquation entre ville et campagne n’opérerait plus. L’Allemagne du XIXème siècle,
avant de voir naître au sein de ses populations une prétention à un grand Reich, était
habituée à voire cohabiter des « villes libres » avec des royaumes et diverses
principautés de taille différente. L’alignement des provinces prévu par Bruxelles se fera
sur le modèle des villes-régions allemandes actuelles (Hambourg, Brême, Berlin), des
villes libres de l’Allemagne du XIXème (Francfort, Brême, Hambourg, Lübeck) et des
villes hanséatiques. Sans volonté politique affirmée, c’est le commerce et lui seul qui
modèlera demain comme hier la géographie économique d’ensemble. Et tant pis si il y a
des laissés pour compte.
Le seul modèle concurrent d’une logique qui nie le particularisme français serait à
chercher dans les villes Etats d’Asie, façon empire britannique : Hong-Kong, Singapour.
Des villes sans racines, directement connectées à la mondialisation, enclaves
territoriales à influence internationale, symbole de réussite économique, éphémère
certes mais dont la simple notion de qualité de la vie est absente et le développement
durable sans aucune garantie. C’est la transposition artificielle en France de systèmes
complètement étrangers à notre culture dont la seule certitude est que la greffe ne

Par Nicolas Stoquer Président du Rassemblement Pour la France – http://www.r-p-f.org


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prendra pas.
Ce retour organisé à une forme indéniable de féodalité ou de vision impérialiste
dépassée comme la France elle-même n’en a probablement jamais connue entre en
contradiction avec le discours de ses promoteurs qui affichent l’ambition d’aller dans le
sens de la modernité triomphante. Les objectifs sont grandioses pour ne pas dire
grandiloquents. La métropole se substituera aux communes en matière de
développement et d’aménagement économique, social et culturel, d’aménagement
d’espace métropolitain, de politique locale de l’habitat, de gestion des services d’intérêt
collectif et de protection de l’environnement. Rien que cela… Les nouveaux
mastodontes seront des métropoles technocratiques dont la compétitivité mondialisée
devrait servir de pôle d’attraction aux entreprises à dimension mondiale. On nous parle
même de « ville monde » concernant le projet du Grand Paris. Avec leur subtilité
habituelle, nos nouveaux promoteurs nous présentent l’évolution comme inéluctable au
risque de quitter le cours de l’Histoire et de voir nos villes se transformer en musée pour
touriste nonchalant.
On note aussi subrepticement que la future « Société du Grand Paris » sera constituée
en société anonyme avec la possibilité d’expropriation et d’urbanisation sur quatre fois
la surface de Paris, ce qui s’apparente ni plus ni moins à une privatisation de l’espace
public et à la mise en place de villes privées sur le modèle nord américain, dont on sait
aujourd’hui qu’elles peuvent faire de retentissantes faillites. Et cela sans parler de
l’ajout à ce modèle américain de vieilles méthodes nationales peu recommandables cette
fois-ci où la société d’économie mixte tient lieu d’alibi pour corrompus ou pour justifier
le fait du Prince. Les années Mitterrand furent particulièrement prolifiques en la matière
comme il est pour le moins étonnant de voir nommer encore aujourd’hui à la tête de ce
genre d’organisme un protégé du pouvoir ou un rejeton du Président.
Mais pour couvrir les rumeurs de banqueroute et d’affairisme, on en rajoute par des
grandes déclarations d’amour et de belle profession de foi européenne. Ainsi le grand
Paris ne peut se concevoir que dans un cadre global et systémique, s’inscrire que dans la
géométrie du triangle Londres, Paris, Rotterdam. Et pourtant, il y a plus que l’ombre
d’un soupçon que tout cela ne servira au final que la mondialisation débridée. Pourquoi
donc Bruxelles s’y retrouverait-elle plus que Paris dans cette prise d’indépendance des
mégalopoles ? La dernière mode dans les milieux du luxe et de la haute couture n’est
elle pas la signature « Paris, Tokyo, New-York » ? Au jeu de massacre ou le plus
archaïque, c’est toujours l’Autre, on en vient un jour à être le ringard du plus snob que
soi !

La suppression de la base juridique du Pays


Pour parachever l’œuvre de destruction entreprise, sacrifier pleinement aux dogmes
de l’Europe et de la mondialisation, le projet de loi s’attaque sous couvert de
rationalisation du millefeuille territorial français et de réduction du nombre d’échelons
administratifs, au seul outil de gouvernance des territoires, le « pays », en supprimant sa
base juridique inscrite dans l'article 22 de la loi d'orientation et d'aménagement du
territoire et le dispositif de la loi Pasqua de 1995. C'est dès lors à bon droit que les
associations d'élus du monde rural font à l'heure actuelle circuler une pétition pour que
l'on revienne sur cette disposition du projet de loi sachant que ce dispositif permettait
aux territoires organisés de mener des actions en faveur du rapprochement des EPCI à
fiscalité propre en impliquant les acteurs socio-économiques, notamment en milieu
rural, dans un objectif équilibré d’aménagement et de développement du territoire, cela
en liaison avec les parcs naturels régionaux et les schémas de cohérence territoriale – les
SCOT – généralisés dans le cadre du Grenelle de l’environnement et en s’appuyant sur

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une contractualisation renouvelée et une prise en compte des pays pour l’organisation
des services publics.
Le projet de loi s’achemine pour sa part dans une direction opposée, celle de la mise
en concurrence des territoires, au mépris des équilibres à l'intérieur des régions. Cette
réforme signifie donc la casse du modèle d'équilibre territorial. Créer les Métropoles et
supprimer les Pays, c'est reproduire à l'échelon régional un déséquilibre entre une ou
deux grandes villes, qui concentreraient l'écrasante majorité des ressources et des
activités, et les territoires périurbains ou ruraux, réduits aux fonctions de villes-dortoirs
ou de lieux de villégiature. Jusqu'à présent, le maillage du territoire par les villes petites
et moyennes, qui fait la particularité et la richesse de nombre de territoires en France,
est encore une réalité, malgré les menaces de fractures territoriales que l'on connaît. Il
constitue par exemple un des facteurs clés de la qualité de vie en Bretagne. Ainsi qu'en
sera-t-il demain si Rennes et Nantes devaient acquérir toujours plus de compétences ?
Dans quel sens les vases communiqueraient-ils ?. L'aire métropolitaine va-t-elle «
irriguer le territoire », ou bien va-t-elle capter le dynamisme breton au détriment de la
Bretagne occidentale ou rurale ? Le précédent des « villes TGV » à une heure de Paris
n’incite pas à l’optimisme. Elles induisent un certain développement par rapport aux
autres villes, mais la fuite des élites en direction de la capitale et le manque de
développement local dresse un tableau contrasté et globalement négatif.

La mutation de l’idée européenne


A l’échelle européenne, niveau auquel se situent les initiateurs de cette réforme, la
question est résiduelle. Il ne s’agit en effet plus d’aménager et d’équilibrer un territoire
national mais un espace bien plus vaste, à l’échelle d’un continent. En changeant
d’échelle, les eurocrates changent de logique. Il ne s’agit pas tant et uniquement de
mettre en concurrence de grandes métropoles selon une critique attendue du modèle
libéral européen que de substituer aux notions de territoires, de pays, impliquant l’idée
de frontières, de limites, de centres et de périphéries celles de l’interconnexion des
grands pôles urbains, de réseau métropolitain. Il n’est alors d’autres souverains biens
que de subvertir les obstacles, de confondre les logiques frontalières.
Le projet de l’Europe « jacobine », supranationale et technocratique, a vécu.
L’idéalisme républicain avait trouvé à se sublimer dans ce projet de construction d’une
Europe puissance qui inspira un certain génie français de Victor Hugo à Jean Monnet. Il
s’agissait de reproduire au niveau bruxellois un super-Etat nation avec un découpage
administratif adapté correspondant à quelque chose près aux Länder allemands ou aux
puissantes régions espagnoles, en lieu et place des anciens départements français. Les
vieilles nations européennes étaient bien évidemment condamnées à dépérir et enfin à
disparaître, prises en étau qu’elles seraient entre une entité supranationale et un
découpage infranational faite de grandes régions administratives. La trop grande
abstraction de cet idéal européen, son refus obstiné de se fonder sur le principe de
réalité, son incapacité à faire émerger un simple embryon de peuple européen fit
apparaître la construction européenne en complet décalage avec les opinions publiques
nationales. L’échec en 2005 du projet de constitution européenne marqua l’échec
définitif de cette entreprise prométhéenne.
L’Europe telle qu’elle procède dorénavant du traité de Lisbonne emprunte à une toute
autre logique, fondée sur une approche pragmatique chère à l’idéologie anglo-saxonne.
Les grandes métropoles régionales sont remises à l’honneur, des traditions imaginaires
et lyriques que des logiques nationales auraient cherché à faire disparaitre sont
ressuscitées pour les besoins de la cause par des tours de passe-passe qui tiennent autant
de la taxidermie, de l’art consommé des ventriloques et du folklore que du surnaturel.

Par Nicolas Stoquer Président du Rassemblement Pour la France – http://www.r-p-f.org


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On flatte le patriotisme régional avec l’improbable terminologie anglaise de « cluster »


fournissant l’illusion aux populations de maîtriser à l’ère de la mondialisation
l’ensemble de la chaîne de production d’une activité donnée. On tente de faciliter les
rapprochements transrégionaux et transfrontaliers qui mettent à mal le découpage
administratif qui fait le socle de base de la nation et brouillent les frontières entre les
Etats.
Les institutions bruxelloises trouvent ensuite dans les pôles métropolitains des
partenaires intéressés tout comme eux à l’abaissement des prérogatives des structures
étatiques. Leurs intérêts croisés poussent à la connivence, engendrant une
reconnaissance et une promotion mutuelle. Les politiques européennes d’harmonisation
territoriale passent maintenant par ses grandes capitales régionales, court-circuitant
l’échelon national. Demain, les grandes mégalopoles seront assurément les premiers
contributeurs financiers de la superstructure européenne. Si un impôt européen voit le
jour dans l’avenir, c’est sur cette base locale qu’il s’établira. Il concernera le futur
citoyen du monde de villes comme Barcelone, métropole qui n'est plus espagnole depuis
longtemps. Elle est internationale, sans identité vraie, entièrement livrée au profit du
tourisme estival et universitaire. Il y a plus de Français, d'Anglais, de Polonais, de
Péruviens que d'Espagnols à Barcelone. Avec tous les inconvénients que cela engendre,
dont la problématique du logement, cher et inconfortable.

Les conséquences de la métropolisation


La logique revendiquée des réseaux et des connexions entre pôles urbains, outre le
phénomène de densification qu’elle engendre, conduit à une forme d’externalisation des
problématiques posées à la structure qui loin de produire de l’altérité, de la différence,
une antithèse susceptible d’être dépassée par une dialectique propre au processus
historique, laisse subsister à côté de la nouvelle réalité triomphante des déchets
inassimilables au système. Bienvenue dans l’ère des surnuméraires et des laissés pour
compte ! Les futures mégalopoles matricielles produiront ainsi toujours plus de friches
industrielles, de déserts urbains ou ruraux, de pollutions atmosphériques et sonores liées
à une densification non maitrisée. Elles verront se multiplier à leur surface des bulles
spéculatives touchant particulièrement l’immobilier rejetant des populations toujours
plus loin des centres, dans des périphéries qui deviendront en fait des confins. Ces
mêmes populations se devront par ailleurs d’être toujours plus mobiles, sans attache
pour satisfaire économiquement au nouveau Moloch urbain. Ce dernier encouragera par
ailleurs, du fait de ses activités, une immigration massive et endémique. Les coûts
exploseront littéralement du fait du dépassement des masses critiques. Les phénomènes
de contagion seront de plus en plus dévastateurs à mesure que ce monde fera tomber les
frontières pour faciliter et accroître les interconnexions. Les crises économiques, loin de
trouver une solution dans une mise en réseau accélérée de notre réalité, naîtront et
puiseront leur force redoublée dans cette marche enthousiaste vers les précipices.
Cette post-histoire européenne rejoindra finalement la préhistoire de l’Occident, avec
la vision des cités concurrentes de la Grèce antique perpétuellement en guerre les unes
contre les autres pour des questions de reconnaissances et d’émancipation politiques et
commerciales. Il manquera à cet univers le récit plein de charme de l’épopée d’Homère
voyant émerger dans la souffrance et la douleur de nouvelles formes de vie et de
sociabilité. L’enfer de Dante pourra néanmoins fournir une vision approchante d’un
spectacle qui emprunte de moins en moins à la science fiction et de plus en plus à notre
quotidien. Le lyrisme en plus !
N.S.

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