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-I-

DES TP : POURQUOI ?

Quel est le rôle des activités expérimentales des élèves dans leurs apprentissages en Sciences
physiques et chimiques ? Cette formulation recouvre en fait deux questions :
Quelle est la place des séances de travaux pratiques dans l'enseignement de ce champ
disciplinaire ? La réponse à cette question est facile car il suffit de regarder la part de l'horaire affecté à ce
type d'enseignement : le temps passé au laboratoire peut aller jusqu’à environ 50% de l’horaire
(notamment dans les filières de lycées encore appelées actuellement technologiques) et de considérer la
place de l'évaluation des savoir-faire expérimentaux dans les examens, qui, de très faible, voire inexistante
il y a quelques années, ne cesse de prendre de l’importance.
Quel est notre perception de la pratique expérimentale ? La réponse à cette question est
autrement plus délicate car elle conduit souvent à remettre en cause les pratiques pédagogiques usuelles.
En particulier, s'il est nécessaire que les élèves manipulent pendant les séances de travaux pratiques de
Sciences physiques et chimiques, cette condition est loin d'être suffisante pour être assuré de l'efficacité
du travail effectué au laboratoire.

Physique et Chimie : deux exemples d'activités intellectuelles.

Physique et Chimie sont des constructions de l'esprit qui aboutissent aux concepts et aux lois que
tout professeur connaît. Si les principes ne sont pas associés aux activités intellectuelles qui les ont
produits ou qui les mettent en oeuvre, ces principes ne sont que des énoncés c'est à dire des traces écrites
sur une page ou des phrases prononcées.
On entend souvent dire que les élèves ont appris mais qu'ils ne savent pas appliquer. Ils ont en
effet entendu ou lu des énoncés, mais n'ayant pas eu l'occasion de les construire par eux-mêmes, ils n'ont
pas su se les approprier et les énoncés généraux restent comme extérieurs à leur pensée. Or, le plus
important est, non pas l'énoncé des contenus, mais la pensée qui les sous-tend.

Si on considère que la Physique et la Chimie sont des activités intellectuelles, alors, la formation à
ces activités intellectuelles doit être au centre de leur enseignement. Il ne faut pas enseigner les résultats
des sciences comme des données à croire mais comme des résultats produits par des méthodes.

"Rien ne va de soi. Rien n'est donné. Tout est construit."


(Gaston Bachelard)
(philosophe français 1884-1962)

Réflexion sur les travaux pratiques en Sciences physiques et chimiques fondamentales et appliquées (octobre 2001)
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Compétences visées par l’enseignement de la Physique et de la Chimie.

Les programmes officiels classent les compétences visées par l'enseignement de la Physique et/ou
de la Chimie en trois catégories : (Cf. B.O.E.N numéro spécial 3 du 09/07/87) ce qui conduit à identifier
trois types d'objectifs :
- des objectifs de connaissance : ils sont fixés par les programmes officiels ; ce sont des
lois et des concepts scientifiques, des définitions, des unités, des modèles, des ordres de grandeur, des
exemples d'application….
- des objectifs de méthodologie théorique (encore appelés savoir-faire théoriques) : ce
sont des compétences concernant l'utilisation raisonnée des lois et formules, des exploitations de courbes,
des méthodes de raisonnement…
- des objectifs de méthodologie expérimentale (encore appelés savoir-faire
expérimentaux ou compétences expériementales) : ils sont liés à l'élaboration d’un protocole expérimental
et à sa mise en oeuvre dans la réalisation du montage ; ils sont liés aux mesures, à leur traduction
graphique et à leur exploitation. Ces compétences doivent être acquises durant les séances de travaux
pratiques.

► Les savoir-faire expérimentaux ne peuvent être acquis par les élèves


que si ceux-ci ont manipulé durant des séances de travaux pratiques.

La Physique et la Chimie mettent en jeu de nombreux savoir-faire généraux liés à l’apprentissage


des divers langages de représentation :
a) la langue française parlée et écrite, dans sa dimension communication :
­ pour savoir formuler une idée : identifier ce que l’on fait varier et ce que l’on 
étudie, identifier le type de relation entre deux grandeurs.
b) l’outil mathématique :
- pour traduire en un langage universel ce qui est dit en français afin de
représenter globalement l’évolution d’un phénomène dans le but de le
modéliser (modes de représentation essentiellement algébriques et
graphiques) : même utilisé avec modération, l’outil mathématique reste
indispensable à toute possibilité de modélisation
c) le langage schématique :
- pour symboliser les grandeurs et les appareils servant à les mesurer en
respectant les règles d’écriture relatives aux divers types de schémas.

► Tous les apprentissages relatifs à ces savoir-faire généraux


sont mis en jeu au cours d'une séance de travaux pratiques.

"Ce sont les mots qui conservent les idées et qui les transmettent."
(Antoine Laurent de Lavoisier )
(chimiste français 1743-1794)

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La démarche scientifique en Physique et en Chimie.

L'analyse de la démarche scientifique montre en réalité une double démarche de la pensée :


- la première consiste à passer d’un système réel à un modèle de représentation : cette
phase permet d’acquérir des savoirs et de les structurer en modèles en partant de situations concrètes.
- la seconde consiste à utiliser le modèle pour prévoir le comportement du système lorsque
celui-ci est soumis à des contraintes connues : cette phase intervient lors de l'utilisation du système et
permet d'en contrôler les performances par comparaison à une norme idéalisée.

Cette analyse permet de définir les lignes de force de la démarche pédagogique préconisée pour
l'enseignement de la Physique et de la Chimie, et cela, quel que soit le niveau envisagé. Même si dans la
plupart des classes, on reste à un niveau modeste, puisque le plus souvent on se borne à étudier le cas
d'une situation voisine d’une situation connue, on peut néanmoins pratiquer une démarche scientifique
chaque fois que l'on donne à l'élève l'occasion de mener les activités suivantes :
- observer et analyser : l’observation permet de dégager des paramètres, l’analyse consiste
à trier ces paramètres
- choisir, en les justifiant, un protocole opératoire, une méthode de mesure
- modéliser un élément ou un système à partir de données théoriques ou expérimentales
- exploiter des renseignements recueillis ou fournis, par exemple, interpréter ou prévoir la
forme des signaux en un point ou à un instant donné dans un montage électrique, interpréter ou prévoir
une réaction chimique.
- porter un jugement critique :
- sur un résultat : l’ordre de grandeur est-il plausible ou aberrant ? le nombre de
chiffres significatifs est-il correct (c’est à dire compatible avec la précision des mesures et des données) ?
- sur une série de mesures : les mesures ont-elles été effectuées avec la meilleure
précision possible ? conduisent-elles à une conclusion satisfaisante ?
- sur un appareil : quelles sont ses qualités ? ses défauts ?
- sur une expérience : est-elle concluante ? pourquoi a-t-elle échoué (ou réussi) ?

Chaque fois que l’élève doit choisir entre différentes lois, différents modèles qui lui sont proposés,
chaque fois qu’il doit élaborer une stratégie, chaque fois qu’il doit maîtriser les étapes d’une activité
expérimentale, chaque fois qu’il doit organiser les étapes d’une résolution, l’élève pratique une démarche
scientifique.

Même si, selon les filières et selon les niveaux, certains items sont plus développés que d’autres,
on trouve toutes les activités décrites ci-dessus dans une séance de travaux pratiques : celle-ci constitue
donc un moment privilégié de l'apprentissage de la démarche scientifique.

► Une séance de travaux pratiques


est l'une des activités pédagogiques les plus riches et les plus fécondes.

"La Science est un mode de connaissance fondé sur le dialogue


entre les théories et les données observées ou issues de l'expérimentation"
( Edgar MORIN)
(sociologue français contemporain né en 1921)

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Conclusion :

Grâce aux travaux pratiques, les sciences expérimentales stimulent des qualités particulières chez
les élèves :
curiosité : observer, se poser des questions
esprit d'initiative et ténacité : concevoir et réaliser des expériences
sens critique : construire sa connaissance
La démarche expérimentale, en effet, aide à :
maîtriser les concepts qui gèrent le fonctionnement d'un dispositif
articuler pratiques expérimentales et appropriation de connaissances plus théoriques
mémoriser (car on retient mieux lorsque l’on fait).

"On se persuade mieux, pour l'ordinaire,


par les raisons qu'on a soi-même trouvées
que par celles qui sont venues dans l'esprit des autres"
(Blaise PASCAL)
(savant et philosophe français 1623-1662)

Dès lors, la réponse à la question "Des TP : Pourquoi ?" devient évidente.

► Les travaux pratiques constituent


un excellent moyen d'acquérir des connaissances et des méthodes.

On pourrait même dire que c'est leur objectif essentiel, d'où le rôle très important joué par
l'activité "exploitation des résultats expérimentaux". Il faut aussi remarquer que les savoir-faire théoriques
et les savoir-faire expérimentaux sont en quelque sorte des pré-requis pour la pratique d'une démarche
scientifique : ce qui distingue fondamentalement la démarche scientifique des savoir-faire de base, c’est le
degré d’autonomie dans la démarche et la décision.

Mais la démarche scientifique va bien au delà du simple moyen d'acquérir des connaissances
limitées uniquement au domaine de la Physique et de la Chimie. Comme "pour connaître, il faut imaginer
en liberté et réfuter avec rigueur, ne rien admettre par argument d'autorité mais par raison et observation,
expérimentation et vérification", la démarche scientifique est donc, en plus, une excellente formation de
l'esprit. Et les travaux pratiques participent à cet acte éducatif.

► La démarche scientifique participe à l'éducation en général.

"En apprenant les Sciences on apprend à raisonner"


(Georges CHARPAK)
(physicien français contemporain, prix Nobel)

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