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HIPPOCRATE

^2

L'ANCIENNE MEDECINE

LES BELLES LETTRES

PARIS
HIPPOCRATE
TOME II

Partie
COLLECTION DES UNIVERSITÉS DE FRANCE
Publiée sous le patronage de l'ASSOCIATION GUILLAUME BUDÉ

HIPPOCRATE TOME II

Partie

DE L'ANCIENNE MEDECINE

TEXTE ÉTABLI ET TRADUIT


PAR

Jacques JOUANNA
Professeur à l'Université de Paris-Sorbonne

Ouvrage publié avec le concours du C.N.B.S.

PARIS
LES BELLES LETTRES
1990
Conformément aux statuts de l'Association Guillaume
Budé, ce volume a été soumis à l'approbation de la
commission technique, qui a chargé MM. Anargyros
Anastassiou et Volker Langholf d'en faire la révision
et d'en surveiller la correction en collaboration avec
M. Jacques Jouanna.

Tous droils de traduction, de reproduction et d'adaptation


réservés pour tous les pays.

© 1990. Société d'édition Les Belles Lettres,


95 bd Raspail 75006 Paris

ISBN : 2-251-00417-3
ISSN : 0184-7155
NOTICE

Le traité de V Ancienne médecine a eu un sort inverse


de celui du traité des Vents. Alors que le traité des
Vents, qui était apprécié dans l'Antiquité, fut parfois
sévèrement jugé par les modernes\ le traité de V Ancien-
ne médecine, qui n'a pas beaucoup retenu l'attention des
anciens, est au contraire fort apprécié de nos jours. Il
est vrai qu'Érotien, glossateur d'Hippocrate au i" siècle
après J.-C, range le traité de ï Ancienne médecine, déjà
ainsi nommé à cette époque, parmi les œuvres authenti-
ques d'Hippocrate^ mais Galien, un siècle plus tard,
;

bien qu'il connaisse le traité comme l'indiquent les


quelques gloses de son Glossaire qui s'y rapportent^, n'a
pas jugé bon d'en faire un commentaire; le médecin de
Pergame néglige ce traité, car il est contraire à l'idée
qu'il se fait de la doctrine d'Hippocrate•*. Sans doute, le

1. Voir J. Jouanna, Hippocrate V, 1, Des Venls, De l'Art,


eu. F., Paris, 1988, p. 9.
2. Voir infra, p. 95.
3. Voir infra, p. 97-99.
4. La critique dans V Ancienne médecine
du rôle des qualités
élémentaires (chaud, froid, sec, humide) est en opposition avec les
théories que Gahen trouvait dans les traités jugés authentiques,
Nature de l'homme, Aphorismes, etc. voir Galien, In Ilippocralis
;

Epidemiarum Wenkebach-Pfaff, CMG V 10, 1,


libres I et II, éd.
Berlin, 1934, p. 220. Elle est en opposition aussi avec ses propres
théories; voir infra, p. 27 et n. 1. Par ailleurs, l'auteur de
VAncienne médecine (c. 20) sépare nettement la médecine de la
philosophie, alors que, pour Galien, «l'excellent médecin est aussi
philosophe».
8 ANCIENNE MÉDECINE
traité avait-il particulièrement apprécié dés la
été
période hellénistique par les tenants de la secte
empirique, aussi bien à cause de ses vues sur l'origine de
la médecine qu'à cause de sa polémique contre les

hypothèses et la philosophie^ Mais comme Galien a


joué un grand rôle dans la diffusion de la Collection
hippocratique, il étonnant de constater que
n'est pas
V Ancienne médecine ne faisait pas partie dans l'Antiqui-
té tardive et au Moyen Âge des grands traités de la
Collection. Ce traité n'a été traduit ni en latin ni en
arabe. En revanche, depuis le xix* siècle, il a acquis une
prééminence jusqu'alors inconnue. Significative est la
place que lui accorde Littré, en tête de la Collection
hippocratique (tome I, p. 570-637), parce qu'il y voyait
l'œuvre d'Hippocrate lui-même, celle à laquelle Platon,
dans le Phèdre, aurait fait référence^. Et comme Littré a
joué un grand rôle dans la diffusion de la Collection
hippocratique à l'époque moderne, ainsi s'explique que
le traité apparaisse également en tête de l'édition
Teubner en 1894 et de l'édition Loeb en 1923^. Même si
la critique moderne a généralement abandonné les vues

de Littré sur l'auteur, elle considère toujours VAncienne


médecine comme un document de première importance
sur l'histoire des idées dans la Grèce classique; l'abon-
dance des études particulières consacrées à ce traité
suffirait à le prouver.

1. Voir W. D. Smith, The Hippocratic Tradition, Cornell


Publications in the History of Science, Ithaca and London, 1979,
p. 209 sq.
2. L'admiration de Littré pour ce traité sera renforcée par son
adhésion au positivisme «Les travaux médicaux d'Hippocrate,
:

déclare-t-il dans ses Remarques rétrospectives du tome IV, p. 670,


ont pour caractère essentiel d'être fondés sur une étude ferme et
bien faite de la réalité. Ils sont plus ou moins avancés, mais ils
sont toujours positifs ils ne s'égarent pas dans les vaines
;

hypothèses». Ce jugement est dicté tout particulièrement par


VAncienne médecine. Il semble donc que les raisons qui expliquent
la haute opinion que Littré a de ce traité rejoignent dans une

certaine mesure celles de la secte empirique.


3. Pour ces éditions, voir infra, p. 108-109.
NOTICE

. L'ANCIENNE MÉDECINE,
DISCOURS ÉPIDICTIQUE

La littérature médicale de l'époque classique se


composait non seulement de traités écrits mais aussi
d'oeuvres destinées à être prononcées devant un public.
L'auteur de ÏAncienne médecine le laisse entendre
clairement dans deux passages où il emploie les verbes
«dire» et «écrire» pour désigner ceux qui ont composé
des œuvres médicales (c. 1, 118, 1 sq.
c. 20, 146,
hippocralique
7 sq. ...
elle-même
).
renferme, à
La
côté d'oeuvres
;

Collection

écrites, des œuvres destinées d'abord à une publication


orale, ces œuvres orales pouvant être soit des cours
soit des discours^ A quelle catégorie appartient le traité

de V Ancienne médecine'!
Bien qu'il ne présente pas toutes les caractéristiques
du discours au même titre que le traité des Vents ou
de VArt^ —
en particulier il ne possède pas comme ces
deux œuvres un épilogue, mais se termine par une
brève phrase de conclusion —
le traité de V Ancienne
,

médecine appartient néanmoins, selon toute vraisem-


blance, à la catégorie des discours épidictiques destinés
primitivement à être prononcés devant un public^.

1. Sur la distinction entre œuvres écrites et œuvres orales dans


la Collection hippocralique, voir J. Jouanna, «Rhétorique et
médecine dans la Collection hippocratique», REG, XCVII, 1984,
p. 26-44.
2. Sur des Venls et de V Art en tant que discours
les traités
épidictiques, voir J. Jouanna, Hippocraie V, 1, Des Venls, De
l'Art..., p. 10-24 (Vents) et p. 167-174 (Art).
3. Sur VAncienne médecine en tant que discours, voir W. Aly,
Formprobleme der friihen griechischen Prosa in Philologus,
Suppl. XXI, 3, Leipzig, 1929, p. 60 sq. (n. 68 de la p. 60);
A.-J. Festugière, Hippocrate. L'Ancienne médecine. Introduction,
traduction et commentaire, in Études et commentaires IV, Paris,
1948, p. viii-xiii, qui emploie l'expression de «discours-program-
10 ANCIENNE MÉDECINE
Pour désigner son propre ou-
Les caractères i> ' i

i
^''^g^' ^^t^"'" " emploie que des

du discours épidictique

) ;
termes signifiant «dire». C'est le

cas lorsqu'il annonce ce qu'il va exposer (c. 2, 120, 1

c. 12, 132, 17 sq.


ou pourrait exposer (c. 16, 140, 16 '
),
exposé (c. 5,

6
124, 2 ;
lorsqu'il rappelle ce qu'il a déjà

; c
c. 5,

11, 132,
124, 10 sq.
8 sq.
... c c
8 sq.
; 15, 138, 16
), ou
;

lorsqu'il insiste sur


24, 153,

.
ce qu'il expose
cil,
146, 13
132, 6
;c
(c. 11, 132, 4 sq.
; C.

22, 149, 3
et 4
12, 132, 18
Sans
; cf. aussi
).
c. 20,
;

doute, le vocabulaire de ambigu, car il peut


l'oral est
très bien être employé dans un ouvrage écrit mais ;

comme l'auteur de YAncienne médecine fait par deux


fois la distinction entre les ouvrages écrits et les
ouvrages oraux quand il parle des autres, et comme il
n'emploie pas le vocabulaire de l'écrit quand il désigne
son propre ouvrage, il est raisonnable d'en déduire que
son ouvrage était primitivement un discours destiné à
être prononcé.
L'œuvre présente d'autres caractères rhétoriques qui
l'apparentent aux discours de .4/ et des Vents :

l'auteur affirme sa présence par l'emploi de la première


personne. Les verbes de déclaration, d'opinion ou même
de volonté à la première personne soulignent, tout au
long de l'œuvre, l'avis de l'auteur c. 1, 119, 4 :

me», voulant indiquer par là que les logoi hippocratiques traitent


de la médecine en général et particulièrement de méthode en fait, ;

il n'y avait pas un lien nécessaire entre la forme du discours et son

contenu, le même sujet pouvant être traité soit dans une œuvre
orale, soit dans une œuvre écrite, comme l'indique clairement
l'auteur de YAncienne médecine lui-même (cf. c. 1, 118, 1 sq.
...
).
and Expérience. Cambridge, 1979.
; cf. c. 20, 146, 7 sq.
Voir aussi G.E.R. Lloyd, Magic, Reason
p. 95.
. . .
NOTICE 11

et c. 3, 121, 6; c. 13, 133, 8 et c. 20, 147, 11 ;

c. 17, 141, 16 et c. 20, 145, 17; c. 5, 124,


2, c. 11, 132, 5 et 9, c. 20, 146, 13, c. 22, 149, 3 et 4 ;

c. 13,

c.

c.
vel
134,
24, 153, 13; ,
c. 5,

11, c. 15,

12, 132, 10 et c. 18, 143, 4;


120, 3 sq., c. 3,
124, 11,
137,
c.
c.

15 et 17,
16, 139, 5;

121, 13 et 15 et 122, 6,
1 1,

...
131, 12,
c.

vel
c. 5,
c. 12,

22, 149,
cil,
133, 3,

132, 6,

124, 2 sq.
14 et

c. 2,

et c. 9, 128, 17 sq.. Le pronom personnel vel


renforce parfois les verbes à la première personne.

128, 15

"
: c. 2,

...
; c
120,
...
16,
1

139, 4 sq.,
c
;

...
c 15,
;
; .138, 1 1

...
c 17,
; c. 9.

141,

;
15 sq. ; 20, 146, 7 sq.
cl, ... c 3, 121, 6

;;
: 119, 4
c 3, c 12, 132, 10

.;
; 121, 13
; c 13, 134, 11 ... c 15, 137, 12
' C. 15, 137, 17 C 18, 143, 4
Le traité de V Ancienne médecine est, du
reste, le traité de la Collection qui emploie le plus
souvent la forme (huit fois alors qu'il n'y a que
neuf autres emplois dans le reste de la CollectionY Bien .

que l'œuvre ne fasse aucune référence directe à l'audi-


toire^, l'auteur attire son attention par divers procédés
qui, sans être l'apanage exclusif de la prose orale, sont
fréquents dans les discours. En employant la pre-

1. Voici le détail des autres emplois dans la Collection 4 fois :

dans Articulations, 2 fois dans Art, 2 fois dans Maladie Sacrée,


1 fois dans Maladies IV.

2. La présence de «les auditeurs», au c. 2, 120,


13 sq., a été utilisée par Festugiére, p. ix, n. 2, pour prouver qu'il
s'agit bien d'un discours; mais ce terme ne se réfère pas au
«public» qui écoute le discours, mais au malade et à l'entou-
rage du malade, lors d'une consultation médicale. De même la

( ),
distinction du c. 1, 119, 8 sq. entre celui qui parle
ceux qui écoutent utilisée par W. Aly, Form-
et

probleme ..., p. 60, n. 68, ne s'applique pas à la situation présente


( )
mais à un discours sur la cosmologie. Il n'y a pas dans V Ancienne
médecine de référence directe au public qui écoute.
12

l'engage
, même
;
ANCIENNE MÉDECINE
mière personne du pluriel, il fait appel à l'expérience
commune de son public (par ex. c. 15, 137, 18 sq.
c. 18, 142, 7 sq.

à participer à la recherche
«examinons»). Il sollicite aussi sa réflexion
,
) (c. 5,
— ou
123, 18

par de nombreuses questions directes c. 3, 123, 4 ... :


;

c. 7, 126, 3 c. 7, 126, 14 c. 13, 133, 19

... .
... ; ... ;

...; c. 13, 134, 9-11 ...;


Pour désarmer
tions fictives qu'il réfute
les
ses adversaires,

met dans l'embarras par


(c. 17,
il

141, 12 '
formule des objec-

ses questions pressantes


),
(c.13, 133, 19 sqq.), ou esquisse une petite scène de
comédie dans laquelle le malade, par sa question de
bon sens, désarçonne le médecin faussement savant
(c. 15, 138, 2-4).
L'auteur veut enfin frapper son auditoire par l'éclat
de la forme.
Les effets de style sont moins voyants que dans les
Vents ou même que dans VArt; néanmoins l'influence de
la prose d'art n'est pas absente^. Ce qui caractérise le

style de l'auteur, c'est la recherche des couples de


termes, synonymes ou complémentaires, qui se ressem-

1. Sur le style du traité, on ne trouve dans la littérature érudite

que quelques remarques éparses J. Ilberg (Sludia pseudippocra-


:

lea, Diss. Lipsiae, 1883, p. 39) oppose le style de VAncienne


médecine à celui de VArt en notant que les effets de style,
antithèses et jeux verbaux, sont beaucoup moins fréquents dans
VAncienne médecine que dans VAri; au contraire, F. Blass, Die
aitische Beredsamkeit I, 2' éd., Leipzig, 1887, p. 89, cite Ari et
Ancienne médecine comme exemples d'une prose ionienne où
l'influence de Gorgias est tempérée, mais il ne donne pas
d'exemples; selon W. Aly, Formprobleme ..., p. 61 (n. 68 de la
p. 60), les phrases bien construites ne donnent pas l'impression de
fleurs de rhétorique mais sont le simple résultat d'une pensée
particulièrement bien disciplinée. W. H. S. Jones (Philosophy and
Medicine ..., p. 92) va dans le même sens: l'auteur, selon lui,
adopte une structure périodique sans les artifices qui sont associés
à la rhétorique sophistique ça et là on rencontre quelques touches
;

qui sont très légèrement rhétoriques, si légèrement qu'elles


peuvent passer inaperçues de quiconque n'est pas à leur recherche.
NOTICE 13

blent par sonorité et longueur (paromoiose et


parisose) et sont reliés
la

quelques exemples parmi bien d'autres


par
la

ou En voici
:
.
C. 3,

;
a) liaison
121, 3
c 3,
: c. 2,

123,
120, 7

1
; C. 3, 122, 5
c.
;

4,

.-
;

123, 14 ; c 10, 131, 8 sq.


; c 13, 134, 3 sq.
; c 22, 151, 9 sq.
c 22, 152, 16

.
;

b) liaison 119, 18 sq.


; c. 3, 123, 3 sq.
: c. 2,

; C.
... 19, 143, 20
; C. 10, 131, 7
;

C. 22, 152, 9 sq.

c. 6,
Parfois ces couples s'opposent dans des antithèses

triades
125, 8-10

qui se répondent et s'opposent


...
. Parfois, ce sont des
,...
: c. 3, 122,
:

16-123,
/3

Enfin de longues séries d'homéotéleutes soulignent


^.
des temps forts du discours ici c'est la variété des :

opérations accomplies par les hommes qui inventèrent


le régime des gens en santé c. 3, 122, 8-13 : ...

,
,, , ,
l'intérieur
...

, , ,.
du corps
;

:

c.
.

c'est
22,

ces énuméra-
. .

la

149, 5-10
variété des formes à

tions liées qui donnent une sorte d'ampleur épique dans

1. Pour l'emploi des couples synonymiques et antithétiques


dans V Ancienne médecine, voir M. Fantuzzi, «Varianza e tenacia
del Polar Thinking nel De prisca medicina pseudoippocratico» in
F. Lasserre et Ph. Mudry, Formes de pensée dans la Collection
hippocralique, Genève, 1983, p. 241 sq.
. .

14 ANCIENNE MÉDECINE
l'évocation soit des exploits des hommes soit de la riche
diversité de la nature, s'opposent les accumulations en
asyndète, plus denses et plus dramatiques, quand

,
les
,
. , ... , ,
l'auteur

, ,
-
hommes
énumère
: c.
"
les différents
10, 130,

Grâce à ces quelques exemples, il est clair que


18-131, 4
troubles qui accablent

développements techniques et effets littéraires ne sont


pas incompatibles.

Est-il possible de préciser d'après


La nature du pubuc , , , , , , ,

le discours la nature du public


visé? L'auteur s'adresse-t-il à des spécialistes? à des
profanes? ou à un public mêlé de spécialistes et de
profanes^?
D'un côté, il est évident qu'il vise un public de
médecins —
ou de savants car la grande place — ,

accordée à la réfutation des thèses de ceux qui veulent


fonder la médecine sur de nouvelles bases n'aurait pas
de sens s'il en était autrement. De plus, lorsqu'il
devance, au début du c. 17, l'objection d'un auditeur
(' ),
il s'agit de l'objection d'un spécialiste qui a

la connaissance de maladies particulières, causus et

péripneumonies (141, 13
Enfin quand il définit positivement ce que doit être
selon lui la médecine, il s'adresse implicitement ou
).
explicitement au médecin dont il définit la tâche. Il
s'adresse implicitement au médecin au c. 2, 120,
3 sqq. «il me semble que l'on doit, lorsqu'on traite de
:

cet art, exposer des choses qui soient concevables par

1. La distinction entre spécialistes et profanes est opérée par


l'auteur lui-même. Pour les spécialistes de l'art, l'auteur emploie
trois termes : (c. 1, 118, 10 et 119, 2), (c. 1,

118, 10 et c. 7, 126, 4) et (c. 7, 126, 4 ; c. 9, 128, 15 et 17,


et 129, 4; c. 20, 145, 18 et 146, 8 et 16; c. 21, 148, 8). Pour les
profanes, il emploie deux termes (c. 2, 120, 5 et 120, 10)
et (c. 2, 120, 13; c. 4, 123, 10; c. 9, 129, 10; c. 21, 148, 8).
NOTICE 15

les profanes. Car l'objet qu'il convient de rechercher et


d'exposer n'est autre que les affections dont ces gens-là
sont eux-mêmes atteints et dont ils souffrent». En
revanche, la référence au médecin est explicite au c. 20,
146, 15 sqq. «Car voici, en tout cas, ce qu'il me paraît
()
:

nécessaire pour un médecin de savoir sur la


nature, et de chercher de toutes ses forces à savoir, s'il a
l'intention de remplir tant soit peu ses devoirs». Mais
d'un autre côté, l'auteur semble viser un public plus
large que les seuls spécialistes. Significatifs à cet égard
sont les passages où l'auteur, employant la première
personne du pluriel, englobe avec lui l'ensemble de son
public. Par exemple, au moment d'examiner une série
de maladies pour justifier sa thèse, il déclare (c. 18, 142,
7 sq.)

).
:

rons de faire l'expérience

()
( ...
«Pour commencer, venons-en aux cas les plus
manifestes, dont nous faisons tous souvent et continue-

Tout d'abord, chez tous ceux d'entre nous


qui ont un coryza, etc.». Dans ce passage,
l'auteur se situe non plus du côté du spécialiste, mais du
côté des malades. Il commence par faire appel aux cas
qui sont connus de la totalité de son public, non
seulement des médecins, mais aussi des profanes, et il
organise son développement surtout en pensant aux
profanes. De même, lorsqu'il parle au c. 15, 137, 18 des

),
aliments et des boissons «dont nous usons tous»
il englobe dans cette totalité médecins
(
et profanes. Dans ces conditions, il n'est pas étonnant
que certaines phrases puissent être adressées plutôt aux
profanes qu'aux médecins. Ainsi à la fin du c. 20 (148,

souffrirait pas» ( :

' ' ,
2 sq.) l'auteur déclare «Qui posséderait ce savoir ne

Puisque l'auteur parle de souffrance et non de traite-


).
ment, il se place surtout dans la perspective du profane.
Connaître les causes des maladies peut éviter au profane
de tomber malade. Bien que dans l'ensemble des
chapitres l'auteur s'adresse avant tout au médecin et
parle de son savoir, il n'y a pas lieu de modifier le texte
16 ANCIENNE MÉDECINE
de ce passage pour que désigne uniquement un
médecin comme on proposée Mieux vaut conserver
l'a

la souplesse, et parfois l'ambiguïté du texte. Ainsi, à la


fin du c. 21 (148, 17-19), quand l'auteur conclut
()
:

«Celui-là donc qui ne saura pas comment chacune


de ces choses se comporte à l'égard de l'homme, ne

()
pourra ni connaître les effets qui en résultent ni en user
correctement», il emploie le verbe
le sens vague d'«user» à la place d'un verbe précis
qui a

signifiant «soigner» tel que (cf. c. 15, 137, 14)

ou (cf. c. 13, 133, 10), si bien que la phrase peut

concerner non seulement le médecin mais aussi le


profane qui, faute de connaissance, ne saura pas user
d'un régime correct. L'ambiguïté paraît voulue par
l'auteur, car, quelques lignes plus haut, il a dénoncé
conjointement l'erreur de la plupart des médecins et des
profanes (148, 7 sq.
)^.
Le public auquel s'adresse l'auteur de VAncienne
,
médecine est donc composite. Il s'adresse d'abord au
médecin mais n'exclut pas les profanes. Cette double
destination du discours ne doit pas surprendre. Elle
trouve sa justification dans la conception même que
l'auteur a de la médecine comme le discours médical
:

Voir commentaire ad loc, p. 148, n. 1.


1.

La même ambiguïté paraît voulue au c. 23, 153, 5


2.
«afin que connaissant les
causes de chacun des maux subis, on puisse correctement s'en pré-
server». Le moyen peut avoir pour sujet aussi bien le
médecin qui évitera au profane les que le profane qui
s'en gardera. De fait, dans la Colleclion hippocratique,

110, 15 sq.
«il
: ,
est employé aussi bien à propos du médecin que du malade. Pour
le médecin, voir par ex. Maladies des femmes II, c. 52, Littré VIII,

faut que (le médecin) refroidisse le ventre (de la malade) tout


en évitant qu'elle ne soit prise de frissons»; pour le malade,
)
voir par ex. Maladies II 2, c 15 (c. 4), Littré VII, 28, 15 sq.
(= Jouanna 149, 19 sq.) : ...

«que (le malade) fasse des promenades en se gardant du vent».


NOTICE 17

porte sur les maux ressentis par le profane, il n'atteint


pas son objet, qui est de les expliquer pour les
combattre, s'il n'est pas compris du profane (cf. c. 2,
120, 12-14).

Contenu Bien que les transitions soient


structure et moins nombreuses et moins ap-
unité du (Sscours
puyées que dans d'autres discours
hippocratiques, la structure du discours, masquée
parfois par la subdivision traditionnelle en chapitres,
est à la fois souple et clairet La souplesse de la
structure, plus grande à la fin du discours qu'au début,
a amené les érudits à s'interroger sur l'unité de l'œuvre.
Le discours débute par un long préambule polémique
(c. 1 et 2) où l'auteur dénonce les erreurs des novateurs

qui partent d'un postulat simplificateur tel que le


chaud, le froid, le sec ou l'humide, pour expliquer la
cause des maladies. Afin de montrer que l'art n'a pas
besoin d'une méthode nouvelle, l'auteur va retracer
dans un long développement, que l'on pourrait appeler
r« archéologie» de la médecine, la naissance de l'art en

dégageant cause qui a provoqué les recherches et la


la

méthode qui a présidé à la découverte (c. 3 à c. 12).


Après une apologie riche et nuancée de l'ancienne
médecine, l'auteur revient à la critique des novateurs
dans une longue partie qui va du c. 13 au c. 19. Dans
les c. 13 à 15, il montre que leur postulat qui consiste à
attribuer la cause des maladies au chaud, au froid, au
sec ou à l'humide, ne correspond pas à la réalité, car ils
ne trouveront pas dans la réalité une thérapeutique en
accord avec ce postulat. Puis, dans les c. 16 à 19,

, 1. Sur la structure de V Ancienne médecine, voir W. Aly,


Formprobleme ..., p. 60, n. 68, H. Wanner, Studien zu
Diss. Zurich, 1939, p. 9-17 («Aufbau der Schrift»);
A.-J. Festugière, Hippocrate, L'Ancienne médecine..., p. xxvni-
xxxi et surtout J.-H. Kuhn, System- und Melhodenprobleme im
;

Corpus Hippocraticum, in Hermès, Einzeischriften XI, Wiesbaden,


1956, p. 3-26 («Aufbau und Tendenz der Schrift»).
18 ANCIENNE MÉDECINE
l'auteur concentre ses critiques sur le chaud et sur le

froid,en montrant que ce sont les qualités qui ont le

moins de pouvoir dans le corps de l'homme.


Avec le c. 20, l'auteur abandonne la polémique
contre les tenants du chaud, du froid, du sec et de
l'humide pour l'élargir aux médecins et aux savants qui
estiment que la médecine suppose une connaissance
préalable de la constitution originelle de l'homme. Loin
d'être préalable à la médecine, la connaissance de la

nature de l'homme n'est possible que par la médecine


bien comprise, c'est-à-dire par l'étude des relations
causales entre le régime (aliments, bains, exercices) et
l'homme. Une telle étude relationnelle du régime et des
constitutions est du reste nécessaire pour connaître les
causes des maladies et pour les soigner; bien des
médecins commettent des erreurs parce qu'ils l'ignorent
(c. 21).
Les trois derniers chapitres (c. 22 à 24) ajoutent des

() ()
précisions sur les causes des maladies. Elles sont dues
non seulement aux qualités mais aussi aux

) )
configurations des parties du corps. Cette fin a

été jugée inauthentique par G. Plambôck^ Il voit en

() (
particulier
les affections
soit
une contradiction entre le c. 22 qui attribue

aux configurations
soit aux qualités (
et le reste de

()
l'œuvre où,
affections
().
notamment au

Par
c. 19, 144, 10 sq., toutes les
ont été attribuées aux qualités
lui paraît singulier qu'un
ailleurs,
il

auteur qui n'a cessé de parler des éprouve le


besoin de les définir seulement au début du c. 22. Du
reste, cette définition ne lui paraît pas coïncider
exactement avec les emplois précédents, car les
sont définies au c. 22 comme les propriétés extrêmes des

1. G. Plambôck, «Dynamis im Corpus Hippocraticum », Akade-

mie der Wissenschafien und der LUeraiur, Abhandlungen der


Geistes- und Sozialwissenschaftlichen Klasse, Mainz, 1964, 2,
p. 89, n. 3.
NOTICE ly

humeurs (), alors que humeurs jouent un rôle


les

peu important dans les vingt et un premiers chapitres.


Enfin, il paraît singulier qu'un auteur qui a accordé
lui

une si grande importance à la notion de cause puisse


envisager au c. 24 qu'une humeur se change d'elle-
même en une autre.
Si l'on examine les choses de plus près, les prétendues
contradictions s'estompent et les ressemblances appa-
raissent. Quand l'auteur au c. 19, 144, 10 sq. affirmait
que les affections sont dues aux qualités, c'était dans un
développement où il voulait montrer qu'elles ne sont
pas dues au chaud et au froid, comme l'affirment ses
adversaires. Il n'y a pas contradiction à compléter la
catégorie des affections causées par les par une
autre catégorie d'affections qui n'entraient pas en ligne

,
de compte dans

au contenu de
la discussion sur le chaud et le froid. De

plus, si l'auteur donne au chapitre 22 une définition des


c'est en fait pour l'opposer à la définition des
qu'il introduit ici
la définition des
pour
,
la première
il
fois. Quant
n'est pas en
contradiction avec ce qui précède dans la mesure où il

s'agit bien ici, comme dans d'une


le reste du traité,
force qui agit sur l'homme. Il ne faudrait pas accentuer
l'opposition entre l'importance des humeurs dans ()
ces chapitres 22-24 et leur rôle plus effacé dans le début
du traité. Le terme est attesté quatre fois dans la
première partie (c. 14, 137, 2; c. 18, 143, 4; c. 19, 145,
5; c. 20, 147, 19); et la première fois qu'il apparaît,

()
c'est dans un sens tout à fait analogue à celui des
chapitres 22 et 24 : <( humeur intempérée» dont il est
question au c. 14, 137, 2 désigne «l'amer,
exactement comme au c. 24, 153,
le salé, l'acide», etc.,

13, l'humeur est amère, salée, acide, etc. Lorsqu'il est


dit au c. 22, 149, 3 sq. que «la est des
humeurs», cela n'est pas en contradiction avec le
passage du c. 14, 136, 5-8 où l'auteur dit que «ce qu'il y
a de plus fort dans le doux c'est le plus doux, dans
l'amer le plus amer, dans l'acide le plus acide et dans
20 ANCIENNE MÉDECINE
chacune des qualités présentes c'est son À ».
vouloir serrer la formulation du texte de trop près pour
faire ressortir des contradictions, on court le risque de
perdre de vue la souplesse d'emploi des termes dans le

rester au terme

tantôt les excluent


,
traité, souplesse qui est évidente même dans la partie
jugée authentique par Plambôck. En effet, pour en
les dans le corps tantôt
comprennent le chaud et le froid (c. 16, 139, 4 sq.)
(c. 19, 144, 10). Enfin la notion de
causalité, loin d'être oubliée dans les trois derniers
chapitres, est réaffirmée à

,
que
la

que
le lien

thérapeutique

l'on
nécessaire entre
(c.

''
peut comparer par exemple à
la

la

23, 153, 5 sq. â


fin

,,
du chapitre
connaissance des causes et

c.
23, ainsi

21, 148, 17-19

). Du point de vue de causalité, l'idée qu'une

)
la

humeur puisse se changer d'elle-même () en une


autre humeur, énoncée dans dernier chapitre, n'est
le

pas plus étonnante que


succéder de lui-même au froid
au c. 16, 141, 9^.
(
l'idée que le chaud puisse
énoncée

Ainsi, les arguments avancés par Plambôck pour


démontrer l'inauthenticité des trois derniers chapitres
ne sont pas convaincants. Bien au contraire, l'auteur
rattache le chapitre 24 sur les à ce qui précède
par une référence interne (153, 8 sq.
). L'unité de l'œuvre est confirmée enfin par le
vocabulaire et par le style. En ce qui concerne le
vocabulaire, on notera la même prédilection pour
l'emploi de

142, 8 sq.,
...
part... d'autre part»
c. 19, 144, 11 et
(
... au sens de «d'une

en
en
c.
c. 16, 139, 16,
22, 149, 10 et 16 sq.
c. 18,

en c. 14, 136, 16, c. 16, 139, 20 sq., c. 19, 143,

1. Voir aussi
spontanément ( ).
c. 21, 148, 6 où des troubles se produisent
.

15 et c. 22, 150, 2), de l'adjectif


NOTICE
, rare dans
21

le

,
reste de la Collection hippocratique

, C. 14,

c. 17,
136, 11
142, 1
, (c.

C. 16, 140, 16

et C. 23, 153, 4
5
14, 135,
...
...
)
et de l'adjectif (c. 1, 118, 7, c. 2, 120, 2, c. 9,
12)i. Pour
129, 1, c. 9, 129, 1, c. 9, 129, 9 et c. 22, 151,
on constate dans ces derniers chapitres la même
le style,

fréquence de
149, 1 ;
la première personne en c. 22,
en c. 22, 149, 3 et 4, c. 24, 153, 10;
(
en c. 22, 149, 14 et c. 24, 153, 13), le même emploi des
interrogations directes
153, 12
analogues par
ou
152, 6 sq.

).
),
(c.
la

la
même

22, 152, 16
(c. 22, 149, 11
recherche des couples de termes
longueur et les sonorités reliés par

; 152, 11 sq.
;
; ;

152, 9 sq.
c. 24,

Les trois derniers chapitres sont donc du même

,
auteur que les chapitres précédents. Mais comme ils
abordent deux points nouveaux (maladies dues aux
transformation spontanée des
pu se demander s'il ne s'agissait pas d'un excursus
on a

ajouté en fin du discours^, ou émettre l'hypothèse que


),
ces chapitres n'appartiennent peut-être pas au projet
primitif de l'œuvre^. Toutefois, la fin du chapitre 24 se

1 L'adjectif est employé vingt fois dans la Collection


tiippocratique ; le traité de VAncienne médecine, avec ses six
emplois, arrive en deuxième position après Blessures de lête (8 fois),
nettement avant le traité qui est en troisième position, Plaies
(2 fois seulement).
2. W.
H. S. Jones, Philosopfiy and Medicine ..., p. 92.
3. H. Diller, ^(Das Selbstverstàndnis der griechischen Medizin
in der Zeit des Hippokrates», in L. Bourgey et J. Jouanna, La
Collection hippocratique et son rôle dans t'tiistoire de ta médecine
(Colloque de Strasbourg de 1972), Leiden, 1975, p. 92, n. 1 « Ich :

meine, dass auch dieser Abschnitt sich in die geistige Gesamt-


haltung der Schrift so weit einfugt, dass er jedenfalls dem gleichen
Verfasser, wenn auch vielleicht nicht dem ursprunglichen Darstel-
lungskonzept seiner Schrift, zugeschrieben werden kann».
22 ANCIENNE MÉDECINE
termine par une maxime («le meilleur est toujours ce
qui est le plus éloigné de l'inapproprié») qui clôt
l'ouvrage d'une manière satisfaisante. La technique de
conclusion est certes beaucoup moins élaborée que dans
les discours des Vents ou de VArt qui se terminent tous
deux par un épilogue, mais cette fin n'est pas plus
abrupte que celle du traité des Airs, eaux et lieux, qui
est pourtant soigneusement rédigée^.

II. LA CRITIQUE

D'UNE MÉDECINE PHILOSOPHIQUE

UAncienne médecine appartient à la catégorie des


œuvres polémiques de la Collection hippocratique^. La
polémique dans le traité comprend deux moments, l'un
où l'auteur s'en prend à une catégorie bien précise de
novateurs et c. 13 à 19); l'autre où il élargit sa
(c. 1

critique tous ceux qui adoptent une méthode


à
philosophique en médecine (c. 20). La distinction entre
ces deux moments est faite clairement par l'auteur
lui-même, puisqu'au début du c. 20 il conclut la
première partie de la polémique par ces termes «Sur :

ce sujet donc, je pense m'être suffisamment expliqué.»


Dés la première phrase de son préambule, l'auteur
présente ses adversaires, suivant une technique analo-
gue à celle que l'on trouve dans le traité de VArt ou
celui de la Nature de l'homme. Ce sont les médecins qui,

1. Airs, eaux, lieux se termine également par une phrase


courte «En partant de ces observations, on pourra juger du reste,
:

sans crainte de se tromper» (trad. Littré, t. II, p. 93).


2. J.-H. Kûhn, System- und Melhodenprobleme im Corpus
Hippocraticum .... p. 1-56 (« Der Methodenstreit in der hippokratis-
chen Schrift De prisca medicina»); G. E. R. Lloyd, «Who is
attacked in On Ancient Medicine?», Phronesis, VIII, 1963,
p. 108-126; Id., «.\spects of the Interrelations of Medicine, Magic
and Philosophy in Ancient Greece», .Apeiron, IX. 1975, p. 1-16;
J. Ducatillon, Polémiques dans la Collection hippocratique, Lille/
Paris, 1977, p. 91 sqq.
NOTICE 23

partant d'un postulat (c. 1, 118, 2 réduisent


la cause des maladies à un ou deux principes (c. 1) et
)\
veulent prescrire une thérapeutique en conformité avec
ces principes (c. 15). Comme principes, l'auteur énumère
les quatre qualités élémentaires, chaud, froid, sec,
humide (c. 1 sans que cette liste soit limitati-
et c. 15),
ve. L'ordre dans l'énumération n'est pas indifférent, car
les attaques se concentreront surtout sur les principes
du chaud et du froid (c. 16 début «J'estime pour ma :

part que le froid et la chaleur sont, de toutes les

propriétés, celles qui ont le moins de pouvoir dans le


corps»).
La critique contre ces premiers adversaires s'opère en
deux temps. L'auteur commence par dénoncer leur
erreur principale dans le préambule (c. 1); puis, il
reviendra sur certaines de leurs erreurs au c. 13 (cf. au
début «Je veux revenir à la théorie de ceux qui
:

adoptent une nouvelle méthode dans leurs recherches


sur l'art en partant d'un postulat»). La principale erreur
porte sur leur méthode et sur les conséquences qu'elle
implique. En introduisant une nouvelle méthode en

),
médecine, celle du postulat (c. 1, 119, 4 sq.

),
les novateurs sont en fait des négateurs de la
médecine, car ils rejettent (cf. c. 2, 119, 16 et

-
c. 12, 133, 1 sq. soit explicitement, soit

;
;
implicitement, un art qui existe réellement (c. 1, 118, 8
c. 2, 120, 2 c. 12, 132,
...
;

18 sqq. où... ...


), qui possède un nom (cf. c. 5, 123, 19 ), des

;), ,
spécialistes (c. 1, 118, 10
c. 5, 124, 1 et une méthode de recherche (c. 2,

119, 13 c. 8, 127, 14 c. 15, 137, 13 ). En


présentant ces novateurs, comme des négateurs de l'art,
l'auteur de V Ancienne médecine se trouve dans une
position analogue à celle de l'auteur de VArt qui

1. Sur le sens de dans V Ancienne médecine et sur les


travaux qui en traitent, voir comm. ad loc.
24 ANCIENNE MÉDECINE
dénonce, dès son préambule, ceux qui nient expressé-
ment l'existence de l'art de la médecine^
Cette application de la méthode du postulat à la
médecine est condamnable, non seulement parce que
l'art de la médecine possède depuis longtemps déjà une
méthode, mais aussi parce que cette nouvelle méthode
que l'on veut introduire n'est pas adaptée à l'objet
même de la médecine. L'auteur établit, à cet égard, une
opposition entre cosmologie et médecine. Dans l'étude
des phénomènes célestes ou souterrains, comme l'objet
de l'étude est hors de portée de l'homme, il n'y a pas de
critère du savoir ; aussi le recours à la méthode du
postulat est compréhensible (c. 1). Au contraire, l'objet
de la médecine est à la portée de l'homme puisque le
savoir est relatif à la souffrance du malade (c. 2). Aussi
existe-t-il un du savoir médical, dont l'auteur
critère
dira plus loin au
(128, 13
c.

).
9 qu'il est ce que ressent le malade
Il n'y a donc pas lieu

de recourir à un postulat en médecine.


Quand l'auteur revient, à partir du c. 13, sur la

critique de ceux qui veulent introduire en médecine la

méthode du va souligner l'écart qui sépare


postulat, il

leur postulat de la réalité. Déjà dans les deux premiers


chapitres, il avait implicitement noté cet écart, en
reprochant à ses adversaires de procéder à une réduc-

le
)
tion simplificatrice des causes des maladies (c. 1, 118, 4
et en rappelant que
discours explicatif du médecin, qui porte sur
l'affection ressentie par le malade, doit être compréhen-
sible par le malade lui-même (c. 2). C'est justement
cette impossibilitédu dialogue entre médecin et malade
qui révèle, aux yeux de tous, l'écart entre le postulat et
la réalité. En effet quand le partisan de la nouvelle

méthode proposera au malade un traitement conforme


à son postulat, par exemple le chaud en soi si la maladie

1. Comp. Art, c. 1, Littré VI, 3, 1 sqq. (= Jouanna 224,


1 sqq.).
NOTICE 25

est censée être causée par ne pourra se faire


le froid, il

comprendre du malade, car ce médicament n'existe pas


dans la réalité (c. 15, 137, 15 sqq.). Ainsi le postulat sur
la cause des maladies est inacceptable, puisque les

conséquences qui en découlent logiquement, par la


thérapeutique des contraires, sont contraires à la

réalité.
de trouver dans la Colleciion hippocra-
Est-il possible
tique, ou exemples de ces théories visées par
ailleurs, des
l'auteur? Il faut surtout chercher du côté des partisans
du chaud et du froid, puisque l'auteur concentre, à
partir du c. 16, sa réfutation sur ces deux qualités, en
passant désormais sous silence le sec et l'humide. En
fait, dans la Collection hippocratique, aucune théorie sur
la cause des maladies ne correspond exactement aux
attaques de l'auteur de V Ancienne médecine^. Certes, il
n'est pas exceptionnel que les maladies soient attribuées
à l'excès de chaud, de froid, de sec ou d'humide. Par
exemple, l'auteur de la Maladie sacrée, c. 14 (Littré VI,
388, 3-6 =
Grensemann 82, 21-24) attribue les grandes
maladies au cerveau quand il est anormalement chaud,

composés en -
froid, sec ou humide. Significatif aussi est l'emploi des
désignant l'excès de ces qualités
élémentaires dans Affections, Maladies I et Maladies II,
V. Mais aucun de ces traités ne part de l'un ou l'autre

1. Voir G. E. R. Lloyd, «Who is attacked in On Ancient


Medicine ?...•>, p. 118.
2. Voir, par exemple, Affections, c. 1, Littré VI, 208, 7 sqq.

()
:

«La bile et la phlegme produisent les maladies quand, dans le

(), (),
humide
ou froide
à l'excès
à l'excès ()
corps, l'une de ces humeurs devient sèche à l'excès
chaude à l'excès
comp. Mal. /, c. 2, Littré VI,
;

142, 15-17 (=Wittern6, 7sq.); voir aussi Mal. II, 1, c. 5,

-
,
Littré VII, 12, 20 (= Jouanna 136, 1). La plupart des emplois de
1

ces composés en dans la Colleciion hippocraiique se trouvent


groupés de façon significative dans ces trois traités. Les treize
emplois de et les six exemples de sont dans
ces trois traités sur neuf emplois de
;
sept sont dans
26 ANCIENNE MÉDECINE
de ces principes à l'exclusion d'autres pour expliquer la
totalité des maladies^. En dehors de la Collection
hippocratique, certaines théories médicales connues
indirectement par un écrit doxographique, dit Anonyme
de Londres, qui utilise un matériel remontant à Aristote
ou à son école^, semblent mieux convenir. Concernant
l'humide et le sec, la théorie qui correspond le mieux est
celle d'Hippon de Crotone (XI, 22-42) qui pense que
l'être vivant est constitué d'une humidité naturelle
dont le dessèchement entraîne l'insensibilité et la mort,
et qui attribue les maladies à la modification de ce
principe humide par un excès de chaud ou de froid.
Concernant le chaud et le froid, les deux théories qui se
rapprochent le plus sont celles de Philolaos de Crotone
(XVIII, 8 sqq.) et de Pétron d'Égine (XX, 1 sqq.).
D'après le compte rendu de V Anonyme de Londres,
Philolaos dit que le corps de l'homme est constitué d'un
principe, le chaud, et Pétron d'Égine de deux, le froid et

le chaud. Selon Philolaos, les maladies peuvent être


favorisées par l'excès ou le manque de chaud ou de froid
... ...
,
XVIII, 48-50
(cf.

). De même, selon Pétron d'Égine,


les maladies sont causées, en partie, par ces deux
principes quand ils sont en déséquilibre (cf. XX, 12-14

).
:

,
Mais les théories de Philolaos et de
Pétron sont plus complexes que les théories visées par
V Ancienne médecine. Car Philolaos, tout en disant que la
nature humaine est constituée de chaud refroidi par
l'air de la respiration, attribue la cause principale des

Maladies I et Affections enfin les trois emplois de


;
sont
aussi dans ces deux traités. Sur la parenté de l'étiologie dans ces
trois traités, voir J. Jouanna, Hippocrate. Pour une archéologie de
l'école de Cnide, Paris, 1974, p. 262-360.
Dans tous ces traités, une explication par les humeurs est
1.

combinée avec l'explication par les qualités élémentaires.


2. La meilleure édition est celle de H. Diels, Anonymi
Londinensis ex Arislolelis lalricis Menoniis, Berlin, 1893 (= Sup-
plementum Aristotelicum III, 1).
NOTICE 27

maladies aux humeurs bile, sang et phlegme (XVIII,


30 sqq.)• Et Pétron d'Égine explique les maladies non
seulement par les deux qualités élémentaires (froid et
chaud), mais aussi par les résidus de la nourriture (XX,
8-12). En bref, certaines théories médicales soutenues
soit par des médecins influencés par le pythagorisme
(Philolaos de Crotone), soit par des médecins qui
remettent au goût du jour les anciennes théories
ioniennes en les appliquant à la biologie (Hippon
reprenant l'ancienne théorie de Thaïes), semblent cor-
respondre mieux que celles des traités de la Collection
hippocratique aux attaques de l'auteur de ï Ancienne
médecine, mais il n'y a aucun exemple qui illustre
exactement ses dires sauf Hippon. Cela s'explique à la
fois par les nécessités simplificatrices de la polémique et
par la perte d'une grande partie de la littérature
médicale de l'époque classique. De telles théories sont,
en tout cas, attestées aussi par le Sophiste de Platon
(242 d) qui fait allusion à des théories expliquant
l'Univers «par deux principes, humide et sec ou chaud
et froid». Il reste toutefois assez étrange que l'auteur de
l'Ancienne médecine ait mis tant de zèle à dénoncer le
rôle du chaud et du froid dans la pathologie on ne ;

saisit pas en quoi les théories visées par l'auteur


pouvaient menacer à ce point la médecine traditionnel-
le. Du reste, la position de l'auteur restera isolée; les

qualités élémentaires chaud, froid, sec, humide conti-


nueront à jouer un rôle important, soit directement soit
indirectement dans la pathologie. Le silence de Galien
sur Y Ancienne médecine vient probablement de cette
attaque contre le rôle du chaud et du froid en
pathologie, car lui-même explique les maladies par un
excès de chaud, de froid, de sec et d'humide^

1. Voir, par exemple, son traité sur les Causes des maladies (éd.
Kuhn VII, 2) «A mon avis, il y
: a quatre maladies simples et
quatre composées, les premières venant d'un accroissement
excessif du chaud ou du froid tout seul, ou de l'un des termes de
l'autre opposition, celle du sec et de l'humide, et les secondes
28 ANCIENNE MÉDECINE
En revanche, quand l'auteur de VAncienne médecine
élargit sa polémique au c. 20 à tous les savants ou
médecins qui adoptent une méthode philosophique en
médecine, il aborde une question plus fondamentale et
les exemples précis susceptibles d'illustrer la méthode
qu'il condamne ne font pas défaut. Ce qu'il condamne,
c'est la nécessité affirmée par certains savants ou
médecins d'une connaissance de l'homme préalable à la
médecine. Selon ces penseurs, la connaissance de la
constitution originelle de l'homme est nécessaire pour
en déduire la thérapeutique. Ainsi la médecine devrait
prendre son point de départ dans un savoir qui lui est
extérieur. Bien que l'auteur de VAncienne médecine ne
parle plus ici d', il est clair que les critiques
faites à propos de la méthode des premiers adversaires
restent valables. Mais pour montrer l'écart entre la
théorie et la réalité, l'auteur choisit ici une autre voie,
celle de l'assimilation de leur exposé sur la nature
originelle de l'homme à l'œuvre d'un peintre^ De même
que le peintre recrée l'homme à partir d'un nombre fini
de couleurs, ces médecins ou savants reconstituent la
nature de l'homme à partir d'un nombre fini d'éléments
premiers. Mais, de même que les peintres, ils aboutis-
sent à une image de l'homme et non à sa réalité. Selon
l'auteur, pour atteindre à une connaissance réelle de la
nature de l'homme, il faut procéder à l'inverse. C'est
l'exercice de la médecine bien comprise qui permettra
d'aboutir à une connaissance de l'homme par l'étude
des relations causales entre le régime et ses effets sur les
différentes catégories de natures humaines. Ce n'est pas
l'une des moindres audaces de l'auteur que d'aller à
rencontre de toute cette recherche qui était
en vogue dans la deuxième moitié du siècle et qui.

venant de ce que ces éléments s'accroissent par couple, ce qui


donne la maladie chaude et sèche, ou froide et sèche, ou chaude et

1. Voir c. 20, 146, 9( ),


humide, ou froide et humide».
avec la note ad loc.
NOTICE 29

selon Platon, dansPhédon 96 a, avait passionné


le

Socrate dans sa jeunesse. Ce n'est pas non plus la


moindre audace que de citer nommément pour le
critiquer un savant célèbre, en l'occurrence Empédocle,
ce qui est un procédé exceptionnel dans la Collection
hippocratique^.
Parmi les traités de la Collection hippocratique,
plusieurs correspondent aux critiques de l'auteur de
V Ancienne médecine ; c'est le cas des Vents, des Chairs et
du Régime^. Surtout dans ces deux derniers traités, des
termes établissent un lien particulier avec la polémique
de VAncienne médecine. L'auteur des Chairs affirme
dans son préambule (cl, Littré VIII, 584, 4-8 =
Joly 188, 6-10) la nécessité de fonder sa connaissance de
la nature de l'homme sur la cosmologie si bien que, pour

cet auteur, comme pour les adversaires de VAncienne


médecine au c. 20, la connaissance de la nature humaine
nécessaire au médecin puise ses sources dans un savoir
extérieur à l'art; et dans les deux cas il s'agit de
déterminer comment l'homme s'est formé (comp. Ane.

).
méd. c. 20, 146, 6 et Chairs c. 1
L'auteur des Chairs peut donc faire partie des
adversaires visés au c. 20, si l'on admet sa date
traditionnelle vers la findu siècle^.
Mais c'est dans le traité du Régime (c. 2) que l'on
trouve exactement les déclarations que VAncienne
médecine attribue à ses adversaires du c. 20*. Le
parallélisme entre les deux passages est frappant :

1. Pour les autres passages de la Collection hippocratique où un

adversaire est nommément cité, voir p. 146, n. 4 p. 207. =


2. Voir J.-H. Kuhn, System- und Methodenprobleme im Corpus
hippocraticum ..., p. 57 sqq. (Vents-Chairs-Régime). Il faudrait
ajouter le traité des Semaines.
3. Sur la date du traité, voir R. Joly, Hippocrate, t. XIII,
eu. F., Paris, 1978, p. 182 sq.
4. Sur la comparaison de ces deux passages, la mise au point la

plus récente est celle de R. Joly, Hippocrate. Du régime, CM. G., 1,

2, 4, Berlin, 1984, p. 36 sq.


30 ANCIENNE MÉDECINE
Régime , c 2, Littré VI, Ancienne médecine, c. 20,
468, 6-12(=Joly, CUF 145, 18-146, 7.
2, 8-15 et CMG 122,
22-27).

- -
- ,
-
,
, --


.--
'
.
6
<>-
,
.
L'argumentation de l'auteur du Régime coïncide
point par point avec celle des adversaires présentés par

quer

méd.
correctement

(comp. Régime
la

et Ane. méd.
médecine (comp.

)
)
l'auteur de VAncienne médecine. Celui qui veut prati-
Régime

avoir une connais-


sance préalable de la nature de l'homme (comp. Régime
et Ane.
doit

'
constitution originelle (comp. Régime
), et Ane. méd.
c'est-à-dire de sa
et Ane.
méd.
méd. ).
comp. Régime

'
; et Ane.
Sans cette connaissance préalable
(comp. Régime
et Ane. méd. ), il est

Ane. méd. ' ).


impossible d'y parvenir (cf. Régime
De cette coïncidence parfaite
et
NOTICE 31

dans l'argumentation, il résulte que l'auteur du Régime


est l'exemple conservé qui illustre le mieux la catégorie
des adversaires visés par V Ancienne médecine au c. 20.
Est-ce à que l'auteur de VAncienne médecine
dire
connaissait passage du Régime et y fait allusion? Les
le

avis sont divergents. Selon les uns, l'auteur du Régime


fait effectivement partie des adversaires visés par la
critique de VAncienne médecine, ou bien est même
l'adversaire particulièrement visé^. Selon les autres,
c'est la relation inverse qu'il faut envisager, l'auteur du
Régime réagissant contre la position VAncienne
de
médecine'^. A s'en tenir à la seule comparaison des
passages, c'est la première solution qui paraît la plus
naturelle. Mais la réponse dépend en fait de la date que
l'on attribue aux traités. Si l'on pense, comme il est
admis généralement, que le traité du Régime est
postérieur à celui de VAncienne médecine, on pourra
expliquer la rencontre entre VAncienne médecine et le
Régime par la reprise d'un lopos traditionnel que
l'auteur de VAncienne médecine connaissait par des
ouvrages plus anciens, plutôt que par une réponse
directe de l'auteur du Régime à celui de VAncienne
médecine. Il faut compter avec la perte d'une grande
partie de la littérature médicale écrite de l'époque

1. Voir, par exemple, C. Fredrich, Hippokraiische Unlersuchun-


gen, 1899, p. 169-171
Berlin, Th. Gomperz, Die Apologie der
;

Heilkunsl, 1' éd., Leipzig, 1910, p. 171 approuvé par W. Capelle,


«Zur hippokratischen Frage», Hermès, LVII, 1922, p. 259;

»,
M. Wellmann, «Die pseudohippokratische Schrift
Sudhoffs Archiv, XXIII, 1930, p. 300; A.-J. Festugière,
Hippocraie. L'Ancienne médecine ..., p. 56 (n. 67) et J. Ducatillon,
Polémiques ..., p. 115-118; voir aussi A. Cosattini, «Nota ad
Ippocrate c. XX», Hiv. di Filologia,
XXXVII, 1909, p. 161 sq.
par exemple, W. Jaeger, Paideia. 3'" éd., Berlin, 1959,
2. Voir,
t. 33 sq. R. Joly, Recherches sur le traité pseudo-hippocraii-
III, p. ;

que Du
régime, Paris 1960, p. 184-187, qui a nuancé sa position
dans Hippocrate. Du régime, CMG
I 2, 4, Berlin 1984, p. 36 sq. cf. ;

G. Plambôck, Dynamis im Corpus Hippocraticum ..., p. 94, n. 2.


32 ANCIENNE MÉDECINE
classique et a fortiori avec la perte de la production
orale que l'écrit n'a pas sauvée, et éviter de transformer
en relations personnelles ce qui peut s'expliquer par
l'existence d'un lieu commun dont la plupart des
versions ont disparu.
L'auteur de V Ancienne médecine ne fut certes pas le
seul médecin à contester la validité d'une connaissance
de la nature de l'homme extérieure à la médecine.
L'auteur de la Nature de l'homme va dans le même sens
quand il rejette dans son préambule polémique, au c. 1,
toute connaissance de la nature humaine qui dépasse les
strictes limites de la médecine «Quiconque, déclare-t-:

il, a l'habitude d'écouter des exposés sur la nature


humaine qui sortent du strict domaine de la médecine
n'a aucun intérêt à écouter le présent exposé». Sa
polémique contre les philosophes et les médecins
partisans d'un principe unique (c. 1 et c. 2) est compa-
rable à l'attaque de V Ancienne médecine contre ceux qui
réduisent la cause des maladies à un seul ou deux
principes (comp. Ane. méd. c. 1, 118, 6 et Nature de
l'homme c. 1, Jouanna 164, 1 1 et c. 3, Jouanna 170, 9
).
tout n'est pas comparable dans ces deux
Certes,
traités adversaires visés ne sont pas exactement les
: les
mêmes et l'auteur de la Nature de l'homme fait
intervenir les qualités élémentaires, chaud, froid, sec,
humide dans l'étiologie des maladies, alors que l'An-
cienne médecine veut réduire considérablement leur rôle.
Mais la réaction contre une médecine philosophique
rapproche ces deux traités ils affirment pour la :

première fois dans l'histoire des sciences, l'auto-


nomie de la médecine par rapport à une anthropologie
philosophique^.

1. Dans la réfutation des adversaires un argument est analo-


gue : la thérapeutique qui découle de
réalité est contraire à la
leur théorie sur les causes des maladies; comp. Ane. méd. c. 15,
137, 15 sqq. et Nat. hom. c. 2, Jouanna 168,4 sqq.
2. Pour d'autres ressemblances entre Ancienne médecine et
NOTICE 33

Dans cette «première querelle des anciens et des


modernes» qu'a connue le

133, 7
traditionnelle (c.
)
de ces théories nouvelles
siècle^ la condamnation

et
(cf. c.

la

12, 132, 18 sq.


place l'auteur du côté des anciens,
1, 119, 4,
défense
...
comme
de la

)
et

Aristophane
c. 13,

médecine

qui critique la nouveauté et fait l'éloge de l'ancien. Et


l'on pourrait trouver une certaine analogie dans le

contenu de la critique des novateurs chez l'homme de


théâtre et chez le médecin recherche vaine d'un savoir
:

cosmologique^ ou d'une trop grande précision dans le


domaine des arts*. Toutefois dans son «archéologie» de
la médecine véritable, qui est l'ancienne, l'auteur de
VAncienne médecine rejoint la vision des modernes en
faisant l'éloge des découvertes qui ont arraché l'homme
à un passé de sauvagerie et d'ignorance.

Nature de l'homme, voir infra, p. 55 sq. On trouvera une comparai-


son suggestive entre ces deux traités dans J. Ducatillon, Polé-
miques..., p. 134-142; voir aussi J.-H. Kiihn, System- und
Methodenprobleme im Corpus hippocraticum ..., p. 70-74.
1. L'expression est de L. Edelstein, The Idea of Progress
in Classical Antiquity. Baltimore, 1967, p. 35, qui étudie cette
querelle des anciens et des modernes à l'intérieur du Corpus hippo-
cratique, p. 37-40. Parmi les anciens, il range également l'auteur
des Semaines cf. c. 53 (Littré IX, 466, 9 sq.
;
=
Roscher 80, 7 sqq.) :

«credens melius esse recte intelligere anteriora quam nova et falsa


dicere ».

2. Comparer la critique des recherches cosmologiques dans


Ane. méd. c. 1, 119, 5 sqq., et chez Aristophane, Nuées, v. 225 sqq.
(critique de la passion de Socrate pour la cosmologie). Xénophon,
dans les Mémorables IV, 7, 6, s'efforcera de réhabiliter Socrate en
lui faisant
(
condamner les spéculations sur les phénomènes célestes,

)
qu'il juge inconnaissables
).
3. Dans les Grenouilles, Aristophane se moque de la prétention

v. 797 ).
du novateur Euripide à vouloir juger la poésie «en pesant» (cf.
et en «mesurant» (v. 799 L'auteur de
VAncienne médecine laisse entendre que les novateurs condamnent
l'ancienne médecine parce qu'ils ne la trouvent pas assez précise
(c. 12 fin), mais leur exigence de précision qu'ils prétendaient

atteindre par leur postulat est factice, car il n'y a pas de poids et
de mesure autre que la sensation du corps (c. 9).
34 ANCIENNE MÉDECINE
Par ce double aspect de son œuvre, qui n'a rien de
contradictoire, l'auteur de VAncienne médecine occupe
une place originale dans les théories sur l'art et le
progrès.

III. LA MÉDECINE
DANS L'ANCIENNE MÉDECINE

L'« archéologie»
^^^^ réfuter les théories de ses
de la médecine adversaires, l'auteur devait mon-
(') non seulement que cette méde-
trer
cine nouvelle est mal fondée, mais aussi que la méde-
cine traditionnelle a un fondement solide. A
(«postulat») de cette nouvelle médecine s'oppose
(«origine») de l'ancienne médecine. Alors que
des adversaires est un acte individuel et arbitraire,
de la médecine traditionnelle s'enracine dans
l'histoire. Aussi pour démontrer la réalité de l'art,
l'auteur en vient-il naturellement à remonter jusqu'à
l'origine, à faire une «archéologie» au sens étymologique
du terme en reconstruisant la naissance et les progrès de
l'art médical dans une fresque historique qui présente
de nombreuses analogies avec les grands textes du
v•^ siècle célébrant les progrès apportés par les arts aux

hommes^.

1. Sur l'« archéologie» de la médecine dans VAncienne médecine,


voir H. Wanner, Siudien zu ..., p. 81 sqq. ;

H. W. Miller, «On Ancient Medicine and the Origin of Medicine»


T.A.Ph.A., LXXX, 1949, p. 187-202; Id., «Technê and Discovery
in On Ancient Médecine», T.A.Ph.A., LXXXVI, 1955, p. 51-62;
W. K. C. Guthrie, In the Beginning some Greek Views on the
:

Origins of Life and the early State of Man, London, 1957, p. 95-97 ;

H. Herter, «Die kulturhistorische Théorie der hippokratischen


Schrift von der Alten Medizin», Maia, XV, 1963, p. 464-483; cf.
également J. Pigeaud, «Qu'est-ce qu'être malade? Quelques
réflexions sur le sens de la maladie dans Ancienne médecine», in
NOTICE 35
Mais avant de montrer ces analogies, il convient de
souligner la solution originale adoptée par l'auteur dans
le problème de la délimitation du point de départ de la

médecine. Que l'origine de la médecine remonte dans les


temps lointains (c. 2
Mais où se situe cette
), cela ne fait aucun doute.
selon l'auteur? Ce n'est pas
la réponse la plus évidente qu'il choisit. La réponse la

plus évidente serait de dire que l'origine se confond


avec le moment où, après des recherches, on a
découvert la médecine proprement dite, c'est-à-dire le

.).
régime approprié aux malades (c. 5, 124, 9 ol
Mais pour l'auteur ce
n'est pas là la véritable En effet, cette découverte

)
du régime des malades a été précédée d'une autre

,
découverte, celle du régime en santé (c. 3, 122, 6-8

or ces deux découvertes, qui se


;

sont succédé dans le temps, sont comparables d'une


part, les recherches qui ont abouti à ces découvertes ont
:

);,
la même cause, la nécessité ou le besoin (comp. pour le

régime en santé c. 3, 122, 6 et pour le régime des


malades c. 3, 121, 2 d'autre part, ces recher-

);
ches ont été menées suivant la même méthode (c. 8,
127, 14 et le même raisonnement (c. 7, 126,
...
9
;
cf. aussi c. , 124, 9 sq.

)
enfin ces recherches aboutissent à une décou-
verte analogue (cf. c. 7, 126, 9 qui

R. Joly, Corpus Hippocraticum, Mons, 1977, p. 205-212. On


trouve aussi des remarques dispersées dans des études plus
générales sur l'idée de progrès : voir surtout J. de Romilly,
«Thucydide et l'idée de progrés», Annali délia scuola normale
superiore di Pisa (Lettere, storia e filosofia), XXXV, 1966,
p. 143-191; L. Edelstein, The Idea of Progress ..., p. 25, n. 10,
p. 34, p. 37 sq., p. 51, p. 54, n. 71, p. 55, n. 73, p. 85, n. 62;
E. R. Dodds, The Ancient Concept of Progress (1973), p. 11 sq. ;

W. den Boer, «Progress in the Greece of Thucydides», Medede-


lingen der Koninklijke Nederlandse Akademie van Welenschappen,
Afd. Letterkunde, N.R. XL, 1977, p. 7 et p. 48 sq.
36 ANCIENNE MÉDECINE
a la
5 sq.
même fin, la santé et le salut de
).
l'homme (c. 3,

La
123,
seule

).
différence
complexe

médical est,
est
que
que le régime du malade est plus
régime en santé (c. 7, 126, 15
le

Dès lors, l'origine première de l'art


en fait, la première découverte, celle du

).
régime en santé (c. 7, 126, 16

Cette position originale a l'avantage d'ancrer l'art de


la médecine dans un passé encore plus lointain, et
surtout de montrer la continuité et le progrès des
découvertes sur le régime. Mais cette prise de position
ne va pas sans un certain embarras. Tout en montrant
qu'il n'y a qu'une différence de degré, et non de nature,
entre les recherches et les découvertes qui concernent le
régime en santé et celles qui portent sur le régime des
malades, l'auteur est obligé de reconnaître que la
première de ces activités n'est pas un art proprement
dit au même titre que l'autre. En effet, alors que le
régime des malades est un art véritable parce qu'il a un
nom, la médecine (c. 5, 123, 19
tes, les médecins (c. , 124, 1
),
),
et des spécialis-
le régime des

gens en santé, lui, n'a pas de spécialistes à proprement


parler, puisque tout le monde est savant (c. 4, 123,
10 sq.), et l'auteur se garde bien d'attribuer à cette

«cuisine» ( ),
activité le nom auquel tout le monde pense, celui de
car, dans son esprit, elle
mériterait de s'appeler «médecine». Dès lors, il devient
assez périlleux de faire remonter l'origine d'un art (la
médecine) à une activité qui n'a pas pleinement le
statut d'art. En ayant hésité à intégrer totalement «la
cuisine» dans la médecine pour ne pas trop heurter des
vues plus traditionnelles, l'auteur s'est mis dans une
position épistémologique délicate.
Comme dans les autres textes du siècle relatifs à
la naissance de la civilisation par la découverte des

arts,
l'une
hommes
constitue une coupure entre deux périodes,
négative, l'autre positive.
ont une vie sauvage et malheureuse.
Avant , En
les
effet
NOTICE 37
avant la découverte du régime en santé et de la

ils avaient un régime «sauvage»

17 et c. 7, 126, 7; comp. vel


(,
médecine, les hommes vivaient comme des animaux
c. 3, 121,

c. 7, 126,
;

11); ce terme de «sauvage» qualifie également la vie

),
des premiers hommes dans les Suppliantes d'Euripide
(v. 202
Critias (DK 88
v. 1 sq.

Radt, F 181 a, v. 2 sq.


)
dans le fragment du Sisyphe de
25 = TrGF, vol. 1, Snell, 43 F 19,
... et dans le fragment d'un

... ' )^
Palamède que l'on attribue à Eschyle (TrGF, vol. 3,
Ce régime
sauvage entraînait une vie malheureuse, car les hommes
«éprouvaient bien des souffrances terribles» (c. 3, 121,
16, ),
tombaient malades et
mouraient aussitôt après. De façon analogue, dans le
Prométhée d'Eschyle, avant la découverte de la méde-

' )..
cine, il

tombait malade (v. 478 sq. ' ,


n'y avait pas de secours possible lorsque l'on

Mais tout change après la découverte qui


|

constitue

substitue (c. 3, 123, 6, )


À la place du régime fort et bestial qui
était cause de souffrance, de maladie et de mort, se
un régime qui apporte
le salut, la santé, et la nourriture. La découverte opère

donc un changement radical du négatif au positif. C'est


un changement analogue qui est apporté à la vie des
hommes par les arts dans les Suppliantes d'Euripide
(v. 201-202) et surtout dans le Prométhée d'Eschyle
(v. 442-506). Si l'on prend plus particulièrement dans
le Prométhée l'exemple de la médecine, on assiste à un

renversement total. Tout était négatif avant la méde-


cine «si quelqu'un tombait malade, il n'y avait aucun
:

1. Voir aussi Diodore I, 8, 1 (= DK 68 5, î):

et I, 8, 6 (sur le problème des sources de Diodore,


voir, infra, p. 47, n. 1). Comp. au iv« siècle, Isocrate, Pané-
(), ( )
)
gyrique 28 Échange 254 ;cf. aussi
plus tard Moschion (TrGF, vol. 1, Snell, 97 F 6, v. 4 :

et le pastiche comique d'Athénion


(Frag. 1,4-5 à propos de la cuisine qui a délivré les hommes d'une
vie sauvage : ... ).
38 ANCIENNE MÉDECINE
remède, ni à manger, ni à oindre, ni non plus à boire»
(v. 478-480) puis, à partir du moment où les hommes
;

possèdent «les remèdes bien tempérés», grâce à eux «ils


se protègent contre toutes les maladies». Du rien on
passe au tout. Le rapprochement entre le Prométhée et
V Ancienne médecine est d'autant plus intéressant que
l'auteur tragique, comme le médecin, accorde de
l'importance dans la découverte de la thérapeutique à
la notion de «mélange» (comp. Prom., v. 482

Ane. méd. c. 5, 125, 2 ).


Dans VAncienne médecine ce changement radical est
et

dans
cinq fois
le

,
opéré par une découverte. Les emplois des verbes
signifiant «découvrir» sont particulièrement nombreux
on y rencontre vingt-trois fois
traité : et
ce qui est une fréquence tout à fait
exceptionnelle dans la Collection hippocratique^. Dans le
traité de VArt, qui exalte aussi les découvertes de la
médecine^, les mêmes
verbes ne sont attestés respecti-
vement que sept quatre fois or c'est le second
fois et ;

traité après VAncienne médecine pour le nombre d'em-


plois de ces deux verbes dans la Collection hippocratique.
On ajoutera l'emploi du surcomposé au
c. 4, 123, 15 et aux c. 3, 123, 3,
du substantif
c. 4, 123, 13 et Ce simple décompte est
c. 7, 126, 9^.
déjà significatif. Il arrive même que ces termes de la
découverte apparaissent cinq fois dans la même phrase
«La médecine est en possession

)()()
(c. 2, 119, 12-16) :

depuis longtemps de tous ses moyens, d'un point de


départ et d'une voie qui ont été découverts
(
;

grâce à ces moyens, des découvertes en


grand nombre et de belle qualité ont été faites
au cours d'une longue période de temps et les découver-

1. Voir Index verborum, s. .


2. Voir J. Jouanna, Hippocraie V, 1. Des Vents, De ...,
p. 183-185.
3. Le composé nest pas attesté ailleurs dans les
traités techniques de la Collection hippocratique. Le substantif
se rencontre une autre fois dans le Régime, c. 2, Littré VI,
470, 14 (=Joly CMC 124,17).
les restantes seront
NOTICE
faites () pourvu que,
39

joignant à des dons suffisants la connaissance des


découvertes acquises ( ),
on les prenne pour
point de départ de la recherche». Ce qui est aussi
caractéristique du traité de V Ancienne médecine, c'est la
fréquence du vocabulaire de la recherche qui accompa-
gne celui de la découverte. Le verbe est employé
seize fois dans le traité\ et le substantif apparaît
au c. 3, 123, 4, alors qu'il n'est attesté qu'une autre fois
dans le reste de la Collection hippocratique^. L'auteur ne

1 )
cesse

(cf.

).).
donc de parler de recherche
cesse aussi d'en faire l'éloge

119, 13 sq.
...
...

; les

II
c.

...

faut
Cette admiration enthousiaste devant les
:

découvertes

les
les

;
et de découverte.

14, 135, 14 sq.

admirer
le
;

c.
Il ne

recherches sont belles


cf. c.

sont aussi
12, 133,
(c. 12,
12, 133,
(c. 2,

5
133, 4

découvertes rappelle les autres textes du siècle sur le


progrès. Dans les deux passages du Prométhée d'Eschyle
où le héros, bienfaiteur de l'humanité, se vante d'avoir
inventé les arts pour les hommes et notamment la
médecine, les verbes signifiant «découvrir» vel
ponctuent, comme dans V Ancienne médecine, les
inventions^. Si ce vocabulaire de la découverte ne
réapparaît pas dans le chœur des vieillards de ÏAntigone
de Sophocle, l'admiration étonnée devant ces découver-
tes n'en est pas moins grande. Les vieillards admirent

1. Ce terme n'apparaît que neuf autres fois dans le reste des


traités de la Collection hippocratique, à l'exception des Lettres.
2. Régime dans les maladies aiguës, c. 3, Littré II, 240, 7 = Joly
c. 8,

;
dans
39,9.
3. Prométhée, v. 460
.469
le
. 503
. 467 sq.
; .;

Cf. aussi l'emploi de


...

fragment du Palamède que l'on attribue à Eschyle (TrGF,


vol. 3, Radt, F 181 a, v. 4, qui est comparable à Prométhée,
' |

V. 459), et de dans le Sisyphe de Critias, v. 13


(DK 88 25 = TrGF, vol. 1 Snell, 43 F 19). ,
40 ANCIENNE MÉDECINE
l'habileté technique de l'homme qui dépasse toute
attente (v. 364-365) et citent parmi les arts découverts,
la médecine (v. 362 sq. «contre les maladies qui étaient
:

sans remède, l'homme a conçu des moyens d'y


échapper»)^.
Mais si tous les textes du v siècle qui évoquent le

progrès de l'humanité s'accordent pour faire l'éloge des


découvertes, ils se partagent en deux groupes sur les
causes de cette transformation selon les uns elle est :

due à une divinité qui a fait don des arts aux hommes
{Prométhée d'Eschyle Suppliantes d'Euripide) selon les
; ;

autres, c'est l'œuvre de l'homme lui-même {Antigone de


Sophocle, cf. v. 355 Sisyphe de Critias).;

L'auteur de VAncienne médecine appartient au second


groupe. Conformément à l'esprit rationaliste de la
Collection hippocratique, il attribue les deux découvertes
successives du régime des gens en santé et du régime des
malades tantôt à des hommes (cf. pour le régime en
santé c. 3, 122, 6 et pour la médecine proprement
dite c. 5, 124, 9 oî
cf. aussi c. 14, 135, 16

homme (cf. c. 7, 126, 9-12


8
tantôt à un
pour le régime en santé
), ;

et pour le régime des malacies)^. Il n'ignore certes


pas la croyance traditionnelle qui attribue la découverte
de la médecine à un dieu. Mais au lieu de s'y opposer, il
l'utilise habilement, pour faire l'éloge de la découverte :

1. Pour le thème de la recherche et de la découverte avant le

v« siècle, voir l'épopée Phoronis (environ 600 avant J.-C), à propos


des Dactyles de l'Ida «qui, les premiers, ont découvert l'art
d'Héphaistos à la pensée fort habile» (oî
|
in Schol. Apoiionios de Rhodes 1, 1129 sq. =
Frag. 2) avec le commentaire de K. Thraede, « Das Lob des
Erfinders», Rheinisches Muséum, N.F. 105, 1962, p. 161, et voir
Xénophane (DK
2.
Philologus, Suppl.
21

XXVI,
18).
L'ouvrage classique de A. Kleingunther,
1934, ne parle pas de VAncienne
1,

médecine. Cette constatation a déjà été faite par P. Lain Entralgo,


,
«El Escrito 'De prisca medicina' y su valor historiografico»,
Emerita, XII, 1944, p. 3, n. 2.
NOTICE 41

les premiers inventeurs de la médecine ont estimé que


leur découverte était digne d'être attribuée à un dieu
(c. 14, 135, 17 ).
L'homme donc l'auteur de la découverte dans
est
VAncienne médecine. Et de même que le chœur des
vieillards de VAntigone de Sophocle célébrait l'intelli-
gence de l'homme inventif (v. 347 ^),

)
l'auteur hippocratique souligne que les découvertes ne
sont pas l'effet du hasard, mais de la réflexion de
l'homme, de sa
ou de son
(c. 5, 124, 10; cf. c. 7, 126, 3

(c. 12, 133, 4). Toutefois

l'impulsion première de la recherche et de la découverte

)
ne vient pas de l'homme, mais de la réalité. L'auteur
insiste avec force sur le rôle de la nécessité (c. 3, 121, 2
et du besoin (c. 3, 122, 6 ).
C'est parce que
le régime bestial, loin d'être utile aux premiers hommes,

causait souffrances, maladies et morts que le régime des


gens en santé fut recherché et découvert c'est parce ;

que le régime des gens en santé ne convenait pas aux


malades que les hommes furent contraints de chercher
et de trouver les divers régimes appropriés aux divers
malades. Ce lien de cause à effet, établi entre la
nécessité ou le besoin d'une part et la recherche ou la
découverte d'autre part, n'est affirmé avec autant de
netteté dans aucun texte conservé du siècle. Un des
rares témoignages directs est un fragment du Télèphe

(,
d'Euripide (Frag. 715 Nauck) «Ulysse n'est pas le seul
:

à être enjôleur; le besoin est un maître d'intelligence,


même chez un balourd » ,
)^. En revanche le thème est bien attesté au début
du IV' siècle dans le Ploutos d'Aristophane, où la
relation entre le besoin et la recherche est formulée dans

.
= TrGF,

(
1. Comp. aussi Critias, Sisyphe, v. 12 sq. (DK 88 25
vol. 1,Snell, 43 F 19) :
|
...

2. Comp. TrGF, vol. 2, Kannicht/Snell, adesp. F 509 «le :

temps, le temps, avec l'aide du pressant besoin d'assurer la vie


), découvre bien des choses».
42 ANCIENNE MÉDECINE
une expression tout à fait comparable à celle de
V Ancienne médecine (comp. Ane. méd. c. 3, 122, 6 ...
... et Ploutos, . 534
... )^ Le thème était probablement déjà
répandu chez les penseurs du v* siècle. Mais nous n'en
possédons que des témoignages indirects ï Anonyme de :

Jamblique qui peut remonter au siècle^, et de façon


beaucoup plus problématique le développement de
Diodore de Sicile sur les premiers hommes, dont
certains érudits font remonter la source première
jusqu'au v" siècle^.
Ainsi, face à la nécessité et grâce à leur intelligence,
les hommes ont découvert d'abord le régime en santé
puis régime des malades. Mais ces découvertes ne
le

sont pas seulement situées dans une chronologie relati-


ve, elles sont envisagées dans leur durée. Les découver-

L'expression èv ,
tes passées ont exigé une longue période de temps.
«en beaucoup de temps»,
est employée de façon caractéristique aussi bien pour la
découverte du régime en santé (c. 3, 121, 15) que pour
celle de la médecine (c. 2, 119, 14). C'est un thème que
l'on trouvait déjà un siècle auparavant chez le philoso-
phe présocratique Xénophane qui disait «Ce n'est pas :

certes dès le départ que les dieux ont révélé toutes


choses aux mortels, mais c'est avec le temps
qu'en cherchant les mortels découvrent ce qui est
()
meilleur»*. Au v* siècle, Thucvdide a conscience aussi

1. Comp. 369 b-c


aussi Platon, République II c'est le besoin
() DK
:

2.
qui explique naissance de la cité.
la

89, 6 (1) c'est sous l'emprise de la nécessité


:

les hommes ont inventé tous leurs moyens de vivre et les arts.
que()
3. I, 8. 9=DK 68 5
«d'une manière générale c'est le
besoin lui-même qui a été le maître de tout pour les hommes». Sur
le problème des sources de Diodore, voir infra, p. 47, n. 1.

4. DK 21 18. Au iv siècle, le poète tragique Chérémon, qui


doit se souvenir de Xénophane tant son expression est proche, dit
également (TrGF, vol. 1, Snell, 71 F 21) «Il n'est rien des choses
humaines qui ne soit découvert avec le temps (èv
cherche».
:

)
quand on
NOTICE 43

que les progrès de la civilisation dans la Grèce ancienne


ont exigé une longue période de temps^ Mais nulle part
ailleurs, dans la Collection hippocraiique, les découvertes
de la médecine ne sont situées comme ici dans la durée
passée. Quand l'auteur de VArt, qui défend également
l'existence de l'art de la médecine contre des négateurs,
parle des découvertes de l'art, il les présente comme des
découvertes acquises sans s'interroger sur la façon dont
elles l'ont été^. De même l'auteur des Lieux dans
l'homme, c. 46 (Littré VI, 342, 4 sq. =
Joly 76, 6 sq.) se
contente d'affirmer que la médecine est découverte tout
entière, sans se poser la question de la genèse de cette
découverte. Au contraire l'auteur de VAncienne médeci-
ne envisage les découvertes acquises dans leur succes-
sion chronologique, dans leur durée et aussi dans leur
perfectionnement. Car les deux phases successives de
découvertes qu'il a distinguées se différencient non

première (c. 7, 126, 15 ).


seulement par leur objet, mais aussi par leur degré de
complexité la seconde phase est plus complexe que la
:

En effet, alors que


le régime découvert pour les gens en santé est le même

pour tous (c. 3, 122, 7), car c'est un régime adapté à la


nature humaine en général ( ),
le régime décou-

vert pour les malades comprend trois degrés (nourriture


solide, potages, boissons) qui correspondent à trois
catégories de malades (c. 5, 124, 12 sqq.).

L'originalité du traité de VAncienne médecine, par


rapport aux autres traités de la Collection hippocratique
qui parlent des découvertes de l'art, ne se borne pas à la
seule vision du passé elle concerne aussi le présent et
;

l'avenir. Alors que dans le traité de VArt et dans les

1. Thucydide I, 12,4 ; voir aussi Diodore I, 8, 8

, 8, 3
;
' , 8, 7
problème des sources de Diodore, voir
;
; cf. aussi
'
, 8,

infra, p. 47, n.
2

1.
;
pour le

2. Voir J. Jouanna, Hippocraie V, 1. Des Vents, De l'Art...,


p. 185.
.

44 ANCIENNE MÉDECINE
Lieux dans l'homme l'art de la médecine apparaît
totalement découvert, les découvertes dans V Ancienne
médecine n'appartiennent pas seulement au passé; elles
continuent dans le présent et se prolongeront dans
l'avenir, qu'il s'agisse aussi bien du régime des gens en
santé que du régime des malades. Concernant le régime
des gens en santé, les maîtres de gymnastique ou
entraîneurs d'athlètes, contemporains de l'auteur,

... ).
continuent dans le présent à faire des découvertes qui
s'ajoutent aux découvertes passées (c. 4, 123, 14 sq.
Et concernant le régime
des malades, il reste des découvertes à faire dans
l'avenir (c. 2, 119, 14 sq. ).
L'auteur reconnaît que la médecine n'est pas encore
entièrement découverte, bien qu'elle ait atteint dans
plusieurs domaines l'exactitude la plus grande (cf. c. 12,
132, 16 sq.). Cette vision nuancée contraste aussi avec
l'optimisme sans faille du Prométhée eschyléen qui a
montré aux hommes les remèdes écartant «toutes les
maladies» (v. 481-483).
Pour retracer cette «archéologie» de la médecine,
l'auteur hippocratique emploie une méthode compara-
ble à celle de l'historien Thucydide qui retrace dans son
livre I l'évolution de la Grèce depuis ses origines
jusqu'à la période contemporaine. Ce qui rapproche le
médecin et l'historien, outre le tour personnel donné à
la thèse^, c'est le recours à la vraisemblance^ et surtout

à l'analogie avec le présent pour fonder la reconstitu-


tion du passé chez l'un, comme chez l'autre, le monde
:

barbare actuel et même une partie des Grecs qui n'a pas
été touchée par la civilisation donnent des indications
sur le genre de vie des anciens. Chez Thucydide, la

3,
1

3;
Comp.
9, 1 ; 9,
l'emploi de ,
3; 10, 4 et dans Ane. méd.
chez Thucydide 1,3,2;
c. 3,121, 15; 122, 6; cf.
aussi dans Ane. méd. c. 3, 121, 13 et c. 5, 124, 11.
2. Comp. l'emploi de chez Thucydide I, 4; 10, 3 bis; 10, 4
et dans Ane. méd. c. 3, 121, 21 et 122, 2.
NOTICE 45
chose est bien connue une partie de
: la Grèce
continentale nous renseigne sur la façon dont les
anciens considéraient et pratiquaient le pillage, et les
barbares sur la manière dont les anciens portaient une
ceinture dans les compétitions sportives (1,5 et 6). Chez
l'auteur hippocratique (c. 5, 124, 5 sqq.), une partie des
Grecs et l'ensemble des barbares nous renseignent sur le
genre de vie des anciens, dans la mesure où, ne
pratiquant pas la médecine, ils agissent, quand ils sont
malades, comme les anciens devaient agir avant la
découverte de la médecine. Dans l'expression même,
des rapprochements sont possibles pour introduire ces
:

preuves secondaires tirées de l'observation du monde


contemporain les deux auteurs emploient la même
liaison «encore maintenant» (comp. Thucydi-
de 1,5,2 et 6,5 ... et Ane. méd.
c. 4, 123, 14 ... et c. 5, 124, 5 ... )^.
Tous ces rapprochements que l'on peut faire entre les
thèmes de V Ancienne médecine relatifs à la naissance et
au développement de l'art de la médecine et ceux que
l'on rencontre chez les trois tragiques, Eschyle, Sopho-
cle et Euripide, à propos de la naissance de la
civilisation due à la découverte des arts, ou chez
l'historien Thucydide, lors de son exposé sur l'état de la
Grèce ancienne et son développement au livre I de ses
Histoires, attestent une même vision optimiste de
l'évolution de l'humanité qui est passée d'un état
primitif, où tout est négatif pour l'homme, à un état de
civilisation grâce à des découvertes bénéfiques.
On a voulu trouver la source première de ces thèmes
chez des penseurs du siècle, sophistes ou philosophes
présocratiques. Parmi les sophistes, on cite depuis

1. Pour comparaison entre l'Ancienne médecine et Thucydide


la

sur ce point, voir W. Nestlé, « Hippocratica», Hermès, LXXIII,


1938, p. 21, n. 5; H. Diiler, « Hippokratische Medizin...», p. 396

»,
{= Kleine Schriflen ..., p. 57); J. de Romilly, «Thucydide et l'idée
de progrès...», p. 161 sq. ;S. L. Radt, «Zu
Mnemosyne, XXXII, 1979, p. 81.
.

46 ANCIENNE MÉDECINE
longtemps le plus ancien, Protagoras^. En effet, on a
conservé parmi les titres de ses œuvres un traité intitulé
(DK 80 1 = Diogène

Laërce IX, 55), qui est probablement un traité «sur


l'état originel de l'humanité»; et Platon, dans son
Protagoras (320c sqq.), met dans la bouche du sophiste,
sous la forme du mythe de Prométhée, un tableau de
l'humanité primitive et de son évolution qui est un
reflet plus ou moins fidèle de ce que l'on pouvait lire
chez le sophiste^. Mais il n'y a aucune commune mesure
entre les rares indications sur le régime contenues dans
la version de Platon censée remonter à Protagoras et les

longs développements sur le régime de l'auteur hippo-


cratique^. Parmi les philosophes présocratiques, on cite

l'homme dans son *.


surtout Démocrite, qui aurait traité de l'histoire de
On fait ressortir,

1. Voir par exemple W. K. C. Guthrie, In the Beginning ...,

p. 84 sqq.
2. Voir W. K. C. Guthrie, A History of Greek Philosophy, III,
Cambridge, 1969, p. 63 sq.
3. Voici les quelques indications sur le régime contenues dans
le Protagoras de Platon (321b-322a) : Épiméthée «fournit aux
différents animaux une nourriture distincte, aux uns les herbes
de la terre, aux autres les fruits des arbres, aux autres les racines;
et il en est d'autres à qui il donna pour nourriture la chair
d'autres animaux»; l'homme, grâce au don de Prométhée,
«découvrit les nourritures qui naissent de la terre»
). (
Ces rares indications ne concordent même pas avec
l'Ancienne médecine. Alors que le mythe de Protagoras fait
allusion essentiellement à la découverte de l'agriculture qui donne
à l'homme une nourriture différente de celle des animaux,
V Ancienne médecine passe sous silence cette découverte de
l'agriculture pour mettre en lumière la découverte de la prépa-
ration du régime par la cuisson et par le mélange.
4. Voir H. Wanner, Studien zu . . p. 84;,

. W. Miller, «On Ancient Medicine and the Origin of Medi-


cine...», p. 190-192 et surtout H. Herter, «Die kulturhistorische
Théorie der hippokratischen Schrift von der Alten Medizin...»,
p. 472 sqq. ; voir dernièrement A. Stuckelberger, Vesligia Demo-
critea. Die Rezepiion der Lehre von den Atomen in der anliken
Naturwissenschafl und Medizin, Schweizerische Beitràge zur
Altertumswissenschaft XVII, Bâle, 1984, p. 81-85.
NOTICE 47

médecine à la nécessité
comme point de départ
()
en particulier, que le rôle accordé dans VAncienne

()
et au besoin
pour la découverte de
()
l'art () est une idée démocritéenne. On s'appuie
pour cela sur les parallélismes entre VAncienne médecine
et le développement de Diodore de Sicile (I, 8, 1-9) sur
la vie des premiers hommes et la naissance progressive

de la civilisation. Des ressemblances entre les deux

)
textes existent bien non seulement sur l'idée que le
besoin (comp. Diodore I, 8, 9 est à l'origine de
la découverte des arts, mais aussi sur l'idée que cette

découverte est progressive (voir supra, p. 43) et enfin


sur le genre de vie sauvage des premiers hommes avant
la découverte des arts (voir supra, p. 37). Mais pour

conclure de ces rapprochements à une origine démocri-


téenne, il faudrait être sûr que Démocrite est la source
de Diodore, ce qu'il est impossible de prouver, puisqu'il
ne nous reste de son ouvrage perdu qu'un titre^. Il est

1. On s'est longtemps fondé sur un article de Karl Reinhardt

de 1912 reconstruisant le contenu du de


Démocrite, article qui risque d'avoir encore longtemps force de
loi, puisque H. Diels à la suite de cet article, a inséré le
texte de Diodore parmi les fragments de Démocrite dans son
ouvrage sur les Présocratiques en 68 5. L'avertissement de
W. K. C. Guthrie, A Hisiory of Greek Philosophy, II, Cambridge,
1965, p. 389, n. 1, mérite d'être rappelé : «A warning is par-
ticularly necessary concerning the lengthy passages of Diodorus
printed by DK (II, 135 ff.) with extracts from Tzetzes and
Johannes Catrares as reproducing the content of the
of Democritus. Their inclusion dépends on a confident
attribution by Reinhardt in 1912, which however was already
seriously impugned by Dahlmann in 1928, since when an exten-
sive literature has accumulated around the subject. Although
scholars differ in their positive conclusions, almost ail agrée that
Reinhardt's thesis is condemned by the absence of any trace of
the atomic worldview». Pour la critique de la thèse de Reinhardt,
«Hekataios von Abdera und Demokrit», Hermès XLVII, 1912,
p. 492-513 qui fait remonter Diodore I, 8 à Démocrite par
l'intermédiaire d'IIécatée, voir F. Jacoby, F. Gr. Hist. III a
30 sq., G. Pfligersdorffer, «Studien zu Poseidonios», S. B. Wien,
CCXXXII, 5, 1959, p. 110 sq. et les travaux de W. Spoerri,
Spàlhellenislische Berichte ûber Welt, Kultur und GôHer, Bâle, 1959
48 ANCIENNE MÉDECINE
certes probable que Démocrite a expliqué l'émergence
progressive des arts suivant leur degré de nécessité,
puisque, dans un fragment conservé par Philodème
(68 144),Démocrite prétendait que la musique était

()
un art jeune et, pour l'expliquer, disait que «la nécessité

).
n'avait pas sécrété cet art, mais qu'il était
désormais né du superflu» ( Cela
implique que les arts nés en premier lieu sont issus de la
nécessité. Mais d'une indication aussi fragmentaire, il
est difficile de conclure à une relation particulière entre
Démocrite et V Ancienne médecine; et d'une rencontre, il
est imprudent de conclure à une influence. L'influence
de Démocrite sur V Ancienne médecine, affirmée comme
une évidence, est un locus classicus qui n'a pas de

besoin d'une ,
fondement solide. Pour reprendre les termes de VAn-
cienne médecine, c'est une question douteuse qui a
car il n'y a pas de critère sûr
auquel se référer pour savoir si l'on atteint le vrai. Ce
n'est évidemment pas la meilleure méthode pour
expliquer V Ancienne médecine^.

(qui pense que Diodore se fait l'écho de théories plus tardives,


celles de Posidonius), «Zu Diodor von Sizilien 1. 7/8», Muséum
Helveticum XVIII, 1961, p. 63-82 et «L'anthropologie du
(et Diodore I 7, 3 s.», in Formes de pensée dans la Collection
hipocratique. Actes du IV"" colloque international hippocratique,
éd. F. Lasserre et Ph. Mudry, Genève, 1983, p. 57-70. Même un
partisan de la thèse de Reinhardt, tel que Th. Cole (« Democritus
and the Sources of Greek Anthropology», Philological Monographs
publ. by the Am. Phil. Ass. XXV, 1967, p. 59) reconnaît que
l'identification de la source du passage de l'histoire de la civilisa-
tion avec Démocrite n'est pas certaine et qu'il peut s'agir
d'Épicure, même si Épicure a pu s'inspirer de Démocrite. En tous
les cas, le fait que le passage de Diodore est inséré tantôt dans
les fragments de Démocrite (DK 68 5) tantôt dans ceux du
stoïcien Posidonius (W. Theiler, Poseidonios, Die Fragmente,
Berlin/NewYork, 1982, Frag. 306) doit inviter à la plus grande
prudence.
1. Voir déjà le doute de H. Diller, « Hippokratische Medizin ...»,

p. 396, n. 2 (= Kleine Schriften ..., p. 57, n. 42). Il est, en tous les


cas, aberrant de présenter le passage de l'auteur hippocratique
comme un fragment de Démocrite, ce que fait S. Luria, Democri-
NOTICE 49

Un rapprochement est moins aléatoire, dans l'état


actuel de notre documentation, avec un autre philoso-
phe présocratique, Archélaos^ Selon Archélaos (DK 60
A 4 = Hippol. Refut. I, 9, 5), comme dans VAncienne

;)
médecine, les premiers hommes avaient le même régime
que les animaux (Archélaos
Ane. méd. c. 3, 121, 14 sq.
et mouraient prématurément (Arché-
:

Ane. méd. c. 3, 122, 1 sq.


)
;
laos : ; :

... ;
puis les hommes se
séparèrent des animaux par la découverte des arts
(Archélaos : ...

... Ane. méd. c. 3, 121, 14 sq.

). ...

Mais, malgré ces rencontres, on se gar-


dera de conclure à une influence directe du philosophe
123, 6 sq.

sur le médecin, car l'auteur de V Ancienne médecine, qui

dénonce dans sa polémique le postulat du chaud et du


froid, ne pouvait adhérer à la doctrine d'un philosophe
qui explique la genèse de l'homme et des animaux par
le mélange du chaud
Refut. 5 I, 9, :
et du

Notre connaissance des philosophes présocratiques ou


froid (DK 60 A
).
4 = Hipp.,

des sophistes est donc trop lacunaire pour conclure à


une influence d'un penseur précis sur VAncienne médeci-
ne. Les rencontres témoignent d'un bien commun que
chacun pouvait reprendre et adapter à son propos. En
tout état de cause, la cohérence tout à fait remarquable
de la théorie dans VAncienne médecine exclut qu'elle soit
l'œuvre d'un compilateur. Il vaut mieux la prendre
comme un fait que comme un reflet. C'est, en tous les
cas, la seule théorie ancienne que l'on ait conservée
dans son intégralité.

iea, Leningrad 1970 (Frag. 558). La mise au point récente


d'A. Stuckelberger, Vestigia Democrilea ..., p. 82-85, est claire et
pondérée, mais elle paraît encore trop optimiste quand elle parle
de la «preuve d'une influence fondamentale» (p. 85) de Démocrite
sur Ane. méd.
1. Voir A. Lami, «Un'eco di Gorgia in Antica Medicina»,
Crilica storica, XIV, 1977, p. 3.
50 ANCIENNE MÉDECINE
Bien que l'auteur de V Ancienne
La méthode
médecine ait pleinement conscience
de la médecine
(') (}g l'évolution progressive de l'art

médical depuis son origine et de l'échelonnement des


découvertes dans le passé, le présent et l'avenir, il reste
que ces découvertes supposent un élément invariant qui
a été découvert dès le début, c'est la méthode ou
(c. 2, 119, 13)^. Quelle est cette méthode qui, selon
l'auteur, est la seule possible en médecine?
Cette méthode a déjà été mise en pratique par ceux
qui ont découvert le régime des gens en santé et c'est en
appliquant la même méthode que fut découvert le
régime des gens malades, c'est-à-dire la médecine. Elle

)
consiste à adapter la nourriture à la nature humaine
(c. 3, 122, 6 sq.

cf. ibid. 122, 14 sq.

1. Autres emplois de dans le traité : c. 2, 119, 17; c. 4,

123, 16; c. 8, 127, 14; c. 15, 137, 13. Dans tous ces emplois
a le sens de «voie, méthode», sens qui est exceptionnel ailleurs
dans la Collection hippocratique; comp. seulement Lieux dans
l'homme, c. 34, Littré VI, 326, 11 (= Joly 67, 17), Épidémies VI,
3,
à
12 Littré V, 298, 8
employer en médecine)
(= Manetti/Roselli 66,2)
et le
( «méthode»
traité tardif de la Bienséance, c. 6,
Littré IX, 234, 13. Dans tous
autres emplois (plus de soixante),
les
a des sens Sur la notion de
très concrets. «voie
(de recherche)» au v* siècle, voir O. Becker, «Das Bild des Weges
im fruhgriechischen Denken», Hermès, Einzelschriften IV, 1937,
p. 101 sqq. et 139 sqq. H. Diller, « Hippokratische Medizin ...»,
;

siècle ,
p. 390 {= Kleine Schriften ..., p. 51), insiste sur le fait qu'au
V employé au sens de «voie de recherche» (Hérodote,
Parménide), n'est envisagé que par référence au résultat où elle
mène et non dans les modalités méthodologiques du parcours,
comme c'est le cas dans VAncienne médecine et chez Platon.
Toutefois déjà chez Parménide, les voies de l'être et du non être
(DK 28 8 2) sont distinctes par la nature du chemin et non pas
seulement par
médecine entre
et l'autre voie
est la voie
l'opposition entre les
le

la
(cf. c. 2,

de
but où il

119, 17,
l'erreur, est
mène. L'opposition dans VAncienne
vraie voie, celle de la médecine traditionnelle,

),
comparable,
deux voies parménidiennes.
cellede
mulalis
,mutandis,
qui
à
1

NOTICE 51

implique donc
; c 14, 135, 15 sq.

connaissance des causes des maladies


la
). Elle

qui se ramènent à un déséquilibre entre la force de la

(
nourriture et celle de la nature humaine. Pour que la
nourriture apporte du profit à l'homme, il faut qu'il
dominer 122, 16 et

'
puisse la uel c. 3,

123, 2 ; c. 4, 123, 16 ; c. 5, 124, 16 et 125, 1 ;


c. 7, 126, 1

et 13; c. 11, 131, 15). Et une fois qu'il la domine, il en


retire de la force (c. 4, 123, 16 sq.

).
), Mais quand
nourriture est trop forte (cf. 3, 122,
la

l'individu ne peut pas la dominer (cf.

)).
15
c. 3; c. 5; c. 7 et c. 14), si bien qu'elle lui cause des

dommages (cf. c. 9, 127, 16


dont les plus graves sont les maladies (c. 3,

123, 1 6 résume
Une formule de la fin du c.

clairement cette conception de la cause des maladies :

«Toutes les causes de la souffrance remontent au même


principe, à savoir que les substances les plus fortes sont
celles qui causent les dommages les plus grands et les
plus manifestes à l'homme, qu'il soit en bonne santé ou
qu'il soit malade». Ainsi, à la base de la physiologie et
de la pathologie du traité de V Ancienne médecine se
trouvent les notions de force et de lutte. La fréquence
d'emploi du vocabulaire de la force est remarquable
dans le traité. La famille de est bien représen-
tée ; notamment le substantif qui garde des liens
avec le verbe et qui implique, malgré la

diversité des sens, la force d'agir ou de réagir, est


employé vingt fois; c'est la fréquence absolue la plus

traité
(,
1. Sur
,)
élevée dans la Collection hippocralique, si l'on excepte le
du Régime^. Les termes de la famille de

l'emploi
sont employés une trentaine de

de dans VAncienne médecine, voir


W. H. S. Jones, Philosophy and Medicine ..., 1946, p. 93-96;
H. W. Miller, « Dynamis and Physis in On Ancient Medicine»,
T.A.Ph.A., LXXXIIl, 1952, p. 184-197 et G. Plambôck, «Dyna-
mis im Corpus Hippocraticum»..., p. 74-89.
52 ANCIENNE MÉDECINE
fois^ Ce qui est surtout remarquable, c'est la cohérence
des emplois. Une grande partie de ce vocabulaire de la
force est employée, soit pour régime qui agit sur
le

l'homme, soit pour l'homme est capable ou


qui
incapable de réagir à ce régime et de le dominer.
La méthode consiste donc à réduire le déséquilibre
entre la force du régime et la force de l'individu, que

l'individu soit en bonne santé ou qu'il soit malade.


C'est ce que firent les premiers inventeurs du régime
des malades (c. 5), comme les premiers inventeurs du
régime en santé (c. 3). L'auteur de ï Ancienne médecine
montre permanence de
la en établissant un
parallèle entre ces deux inventions. Elles consistent
toutes deux à supprimer ce qu'il y a de trop fort dans

)
la

c. 7,
nourriture
126, 14
(cf. c. 5, 124,

par diverses opérations dont les deux prin-


cipales sont le mélange (cf. l'emploi de

122, 12 et c. 5, 124, 18, de


19
;

au c. 3,
au c. 3, 122, 13,
c. 14, 136, 5
;

et de au c. 5, 124, 19) et la cuisson (cf. au


c. 3, 122, 12 et au c. 5, 124, 20). De même que
les premiers inventeurs ont adapté la force du régime
à celle de la de l'homme en santé (c. 7, 126, 10),
les inventeurs de la médecine ont adapté la force du
régime à celle de la du malade (c. 7, 126, 12).
La méthode
(c. 4,

le
123, 15 sq.
présent
est la

(c. 4,
même

123, 14
;

))
et c'est cette même méthode
qui est appliquée dans
par les entraîneurs
d'athlètes lorsqu'ils ajoutent des découvertes au régime
même méthode
des gens en santé
(c. 8, 127, 14
;

de découvrir la médecine dans sa totalité.


)
c'est, enfin, cette
qui permettra dans l'avenir

Les découvertes successives de l'art médical suppo-


sent donc une méthode qui a été découverte d'emblée et
qui, elle, n'évolue pas. Comme cette méthode est le fruit

1. Je laisse de côté les emplois d ' (8 fois).


NOTICE 53

d'un raisonnement sur les causes des maladies, même si


ce raisonnement a été motivé par la contrainte des faits,
la position de l'auteur ne saurait être confondue avec

(c. 12, 133, 4 ) )


l'empirisme. L'art médical, selon l'auteur, n'est pas né
d'une accumulation de faits, mais d'un raisonnement
grâce auquel s'est effectué le
passage de l'ignorance (cf. c. 12, 133, 4
savoir progressif^
à un

Si la méthode découverte d'emblée depuis longtemps


n'a pas donné lieu encore à une découverte totale de
l'art médical, c'est parce que son application est
complexe. Adapter la force du régime à la force de la
constitution du malade exige la recherche d'un équili-
bre. Il ne faut pas que le régime soit trop fort, mais il ne
doit pas non plus être trop faible, car un état de vacuité
n'est pas moins néfaste qu'un état de pléthore (c. 9 à
c. 12). Or pour atteindre cet équilibre des forces, il n'y a

pas de proportion mathématique absolue. La médecine


n'est pas une science du nombre. Le seul critère de cet

128, 13 ).
équilibre est la sensation du corps des malades (c. 9,
Ce qui doit guider la
médecine dans la recherche de cet équilibre, c'est la
façon dont le malade ressent les effets du régime^. Aussi
l'équilibre exact est-il difficile à atteindre. Et le
médecin digne d'éloge est celui qui s'écarte le moins
possible de ce point exact d'équilibre.
Telle est la méthode de la médecine selon l'auteur
hippocratique. Du point de vue de l'historien des

1. Aussi existe-t-il une différence essentielle, malgré les ressem-


blances, entre « archéologie» de la médecine chez notre auteur
et chez lesmédecins de la secte empirique (cf. Celse, De medicina,
Praefatio 33-36), bien que les empiriques aient pu se réclamer de
ce traité (cf. supra, p. 8). Alors que le raisonnement est
l'instrument de la découverte selon le médecin hippocratique, il
est postérieur à elle selon les empiriques (cf. 36 :«Nec post
rationem medicinam esse inventam, sed post inventam medicinam

sion ,
rationem esse quaesitam»).
2. Sur les différentes interprétations proposées pour l'expres-
voir le commentaire ad loc.
54 ANCIENNE MÉDECINE
sciences, apparaît comme un bel exemple du
elle
tâtonnement expérimental avec des découvertes qui
sont le résultat de multiples tentatives au cours d'une
longue période de temps^ et comme une nette résistance
à l'application en biologie d'un rationalisme de type
arithmétique ou géométrique^.

La médecine, selon l'auteur de


et le p^hologique V Ancienne médecine est fondamen-
diini /'Ancienne médecine .-ta lement diététique; c'est le ré-
les théories médicaUs
qyj est cause des maladies
gjp^g ;

de l'auteur , . • •

c est par le régime que sont soi-


gnées les maladies. À aucun moment l'auteur n'envisa-
ge des causes externes telles que l'influence du climat.
La médecine «météorologique» que l'on trouve par
exemple dans Airs, eaux, lieux, dans Maladie sacrée,
dans les Épidémies ou dans Nature de l'homme, est
totalement absente du traité. Cette absence est-elle le
signe d'une réprobation? Il est difficile de le dire;
toutefois le scepticisme de l'auteur sur la connaissance

des phénomènes d'en haut, des (c. 1, 119, 7),

ainsi que sa critique de l'importance du chaud et du


froid dans les maladies (c. 16 sqq.), et plus générale-

1. Voir M. Grmek. «La sperimentazione biologica quantitativa

neU'antichita» in La vita le forme i numeri. Biologica I. 1988,


p. 11-33; sur VAncienne médecine, voir p. 16 sq. et p. 19 sq.,
notamment p. 17 «Pour le dire en un mot, la médecine serait
:

fondée historiquement sur une série d'expériences qui, dévelop-


pées à travers des tentatives faites à l'aveuglette, auraient été
conduites sur la base d'hypothèses relatives à la force des aliments
d'un côté, et du corps sain et malade de l'autre. Ces expériences,
de niveau élémentaire, sont présentées comme expériences quanti-
tatives parce qu'elles comportent un raisonnement de type
quantitatif. Cependant nous devons souligner l'absence de toute
référence à des mesures précises, exprimées en nombre».
2. Voir L. Bourgey, Observation el expérience chez les médecins de
la Collection hippocratique. Paris, 1953, p. 201. n. 3; G. Bratescu,
«Le problème de la mesure dans la Collection hippocratique», in

F. Lasserre et Ph. Mudry, Formes de pensée dans la Collection


hippocratique. Genève, 1983, p. 141.
NOTICE 55

ment des qualités chaud, froid, sec,


élémentaires,
humide, justifient bien cette absence de référence aux
levers et aux couchers des astres ainsi qu'aux saisons.
Entre le traité des Airs, eaux, lieux qui affirme que
l'astronomie contribue grandement à la médecine (c. 2)^
et le traité de VAncienne médecine qui sépare nettement
la médecine de la «météorologie» et fait le silence total

sur l'influence des saisons sur le corps, il y a plus qu'une


différence de degré 2.
Les aliments et les boissons peuvent provoquer des
perturbations chez l'homme. Comment s'effectue ce
passage du normal ou pathologique à l'intérieur du
corps ?
Malgré la diversité des constitutions humaines qui
sont plus ou moins résistantes et entre lesquelles
l'auteur établit une hiérarchie en fonction de leur degré
de résistance, toute nature humaine est constituée de
nombreux éléments, «le salé, l'amer, le doux, l'acide,
l'acerbe, le fade et mille autres substances possédant
des propriétés diverses sous le rapport de la quantité et
de la force» (c. 14). Ces substances qui composent le
corps de l'homme sont aussi parfois nommées «hu-
meurs». Il y a santé lorsque ces substances sont
mélangées les unes aux autres il y a maladie lorsque
;

l'une d'entre elles se sépare et se tient à l'écart. Cette


conception de la santé et de la maladie est tout à fait
analogue à celle d'un autre traité hippocratique, la
Nature de l'homme

,
:

Ane. méd. c. 14. Nature de l'homme c. 4.

5
, 1.
8

Airs, eaux, lieux, c. 2,


,
Littré II, 14, 15-19 (=
-
Diller 26, 18-
21).
2. Comp. W. Nestlé, « Hippocratica» ..., p. 20 et n. 1.
56 ANCIENNE MÉDECINE

, . ' • '

...
. ... ,' fj

. . ...

...

Sans doute éléments qui composent le corps ne


les
sont identiques ni par leur nombre ni par leur nature,
dans ces deux traités. L'auteur de la Nature de l'homme
ne retient que quatre éléments constitutifs, et ce sont
les humeurs sang, phlegme, bile jaune et bile noire.
Néanmoins, le principe d'explication est identique :

plusieurs éléments sont en état de mélange et de crase


dans l'état normal et la séparation de l'un d'entre eux
cause la souffrance. Comme cette identité de la pensée
se double d'une similitude du vocabulaire désignant le
mélange ou la séparation des substances constitutives,
on est en droit de se demander s'il n'existe pas une
deux traités^. On a pensé que
relation directe entre ces
l'auteur deNature de l'homme se souvenait de
la

V Ancienne médecine^; mais l'hypothèse inverse a été


également envisagée'.

1. Les ressemblances verbales portent aussi bien sur le


vocabulaire du mélange dans l'état de santé (comp. en
Ane. méd. et

hom.
en Ane. méd. à
;
'
en al. hom. ;

en Ane. méd. et
et
en Ane. méd. et
en .Va/, hom.) que sur celui de la séparation et de
l'isolement dans l'état de maladie (comp.

'
et
en Nat.
en Nat.
)
hom.).
Voir L. Bourgey, Observation et expërienee ..., p. 32, n. 1 et
2.
p. 57; J. Jouanna, Hippocrate. La nature de l'homme, CMC 11,3,
Berlin, 1975, p. 51 J. Ducatillon, Polémiques dans la Colleetion
;

hippocratique ..., p. 134.


3. Voir H. Diller, « Das Selbstverstàndnis der griechischen
Medizin in der Zeit des Hippokrates» in L. Bourgey et
J.Jouanna, La Colleetion hippocratique et son rôle dans l'histoire de
la médecine (Colloque de Strasbourg 1972), Leiden, 1975, p. 87.
NOTICE 57

Quoi en soit des rapports entre ces deux traités,


qu'il
la théorie de V Ancienne médecine présente des analogies
avec celle d'un penseur proche de l'école pythagoricien-
ne, contemporain de Pythagore, mais plus jeune que
lui, Alcméon de Crotone^. Selon une doxographie sur la

santé et la maladie conservée à la fois par Plutarque et


par Stobée qui remonte à Aétius, «Alcméon dit que ce
qui maintient la santé c'est l'égalité
forces (), des
l'humide, le chaud, le sec, le froid,
()
()
l'amer, le doux, et tout le reste, tandis que la monarchie
instaurée parmi ces forces cause la

)
maladie^.» Dans V Ancienne médecine, comme chez
Alcméon de Crotone, le corps humain est constitué de
nombreuses
...
(comp. Ane. méd., c. 16 -
l'amer et
et
et
et Alcméon
pas toutes énumérées (comp. Ane. méd., c. 14
Alcméon

, ). )
qui ne sont

et qui comprennent
le doux (comp. Ane. méd., c. 14

Alcméon La santé et la maladie


sont expliquées de façon analogue, la santé par l'égalité
de toutes les forces constitutives, et la maladie par la
prédominance de l'une d'entre elles sur les autres. Il est
vrai que la métaphore n'est pas exactement la même.

Dans doxographie sur Alcméon, l'idée est exprimée à


la

l'aide d'une métaphore politique, qui peut remonter à


Alcméon lui-même la santé correspond à un état
:

démocratique où les citoyens ont les mêmes droits,


tandis que la maladie est comparée à un état monarchi-
que où un seul individu a pouvoir sur tous les autres
sujets; en revanche, chez l'auteur hippocratique, qui
parle de mélange ou de séparation, toute référence
politique précise semble absente. Mais il ne faudrait pas

1. Sur la date d'Alcméon, voir Aristote, Métaphysique I, 5,


986a 29 sq. : « Il était dans la force de l'âge quand Pythagore était

vieux ».

2. Les versions de Plutarque et de Stobée sont éditées par


H. Diels, Doxographi graeci, Berlin, 4'" éd., 1965 ("- éd. 1879),
p. 442 sq.; cf. DK 24 4.
58 ANCIENNE MÉDECINE
exagérer l'opposition, car dans V Ancienne médecine, où
la notion de force est à la base de toute la physiologie, il
est clair que lorsqu'une substance se sépare des autres
c'est pour manifester son pouvoir et exercer sa domina-
tion l'emploi du verbe
: au c. 16, 139, 5 est
significatif à cet égard.
De cette ressemblance entre Alcméon et le traité de
VAncienne médecine sur les principes constitutifs de
l'homme et sur l'explication de la santé et de la
maladie, on a conclu depuis longtemps à une origine
pythagoricienne du traité^. Toutefois, VAncienne méde-
cine présente une grande différence par rapport à la
doxographie d'Alcméon l'auteur hippocratique nie, ou
:

tout au moins réduit considérablement, le rôle du


chaud, du froid, du sec et de l'humide dans la
production des maladies, alors que la doxographie sur
Alcméon présente ces qualités sur le même plan que
l'amer et le doux et les place en tête de l'énumération.
S'ily a eu influence d'Alcméon sur VAncienne médecine,
cette influence est limitée puisque le médecin hippocra-

tique apporte une modification importante à la théorie


d'Alcméon.
Pour rendre compte des vues de l'auteur de VAncien-
ne médecine sur la santé et la maladie, on a invoqué plus
récemment un autre présocratique, Anaxagore'^. Effec-
tivement, les notions de «mélange» et de «séparation»
reviennent souvent dans les fragments conservés de ce

1. par exemple, M. Wellmann, «Die pseudohippokra-


Voir,
tische Schrift »..., p. 299-305.
Voir surtout G. Vlastos, C. R. de F. M. Cornford, Principium
2.
sapientiae in Gnomon, XXVII, 1955, p. 67 sq. (= n. 2 de la p. 67).
Voir aussi W. H. S. Jones, Hippocrates I, London, 1923, p. 5 et
n. 2 et Philosophy and Medicine .... p. 78 F. Heinimann, Gnomon,
;

XXIV, 1952, p. 272; J. Longrigg, «Philosophv and Medicine»,


Harvard Studies in Classical Philology, LXVII, 1963, p. 147-175 et
«[Hippocrates] .\ncient Medicine and its intellectual context» in
Formes de pensée dans la Collection hippocratique, Genève, 1983,
p. 249 sqq.
, -
DK59B12
comp. Ane. méd.,

12
c.

14
14,

c.
136,

c. 14,

16, 139,
7
...
NOTICE
philosophe, et les termes employés pour les désigner
sont les mêmes que dans ï Ancienne médecine (comp.
Ane. méd., 13

10
136, 15

16
...
[bis],

-
et

).
...
et

Anaxagore
9
Anaxagore

136,

Tout
59

21
6

13

particulièrement l'expression qui signifie qu'une subs-


tance séparée des autres «demeure à part soi» est
commune
méd., c.
'
12
au médecin et au philosophe (comp. Ane.
14, 136, 15

-
et
'
'
Anaxagore
Tous
, ).
DK 59
'
c.

6
15, 137,
'
16

deux notent que les substances sont invisibles quand


elles sont mélangées (comp. Ane. méd., c. 14, 136, 13
et Anaxagore DK 59
), 1 59 4

;
...
lorsqu'elles

même
alors
sont séparées {Ane.
Anaxagore DK59B12
cf.
qu'elles

Et de
qu'Anaxagore récuse l'existence de principes
élémentaires existant à part
deviennent manifestes
méd.,
). c. 14, 136, 15

(cf. 59 6 ' '


excepte l'esprit
cf. 59
soi, si l'on

8), de ;

même l'auteur de V Ancienne médecine récuse au c. 15,


137, 15 sq. l'existence du chaud, du froid, du sec ou de
l'humide à part soi ( ... '
).
En s'appuyant sur ces rappro-
chements et d'autres plus discutables^, on a conclu à

1. Selon G. Vlastos, C. R. de F. M. Cornford, p. 67, n. 2,

VAncienne médecine, comme Anaxagore, soutient que les multiples


qui sont dans l'homme sont aussi dans les autres choses, le
cuir, le bois, etc. (cf. c. 15). Ce rapprochement a été justement
critiqué par J. Longrigg, « Philosophy and Medicine ...», p. 160,
car le chapitre 15 de VAncienne médecine ne parle pas des éléments
constitutifs du cuir ou du bois. Un autre rapprochement fait par
G. Vlastos, ibid., p. 67, n. 2, et repris cette fois par J. Longrigg,
concerne la théorie médicale. Il note que la bile ()
est la cause
60 ANCIENNE MÉDECINE
une influence d'Anaxagore sur le médecin hippocratique
ou inversement de l'auteur de V Ancienne médecine sur le
philosophe présocratique^. Mais ici encore, comme dans
le cas d'Alcméon, il ne faudrait pas majorer la
signification des rapprochements et masquer des diffé-
rences importantes. Les rapprochements sur le vocabu-
laire du mélange et de la séparation ne sont pas très
significatifs, car on peut retrouver ce même vocabulaire
chez Empédocle qui est, pourtant, un adversaire déclaré
de l'auteur^ même le rapprochement précis sur l'ex-
;

pression ' appliquée à des éléments constitutifs


qui sont isolés des autres n'est pas aussi décisif qu'on
pourrait le croire, car cet emploi n'est pas particulier à
ces deux seuls auteurs^, mais se retrouve dans le c. 4 de
la Nature de l'homme*. Par ailleurs, ce qui fait
l'originalité de la théorie d'Anaxagore, à savoir l'isole-
ment de l'esprit qui domine le reste et l'organise, est
étranger à VAncienne médecine. Enfin, il n'est pas très
heureux de vouloir rechercher une relation trop étroite

des maladies aiguës chez Anaxagore (DK 59 A 105 = Aristote,


Parties des animaux 677 a que cela concorde avec VAncienne
5) et
médecine qui ne mentionne jamais le phlegme, mais seulement (une
fois) la bile jaune (c. 19, 144, 12 ).
En fait, l'auteur de
VAncienne médecine n'a jamais prétendu que la bile était la seule
cause des maladies aiguës. C'est une humeur parmi d'autres. Par
exemple les péripneumonies, qui appartiennent à la série des
maladies aiguës (cf. par ex. Régime des maladies aiguës, c. 2,
Littré II, 232, 6 sq. = Joly c. 5, 37, 22), sont attribuées dans
VAncienne médecine à un flux d'humeurs salées et acres, bien
distinctes de l'humeur amère qu'est la bile jaune. Le rapproche-
ment n'est donc pas convaincant.
1. G. Vlastos, C. R. de F. M. Cornford, p. 67, n. 2, conclut à une

; .
influence du philosophe sur le médecin; en revanche J. Longrigg,
«Philosophy and Medicine ...», p. 161 sqq. et «[Hippocrates]
Ancient Medicine ...», p. 252 sqq., croit à l'influence inverse.

. 1 : ;
2. Pour le mélange des éléments, voir par exemple Empédocle
DK 31 35, . 7 et 16 :

pour la séparation, voir


3. Contrairement à
8, . 3
9, . 4 :

ce que pense G. Vlastos, C. R. de


F. M. Cornford..., p. 67, n. 2.
: 9,

4. Voir supra, p. 56, n. 1.


NOTICE 61

entre deux auteurs qui ont des vues si différentes sur la


méthode à suivre pour connaître la nature humaine^
Pour expliquer les phénomènes internes de la santé
ou de la maladie, l'auteur de V Ancienne médecine ne s'en
tient pas aux seules notions de mélange, de crase, ou de
séparation utilisées au c. 14. Il introduit, à partir du
c. 18, les notions supplémentaires de coction (adjectif :

c. 18, 142, 18 et c. 19, 143, 20;


substantif c. 18, 143, 3; verbe

[];
143,
[];
:

c. 19, 143, 13
c. 18,

c. 19, 143, 14 []
[]
:

[] C ; cf.
19,
aussi
145,
le
3
verbe
; c.

au
19,
c.
145,
19, 143, 15
15

et le verbe en c. 19, 145, 9


de coction (c. 19, 144, 17
ou d'absence
Un flux d'humeur est
morbifique tant qu'il n'est pas cuit; au contraire, la
). [])

; ...
coction de ce flux d'humeur marque la fin de la maladie.
Cette coction se manifeste par l'épaississement du flux
(cf.

...
c. 18, 142, 17 sq.
20 c. 19, 143,
Cet approfondissement dans l'explication de la santé
; c. 19,

). 143, 13

et de la maladie ne signifie pas que les notions nouvelles


de coction ou d'absence de coction se substituent à
celles de mélange ou de séparation. Bien au contraire,

, ).
l'auteur de VAncienne médecine, à partir du moment où
il les

143, 14 sq.
144, 17
introduit,
mélange ou de séparation
;

...
c.
les

18, 143,

des humeurs sont deux processus qui aboutissent au


allie

5 sq.
constamment
(c.

Car
18,

la
142,

coction et
18
à

le
celles

;
c.

c
mélange
de

19,
19,

même résultat, à la diminution de la trop forte

)2.
de l'humeur (cf. c.

Et
18, 142, 17 sq.
ces deux processus internes de
...

1. Anaxagore fait partiedes auteurs à tendance philosophique


critiqués par le c. 20 de VAncienne médecine.
2. Ces deux processus qui sont d'ordinaire sur le même plan,
sont subordonnés dans la définition de la coction du c. 19, 143,
62 ANCIENNE MÉDECINE
coction et de mélange des humeurs sont comparables
aux deux pratiques externes opérées sur les aliments et
les boissons par ceux qui ont inventé le régime des gens
en santé ou celui des malades, à savoir la cuisson et le
mélangea L'une des caractéristiques de VAncienne
médecine est d'avoir combiné systématiquement ces
deux modèles d'explication de la santé et de la
maladie^, alors que les autres traités de la Collection
hippocralique privilégient l'un ou l'autre de ces deux
types d'explication ou les associent moins fréquem-
ment. C'est ainsi que dans la Nature de l'homme, le
modèle d'explication par le mélange ou l'absence de
mélange est le seul allégué pour expliquer la santé et la
maladie à aucun moment n'apparaît dans ce traité le
;

vocabulaire caractéristique de la coction des humeurs^.


En revanche, dans le groupe formé par les livres
Épidémies et les traités qui leur sont apparentés, le
vocabulaire de la coction est riche, et la notion y joue
un rôle dans l'évolution des maladies*; quant à la

14 sq. : «La coction provient du mélange et de la crase des


flux entre eux, ainsi que de leur cuisson en commun». La
cohérence d'ensemble de la pensée n'exclut pas une certaine
souplesse dans le détail.

\. Toutefois le vocabulaire de la cuisson et de la coction n'est

pas totalement identique. Si le verbe (ou son composé -)


appartient au.x deux registres, le verbe n'est employé que
pour la cuisson (des aliments) et le verbe seulement pour la

.
coction (des humeurs) ou la digestion (des aliments).
2. Ancienne médecine présente aussi une certaine originalité
dans le vocabulaire de la coction, dans la mesure où il emploie le
verbe (5 fois), là où les autres emploient plutôt
Le verbe est d'ordinaire réservé à la

digestion des aliments. Comp. toutefois en Régime dans


les maladies aiguës, c. 11, Littré II, 312, 5 (= Joly c. 42, 54, 3) à
propos de la coction d'une maladie.
3. Les seuls emplois de et de que l'on ait dans
Nai. hom. (c. 22 [=Hég. sai 7], Littré VI, 82,14 et 16, 84,9 =
Jouanna 216, 10 et 13, 218, 7) concernent la digestion des aliments.
4. Ce groupe est formé des Épidémies et de huit traités
{Humeurs, Pronostic, Prorrtiétique I. Prorrhélique II. Prénolions
coaques, Aphorismes, Régime dans les maladies aiguës et Appen-
NOTICE 63

notion de mélange (ou d'absence de mélange), elle existe


aussi dans ce groupe, mais elle est rarement associée à
cellede coction (ou d'absence de coction)^
Les théories du traité sur la santé et la maladie sont
donc plus complexes que celles de ses adversaires;
néanmoins, elles apparaissent à l'historien des sciences
aussi spéculatives que les leurs^.

IV. PLACE DE L'ANCIENNE MÉDECINE


DANS LA COLLECTION HIPPOCRATIQUE :

relations entre V Ancienne médecine


et le Régime dans les maladies aiguës

De tous les rapports que l'on peut établir entre


V Ancienne médecine et d'autres traités de la Collection
hippocratique le plus étroit et le plus indéniable est celui
qui l'unit au traité du Régime dans les maladies aiguës.
La connexion entre ces deux traités a paru si grande à
É. Littré (tome 314-320) qu'il y a vu la preuve
I, p.
d'une identité d'auteur (cf. p. 318 «C'est le même
homme qui a écrit les traités de VAncienne médecine et
du Régime des maladies aiguës»). Depuis Littré, les
choses sont devenues plus complexes, car les rapproche-
ments portent non seulement sur la première partie du
Régime dans les maladies aiguës (= RMA I) mais aussi
sur V Appendice (RMA II) qui n'est pas nécessairement
du même auteur que la première partie^. On ne croit

dice). Ce qui caractérise ce groupe pour le vocabulaire de la


coction, c'est l'emploi du substantif

1.Voir toutefois Épidémies


Kuehlewein
,
I, 242, 26 (à propos des selles)

«déjections bilieuses, sans mélange, crues».


,,
attesté douze fois,
alors qu'il est absent du reste de la Collection hippocratique.
17, 13, Littré III, 140, 1

2. Voir G. E. R. Lloyd, Magic, Reason ..., p. 149.


3. Sur la question d'auteur dans RMA I et RMA II, voir
=

R. Joly, Hippocrate VI, 2. Du régime des maladies aiguës,


Appendice ..., C\JF, Pans, 1972, p. 1 1-13 J. Jouanna, «Le problè-
;
64 ANCIENNE MÉDECINE
plus à l'identité d'auteur entre VAncienne médecine et le
Régime dans les maladies aiguës depuis que des analyses
plus fines du vocabulaire ont été faites, et d'autres
hypothèses ont été avancées pour expliquer ces rappro-
chements^ Mais les rapprochements sont indéniables et
certains ne peuvent pas être dus au hasard. Voyons
donc d'abord les faits.
Entre Ancienne médecine et BMA /, il existe deux
développements parallèles. Ils ont pour objet de décrire
les troubles dus à un changement de régime, d'une part
chez les gens qui, ayant l'habitude de prendre un seul
repas par jour, passent à deux repas, et inversement
chez ceux qui ne prennent qu'un seul repas, alors qu'ils
sont habitués à en prendre deux. Comme ces deux
sortes de troubles sont également décrits dans RMA II,
on est donc en présence de trois rédactions parallèles sur
ces deux changements opposés de régime. Voici les
textes présentés côte à côte :

I. Passage d'un repas à deux repas :

DESCRIPTION DES TROUBLES

A =
Anc. méd. c. \0, = RV/.1 / c. 9, Lit- C = fiMA II c. 18,
130,9-14. tré II, 282, 10 sqq. Littré II, 478, 5 sqq.
(=Jolv

, ,
(=Jolv c. 28, 48, c. 42, 87,

(a)

,--
, -
7

(a)
sqq.)^.

, 23
(a)
sqq.).

--
3 : . 1 \ Gai. : om.
MV II
2 A"'
Gai : A? M
V.

me de l'unité du Régime dans les maladies aiguës», in R. Joly,


Corpus Hippocraticum (Colloque de Mons 1975). Mons, 1977,
p. 291-312 et .\. Thivel, «La composition de VAppendice RMA », in
M. Grmek/F. Robert, Hippocratica (Colloque hippocratique de
Paris 1978), Paris, 1980, p. 449-467; voir aussi II.-D. Kunstmann,
Die Diàl bei akulen Krankheiten. Eine Untersuchung ziveier
Schriflen des Corpus Hippocraticum. Diss. med. Hamburg, 1976.
1. Voir infra, p. 71 sqq.
NOTICE 65

• -
, .- .,

,
(b)
"

- (b)

'
- (b)

.-

.
4

recte.
MV
Gai.
fortasse
:

II. Passage de deux repas à un seul repas


DESCRIPTION DES TROUBLES

A = Ane. méd. c. 10, B = RMA C. 9, c =

130, 16-131, 4. Littré 11,288, 3 sqq.


(=Joly c. 30, 49,

,
1 sqq.).

,
- -
(a)

-
,, , (a)

, - ,,
, ,

...

'

,
, ,- .-
*

.
'
66 ANCIENNE MÉDECINE
(b) ...

, ,- -- (b) -
- (b)

. -,
/- - •

. -
-
-
, -
-
. -
22
.
: -
Entre ces trois versions (A, B, C), qui décrivent les
symptômes malaises dans les deux exemples
des
opposés d'un changement de régime contraire à
(I-II)
l'habitude, il existe des ressemblances aussi bien dans la
structure que dans le contenu et dans l'expression. En
ce qui concerne d'abord ladeux exemples
structure, les
sont construits de la même
manière dans les trois
versions. Dans le premier exemple, c'est-à-dire chez les
individus qui sont au régime habituel d'un seul repas
par jour, le repas du soir, on envisage d'abord les
troubles s'ils déjeunent à midi contre leur habitude
(I A a I B a I C a) puis on décrit les troubles si, après

).
; ; ;

cela, ils dînent (I Ab, I Bb, I Cb, avec la présence,


dans les trois versions, de []
De même,
dans le cas inverse des individus qui, eux, sont habitués
à déjeuner à midi, c'est-à-dire qui sont au régime de
deux repas, on expose d'abord les troubles s'ils ne
déjeunent pas (II A a, II Ba, II Ca, avec la présence,

),
dans deux versions sur trois, de ...

dans
puis les troubles supplémentaires occasion-
nés par le dîner (II A b, II B b, II C b avec la présence,
les trois versions, de
vel

uel ).
NOTICE 67

Dans le contenu et l'expression, de nombreux


symptômes sont parallèles. Ils sont parfois attestés dans
les trois versions à la fois (ainsi la diarrhée en I Ab,
I Bb et Cb ou l'urine chaude et la bouche amère en
I

II A a, II aet II Ca). Mais assez souvent, ils ne se


rencontrent que dans deux versions sur trois ces deux ;

versions sont tantôt Ane. méd. et RM


A I (ainsi en I Aa
et en a en II A a
et en II a
...

... en II A a
;

...
),
et en II a
en 1 1 b;
et en
tantôt Ane. méd. et RMA II (ainsi

-
II b
en I A a
II
II
Ca
Ba
), et I C a en II A a
tantôt enfin
et II
RMA
Ca
et ;

I et RMA II (en

). examine maintenant le rôle et la place de ces


Si l'on
trois dans chacune des séquences où elles
versions
s'insèrent, on constate des ressemblances qui peuvent
unir soit les trois versions soit surtout deux versions
sur trois. Dans les trois versions, on dénonce le danger
d'un changement de régime contraire à l'habitude. La
notion d'habitude est présente dans
et le

;
même

I B a
participe parfait
habitué» apparaît dans chacune d'elles

). Toutefois, dans
et 1 1

la
a
(II Aa

version de V Ancienne
-
les trois versions,
au sens d'«être

; Ca

médeeine, cette notion d'habitude est subordonnée à


celle d'intérêt. Alors que dans les versions de I et RMA
RMA II, les maux décrits affectent, lors d'un change-
ment de régime contraire à l'habitude, tous les gens
sans distinction, dans V Ancienne médecine, en revanche,
ils n'affectent qu'une catégorie, uniquement ceux qui

«ont intérêt» à suivre ce régime habituel


et II Aa ), ceux
dont la santé exige un tel régime. Or, selon l'auteur
c'est-à-dire
(cf. lAa

d'Ancienne médecine, il s'agit d'une minorité, car pour


la majorité des gens (cf. c. 10, 130, 3 ... ).
68 ANCIENNE MÉDECINE
iln'importe pas de s'en tenir à une habitude plus qu'à
une autre. La notion d'habitude a donc un rôle moins
déterminant dans V Ancienne médecine que dans les deux
autres versions. Du reste, la finalité du développement
dans l'Ancienne médecine n'est pas centrée sur la notion
d'habitude comme c'est le cas dans les deux autres
versions. Alors que, dans BMA I et BMA II, il s'agit
de montrer le rôle néfaste d'un changement d'habitude,
dans V Ancienne médecine le propos est d'établir que la
vacuité n'est pas moins nocive que la pléthore.
Le développement qui fait suite à la description des
symptômes dans chacune des trois versions révèle une
nouvelle différence entre V Ancienne médecine et les deux
autres versions. Dans I et RMA RMA
II, la sémiologie

de chacun des deux changements de régime est suivie


de la thérapeutique^; V Ancienne médecine ne donne pas
les prescriptions thérapeutiques, mais présente un
développement sur l'étiologie qui est absent de I RMA
et RMA IP.
Ainsi, lorsqu'on examine la place et le rôle du
développement sémiologique dans les trois versions,
l'accord de deux versions sur trois a lieu surtout entre
RMA I et RMA II contre Ancienne médecine. Cepen-
dant la complexité des relations entre ces trois versions
se vérifie ici également, car l'accord peut avoir lieu
entre Ancienne médecine et I contre RMA II. RMA
Alors que dans RMA
II l'ensemble formé par la
sémiologie et la thérapeutique constitue un tout qui se
suffit lui-même, dans V Ancienne médecine et dans
à
RMA ensemble, qu'il comprenne la sémiologie et
I cet
la thérapeutique (RMA I) ou la sémiologie et l'étiologie

(Ancienne médecine), s'insère dans une argumentation

1. RMA I c. 9, Littré II, 284, 6 sq. (= Joly c. 29, 48, 14 sq.)


... et c. 9, Littré II, 294,
(=
1-3 Joly c. 33, 49, 21 sq.) Tôv

478, 9 (= Joly c. 42, 88, 1)


; RMA .
'
II C. 18, Littré
II,
Littré II, 482, 5 (= Joly c. 44, 89,
2. Ane. méd., c. 11, 131, 11 sqq.
1) . et c. 18,
.

NOTICE 69

qui prend le régime des gens en santé comme point de

comparaison pour montrer les dangers à éviter dans le


régime des malades (comp. Ane. méd., c. 10, 129, 16 sq.

et
22

ne,
RM
sq.)

comme
C. 9,

) Littré II, 280, 8 sq.

Ainsi dans V Ancienne médeci-


.

dans RMA I, l'exposé parallèle sur les maux


causés par un écart de régime chez les gens en santé
n'est pas une fin, mais un moyen dans un raisonnement
(= Joly
)
c. 28, 47,

a fortiori.
Unsecond parallélisme a été signalé, depuis Littré,
entre V Ancienne médecine et I il porte sur RMA :

l'attention que l'on doit accorder aux différentes façons


de préparer les aliments et notamment le pain de blé ou
la galette d'orge, dans la mesure où ces différentes
préparations modifient différemment l'état du corps et
ont donc une incidence sur la santé et la maladie.

Ane. méd. c. 14, 135, 1- RM C. 10, Littré II,

11. 298, 10sqq.(= Joly C.37,


51, 2 sqq.).

... ...-

-
-
-
,
-
,. - <>

*
'
-

- ...
. .

- .
.
70 ANCIENNE MÉDECINE
Dans deux passages, l'idée fondamentale est la
les
même corps de l'homme est différemment modifié
le

, ()
:

par les différentes préparations du pain de blé


().
),,
et de la galette d'orge Certaines expressions sont

)
). ,
parallèles, qu'elles soient relatives à la modification du
corps {Ane. méd.

RMA I
I
différence des effets des aliments {Ane. méd.
à la

ou aux variétés de pain {Ane. méd.

que ce thème est exploité


II est vrai
différemment dans chacun des deux traités. RMA I
RMA
RMA

l'utilise dans son développement sur les effets néfastes

)
d'un changement de régime contraire à l'habitude (cf.
c'est donc un argument qui a le même rôle
;

que l'exemple des repas. Dans VAncienne médecine au


contraire, les deux exemples appartiennent à deux
parties différentes du traité. Alors que l'exemple du
changement de régime dans les repas s'insérait dans le
développement sur les dangers de la vacuité qui ne sont
pas moins grands que ceux de la pléthore, le thème de
l'importance des différentes préparations du pain ou de
l'orge est introduit lors de la reprise de la polémique
contre les adversaires qui, eux, n'accordent de l'impor-
tance qu'au chaud, au froid, au sec ou à l'humide.
Malgré une utilisation assez différente dans les deux
traités, l'idée reste comparable.
Voilà donc les principaux points de rencontre entre
VAncienne médecine et le Régime dans les maladies
aiguës I et 11^. Pour rendre compte de ces rapproche-

1. Littré (I, p. 317 sq.) rapproche aussi Ane. méd. c. 8, 126,


20 sqq. :

RMA
. ,
et c. 12, Littré II, 320,
6-8 = Joly c. 46, 56, 4 sq.
Festugière .
41 (. 40) ajoute plusieurs
autres rapprochements, surtout Ane. méd. c. 9, 128, 15
/.4
,
et /
'
c. 2, Littré II, 232, 3 sqq. (= Joly
...
c. 5, 37, 18 sqq.) :
NOTICE 71

ments, les érudits ont avancé des explications divergen-


tes, bien qu'ils s'accordent à penser que ces rapproche-
ments sont trop précis pour être attribués au hasard.
Littré, nous l'avons dit, a conclu à l'identité d'auteur.
Selon lui, qu'on remarque dans
«les légères différences
les mots prouvent que c'est non pas un homme qui en
copie un autre, mais un auteur qui reproduit, avec toute
liberté de rédaction, une pensée qui lui appartient»
(tome I, p. 316). Il croyait même pouvoir établir une
chronologie relative entre les deux traités. L'Ancienne
médecine serait antérieure au Régime dans les maladies
aiguës, car l'annonce d'un développement faite dans le
premier traité {Ane. méd. c. 12, 132, 17 sq.,
«dont il sera question») trouverait sa réalisa-
tion dans le second {RM A I cil, Littré II, 314,
12 sqq. [= Joly c. 43, 54, 18-22]). Plus généralement, il
considère que «le livre du Régime dans les maladies
aiguës est véritablement une application de la grande
pensée qui domine tout le livre de VAncienne médecine,
et qui est que, pour devenir savant dans la science de la
vie, il importe, non pas d'étudier le corps en soi et
d'après une hypothèse telle quelle, mais de rechercher
tous les rapports qu'il a avec les choses qui l'entourent».
Il semble toutefois que Littré ait changé d'avis, car,

dans son tome II (p. 198), il présente l'évolution inverse


lorsqu'il déclare «Le traité Du régime dans les maladies
:

aiguës repose sur une doctrine que Hippocrate, plus


tard selon moi, développa dans le livre de VAncienne
médecine»^. Mais cette explication par l'identité d'au-
teur est aujourd'hui sujette à caution, car une étude
comparative du vocabulaire des deux œuvres aboutit à

; Ane. méd. c. 20, 146, 11 sq.


et FMA c 2, Littré II, 230,
1 sq. (= Joly
. c. 4, 37, 11 sq.) : Se ...
1. Ce qui est singulier c'est que Littré ne fait nullement
allusion dans son tome II à sa première position soutenue dans le
tome I.
72 ANCIENNE MÉDECINE
trop de divergences pour qu'on puisse les attribuer à un
même auteur^. J'ajouterai un argument tiré de la
comparaison des deux passages parallèles sur le pain de
blé et la galette d'orge. Lorsque le RMA I énumère les
différentes préparations,
(), «sec» (, cf. aussi ),
il emploie les adjectifs «chaud»

(), ce que V Ancienne médecine évite par-dessus tout,


«humide»

puisqu'il veut justement montrer que les qualités


élémentaires, chaud, froid, sec, humide, n'ont pas
l'importance que veulent leur accorder les adversaires
qu'il est en train de réfuter. Ce qui fait donc la grande
originalité de V Ancienne médecine ne réapparaît pas
dans le BMA I.

Si l'on les trois œuvres sont écrites


admet donc que
par trois auteurs différents, on expliquera les parallé-
lismes, soit par une influence directe des œuvres les
unes sur les autres, soit par l'existence d'un modèle
commun. Alors que Th. Gomperz*, reprenant la posi-
tion de Littré dans son tome I, pense que le traité de
VAncienne médecine est antérieur au Régime dans les
maladies aiguës, H. Diller, signalant la position de
Littré dans son tome II, explique les parallélismes par
une influence directe de HMA I et de RMA II, déjà
réunis, sur VAncienne médecine^. Ainsi s'expliquerait le
fait que VAncienne médecine présente des expressions
parallèles tantôt avec RMA I, tantôt avec RMA II.
L'auteur de VAncienne médecine aurait donc fait œuvre

Th. Gomperz, «Die hippokratische Frage und der .Ausgangs-


1.

punkt ihrer Lôsung», Philologus, Neue Folge, XXIV, 191 1 p. 225- ,

226, notait déjà des différences de vocabulaire, en particulier la


fréquence de dans RMAet son absence dans Ane. méd. La
comparaison d'ensemble a été faite par I. M. Lonie, «The
Hippocratic Treatise
1965, p. 50-79, en particulier p. 60, n. 1.
»,
Sudhoffs .Archiv, XLIX,

ippocrateo
(= Kleine
8
2. Th. Gomperz, «Die hippokratische Frage...». p. 225.
3. H. Diller, C. R. de R. Rlum, La composizione dello scritto
in Gnomon XIV,
Schriflen zur antiken Medizin ..., p. 174
1938,
sq.).
p. 302
NOTICE 73

de contamination. Cette position de H. Diller a été


assez largement suivie^. L'explication par la conta-
mination ne serait vraiment satisfaisante que si l'exposé
sémiologique dans VAncienne médecine se réduisait à
l'addition des symptômes donnés par BMA I et
BMA II, ce qui n'est pas le cas. Des symptômes que
présentent à la fois I et BMA II ne se retrouvent
BMA
pas dans VAncienne médecine, tandis que VAncienne
médecine donne des symptômes qui n'apparaissent ni
dans BMA I ni dans BMA
II. Aussi l'hypothèse d'un

modèle commun, proposée pour la première fois par


M. Wellmann^, ne saurait être écartée. La variété des
relations entre les trois versions qui offrent tous les
types d'accord possibles (accord de AB contre C, de
AC contre et de BC contre A) plaide plutôt en faveur
de cette hypothèse^. Il est possible que ce modèle
commun, qu'il est vain de vouloir déterminer*, soit un
lieu classique de la médecine grecque transmis d'abord
oralement, ce qui expliquerait la diversité des variantes
d'une version à l'autre. En tout état de cause, il n'est

1. Voir, par exemple, R. Joly, Hippocrate VI, 2. Du régime des

maladies aiguës, Appendice ..., p. 13 sq. et p. 23, et surtout V. di


Benedetto, qui a réexaminé en détail les parallélismes entre
RM A I et Ancienne médecine, et conclut également à une influence
directe de FMA sur VAncienne médecine dans un article dont le
titre est révélateur de sa thèse (« 1! debito deli' Antica medicina nei
confronti del Régime délie malaltie acute», Sludi classici e orienlali,
XIX-XX, 1970-1971, p. 430-441 voir aussi Ch. Lichtenthaeler,
;

Chronologische und gedankliche Rezugssysleme in und um « Uber die


aile Medizin», XI. Hippokratische Studie, Genève, 1980, p. 12-14,
selon qui l'auteur de VAncienne médecine a lu «sans aucun doute»
(p. 13) le traité du Régime dans les maladies aiguës et d'autres
traités que l'on attribue à l'école de Cos.
2. M. Wellmann, «Die pseudo-hippokratische Schrift
»..., p. 305.
Voir déjà J. Jouanna, «Le problème de l'unité du traité du

»
3.
Régime dans les maladies aiguës»..., p. 311, n. 72.
4. M. Wellmann («Die pseudo-hippokratische Schrift

'.
..., p. 305) pensait notamment à un traité perdu

de la Collection hippocralique,
74 ANCIENNE MÉDECINE
pas prudent de s'appuyer sur la seule comparaison de
ces trois versions pour en tirer une chronologie relative
de ces trois traités^. La possibilité de l'existence d'un
modèle commun perdu ainsi que l'existence d'opinions
contradictoires (même chez un seul auteur comme
Littré !) sur les relations entre les traités ôtent toute
certitude aux conclusions d'ordre chronologique que
l'on voudrait tirer de l'utilisation directe d'un traité
par l'autre^.

V. L'ANCIENNE MÉDECINE ET PLATON

Le de VAncienne médecine est, de tous les


traité
traités de la Collection hippocratique, celui dont les
relations avec Platon ont été le plus étudiées et le plus
discutées. Les discussions portent d'abord sur la
question de savoir si VAncienne médecine, qui offre des
rapprochements possibles avec d'autres traités de
Platon depuis le Gorgias jusqu'aux Lois en passant par
le Philèbe, n'a pas subi l'influence de la philosophie

attique de Platon. Elles portent ensuite et surtout sur le


passage du Phèdre qui fait allusion à la méthode
d'Hippocrate VAncienne médecine est-il le traité au-
:

quel Platon fait allusion, comme Littré pensait l'avoir


démontré? Sur la première question un consensus
semble maintenant s'établir alors que sur la seconde les
avis restent divergents.

L'auteur
L'hypothèse selon laquelle VAn-
de /'Ancienne médecine médecine serait un traité
cienne
a-t-U connu postérieur à Platon a déjà été
l'ctuvre de Platon ? > r-i
soutenue au xix" siècle par Erme-
i

rins^; mais c'est au milieu du xx^ siècle que la question

Pour le problème de la date du traité, voir infra, p. 84 sq.


1.

Voir la position prudente de W. H. S. Jones, Philosophy and


2.
Medicine ..., p. 96-98 (plutôt influence de RMA
sur Ane. méd., mais
l'influence inverse est possible).
3. F. Z. Ermerins, t. II, Prolegomena. p. xxviii sqq. ; voir aussi
NOTICE 75

a été reprise. Dans un article de 1952 qui a fait date,


H. Diller^ a examiné avec la plus grande acribie tous les
rapports possibles entre ÏAncienne médecine et les
divers dialogues de Platon et il en a tiré la conclusion
que les rapprochements ne s'expliquent pas, comme on
le pensait généralement jusque-là, par une influence de

la médecine hippocratique sur Platon, mais inverse-

ment par une connaissance des dialogues de Platon,


même de dialogues tardifs tels que le Philèbe. En
particulier, selon lui, les conceptions de l'auteur de
(), ()
le postulat ()
V Ancienne médecine sur l'art la méthode

supposent la connaissance directe


et

de la réflexion rationnelle et spéculative de Platon sur le


savoir et sa transposition dans le domaine empirique, ce
qui explique à la fois les ressemblances avec la
terminologie platonicienne et la différence des contextes
d'emploi. Cette position était fort différente de celle de
A.-J. Festugière qui, quelques années auparavant, da-
tait le traité des années 430-420 (ou 440-430) et ne
pensait pas que les expressions du traité que l'on
retrouve chez Platon présupposent déjà tout le système
de Platon^. La thèse de H. Diller n'a pas convaincu.
Elle a été critiquée notamment par J.-H. Kuhn et par
H. Herter^. Revenant vingt ans plus tard sur sa thèse

F. Poschenrieder, Die platonischen Dialoge in ihrem Verhaltnisse zu


den hippokratischen Schriften, Landshut, 1882, p. 37, n. 5.
1. H. Diller, « Hippokratische Medizin...», p. 385-409 {= Klei-

ne Schriften zur antiken Medizin..., p. 46-70).

l'usage qui est fait ici de ,


2. Festugière, p. 60 (pour la date) et notamment p. 52 (pour les
rapports avec Platon) «Je ne vois donc pas, pour conclure, que
:

'
présuppose déjà tout le système de Platon».
3. J.-H.
de et de

Kuhn, System- und Methodenprobleme im Corpus


hippocraticum ..., p. 46-56 (5. Die Frage der Fruh- oder Spàtab-
fassung); H. Herter, «Die Treffkunst des Arztes in hippokra-
tischer und platonischer Sicht...», p. 262 sqq. La thèse de
H. Diller a pratiquement fait l'unanimité contre elle. Voir aussi
H. W. Miller, «Technê and Discovery in On Ancient Medicine»,
T.A.Ph.A., LXXXVI, 1955, p. 52, n. 7 et surtout F. Heinimann,
«Eine vorplatonische Théorie der », Muséum Helveticum,
76 ANCIENNE MÉDECINE
dans une communication au Colloque de Strabourg de
1972^, H. Diller prenait en compte les critiques faites
par ces deux érudits et abandonnait ce qu'il y avait
d'excessif dans sa position, en particulier l'idée que
VAncienne médecine suppose nécessairement la connais-
sance des œuvres tardives de Platon telles que le
Philèbe, mais il maintenait le traité dans l'ambiance
intellectuelle qui va de la sophistique à la pensée
attique du iv siècle. Les points de vue se rapprochent
même s'il reste encore un écart entre ceux qui situent le
traité de VAncienne médecine avant l'œuvre de Platon
et ceux qui le placent au moment des premiers
dialogues de Platon.

La conception de l'art médical

de l'art de la rhétorique et de la
politique dans Gorgias présente des analogies avec
le

celle de l'auteur de VAncienne médecine aussi bien dans


les buts recherchés que dans la méthode utilisée.
L'art médical, selon Platon, ne vise pas à satisfaire le

plaisir () du malade mais à servir son intérêt^. De


manière analogue dans VAncienne médecine l'art médi-
cal, dans la mesure où il impose un régime restrictif au
malade, pour lui rendre la santé ne va pas dans le sens
de son plaisir ou de son désir (c. 5, 124, 7 sq.)^.
L'analogie la plus profonde porte sur le lien qui existe
entre la notion de cause et celle d'art. Le véritable art
médical, selon l'auteur de VAncienne médecine, consiste
à déterminer la cause (c. 20, 147, 3 des effets )

XVIII, 1961, p. 112 et n. 32; J. de Romilly, «Thucydide et l'idée


de progrès...», p. 147, n. 13; L. Edelstein, The Idea of Progress ...,

p. 37, n. 1.
1. «Das Seibstverstàndnis der griechischen Medizin»...,
p. 92 sq.
Gorgias 464 c-e; 500e -501 a; 521 d- 522c.
2.

( ).
3. Voir aussi en c. 14, 137, 5 la condamnation implicite des
aliments proposés pour le plaisir
NOTICE 77

néfastes du régime sur la nature de l'homme ; de même,


selon Platon, la médecine est un art dans la mesure où

le

(501 a )
médecin connaît la nature du malade et la cause
des prescriptions thérapeutiques.
Mais deux auteurs divergent aussi sur deux points
les
essentiels. Platon, dans le Gorgias, établit pour la
première fois une distinction entre et
entre l'art fondé en raison et l'expérience routinière^
Une telle distinction n'est pas connue de l'auteur de
,
VAncienne médecine, pour qui le savoir technique est
indissociable de l'expérience, et l'absence d'expérience
est synonyme de hasard (cf. c. 1, 118, 13 sq.
Sa position, sur ce point, est
... ...).

fondamentalement identique à celle de Polos, le disciple


de Gorgias que critique Platon^. N'est-ce pas le signe
que le traité de VAncienne médecine est antérieur au
Gorgias"! Enfin Platon et l'auteur de VAncienne médeci-
ne s'opposent sur les relations entre la cuisine et la
médecine. Alors que le médecin hippocratique s'efforce
de montrer les analogies qu'il y a entre le régime des
gens en santé et le régime des malades dans le but visé
(maintien ou rétablissement de la santé) et dans la
méthode employée (mélange et coction des aliments
pour adapter le régime à la nature de l'homme en santé
ou à l'état du malade), le philosophe établit une
différence radicale de nature entre la médecine qui est
un art visant au bien du corps et la cuisine qui est une
routine au service du plaisir (Gorgf /as 464 d-465b). 11
semble donc que Platon construit dans le Gorgias une
opposition que ne connaissait pas encore l'auteur de
VAncienne médecine.

L'Ancienne médecine ^^ témoignage le plus ancien sur


et la méthode d'Hippocrate \a méthode d'Hippocrate est le
dans k Phèdre Phèdre de Platon. Dans un dia-
logue entre Socrate et Phèdre, Platon voulant définir

1. Gorgias 465 a.
2. Gorgias 448 c.
78 ANCIENNE MÉDECINE
un art véritable de la rhétorique prend l'art de la

médecine comme modèle


pour le définir et fait allusion
à la méthode d'Hippocrate sur la connaissance de la
nature du corps (270 c-d). Depuis l'Antiquité, on a
essayé de déterminer l'ouvrage de la Collection hippo-
cratique où pouvait se trouver cette méthode, afin
d'apporter quelques lumières sur la question hippo-
cratique. Galien pensait qu'il s'agissait du traité de la
Nature de l'homme^. Littré dans une longue analyse
parue dans son tome I (1839, p. 295-314) critique la
position de Galien et pense avoir démontré que Platon
fait allusion au c. 20 de VAncienne médecine^. Aussi
place-t-il le traité de VAncienne médecine en tête de sa
première classe des écrits hippocratiques, c'est-à-dire
des livres qui sont d'Hippocrate lui-même. Au contrai-
re, selon A.-J. Festugière, dans son édition de VAncien-

ne médecine (p. 63), la méthode d'Hippocrate dans le


Phèdre, loin de faire allusion au c. 20, «est exactement
à l'opposé de celle que préconise» VAncienne médecine
et «s'accorde bien plutôt avec celle des novateurs
critiqués» par l'auteur^. Deux positions aussi radica-

1. Galien, Galeni In Hippocratis De natura hominis commen-


taria tria, éd. Mewaldt (CMC V 9, 1), p. 8,31 -9, 11.
Littré était certain d'avoir découvert une vérité importante
2.
(tome I, p. 295) «Or, j'ai découvert, je pense, en faveur du traité
:

de VAncienne médecine, un de ces témoignages décisifs qui, une


fois reconnus, ne laissent plus de place pour aucun doute :c'est
celui de Platon». Littré est revenu sur cette question dans d'autres
tomes de son édition où il renforce plus nettement que dans le
tome I ce témoignage extrinsèque sur l'authenticité de VAncienne
médecine par un témoignage intrinsèque, celui des rapports entre
VAncienne médecine et le Régime dans les maladies aiguës; voir
tome II, p. 214 («De la sorte, ce qui est certifié par les témoigna-
ges extrinsèques est confirmé par les témoignages intrinsèques ;

et rien ne peut plus ébranler, je pense, la croyance à leur


authenticité» et surtout tome IV, p. 657-658 (n. 1 de la p. 656)
où, selon la formule de \. Diès {Autour de Platon, Paris, 1926,
p. 37), «le passage de Platon n'est plus, s'il l'a jamais été, le pivot
de la critique littréenne».
3. Le ton de Festugière n'est pas moins péremptoire que celui
de Littré «Maintenant, si on lit sans préjugé le morceau du
:
NOTICE 79

lement opposées sont symboliques des innombrables


discussions variées et contradictoires qui ont eu lieu et
qui auront lieu sur l'utilisation du Phèdre dans l'étude
de VAncienne médecine, pour me borner à cet aspect
particulier de la question hippocratique^. L'existence

Phèdre, à partir de 269 d 2 qui marque le début de la section sur la


rhétorique philosophique et ses conditions, on ne peut pas ne pas
constater que la méthode que recommande Socrate est exacte-
ment à l'opposé de celle que préconise V. M., et qu'en revanche
cette méthode s'accorde bien plutôt avec celle des novateurs
critiqués en V. M.».
1. Sur cette question, on trouvera une bonne mise au point

bibliographique dans A. Hellwig, Uniersuchungen zur Théorie der


Rhelorik bei Platon und Aristoteles, in Hypomnemata, 38, Gôttin-
gen, 1973, p. 182 et n. 14 a.
Pour la catégorie d'interprètes qui voient une relation entre
la méthode de VAncienne médecine et le passage du Phèdre, outre
Littré, voir par exemple Th. Gomperz, « Die hippokratische Frage
und der Ausgangspunkt ihrer Losung», N.F. XXIV, 1911, p. 213-
241 (cf. p. 219 « Dass Platon im 'Phaedros' unter Hippokrates

eben den Verfasser des Bûches Von der alten Medicin ver-
' '

standen bat, daran scheint uns ein Zweifel nicht gestattet»);


F. E. Kind, « Bericht uber die Literatur zur antiken Medizin 1911-
1917», Jahresberichl ûber die Fortschritte der klassischen Altertums-
CLXXX, 1919, p. 6-8 (cf. p. 8 «Platon kann aiso
wissenschaft,
sehr wohi . .. :

im Auge gehabt haben»); F. Steckerl,


«Plato, Hippocrates, and the Menon Papyrus», Classical Philo-
logy, XL,1945, p. 166-180 (p. 174 «There seems to exist an
:

agreement in principle between the conception of medicine as


expressed in the treatise «On Ancient Medicine» and the ideas
developed above from the passage in Plato»).
Pour la catégorie d'interprètes qui opposent la méthode
d'Hippocrate dans le Phèdre et celle de VAncienne médecine, outre
Festugière, voir par exemple H. Diels, « Hippokratische Forschun-
gen I», Hermès, XLV, 1910, p. 125 (qui oppose «
idéalisme»
de la méthode d'Hippocrate dans le Phèdre au «positivisme»
et à r«empirisme» de la méthode de VAncienne médecine); Id.,
«Ûber einen neuen Versuch, die Echtheit einiger hippokratischen
Schriften nachzuweisen», S. B. Berl. Ak., 1910, p. 1141, n. 1;
M. Pohlenz, « Das zwanzigste Kapitel von Hippokrates De prisca
medicina», Hermès, LUI, 1918, p. 406 sq. ;W. Capelle, «Zur
hippokratischen Frage», Hermès, LVII, 1922, p. 247-265 (critique

,
de la thèse de Littré et de Gomperz; cf. p. 253 «Man wird also
:

die Littré-Gomperzsche Hypothèse endgultig begraben mussen»);


H. Wanner, Studien zu
p. 75-78.
Diss. Zurich, 1939,
80 ANCIENNE MÉDECINE
de telles oppositions provient surtout de divergences
dans l'interprétation du passage du Phèdre sur Hippo-
crate. De la réponse à diverses questions sur ce passage
dépend la diversité des opinions. Mais la question qui
est à la racine des divergences les plus marquées est
celle-ci quand il est dit que, selon Hippocrate, il n'est
:

pas possible de connaître la nature du corps ou de


l'âme sans connaître la nature du tout, que signifie le
tout? Est-ce l'univers ou est-ce la totalité de l'objet
considéré^? Si l'on interprète le tout dans le passage
du Phèdre comme étant le tout de l'univers, aucune
relation n'est possible entre la méthode de l'Hippocrate
du Phèdre et celle du c. 20 de VAncienne médecine, car
la médecine de l'auteur hippocratique n'est ni météo-

rologique ni cosmologique si l'on interprète en re-


;

vanche le tout, comme étant le tout de l'objet à


considérer, une relation n'est pas impossible c'est ;

même l'un des traités de la Collection hippocratique qui


correspond le mieux à la médecine hippocratique selon
le Phèdre ainsi interprété, dans la mesure où l'auteur

1. Voir la mise au point bibliographique de A. Hellwig,


Untersuchungen zur Théorie der Rhelorik bei Platon und Aristote-
les..., p. 183, n. 16a et p. 184, n. 16b.
La majorité des interprètes entendent par le tout de

l'Univers; c'est le cas, par exemple, de Diels, Pohlenz, Capelle,


Wanner et Festugière cités à la note précédente ou de H. Herter,
«The Problematic Mention of Hippocrates in Plato's Phaedrus»,
Illinois Classical Studies, I, 1976, p. 22-42; mais une minorité
d'interprètes entendent le tout de l'objet considéré ; voir, par
exemple, L. Edelstein, und die Sammlung der
hippokratischen Schrifien (Problemata 4), Berlin, 1931, p. 131 et
J. Jouanna, «La Collection hippocratique et Platon {Phèdre 269c-
272a)», REG, XC, 1977, p. 15-28.
Pour une revue des diverses interprétations sur ce point, voir
R. Joly, «La question hippocratique et le témoignage du Phèdre»,
R.E.G., LXXIV, 1961, p. 69-92 et sa continuation (inutilement
polémique) dans «Platon, Phèdre et Hippocrate vingt ans après»
in F. Lasserre et Ph. Mudry, Formes de pensée dans la Collection
hippocratique {CoWoque hippocratique de Lausanne 1981), Genève,
1983, p. 407-421 (avec ma remarque p. 422).
.

NOTICE 81

de l'Ancienne médecine, dans son chapitre 20, trace le


programme de recherche d'un art de la médecine, pris
dans toute son extension, qui se fonde sur la connais-
sance de la nature du corps dans ses relations causales
avec le régime, de même que chez Platon, l'art véritable
de la rhétorique se fonde sur la connaissance de la
nature de l'âme dans ses relations causales avec les
discours^. Mais, même dans ce cas, il existe un écart
entre la méthode de l'Hippocrate reconstruit par Platon
(à de la raison)^ et celle de l'Hippocrate
l'aide
historique. Cet écart dont on ne peut pas mesurer
l'amplitude, joint à la divergence irréductible des
interprétations sur le passage du Phèdre, fait que ce
témoignage de Platon n'apporte, en définitive, aucune
lumière certaine sur le traité ou les traités d'Hippocrate
visés par Platon, et en particulier sur VAncienne
médecine^.

VI. L'AUTEUR ET LA DATE DU TRAITÉ

les plus opposées ont été soutenues sur


Les positions
l'auteur et date du traité.
la

Concernant l'auteur, l'opposition était déjà nette


entre les deux grands éditeurs du xix*^ siècle. Selon
Littré qui s'appuyait sur le témoignage externe du

1 Voir J. Jouanna, « La Collection hippocratique et Platon ... »,


p. 15-28 (et notamment p. 27 pour les relations entre la méthode
du Phèdre et celle de VAncienne médecine).
2. Voir Platon, Phèdre 270c («Ainsi donc, en ce qui concerne

('
l'enquête sur la nature, examinant ce que peut bien dire
).
.
Hippocrate et la juste raison»
3. Pour un scepticisme analogue, voir par exemple A. Nelson,
Die hippokratische Schrift Text und Studien, Uppsala
1909, p. 92 sq. G. E. R. Lloyd, «The Hippocratic Question», The
;

Classical Quarterly, N.S. XXV, 1975, p. 172-175. Ce scepticisme


peut être la conclusion ultime d'analyses divergentes sur le
Phèdre; comp. par exemple J. Jouanna, «La Collection hippo-
cratique et Platon...», p. 27 et R. Joly, «Platon, Phèdre et
Hippocrate...», p. 421.
82 ANCIENNE MÉDECINE
Phèdre de Platon et sur la comparaison, à l'intérieur de
la Collection, avec le Régime dans les maladies aiguës,

l'auteur n'est autre qu'Hippocrate lui-même^. Au


contraire, selon Ermerins, l'auteur est un sophiste et un
rhéteur postérieur à Platon^. Ces deux positions extrê-
mes sont aujourd'hui généralement abandonnées^. Mê-
me si l'auteur avait une profonde et large connaissance
de la rhétorique, de la sophistique et de la philosophie*,
il est, avant tout, un médecin qui défend l'art de la
médecine devant un public de spécialistes et de
profanes. Et même si l'œuvre de ce médecin paraît
encore, à certains au moins, correspondre le mieux dans

1. Voir supra, p. 78 et n. 2.
2. Voir supra, p. 74 et n. 3.
3. La position de Littré a été suivie par Th. Gomperz, «Die
hippokratische Frage und der .\usgangspunkt ihrer Lôsung...»,
p. 213 sqq. et plus récemment par F. Steckerl, «Plato. Hippocra-
tes, and the Menon Papyrus ...», p. 166 sqq.) qui a voulu confirmer
la thèse de Littré par des voies nouvelles en essayant de montrer

que la doxographie sur Hippocrate contenue dans VAnonyme de


Londres et attribuée à Aristote (éd. Diels V, 35- VI, 43) faisait
référence non pas au traité des Vents mais à celui de VAncienne
médecine, c. 22, 151, 7 sqq.; voir comm. ad loc. (p. 218, n. 5).
La position d'Ermerins a été critiquée par Th. Gomperz, «Die
hippokratische Frage...», p. 224. Même ceux qui insistent sur les
échos de la sophistique dans le traité ne croient pas qu'il s'agisse
de l'œuvre d'un sophiste; voir A. Lami, «Un'eco di Gorgia in
.\ntica Medicina» .... p. 1-8. Dernièrement, toutefois Ch. Lichten-
thaeler {Chronologische und gedankliche Bezugssysteme in und um
«Cher die aile Medizin», XI. Hippokratische Studie, Genève,
1980. p. 30) voit dans l'auteur de VAncienne médecine «non pas
le grand médecin empirique de l'époque classique grecque mais

un sophiste plein d'idées du iv siècle avec ses bons et ses mau-


vais côtés» («er ist nicht der grosse medizinische Empiriker
dergriechischen Klassik, sondern ein einfallsreicher Sophist des
4. Jahrhunderts mit seinen Licht- und Schattenseiten»). Il rejoint
ainsi la position d'Ermerins. Cependant dans une lettre que j'ai
reçue le 9-12-88, Ch. Lichtenthaeler nuance son jugement sur

l'auteur il:ne le qualifie plus de sophiste, mais de «médecin


expérimenté et intéressé par la philosophie qui mêle sans s'en
douter des connaissances positives et la spéculation».
4. Voir supra, p. 9 sqq.
NOTICE 83

la Collection hippocratique à l'Hippocrate platonicien, il

serait hasardeux d'en tirer des conclusions trop péremp-


toires sur l'Hippocrate historique^ Il n'est même pas

sûr que leappartienne directement au groupe des


traité
traités qu'on attribue traditionnellement à l'école de
Cos^, bien qu'il s'en rapproche par plusieurs aspects;
car l'absence, sinon le refus, d'une médecine météorolo-
gique tranche avec l'une des intuitions dominantes de
traités tels que Airs, eaux, lieux. Maladie sacrée.
Épidémies I-III ou Nature de l'homme, à savoir
l'influence des saisons sur la santé et les maladies^.
L'auteur y occupe, en tout cas, une position particulière
dans la mesure où mêle deux modèles d'explication,
il

celui de la coction et celui du mélange*. Si l'on a de la


difficulté à situer avec précision l'auteur, c'est moins à
cause de son éclectisme qu'à cause de la cohérence
d'une pensée originale qui, tout en reflétant les grands
courants de pensée de son époque (éloge du progrès,
réflexions sur l'art) a eu une conscience aiguë du danger
inhérent à des méthodes qui, au nom d'une apparente
rigueur scientifique, veulent envahir toutes les sciences,
y compris celles du vivant, et passent à côté d'une
réalité complexe qu'une méthode traditionnelle s'effor-
ce depuis longtemps de saisir*. L'auteur de V Ancienne

Voir supra, p. 81.


\.

Pour ce groupe de traités, voir surtout K. Deichgrâber, Die


2.
Epidemien und das Corpus Hippocraticum, Berlin, 1933 (2*" éd.
1971).
3. Voir W. Nestlé, « Hippocratica»..., p. 22 sq. et R. Joly, Le
niveau de la science hippocratique, Paris, 1966, p. 156.
4. Voir supra, p. 62.
5. Ce sentiment de la complexité du réel est perceptible dans le
style lui-même
élargies par des expressions telles que , ,
les énumérations ne sont pas fermées, mais sont
:

etc. qui
laissent entendre que ces énumérations ne sont pas exhaustives et
n'épuisent pas le réel; voir M. Fantuzzi, «Varianza e tenacia del
Polar Thinking» ..., p. 239 (recensement de nombreuses énuméra-
tions de ce type dans le traité); cf. aussi l'emploi de (voir
supra, p. 21).
84 ANCIENNE MÉDECINE
médecine est un esprit moderne qui a eu le courage de
refuser les excès de la modernité.
Concernant la date du traité, les positions sont aussi
fort divergentes. Entre les dates extrêmes qui ont été
proposées, 440 avant J.-C. et 350 avant J.-C, il existe
presque un siècle^. Ces désaccords sur la chronologie
absolue résultent de divergences sur la chronologie
relative de ce traité, essentiellement par rapport à
Platon^ et par rapport aux traités hippocratiques du
Régime dans les maladies aiguës ou de la Nature de
l'homme^. Actuellement, un certain accord semble se
faire sur l'antériorité de l'auteur de V Ancienne médecine
par rapport à Platon*. Et l'on a tendance à penser que
le traité de V Ancienne médecine est postérieur au Régime

dans les maladies aiguës, mais antérieur à la Nature de


l'homme, bien qu'aucune preuve décisive ne puisse être
avancée en ce domaine^. Quant aux jugements contra-
dictoires sur le style ou sur le vocabulaire, ils ne
reposent pas sur une analyse assez précise pour être
véritablement fondés^. La seule donnée objective est

1. La date la plus haute a été proposée par Festugière,


Hippocrate. L'Ancienne médecine ..., p. 60 (n. 69), qui ne voyait pas
dans le traité des traces du relativisme de Protagoras : «les
années 430-420 ou, si l'on préfère, 440-430, me paraissent la date
la plus probable pour notre écrit»; et la date la plus basse
(années 355) par H. Diller, « Hippokratische Medizin...», p. 402-
409, qui décèle une influence des œuvres de Platon, même tardives
sur le traité (voir supra, p. 75), mais qui en est venu plus tard à
une position moins tranchée (voir supra, p. 76).
2. Voir supra, p. 74 sqq.
3. Voir supra, p. 63 sqq. et p. 55 sqq.
4. Voir supra, p. 75 sq.
5. Voir supra, p. 72 sq. et 56.
6. F. Blass, Die Attische Beredsamkeit. I, 2^ éd., 1887, p. 89,
place le traité de V Ancienne médecine ainsi que le traité de VArt au
IV siècle pour des raisons de style l'influence de Gorgias y est
:

tempérée (longues périodes bien construites; diminution des


ornements et des figures); mais il a été critiqué par Th. Gomperz,
« Die hippokratische Frage und der .\usgangspunkt ihrer
Lôsung...», p. 223 qui place le traité au siècle.
NOTICE 85
en définitivela mention d'Empédocle au c. 20, 146, 4;

elleconstitue un terminus post quem. Le traité se situe


à un moment où Empédocle était assez éloigné pour
être une référence, et assez proche pour ne pas être
démodé. Les années 420-410, peu après la mort du
philosophe (vers 423) conviendraient assez bien^. Il ne
semble pas pouvoir être postérieur au Gorgias de Platon
(années 390-385)^. Le traité a donc des chances de dater
de la fin du v* siècle ou du tout début du iv" siècle,
plutôt de la fin du v* siècle, si l'on admet l'antériorité
par rapport à la Nature de l'homme^.

VIL LA TRADITION DU TEXTE

A. La tradition directe
Le VAncienne médecine
traité de
""""^""
dans vingt et un manuscrits
ge lit

qui contiennent le texte en entier et dans trois autres


qui ne donnent que des extraits. Ils sont recensés pour

1. Comp. M. Pohlenz, « Das zwanzigste Kapitel...», p. 421 :

«La façon dont Empédocle est cité comme archégète des médecins
spéculatifs indique que celui-ci est mort depuis déjà quelque
temps. Nous ne devrons donc pas placer la composition de l'écrit
avant la dernière décennie du siècle».
2. Voir supra, p. 76 sq.
3. La date de 410-400 proposée par H. Wanner, Studien zu
..., p. 101 sqq. n'est pas déraisonnable. Dernière-
ment Ch. Lichtenthaeler, Chronologische und gedankliche Bezugs-
systeme in und um « Ober die aile Medizin » ..., p. 26 sq., s'appuyant
en particulier sur la postériorité d'Ancienne médecine par rapport
au Régime des maladies aiguës propose une date plus tardive :

«notre traité ne peut pas être paru avant 390-380; il peut même
être de quelques années plus jeune». Mais on observe que le même
argument peut servir à des fins différentes les relations étroites
:

entre Ancienne médecine et Régime dans les maladies aiguës, aussi


bien dans la théorie et la manière de pensée que dans le style, sont
invoquées par F. Heinimann, « Eine vorplatonische Théorie der
...», p. 112, n. 32, pour défendre une date haute (fin du
siècle) contre la date basse de H. Diller.
86 ANCIENNE MÉDECINE
la plupart par H. Diels dans son Catalogue des manus-
crits médicaux ^ En voici la liste :

a) manuscrits contenant l'ensemble du traité :

Marcianus gr. 269 (coll. 533)


NOTICE 87

b) manuscrits ne donnant que des extraits :

— Parisinus 2332 gr. s. XV f. 204^-205^ X


— Neapolilanus C 32 II s. XV f. 362"

— Vindobonensis med. gr. 15 s. XVI f. 139''-140'^

Manuscrits Anciens

1. Présentation. L'Ancienne médecine est trans-


mise par deux manuscrits anciens :

'
Marcianus gr. 269 (coll. 533) (M), du x•" siècle, qui
donne le texte sur deux colonnes à partir du folio 16^
(col. 1, 1. 12) avec le titre
numérotation
le titre de rappel
et la
(= 4) jusqu'au folio 23^ (col. 2, fin) avec

traité fait suite à celui de VAri et précède les Préceptes.



Le .
titre ()
Parisinus gr. 2253 (A), du xr siècle, qui donne le
texte à pleine page à partir du fol. 117" (1. 16) avec le

() sans numérota-
tion, jusqu'au folio 130'" (1. 25) avec le titre de rappel
,
^. Le traité est
copié entre les Lieux dans l'homme et Épidémies I.

2. Notes marginales et corrections.


a) dans M :

Les notes marginales de première main sont très


rares. Il n'y en a que deux :

— fol. 19" col. 2, 1. 12 en face de


Yàp = c. 13, 134, 1

— fol. 22" col.


;

1, 1. 27 en face de
=. 20, 147, 12.

Les corrections de seconde main sont peu nombreuses


et peu importantes. S'il est aisé de distinguer la main du
scribe des corrections plus récentes, il n'est pas toujours
possible de faire la distinction entre les différentes

1. Pour la description et la date de ces deux manuscrits


anciens, voir la bibliographie donnée dans mon édition de Vents et
Art, p. 51, n. 1 et p. 52, n. 1.
88 ANCIENNE MÉDECINE
mains On désignera donc toutes les correc-
correctrices.
tions de seconde main par le sigle M^. Au folio 22" (au

'
bas dans la marge de gauche au niveau de la
32 = c. 20, 147, 15), un correcteur a écrit une

.
ligne
assez longue note marginale qui est fort curieuse, car
elle est une réflexion sur la correction d'Hippocrate. La
voici
..

:

(non legitur)


,
main qui ne réapparaît pas dans
. Cette note marginale est d'une
le reste du manuscrit.

b) dans A :

On a distingué, comme pour les traités des Vents et de


VArt parus dans la même Collection (tome V, V^ partie),
outre les corrections du scribe (A^), trois correcteurs ou
catégories de correcteurs (A^, A^, A*). Les corrections,
qui sont nombreuses, portent principalement sur l'ac-
centuation et l'orthographe.

3. Relations entre A et M.
Les deux manuscrits remontent à un modèle commun
perdu, car ils possèdent des fautes communes.

c.

c.
2, 119,
8, 127, 11
15 Ermerins :

:
AM
-
C. 10, 131, 8 ^^ :

C. 12, 132, 17 » :

^
C.

C.

C.
19, 144,
22. 151,
5
2
22, 152, 12 sq.
2-4 :
:

* : -
Le modèle commun de A
un modèle en et de M était
onciale, car plusieurs divergences entre les deux manus-
crits s'expliquent par des mélectures d'onciale soit dans
la branche de A soit dans celle de M. Ils proviennent de
c.
90 ANCIENNE MÉDECINE
c. 16, 140, 10 A : M
(<OIAnACXOÎCIN) confusion C/e
c. 18, 142, 17 A M
(<60)
:

confusion O/G
c. 19, 144, 1 A M
(<[]?)
:

confusion A/A?
c. 20, 146, 13 A : M
(<0060?) confusion C/G
c.

c.
22,
22,
150,
152, 15
1 A : M (<6)
A
confusion
M
/
(<666?)
:

confusion 6/?
A ces fautes d'onciale, il faudrait joindre celles qui
sont nées de la scriptio continua par mécoupure des
mots. Par exemple la faute absurde de M «les
corps» à la place de (A) «et crus» au c. 3, 121, 17
se comprend fort bien dans la séquence continue
AIAITHCi2M>17ieKAlAKPHTA; le C final de a
été lu (aussi) comme initial de entraînant la
lecture ; voir aussi c. 20, 147, 15
A : M.
Autant que l'on puisse en juger, cet archétype était
généralement de bonne qualité, encore que certaines de
ses imperfections aient pu entraîner des divergences
entre ses copies. Ainsi au c. 24, 153, 17 recte
Kuehlewein A om. M il est possible que l'archétype
: ;

de AM ait déjà eu la leçon fautive GCTINGI par


mélecture de GCT1AI61 (confusion de Al et de N) et que
cette leçon fautive, conservée dans la branche de A, ait
été supprimée dans celle de M, car la conjonction n'a
pas de fonction dans la phrase.
Par rapport à cet archétype, les manuscrits conservés
présentent chacun de leur côté de nombreuses fautes,
comme l'attestent les nombreuses divergences qui les
séparent. Outre les mauvaises lectures dues à des
erreurs d'onciale ou à la scriptio continua, les fautes les
plus importantes proviennent de lacunes, ces lacunes
étant favorisées par le style de l'auteur qui multiplie
les doublets et les homéotéleutes et favorise ainsi les
NOTICE 91

sauts du même au même. Ces omissions vont de la


faute d'une ou deux lettres qui peuvent changer
considérablement le sens (ainsi c. 3, 121, 11
A; c, 19, 143, 13
144, 6
M^ M)
M
A C. 19,
A :
(
M; c 20, 146, 14
: :
:

< ;;
M
;
membre de phrase

15
:

(omission dans
A) jusqu'à
A : c.

;
la

1,

c. 13,
perte d'un
118, 12
133,
'
15
; c. 3,

c.
121,
13,
134, 8 (e

>); c
:

15, 138, 9
c 17, 141, 19 sq. c 22,

;
; ;

150, 3 omissions dans


;

M : c. 1, 118, 10 c. 3, 123, 3 sq.


; c. 3, 123, 7 c. 9, 128, 9

; c 18, 143, 1 sq.

;
;

C.

C.
20,
22, 149, 9
À
146, 18 sq.

toutes ces fautes mécaniques s'ajoute


c 24, 153, 18 ait.
le
).
remplace-
ment d'une ledio difficilior par une lectio facilior; et ici
encore la faute peut se trouver dans l'un ou dans l'autre
des manuscrits. En particulier, les caractéristiques
ioniennes ont tendance à disparaître, soit que les formes
ioniennes disparaissent au profit des formes attiques
(ex. c. 8, 127, 4 [relatif ionien] A : M ; mais c. 6,

125, 13 M : A) soit que les termes


ioniens laissent la place à leur synonyme attique (ex.
c. 2, 120, 10 A^ : M ; c. 9, 128, 16
A : M; mais c. 3, 122, 11 M : A).
Plus généralement les mots rares sont remplacés par
des mots courants (ex. c. 6, 125, 7 A :

M; c. 9, 128, 6 A : M (faute de
minuscule v/p) ; ibid. A : M; 128, 7
A : M ; c. 15, 138, 13 A :

M; mais c. 3, 122, 6 M : A ; c. 11, 131, 11


M : A; c. 16, 139, 6 M :

A). Dans ce processus de banalisation, les gloses ont


souvent joué un rôle, le mot rare glosé disparaissant
92 ANCIENNE MÉDECINE
au profit de son synonyme plus courante Disparition
du mot glosé dans A c. 6, 125, 6
A (cf. Hésychius
:

); M
c. 8, 127, 9•
:

M :

Hésychius
A (cf. Erotien
... );
cil, 131, 11

cf. aussi •
;

M :

Hésychius
M :
A et c. 16, 139, 6

A (cf. Hésychius

, );, , ).
M
c. 3, 122, 11
A (cf.


:

A^
) ,)
Disparition du mot glosé dans M
: M (cf. Hésychius
c. 2, 120, 10 :


• ).
; c 9, 128, 16 :

(cf. Hésychius •
et peut-être aussi
c. 7, 126, 11 A'"' : M (cf. Hésychius

De l'examen de ces divergences entre les deux


manuscrits anciens, il ressort clairement que chaque
catégorie d'erreurs se rencontre dans chacun des
manuscrits. Il en résulte qu'il n'y a pas lieu d'accorder
un préjugé favorable à l'un des deux manuscrits, mais
de peser chaque divergence en utilisant toutes les
ressources dont dispose la critique verbale.
Le plus pour l'éditeur est sans aucun doute
irritant

,
le cas des interversions dont la fréquence est assez

?
étonnante. Pourquoi lit-on par exemple au c. 4, 123, 13
dans A mais dans M
ou au c. 9, 128, 11 sq.
dans A et dans M ? La raison de ces
interversions n'apparaît pas souvent aussi la reconsti- ;

tution de l'archétype est-elle aléatoire dans la majorité


de ces cas. Pourtant dans deux passages au moins, le
coupable de l'interversion peut être découvert. Dans un

., ,
cas, il se trahit; dans l'autre il est dénoncé par un
témoignage indirect. Au c. 9, 129, 1 sq. A donne
tandis que M donne
, Or, après le manuscrit A donne

1. Pour les gloses d'Érotien, de Galien et d'Hésychius, voir


infra, p. 95 sqq.
,

NOTICE 93
l'adjectif rare qui est omis par M. C'est l'omis-
sion accidentelle de l'adjectif rare qualifiant le
vent qui rend possible dans M l'interversion de et

,
de
c. 10,

,
(pour plus de détails, voir comm. ad loc). Au
131, 1 on lit dans A
et en revanche, dans M,

texte de l'archétype? Le comparatif


Quel était le
«plus
jaune» qualifiait-il les yeux ou l'urine? La tradition
parallèle du Régime dans les maladies aiguës, c. 9 (voir
.
infra, p. 103 sq.), confirme sans ambiguïté la leçon
de A. Voilà donc deux passages où l'inversion fautive
se situe dans la branche de M. Mais, à partir de ces deux
exemples, aucune généralisation ne doit être faite.

.. . ,
En ce qui concerne les ma-
Manuscnts récents . , , , , , , ,

nuscrits récents, le seul problème


important pour l'éditeur est de déterminer s'ils dérivent
ou non d'un manuscrit ancien conservé. J. Ilberg, dans
un Epimelrum à ses Studia pseudippocralea, Leipzig,
1883, p. 59-61, où il examinait quelques variantes des
manuscrits du traité de ÏAncienne médecine, concluait
en disant que l'établissement du texte doit prendre en
compte trois sources, d'abord le manuscrit A, en second
lieu le manuscrit M et en troisième lieu les manuscrits
récents qui, tout en étant proches de M, ne dérivent pas
de lui, mais sont les seuls à préserver parfois la leçon
ancienne. Malheureusement, il ne donne pas d'exemple
d'une bonne leçon ancienne conservée par les manus-
crits récents.
En d'une comparaison de M et du recentior le
fait,

plus ancien,le Parisinus gr. 2140 (I), faite sur l'ensem-

ble du traité de ÏAncienne médecine, il résulte que


l'hypothèse la plus vraisemblable est que M est la
source de L II est inutile d'insister sur les nombreuses
leçons communes à MI contre A, qu'elles soient
mauvaises ou bonnes. On notera simplement que toutes
les omissions fautives de M signalées supra, p. 91, sont
également dans I. Mieux vaut souligner les innovations
94 ANCIENNE MÉDECINE
fautives de I par rapport à M qui peuvent s'expliquer

par forme ou la disposition de l'écriture dans M. En


la

ce qui concerne la forme de l'écriture, au c. 22, 150, 8,


' de I face à de M peut s'expliquer par le
oncial très ouvert dans M (fol. 23^ col. 2, 1. 3), dont
la première branche est presque aussi courbe que la

seconde et qui a pu être lue . En ce qui concerne la


disposition de l'écriture, l'omission dans I au c. 14,
135, 4 de peut sans doute
s'expliquer indépendamment de la disposition de son

(
modèle, puisqu'elle est due à un saut du même au
même toutefois, elle correspond exactement à une
;

ligne de M (fol. 20, col. 1, 1. 10). Il en est de même pour

)
la longue et célèbre lacune du c. 20, 146, 2-5

qui correspond exactement à sept lignes de M


(fol. 22, col. 2, 1. 18-23). Le manuscrit I ne paraît
-

présenter aucune leçon nouvelle qui soit susceptible de


remonter à un stade ancien de la tradition. Je signale
par acquis de conscience une variante qui n'est pas
absurde c. 23, 153, 6; AM I recc. :

Il n'a pas lieu dans le cadre de cette Collection de

procéder à un classement détaillé des recentiores. Pour


les recentiores les plus anciens, rien ne s'oppose
I H^ R,
à ce que H'' soit une copie de outre que H'' possède
I :

régulièrement les innovations^ de I par rapport à M, il


tient compte de certaines corrections de seconde main^
faites dans I. Le modèle de R peut avoir été H'', car R
présente des innovations^ de H*^ par rapport à I.

1. Voici quelques exemples significatifs : c. 4, 123, 14


M : I H*" ; c. 8, 126, 19 M : I H*" ;

c.

(iege
10, 130, 7
) :

H''; c. 23,

M :

153, 6
H** ;
I

c.
H''
22,
; c.

150,
M
10, 130, 8 où

:
3
H''.
M
M
:

2. Voici quelques exemples : c. 10, 131, 8 M^" P" :

M^ F H''; c. 14, 137, 2 M I :


'*
H*•; c. 15, 137, 13 M l"=l : H^ c. 16, 140, 7
M : ^ ** c ; 22, 149, 14 post
add * ''; c 22, 152, 12 sq. : F *».
3. C. 16, 141, 11 : H^R ; c. 17, 141, 13
NOTICE 95

. La tradition indirecte

Le

l'Ancienne
glossaire

médecine
. .
a Erotien
, .

traite de
dans la
catégorie des écrits d'Hippocrate qui traitent de l'art en
le rapprochant judicieusement du traité de VArt (éd.
rain
(
Érotien,
,

de
, -

INeron,
)
srlossateur
• .

cite
i
le
contempo-
. • . - i

Nachmanson, 9, 18 sqq.).

Son Glossaire comprend trois mentions du traité :

1. Dans la glose à A 4 (éd. Nachmanson, 10,


16 sqq.), pour illustrer le sens d'pt, Érotien cite
entre autres traités :


»

=.

12,
'
132, 15-17.
'
« 2.
11 sqq.),
Dans la

Erotien cite

probablement du c. 22 où l'adjectif
glose à

f
est employé
trois fois au pluriel neutre (149, 10; 150, 14; 151, 3).
».
A 6 (éd. Nachmanson

Cette citation provient très


12,

()
Mais dans tous ces cas, il s'agit des parties du corps
(),
;
(
et non des corps et l'adjectif qui lui
est coordonné est soit soit cf. aussi un

quatrième passage du c. 22 où l'adjectif est


...,
employé au neutre singulier

ont été proposées pour amender l'énigmatique t


). Plusieurs corrections
:

-' '
c. 16,
;
M
c
140, 12
I :

24, 153, 15
c. 20, 147, 10
'
:
; c. 17, 141, 13

*"
:
:

'' R
R; c
;
:

cf.

16,
M
aussi
139,
:

'' *»™- R
16
• ^'"
:

R.
; c. 16, 139, 17 :
96 ANCIENNE MÉDECINE
soit Stephanus soit Klein soit
Nachmanson. À

,
ces corrections indiquées dans l'appa-
rat critique de l'édition de Nachmanson^, il convient
d'ajouter celle de Foes {Oec. p. 89) qui est
supérieure à celle d'Etienne, car correspond à un elle
terme du c. 22. Toutes ces corrections supposent que le
texte lu par Érotien était différent du texte de nos
manuscrits. On peut toutefois se demander si le texte lu
par Érotien n'était pas
3. Dans la glose à 1
.
(éd. Nachmanson 90,
2 sqq.), Érotien donne trois sens à dans la
Collection. Un de ces trois sens est illustré par ï Ancienne
médecine

En
/ :

=c 10, 130, 13 et c. 22,^ 151, 7 et 152, 8.


plus de ces citations, Érotien a glosé plusieurs
termes du traité qu'il a lu entre le traité des Lieux dans
l'homme et le traité de VArt^
-
:

— A 60 (éd. Nachmanson 19, 13 sq.)



=c 14,
135, 3.
— 61 (éd. Nachmanson 19, 15) •


Bien que
médecine,
62

le
(éd.

terme ne
E.
=c

Nachmanson
15, 138, 6.
Nachmanson

soit
19,
'.
16

pas employé dans VAncienne


{Erotianstudien....
sq.)

p. 340)
pense que la glose peut en provenir, étant donné sa
place à la suite de deux gloses tirées de ce même traité
(A 60 et

— 27
A.
A

(éd.
61); comp.

Nachmanson
= c.
c. 4,

37, 6)
123, 14

22, 149, 6 et 12 et 150, 9.



- M vel

1. .
Nachmanson, Eroliani vocum hippocralicarum collectio,
Upsaliae. 1918, p. 12.
2. Voir E. Nachmanson, Erotianstudien, Uppsala, 1917,
p. 339 sq.
.

NOTICE 97
— M 10
127, 9
— Mil
' ,
(éd.
M
(éd.
Nachmanson
:

Nachmanson
.
60, 4)

60, 5-7)
'
'
" ,


= c. 8,

127, 12;

=.
c.

11 (éd.
3, 122, 11;
14, 135, 6; c. 14, 137, 3.
Nachmanson
= c.
cf. aussi

91, 14)
22, 152, 14.
c.


6, 125, 11; c. 8,

ot

Ces citations ou ces gloses n'apportent pas beaucoup


d'indications utiHsables pour l'établissement du texte.
La glose M 10 indique que le manuscrit conservé M a
la bonne leçon (), tandis que, dans manuscrit le

(/)
A, la leçon authentique a
^

Aucune
été remplacée par la glose

glose n'est attribuée


Le Glossaire de Gahen . •. . i, ^
nommément
de An-
,

au traite
i
1

cienne médecine, mais quatre gloses proviennent du


traité ou sont susceptibles d'en provenir.

1. Gloses provenant probablement du traité de


l'Ancienne médecine :

— Al (éd. Kûhn XIX 80, 16)


= c. 22, 151, 7. La glose est tirée de V Ancienne
médecine, car c'est le seul passage de la Collection où
soit à l'accusatif. Dans le second passage où

(
l'on
6

p.

1.
rencontre
= Jouanna
A2

Pour
(éd.

la

180 sq. (=n. 8 de


M
115, 11),
Kuhn XIX
:
le

om. L

discussion
terme {Venls, c.
il est au nominatif.

la p.
85, 4 sq.)
secl.

de
132).
la
Helmreich)^,

citation
:
9, Littré VI, 104,

du c. 20, voir infra,

2. de l'édition de Kuhn, à l'aide d'une


J'ai contrôlé le texte
collation personnelle de M {Marcianus gr. 269 du x" siècle), et de la
collation de L {Laurentianus 74,3 du xiii•• siècle) faite par Helm-
reich (« Handschriftiiche Verbesserungen zu dem Hippokrates-
glossar des Galen», Sitzungsberichte der kôniglich preussischen
Akademie der Wissenschafien, philos. -hislorische Klasse, Berlin,
1916, p. 197-214).
98

, , (
ANCIENNE MÉDECINE

- def. in M) ^ c. 14, 135, 3.


Seul passage de
employé au

Collection
A

.
3 (éd.

Le terme
^c
la Collection où l'adjectif
génitif pluriel.
Kùhn XIX
22, 149, 18
133, 5)

n'est pas conservé


La forme glosée par Galien
hippocratique.
correspond exactement à notre passage. Comp. la glose
ailleurs
: - dans
est

la

de Galien à (M L)


:

(M : L), (Kuhn XIX,


133, 4) et à (M Kuhn) :

(éd. Kuhn XIX 84, 6).


— A 4 (éd. Kuhn XIX 153, 10)
= C. 3, 122, 10 M. Le A :

verbe est attesté dans la cinq autres fois


Collection hippocratique, mais le participe au nominatif
masculin pluriel n'apparaît que dans ce passage.

2. Gloses susceptibles de provenir du traité de


V Ancienne médecine :

— 1 (éd. Kuhn XIX 73, 5 sq.)


(def. in M) = c. 14, 136, 19


(bis). Évidemment d'autres passages de la Collection
hippocratique sont possibles ;
voir notamment
en Régime des maladies aiguës, c. 15, Littré II, 342, 6
(= Joly c. 54, 59, 24) ou en Maladies des femmes II,

c. 199, Littré VIII, 382, 6.


— 2 (éd. Kuhn XIX 87, 13) •

(def. in M) = c. 10, 131, 1. dans Le terme se retrouve


Maladies II 1, c. 5 (Littré VII, 12, 17 sq. = Jouanna
136, 8) et dans six autres traités de la Collection.

=
3 (éd. Kuhn XIX 98, 6)
c. 22, 151, 1 A M. Le verbe
n'est pas attesté dans la Collection hippocrati-
: ' •
-
que. Ce passage d'Ancienne médecine est ce qu'il y a de
plus proche. Dans les ouvrages imprimés, le rapproche-
.

NOTICE 99
ment a été fait pour
première fois par A. Foes dans
la

son Oeconomia Hippocratis de 1588, s.v. mais ;

la tradition manuscrite récente atteste que le rappro-

,
chement était fait dès le xiv'^ le Parisinus gr. 2143, ;

comme le remarque déjà Littré (t. I, p. 631), porte en


marge du passage de ï Ancienne médecine la glose de

et

M)
le
,
Galien. Pour la comparaison des deux leçons


= c.
voir infra, p. 217 (= p. 151, n. 1).
4 (éd.

11, 131, 15
Kuhn XIX

.
reste de la Collection (une vingtaine de fois).
117, 9)

Le verbe
- est fréquent
(def.
dans
in

, ^. . ..„, .. Si le Glossaire d'Hésychius doit


Le Glossaire a Hesychius , . • . , . ,

être mentionne, ce
est pas seule-
ment parce possède un mot glosé tiré directement
qu'il
du traité de ÏAncienne médecine, mais c'est surtout
parce que les gloses qu'il donne pour certains mots
attestés dans le traité éclairent des variantes des
manuscrits anciens A et M.

c. 6,
1. (éd.
125, 6
K. Latte
M
5323) .
,. .

Comp.


:

. Latte Comp.


2. (éd. 8142) •

.
c. 9,

3.
.
128, 16
(éd. . Latte 880)
:

•,,. ^.

•,.
Comp. c. 2, 120, 10 :

4. (éd. . Latte 604)


Comp. c. 8, 127, 9 : .
5. (éd. Schmidt III 397)
.
•,,.
Comp. 131, 11 Cf. aussi

•,-
c. 11, :

c. 16, 139, 6 M : .
6. (éd. Schmidt IV, 112)
Comp. c. 3, 122, 11 : .
7. (éd. Schmidt IV, 255)
= c 3, 122, 10 : .
De ces gloses, la seule qui semble tirée directement
de V Ancienne médecine est la glose n° 7
est dit à la glose de Galien A 4 (). ; comp. ce qui
C'est
100 ANCIENNE MÉDECINE
vraisemblablement un hasard si, dans cinq cas sur sept,
le remplacement du mot originel par la glose se fait

dans le manuscrit A. Néanmoins cette proportion doit


mettre en garde contre une confiance trop grande dans
le caractère conservateur de A.

À la fin du Vaticanus Urbinas


Le traité anonyme no j • i

sur la Rage d''' ""' "lanuscrit du xiv•^ siècle


qui donne la Collection hippocra-
iique (= **), a été préservé aux fol. 429'^-430'' (= U''), un
traité copié par une main plus récente. Ce traité resté
sans titre, parce que le travail de rubrication n'a pas été
exécuté, est un exposé sur l'étiologie, la sémiologie et la
thérapeutique de la rage. Bien que la rage soit une
maladie absente de la Collection hippocratique, l'auteur
réussit le tour de force de composer un traité sur cette
nouvelle maladie à partir d'un tissu de réminiscences
hippocratiques. Plusieurs passages de ce traité, publié
par Diels en 1918^, sont repris à VAncienne médecine. En
voici la liste

— Sur
:

la rage

. ,
10 (éd. Diels 64, 5 sq.)

,
:

'
méd. c. 20, 146, 13-15 ...

' '= Ane.

— Sur

méd. 20, 146, 13 sq.


la

.
rage 24 (éd. Diels 65,

,
10 sq.)
= 7 ne.

, ,,
— Sur la rage 25 (éd. Diels 65, 12 sqq.)

20, 146, 15-17


' '
= /Inc. méd.
c.

'.
1. .
Diels, « Hippokratische Forschungen V. Eine neue
Fassungdes XIX. Hippokratesbriefes», Hermès, LUI, 1918, p. 57-
87.
NOTICE 101

Toutes les réminiscences de VAncienne médecine


appartiennent au c. 20. Le premier érudit qui a noté ces
rapprochements est M. Pohlenz, dans un article de 1918
paru juste après la publication du traité par Diels^
Comparant la version du traité Sur la Rage à la
tradition manuscrite de VAncienne médecine, Pohlenz
remarque d'abord que le traité sur la Hage confirme la
leçon de M recc. alors que A
présente un texte fautif et il en
tire la conclusion que Kuehlewein, dans son édition de
1894, n'aurait pas dû écrire en
mêlant la leçon de M et de A, mais suivre M recc. 11
remarque surtout que le traité sur la Rage présente le
texte fautif des recentiores dans .
Comme il
admet, avec H. Diels, que ce traité sur la Rage date du
début de l'époque impériale et, avec Th. Gomperz
{Apologie der Heilkunst, 2^ éd., Leipzig, 1910, p. 64), que
les recentiores hippocratiques ne peuvent pas dériver de
M, il en conclut (p. 401) que la séparation entre M et les
recentiores s'est produite déjà avant le début de notre
ère et que la séparation entre A et M recc. est encore
beaucoup plus ancienne. 11 faudrait, dans ces condi-
tions, ne pas négliger le témoignage des recentiores,
l'accord de M recc. garantissant l'ancienneté d'une
leçon et l'accord de A recc. signifiant une erreur de M.
De telles conclusions sont hasardeuses et s'appuient
sur deux certitudes qu'il faudrait d'abord démontrer, à
savoir que les recentiores ne dérivent pas de M et que le
traité sur la Rage date du début de l'époque impériale.
En ce qui concerne la relation de M et des recentiores,
l'hypothèse de la filiation M recc. est la plus vraisembla-
ble^. Quant à la date du traité sur la Rage, les avis
divergent actuellement entre l'époque romaine et l'épo-
que byzantine, si bien qu'une datation précise est

1. M. Pohlenz, « Das zwanzigste Kapitel von Hippokrates De


prisca medicina», Hermès, LUI, 1918, 399 sq.
2. Voir supra, p. 93 sq.
102 ANCIENNE MÉDECINE
exclue en l'état présent des recherches sur ce traité^. Il
est clair que le modèle de VAncienne médecine qui a
servi de base à l'auteur du traité sur la Rage se situe du
côté de la branche de M recc. ; mais le matériel fourni
par ce témoignage indirect est trop mince pouf
autoriser des conclusions solides sur la place de ce
modèle dans l'histoire du texte^.

c. la tradition parallèle :

Le Régime dans les maladies aiguës


Dans les quelques passages de VAncienne médecine
qui présentent des rédactions parallèles avec le Régime
dans les maladies aiguës^, la comparaison entre ces
diverses rédactions donne parfois un critère de choix là

où l'éditeur du traité pourrait hésiter entre deux leçons


divergentes de A et de M qui lui paraissent également
possibles.
Ainsi au c. 10, 131, 4, dans l'énumération des malai-

ses survenant chez ceux qui ont l'habitude de pren-


dre deux repas mais s'abstiennent du repas de midi,
M^*^ recc. et la vulgate donnent «mauvaise
humeur», alors que A lit «difficulté à travail-
ler». Littré, qui est le premier à prendre connaissance
de la leçon de A, écrit dans son apparat critique ad
loc. (t. I, p. 593) «Quoique : soit certainement
une bonne leçon, de 2253 (= A) me paraît
encore meilleur». Mais il ne donne pas de justifica-
tion de sa préférence. Aussi n'est-il pas étonnant de

1. Pour la datation du traité à l'époque byzantine, voir


H. Diller «Die sogenannte zweite Fassung des Hippokrates-19.
briefes», Quellen und Studien zur Geschichte der Naturwissenschaften
und der Medizin, 1933, III, Heft 4, p. 35 (243)-44 (252) avec les
remarques de J. Jouanna, Hippocrate V, 1. Des vents, De l'art...,
p. 85, n. 1.
2. Comparer les problèmes posés par ce témoignage indirect
pour la tradition du traité des Vents in J. Jouanna, Des Vents,
De l'Art..., p. 83-86.
3. Voir supra, p. 63 sqq.
NOTICE 103

constater qu'Ermerins, qui édite le traité après Littré,


revienne à la vulgate en critiquant avec vivacité la
leçon de A (p. 30) « Equidem : nuUo modo
concoquo, sed falsam lect. esse puto». Bien qu'ils soient
opposés, les jugements de Littré et d'Ermerins se
ressemblent, dans la mesure où ils expriment tous deux
une impression personnelle sans argumentation objec-
tive. Si l'on compare, en fait, ce passage de V Ancienne
médecine avec les deux autres rédactions parallèles du
Régime dans les maladies aiguës et de son Appendice, il
apparaît que la leçon de A est confirmée aussi bien par

49, 3
Littré II, 482, 3
)
l'une {HMA I c. 9, Littré II, 288, 4 sq.

=
Joly c. 44, 88, 24
Joly c. 30,
que par l'autre {HMA II c. 18,
èv
=

). La forme dans M^*^ provient vrai-


semblablement d'une mélecture d'onciale^.
Le choix entre deux autres variantes du même
passage dues également à une faute d'onciale^ est
également facilité par la tradition parallèle du Régime
dans les maladies aiguës. Au c. 10, 131, 7, alors que M

obstruent ()
recc. et la vulgate ont «(les aliments) en descendant
le ventre», le manuscrit A, suivi

descendant brûlent ()
par les éditeurs depuis Littré, donne «(les aliments) en
le ventre». Ici encore la

leçon de A est confirmée, mais cette fois par une seule


:

{RM A
des deux rédactions parallèles
288, 6 sq.
Une
= Joly c. 30, 49, 5
dernière divergence importante, qui n'est pas
)^.
I c. 9, Littré 11,

due

1 sq.,
à
véritable réécriture

l'urine plus
la

)
leçon de
jaunes, l'urine épaisse et chaude»
recc.
(
une faute de lecture d'onciale, mais à une
du texte, oppose, au c. 10, 131,
M

(,
vulg. «les
, yeux sont plus

à celle de A «les yeux sont creux,


jaune et plus chaude»

1. Voir supra, p. 89.


2. Voir supra, p. 89.
3. Pour plus de détails, voir le commentaire ad toc.
104

). ANCIENNE MÉDECINE
Dans son apparat critique au
passage (p. 593, n. 28), Littré insiste opportunément sur
l'ampleur de la divergence «Ce passage est une des
:

preuves qui font voir que le n° 2253 (= A) reproduit une


édition antique différente de celle qu'ont suivie les
autres manuscrits que nous possédons, et nos imprimés.
Les différences que les deux textes présentent ne sont
pas de simples variantes, ou de simples erreurs de
copistes». Mais il ne justifie pas les raisons de son choix
en faveur de la leçon de A. La justification se trouve, en

.)^.,
fait, dans la rédaction parallèle du Régime dans les

maladies aiguës (c. 9, Littré II, 288, 6-8 =


Joly c. 30,
49, 4-6: ...
Ainsi, par trois fois, le témoignage du Régime dans les
maladies aiguës confirme une leçon de A contre M. C'est
le signe que le manuscrit A, même s'il a été parfois

surévalué, conserve une valeur indéniable. Il a permis


d'apporter des améliorations notables au texte de la
vulgate; toutefois les leçons de ce manuscrit ont fait
assez tard leur entrée dans l'histoire du texte imprimé,
seulement à partir de Littré.

D. Les Éditions et l'histoire du texte imprimé


Du xvr au début du xix*• siècle, le traité de
siècle
V Ancienne médecine a été édité sans que soient directe-
ment connus les manuscrits anciens A et M. Précédée
par une traduction latine de Calvus publiée en 1525 et
faite à partir d'un manuscrit récent issu indirectement
de M, le Valicanus gr. 278 (W), la première édition en
grec, l'Aldine, publiée un an plus tard à Venise, a eu
pour modèle principal un autre manuscrit récent
dérivant lui aussi de M à travers des intermédiaires, le
Parisinus gr. 2141 (G). Ce texte, corrigé par Cornarius

1. Cette justification a été donnée par Ermerins dans son


apparat critique ad loc. (p. 30).
NOTICE 105

dans son édition de 1538\ a été réédité plusieurs fois


au cours du xvr, notamment par le bâlois Th. Zwinger
(1579) avec une cinquantaine de notes marginales
provenant en partie des collations de Sambucus, par le
padouan Mercurialis (1588) avec vingt-sept notes margi-
nales qu'il attribue à un manuscrit ancien (Vet. cod.), et
par le messin A. Foes (1595) dans une édition qui a
marqué le texte des éditions suivantes surtout par les
leçons de Servin et de Févrée données en appendice,
puis au xvir par J. A. van der Linden (1665) et
R. Chartier (1679), et au xviir siècle par le médecin de
la cour de Vienne, S. Mack (t. 1, 1743)^. L'édition
commentée du traité faite par Coray (1748-1833) au
début du XIX•" siècle, demeurée longtemps inédite^, est

1. On doit aussi à Cornarius une traduction latine (Bâle 1546)


dont consultation reste fort utile pour l'interprétation du texte.
la

2. L'édition de Mack repose sur la collation des variantes


relevées dans les précédentes éditions, notamment les variantes
marginales des éditions de Zwinger, Mercurialis et Heurnius
(1593), ainsi que les variantes de Servin et de Févrée données par
Foes, auxquelles il ajoute les variantes portées par Sambucus dans
un exemplaire de l'Aldine de la Bibliothèque de Vienne (une
vingtaine pour le traité de VAncienne médecine). Pour ce traité,
l'apparat critique de Mack ne possède aucune variante prise dans
l'exemplaire de la bibliothèque de Vienne annoté par Cornarius.
3. Il s'agit en fait d'une édition commentée en français de deux
traités hippocratiques. Régime dans les maladies aiguës (sans
l'Appendice) et Ancienne médecine, dont le manuscrit a été
accidentellement disloqué en plusieurs dossiers conservés sous des
cotes différentes à la bibliothèque Coray de Chio (n»* 454, 453 et
285). Pour la reconstitution de l'ensemble, voir J. Jouanna,
«Coray et Hippocrate», in Hippocrate et son héritage, Colloque
Franco-hellénique d'Histoire de la médecine, Fondation
M. Mérieux. Lyon, 1985, p. 185. La version la plus élaborée du
commentaire de VAncienne médecine (accompagnée du texte grec
établi par Reinhold) a été publiée par N. M. Damalas à Athènes
en 1887 dans le tome V des œuvres posthumes de Coray,
conjointement avec le commentaire du Régime dans les maladies
aiguës. Quant au texte grec de VAncienne médecine établi par
Coray lui-même, il n'a été publié que beaucoup plus tard, par
K. Métropoulos en appendice à sa propre édition de VAncienne
médecine (Athènes 1952). Cette édition commentée de VAncienne
106 ANCIENNE MÉDECINE
exemplaire de ce que pouvait être encore la critique
érudite au début du xix'' elle est sans doute très
:

ingénieuse et l'éditeur moderne peut encore y trouver


des conjectures utiles, mais le texte pris pour base est
celui d'une édition précédente, celle de van der Linden
(sigle V), complétée par les collations de Servin et de
Févrée (sigle Ms.), qui ont été recueillies dans l'édition
de Foes (sigle F), avec consultation de l'édition de
Zwinger (sigle Z) et des traductions latines de Calvus

médecine (rédigée définitivement en 1823 ou postérieurement


comme l'indique «1823» dans le bifolium formant les
le filigrane

pages 297 à donnant le début du commentaire de


300 et
VAncienne médecine) avait été précédée par un commentaire
critique en latin de ce traité fait dansle cadre de la préparation

d'un grand ouvrage critique sur l'ensemble de la Collection


hippocratique (voir J. Jouanna, «Coray et Hippocrate»...,
p. 182 sqq.). De cet ouvrage inachevé et resté inédit, il reste des
«cahiers» à la Bibliothèque de Chio, représentant plusieurs étapes
du travail. Une première version se trouve sous les numéros 1733
et 1732 (Ancienne médecine ^
n" 1733, p. 58-120) et une version
plus récente sous le numéro 1734 (Ancienne médecine p. 125- =
357). La postériorité de version du n" 1734 par rapport à celle
la

du n" 1733 est évidente pour de nombreuses raisons et en


particulier parce que Coray renonce dans le n" 1734 à une
conjecture qu'il avait faite dans le n" 1733. A propos d'Ane, méd.,
c. 3, 122, 8,

legendum »;
il écrit dans le n" 1733 (p. 69) «putarem pro
:

cette conjecture a paru, par


ailleurs, à Londres en 1797 dans le Musei Oxoniensis litterarii
fasciculus secundus. Quo continentur Observaiiones in Hippocra-
tem ..., p. [1]. Mais dans sa version du n" 1734 (p. 150), commen-
tant le même passage, Coray note «Fuit ubi censebam legendum
esse
lubentius legerem
pro ... vel ».
:

sed tamen meliora edoctus, nunc eo


Ce sont ces deux
nouvelles conjectures qui seront reprises dans son commentaire en
français. Le commentaire critique en latin, bien qu'étant antérieur
au commentaire en français, mérite d'être consulté, car il est plus
érudit et permet, en particulier, de déterminer l'origine de leçons
citées de façon trop allusive dans son commentaire en français.
Ainsi, au c. 1,1 19, 4, Coray pour justifier sa correction de en
dit, dans son commentaire en français, que cette correction
est «confirmée par un manuscrit» sans autre précision. Le
commentaire en latin précise, lui, qu'il s'agit de «Serv'inus e Mss»,
c'est-à-dire de la collation de Servin donnée à la fin de l'édition de
Foes.
NOTICE 107

(1525) et de Cornarius (1546), sans examen critique de


l'origine des leçons et de leur valeur relative et sans
consultation du texte des manuscrits de Paris, que
Coray aurait pu coUationner tout aussi facilement que
Littré.
L'ère des éditions fondées en grande partie sur les
leçons des manuscrits commence avec Emile Littré
(tome I, 1839, p. 557-637). C'est à partir de lui que l'un

des deux manuscrits anciens est utilisé, le manuscrit A.


Avec une grande lucidité, Littré a reconnu son impor-
tance pour l'édition, comme l'indique le Nota inséré en
tête de son apparat critique (p. 570) dont voici un
extrait: «Il est certain... qu'il {se. le Parisinus
gr. 2253 =
A) contient une foule de leçons qui comblent
des lacunes, rétablissent le sens et fournissent d'excel-
lentes corrections... En
conséquence, je lui donnerai
souvent la préférence». Mais Littré ne connaissait
qu'indirectement l'autre manuscrit ancien, le manus-
crit M, par plusieurs copies qu'il pouvait lire à la
Bibliothèque royale de Paris. Il est revenu sur certains
de ses choix ou de ses traductions dans le tome II
{Addenda et Corrigenda, p. xlix-lii) en tenant compte
d'observations que Dùbner lui avait communiquées, et

aussi de remarques critiques d'Ermerins.


La seconde grande édition complète d'Hippocrate au
xix" siècle est l'œuvre du médecin hollandais Ermerins.
Le texte grec de ï Ancienne médecine, accompagné d'une
traduction latine, se trouve au tome II (1862), p. 19-48.
L'édition d'Ermerins repose fondamentalement sur le
travail de collation des manuscrits fait par Littré. Il
y
ajoute simplement la collation personnelle d'un manus-
crit récent (Voss. = Vossianus gr. F ne
10^ s. xvi) ; il

dispose pas pour ce traité, comme pour


c'est le cas
d'autres, de la collation du manuscrit M faite par
Cobet. Ermerins a introduit une innovation malheureu-
se en réunissant en un même ouvrage, qu'il attribue à
un même auteur, à un sophiste ou à un rhéteur, les
traités Loi, Art, Ancienne médecine, avec une numérota-
108 ANCIENNE MÉDECINE
tion de chapitres continue, si bien que le c. 1 de
VAncienne médecine devient le c. 19 chez Ermerins^.
Néanmoins, l'édition d'Ermerins n'est pas sans mérite;
il a, en particulier, justifié ses choix dans des notes

critiques en bas de page.


On ne peut pas en dire autant de l'édition de
Reinhold (vol. 1, 1865, p. 14-36) qui présente, de façon
curieuse, un texte apparat critique, sans
seul sans
traduction, et sans commentaire, si bien qu'il n'est pas

facile de déterminer ni l'origine du texte choisi, ni la


raison des choix. Il est clair toutefois que Reinhold a
utilisé, pour la première fois dans l'histoire du texte, les
leçons de M. De tous les éditeurs, Reinhold est celui qui
s'écarte le plus intrépidement du texte des manuscrits ;

sur la masse de ses changements, pour la plupart


inutiles et téméraires^, certaines solutions sont astu-
cieuses et parfois judicieuses.
Il faut attendre l'extrême fin du xix*" siècle pour que
les du manuscrit M apparaissent systématique-
leçons
ment avec celles de A dans l'apparat critique. Le mérite
de l'édition de H. Kuehlewein (t. I, 1894, p. 1-30) est de
présenter pour la première fois un texte critique qui
repose essentiellement sur la collation de A et de M et
qui donne cette collation dans l'apparat critique. Son
édition avait été précédée d'un article sur la tradition
manuscrite de VAncienne médecine où il soulignait en
particulier l'importance de l'accord de A et de M^.
Depuis lors, les bases qui servent à établir le texte
n'ont pas changé. L'édition critique la plus récente,
celle de Heiberg (CMG I, 1, 1927), repose également sur

1. Comp. J. Jouanna, Hippocrate, V, \. Des vents, De l'art...,

p. 215.
2. Certaines des conjectures de Reinhold ont été critiquées par
Ermerins dans le volume III de son édition d'Hippocrate
{Epimetrum, p. xcv-xcviii).
3. H. Kuehlewein, «Die Textesuberlieferung der angeblich
hippokratischen Schrift. Ober die alte Heilkunde», Hermès, XXII,
1887, p. 179-193.
NOTICE 109

la collation de A
de M. La différence entre les
et
éditions, si on laisse de côté la question du dialecte,
réside désormais essentiellement dans le choix entre les
variantes de A et de M et dans l'utilisation des
conjectures. L'édition de Kuehlewein se caractérise par
une préférence nette pour le manuscrit A. 11 a été suivi
en cela, à quelques exceptions prés, par W. H. S. Jones
(I, 1923, p. 12-64) dont l'édition ne donne qu'un
apparat critique très sélectif. Pourtant, assez vite après
la parution de l'édition de Kuehlewein, des critiques ont

souligné que l'éditeur avait accordé trop systématique-


ment la préférence à A sur M. C'est le cas de la
recension signée de l'initiale B. (=
dans le Blass)
Litterarisches Centralblatt. de779 «il peut
1896, p. :

sembler que l'éditeur a attribué quelque peu à l'excès la

,
préférence à A sur M». Ce jugement est partagé par
H. Weber, dans son article «Zu der Schrift
1-11», Philologus, LVI, 1897,
Th. Gomperz qui a édité en 1911 (à la fin de son article
« Die hippokratische Frage und der Ausgangspunkt
p. 231-2441.

ihrer Lôsung»..., p. 229-241) le texte partiel de l'an-


cienne médecine sans apparat critique (c. 1 à 13 et c. 20
à 24) accorde aussi plus de crédit que Kuehlewein aux
leçons de M. Dans l'édition de Heiberg, parue en 1927,
la préférence donnée au manuscrit A est également

moins grande; il reste qu'en l'absence d'un commentai-


re critique la raison de certains choix, en apparence au
moins singuliers, demeure énigmatique.
Le texte établi par Heiberg a eu de l'influence sur les
éditions suivantes. W. H. S. Jones a refait une édition
en 1946 avec introduction, texte, traduction, et notes
additionnelles. Alors que sa première édition avait pour
modèle principal le texte de Kuehlewein, sa seconde
édition s'inspire du texte de Heiberg.

1.Voir aussi G. Schonack, Curae hippocraiicae, Berlin, 1908,


p. 83 et 88 sq. ;E. Nachmanson, C.R. de Jones^ in Philol.
Wochenschr. XL IV, 1924, p. 226.
110 ANCIENNE MÉDECINE
Dans les travaux du xx^ siècle une mention
toute spéciale doit être faite de la contribution de
A.-J. Festugière, Hippocrate. L'Ancienne médecine. In-
troduction, traduction et commentaire, Paris, 1948.
Comme l'indique le sous-titre, ce n'est pas à proprement
parler une édition, puisque le texte qui sert de base est

celui de Heiberg (sans apparat critique), texte qui «a


été... reproduit pour la commodité du lecteur»
(p. xxxiii). Mais par son introduction, par sa traduction
beaucoup plus précise que celle de Littré, et surtout par
son commentaire d'une richesse inégalée, aussi bien
dans le détail de l'expression que dans l'interprétation
du contenu et dans les rapprochements avec le reste de
la littérature grecque, ce travail constitue le premier

grand monument de la renaissance des études hippocra-


tiques en France au xx' siècle.
Après le travail de Festugière, une mention spéciale


doit être faite du commentaire critique de S. L. Radt
dans un long article modestement intitulé «Zu
et paru dans Mnemosyne
XXXII, 1979, p. 75 à 118, Radt réexamine, à partir de
l'édition de Heiberg, l'établissement du texte et le sens
:

de nombreux passages du traité. Il a eu le mérite de


rassembler un matériel très riche, non seulement chez
les éditeurs précédents, mais aussi chez de nombreux
critiques dont les analyses ou conjectures éparses
avaient été, en partie, négligées par les éditeurs précé-
dents. Par ailleurs, poursuivant l'orientation amorcée
par Blass et par Weber, il a bien montré que les édi-
teurs ont eu tendance à privilégier certaines leçons
de A inférieures à celles de M^.

1. Il existe aussi une édition avec traduction en catalan due


à J. Alsina (avec la collaboration de E. Vintro), Hipocrates,
Tractais mèdics, M : De aère aquis locis, Prognosticum, De prisca
medicina, Barcelone, 1976, et une édition avec traduction en
espagnol de C. Eggers Lan, Hipocrates. De la medicina antigua,
Mexico, 1987.
NOTICE 111

Parmi nombreuses traductions, sans l'édition du


les
texte, la seule qui apporteune contribution à l'histoire
du texte est la traduction allemande de Hans Diller^,
car elle repose implicitement sur une édition originale
du texte grec, que l'on peut souvent reconstituer grâce
à la précision de la traduction^.

La présente édition donne une collation personnelle


de A et de M faite directement sur les manuscrits elle :

s'est efforcée d'être aussi précise que possible, mais, à la


différence de l'édition de Heiberg, elle passe sous silence
les nombreuses fautes d'orthographe ou d'accentuation
dans A n'ayant aucune incidence sur l'interprétation
des formes. Néanmoins, quand ces formes doivent être
signalées pour une autre raison, les fautes d'orthogra-
phe et leurs corrections sont notées, mais non les fautes
d'accent, sauf si elles sont susceptibles d'avoir quelque
signification. Quant au choix des variantes et de
l'interprétation, il résulte d'abord d'un examen person-
nel des leçons de A et de M pesées, sans préférence
systématique, à l'aide de tous les moyens de la critique
verbale, puis d'une confrontation avec les différents
choix des éditeurs ou critiques sans en privilégier

1. H. Diller, Hippokrates. Schrifien, Reinbek bei Hamburg,


1962, p. 201-223.
2.D'autres traductions sont utiles pour l'interprétation; en
français J.-B. Gardeil, Œuvres d'Hippocrate, t. I, Paris, 1855
:

(p. 422-440); Ch. Daremberg, Œuvres choisies d'Hippocrate, 2'" éd.,


Paris, 1855 (extraits, p. 611-616); R. Joly, Hippocrate. Médecine
grecque, Paris, 1964 (extraits, p. 45-53); en allemand R. Fuchs, :

Hippokrates. Sàmmtliche Werke, I, Munich, 1895 (p. 18-39);


R. Kapferer-G. Sticker, Die Werke des Hippokrates, Teil II,
Stuttgart-Leipzig 1934 (p. 13-37); W. Mûri, Der Arzt im
,

Altertum, 3' éd., Munich, 1962 (c. 3-21 avec le texte grec sans
apparat critique, p. 150-183); en anglais F. Adams, The genuine
:

Works of Hippocrates, London, 1849 (p. 132-146), J.Chadwick-


W. N. Mann, The médical works of Hippocrates {\" éd. Oxford,
1950), réimprimé dans G. E. R. Lloyd [éd.], Hippocratic writings,
Hammondsworth, 1978, p. 70-86; en italien M. Vegetti, Opère :

di Ippocraie, 2' éd. Turin, 1976, p. 151-190 (avec des notes


suggestives); A. Lami, Ippocrate. Testi di medicina greca, Milan,
1983 (c. 1-20 seulement, p. 185-211).
112 ANCIENNE MÉDECINE
aucun. Les notes justifient, dans la mesure du possible,
les choix. Quant d'une
à la traduction, elle résulte aussi
première ébauche, confrontée ensuite systématique-
ment à d'autres, en particulier celles de Littré, Jones,
Festugière, Diller. Tout en n'hésitant pas à reprendre
parfois, quand on ne pouvait pas être plus précis, la
traduction de Festugière, on s'est efforcé d'éviter, pour
rendre les termes de la réalité physiologique et médica-
le, les modernismes de sa traduction qui peuvent
procurer de l'agrément au lecteur, mais donnent une
idée inexacte de l'histoire des sciences. Il reste que la
littérature médicale technique du siècle ne forme pas,
comme de nos jours, une production technique séparée
de la littérature et de la pensée philosophique contem-
poraines. C'est ce qu'a bien compris Festugière, dans
son introduction et dans son commentaire, et c'est ce
que nous avons essayé de montrer aussi dans notre
introduction et dans nos notes, sans avoir eu l'impres-
sion de refaire ce que Festugière avait fait, et très
souvent excellemment fait, même si sa lecture du traité
hippocratique est parfois un peu trop platonisante.

J'ai plaisir à exprimer tous mes remerciments à mes


deux réviseurs, A. Anastassiou et V. Langholf qui ont
apporté, avec un amical dévouement et une extrême
compétence, tout le soin nécessaire pour supprimer des

imperfections et faire des suggestions enrichissantes,


ainsi qu'à M. Grmek dont l'amicale et fidèle collabora-
tion m'est très précieuse pour tout ce qui concerne
l'histoire de la médecine. Mes remerciements s'adres-
sent également à D. Manetti qui a relu le manuscrit
et à L. Villard qui a bien voulu accepter une fois encore
de rédiger l'index des mots. Une pensée reconnaissante
va enfin à tous les auditeurs du séminaire hippocratique
de la Sorbonne où cette édition a été élaborée.
GONSPECTVS SIGLORVM

I. CODICES

1. De vetere medicina liber.

M = Marcianus gr. 269; X. s.

M^ = emendatio scribae ipsius.


M^ = manus posteriores.
M**^ = lectio ante correctionem.
j^corr _ igçj^iQ pQg^ correctionem.
M""^* = lectio post rasuram.
A =Parisinus gr. 2253; s. XI.
A^ = emendatio scribae ipsius.
A^, A^, A* = manus posteriores.

Raro memorantur :

I
114 ANCIENNE MÉDECINE
Foes^ = A. FoES, Oeconomia Hippocratis, Franco-
furdi, 1588.
Mercurialis = Mercurialis, Hippocratis opéra quae
exstant ..., Venetiis, 1588.
Foes^ = A. FoES, Magni Hippocratis ... opéra
omnia, Francofurti, 1595, Sect. I, p. 9-
20 (notes, col. 36-39).
L = lectiones e Servini exemplari desumptae
apud Foes^ (col. 46-48).
Q' ^ lectiones e Fevrei exemplari desumptae
apud Foes^ (col. 46-48).
Lind. =J. A. Van der Linden, Magni Hippo-
cratis Coi opéra omnia..., vol. I, Lug-

Mack

Coray = '
duni Batavorum, 1665, p. 14-40.
^Hippocratis opéra omnia..., t. I, Viennae
Austriae, 1743, p. 16-35.


-
Littré =
crate, t.
..
I,
,
... ',
É. LiTTRÉ, Œuvres complètes d'Hippo-
Paris, 1839, p. 570-637;
1887.

cf.

etiam Addenda et Corrigenda in t. II,

Paris, 1840, p. xlix-lii.


Ermerins = F. Z. Ermerins, Hippocratis et aliorum
medicorum veterum reliquiae, t. II,Tra-
jectiad Rhenum, 1862, p. 19-48; t. III,

Reinhold

Weil
=
=
,
1864; Epimetrum, p. xcv-xcviii.
C. H. Th. Reinhold,
1865, p. 14-36.
',
vol. I,

H. Weil, «Observations critiques». Re-


II, 1878, p. 86-89
vue de Philologie, N.S.
(Hippocrate).
Kuehlewein = H. Kuehlewein, Hippocratis opéra quae
feruntur omnia, vol. I, Lipsiae, 1894.
B. = Blass, C. R. de Kuehlewein, Lilera-
risches Centralblatt, 46, 1896, p. 779 sq.
SIGLA 115

Weber^ = H. Weber, «Zu der Schrift


I-II», Philologus, LVI, 1897,
p. 231-244.
Wilamowitz = U. von Wilamowitz-Moellendorff,
«Lesefruchte 9», Hermès, XXXIII, 1898,
p. 518 sq. (= Kleine Schriften IV, Berlin,
1962, p. 29-30).
Weber^ = H. Weber, «Zu der Schrift
», Philologus, LVIII, 1899,
p. 215-223.
Diels = H. DiELS, «Hippokratische Forschun-
gen I», Hermès, XLV, 1910, p. 125,
n. 2.
Schonack = G. Schonack, «Coniectanea in nonnulla
scripta Hippocratea. I. De prisca medi-
cina», Philologus, LXIX, 1910, p. 428-
434.
Gomperz = Th. Gomperz, Die hippokratische Frage
«

und der Ausgangspunkt ihrer Lôsung»,


Philologus, N.F., XXIV, 1911, p. 213-
241 (éd. c. 1-13 et c. 20-24) Hellenika, =
t. II, Leipzig, 1912, p. 324-354.

Pohlenz = M. Pohlenz, «Des zwanzigste Kapitel


von Hippokrates De prisca medicina»,
Hermès, LUI, 1918, p. 396-421 (éd.
c. 20).
Jones^ = W. H. S. Jones, Hippocrates, voL 1, Cam-
bridge (Massachusetts)/London, 1923.
Heiberg = I. L. Heiberg, Hippocralis opéra, CMG,
I 1, Lipsiae et Berolini, 1927, p. 36-55.
Edelstein = L. Edelstein, und die
Sammlung der hippokratischen Schriflen,
Problemata IV, BerHn, 1931.
Gutmann = M. Gutmann, Die Nebensàlze in ausge-
wahllen Schriflendes hippokralischen Cor-
pus und ihre Bedeutung fur die Verfasser-
frage, Diss. Munchen, 1929.
116 ANCIENNE MÉDECINE
= Wanner,
Wanner
-,H. Studien
Diss. Zurich, 1939.
zii

Jones^

Festugière
= W. H.

of

=A.-J.
S.
cine in Ancient Greece.
7]
(éd. p. 38-98).
Festugière.
,
Jones, Philosophy and Medi-
With an Edition
Baltimore, 1946

Hippocrate. L'An-
cienne médecine, Paris, 1948.
Diller^ = H. Diller, « Hippokratische Medizin
und attische Philosophie», Hermès,
LXIII, 1952, p. 385-409 = Kleine Schrif-
ten zur antiken Medizin, Berlin, 1973,
p. 46-70.
Kùhn =J. H. KuHN, System- und Methoden-
probleme im Corpus Hippocralicum in
Hermès, Einzelschriften XI, Wiesbaden,
1956.
Diller^ = Hippokrates. Schrifien, Reinbek bei
Hamburg, 1962, p. 201-223.
Mûri = W. Mûri, Der Arzi im Alierium. 3^ éd.,
1962, p. 150-183.
Dihle = A. Dihle. « Kritisch-exegetische Bemer-
kungen zur Schrift Cher die alte Heil-
kunst». Muséum Helveticum, XX, 1963,
p. 135-150.
Herter^ = H. Herter, «Die Treffkunst des Arztes
in hippokratischer und platonischer
Sicht», Sudhoffs Archiv Gesch. éd. Na- M
XLVII,
turœiss., 1963, p. 247-290.
Herter^ = H. Herter, « Die kulturhistorische Théo-
rie der hippokratischen Schrift von der
Alten Medizin», Maia, XV. 1963, p. 464-
483.
Lloyd = G. E. R. Lloyd, «Who is attacked in On
Ancient Medicine?», Phronesis, VIII,
1963, p. 108-126.
SIGLA 117

= .
Fritz

»,
von Fritz, «Einige Bemerkungen
zur Uberlieferung und Textkritik von
Wiener

Radt =S.
»,
Studien,

p.
L.
LXXIX,
Radt, «Zu

75-118.
1966, p. 165-178.

Mnemosyne, XXXII, 1979,

Index Hippocraticus = J.-H. Kuhn/U. Fleischer ...,


K. Alpers, a. Anastassiou, D. Irmer,
V. ScHMiDT, Index Hippocraticus, Got-
tingae, 1986-1989.
HIPPOCRATE

DE L'ANCIENNE MÉDECINE

I. 1 Tous ceux
qui, ayant entrepris de traiter de la
médecine, oralement ou par écrit^, se sont donné
comme fondement à leur thèse un postulat^ tel que le
chaud, le froid, l'humide, le sec, ou tout autre postulat
de leur choix', simplifiant la cause originelle des
maladies et de la mort chez les hommes et postulant
dans tous les cas la même cause, un ou deux principes,
commettent des erreurs manifestes sur bien des points
de leur thèse*, mais sont surtout blâmables parce que
ces erreurs portent sur un art existant réellement^,
auquel tout le monde a recours en vue des choses les
plus importantes^, et dont tout le monde honore' au
plus haut point les bons praticiens et
les bons profes-
sionnels®. 2 Parmi les professionnels, les uns sont
médiocres*, les autres sont de beaucoup supérieurs^". Or
cette différence, si l'art de la médecine n'existait
absolument pas et si l'on n'y avait fait aucune
observation ni aucune découverte, n'existerait pas^^,
mais tous seraient semblablement sans expérience et
sans connaissance de cet art^^, et c'est le hasard qui

9. Les manuscrits A et M donnent deux synonymes, A


M. La prédominance de en prose ionienne, face à la
prédominance de en prose attique, fera préférer ici la leçon
de M. Les dictionnaires de l'Antiquité qui expliquent par
(Hésychius, Et. Magnum) confirment que la leçon de A est
une glose qui a remplacé la leçon originelle conservée par M. Le
choix de par les éditeurs modernes (Kuehiewein, Heiberg,
Jones^-*, Festugiére) n'est pas heureux.
9,
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. 1 ircpl Littré

, 570

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cf.

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10
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13
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1 1

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: -- e corr. M^
om. A 14
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:
:
Littré

M
A
||
:

||

8'
12 '
om. M.
om. A
||

||
119 ANCIENNE MÉDECINE
régirait en totalité le sort des malades^ En réalité, il
n'en est pas ainsi ; mais, de même
que dans tous les
autres arts les professionnels diffèrent beaucoup entre
eux par la main et par l'intelligence^, de même en est-il
pour la médecine. 3 C'est pourquoi j'ai estimé, pour ma
part, qu'elle n'a pas besoin d'innover en posant un
postulat^, comme on le fait pour les choses invisibles et
douteuses; car pour ces choses-là, il est nécessaire, si
l'on entreprend d'en dire quoi que ce soit, de recourir à
un postulat, comme c'est le cas pour les choses qui sont
au ciel ou sous la terre"* quand bien même quelqu'un
:

les exposerait et les concevrait^ comme elles sont, ni


celui qui expose lui-même ni ceux qui l'écoutent ne
verraient clairement s'il est dans le vrai ou non car il ;

n'y a pas de critère auquel on puisse se référer pour


avoir une connaissance exacte^.
II. 1 Au contraire, la médecine est en possession

depuis longtemps de tous ses moyens, d'un point de


départ et d'une voie qui ont été découverts'' grâce à ces
;

moyens, des découvertes en grand nombre et de belle


qualité ont été faites au cours d'une longue période de
temps^, et les découvertes restantes seront faites,
pourvu que, joignant à des dons suffisants la connais-
sance des découvertes acquises, on les prenne pour
point de départ de la recherche. 2 Mais celui qui,
rejetant et récusant tous ces moyens, entreprend les
recherches par une autre voie et un autre procédé et
prétend avoir fait une découverte, celui-là s'est trompé
et continue à se tromper*. Car c'est impossible. Pour

1.

règne total de la .
Admettre l'absence
L'art et
de la
totale ,
c'est admettre le
hasard sont opposés et s'excluent
le

.
l'un l'autre; cf. aussi c. 12, 132, 18-133, 6, ...
On retrouve cette même antithèse dans d'autres traités de
la Collection hippocratique voir Ari, c. 4, Jouanna 227, 11 sq.
;

avec la note ad loc, et Lieux dans l'homme, c. 46, Littré VI,


342, 4-344, 2 (= Joly 76, 6-77, 4). Elle est du reste fréquente
aux v*^ et IV'' siècles dans les discussions sur l'existence de l'art
et sur le rôle du hasard.
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Littré (app. crit.) A

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||
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10
Ermerins :
:

16
||

Kuehlewein
13 (pr.)
: - || 15

-
||

^
||

:
|| 18 Kuehlewein :

et fort, sequitur rasura 1 litt. M A : M


-
|| ||

Lind. : A A^ M || A :

M II A^M : A jj 19 ait. M : A.
120 ANCIENNE MÉDECINE
quelles raisons nécessaires c'est impossible, je vais
essayer, pour ma montrer, en exposant et en
part, de le

montrant que l'art existe^ De cette démonstration il


apparaîtra clairement qu'il est impossible de faire des
découvertes par quelque moyen différent de celui-ci.
3 Et par-dessus tout, il me semble que l'on doit,
lorsqu'on traite de cet art, exposer des choses qui soient
concevables par les profanes^. Car l'objet qu'il convient
de rechercher et d'exposer n'est autre que les affections
dont ces gens-là sont eux-mêmes atteints et dont ils
souffrent. Sans doute ne leur est-il pas aisé de connaître
parfaitement par eux-mêmes leurs propres affections, la
façon dont elles naissent et dont elles cessent^, les
causes qui les font croître et décliner, puisqu'ils sont des
profanes mais quand elles sont découvertes et exposées
;

par un autre, c'est facile. Car il ne s'agit de rien d'autre


pour chacun que de se remémorer, en les écoutant, les
accidents qui lui sont arrivés*. En revanche, si l'on
passe à côté de la faculté de compréhension des pro-
fanes, et si on ne met pas les gens qui écoutent dans
cette disposition d'esprit, on passera à côté de la
réalité*. C'est donc aussi pour ces mêmes raisons que la
médecine n'a nullement besoin de poser un postulat*.
III. 1 A l'origine, l'art de la médecine n'aurait été ni
découvert ni recherché — car le besoin ne s'en serait
point fait sentir — s'il avait été profitable aux gens
souffrants d'user, dans leur régime et dans leur
alimentation, des mêmes aliments, des mêmes boissons,

5. a le sens prégnant de «ce qui est réellement», «la


réalité»;voir déjà supra, p. 118, n. 5. Pour un autre emploi
comparable de dans la Collection hippocratique, voir Maladie
sacrée, c. 17, Littré VI, 392, 6 (= Grensemann 86, 15) "
). Comme
:

propos. Littré : (lege " le

remarquent Coray (p. 123)Festugière (p. 37


et n. 21), cet=
emploi se rencontre aussi dans la prose ionienne d'Hérodote
(I, 30, 3; I, 97, 1 IX, 11,5). Cet usage annonce Platon; à notre
;

passage on comparera surtout Platon, Phédon 66 a


(rapprochement déjà fait par Littré I, 560, n. 1).
II, 2

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120

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, 574

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10
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15

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Littré
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13
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scripsi : || 15 om. || :

16 (pr.) om. M 17 ^*' om.


*^ -
: :
|| || ||

18 post add. 19 :

*^
II || ||

om. II
\''°" """ : - in ras. || om. .
121 ANCIENNE MÉDECINE
et, en général, du même régime que les gens bien
portants, et s'il n'y avait pas eu d'autres choses
meilleures que celles-là. 2 Mais en réalité, c'est la
Cjiécessité elle-même^ qui fit que la médecine fut
recherchée et découverte chez les hommes, car il n'était
pas profitable aux gens souffrants de prendre la même
alimentation que les gens bien portants, de même
qu'aujourd'hui non plus cela n'est pas profitable. 3 Et
en remontant encore plus haut^, j'estime, pour ma part,
que même le régime et la nourriture des gens bien
portants dont on use actuellement n'auraient pas été
découverts s'il avait été tout à fait suffisant pour
l'homme de manger et de boire les mêmes choses que le
bœuf, le cheval, et tous les animaux en dehors de
l'homme, comme par exemple les produits de la terre,
fruits^, broussailles et fourrages car, grâce à ces
;

produits, ils se nourrissent, s'accroissent et vivent à


l'abri des souffrances sans nul besoin d'un autre régime.
Et à vrai dire, je crois pour ma part qu'à l'origine,
l'homme aussi a usé d'une telle nourriture. Quant au
régime actuellement découvert et élaboré avec art, il
a fallu une longue période de temps*, à mon avis, pour
qu'il soit ce qu'il est. 4 En effet, comme^ les gens
éprouvaient bien des souffrances terribles par suite
d'un régime fort et bestial, du fait qu'ils ingéraient
des aliments crus, intempérés et dotés de qualités
fortes^ —
souffrances analogues à celles que les gens
d'aujourd'hui éprouveraient aussi' à la suite de ce
régime, tombant dans de fortes douleurs, dans des
maladies, et rapidement dans la mort; sans doute est-ce
à un moindre degré que les gens d'alors devaient

L'auteur, remontant plus haut dans le temps, va traiter


2.
longuement de la découverte du régime des gens en santé, qui est
antérieure à la découverte du régime des gens malades. Il va
s'efforcer de montrer que les causes de la naissance de ces deux
découvertes sont analogues, ainsi que leurs méthodes et leur but.
On est loin de l'oppositon entre cuisine et médecine du Gorgias de
Platon voir Notice, p. 77.
;
III, 1

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|| 12 om. || 13
II
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|| 13 sq.
: || 15 om. || Kuehlewein
|| 16 : || : || 17

- ||
||

20
18 om.
:
|| 19
||
:

^ : -.
||
122 ANCIENNE MÉDECINE
éprouver ces à cause de l'habitude^
souffrances, ;

toutefois ils éprouvaient fortement même à ce


les
moment-là, et le plus grand nombre, ceux qui avaient
une nature plus faible, devaient périr, tandis que ceux
qui leur étaient supérieurs devaient résister plus long-
temps^, de même qu'aujourd'hui encore, après avoir
pris une nourriture forte, les uns s'en remettent facile-
ment tandis que les autres n'y arrivent qu'au prix de
bien des souffrances et de bien des maux dès lors, — ,

pressés par ce besoin^, ces gens-là, à mon avis, cher-


chèrent une nourriture adaptée à leur nature et décou-
vrirent celle dont nous usons actuellement. 5 Ainsi
donc, à partir des grains de blé, après les avoir
mouillés*, mondés, moulus, tamisés, pétris et cuits,
ils confectionnèrent^ le pain, et à partir des grains

d'orge, la galette*. Et procédant à bien d'autres


opérations pour préparer cette nourriture, ils firent
bouillir et rôtir, mêlèrent et tempérèrent les substances
fortes et intempérées à l'aide de substances plus faibles,
façonnant tout en conformité avec la capacité naturelle
de l'homme car ils estimaient que, dans le cas des
;

aliments trop forts, la nature de l'homme ne sera pas

4. . Toutes les opérations nécessaires à la fabrication


du pain semblent être énumérées dans un ordre chronologique il

,
;

faut donc admettre que le mouillage du grain servait à séparer le

d'Alexandrie)

,
grain de la balle; comparer Geoponica 3,8 (à propos du blé

, «il faut le mouiller et


monder». Radt. dans une longue note (p. 77-80), préfère adopter
une conjecture de Coray, «après avoir vanné». Sur cette
conjecture de Coray, voir Notice, p. 106, n. 5 de la page 105.
le

5. La variante de A

sont à la troisième personne du pluriel .(cf.


correction entraînée par la V^ pers. du pluriel
,
qui est une première personne
du pluriel, ne convient pas dans un développement où les verbes
etc.). Est-ce une

précède? Est-ce au contraire une ledio difficilior conservant, avec


qui

corruption, un primitif comme l'a conjecturé


Ermerins? On aurait ici un exemple de réduplication de (cf.

Denniston, Greek Particles ..., p. 385 sq.). Ces exemples sont rares,
peut-être parce que les copistes ont tendance à les supprimer.
III, 4 122

€, €
6€€
, €,

cikos,

- —

.
5 ,

10

15
,,
,
,
5

"

,
[

-
,
fj

f[,
578

Test. 10
Kuhn XIX,
1 1

p. 97).
]
] 153, 10).
cf. Erot. s.v.
cf.

(M
Gal

1 1
Gloss., s.v.

, éd. Nachmanson
(A 4 supra,

60, 5-7
p. 98

= supra,
= éd.

2
M II
post
M
add.
: - M
A
|| 6
|| 3
M
A
:
:

A ||
M
7
|| 4
A'M
A

A 8
II
Kuehlewein : AM ||
AM
vel Coray || Kuehlewein : A om. M |

9 post add. M || A*M : M'


(-- add. s.l.) ||
10 A Gai. : M ||

Ermerins : A M ||
post add. M sed
del.
M*)
Ermerins

13 sq.
:
M"""' Il

A*M^
: -
11
M^""»

:
AM
||

||

Littré
M

post
AM
:

:
M

-,
||
:

13
A

AM
||

om.
A

||
||

M
15
12

||
AM™"^

iter.
(--

M :
e

M'^* (post
corr.

A
A
||

||

-01 ras. 1 litt.) : A || Index Hippocraticus


s.v. III (p. 578, . 19) (cf. Zwing.•"») :

™" (-V et e corr. *-^) , Reinhold Heiberg

16
, apud Kuehlewein
Diels
Kuehlewein :
||

* ||
:

Littré
||

(app. crit.) : A M.
123 ANCIENNE MÉDECINE
capable de les dominer si elle les ingère\ et qu'il
résultera de ces aliments eux-mêmes souffrances, mala-
dies et mort, tandis que de tous les aliments qu'elle
est capable de dominer, il résultera nourriture, accrqis-
sement et santé^. 6 Or, à cette découverte et à cette
enquête, quel nom plus juste ou plus adéquat pourrait-
on donner que celui de médecine, puisqu'il s'agit d'une
découverte^ faite pour la santé, le salut et la nourriture
de l'homme, en remplacement de ce régime-là qui était
à l'origine des souffrances, des maladies et de la mort^?

IV. 1 Si cela ne passe pas communément pour un


art, ce n'est pas sans raison car dans un domaine
;

où personne n'est profane, mais où tout le monde


est savant^ par le fait de l'usage et de la nécessité,
dans un tel domaine* personne ne mérite le titre
de «spécialiste de l'art». 2 Pourtant ce fut une grande
découverte', fruit de beaucoup d'observations et de
beaucoup d'art; ce qu'il y a de sûr, c'est qu'encore
de nos jours ceux qui s'occupent des exercices et
de l'entraînement des athlètes^ ajoutent sans cesse
quelque découverte en appliquant la même méthode
dans leur recherche pour déterminer quels sont les
aliments^ et les boissons dont l'athlète triomphera au
mieux et grâce auxquels il sera au summum de sa
force^".

V. Mais examinons aussi la médecine reconnue


1

comme qui a été découverte pour les malades


telle, celle
et qui possède à la fois un nom et des spécialistes de

préférable à la conjonction causale


L'antécédent de ce relatif causal est .
3. Radt, p. 80, note judicieusement que le relatif 6

4. Dans cette fin de chapitre, l'auteur oppose par deux fois


est
adoptée par les éditeurs.

deux triades 1) 123, 1

opposé à
;2) 123, 6
. opposé à

Dans la vulgate
avant Littré, cette symétrie a partiellement disparu à cause de
l'omission de dans la branche de M recc.
III, 5


'
. € ,

€€,
123


€ , «
8€

6


Se

,
€ ;
If

€ €,- €,

.
IV. 1

10 •


2 ||


580

15

V. 1
.
1

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8 : S' 3sq. ||

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13 :
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||

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: || 15 :
|| 16
: || :
™'"' (- in ras. A*) || 17
: || :
|| om. ||

: || 19 : .
124 ANCIENNE MÉDECINE
l'art : de ces buts? Comment
vise-t-elle, elle aussi, l'un
donc a-t-elle commencé^? A mon avis, comme je l'ai
dit au commencement^, on n'aurait même pas entamé
les recherches sur la médecine si le même régime avait
convenu aussi bien aux malades qu'aux bien portants.
2 Ce qu'il y a de sûr, c'est qu'encore de nos jours
tous ceux qui n'usent pas de la médecine les —
Barbares et un petit nombre de Grecs conservent —
(quand ils sont malades) le même régime que les gens
bien portants, n'écoutant que leur plaisir, et ils ne
sauraient ni renoncer à aucun des mets qu'ils désirent,
ni même en réduire la quantité^. 3 Mais ceux qui ont
cherché et découvert la médecine, tenant le même
raisonnement que ceux dont il a été question dans mon
développement précédent*, commencèrent, à mon avis,
par retrancher sur la masse de ces aliments eux-mêmes
et à réduire la quantité de beaucoup à très peu*.
4 Mais comme, à ce qu'ils virent, ce régime, parfois
suffisant pour certains malades et manifestement béné-
fique pour eux, ne l'était pas cependant pour tous,
puisque certains étaient dans un état tel qu'ils ne
pouvaient même pas triompher d'une petite quantité
d'aliments, et comme, dès lors, c'est d'un régime plus
faible que de tels malades leur paraissaient avoir besoin,
ils découvrirent les potages en mélangeant une petite

quantité de substances fortes à beaucoup d'eau et en


ôtant la force de ces substances par le tempérament et
la cuisson. 5 Enfin, pour les malades qui ne pouvaient
même pas triompher des potages, ils retranchèrent aussi

1. On a choisi la
conviennent bien à la vivacité du ton du discours.
2. Voir c. 3, 120, 16 121, — Après
sa longue parenthèse sur «l'archéologie» du régime des gens bien
portants, l'auteur revient à «l'archéologie» du régime des malades.
.
solution des interrogations directes. Elles
, 124

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1

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||
||

Littré :

-. ||
20 :
||
:
125 ANCIENNE MÉDECINE
ces potages et en vinrent aux boissons encore veillè-
;

rent-ils à ce qu'elles fussent dans une juste mesure tant


par le tempérament que par la quantité, s'abstenant
d'administrer des boissons trop abondantes et trop
intempérées ou aussi trop insuffisantes^.
VI. 1 Voici une chose qu'il faut bien savoir : les sujets
à qui les potages ne sont pas bénéfiques dans les mala-
dies mais sont contraires^, voient s'aviver leur fièvre et
leurs douleurs quand ils prennent ces potages, et il est
évident que ce qui a été ingéré apporte nourriture et
accroissement à la maladie^, mais dépérissement et fai-
blesse au corps. 2 Et tous les sujets qui, étant dans
cette disposition, ingéreraient un aliment sec, de la
galette de blé ou du pain d'orge, fût-ce en fort petite
quantité, seraient victimes d'un mal dix fois* plus
grand et plus manifeste que s'ils prenaient des potages,
uniquement à cause de la trop grande force de l'aliment
par rapport à leur disposition. 3 Quant au malade à qui
il est utile de prendre des potages, mais non de manger,

s'il mangeait beaucoup, il serait victime d'un mal bien

plus grand que s'il mangeait peu, et même s'il mangeait


peu, en souffrirait. Dès lors, toutes les causes de la
il

souffrance remontent au même principe^, à savoir que

1 Cette dernière mention


.

pement des
(' ) .annonce le dévelop-
c. 9 sq.; comp. en particulier 128, 5

régime trop peu abondant et trop faible est aussi néfaste qu'un
régime trop abondant et trop fort.
Un

3. Le potage ingéré est une «nourriture» ()


pour la

,
maladie. C'est une survivance, dans la pensée rationnelle, d'une
conception plus archaïque de la maladie, conçue comme un être
vorace qui a pénétré à l'intérieur du malade et s'y nourrit à ses
dépens.

. 4. À comp. au c. 16, 140, 7. Le terme


n'est pas employé ailleurs dans la Collection hippocratique.
L'adverbe modifie les deux comparatifs
comp. (avec Radt, p. 83), à ia fin du chapitre,
et ;
€, €
, 5

, 125

€ €
€ . €-
, ,,
Cis

,. , '
VI. 1

?
, ,
" 2

9
9
, ,.
'

'
584

,,
II

3 ' ,
€S , .
<>

2)
1

Il
™" Kuehlewein
: --
:

in ras.
-^ * (- ) ||
™'''
™"'' (--
:
in ras.

|| 2
\ (cf. jam Coray) M (<KPHCG
)
: :
||

M
CI)
A'M
Il

:
3 A. :

.\ \\ 4
M^ (- add. supra
A : *MM || 5
lin.)

]
|| 3sq.
A :

^ II
M ||

»
- ' om.

Reinhold
||
:
M
||

^^'
||

om.
:
A

^
:

|| 8
||
:

7
|| 6

||
post
:
||

add.
6sq.

»
: -^'"*'

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||

-
om. ™'''' : ||
9 :
II

|| 10 : ||
* : ||
1 1 :

||
:
"* || 12 post add.
**' II
: || 13 post add. |1

15
^ om. 16 ante

-
: || : ||
||

add. ||
post add. || :
||

Ermerins : om. || 17 om. || om. || 18


: || : || : (<TG).
126 ANCIENNE MÉDECINE
les substances les plus fortes sont celles qui causent les
dommages les plus grands et les plus manifestes à
l'homme, qu'il soit en bonne santé ou qu'il soit malade.
VII. 1 Quelle différence apparaît donc entre le
raisonnement de l'homme, appelé médecin et reconnu
spécialiste de l'art, qui a découvert le régime et la
nourriture des malades, et le raisonnement de cet
homme-là qui, à l'origine, a trouvé et préparé pour tous
les hommes la nourriture dont nous usons aujourd'hui,
à la place de ce régime sauvage et bestial d'autrefois^?
2 A mes yeux, ce qui apparaît, c'est l'identité de la
méthode, c'est l'unité et la similitude de la découverte^.
L'un a cherché à retrancher tous les aliments ingérés
dont la nature humaine dans l'état de santé n'était pas
capable de triompher à cause de leurs propriétés
bestiales et intempérées, et l'autre tous les aliments
dont le malade, dans la disposition où il se trouvait à
chaque fois, ne pouvait triompher^. 3 En quoi donc
cette recherche-ci diffère-t-elle de celle-là, sinon en ce
qu'elle a plus de faces, qu'elle est encore plus diversifiée
et qu'elle exige une plus grande habileté opératoire*?
Mais le point de départ a été cette recherche-là, qui
fut la première.

VIII. 1 Si l'on examinait le régime des malades en


le comparant à celui des gens en bonne santé, on
trouverait qu'il ne cause pas plus de dommage que le
régime des gens en bonne santé comparé à celui des
bêtes sauvages et à celui des autres animaux*. 2 Pre-
nons en effet un homme souffrant d'une maladie qui

3. La proposition éventuelle ... est citée par


Schwyzer-Debrunner, Griechische Grammaiik ..., II, p. 312, parmi

lescas de propositions éventuelles sans av. Voir aussi M. Gutmann,


Die Nebensatze in ausgewàhlten Schriflen des hippokralischen
Corpus, Diss. Munchen, 1929, p. 39.
VI, 3

VOS
VII.

.
$ € 1 CTcpoiov €€-
ôs è|cûpc
126

5 tous €
'
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,.
'

,
10

,
' , '
15

VIII. 1
||

,.
'
3

. 586

20 2 -
* """ -
- -
1 : 2 : 3 :

^
|| ||

in ras. || 3sq. : || 5 :

•^"" (-V0 in ras. A*) || 6 :


|| :
||

7 transp.

(
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|| ||

post || 8 :
|| 9
:
||
post add. || 10 sq.

^- : ||
:

"» )
'' :
|| 11
ait.

^ ?-
||

om. 12 II : ||post add.


Kuehiewein 13
(- in ras.
del.
^)
Reinhold
||

|| 14 ' A
:

:
:

(<6)
||
' ||

:
:

scripserim
15
'"''''

||

^
-
|| || :
||

16

-(
:
|| scripsi :

:
|| :
' || 17 :
||

; 18 om. :

*
|| ||

19 Littré (app. crit.) ^


^ || :

) || om. .
127 ANCIENNE MÉDECINE
n'appartienne ni à catégorie des maladies difficiles
la

et intolérables\ ni inversement à celle des maladies


tout à fait bénignes, mais telle qu'il doive, en cas
d'erreur de régime, s'en ressentir clairement^, et
supposons qu'il veuille manger du pain et de la viande,
ou quelque autre des aliments que les gens en bonne
santé ont profit à manger, non pas en grande quantité,
mais beaucoup moins que ce qu'il eût pu manger s'il
eût été en bonne santé prenons à côté un homme en
;

bonne santé, doué d'une nature ni tout à fait faible ni


inversement tout à fait forte, et supposons qu'il mange^
un des aliments dont le bœuf ou le cheval tirerait en
les mangeant profit et vigueur, de l'ers*, de l'orge*, ou
tout autre aliment analogue, non pas en grande
quantité, mais beaucoup moins^ qu'il le pourrait chez :

l'homme en bonne santé qui agirait ainsi, la souffrance


et le danger ne seraient pas moins grands que chez ce
malade-là qui a pris inopportunément du pain de blé
ou de la galette d'orge. 3 Tous ces faits sont des
preuves que l'art de la médecine proprement dit*, si
l'on poursuit la recherche dans la même voie, peut être
découvert tout entier.
IX. 1 Si la chose était aussi simple qu'il a été indiqué
— tous les aliments, quand ils sont plus forts, étant
nocifs, et quand ils sont plus faibles, utiles et nourris-
sants aussi bien pour le malade que pour l'homme en

1. Bien que l'archétype de A et de M donne

récents depuis Ermerins préfèrent la correction de A^


voir déjà Coray (p. 130) qui, sans connaître la leçon de A", a
,
les éditeurs

conjecturé en rapprochant judicieusement de Maladies IV,


c. 49, Littré VII, 578, 16 (= Joly 105, 2). La fièvre n'est «ni

sans remède ni forte


que le sens passif de
)^ ( Il est vrai ).
«impossible à supporter», n'est pas
signifie

-
attesté ailleurs (dans la Collection hippocratique,
«stérile» à propos d'unefemme); mais le sens passif est attesté
pour d'autres adjectifs composés en : comp.
«difficile à supporter», à propos des souffrances; voir LSJ s. . 2.

La leçon n'est-elle pas une lectio difficiliorl


1

VIII, 2

£ £
, ' ,, €
fj
127

' ,,
5

,
10 , ||

. 3
588

15 IX. 1

,, , , .
'

Test. 9
supra, p. 97);
] cf.
cf.

Hsch
Erot.
s.v. (éd.
s.v. (M 10, éd.
Latte 604
Nachmanson,
= supra,
60, 4
p. 99).
=

AM ( A ''M
''
1 : A™"' add. A^*') || ait. :
||

M Dubner A
ait.
A^"'
:
' om.
M
|| 2

3
Zwing""»
:
||
in Littré II, p. l
:

:
:

||

(<660)
|| || ||

corr.
:
om.

^ ||
||

7
4
||
:

:
^- :
||

||
||

:
:

™"
'^"'''"
(-
: -
|| 5
et
in ras.
-- e
3
litt.) 8 om. A post add. Kuehiewein

-
|| ||
Il

scripsi : A™" (pr. -o- A*)M ||


Littré : A (-poî
A^) M || 9 A : M ||
M Erot. : A ||

post add. Gomperz || 10 A™''"' (-ai- A**') M : A || 1


'""''
:

™" (- add. **')


(-V

II
add.
14
^)
om. II

.\
:

15
(<)
||
13
^ (lege ):

||

-
:

^ (- )
: : ||
||

|| 17 : ||
(ait.) om. M.
.

128 ANCIENNE MÉDECINE


bonne santé —
la tâche serait aisée^. Il conviendrait en
,

effet, pour obtenir une ample marge de sécurité, de


conduire vers le plus faible^. 2 Mais, en
le régime
réalité, la faute n'estpas moins grande et le dommage
pour l'homme n'est pas moindre si on lui administre une
alimentation inférieure en quantité et en qualité à ce
qui convient. Car la faim impétueuse pénètre avec force
dans la nature de l'homme pour lui couper les jambes, le

rendre faible et le tuer^. Bien d'autres maux, différents


de ceux qui proviennent de la réplétion mais nullement*
moins redoutables, proviennent aussi de la vacuité^.
3 C'est pourquoi les tâches (du médecin) sont bien plus
diversifiées et requièrent une exactitude bien plus
grande*. Il faut en effet viser à une mesure' or il n'y a

;

pas de mesure pas plus du reste qu'un nombre ni


qu'un poids —
à quoi l'on puisse se référer pour
,

connaître ce qui est exact, si ce n'est la sensation du


corps*. Aussi est-ce un travail que d'acquérir un savoir
assez exact pour ne commettre que de petites erreurs en
deçà ou au-delà^. 4 Le médecin auquel j'adresserais,
pour ma part, de vifs éloges est celui qui ne commettrait
que de petites erreurs, la précision parfaite étant un
spectacle rare. C'est que la majorité des médecins me
paraissent subir le même
mauvais pilotes de
sort que les

navires^". De fait ces gens-là, quand ils commettent une


erreur en pilotant par temps calme, le font sans que l'on

1 L'auteur va insister dans les chapitres suivants


.
(c. 9 à 12) sur
la complexité de l'art médical (thème déjà indiqué à la fin du c. 7)

et sur la difficulté d'atteindre l'exactitude parfaite. Mais cela ne


saurait remettre en cause l'existence de l'art. Pour
... ... 8, comp. Platon, Phèdre 244
a 5 . . . . . .

On comprend (avec Radt, p. 85) le membre de phrase


comme une parenthèse développant

'
. .

. —

.
«Si la chose était aussi simple à savoir <si> tout ce qui est
trop fort nuisait». On sous-entendra donc devant
Il est probablement inutile de rajouter

pour supprimer l'anacoluthe.


ou
et
devant
.
IX, 1

— ,

2
€€€5
iSci
Se
€€5 €
,
'
128

9
,
.
.,
"

3
.
10

, ., '

'
,
||

590

.
,
15 4

,
— .

.
1

:
'
^
:
II
:

'°" (
3sq.
II

(<)
add.

||
"')
:

||

:
3
|| 2

*•"«
:
' :

''"''''
- :

|| 6
||

||

7 (cf. jam Coray) : M ||


(-- add.
2>*') : ||
^^' om. : || 8 om. || 9 scripsi :

|| om. || :

(<?) II
10 :

^'^^
'^"" (
add. ^"') II
: || :

|| : eras. et "'" || 1 1 : Reinhold ||

llsq.
:

:
^ (/ )
||
^' ||
:

:
||

|| 14
:
' ||

|| 13
12

' II
16
:

: - ||
:

||
:
||

; -
||
:
'

.
:
|| 17
|| 18
129 ANCIENNE MÉDECINE
s'en aperçoive mais quand ils sont pris par une forte
;

tempête et un vent qui fait dériver^, désormais il est


bien clair aux yeux de tous que c'est par leur ignorance
et leur erreur qu'ils ont perdu le navire. 5 II en est de
même aussi pour les mauvais médecins, qui sont les plus
nombreux quand ils soignent des malades qui n'ont
:

rien de grave et chez lesquels on ne saurait provoquer


rien de grave en commettant les plus grandes erreurs —
de telles maladies sont nombreuses et surviennent bien
plus souvent que les maladies graves —
eh bien donc
,

dans de tels cas^, ils peuvent commettre des erreurs


sans que les profanes s'en aperçoivent mais quand ils
;

tombent sur une maladie importante, violente et


dangereuse, alors leurs erreurs et leur ignorance de l'art
sont visibles aux yeux de tous car pour l'un comme
;

pour l'autre le châtiment ne se fait pas attendre


longtemps, mais bien vite il est là^.
X. 1 Que les troubles chez l'homme ne sont pas
moins graves quand ils proviennent d'une vacuité
inopportune que quand ils proviennent d'une réplétion
inopportune, c'est ce que l'on peut bien comprendre si
l'on se réfère aux gens en bonne santé. Pour certains
d'entre eux•*, en effet, il est bénéfique de ne prendre
qu'un seul repas —
régime qu'ils ont aménagé ainsi
pour eux-mêmes justement à cause de son caractère
bénéfique — et pour d'autres de prendre aussi un
,

déjeuner, en vertu de la même nécessité^. Car pour tous

— forme une parenthè-

)
La proposition
5.
se. Les parenthèses sont très fréquentes dans le traité, comme l'a
justement noté Radt (p. 87) à propos d'autres passages. La
proposition (M A)
: (se.

paraît être un raccourci d'expression. L'auteur veut dire :

«et à d'autres il est bénéfique de prendre (aussi) un déjeuner (et)


c'est pour la même nécessité (qu'ils ont adopté un tel régime)».

lors, «prendre le repas de midi» ()


Ceux qui prennent un seul repas prennent le repas du soir; dès
revient à dire qu'on prend
deux repas. Pour plus de clarté, j'ai ajouté «aussi» dans la
traduction.
IX, 4

, , '
-
129

5
'
*
5


,,
10 ,, '
— ,

",
'

.,
15

."

. 1

— ,
'

-
.
- 1 ^ :

:
- - || 2
||
' :

:
||

||
* :

^
||

™"
om.

- *)
II

II
4 ante
|| 2sq.
add.
:

|| 5
(
: - corr. in
|| 3
: -
et in
:

||

- :
:

||
||

om.
II

8 om.
|| 9
||
:

^- :
:
||

||
7
||
om. ||

scripsi
:

10 :
|| scripsi :

: - ||

11
^
:

om.
||

-
|| || ||

12 :
||
post add. ||

: || 13 :
|| :
||

^)
-
'"''''
15 : (-- e corr. 17

--
||

Reinhold
II
:

Kuehlewein :
scripserim
||18
||

'"""
:

: -
^
et -
:

II
in ras. A*

^
||

( )
:

:
||

.
18 sq.
Kuehlewein || 19 :
130 ANCIENNE MÉDECINE
ceux-là il mais non pour
est bénéfique de procéder ainsi,
ceux qui adoptent l'un ou l'autre de ces deux régimes^
par plaisir ou pour toute autre raison fortuite. 2 En
effet, pour la plupart des gens, quel que soit celui des
deux régimes qu'ils pratiquent, soit un seul repas, soit le
déjeuner en plus, il n'importe en rien de s'en tenir à
cette habitude il est des gens, en revanche, qui ne
;

sauraient être capables, s'ils s'écartaient du régime qui


leur est bénéfique, de s'en remettre facilement, mais il
survient chez eux, dans chacun des deux types de
régime, pour peu qu'ils en changent durant une seule
journée, et encore pas tout entière, un malaise extraor-
dinaire. 3 Les uns en effet, s'ils prennent un déjeuner

alors que cela ne leur est pas bénéfique^, aussitôt


deviennent pesants, lents de corps et d'esprit, et sont
pleins de bâillements, de somnolence et de soif. Et si, là-
dessus, ils prennent leur dîner, ce sont des vents, des
coliques, un flux de ventre^, et pour beaucoup c'est là
l'origine d'une grande maladie, même si la quantité de
nourriture qu'ils ingèrent en deux fois est identique et
nullement supérieure à celle qu'ils avaient l'habitude de
digérer* en une seule fois. 4 D'un autre côté^, si
l'individu qui a l'habitude de prendre un déjeuner,
alors qu'un tel régime lui est bénéfique^, vient à
supprimer son déjeuner, il éprouve, aussitôt qu'en
est passée l'heure, faiblesse étrange, tremblement, éva-

4. Le verbe signifie littéralement «dépenser» les


aliments, «consumer». Cela correspond à notre français
les
«digérer», étant bien entendu que la digestion implique, pour
l'auteur, des idées différentes des nôtres; sur le processus de
digestion selon l'auteur, voir cil, 131, 16 avec la note ad loc.
La leçon de M ... est une leclio difficilior par
rapport à <â> ... de .\ comparer à la fin du c. 3
;

avec la note ad loc. Littéralement «les aliments


:

qu'ils avaient l'habitude de digérer..., ces mêmes aliments». C'est


une manière d'insister sur l'identité.
5. Pour la dissymétrie oi ... . voir Kûhner-Gerth,
Ausfûhrliche Grammatik .... II. 2. p. 265 .\ 2.
, 130

»,

'

€,.,
€€
||

'
2
€'•€ €€
€€
-
592

€,

eioî

Tiv€S €|
€€5
€6 6. '
, '

|
.
,
,
3 01 ,

,] Test. 13 cf. Erot. s.v. ( 1, éd.


,
Nachmanson 90,2
4 ,

sqq.
supra, p. 96).

^ - )
1 A : M ||

' - A :

Reinhold
M ||
(-

-- -
: :

Wilamowitz ||
2 Si' (ait.) om. M ||
AM^ : M ||

3 M : A A : M 4 A :

-
|| ||

M ||
M : A ||
M : A
Langholf || 5 A : M ||
M : A ||
A :

M ||
A"'" (-- in ras. A*) M : A || 7
M A (sed ras. supra -v) A M 8
A :
:

- M ||

A* (- M - A A :

A) :
M
||

||

M
:

AM^ :
||

M ||
9

j\4mg iQ : A™'''' (ait. -o- add.


II ||

A"') : A (corr. in al. manu) M


(sed. - in ras. M^) ||
A' : A M || A :

M ||
scripsi : AM ||
11 ante om. M || 13
A^M^ AM 14 IH'' (cf. 131, 9)

-
: :
||

A A' M ||
A : M ||
om. M ||
15
om. A II
â om. A ||
A : M || 16 A :

M A M 17 M A A

-
: : :
|| || ||

M || A : M Radt (coll. 130, 10) ||

post add. A || 18 AM : M^.


131 ANCIENNE MÉDECINE
nouissement^ en plus de cela, les yeux sont creux,
;

l'urine est plus jaune et plus chaude^, la bouche amère ;

et il lui semble que les viscères pendent; il y a ver-


tige, abattement, incapacité au travail^. Voilà tous les
symptômes qui Et quand il se met à
se manifestent^.
dîner, la nourriture est moins agréable et il ne peut pas
digérer tous les aliments qu'il prenait auparavant à son
dîner du temps où il déjeunait. Ces aliments eux-mêmes,
dont la descente s'accompagne de coliques et de gar-
gouillements, brûlent le ventre^. Ces gens dorment mal
et ont des rêves agités et tumultueux®. Et même chez
beaucoup d'entre eux c'est là l'origine d'une maladie.
XI. 1 II faut examiner par quelles causes ces
accidents leur arrivent. Pour celui qui a l'habitude de
ne faire qu'un seul repas, c'est, je pense, parce qu'au
lieu le temps suffisant pour que son ventre
d'attendre
puisse tirer complètement profit des aliments ingérés
la veille, les dominer, se vider et avoir du repos, il a

introduit en sus de nouveaux aliments dans un ventre


qui était en ébullition et en fermentation'. Chez de tels
individus, le ventre cuit les aliments beaucoup plus
lentement et a besoin d'un temps plus long de relâche
et de repos. 2 Quant à celui qui a l'habitude de prendre

3. Contrairement à ce que pense E. Fraenkel, «Zur Geschichte


der Verbalnomina auf --, -.
Eine wortgeschichtliche Unter-
suchung», Zeilschrift f.
vergleich. Sprachforschung, XLV, 1913,
p. 179, n. 1, la leçon de M n'est pas la ledio difficilior;
c'est une faute d'onciale pour voir Nolice, p. 89.

;
;

),, ,
Comparer Régime dans les maladies aiguës, c. 9, Littré II, 288,
4 sq. (= Joly c. 30, 49, 3) cf. aussi App. c. 18,

Littré II, 482, 3 (= Joly c. 44, 88, 24) ;


voir
Notice, p. 65 sqq. Il faut lire soit dérivé de avec
M^, soit (dérivé de et non de A qui est
vraisemblablement un pseudo-ionisme.
4. La phrase (se.

de symptômes qui précèdent, alors que


)
reprend les deux catégories
(131, 1)
reprenait la première catégorie En apparence inutile (Wilamowitz
la supprime), cette phrase insiste sur l'accumulation des malaises
énumérés.
,4
€,

||
,
"
,
,
,,,, '


,,
131

5
'

, 594

10 . '

. XI. 1

15
'
. 2
'

(
,
ante
II
1

)
add.
:

' (- )
scripsi
|| 3

:
||

, :
Kuehlewein
Kuehlewein
:

:
|| 2

* ||

(corr. in
3sq.
||

^), 4 seci. Wilamowitz 5


(-
|| ||

om. ||
^ : ||
(sed

(cf.
e corr.) :

||

Littré)
^ || 7
: ||

(<06)
:

Kuehlewein
8
^^
:

^
||

-*
:

-
||

) : || ait. om. || 9 :

: * : 1 1

-
II || ||

: : 12
-
|| ||

Kuehlewein 13

(<) -
: : :
|| ||

II
: ||
14 : ||

^ || 18
|| 16
:
Littré :

.
132 ANCIENNE MÉDECINE
aussi un déjeuner^, c'est parce que son corps n'a pas,
au moment où il a eu besoin de nourriture, et où il
avait dépensé le repas précédent et n'avait plus rien

de quoi tirer profit, reçu aussitôt l'apport d'une


nourriture nouvelle^. Il dépérit et se fond sous l'effet
de la faim; car tous les maux dont je dis qu'un tel
homme souffre, je les attribue à la faim^. 3 Et j'affirme
même que tous les autres hommes qui, jouissant d'une
bonne santé*, resteront sans manger pendant deux ou
trois jours, souffriront des mêmes maux que ceux que
j'aiprécisément mentionnés dans le cas des individus
privés de leur déjeuner^.

XII. 1 De telles constitutions, qui se ressentent


promptement fortement des erreurs (de régime)^, je
et
dis, pour ma part, qu'elles sont plus faibles que les
autres. Le faible est celui qui se rapproche le plus du
malade, mais le malade est encore plus faible, et il lui
revient de souffrir davantage à chaque fois qu'il s'écarte
de la juste mesure'. 2 II est difficile, quand une telle
exactitude est exigée de l'art, datteindre toujours la
plus grande précision. Et pourtant, bien des aspects de
la médecine, dont il sera question, parviennent à un

tel degré d'exactitude^. Je prétends donc qu'il ne

2. La place de dans les deux manuscrits anciens


la négation
est très différente avant la subordonnée
: dans M, en tète
de la principale dans A. Les éditeurs se partagent Littré et :

Gomperz suivent M. tandis que Ermerins. Reinhold, Kuehlewein,


Heiberg, Jones^-^, Festugière suivent A. Il est possible que ces
deux leçons renvoient à un archétype qui avait la négation aux
deux endroits. La reprise de la négation conviendrait bien à la

à Colone. v. 587 où : ,,
vivacité du ton du discours. Pour deux négations qui se
reprennent et se renforcent, voir, par exemple, Sophocle, Œdipe
.
Pour d'autres exemples
où les deux négations sont plus éloignées, voir Kûhner-Gerth,
Ausfùhrliche Grammaiik .... II 2, p. 204-206. Par prudence, j'ai
conservé la leçon d'un des deux manuscrits, en l'occurrence celle
de M qui est la ledio difficilior.
3. Selon le

104, 5), «la faim est


traité des
une maladie» (
Venh, c. 1. Littré VI. 92, 6 (= Jouanna
).
€$
,
XI, 2 132

,
5
. 3
' '

.
.' ,
|

-
,
10 XII. 1 596

,
. ,
15

. '
2
. ,
Test. 15-17
Nachmanson, 11, 7-10

= supra,
] p. 95).
Erot. s.v. ( 4 éd.

1 A™"'M : pr. -- in ras. .\^ \\ M : .\ || 2

II
:
A
||
:

^ Zwing""^
:
||

||
3 ante

7
|| 4
add.

om.
'
||
||

: 8 : (sed ras. supra )


^
||

)
: : ||

(<0)
|| ||

* (- .\) 10 (ait.) om. M 11


-
: || ||

(sed eras.) :

-
- -
||

13
II

Erot.
:

Radt
||

^
||
: - :

|| 15
:
|| 14

||
:

16
: //
||

':
||

om.
:

Erot. ]|
: || 17 : \ \\

: Erot. ||
» : || 18 : .
133 ANCIENNE MÉDECINE
convient pas de croire que l'ancienne médecine n'existe
pas et n'est pas l'objet d'une bonne méthode de
recherche, et, partant, de la rejeter en s'appuyant sur
la raison qu'elle ne possède pas l'exactitude dans tous

ses aspects, mais qu'il convient bien plutôt, pour la


raison qu'elle est capable, à mon sens, de s'approcher
tout près^ de la précision la plus grande à l'aide du rai-
sonnement après être sortie d'une profonde ignorance,
d'admirer les découvertes obtenues par une méthode
bonne et correcte, et non sous l'effet du hasard^.
XIII. 1 Je veux revenir à la théorie de ceux qui
adoptent une nouvelle méthode dans leurs recherches
sur l'art en partant d'un postulat^. Admettons que c'est
un principe chaud, froid, sec ou humide qui est la cause
du dommage chez l'homme, et qu'il faille, pour soigner
correctement, porter secours par le chaud contre le
froid, par le froid contre le chaud, par le sec contre
l'humide, et par l'humide contre le sec. Qu'on me
choisisse alors un homme, non parmi ceux qui ont une
constitution forte, mais parmi ceux qui l'ont plutôt
faible qu'il mange des grains de blé ramassés sur l'aire,
;

crus et sans préparation, ainsi que des viandes crues, et


qu'il boive de l'eau. En suivant ce régime, il sera
victime, je le sais bien, d'accidents multiples et graves;
effectivement il éprouvera des souffrances, son corps
sera sans force, l'état de son ventre se détériorera et il
ne pourra pas survivre longtemps*. 2 Quel secours faut-
il donc ménager à un homme dans un pareil état? Le

4. L'auteur propose une expérience en pensée pour mettre ses


adversaires dans l'embarras. Il réunit toutes les conditions pour

que l'homme tombe gravement malade constitution faible et


:

régime fort. Le régime qui lui est imposé est comparable à celui
des premiers hommes avant la découverte de la «diététique» (cf.
c. 3) absence de préparation
: ()
et de cuisson (... ).
L'auteur considère que l'eau est une boisson plus néfaste que le

l'eau par le vin (134, 6 )


vin, puisqu'il conviendrait normalement, selon lui, de remplacer
pour que le malade retrouve la santé.
Il est certain que l'eau pure non bouillie était, dans l'Antiquité,

plus dangereuse que le vin, car elle véhiculait les causes de


nombreuses maladies.
XII, 2

, , - 133

5 |
.
|| 598

XIII. 1

.
10

,, | ,
, ,
*

15
'
.
"

'

20 ' ; 2
|
- --1

(<?)
|| 7
:
:

||
||
Wilamowitz Radt

Coray Ermerins
|| 2

:
:
^
secl.
:
:

||3
Ermerins
|| 1 sq.
||

||

||
^
6
8
||
:
""*

'
:

||

: :
||

(ait.) ^
Kuehlewein

2 :
|| 9
II
om.
12
||

^^ :
:

||
|| 11
(pr.) ^om.
:
||

?
: (ait.) : || :
* ||13
^
II

15
^
: : :
|| ||

*
||

|| 17
om. ||

^' (? )
16
:
Kuehlewein
|| 18
:

]
19 scripsi 20
'
: || :
||

:
|| : ^ ' ||

-- eras. in A ||
20-1 p. 134 : .
134 ANCIENNE MÉDECINE
chaud ou le froid, le Il est évident que
sec ou l'humide?
c'est l'un de ces principes; car cause du dommage
si la

est l'un ou l'autre d'entre eux, c'est par son contraire


qu'il convient de la supprimer, conformément à leur
théorie^. En fait, le remède le plus sûr et le plus évident
consisterait à supprimer le régime dont il usait en lui
donnant, à la place des grains de blé, du pain et, à la
place des viandes crues, des viandes bouillies et en lui
faisant boire, après cela, du vin^; ce changement ne
manquerait pas de lui rendre la santé, à condition bien
entendu que son état ne soit pas complètement détérioré
par un (mauvais) régime prolongé. Que dirons-nous
donc? Qu'il souffrait à cause du froid et qu'en lui admi-
nistrant le régime chaud en question on lui a été utile^?
Ou que c'est le contraire? 3 Je pense, pour ma part,
avoir mis dans un grand embarras la personne interro-
gée*. Car celui qui prépare le pain, est-ce le chaud ou le
froid, le sec ou l'humide qu'il a retranché des grains de
blé? En fait, ce qui a été soumis au feu et mouillé avec
de l'eau^ et qui a subi bien d'autres opérations dont
chacune possède une propriété naturelle particulière,
a perdu certaines de ses qualités premières, mais s'en
est adjoint d'autres par tempérament et par mélange.

2. Au début de la phrase, la particule se comprend par


référence à une idée sous-entendue (je dis «conformément à leur
théorie», car le remède le plus sûr...). Pour cet emploi de
J. D. Denniston, The Greek
, voir
articles ..., p. 61 sq. Il n'y a pas lieu
de changer en avec Wilamowitz.
La véritable thérapeutique consisterait, selon l'auteur, à

(.)
remplacer un régime fort par un régime faible, en tenant compte
des découvertes de la diététique.
3. Le passage de la première à la troisième personne du pluriel
— a paru surprenant à Radt (p. 93) qui corrige
en
ambiguë («on» ou
V
«ils»,
personne du pluriel
.
Mais la 3•" personne du pluriel volontairement
les adversaires) sert de transition entre la
désignant l'auteur et son public et
la S*"""" personne du singulier désignant un adversaire

Par un subtil glissement, on passe de «nous» à «il» par


l'intermédiaire de «on».
XIII, 2

CTCpov,
.

cî €, 134

5 , , ,, '

.; ; || -
10

.
; ,^)
3
600

15

, .- ,

' Test. 5

1 :
— ] cf. Bekker, Anecdota

(<)
(sic) •
graeca

""»
.
, 169

||
post
:

add. Zwing'"^' || 2 :
||

3 om. 4 : || 5 : 6
*
II ||

""" (-
'^'-'-
:
:
-- in ras.
||
||

* in ras. A*)
:
:
' M
||
|| 7
:
||

add.
:

2
||
10

Reinhold Wilamowitz
||

Radt ||
11
:

: -^ ||

||

:
||

-
om.
:

||
||

post
12
:
9
||

om.
|| ||

II
:
|| 14 :

^
||

(pr.) om. A || add. Reinhold || :

|| 15 Heiberg :

* || :
||

16 ante add. post add.


-
:

*
II || ||

16 sq. 17 om.
(<)/1|
: || :
||

om. .
135 ANCIENNE MÉDECINE
XIV. Car je sais également, bien sûr, que le pain
1
agit différemment sur le corps de l'homme suivant qu'il
est fait de farine pure ou mêlée, de blé non mondé ou
mondé, suivant qu'il est pétri avec beaucoup d'eau ou
peu, fortement pétri ou non pétri, bien cuit ou presque
cru, ou suivant mille autres préparations en plus de
celles-là^. Il en est de même également de la galette
d'orge; dans ce cas aussi, les propriétés de chaque pré-
paration ont un grand pouvoir et l'une de ces propriétés
ne ressemble en rien à l'autre^. 2 Celui qui n'a pas exa-
miné ces questions ou qui, tout en les examinant, n'en
possède pas le savoir, comment pourrait-il connaître la
moindre des affections qui atteignent l'homme^? Car
par chacune de ces préparations l'homme est affecté et
se modifie de telle ou telle façon, si bien que toute sa
vie en dépend, qu'il soit bien portant, convalescent
ou malade. Il n'existe donc aucun savoir qui soit plus
utile ni plus nécessaire que celui-là, c'est sûr. 3 Et
comme* pour avoir mené leurs recherches, suivant
c'est
une bonne méthode et un raisonnement approprié, en
conformité avec la nature de l'homme que les premiers
à faire ces découvertes les ont faites^, ils pensèrent
même que l'art méritait d'être attribué à un dieu, ce
qui est effectivement la croyance usuelle*. Estimant en
effet que ce n'est pas le sec ni l'humide ni le chaud ni
le froid ni aucun autre de ces principes qui cause du

5. Pour ces premiers inventeurs de la médecine, voir déjà le


c.

6 sq. .
5; comparer aussi les inventeurs du régime en santé, c. 3, 122,
La méthode est identique
elle consiste dans les deux cas à adapter le régime à la nature
:

humaine.
6. Si le traité date bien du v"" siècle, il s'agit plus vraisem-
blablement d'Apollon que d'Asclépios. Dans le Serment, Apollon
est invoqué avant Asclépios (Littré IV, 628, 1 : «Je jure par
Apollon médecin et par Asclépios»). Notre auteur, tout en se

voir J. Jouanna, « Ippocrate e il sacro»,


p. 91-113.
,
prononçant clairement pour l'origine humaine de l'art médi-
cal, paraît respecter la croyance traditionnelle dans l'origine
divine. Cette attitude semble caractéristique des «.\sclépiades» ;

XII, 1988,
XIV, 1 135

XIV. 1 € €€
€€ --
5
'
, . ".
<)
'

, 2

10 ;' ,
' . .
15

|| ,, . 3

602

Test. 3
13 sq.
A
=
supra, p. 96); Ga\. Gloss.,
2 supra, p. 97 sq.).
] cf. Erot. s. . (A 60 éd. Nachmanson 19,
. {ea. Kùhn XIX,85, 4sq.=
s.

1 A
A
:

:
M II 2
M ||
M
A
: - :
A || 4
M
add. Ermerins 5
6 ||A*M
||

A || 8è om. A || 7 M : A || M : A ||

?
y^corr]y[
_Q^. A* in ras. A M 8 A M
(<6)
.
: :
Il || ||

^ M : otS' A
* A* || 9 M :
||

^ '-
ante add.

-
:
|| :
|| ||

:
*"* || 10 :

.)
- :
II
11

14 ' ||
:

:
|| 13
16
||

om.
om.
||
(lege

**
: : :
|| || || ||

: || 17 :
|| : .
,

136 ANCIENNE MÉDECINE


dommage l'homme
à —
ou dont l'homme a besoin —
mais ce qui, en chaque aliment, est fort et surpasse la

nature humaine, estimèrent donc que ce qui était


ils

nuisible, c'était ce que la nature humaine ne pouvait


pas dominer, et voilà ce qu'ils cherchèrent à retran-
cher^. Or, ce qu'il y a de plus fort, dans le doux, c'est le
plus"3oux, dans l'amer, le plus amer, dans l'acide, le
plus acide, et dans chacune de toutes les substances pré-
sentes^, le degré extrême. 4 Car ils voyaient que ces
substances étaient égalem^e^nt présentes dans l'homme et
qu'elles l'incommodaient. Il y a en effet dans l'homme
du salé, de l'amer, du doux, de l'acide, de l'acerbe^, du
fade*, et mille autres substances possédant des proprié-
tés diverses sous le rapport de la quantité et de la
force^. Ces substances, tant qu'elles sont mélangées et
tempérées l'une par l'autre, ne sont pas manifestes et ne
font pas souffrir l'homme; mais quand l'une d'entre
elles se sépare et devient manifeste et
s'isole, alors elle

fait souffrir l'homme^ 5 D'autre part, en ce qui


concerne les aliments, tous ceux qui ne nous sont pas
appropriés et incommodent l'homme quand ils sont
ingérés sont, chacun pris à part, de l'amer intempéré ou
du salé ou de l'acide ou toute autre substance intempé-
rée et forte ; et c'est la raison pour laquelle nous som-
mes dérangés par les aliments comme par les substances
qui se séparent à l'intérieur du corps'. 6 En revanche
tout ce que l'homme mange ou boit (régulièrement).

.
3.
souvent,
et
une fois
Le terme revient
la
six fois

Alors que A donne toujours la forme


(ici) et cinq fois

10; 16; c. 24, 153, 13). En théorie,


dans
confusion est grande dans les manuscrits entre

(c. 15,
M donne
138, 5; 9;
s'applique au goût
,
le traité, et, comme il arrive

et signifie «acerbe»; mais comme ce qui est acerbe est resserrant


et desséchant
c.

«les
(cf.,

55, Littré VI, 264, 24


dans la Collection

aliments acerbes dessèchent et contractent le corps»),


hippocralique,
,
Affections,

les

confusions ont pu se faire entre «acerbe» et


«resserré, dur».
€ € € -
XIV, 3 136

5
'
,
, € .,,
4
€ € oùScv

€,
€€.
outc

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604

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4 :

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^ edd. :

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scripsi :

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II ||

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: || 6 "* :

7 8 om.
(<)
: : ||
|| || ||

10
^'
:

-
; ||

|| 14
16
|| 12
:

Kuehiewein
- :

||

:
|| 13
:

post
|| 15
:

-
:


|| ||

iteravit (14) sed expunxit A* ||


17 :

18 om.

-
: : ||
II || ||

: || 18 sq. : delev. Reinhold || 19 post


(pr.) add. M ||
pr. om. M || 20 A : M 21 ||

om. M.
137 ANCIENNE MÉDECINE
de tels aliments participent manifestement moins que
tout autre à une telle humeur intempérée et prédomi-
nante, comme par exemple le pain de blé, la galette
d'orge et autres aliments analogues^ dont l'homme a
l'habitude d'user en très grande quantité et journelle-
ment, à l'exclusion de ceux qui sont assaisonnés et pré-
parés en vue du plaisir et de la satiété^. Ces aliments,
bien qu'ils pénètrent en très grande quantité en
l'homme, causent, moins que tout autre, trouble^ et
séparation des qualités contenues dans le corps, et plus
que tout autre, force, accroissement et nourriture, pour
cette seule raison* qu'ils sont bien tempérés et ne
contiennent rien ni d'intempéré ni de fort, mais forment
dans leur totalité une unité simple^.
XV. 1 Pour ma part, je me demande avec perplexité
comment les gens qui professent cette thèse-là, et qui
conduisent l'art hors de la présente voie vers un
postulat, peuvent traiter les malades en conformité
avec ce qu'ils postulent.. Car ils n'ont pas découvert,
je pense, quelque chose qui soit chaud, froid, sec ou
humide, en soi et à part soi, sans être associé à aucune
autre sorte de qualité^! Mais je pense pour ma part
qu'ils ont à leur disposition les mêmes aliments et les
mêmes boissons que ceux dont nous usons tous. Seule-
ment, ils assignent à l'un la qualité d'être chaud, à

1. Pour l'expression
contexte analogue Platon, République lïl 406 d
, . comparer dans un

.
du
2. C'est
plaisir,
la deuxième fois
car elle est nuisible à

,
que l'auteur condamne
la santé; cf. c. 5,
la recherche
124, 7

,
C'est
22
Le terme
le
111
contraire du
, ,
ne signifie pas autre chose ici que la «satiété».
de la «faim». Comparer Heraclite DK

maladie rend la santé agréable et bonne, la faim


«la
rend la satiété agréable et bonne, la fatigue rend le repos agréable
et bon». .Aussi des traductions telles que «pour flatter... la
sensualité» (Littré) ou «pour exciter... son appétit» (Festugière)
relèvent-elles plus de l'imagination que de la raison.
XIV, 6 137

5 ,, |

, [,]., '
'

'
10

XV. 1 '

15

. , ,| '

' 2 ''
, ||
606

- 1 Se :
'
3
II

:
:

4
Ermerins 2
Reinhold
|| :

-
:

.)
II ||

|| :
|| (lege :

: 6 : 7
^
|| || :
II ||

om. || 8 :
|| : || 9
post add.
'M 10 (pr.)

-
|| :
||

om. M II
(ait.) A :
||
1 1 A""M : A ||

A M AM M^
:

M
A :
||

M (<?) delev. Reinhold

M^ 15
|| 14
|| 12 oi

Reinhold
A
:

:
|| 13

(
|| :

M ||
ante add. M || 16 M : A || 17
M : A A"'* || A'"^ : M || 18 A :

M M"* ||
post add. A ||
A''"*

A) : M || Reinhold : A' (-oi- in ras.)


M II
19 A : A"* M || (pr.) AM :

A'"" {-6 add. A^^') ||


M : A || (ait.) AM : add. A*^'.
138 ANCIENNE MÉDECINE
l'autre d'être froid, à tel autre d'être sec et à tel autre
d'être humide. Car c'est à coup sûr une impasse que de
prescrire au malade de prendre quelque chose de chaud ;

aussitôt en effet il demandera : «quelle chose?», si bien


qu'ils seront contraints de divaguer ou de recourir à
l'une de ces choses chaudes qui sont connues^. 3 Mais
s'il est vrai que telchaud se trouve être acerbe, tel autre
chaud fade, et que tel autre chaud se trouve causer
des troubles^ — il existe aussi bien d'autres variétés
de chauds qui ont bien d'autres propriétés opposées
entre elles —
assurément il ne sera pas indifférent^
,

d'administrer tel d'entre eux, le chaud acerbe, ou le


chaud fade, ou du même coup le froid acerbe (cela
existe aussi), ou le froid fade. 4 Car, à ce que je sais
pour ma part, c'est un effet tout à fait contraire qui
résulte de chacune des deux variétés*, non seulement
sur l'homme, mais aussi sur le cuir, le bois, et bien
d'autres corps qui sont moins sensibles que l'homme^.
Car ce n'est pas le chaud qui possède une grande
propriété, mais l'acerbe et le fade, ainsi que toutes les
autres substances que j'ai mentionnées*, qu'elles soient

5. Les êtres, animés ou inanimés, différent par leur degré de


«sensibilité» (),
c'est-à-dire par leur degré de réaction aux
différentes qualités, acerbe, fade, etc.
128, 13
que les animaux, et les
). animaux
Les
(cf.

hommes
le

plus sensibles que


le cuir ou le
commentaire à c. 9,
sont plus sensibles

bois. Du reste, à nature humaine, il y a des


l'intérieur de la

degrés de «sensibilité» les hommes bien portants sont moins


:

sensibles que les malades, et à l'intérieur des hommes bien


portants, les uns sont plus sensibles que d'autres. Plus un être
est «sensible», moins il est résistant. En prenant ici l'exemple du
cuir ou du bois qui sont moins sensibles que l'homme, l'auteur
avance un argument a fortiori; mais on aimerait savoir ce qu'il
a effectivement observé sur le cuir ou sur le bois.
6. L'auteur fait référence à l'énumération du c. 14, 136, 10 sq.
En plus de l'acerbe et du fade, il avait cité le salé, l'amer, le doux
et l'acide comparer aussi à la fin du traité l'énumération du c. 24,
;

153, 10-13 doux, amer, salé, acerbe et acide.


:
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XV,

€ € 2 138

,. ,
bk |, € '
èuci €

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.
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10

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4

. —

15 ,
19, 15
Test.
= supra,
6 ] p. 96).
cf. Erot. s. . (A 61 éd. Nachmanson

1 AM : A™"'' (- add. A**') ||


(pr.) AM : add.
A**' Il
AM : A™" (- add. A**') || (ait.) M : A ||

AM : A™"' (- add. A**') ||


AM''"" : M || 2
A™" (-ai add. A**') M A M A
-
: :

--
|| ||

3 M : A A^ ||
post add. M i|
AM : A^ ||

A : M || 4 A : M || A :

M
A
7sq.

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II

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9
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M
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*""^
II

^)
7

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:
M

scripsi
om.
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*
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M
(ait.)

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8

om.
Kuehlewein
om.

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M
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6

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A
A om. M

Ermerins
M :

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II ||

|| ante add. || 10 ante add.


™"
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13
II
12 '
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'
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||
? :

:
||

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||
11

14
: -' :

:
||

II
15 : || 16 : || om. .
139 ANCIENNE MÉDECINE
dans l'homme ou hors de l'homme, prises sous forme
d'aliments et de boissons ou appliquées de l'extérieur
sous forme d'onguents et d'emplâtres.
XVI. 1 J'estime pour ma part que le froid et la
chaleur sont, de toutes les propriétés, celles qui ont le
moins de pouvoir dans le corps, pour les raisons que
voici^. Aussi longtemps, bien entendu, que le froid et le
chaud restent ensemble dans le corps mélangés l'un
avec l'autre, ils ne causent pas de souffrance; car le
froid est tempéré et modéré par le chaud, et le chaud
par le froid^. Mais quand l'un des deux se sépare et se
tient à l'écart, alors il cause de la souffrance. 2 Toute-
fois, en cet instant critique, dès que le froid survient et

cause quelque souffrance à l'homme, en toute hâte, de


ce seul fait, le chaud venu de l'intérieur même de
l'homme se présente en première ligne, sans qu'il ait
besoin d'aucun secours ni d'aucun préparatifs. Et cette
intervention, le chaud la mène à bien chez les gens en
bonne santé comme chez les malades*. 3 Par exemple,
si un individu en bonne santé veut en hiver refroidir son

corps soit en prenant un bain froid, soit de quelque


autre façon, plus fortement il l'a refroidi et à —
condition toutefois que son corps ne soit pas complète-
ment gelé —plus intensément encore et plus fortement
,

son corps se réchauffe une fois qu'il a remis ses


vêtements et regagné un abri^. 4 D'un autre côté, s'il

4. Le sujet de est le chaud «qui mène à bien» son


expédition, et non le froid (trad. de Festugière).
La distinction faite entre gens en bonne santé et gens ma-
lades sert de principe d'organisation dans les exemples qui vont

santé (cf. 139, 16 ),


suivre. La première catégorie d'exemples concerne les gens en

malades (cf. 140, 16 sq. ).


tandis que la seconde porte sur les

XV, 4

€ €
- 139


èv

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XVI.


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17
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20
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om.
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om. ||

scripserim
- : ^.
seclus.
^'"'

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||
19
(. supra

:
134,
:
140 ANCIENNE MÉDECINE
veut se chauffer fortement soit par un bain chaud, soit
par un grand feu, et, après cela, remettre le même
vêtement et rester dans le même local que quand il
s'était refroidi, manifestement il aura bien plus froid
et, par ailleurs, frissonnera bien davantage i. 5 Ou
encore, si quelqu'un qui s'évente à cause d'une cha-
leur étouffante et se procure à lui-même du froid
de cette manière, vient à cesser de le faire, la chaleur
brûlante et étouffante sera pour lui dix fois plus intense
que pour celui qui ne fait rien de tel^. 6 Voici main-
tenant une preuve encore plus forte^ tous les gens
:

qui, pour avoir marché dans la neige ou par quelque


autre temps glacial, ont eu particulièrement froid aux
pieds, aux mains ou à la tête, quelles souffrances
n'endurent-ils pas la nuit, quand ils sont enveloppés
dans leurs couvertures et sont à l'abri, à cause de la
chaleur brûlante et de la démangeaison*! Chez certains
même, des phlyctènes surgissent, comme chez ceux qui
ont été brûlés par le feu. Et ils n'endurent pas ces
souffrances avant de s'être réchauffés. Telle est donc la
diligence avec laquelle chacun de ces deux principes se
présente à l'encontre de l'autre*. Et je pourrais citer
mille autres exemples. 7 En ce qui concerne les
malades, n'est-ce pas chez ceux qui sont pris de frissons

2. Après l'expérience faite en hiver (139. 16 ), ).


expérience faite en été par une chaleur étouffante (140, 5
voici une

Ici encore le froid


restitution de
() est suivi de l'arrivée du chaud. La
(Ermerins) correspond au style attendu dans
l'exposé des expériences non seulement dans Ancienne médecine
(cf. précédemment
l'ensemble de la Collection
et
hippocraiique.
), mais aussi dans
La protase introduite par
(-1- ind. ou optatif) ou par (-|- subjonctif) énonce les
conditions de l'expérience, tandis que l'apodose à l'indicatif en

.
donne les résultats voir G. Senn, « Uber Herkunft und Stil der
;

Beschreibungen von Experimenten im Corpus Hippocraiicumo.


Sudhoffs Archiv, XXII, 1929, p. 260-268 (surtout les tableaux
p. 266-267). Comme le remarque Dihie. p. 144, le pléonasme
(moyen) se rencontre ailleurs dans la
Collection hippocraiique. On préférera le moyen de .\ à l'actif de M
à cause de la paromoiose ...
, €€ ,
. €
XVI, 4 140

€ €

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5 <6Î> 610

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add. Ermerins : sed -- supra -- add.


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Kuehlewein : ||
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II

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|| ||

II
: Kuehlewein ||
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Kuehlewein)
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II

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II

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13

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||
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||
om.
™''''•
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||

II
17 : || : ||
scripsi :

||
Reinhold : .
141 ANCIENNE MÉDECINE
qu'éclate la fièvre la plus aiguë — fièvre qui n'est
pourtant pas aussi forte (qu'il y paraît), mais même
cesse en peu de temps et se révèle, d'ailleurs, générale-
ment inoffensive? Et tout le temps que le frisson est
présent, elle est très chaude ;
puis, traversant tout le
corps, elle se termine le plus souvent aux pieds,
là où
précisément le frisson et le refroidissement ont eu le
plus de vigueur et sont demeurés plus longtemps
qu'ailleurs^. Inversement, lorsque le malade a transpiré
et que la fièvre s'est éloignée, il se refroidit beaucoup
plus que ne l'avait pas saisi tout d'abord^.
si la fièvre
Dès lors, d'un principe face auquel se présente avec
autant de hâte le principe qui lui est le plus opposé et
qui lui enlève spontanément son pouvoir, que pourrait-
on attendre de grand ou de redoutable? Qu'est-il besoin
d'un puissant secours contre lui?

XVII. 1 Quelqu'un pourrait objecter: «Mais ceux


dont la fièvre est due aux causus, péripneumonies, et
autres maladies graves, ne se débarrassent pas rapide-
ment de la chaleur, et dans ces cas-là le froid ne se pré-
sente pas à rencontre du chaud^.» 2 bien, moi, je Eh
pense disposer là d'une très grande preuve que, si ces
gens ont de la fièvre, ce n'est pas simplement à cause du
chaud et que ce principe ne saurait être à lui seul la
cause de l'affection*, mais qu'il y a conjointement de
l'amer et du chaud, de l'acide et du chaud, du salé et du

3. Aucun des manuscrits anciens n'a conservé la bonne leçon,

aisément (corruption de
de entre et
en
,
mais la comparaison des deux variantes permet de la restituer

,
dans A, entraînant l'adjonction
déplacement de dans M). Cette
restitution, qui est confirmée par la comparaison avec le c. 16,
140, 15 a été faite dès le
xvi•" s.par Cornarius (suivi par Zwinger) dans sa traduction latine
(«neque adest hic frigidum adversus caiidum»), et au xix*' par
Coray, p. 152 ( ).
Elle n'a pas eu le succès
qu'elle méritait dans les éditions modernes. La leçon fautive de A
est adoptée par Littré, Ileiberg, Jones*, Festugière. Jones^ offre le
bon texte, qu'il attribue à Cornford (= F. M. Cornford, « Emenda-
tiones in ...», Proc. Cambi . Philol. Soc. CLXXVIII, 1941/45,
p. 22 sq.); il a échappé à Cornford et à Jones que c'était déjà le
texte de Kuehlewein.
XVI, 7 141

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5

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Jones^ Il

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Ermerins ||
om. || 8 :
|| 9
Reinhold 10

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Ermerins : (pr.) :
|| : || 1 1

^
||

- :

Ermerins

Corn. [Lat.]
||

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ante
*
||

add.

Kuehlewein
: -
Kuehlewein
|| 14
(cf.
:

||

frigidum adversus calidum


Coray) :
13
|| 12 post

^ : - ||
add.

15
"
:

II
19
|| 17 om.
||

:
16
||
18 ' :

||
19-
||

.
||

142.1
om.

om. .
142 ANCIENNE MÉDECINE
chaud, et mille autres combinaisons le froid à son —
tour étant associé à d'autres qualités. 3 Ce qui cause
donc le dommage, ce sont ces qualités-là^; c'est en
auxiliaire que le chaud est présent aussi, participant à
la force dans la mesure où le principe qui dirige en

possède^, s'exacerbant et s'accroissant avec lui, mais ne


possédant aucune puissance plus grande que celle qui
lui est propre.
XVIII. 1 II est clair qu'il en est ainsi d'après les
exemples suivants^. Pour commencer, venons-en aux
cas les plus manifestes* dont nous faisons tous souvent
et continuerons de faire l'expérience. 2 Tout d'abord,
chez tous ceux d'entre nous qui ont un coryza avec
déclenchement d'un flux par les narines^, ce flux, (étant)
généralement plus acre que celui qui existait aupara-
vant et qui sortait par les narines chaque jour, fait que
le nez se gonfle et s'enflamme au point d'être chaud et

brûlant au dernier degré^ ; et si l'on y porte la main', et


que le flux persiste assez longtemps, cette partie, qui
n'est pas charnue et qui est dure*, en vient même à
s'ulcérer. Et comment donc cesse cette brûlure du nez^?
Ce n'est pas lorsqu'il y a flux et inflammation, mais
c'est quand l'humeur s'écoule plus épaisse, moins acre,
cuite^" et davantage mêlée à l'humeur précédente^^ ;

alors donc désormais la brûlure cesse. 3 Toutefois, chez


ceux dont le coryza est manifestement provoqué par
le froid seul sans qu'aucune autre qualité ne vienne s'y

associer, chez tous ces gens voici comment survient la

6. Je choisis de

sont sur le même plan.


lire

, avec
A, Littré. Kuehlewein, Heiberg, Jones^-^.
M vulg. et non
et trjYxatciv
dont le sujet sous-entendu est
est employé ici intransitivement au sens de «s'enflammer»;
et sont des adjectifs à l'accusatif (féminin), attri-
( ).
Avec la leçon
avec

de A, 'J
buts proleptiques du sujet à l'accusatif
est transitif (cf. 131, 7).

XVII, 2

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142

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Kuehiewein
||
om.
12
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addiderim
Kuehiewein
||
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|| 16 om. ||

recc.
om.
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|| 18

Littré
21
:

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: -
delev. Ermerins
||
||

:
:

||
||

:
143 ANCIENNE MÉDECINE
délivrance : du refroidissement on se réchauffe
à la suite
on se refroidit;
alors qu'à la suite de la chaleur brûlante
et ces états se présentent rapidement sans qu'il y ait
besoin en plus d'aucune coction^. 4 Mais tous les autres
cas de coryza, dont je dis qu'ils se produisent par
l'âcreté et le manque de crase des humeurs, s'achèvent
de façon identique quand il y a eu coction et crase^.
XIX. 1 En second qui se tournent vers
lieu^, les flux
les yeux, dans la mesure où
contiennent des âcretés
ils

violentes et variées, ulcèrent les paupières, rongent


complètement chez certains les joues ainsi que la région
sous les yeux à l'endroit où ils s'écoulent, déchirent et
traversent en rongeant la tunique qui enveloppe la
pupille. Douleurs, chaleur brûlante et inflammation
extrême s'emparent du malade, et cela jusqu'à quand*?
Jusqu'à ce que les flux subissent la coction, deviennent
la chassie. Or la coction
plus épais, et qu'il en résulte de
provient du mélange et de la crase des flux entre eux,
ainsi que de leur cuisson en commun^. 2 Autre exem-
ple les flux qui se tournent vers la gorge* et sont à
:

l'origine des enrouements', des angines, des érysipèles^


et des péripneumonies, tous ces flux commencent par
émettre des substances salées, aqueuses et acres et à —
cause de telles substances les maladies sont pleines de
vigueur^ — , mais quand ils deviennent plus épais et
plus cuits ^*', et qu'ils se sont débarrassés de toute âcreté.

grec .
Aucun terme français ne correspond exactement au terme
7.
La traduction traditionnelle par «enrouement»
privilégie un symptôme parmi d'autres. Dans la Collection
hippocratique, c'est une affection de la gorge, accompagnée ou non
de toux, qui affecte la voix et peut descendre sur la poitrine.
Comparer en particulier Vents, c. 10, Littré VI, 106, 3 (= Jouan-
na, 117, 4 avec la note 2, p. 117) où la maladie est causée par un

).
flux de phlegme mêlé à des humeurs acres (
On retrouve donc les humeurs acres dans les
V^ents comme dans VAncienne médecine. Selon M. Grmek, Les
maladies à l'aube de la civilisation occidentale .... p. 476 (n. 96 de la
p. 475). c'est un rhume avec laryngite et trachéo-bronchite.
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15 pr.

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Reinhold
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II, p.

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M)
M
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:

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A'

18
(-
A
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A
" ||

||
ait.
:

17
:
144 ANCIENNE MÉDECINE
alors désormais les fièvres cessent, ainsi que tous les

autres maux qui affligeaient l'homme. 3 II convient,


naturellement, de considérer que ces substances-là sont
la cause, dans chaque cas, de l'affection, puisque leur

présence détermine nécessairement son mode d'être, et


que leur changement en une autre crase détermine
nécessairement sa cessation^. 4 Et dans ces conditions,
tous les flux (sur la gorge) qui proviennent de la chaleur
seule à l'état pur ou du froid seul à l'état pur, sans avoir
part à aucune autre qualité^, cesseront de la façon
suivante par le changement du chaud au froid et du
:

froid au chand, changement qui s'opère comme je l'ai


dit précédemment^. 5 Qui plus est, les autres maux qui
affectent l'homme proviennent, tous, des qualités*.
D'une part en effet, quand une humeur amère s'est
déversée^, humeur que nous appelons bile jaune, quelles
nausées, quelles fièvres brûlantes, quelles faiblesses
s'emparent des malades! Et une fois qu'ils se déli-
vrent de cette humeur —
parfois même à la suite
d'une purgation soit spontanée, soit provoquée par un
remède, si l'une de ces opérations se produit comme il
convient* —
les voilà manifestement qui se délivrent
,

et des douleurs et de la chaleur; mais aussi longtemps


que ces humeurs sont soulevées' sans coction et sans
crase, ils n'ont aucun moyen de mettre fin ni à leurs
douleurs ni à leurs fièvres. D'autre part aussi dans les
cas où des acidités acres et érugineuses viennent se

Les malades sont délivrés de la bile jaune soit par la coction


6.
et la crase de cette humeur, soit parfois par une évacuation,
qu'elle soit spontanée ou provoquée par un médicament évacuant.

Il
porte sur
faut que l'évacuation se fasse
une juste mesure et au moment opportun
,
comme l'a rappelé Radt (p. 102).
c'est-à-dire à la fois
(sens spatio-temporel de
dans

). Comparer Eschyle, Prométhée, v. 379


(métaphore médicale). Les médecins hippocratiques
employaient des évacuants qui, selon eux, attiraient électivement
la bile (jaune). Comparer Nature de l'homme, c. 5, Littré VI, 42,

,
11 sq. (= Jouanna
. 176, 12 sq.) :
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XIX, 2

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1 1
Reinhold
- om.
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10
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12
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add. **' et
13 :

17
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II
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-
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18
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||

II
19
||

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:

: --
ras.
* ||
A* ||

scripsi
:

: .
||
145 ANCIENNE MÉDECINE
fixer, quels accès de fureur^ quelles morsures dans les
viscères et le thorax, quelle détresse ! Et le malade ne
quitte pas cet état avant que l'acidité ne s'évacue ou ne
se calme et ne se mêle à toutes les autres substances (du
corps)2. 6 Mais subir la coction, se transformer, devenir
ténu ou plus épais pour aboutir à une forme d'humeur
en passant par de nombreuses formes variées, ce qui —
explique que les crises et le décompte des périodes aient
une grande importance dans de telles maladies ce — ,

sont là des modifications que le chaud ou le froid sont


de toutes ces substances (du corps) les moins aptes à
subir^. Car il ne saurait y avoir, dans ce cas-là au moins,
ni mûrissement* ni épaississement. De fait, en quoi
pourrons-nous dire qu'il existe pour le chaud et le froid
des crases possédant telle ou telle propriété suivant
qu'elles se font avec telle ou telle substance, puisque le
chaud ne se mélangera à rien d'autre quand il perdra sa
chaleur sinon au froid, et le froid, lui, ne se mélangera à
rien d'autre sinon au chaud*? 7 II en va autrement de
toutes les autres substances présentes en l'homme plus :

les substances auxquelles elles se mêlent sont nombreu-


ses, plus elles s'adoucissent et s'améliorent. L'homme se
trouve dans la condition la plus excellente de toutes
quand les substances sont en état de coction et de
calme, sans manifester aucun pouvoir particulier^.
XX. 1 Sur ce sujet donc je pense m'être suffisam-
ment expliqué. Cependant certains médecins et certains

4. Le verbe reprend dont il est ici synonyme.


.)
XIX, 5 145

€)
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5
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1

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: om.
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C. 15, 138, 6

Coray
II
5

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II

-
:
6 om.
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:

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an

seclus.
: -
|| om.
Langholf
||
cf.

||

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7
9
:

'

""" (
II

supra
*
-- add. *)
:

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Reinhold
^ :
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|| 10
Ermerins

:
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: Zwing."'*' Coray ||
scripsi :
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II
12 2:

:
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13
1

' :
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|| om.
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14
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II ||

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^corrjyi _^. ^ras
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pgg pQgj^ Lind.

-
|| :

(sic) post add. Kuehiewein

:
(sed add. supra
\\

') : //
Ermerins :
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||

16
17
|| ||

om. sed où ( = ?) add. A' jj Ermerins : M om.


A II
om. A \\
M : A || 18 pr. om. A.
146 ANCIENNE MÉDECINE
savants déclarent qu'il n'est pas possible de connaître la
médecine si l'on ne connaît pas ce qu'est l'homme, mais
que c'est ce savoir que doit parfaitement acquérir celui
qui a l'intention de soigner correctement les hommes^.
Et le discours de ces gens-là va dans le sens de la
philosophie^ comme^ celui d'Empédocle* ou d'autres
qui, à propos de la nature^, ont écrit en remontant à
l'origine^ ce qu'est l'homme, comment il s'est formé au
début et de quels éléments il s'est constitué'. 2 Mais
moi, j'estime que tout ce qui a été dit ou écrit sur la
nature par tel savant ou tel médecin a moins de rapport
avec l'art de la médecine qu'avec l'art de la peinture^,
et j'estime que pour avoir quelque connaissance précise
sur la nature, il n'existe aucune source autre que la
médecine. Et cette connaissance, il est possible de
l'acquérir parfaitement quand on embrasse la médecine
elle-même correctement dans sa totalité —
tant qu'on
ne l'a pas fait, il s'en faut de beaucoup —
je veux dire^
,

cette enquête qui consiste à savoir ce qu'est l'homme,


les causes de sa formation et tout le reste, avec
exactitude. 3 Car voici ^", en tout cas, ce qu'il me paraît
nécessaire pour un médecin de savoir sur la nature, et
de chercher de toutes ses forces à savoir, s'il a
l'intention de remplir tant soit peu ses devoirs c'est ce :

qu'est l'homme par rapport aux aliments et aux


boissons, ce qu'il est par rapport au reste de son genre

coagulation; c'est ce qu'implique le verbe

(voir Chairs, c. 9, Littré VIII, 596, 4 =


froid qui a formé les chairs par coagulation
.
de vie^^, ce qui arrivera à chacun^^ à la suite de chaque

7. La formation originelle de l'homme est conçue comme une

manière de se représenter la formation de l'être vivant se


rencontre chez d'autres médecins de la Colledion hippocratique
Cette

Joly, 194. 9, à propos du


— —
voir ;

aussi Maladies IW, c. 32, Littré VIL 542, 5 = Joly 84, 3 à propos
de la semence qui s'est coagulée — — dans la matrice pour
former, avec le temps, une «nature à forme humaine» —
— ) et chez les philosophes présocratiques (Empédocle

... ).
DK 31 15. V. 4 ... ; Anaxagore DK 59 4
XX, 1


, . Teiv€i
146

.
|
-
10

.
2

, | 622

,
î

15

, . 3
— ,

'

, '

sq.);
Test. 13-15
24 (éd. Diels 65, 10
15-17 — ] ] —
cf.
sq.).
De rabie
cf. De

25
rabie 10 (éd. Diels 64, 5

(éd. Diels 65, 12-15).

1 A : M II 2 AM" : 8M || 3 A :

-
II
.A*M : A A*""^ || M :

- A ||
4 Reinhold :

om.
in
M
ras.
A
A
II

om. A
M^
II

8
6

||
om.
11
||

M

A
\
add. A^'
||

A
:

\
:
* M
: -
M
||

||
||
M

M
7
:

||
M

13
:

A*M
A
AM
||

:
:

A || 10

A
]:
A
M^

||
M
||

-
:

12

M (<0060?) ||
A : M ||
A : M ||

A : MU'' ||
14 :

: || 15 : || : \\
II

:
* ||
Kuehiewein : \\ 16
: om. ''' || 17 : ||

: ||
om. ||
18 om. || 18 sq.
om. || 19 om. .
147 ANCIENNE MÉDECINE
chose, et pas simplement ainsi : «Le fromage est une
nourriture mauvaise, car il cause du mal à qui s'en est
rempli», mais quel mal il cause, pour quelle raison, et
quelle est, parmi les substances contenues dans l'hom-
me^, celle à laquelle il est inapproprié^. 4 Car il y a bien
d'autres nourritures et boissons mauvaises, qui affec-
tent l'homme d'une façon qui n'est pas la même. Ainsi
donc, qu'il me permis de prendre l'exemple du vin
soit :

non mélangé, bu en grande quantité, il affecte l'homme


d'une certaine façon et tous, à la seule vue de cet état,
;

reconnaîtraient que c'est là la propriété du vin et que


c'est bien lui qui en est la quant aux substances
cause ;

contenues dans l'homme sur lesquelles il exerce surtout


cette action, nous savons quelles elles sont*. 5 Telle est
donc la vérité que je veux voir apparaître également
dans les autres cas. Le fromage, puisque je l'ai choisi
comme exemple, n'incommode pas tous les hommes de
la même façon, mais il y a des individus qui peuvent

s'en remplir sans en éprouver le moindre dommage, et


même il procure une force étonnante à ceux auxquels il
convient il en est d'autres, en revanche, qui ont de la
;

difficulté à l'éliminer'*. 6 II existe donc une différence


entre les natures de ces gens-là, et la différence porte
sur la substance qui dans le corps est précisément
ennemie du fromage et qui est éveillée et mise en
mouvement par lui. Ceux chez qui une telle humeur se
trouve être en plus grande quantité et exercer une plus
grande domination dans le corps, ceux-là éprouvent
XX,

»,
3

€, '
» « 147

6€0

€€.,"
5

. 4
â

.
"

.
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10 €V
5

,,
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'

'
|| 624

,
15
' 6

20
. ,
1 : 8 II
2 : 1| : ||

:
||
3 : || : || 3sq.

'
8
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:
|| 6
||
||

^ 5
:

:
''''*
|| 7
:

*(
:
||

) || 9
||

om.

]]
II
post
Ermerins :
add. ||

^
||
10
12
om.
'
|| 1 1

:
:
||

||

-
add. "'•' || : || :

II
13 in ras. A' ||
14 : || :

^'*'
|| 15 :

^ ||

^
: ||

(
: 16 || :

Ermerins
: - ||

)
|| 18 pr. om.
:

|| : ||
||

19
17
'"*

.
||
:

20
||

^ :

:
|| :

||
||

:
148 ANCIENNE MÉDECINE
normalement une plus grande souffrance. Si le fromage
était néfaste nature humaine, il
pour l'ensemble de la

aurait incommodé l'ensemble des hommes. Qui posséde-


rait ce savoir ne souffrirait pas^.

XXI. D'autre part, dans les convalescences au


1
sortir des maladies, et de plus dans les maladies de
longue durée, il se produit de nombreuses perturba-
tions, les unes spontanément, les autres par des choses
fortuitement administrées. 2 Or je sais que la majorité
des médecins comme les profanes, si, ce jour-là^, les
malades trouvent avoir fait quelque innovation, soit
se
en se baignant, soit en se promenant, soit en mangeant
un mets différent —
que tout cela, une fois administré,
se trouve ou non meilleur pour les malades^ en — ,

attribuent néanmoins la responsabilité à l'une de ces


innovations, ignorant la cause et supprimant, si cela se
trouve être ainsi•*, ce qui est le plus utile. 3 II ne faut
pas raisonner ainsi, mais savoir l'effet que produira un
bain supplémentaire pris inopportunément, ou l'effet
que produira une fatigue (supplémentaire et inopportu-
ne). Car ce n'est jamais la même souffrance qui résulte
de chacune de ces deux choses^, ni non plus d'une
pléthore, ni même de tel ou tel aliment. Celui-là donc
qui ne saura pas comment chacune de ces choses se
comporte à l'égard de l'homme ne pourra ni connaître
les effets qui en résultent ni en user correctement*.

au
5. Le terme
c. 10,

. apparaît deux autres fois dans le traité,

129, 15 et 130, 9. Les manuscrits tiésitent entre les formes


et Une harmonisation semble nécessaire
pour l'ensemble du traité. On écrira

. .
qui est la forme

- (type — ).
attendue dans le cas d'un abstrait dérivé d'un adjectif en
Mais la forme
dans les inscriptions (cf. LSJ s.v.). Le génitif
est attestée
est un
génitif objectif dépendant de Radt (p. 110 sq.) estime
nécessaire de rétablir, à la suite de Wilamowitz et Gomperz, la
préposition devant
lélisme avec la suite ...
correction semble être une lertio facilior.
pour rétablir le paral-
Cette
XX,

,.
6

. ],cl

'
148

5 , , .,,
XXI. 1 '

,
10

"'
,,. , ., ,
||
3
626

, '
15
'

."
' .
1 : - ||2
- :

^ ||
' :

3sq. '

(

: ||
:
II

Gomperz || 4 ait. :
|| 6 :

||
: ||
7sq.
corr. ^) ( in ras.) A : || 8
'^"'"''
: ||
9 ; ||

(-- in ras. A*) M : A* (- add. si) ||


pr. A :

M 10 II
A^^M : A sed supra add. A et
mut. in
^ A^)
||

:
||

12 :

|| 13
A ;

||

:
:
||

||
1 1 :

||

]
scripsi :

Ermerins
Wiiamowitz Gomperz
: - |

||
||

' 16
:
||
14
:
in ras.

|| 19
^ <> A || 15

||
Kuehiewein : .'MVI.
149 ANCIENNE MÉDECINE
XXII. 1 On doit, à mon avis, savoir également ceci :

quels sont lesmaux subis par l'homme qui proviennent


des qualités et quels sont ceux qui proviennent des
configurations^ Que veux-je dire par là^? Par qualité,
j'entends l'acuité^ et la force des humeurs; par
configurations, toutes les parties internes du corps, les
unes étant creuses et se resserrant après une portion
large en une portion étroite, d'autres étant au contraire
évasées^, d'autres dures et arrondies, d'autres larges et
suspendues, d'autres étendues, d'autres longues, d'au-
tres compactes, d'autres lâches et gonflées, d'autres
spongieuses et poreuses^. 2 Dans ces conditions, quand
il s'agit, tout d'abord, d'attirer à soi et d'aspirer un
liquide du reste du corps, sont-ce les parties creuses et
évasées qui sont les plus capables de le faire, ou les
parties dures et arrondies, ou les parties creuses et se
resserrant en une portion étroite après une portion
large? Je pense, pour ma part, que ce sont ces
dernières, celles qui se rétrécissent en une portion
étroite après une portion creuse et large^. 3 Pour le
comprendre, convient de se référer à ce qui est visible
il

à D'une part, en gardant la bouche


l'extérieur^.
ouverte, vous ne pourrez aspirer aucun liquide^; mais
en avançant les lèvres^, en les contractant et en les

que,
rares
9.
du verbe
presque
P. Chantraine,
,
Unique emploi, dans l'état actuel de

DELG,
qui appartient
exclusivement
s. .
attestée
() «les
la

à
Collection fiippocrati-
une famille de mots
dans les gloses
lèvres».
voir ;

Pourtant, à

,
l'époque de Galien, y avait au moins un autre endroit de la
il

Collection où ce verbe était attesté. En effet Galien signale dans


son Glossaire liippocratique, outre notre passage qu'il glose par
(«tendant les lèvres en avant à l'extérieur»),
un passage où était employé le présent glosé par
(éd. Kùhn XIX, 133, 4). Un
autre composé est attesté dans Articulations, c. 33,
Littré IV, 152, 1 (= Kuehiewein II, 152, 2), et relevé par les
glossateurs, Érotien (A 118 éd. .Nachmanson 25, 11-13) et Galien
(éd. Kùhn XIX, 84, 6). Cf. chez Aristophane, Guêpes,
V. 1315 («faire la moue).
-
XXII,

€ '
. , ,€ XXII.
1

1 Aeîv 8é cîSévai
149

€ €,
cîvai

$
;

€€, , €,
, ,€€
, . €,
€€
6€ €
es


10 €

'
€ 2

€ €
'

| .
. ,- ;

15 éç 3

'

37, 6

5 =
Test. 6

18
A
]]
= supra,
3 supra,
et 12
p. 96).

p. 98).
cf. Gai..,
cf.

Gloss.,
Erot. s.

s.v.
. ( 27, éd. Nachmanson
(éd. Kùhn, XIX, 133,

add.
1

M
M
A
:

||

M
:

om. A
A
M
||

AM
||

4 ]<>
6
:
M ''• A

M
:

-- in ras. A^"*"'*

A
|| 2 pr.

Gomperz
M
||
post
AM'

||
:

b post
add.

A post
M ||

< > ^—
|| || : || :
||

add. M M A 6sq.

-
|| : ||

om. || 6 post addiderim ; cf. 149, 12 || 7


post add. ||
ait. om. || 8 :

'"*

- ]'
|| 9 om. || 10 : ||

:
||
1 1 : ||
12 ait. in ras.
A* Il
13 M : A A^ ||
14 M : A || M :

A
' A''"'''" (ai add.
]
A*'') || ait. om. M || 15 M :

, -
A II
: A || in ras. A* || ante add. A ||

16 A : M ||
17 post add. âv Ermerins ||

A : M ||
18 M Gai. : A ||

A^M A M A 18-p. 150.1


(<001)
: :
|| ||

scripsi : .
150 ANCIENNE MÉDECINE
comprimant, vous aspirerez; et même, si de surcroît^
vous appliquez une canule contre les lèvres, c'est avec
facilité que vous pourrez aspirer tout ce que vous
voudrez. D'autre part, les ventouses que l'on applique,
formées d'une portion large se resserrant en une portion
plus étroite, sont une invention de l'art dont le but est
précisément d'attirer hors de la chair et d'aspirer; il en
est ainsi de bien d'autres instruments analogues. 4 Les
parties à l'intérieur de l'homme qui ont une configura-
tion naturelle de ce type^ sont la vessie, la tête, et, chez
les femmes, la matrice^. Manifestement ces parties-là
sont celles qui attirent le plus et elles sont constamment
remplies d'un liquide amené du dehors. 5 Quant aux
parties creuses et évasées, ce sont les plus aptes de
le liquide quand il afflue*, mais elles ne
toutes à recevoir
peuvent pas l'aspirer aussi bien (que les précédentes).
Les parties dures et arrondies, elles, ne peuvent ni
attirer le liquide ni le recevoir quand il afflue; car le

liquide ne peut que glisser tout autour faute d'avoir un


siège où demeurer^. 6 Les parties spongieuses et
poreuses telles que la rate, le poumon et les seins,
placées au contact (d'une humeur), sont les plus aptes à
l'absorber^, à se durcir et à s'accroître par l'apport du
liquide. Car elles ne peuvent même pas, comme dans le

La leçon de A
2. a été adoptée par tous
modernes depuis Kuehiewein mais, comme l'a

.
les éditeurs ;

justement souligné Radt (p. 12), elle est criticable la préposition


1 :

gouverne normalement un génitif et non un datif; comp.

, .
c. 23, 152, 18 sq. ... Il convient donc de suivre le

texte de M, qui était déjà celui des éditions du au xix"'. Pour


l'hendiadyn ... comparer dans Maladie sacrée, c. 1,
Littré VI, 352, 3sq. (= Grensemann 60, 4) ...
la de ventouses
façon (
3. Aristote. en Génération des animaux II 4. 737 b 30-32. réfute
l'opinion selon laquelle les parties sexuelles de
).
Le philosophe vise
vraisemblablement notre traité comme on le pense généralement;
voir par exemple P. Louis, Aristote, De la génération des animaux.
la femme attirent à

eu. F., Paris, 1961, p. 64, n. 1, et S. Byl, Recherches sur les grands
traités biologiques d' Aristote : sources écrites et préjugés, Bruxelles,
1980, p. 40.
.€€ €$,$-
XXII, 3 150

.
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5
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- 628

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10
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15

. ,
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, 6

-
630

1 : Kuehlewein 2

||

: || 3 om. Littré || :

II
4 Littré (cf. jam Coray) : A
M (-
M
M
:

(
:
M™"^ add.
A ||
M'*')
5
6
A :
' M jj 5sq.
Heiberg

-'
||

] 4sq.

-
|| : ||

-- . -
II
in ras.
8
A*
:
\)
||
|| 7
:
:

\ || ] ||

e corr. M
:

|| 9

* (-
\
!|

:
:

||

: -om.

||
||

||

||
10
11
Kuehlewein

Kuehlewein
''"''''

:
(
:

^"^^')
\ \\ 12
;

(
?) || om. : || 13 ||

: || 14 ait.
: om. 15 ante || ||

add. Diels apud Heiberg || :

"* )
2
add.
15sq.
II

Lind.
..

(cf.
: -
Ermerins
16 om.
pulmo Corn. [Lat.])
Anastassiou coll. 151,
17 post
A
||

M post ||
||

:
||

add. Littré ||
M (falso legunt Heiberg Jones^) :

om. A II
A2 : A M.
151 ANCIENNE MÉDECINE
cas où le liquide est dans une cavité et que cette cavité
l'enveloppe du dehors, se vider chaque jour^; mais
quand une de ces parties a bu et reçu le liquide en elle-
même, les endroits vides et poreux, même de petite
taille, remplissent de toute part, et de molle et
se
poreuse était, cette partie devient dure et
qu'elle
compacte, et elle n'opère ni coction ni évacuation^.
Voilà ce qu'elle subit à cause de la nature de sa
configuration^. 7 Tout ce qui produit du vent et des
coliques dans le corps provoque normalement dans les
parties creuses et spacieuses, telles que le ventre et le
thorax, du bruit et des grondements* vent ne
; car si le

les remplit pas assez pour rester immobile, mais a la


possibilité de changer de place et de se mouvoir, il en
résulte nécessairement du bruit et des mouvements
perceptibles^. Mais quand les parties sont charnues et
molles, dans de telles parties cela provoque normale-
ment des engourdissements^ et des engorgements,
semblables à ceux qui surviennent dans les parties

,
2. La syntaxe de cette phrase, comme on l'a remarqué depuis
longtemps (voir la longue note 21 de Littré I, 628-631), est
singulière. On passe d'un pluriel neutre (...
parties spongieuses») à un sujet masculin singulier (cf.
«les

dans A et M), qu'il y ait ou non la transition par


un neutre singulier (cf. A face au masculin
<> de M). Pour expliquer le passage, on a supposé la
lacune d'un sujet masculin à tirer de l'énumération des trois
parties spongieuses citées en exemple qui sont au masculin (150,
14 sq. oïov
poumon
). On a restitué soit
(Corn. [Lat.], Van der Linden, Coray), soit la rate (Littré,
le

Ermerins, Radt). Mais il n'y a pas lieu de privilégier l'une des


trois parties citées en exemple; voir déjà VVanner, p. 16, n. 17.
En employant le masculin, le médecin peut avoir à l'esprit
chacune des trois comme me le signale M. Grmek, l'induration
:

du poumon est en fait un signe de la phtisie, l'induration de la


rate un signe de paludisme, et l'induration du sein un signe de
cancer. On conservera donc l'anacoluthe et l'indétermination
qu'elle implique.
€,, ',
XXII, 6 151

'| € 66 •


[]

. ",
. , èç


- '
'
,
5

,
7

10
' *

, , 632

,
II

'
'

Test.

]
] Gal., Gloss., . (éd. Kuhn

]
1 cf. s.

XIX, 98, 6 = 3 supra, p. 98 sq.).


7 cf. Erot. s.v. ( 1. éd. Nachmanson 90, 2sqq.=
supra, p. 96).
7 cf. Gal., Gloss., s.v. (éd. Kùhn XIX, 80, 16 =
A

'
1 supra, p. 97).

M
A : - M ||
.\ : M ||
post add.
M
' in initio
II

Gal.
sequ. Iineae
|| 2 'M
secl. Kuehlewein
.'"*'
post
deinde ras.
;

add. '
||

1
A
litt. in fine
:

Ermerins et post
iineae et
||

Radt || A^* : A M scripserim coll. 150, 15 || 3


Aid. .\*
?
: :
||

|| om. || 4 \ :
||
(-
in ras. A*) 6

- (-
: || :

-
-
|| 7 :
|| Gai. :

™" (-- **') "'" (-- in


||

7sq. : 8 ||

ras. M*) : A om. A|| 9 ||


^ :

(
\carr^ .
.^.
.\*

jj^
supra -- add.) Coray

--
pgg ^1 A II

^"*
: - M ||
post
|| 10
add.
)
A ||

-
:
|| 1 1 .\* :

|| 12 Kuehlewein :
||
pr. om. || 13
:
||
14 : || :
||

:
II
14-. 152.1 Coray :

(- .\^) (ait. -- et ait. -- e corr.) A (lege


; cf. jam Mercurialem) Coray
Littré Weber^.
152 ANCIENNE MÉDECINE
obstruées^. 8 Quand le vent rencontre une partie large
faisant obstacle et se heurte à elle^, et quand il se
trouve que cette partie n'est par nature ni assez forte
pour être capable de supporter la violence du choc et de
n'en éprouver aucun mal, ni assez molle et assez lâche
pour accueillir l'air et lui céder la place, mais est à la
fois tendre, gonflée, pleine de sang et compacte, comme
par exemple le foie, alors cette partie d'un côté, à cause
de sa compacité et de sa largeur, résiste et ne cède pas
— tandis que le vent, affluant^, augmente, gagne en
force, et mène les assauts les plus violents contre
l'obstacle qui le repousse —
mais d'un autre côté, à
,

cause de sa mollesse et de sa teneur en sang, elle ne peut


pas être exempte de souffrances. Voilà les raisons pour
lesquelles des douleurs très aiguës et très fréquentes
surviennent en cette région, ainsi que des empyèmes et
des tuméfactions en très grand nombre. 9 Ces
symptômes se manifestent aussi avec violence sous le
diaphragme, toutefois avec beaucoup moins d'intensité.
Car le diaphragme est, de par son extension*, une partie
large qui fait obstacle, mais il est, de par sa constitu-
tion, une partie plus tendineuse et plus robuste. Aussi
l'endroit est-il moins sujet à la douleur; cependant il se
produit même dans cette région des souffrances et des
tuméfactions.
XXIII. 1 II y a bien d'autres sortes de configura-
tions, à l'intérieur et à l'extérieur du corps, qui diffèrent

,
grandement^ les unes des autres relativement aux maux

3. La leçon de A adoptée pour la première fois par


Gomperz en 191 1 et reprise par Festugière, est un terme imagé qui
compare d'un torrent qui se précipite contre un

,
le flux d'air à celui
obstacle, grossit, et s'élance sur lui avec plus de force ; cf. Vents,
c. 3, Littré VI, 94, 4 (= Jouanna 106, 4) ... «flux
d'air». La métaphore du torrent n'exclut pas la métaphore
militaire du flot des assaillants repoussés par un rempart. La
conjecture de Reinhold («retenu») a eu les faveurs de
plusieurs érudits (Kuehlewein, Jones^'^, Diller^, VVanner, p. 16,
n. 17, Radt, p. 115).

6 . "€
XXII, 7

€ irpôs
8

€ 6 €€€
' €£ €
152

5
€05

'
'
,
€€ €
€ €,

,


€€ €

€|
— ,

-
10

civai •

$ €.

,, ||

bk
9
*
634

15

XXIII. 1

. ,|
()) ^ ^
)
1 2
() ^
: || : ||

supra add. || ante add. ||

: ||
: Coray Littré (cf. 152, 9
||
3 post transp. || 5 ;
||

:
II
6 : || 8 :

Ermerins (app. crit.) Reinhold edd. usque


ad Littré 9 M : A 10 post add.

)
|| ||

M sed del. M"" -- A* 12 sq.

]
|| A''"'^M ; e corr. jj

A* : A M || 14 A^M : A ||

15 A^M A A M 16
. *" :

.^™^ (lege
*
||

||
:

:
""
||

||

:
||
17 pr. om. || 18 :
||

19 om. ||
:
^.
153 ANCIENNE MÉDECINE
subis^ soitchez un malade soit chez un homme sain, par
exemple une tête petite ou grande^, un cou mince ou
épais, long ou court, un ventre allongé ou arrondi, la
largeur ou l'étroitesse du thorax, des flancs^, et mille
autres espèces de configurations à propos de toutes, il
;

convient de connaître en quoi elles diffèrent, afin que,


connaissant les causes de chacun des maux subis, on
puisse correctement s'en préserver*.
XXIV. 1 En ce qui concerne les qualités^, il convient
d'examiner à propos de chacune des humeurs prises en
elles-mêmes quelle action elle est capable d'exercer sur
l'homme, comme il a été dit précédemment*, et, à
propos de leurs relations entre elles, quel degré de
parenté elles entretiennent. Je veux dire en substance
ceci si une humeur, étant douce, se transforme en une
:

autre espèce, non par mélange', mais en quittant d'elle-


même son état, quelle humeur deviendra-t-elle
d'abord? Sera-t-elle une humeur amère, ou salée, ou
acerbe, ou acide? A mon avis, acide*. L'humeur acide
doit donc être la plus appropriée à prescrire parmi les
humeurs restantes, s'il est vrai que l'humeur douce est,
elle, la plus appropriée de toutes les humeurs^. 2 Qui
serait ainsi capable, grâce à une recherche partant des
phénomènes extérieurs^**, d'atteindre le vrai serait
également capable de choisir parmi tous traitements
les

toujours le meilleur. Or le meilleur est toujours ce qui


est le plus éloigné de l'inapproprié^^.

le
1.

terme
A

d'en préciser
la fin

n'est pas l'exact


du développement sur

le
synonyme de / les «configurations
reprend en composition annulaire
employé au début du développement
sens de manière régressive.
(149, 2) et
En
«maladie», puisqu'il
s'applique aussi bien à l'homme sain qu'à l'homme malade. Il
s'agit donc des «maux subis».
2. Sur l'importance des particularités physiques, comparer
effet,

Épidémies II, 5, c. 1, Littré V, 128 1 sqq., et 6, c. 1, ibid., 132,


(),
le

le
terme
permet
terme

13 sqq.
,
XXIII,

irpôs ,
, ,,, -
1

€5,
153

.
KOS,

, ,
fj
'

. , XXIV. 1

'^|, , ;
10

15

..
,
,' |

2
|| ; , |. 636

A*
add.
1

II

vulg. Littré
Il

A
om. \

-
:
scripsi

A
|| 4
Il

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7
:

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om.
(sed
M
M
||

||
'
add. '"' et mut.

Kuehlewein
M :
:

A om. M || 19 post add.


.
NOTES COMPLÉMENTAIRES

p. 118.

atteste l'existence de discours

.
1. L'expression
sur la médecine au V siècle, à côté de traités écrits. Comp. c. 20,
146, 7 sq., et voir Notice, p. 9.
C'est un des emplois les plus anciens de
2. Le terme
est particulièrement fréquent dans le traité où il qualifie la
méthode des adversaires (six fois; voir Index, s.v.). Pour le seul
autre emploi
c. 15, Jouanna 125, 1
d'6 dans la Colledion hippocratique, voir Vents,
M :A avec la note ad toc.
Le terme conserve encore ici son sens premier («ce que l'on place
sous» la thèse, le «fondement»), mais il tend à prendre le sens
technique de «principe»; il désigne ici pour la première fois le
principe indémontré que l'on met à la base de sa thèse, c'est-à-dire
le postulat. L'emploi du terme dans le traité a été souvent étudié;

voir en particulier Festugière, p. 25 sq. (= n. 1) Jones^, p. 26-32


; ;

Diller», p. 387-389 Kuhn, p. 5, n. 1 Lloyd, p. 109-112 l'étude la

,
,
; ; ;

plus récente, celle de D. W. Vickers, «The naive empiricism of On


Ancient Medicine», Apeiron, p. 1-8, n'est pas la mieux
informée. On a comparé les emplois de Platon, Ménon 86e et
République 510 b-c, où la méthode qui part de
principes supposés admis et connus, mais non démontrés, est
proprement celle de la géométrie, des mathématiques et des
sciences de ce genre.

4. La correction de Schône <> ,


3. Pour les adversaires visés par l'auteur, voir Notice, p. 25 sqq.
adoptée par Kuehle-
wein (qui, toutefois, s'en repent en II, p. xvi) et Jones", vient
de ce que la valeur de
corrections
p. 34. Ce
:

ne
<>
signifie
n'a pas été comprise; cf. aussi d'autres
Coray, p. 119,
pas,
seclus. Gutmann,
comme le propose Festugière, p. 27
(^ n. 3), «se trompent en beaucoup de choses et en particulier en
ce qu'ils prétendent»; ce n'est pas un
adverbial intensif. À
comparera Hérodote IV, 195, 3
8' ...
coordonnant, mais un
... 8è, on

Voir aussi J. ). Denniston, The Greek


Particles, 2'" éd., Oxford, 1954, p. 306. L'antécédent de est
,
.
156

Au
ANCIENNE MÉDECINE
cours de la discussion, l'auteur reviendra sur certaines
des erreurs de ses adversaires; voir c. 13 -c. 19.
5. Le participe a son sens prégnant, comme l'a bien
souligné Festugière. p. 27 (= n. 4). C'est un art qui existe
réellement. En voulant introduire un nouveau postulat, les
médecins «philosophes» visés par l'auteur avaient sans doute
l'intention de donner un fondement «scientifique» à l'art de la

.
médecine; mais, selon l'auteur, leur position rejoint celle des
négateurs de l'art; cf. aussi c. 12, 132, 18 sq.

tration
Aussi la réfutation des adversaires de V Ancienne médecine
consistera-t-elle d'abord à montrer que l'art existe; cette démons-
rejoint dans le principe, sinon dans les modalités, la

.. ( . .
critique des négateurs de l'art dans le traité de VArl, c. 1 sqq. ;

comp. en particulier, pour la valeur prégnante de Art, c. 2,


Jouanna, 225, 9 sq. ...
6. Comp. c. 3, 123, 5 sq.
La médecine a pour but de rétablir la santé et
de préserver de la mort + datif marque le but dans les deux
cas). Or la santé était proverbialement considérée comme la «chose
la plus importante»; cf. Théognis, v. 255 et Bacchylide I,
V. 165 sqq. Ce devait être un lieu commun de l'éloge de la
médecine par les médecins; cf. Gorgias 452a où Platon fait dire à
un médecin : S' («quel bien
;

est supérieur à la santé pour les hommes?»), avec l'allusion en

des biens pour un mortel » (


451 e à la célèbre chanson de table attribuée à Simonide ou à
Épicharme (éd. Page 890) selon laquelle «la santé est le premier

qui est plus précieux que la beauté, la richesse et la jeunesse.


7. On a ici l'écho d'une réalité de l'époque. Les bons médecins
),
bien

qui avaient rendu des services aux cités étaient récompensés par
des décrets honorifiques; cf. dans la Colleclion, Presbeutikos, Littré
IX, 420, 17 sqq. et Décret des Athéniens, ibid., 400-402. Pour les
décrets honorifiques conservés par l'épigraphie, voir L. Cohn-
Haft, The Public Physicians of Ancient Greece. Northampton
(Mass.), 1956, p. 6 sqq. L'excellente réputation qui s'attache au
(bon) médecin remonte jusqu'aux temps homériques; cf. Iliade
XI, V. 514 (un médecin vaut beaucoup d'autres hommes»), avec
l'allusion dans Platon, Protagoras 322c.
8. Les couples de termes synonymes ou analogues sont

.
fréquents dans le traité. Les copistes ont eu tendance à simplifier.
Ici, c'est la branche de M qui a simplifié en omettant le deuxième

terme quelques lignes plus bas, c'est la branche de A (omission de


* ;

en 118, 12). Pour un doublet analogue, voir c. 7, 126,


3 sq.

V. 1000 sq. / ) Le terme de


n'est ici ni péjoratif (comp. Sophocle, Trachiniennes,
ni spécialisé dans le sens de
chirurgien (voir G. Cambiano, «Le médecin, la main et l'artisan»,
in R. Joly, Corpus Hippocraticum, Mons, 1977, p. 226).
NOTES COMPLÉMENTAIRES 157

10. La distinction entre les bons et les mauvais médecins est

c. 8,
,
nettement faite également dans le traité du Régime dans les mala-
dies aiguës, c. 2, Littré II, 238, 6 sq. (= Joly
et c. 3, Littré II, 240, 8 sq.
39, 10 sq.). Mais l'auteur du Régime dans les maladies aiguës
note que les différences et divergences entre praticiens entraînent
c. 6, 38, 18 sq.)
(= Joly

le discrédit de l'art auprès des profanes qui vont jusqu'à nier

complètement son existence (


que l'auteur de V Ancienne médecine voit dans ces différences la
alors ),
preuve même de l'existence de l'art (, ...
). Le même argument pouvait donc être utilisé à des fins
contraires dans la même discussion sur l'existence de l'art médical.
11. C'est vraisemblablement la trop grande confiance dans le
texte de A qui explique l'omission de âv après dans toutes
les éditions modernes depuis Kuehlewein Sv après est aussi ;

nécessaire qu'après 8() les deux apodoses


;
sont coordonnées.
Il est impossible de proposer avec Festugière, p. 29 (= n. 9), de

rattacher ... à l'ordre des mots l'exclut il


; ;

faudrait pour cela que âv soit placé avant .


12. Même si l'on peut penser que les deux termes
correspondent aux deux aspects complémentaires de
l'activité du médecin, activité manuelle et activité intellectuelle

),
distinguées quelques lignes plus bas (119, 3

, il n'y a pas, en tout cas, opposition entre

comme ce sera le cas chez Platon dans le


et la
Gorgias.
L'expérience manuelle, comme la réflexion, est ici l'ordre de la
; voir Notice, p. 77.

P. 119.

Jouanna

Maladies
...
103, 7 sq. où
étant
I, c. 6,
)
2. Cette distinction entre l'habileté manuelle et l'intelligence se
retrouve dans deux autres traités de la Collection; cf. Vents, c. 1,

.
repris par
Littré VI, 150, 13 sq.

3. Les manuscrits et les éditions se partagent entre


Kuehlewein Heiberg Festugière et
(=

A
M Littré Jones^-^, cf. aussi
(le terme

avec la note ad toc.


Wittern, 16,11 sq.)
;

Wanner, p. 19, n. 2. La divergence provient d'une faute d'ortho-


graphe assez courante (confusion /). Mais quelle est la bonne

,
leçon? Jones^^ rejette la leçon de A parce que la formulation
laisserait entendre que l'ancienne médecine part aussi d'une
ce qui est contraire à
ment, selon l'auteur,
postulat 120, 15
(cf. c. 2,
la
la

).
pensée de l'auteur. Effective-
médecine n'a nullement besoin d'un
Mais, d'un autre côté,
réapparaît au pour qualifier
l'adjectif
méthode des adversaires ( c. 13, 133, 7 sq. la
158 ANCIENNE MÉDECINE
). Par ailleurs, l'auteur, pour s'opposer à ses

.
adversaires, rappelle que la médecine est un art qui existe depuis
longtemps (c. 2, 119, 12

leçon de A, a proposé de corriger


). Coray (p. 120), sans connaître la
la vulgate en
4. La périphrase désignait au
*" siècle et au début du iV les recherches cosmologiques. Le
domaine essentiel de la recherche était celui des «choses d'en

;
haut»; aussi peut-on rencontrer seul, sans

.
voir par ex. Platon, Protagoras 315c. Mais on rencontre la

;
périphrase en entier dans les accusations portées contre Socrate
voir Platon, Apologie de Socrate 19b5
cf. déjà 18b
:

...... Dans les Nuées


;

d'Aristophane, les recherches de Socrate et de ses disciples ne


portent pas seulement sur les (. 228
mais aussi sur les phénomènes souterrains (v. 188 Le
),
).
désir de connaître ces deux domaines paraissait impie à la
croyance populaire, car ils constituaient le séjour des dieux d'en
haut et d'en bas; en témoignent les procès d'impiété dont ont été
victimes les «cosmologues» à Athènes, en particulier Anaxagore
(cf. E. Derenne, Les procès d'impiété intentés aux philosophes à

Athènes au v* et au iv' siècle avant Jésus-Christ, Liège, 1930). La


critique portée ici par un esprit positif prend des voies différentes ;

elle dénonce dans la recherche cosmologique l'impossibilité


d'arriver à une connaissance sûre, par suite de l'absence d'un
critère de référence. Les critiques contre les cosmologues au v*"
siècle pouvaient réunir les deux préoccupations à la fois, la défense
du divin et la dénonciation d'un savoir conjectural voir Euripide, ;

Frag. 913 Nauck «Qui, en voyant cela, ne réalise pas qu'il y a un


:

'météorologues' ()»? (
dieu et ne rejette pas au loin les tromperies tortueuses des

pernicieuses sur les choses invisibles


()».
aucunement part à l'intelligence
d'Hélène, c. 13 (DK 82 11), la perspective
)
Leur langue fait des conjectures
sans avoir
Chez Gorgias, Éloge
est différente de celle

(
)
de notre auteur, car «les discours des météorologues qui rendent
visible aux yeux de l'opinion ce qui n'est pas sûr et obscur»
...
sont pris comme exemple de la

puissance de la persuasion.
5. Radt, p. 75, voit un hendiadyn dans en
citant Jones^, p. 65 : «If anyone were to express his opinion». Il

commence par
l'auteur
concrète de
,
s'agit plutôt d'un hysteron proteron (cf. Jones^
c'est qu'il se place dans la situation
la communication entre l'orateur et les auditeurs.
in not., p. 66). Si

6. Pour l'impossibilité d'arriver à une connaissance sûre des


phénomènes hors de portée, comparer Alcméon de Crotone
(DK 24 1); pour l'impossibilité de savoir, dans ce cas, si l'on dit
NOTES COMPLÉMENTAIRES 159

le vrai, comparer Xénophane DK 21 34, . 3 sq. : «car à


supposer même qu'il autant qu'il est possible la
atteigne
perfection en parlant, lui-même cependant ne le sait pas». On a
rapproché aussi Gorgias, Du non-être ou de la nature, DK 82 3
(65): «premièrement, rien n'existe; deuxièmement, même s'il
existe quelque chose, l'homme ne peut le concevoir; troisième-
ment, même s'il peut le concevoir, il ne peut le communiquer et

,
l'expliquer à autrui»; voir A. Lami, «Un'eco di Gorgia in Antica
Medicina ...». p. 7 sq., qui force toutefois le rapprochement, car il

)
,
n'est pas question d'incommunicabilité dans VAncienne médecine,
mais seulement d'impossibilité pour les auditeurs comme pour
l'orateur de déterminer ce qui est vrai, en l'absence d'un critère. À
... comparer c. 9, 128, 12

,
C. 10, 129, 16 et Platon, Cratyle 425d «Car nous
(
:

n'avons rien de mieux à quoi nous référer


pour la vérité des noms primitifs.»
7. L'accumulation des formes de «découvrir», dans
cette phrase et dans le développement qui va suivre est un signe
de la confiance enthousiaste de l'auteur dans les découvertes de la
médecine. Sur ce thème et sur la comparaison avec les autres
traités de la Collection hippocratique (Art, Lieux dans l'homme) qui
célèbrent les découvertes de la médecine, ou plus généralement
avec les auteurs du V
siècle qui célèbrent la découverte des arts,
voir iVo/ice ( 1 L La médecine dans VAncienne médecine), p. 38 sqq.
8. La médecine a derrière elle un long passé, car les inventions
sont longues à se faire et progressives; même idée en c. 3, 121, 15
pour la découverte du régime des gens bien portants (
); pour ce thème, voir Notice (L'« archéologie» de la
médecine), p. 42 sq.

,
est particulièrement sensible dans cette phrase

Sur le sens de ce dernier doublet,


le xvi^ siècle. Les uns entendent
les
/
, /.
9. La recherche des doublets, caractéristique de la prose d'art,
ils forment des

membres de longueur égale ou comparable (parisose), commençant

)
ou se terminant par les mêmes sonorités (paromoiose)
;

éditeurs se partagent depuis


«il s'est trompé et il se trompe»
:

(par ex. au xvi" siècle Cornarius «falsus est et fallitur» et au


XX* siècle Festugière «on a vécu dans l'illusion et on continue
:

d'y vivre»); les autres comprennent : «il s'est trompé et il trompe»


"" Foes «cum tum
au

(
(cf. au siècle fallitur, alios fallit» et
xix'' siècle Littré «celui-là se trompe et trompe
Ces les autres»).

derniers donnent un sens moyen à qui n'est pas


clairement attesté; cf. seulement Platon, Cratyle 439c où les
manuscrits divergent Tw b). Dans le
:

reste de la Collection hippocratique en tout cas, on ne rencontre


que des actifs ou des passifs. Les nombreuses corrections proposées
par les modernes (voir Radt, p. 76, n. 1) n'emportent pas la
160

est
,
conviction.
manuscrite est

/
La seule qui ne
celle

/ /
ANCIENNE MÉDECINE

de Pierer

:
s'éloigne pas trop de
in

forment un couple de mots de longueur égale (cinq syllables) et


ayant les mêmes sonorités au début et à la fin, mais plus
largement forment une séquence
de trois termes où la parisose et la paromoiose sont parfaites.
Diels, p. 125, n. 2,
trompe et il se trompe». Mais l'effet de style
partiellement perdu
«il

non seulement
la tradition

P. 120.

1. Deux
lectures et deux interprétations ont été proposées :

un seul mot)
(en vel (Coray, Kùhlewein, Ileiberg,
Jones^), «(en montrant) que (l'art) existe réellement», ou (en
deux mots) (Littré, Jones^ Festugière), «(en montrant) ce
qu'est (l'art)». La première interprétation, malgré les objections
de Festugière, p. 36 (= n. 18), paraît préférable. Le long déve-
loppement suivant (c. 3 à c. 12) a pour objet de montrer que l'art
possède une méthode correcte qui fonde la réalité de l'art. Mettre

.
en cause la justesse de cette méthode, c'est mettre en cause
l'existence de l'art. Significative est la reprise conjointe de ces
deux thèmes à la fin du développement, au c. 12, 132, 18 sqq.
oïj

2.
8
... est repris
-
quelques lignes plus bas
:

,
par (12 sq.). désigne ici «les choses
concevables» (et nonconnues» Littré, Festugière) et
«les choses
«la faculté de concevoir». Sur ce sens «ancien» de
comp. Vents, c. 1, Jouanna 103, 8 avec la note ad loc, p. 129

. . . )
(= n. 3 de la p. 103). Le propos de l'auteur est en effet de montrer
que les choses inconnues ou mal connues du profane (cf.
sont concevables par réminiscence, si le
discours du médecin touche le vrai, c'est-à-dire explique ce que les
malades ont ressenti ou ressentent effectivement.
3. Ermerins M vulg. : edd. a Littré. L'omission
de par \ est plus vraisemblable que son addition dans M. Pour
,
cette place de
<> ).
voir J. Denniston, Greek Particles ..., p. 518 sq.
(=
4.

qu'être
et de
malade? Quelques
, la fois complément de
comme
est
note J. Pigeaud, «Qu'est-ce
à
le

le sens de la maladie dans


réflexions sur
Ancienne Médecine», in R. Joly, Corpus hippocralicum, Mons,
1977, p. 200. Le malade se remémore ce qui lui arrivait au cours
de la maladie au fur et à mesure que le médecin lui explique les
NOTES COMPLÉMENTAIRES 161

effets et les causes de son mal. Comp.

(
Pronostic, c. 1, Littré II,
1 10, 3 (= Alexanderson 193, 3 sq.)

).
le médecin arrivant au chevet
:

d'un malade doit «exposer ce que les malades omettent»


Cette anamnèse est tout
à fait différente de l'anamnèse platonicienne (Ménon 81 c sq.)• Elle
n'est pas, comme chez Platon, le signe d'un savoir non enseigné
chez celui qui se ressouvient, mais seulement le signe que le
médecin qui enseigne touche le vrai. Dans le cas de la médecine, à
la différence de la «météorologie», les auditeurs (= les malades)

sont capables de savoir si l'orateur (le médecin) est dans le vrai,


car le critère de la véracité de son discours est l'adéquation entre
ce discours explicatif et ce que ressentent les malades.
La plupart des éditeurs (Littré, Ermerins, Heiberg, Jones)

.
6.
omettent le secondavec M. Seul Kuehlewein suit la leçon de
A Sià

de
8
; Ce redoublement, mal compris par les
copistes et les éditeurs, a souffert dans plusieurs passages. Il s'agit
comp. Nature de l'homme, c. 2, Jouanna 170, 1 sq.
avec la note ad loc. (= p. 249). Pour ce tour de

République , 329 b .
style, comparer par exemple Platon, Gorgias 518 a
Les raisons qui prouvent
l'existence de l'art prouvent aussi qu'il n'a pas besoin d'un
;

postulat.

P. 121.

1. L'Ancienne médecine appartient à un courant de pensée


rationaliste qui attribuela découverte des arts non à un don divin,
mais à des facteurs purement matériels, (),
besoin (cf. ), l'intérêt (). la

de pensée, voir Notice (L'« archéologie» de la médecine), p. 41 sq.


nécessité
Sur ce courant
le

3. a ici le sens large de «fruits» (Littré) et non le sens


restreint de «céréales» (Festugiére). Ce sont ici tous les fruits
produits naturellement par la terre, tels que les glands. Peut-être,
parmi ces fruits, faut-il entendre aussi les céréales (cf. c. 13, 133,
14 ), mais cela ne peut être qu'un cas particulier. Le sens de
est si malléable que le terme a pu être employé soit, comme
ici, pour qualifier le régime «sauvage» des premiers hommes, soit

, (,
au contraire, comme chez Isocrate, Panégyrique 28, pour désigner
la nourriture qui a permis d'échapper au régime sauvage, les
«fruits» de Déméter

façon des bêtes»).



« les récoltes qui nous ont empêchés de vivre à la

4. Les découvertes de l'art ont été faites au cours d'une longue


période de temps; voir supra 119, 14 et note ad loc.
5. La conjonction de subordination introduit une longue
subordonnée ;
la principale commence à
162 ANCIENNE MÉDECINE
(122, 6). Entre la et la principale, il y a une longue
subordonnée
parenthèse. Cette construction adoptée pour la première fois par
Gomperz (p. 230 sq.) a été reprise par Festugiére. p. 39 (= n. 26),
et par Radt, p. 76 sq. Toutefois, alors que Gomperz fait commen-
cer la parenthèse à (121, 20), je la fais débuter à (121,
18); elle est ainsi consacrée à la comparaison entre le présent et
le passé.
6. Pour qualifier le régime des premiers hommes, avant la
découverte des arts, on rencontre le terme

Notice, p. 37. Mais un autre terme (« «sauvage» qui


apparaît dans d'autres tableaux de l'humanité primitive; voir
mélangé») est plus
technique et correspond à un thème fondamental dans le traité;
voir Notice, p. 55 sqq. Le régime désigné par ne
comprend pas seulement les «viandes crues, intempérées» (Festu-
giére, p. 3); l'auteur songe d'abord ici aux produits de la terre
(cités quelques lignes plus haut) qui sont mangés crus (cf. c. 13,
... ).
133, 14 sq.
les «viandes crues» (cf. c. 13, 133, 15
r«omophagie» ne s'applique pas seulement à la viande. Quand
Thucydide III, 94, 5, parle des Étoliens qui sont

p. 37 = n. 24), mais «mangent leurs aliments crus» (R. Weil,


Thucydide ///, CUF, Paris, 1967. p. 67).
,
Bien entendu, il a pu entendre aussi
Mais

il ne

faut pas traduire par «se nourrissent de chair crue» (Festugiére,


).

7. Dans tout ce développement où l'auteur reconstruit le


passage de la vie bestiale à la vie civilisée, la relation entre le
présent (vûv) et le passé ()
est double. Il y a d'une part une
opposition entre le passé (régime bestial) et le présent (régime
civilisé), mais aussi une utilisation du présent (réaction de
l'homme dans le présent soumis aux mêmes conditions que
l'homme dans le passé; cf. 121, 18 122, 3 sq.
) pour reconstituer le passé. C'est une méthode
analogue à celle de Thucydide dans son Archéologie du livre I
;

voir Notice, p. 44 sq.


Pour les maladies causées par un régime sauvage, comp.
Hérodote VIII, 115, 2-3 (rapprochement fait par P. Demont,
«Hérodote et les pestilences», Revue de Philologie, LXII, 1988,
p. 11 sq.).

P. 122.

1. La médecine hippocratique, et plus généralement la médeci-

ne antique, ne négligent pas le rôle de l'habitude, que ce soit dans


le pronostic ou dans la thérapeutique. La notion d'habitude et la

notion opposée, celle de changement, jouent en particulier un


grand rôle dans le traité du Régime dans les maladies aiguës. On

Habitudes ( ),
sait par ailleurs que Galien a composé un petit traité sur les
où il utilise et cite non seulement
NOTES COMPLÉMENTAIRES 163

Hippocrate mais aussi Érasistrate. Ici, toutefois, l'habitude ne


joue qu'un rôle secondaire et la nature a, pour l'essentiel, les
mêmes réactions dans le présent que dans le passé.
2. On notera dans cette reconstruction du passé la notion
d'eîxoç, de «vraisemblable», comme chez l'historien Thucydide
lorsqu'il reconstruit le passé de l'humanité.
Ce passage offre la première formulation, dans l'histoire des
idées, de la sélection naturelle, bien avant Darwin, comme le
remarque M. Grmek, «La sperimentazione biologica quantita-
tiva ...», p. 16.
3. M vulg. Littré Ermerins est la ledio difficilior par
de
()
rapport à
Reinhold
leçon de A
la

)adoptée par les éditeurs modernes,


Kuehlewein, Jones*, Heiberg, Festugière. C'est la

)
situation de besoin dans laquelle il se trouvait (cf. ]2\, 15-20
— qui explique la naissance de l'art du
régime en santé, comme la nécessité (cf. 121, 2

tance de la notion de besoin ()


explique
la naissance de l'art du régime des gens malades. Pour l'impor-
dans la découverte des arts,
voir Notice, p. 41 sq.
(accentuation régulièrement donnée par les manuscrits

. .,
6.
hippocratiques) ne désigne pas la «pâte» (Littré, Festugière), mais
la «galette» d'orge qui s'oppose au «pain» de blé; comp. Nature

de l'homme, c. 9, Littré VI, 54, 2 sq. (= Jouanna 188, 19)


Entre et
il faut sous-entendre tout le groupe — Aussi
la proposition suivantecommençant par
ne peut-elle concerner les préparations relatives
à la galette d'orge, comme le pensent Littré ou Festugière (dont
la traduction «et au cours de toutes sortes d'expériences sur cette

pâte» est déjà critiquée par Radt, p. 80); mais elle s'applique à
toutes les recherches autres que le pain de blé et la galette d'orge
faites pour élaborer cette nourriture adaptée à la nature humaine ;

ne peut reprendre que de la ligne 7, comme le pense


Reinhold. Le changement de en opéré par Kuehle-
wein et approuvé par Radt (p. 80) n'est probablement pas
nécessaire.
La syntaxe de la phrase après
7. est corrompue dans
A dans M et de nombreuses corrections ont été proposées dont
et
aucune n'est vraiment satisfaisante. J'ai adopté (en rejoignant une
proposition de V Index Hippocraticus voir app. crit.) une solution
;

qui combine la leçon des deux manuscrits (, â )


et qui est
comparable à celle de Zwinger"'» Littré (, ). Par
rapport à la solution de Reinhold (trouvée aussi indépendamment
par Heiberg et adoptée par Festugière et Jones^)
l'avantage de conserver le parallélisme ... '
,.
elle a
Mais
toutes ces solutions ont l'inconvénient de relier par (ou ') deux
propositions subordonnées à dont la construction est
164 ANCIENNE MÉDECINE
différente,
().= Une
,
(p. 518
,l'une,

29)

V. Langholf préfère lire


-\- mode
solution draconienne

[
personnel, l'autre, une infinitive

[
]
une construction très satisfaisante, mais à quel prix
comme
]

avec ellipse de âv (cf.


Kuehner-Gerth, Àusfuhrliche Grammatik ..., I, 2, p. 426 et surtout
celle


de Wilamowitz

!
rétablit

Index Hippocraticus, s.v. II 3 a et I 2). Selon lui, la

mauvaise place de dans A s'explique par l'adjonction supra-


linéaired'un âv (transformé en par hyperionisme) dans la
branche de A. L'explication est possible. Toutefois la particule
est exprimée dans la seconde relative qui est symétrique.

P. 123.

Aucun des deux verbes donnés par les manuscrits (


,
1.

A M) n'a le sens d'eingèrer» ni dans la Collection


hippocratique ni ailleurs. Pour dans la Collection hippocra-
tique, voir Maladies II 2, c. 27, Littré VII, 44, 7 (= Jouanna 162,
6), qui a le sens de «jeter dans» et pour ; voir Épidémies
VII, c. 40, Littré V, 408, 9 et Pronostic, c. 12, Littré II, 140, 9
(= Alexanderson 208, 13) M V avec le C

écrira
crit.).
,
sens technique, dans les deux passages, d'«être en suspension» à
propos de matières dans les urines. Comme on rencontre le verbe

dans le traité (c. 3, 121, 18) au sens d'eingérer», on


ici suivant la proposition de Littré

2. Le vocabulaire de la biologie à l'époque hippocratique prend


son modèle dans le vocabulaire de la force et de la lutte. C'est la
(I, p. 578, app.

loi du plus fort qui régit les rapports entre l'homme et sa


()
()()
nourriture. La nature

force de l'emporter
de l'homme a une certaine force
de même que les aliments. Si la nature de l'homme a la
()
sur les aliments, il y a
nutrition et santé. Si c'est l'inverse, il y a troubles, maladies et
mort. Ce que nous appelons «digestion» était conçu comme une
«domination» de la nourriture par la nature. Voir aussi Notice,
p. 51.
5.
Gomperz
(p. 4 et p. 39
Festugière
(suggérée par la leçon de A
=
n. 28) a adopté la conjecture de
«dans une
certaine mesure». C'est une conjecture douteuse; cf. Index
) :

Hippocraticus, s.v. A III 5.


6. Les féminins ... ne renvoient pas à «l'art»,
comme le pense Festugière qui traduit (p. 4) «dans un art qui ne
comporte pas de profanes». L'auteur apporte précisément un
argument pour justifier que ce n'est pas un «art» à proprement
parler. Ces féminins s'expliquent par référence à (pour ,
NOTES COMPLÉMENTAIRES
au féminin par attraction); ...
savoir l'activité qui consiste à préparer
santé.
= ...
le
, «cela», à
régime des gens en
165

7. Pour le sens de ... ,


voir Pohlenz, p. 399, n. 1 et Radt,
p. 80 sq. La particule causale se justifie par référence à une idée
sous-entendue «(Pourtant c'est un art) car». Le texte n'est pas
:

lacunaire comme certains l'ont supposé à la suite de Fuchs (p. 21,


n. 9).
8. L'auteur désigne ainsi les maîtres de gymnastique qui
entraînent les athlètes. forme un
couple de synonymes avec un effet de parisose et de paromoiose
souvent recherché dans la prose d'art. ne signifie pas dans
la Collection hippocratique les «gymnases» (traduction de Festugié-

re), mais les «exercices gymniques». Le doublet désigne ici plus


particulièrement «les exercices et l'entraînement des athlètes» en
vue des concours. Pour ce sens restreint, comp. l'emploi de
«les athlètes» (catégorie mise sur le même plan que «les
gens en santé» et «les malades»
Régime dans les maladies aiguës, c. 3, Littré H, 244, 5 (= Joly c. 9,
40, 1); cf. aussi la glose d'Érotien A 62
en


) •

de et de ,
(citée déjà dans la Notice, p. 96). Comme sujet
il faut sous-entendre l'athlète, comme l'a

bien vu Coray (p. 127). Les entraîneurs des athlètes attachaient


une grande importance au régime et firent progresser la diététique
comme le reconnaît notre médecin. Les deux noms les plus
célèbres aux v7iv'' siècles sont ceux d'Iccos de Tarente et surtout
d'Hérodicos de Sélymbrie.
9.
synonymes
Comme
( assez souvent dans
M : A) et
le traité,

les
M et A donnent deux
éditeurs modernes, depuis
Kuehlewein, ont préféré la leçon de A. Pourtant le verbe ,
très rarement employé après Homère (cf. LSJ s. .) est sans aucun
doute une lectio difficilior. Comp. l'emploi de donné par
M en face de Littré Joly en Régime, c. 54, Littré
VI, 558, 11 (= Joly CMC 174, 26). Par l'emploi de l'auteur
apporte un raffinement dans l'expression en mettant sur le même
plan deux homéotéleutes de même longueur (2 syllabes).
10. On hésitera entre le superlatif + réfléchi (leçon de M) qui
signifie que l'athlète atteindra le summum de sa force, et le
comparatif + réfléchi (leçon de A) qui signifie que l'athlète se
surpassera et atteindra un degré de force encore inégalé. Selon
Radt, p. 81, le superlatif + réfléchi est une lectio difficilior.

P. 124.

3. Pour la corrélation '... ' «ni...


Denniston, Greek Particles ..., p. 193. Le deuxième terme renchérit
ni même», voir

sur le premier. Les malades se refusent non seulement à supprimer


166 ANCIENNE MÉDECINE

diminuer la quantité.

.
quelque mets que ce soit dans leur régime, mais même à en
est le contraire de
(voir Aphorismes !. 11, Littré IV, 464, 11). Après
, il faut sous-entendre
+ gén., «s'abstenir de» et
"
La différence de

.,
sens entre -|- gén.

«réduire la dose de», évidente dans ce passage, indique que L.S.J.


a tort de donner à -|- gén. le sens de «abstain from».

Le passage des Problemata d'[Aristote] qu'il cite (864 b 36) confirme


du reste que tel n'est pas le sens :

«Pourquoi est-il sain de réduire la quaniiié de nourriture et


d'augmenter la quantité d'exercices? est-ce parce que la quantité
de résidus est cause de la maladie? Or cela a lieu quand il y a excès
de nourriture ou manque d'exercices.»
4. C'est-à-dire ceux qui cherchèrent et trouvèrent le régime des
gens en santé; voir c. 3, 122, 6 sq.
5. Selon l'auteur, les découvertes relatives au régime des

consiste à conserver les aliments solides ( )


malades comprennent trois étapes. La première (cf. 124, 11
)
santé, mais à supprimer certains d'entre eux et à diminuer
du régime en

fortement la quantité du reste. Les deux membres de phrase


— et — ne sont pas synonymes : le

premier indique que l'on «retranche sur la masse des aliments


solides eux-mêmes», c'est-à-dire que l'on supprime un certain
nombre des aliments solides du régime en santé, sans modifier
l'ensemble de ce régime (comp. Régime, c. 68, Littré VI, 604, 16
[= Joly CMG 200, 20] à l'automne,
:

«retranchant sur le régime de l'été» et non «supprimant le régime


de l'été»), tandis que le second membre indique que l'on réduit
fortement la quantité des aliments solides restants. On notera que
ces deux opérations correspondent exactement aux deux opéra-

)
tions qui ne sont pas faites par ceux qui ignorent la médecine (voir

)) ). '
supra, n. 3). Dans la seconde étape (depuis 13 jusqu'à 20
), on supprime tout aliment solide (cf.
on remplace par les potages (
et
La troisième étape

() (
(depuis 20 jusqu'à 125, 4 consiste à supprimer
même les potages et à ne donner que des
boissons bien tempérées. Les deux dernières phases sont
plus complexes que la première. La première est purement
négative, puisqu'il suffit de retrancher qualitativement et quanti-
tativement. Dans la seconde et la troisième, on ne se contente pas
de retrancher, mais on procède, comme dans le cas de la
découverte du régime des gens en santé, à des préparations
(mélange, cuisson) pour diminuer la force du régime et l'adapter à

c. 3, 122, 12
cuisson, comp. 20
;19
et c. 3, 122, 12 .
la force diminuée du malade. Pour le mélange, comp.
et c. 3, 122, 13 :
et
et pour la
NOTES COMPLÉMENTAIRES 167

P. 125.

M Récemment, Dihie rappelé

.
2. : A. (p. 137) a
(cf. déjà Littré I, 582 app. crit.) que une glose
de A était
de mise à la place de la leçon originale voir, par exemple,

.
;

Hésychius •
Il faut donc revenir, malgré

Kuehlewein et Heiberg qui adoptent la leçon de A, à qui


était déjà la leçon de la vulgate. Mais quel en est le sens? Tous les
traducteurs et commentateurs lui donnent le sens de «manifeste-
ment» et le rapportent à La comparaison avec le seul
autre passage où apparaît dans la Collection hippocratique
(conservé toujours par M) invite à lui donner un autre sens et une

,
autre construction. Dans Vents, c. I, Littré VI, 90, 8 (= Jouanna,
103, 4), on lit (M
«en effet la médecine s'oppose à tout cela» {se. les
maladies, etc.). L'adverbe
: Vat)

joue le rôle d'un verbe et a le


sens littéral de «être contre» + datif. Il me paraît que l'emploi est
...
analogue ici
' la relative
:

indique les effets dus aux potages


effets (
suivante où, après la relative
principale
)()
(relatif ionien)
signifie «les sujets à qui les
pas bénéfiques mais sont contraires». Après cette relative vient
régissante dont les verbes sont
temporelle


(125, 12
(auquel se rattache
et

(125, 10

{se.

et la raison de ces
.). Le parallélisme apparaît alors avec la phrase
— 12), la
14) indique chez ces
potages ne sont

). La régissante

la

la

mêmes personnes les effets dus aux aliments solides comparés aux

).
c. 7,
Le terme ,
effets dus aux potages, et la raison de ces effets (8i'

125, 11), a
normal du corps,
employé deux fois dans ce passage (cf. aussi
un sens très précis. Alors que désigne l'état
désigne l'état accidentel dû à la maladie ;

et alors que la d'un même individu ne varie pas, sa

5. Comparer
des adversaires)
Festugière (p. 40 =
.
varie suivant la nature de la maladie qui l'affecte.
et c. 1, 118, 4 (dans la critique
Rapprochement déjà fait par
n. 33) qui note judicieusement «On voit donc
que ce que l'auteur reproche aux novateurs n'est pas de ramener à
:

l'unité les causes des maladies chez les hommes..., mais de s'être
trompé de cause en faisant appel à des postulats extrinsèques à la
médecine». Cet effort pour ramener les maladies à une cause
unique se rencontre ailleurs dans la Colleetion hippocratique voir, ;

par exemple. Vents, c. 2, Littré VI, 92, 18 sq. (= Jouanna 105, 9) :

«Il n'existe pour toutes les maladies qu'une seule et même...


cause»); mais pour l'auteur des Vents cette cause est l'air. Il n'est
pas impossible, comme le suggère finement Kuhn (p. 34), que les
exigences rationnelles de la méthode des médecins théoriciens qu'il
critique ait amené l'auteur de VAncienne médecine, malgré sa
position plus empirique, à en tenir compte dans son système
d'explication.
168 ANCIENNE MÉDECINE
P. 126.

1. Après avoir terminé ce qu'il avait annoncé au début du c. 5,

à savoir la découverte du régime des malades, il compare cette


découverte à celle du régime des gens en santé qu'il avait exposée
auparavant. Il est donc normal que de nombreux termes de ce
chapitre reprennent en écho les termes et les thèmes précédents.
Comparer, par exemple, ici et c. 5, 124, 10 ici ;

, et c. 3,
...
121, 17
et c. 3, 121, 17
; ici
et C. 5,

; ;
123, 18 sqq.

et c. 6,
ici

125,
ici

11

(
etc.
Ce nouvel exemple de deux variantes presque synonymes
2.
M : .\) établit encore une ligne de
partage entre les éditions du au *" •"
siècle qui ont la leçon de
M recc. et les éditions modernes qui, depuis Kuehlewein, ont
adopté la leçon de .\. Il semble pourtant que la leclio difficilior soit
celle de M. Le nom d'action signifie ici littéralement
«l'action ou la manière de se tourner vers (l'entreprise)» (cf. le
)
,
verbe correspondant au moyen d'où «l'approche» (de
la question), «la méthode» (de la recherche). Comp. l'emploi de
au sens de «méthode», chez les Stoïciens et les Épicuriens
signalé par L.S.J. s. . VI. Ce sens technique, que l'on pourrait
juger tardif, est en fait un emploi qui sort naturellement du sens
;

concret; comp. dans le traité l'emploi de


méthode»; cf. Platon, Timée 48c
La supériorité de la leçon de M
«voie de recherche,

()
sur celle de A est ()
).
)
confirmée par la comparaison avec c. 13, 133, 7 sq.
où désigne, de la même façon, la
méthode de recherche.
4. Cette fin de chapitre (—
a donné lieu à de
nombreuses discussions. Elles portent sur deux questions principa-
les :

1. Faut-il écrire avec A, Littré, Festugière,


ou avec M, Ileiberg, Jones^, ou supprimer
devant avec Reinhold, Kuehlewein, Jones', Diller*?
2. Sur la ponctuation faut-il mettre le point d'interro-
:

gation après (Reinhold, Diller, Radt) ou après


(Littré, Kuehlewein, Heiberg, Jones'-^)?
En faveur du texte de A
de Littré, reprise par Festugière, {se.
(ace. de relation)
et de l'interprétation
{se.

litt. «cette recherche-ci est supérieure


) )
.
:

à celle-là relativement à la forme», c'est-à-dire qu'eelle a plus de


faces», on rapprochera (ce qui à ma connaissance n'a pas été fait)
c. 12, 132, 16 sq.
réserve face à la suppression de
' Pour marquer
proposée par Reinhold,
sa
Festugière (p. 40
entre les comparatifs
NOTES COMPLÉMENTAIRES
=
, .
n. 34) a raison de souligner le parallélisme
et
parallélisme est rompu dans la tradition manuscrite par un
Ce
169

;
dans lequel je

34, 16
A). Pour

,
(M); c. 12, 132, 13;
proposerais

(= Jouanna
168, 3)
de voir une faute d'onciale

devant un comparatif, voir c. 6, 125, 16

Cet adverbe ajoute une nuance


c. 16, 139, 20
pour
comp. la faute inverse dans Nature de l'homme, c. 2, Littré VI,
recte Coray Ermerins MV om.

la recherche sur le régime en


:

santé est déjà complexe, mais la médecine l'est encore plus. Pour
...
:

.
,
le sens de comp. en
c. 3, 122, 11 sq. à propos des opérations, déjà nombreuses, faites

.
par ceux qui inventèrent le régime des gens en santé. Ce
.

.
rapprochement renforce le bien-fondé de la conjecture de
Pour comp. c. 9, 128, 10

En ce qui concerne ponctuation, il vaut mieux arrêter


la

l'interrogation après Les deux manuscrits M et A ont


il en est de même des éditions du

,
une ponctuation à cet endroit;
•" siècle (Corn. [Lat.], Foes). On ajoutera avec Radt (p. 83 sq.)
que ponctuée mentionne

,
l'interrogation ainsi les différences
secondaires. Avec — on revient à l'essentiel, à
savoir que l'origine première de la médecine, remonte en
définitive à la découverte du régime des gens en santé comp. ;

c. 2, 119, 12.
5. Cette phrase, qui a embarrassé les éditeurs, s'éclaire par les
deux exemples qui l'illustrent. Le régime des malades n'est pas
dommageable en lui-même. mais, comme l'indique la suite du
développement, il est susceptible de causer des dommages en cas
d'erreurs qui le rapprochent du régime des gens en bonne santé.
Toutefois ces dommages ne sont pas plus grands que les dommages
causés à l'homme en bonne santé par un régime qui se rapproche

(
grand (où ),
de celui des animaux. A conditions égales, les deux genres de
dommages sont équivalents le premier dommage n'est pas plus

).
:

le second dommage n'est pas moins grand

L'objet de cette comparaison est donc de montrer


que la découverte du régime en santé n'est pas moins importante
que celle du régime des malades, et que la méthode de l'une est le
prolongement de la méthode de l'autre.
La leçon de A (app. crit.) est une corruption de par
iotacisme. comme l'a déjà vu Littré (I, 586, app. crit. ad loc).
L'archétype de AM ne semble pas avoir de après -p- (comp. A
et M"• ). Si l'on en juge par l'histoire du texte, le
nominatif est préférable à l'accusatif
par tous les éditeurs.
,
leçon de M* adoptée
170 ANCIENNE MÉDECINE
P. 127.

2. Dûbner, Gomperz Zwingern•?. Les éditions modernes


:

depuis Kuehiewein (voir déjà Coray, p. 130) adoptent qui est

.
une variante des éditions de la Renaissance (Zwingerf"»; cf. aussi
Cod. Servini apud Foes). Il faut sans aucun doute un relatif
pour introduire le verbe à un mode personnel Mais il se
trouve déjà dans A, à condition d'y voir l'adverbe relatif de
manière ^ (litt. souffrant d'une maladie «d'une manière telle

.
:

que»).
Le participe
3. a une valeur hypothétique = ;

comparer dans le premier terme de la comparaison

4. Pour les maux causés par un régime à base d'ers (= Ervum


ervilia L), comp. Épidémies c. 3, Littré V, 126, 5
II, sect. 4,
(= Épidémies
Roselli 92, 1 sq.)
de l'ers () VI, sect. 4,
:
V, 310, 4 sq.
c. Manetti-
11, Littré
lors d'une famine à Ainos, «ceux qui mangèrent
eurent mal aux genoux»; voir aussi
M. Grmek, Les maladies à l'aube de la civilisation occidentale, Paris,
=

.
1983, p. 324-326.

(
5. Les gloses d'Érotien et d'Hésychius (cf. Test.) prou-
vent que M a conservé la leçon originale, qui, en revanche, a été
remplacée dans la branche de A par la glose
6. .Alors que les éditions depuis Littré ont adopté la leçon de A
«cet art»), j'ai choisi la leçon de M
: «l'art proprement (
.
:

dit») cette leçon fait implicitement référence à l'autre activité qui


;

mériterait le titre d'art mais ne l'a pas (cf. 123, 9 sq.), c'est-à-dire
la préparation du régime en santé. Les deux activités obéissent à

la même méthode ( ).
P. 128.

p.
2. Le superlatif
85 sq.) a été préféré au comparatif
() ()
de M Littré Ermerins (cf. Radt,
de A Reinhold
Kuehiewein Jones^ Heiberg Jones^ Festugière. Si tout ce qui est
fort est et tout ce qui est faible bénéfique, c'est
nuisible
immédiatement régime le plus faible qu'il faudrait prescrire au
le

malade, c'est-à-dire le régime des boissons (voir c. 5 fin).


3. L'expression dans \ préserve une croyance archaïque selon
laquelle la faim est une force ennemie, extérieure à l'homme, qui
peut pénétrer en lui pour l'affaiblir ou même causer sa mort voir ;

J. Jouanna, «Médecine et protection. Essai sur une archéologie


philologique des formes de pensée» in F. Lasserre et Ph. Mudry,
Formes de pensée dans la Collection fiippocratique, Genève, 1983,

II,
Pour
362, 2
, (=
comp. Régime dans
Joly, c. 63, 64, 16)
les maladies aiguës, c.

et
17, Littré
Maladies
NOTES COMPLÉMENTAIRES 171

.
des femmes , c. 75, Littré VIII, 168, 1
La leçon de A
(se.

a curieusement été négligée par les


)
éditeurs modernes (depuis Kuehlewein jusqu'à Festugière). Pour-
tant Ermerins, que l'on ne peut soupçonner de donner systémati-
quement la préférence à A, l'adopte et est suivi par Littré dans ses

,
Addenda et Corrigenda au tome I (tome II, p. l). Le moyen semble
être un hapax, mais il est morphologiquement satisfaisant. La
variante de M est une lectio facilior. Pour la construction de

,.
Homère,
après
VI, 276, 18 sq.
Iliade
comparer Lieux dans l'homme, c. 1, Littré
(= Joiy

et
XXIII,
39, 2)
131
:

.
sont des infinitifs consécutifs dépen-
Les
; cf. aussi
infinitifs

dant de
Le verbe n'est pas «un mot poétique» (Festugière 41,
n. 40). Il est bien attesté dans la prose technique de la Collection
hippocratique (huit fois) cf. ; aussi (deux fois). La
corruption de en de M bien vue par Coray
a été

(p. 132), qui ne connaissait pas la leçon de A. Même corruption des

manuscrits en Épidémies VII, cil, Littré, V, 382, 15, où il faut


lire

connue de
faut
avec Coray

lire

codd. Littré)
4.
:
oi
Littré), et en

Épidémies IV

«fièvre, anorexie, le
M a conservé dans le terme
Le manuscrit
à la place de

(
c.

malade
(omis par A et
(correction
31, Littré V, 174, 19 où
Ermerins :

fut pris de faiblesse».


il

par les modernes) une forme rare qui a été mal


éditeurs
comprise. Ce n'est pas l'adverbe de temps
neutre adverbial de l'adjectif indéfini
mais le pluriel
«quelque» qui renforce
,
la négation. L'expression signifie littéralement
«mais en rien moins»; comp. l'indéfini neutre dont l'emploi pour
renforcer la négation est bien connu on pourrait avoir de manière
;

.
analogue

et
vel
Ce pluriel neutre
dans les composés par agglutination
(<' ).
renforce la négation
(<'
Ces formes issues du pluriel neutre sont
)
cinq fois et cinq fois ),
propres à l'ionien. Très fréquentes chez Hérodote (environ vingt-
elles sont plus rares dans la
Collection hippocratique où parfois elles sont masquées par une
faute d'accentuation et une confusion avec l'adverbe «en
même temps». Ainsi en Maladies des femmes II, c. 133, Littré

leçon de
adoptée par Littré
'
VIII, 284, 14, il faut lire soit

.'
face à la leçon de MV
soit

Pour les emplois de


à partir de la
et à la vulgate,

dans la Collection hippocratique, voir Index Ilippocraticus


III, s.v. Il est intéressant de noter que
et de

jouit encore ici d'une


certaine autonomie par rapport à la négation, à laquelle il n'est
pas agglutiné. C'est là une survivance.
autonomie des formes adverbiales de
La
,
disparition de cette
qui devaient être en
régression dans la langue, a été accélérée au cours de la
172 ANCIENNE MÉDECINE
transmission des textes. On en a la preuve dans la Collection
hippocratique elle-même, grâce au témoignage de Galien qui cite
dans son Glossaire hippocratique (éd. Kùhn XIX, 77, 14) la forme
(lege vel avec psilose ionienne), glosée par
«d'une certaine façon», qui a disparu de nos manuscrits
médiévaux. Dans le cas du pluriel neutre ,
la confusion avec
l'adverbe

'
a dû contribuer à sa disparition. L'ambiguïté

Régime, c. 3, Littré VI, 474. 5


MV), faut-il lire
hippocralicus, ou bien * ,
demeure dans certains passages de la Collection. Par exemple en
=
Joly CMC 126, 17
avec Fredrich et Vïndex
avec M Littré et Joly ?
( :

5. Il paraît peu probable que {\ om. M) soit :

une remarque marginale insérée dans le texte, comme le pense


Dihle (p. 140); la recherche des homéotéleutes de sens opposé est
parfaitement à sa place dans un discours médical. Du reste cette
antithèse est familière à la prose technique médicale voir, par ;

exemple, Aphorismes VI, c. 39, Littré IV, 572, 8 «les convulsions

-
:

).
proviennent soit de la plénitude, soit de la vacuité» (

. 6. Comparer
Pohlenz, .
c. 7,

la leçon correcte, parce que


126, 15 sq.
402, pense qu'ici de M {se. -Îkyyri) est
de A ne peut renvoyer
qu'aux de la phrase précédente, ce qui aboutirait à un non-
sens. Kùhn (p. 12, n. 1) a justement objecté que peut
difficilement être sous-entendu, car le mot ne se trouve pas dans le
voisinage. La comparaison avec l'expression analogue du c. 7, qui

renvoie pas à .
est déjà au neutre (singulier) conforte plutôt la leçon de .\ qui ne
Dans les deux cas, on insiste sur la complexité
de la tâche du médecin. La substitution de à

,
lance un nouveau thème, celui de l'exactitude. Les références à
l'exactitude se multiplient dans ce chapitre et au c. 12. Sur
voir D. Kurz, Das Idéal der Exaklheil bei den Griechen bis
.Aristoteles,
médecins).
Gôppingen. 1970 (p. 62-87 pour chez les

7. Pour un emploi comparable de dans la Collection


hippocratique, voir Fœtus de huit mois. c. 9, Littré VII, 448, 13 sq.
(= c. 1 Grensemann 80. 5 sq.)
« le médecin qui veut viser correctement

lesalut des malades». Le verbe ne signifie rien d'autre que «viser»


un but recherché, «s'efforcer de l'atteindre», quel que soit ce but
(avec la

).
métaphore de l'archer

l'opposition faite par Platon dans


cf. Platon, Lois IV 705 e
:

L'emploi ne présuppose pas encore


le Gorgias entre une méthode

selon l'art et une


le (cf. 463

faite par ce
exactes qui
a

même
, ),
méthode «stochastique», c'est-à-dire conjectura-
6 sq. Socrate à propos de la rhétorique de son temps

Platon dans le Philèbe (55 e) entre


utilisent mesure, nombre et poids, et
ni la distinction
les
les
NOTES COMPLÉMENTAIRES 173

empiriques qui une méthode «stochastique», c'est-à-dire


ont
conjecturale, telles que musique, art du pilotage et médecine. À
de V Ancienne médecine, on opposera où
du Philèbe (56 a). On évitera donc de
parler de «médecine stochastique» (die stochastiche Medizin) ou de
«médecin stochastique» (der stochastische Arzt) à propos de
V Ancienne médecine comme le fait H. G. Ingenkamp « Das
des Arztes (K.M. 9)» in F. Lasserre et Ph. Mudry,
Formes de pensée dans la Collection Hippocratique ..., p. 257-262
(notamment p. 258 et 259).
8. C'est probablement la phrase du traité qui a donné lieu aux
commentaires les plus longs et aux discussions les plus nombreu-
ses, non seulement sur l'établissement du texte, mais aussi sur son
sens. Les éditeurs récents écrivent ... avec Kuehiewein

,
au lieu de ...
F. Heinimann («Mass
cum,
\ et de oùSè...

Gewicht
M recc. vett. edd. Mais

Zahl», Muséum Ilelveli-
1975, p. 192, n. 44) revient au texte de M tandis
que Dihie (p. 139), suivi par K. von Fritz (p. 175), défend la
leçon de A qui est vraisemblablement la leclio difficilior (cf.
J. D. Denniston, The Greek Parlicles ..., p. 510). Les trois termes
— — (ordre de A) ou — —
(ordre de M) ne sont pas exactement sur le même plan,
bien qu'ils soient tous trois compléments de âv (cf. Radt,

p. 86 sq.). À qui reprend le de la phrase précédente


vient s'ajouter le couple — «or une mesure, pas
plus du reste qu'un nombre ni qu'un poids...» (... «et
ne pas même... ni»). Ils ne forment pas exactement une triade,
même si l'adjonction de et d'pv s'explique vraisem-
blablement par l'existence d'une telle triade dès le v•" siècle pour

mède, DK 82 R lia (30)

Phéniciennes,
exemples de la
541 sq.
«mesure
triade nombre— —
;.
réunir tous les moyens de quantifier; cf. Gorgias, Éloge de Pala-

, ...
Sophocle, Frag. 399, 2 Nauck (= 432, 2 Radt), également à propos
de Palamède
. ... ... p]uripide,
Pour les
poids» au iv*' siècle
chez Platon et Xénophon, voir Festugière (p. 41-43 = n. 41), avec
;

le complément de F. Heinimann, «Mass —


Gewicht Zahl»..., —
p. 193, n. 48.
Pour l'ordre des trois termes, Heinimann (ibid., p. 192, n. 44)
défend le texte de M contre celui de A parce qu'il est en accord
avec l'ordre suivi chez Gorgias, Sophocle et Euripide, où le terme
«se trouve après suivant la loi des nombres
croissants». L'argument n'est guère contraignant, car l'ordre des
trois termes varie même dans les trois autres témoignages du
v*" siècle cités ci-dessus.
La suppression de proposée par DihIe,
Gomperz, p. 234) est inutile. Comp., avec Radt (p.
Anabase I, 5, 5 où .p.
87),
140 (cf.

Xénophon,
déjà
174

la
est-elle la sensation
ANCIENNE MÉDECINE

'
Concernant le sens, les interprètes se divisent sur ce qu'est
mesure en médecine selon l'auteur,
du médecin face au corps du malade, ou la
sensation (ou sensibilité) du malade face au régime qu'il ingère?
Le problème a été très clairement posé par P. Lain-Entralgo,

)»,
«Quaestiones hippocraticae disputatae très (I. TOT
in L. Bourgey et J. Jouanna, La Collection hippocra-
lique et son rôle dans histoire de la médecine, Leiden, 1975,
p. 305-310. La seconde solution a été adoptée par la très grande
majorité des philologues voir surtout W. Mûri, «

-
;

Kap. 9», Hermès, LXXI, 1936, p. 467-469 (qui critique


à juste titre la conjecture de à la place de proposée
par K. Deichgràber, «Zu Hippokrates
9», Hermès, LXVIII, 1933, p. 356-358); cf. aussi J. Pigeaud,
«Qu'est-ce qu'être malade? Quelques réflexions sur le sens de la
maladie dans Ancienne médecine»..., p. 213-218. La première
solution est choisie plutôt par les médecins et les historiens des
sciences; voir notamment P. Lain-Entralgo, «Quaestiones...»,
p. 305-310, suivi par G. Bratescu, «Le problème de la mesure...»,
p. 139. Certains historiens des sciences se rallient maintenant au
point de vue des philologues; voir M. Grmek, «La sperimen-
tazione...», p. 20. Pour justifier la première solution (perception
de la part du médecin du corps du malade), on fait appel au
témoignage d'autres traités hippocratiques cf. en particulier
;

rechercher «ce que l'on peut percevoir ()


Officine du médecin, c. 1, Littré III, 272, 3-5 :le médecin doit

en regardant, en
touchant, en écoutant, en flairant, en goûtant et en appliquant
l'intelligence»; cf. aussi Épidémies IV, c. 43, Littré V, 184, 7 sq.
En revanche, la seconde interprétation (sensation ou sensibilité du

,.
corps du malade) s'appuie sur des témoignages internes au traité.
Comparer, à la suite de Mûri, c. 15, 138, 14 S
J'ajouterai qu'un rapprochement s'impose avec les
c. 1 et 2 où le thème du critère a déjà été abordé
10 sq.
comp. c. 1 119,
;

et ici
,

:si la cosmologie n'a pas le du vrai,


critère
la médecine, elle, a pour critère l'accord du discours du médecin
sur les avec ce que ressent effectivement le malade,
même si le savoir causal du médecin ne doit pas être confondu
avec son critère, du malade.

les deux penseurs. Car si


),
Bien que la formulation rappelle ici Protagoras (DK 80
la distance est grande entre

du malade est, chez Protagoras,


1

le critère de la réalité pour le malade, elle est, chez l'auteur de

VAncienne médecine, le critère de la réalité pour le médecin.


Le témoignage extérieur le plus proche de notre passage est un

Young, Théognis, p. 89)


/

:

', ,
précepte du Carmen aureum, v. 33 sq. attribué à Pythagore (éd.

« II faut avoir une


NOTES COMPLÉMENTAIRES 175

mesure pour la boisson et les exercices. Par mesure,


nourriture, la

j'entends ce qui ne te causera pas de trouble» (rapprochement fait


par Coray, p. 135).
9. L'auteur du traité du Régime a également conscience de la
difficulté d'arriver en médecine à une exacte mesure sans excès ni
défaut; pour lui, c'est même impossible voir c. 2, Littré VL 470,

(
:

14-18 (= Joly CMC 124, 18 sq.) avec des expressions comparables


à notre traité

10.
).
Toute cette fin de chapitre est occupée par une très
brillantecomparaison entre le mauvais médecin et le mauvais
pilote de navire, où les deux termes de la comparaison se
correspondent avec une rigueur remarquable. Elle annonce les
nombreuses comparaisons entre le médecin et le pilote de navire
chez Platon (Festugière, p. 44 = n. 42). Mais ici l'art du pilote sert
de modèle de référence pour éclairer l'art de la médecine, alors que
chez Platon, l'art de la médecine sert de modèle de référence,
comme l'art du pilote, pour éclairer d'autres (politique,
rhétorique).

P. 129.

1. Le terme technique rare qualifie les vents «qui


déroutent» (-) les navires et les «poussent» (cf. contre les)
s.v.

p. 92 sq.
2. La leçon de M Littré
et de ;
écueils; voir Hérodote II, 113, I, Eschine, Ep., I, 3 et comp. LSJ
IL Ce terme a été omis dans la branche de M, ce qui a
rendu possible l'interversion de voir Notice,

est une ledio difficilior par


rapport à de A, Reinhold, Kuehlewein, Gomperz, Heiberg,
Jones'"^, Festugière. Pour la liaison qui est rare dans la

circumferuntur, Gottingae, 1870, p. 28 (recensement incomplet et


Pour
inexact). ...
Démosthène VIII (Sur les affaires de
...
3.
.
la
,
Colieciion, mais bien attestée, voir H. Kuehlewein, Observaiiones
de usu pariicularum in libris qui vulgo Hippocratis nomine

Chersonèse), 39-43

Par discrétion, l'auteur ne précise pas ce qu'est le châtiment


comparer

pour le mauvais médecin c'est la mort du malade (comme pour le


:

pilote la perte du navire et la mort des passagers) avec toutes les


conséquences néfastes qui en résultent pour la réputation et la
carrière du médecin.
4. La leçon de A («d'entre nous»), face à celle de M («d'entre
eux»), n'a été adoptée par aucun éditeur, malgré la préférence
assez systématique des modernes depuis Kuehlewein pour les
leçons de A. Elle mérite toutefois considération, si l'on compare
avec c. 18, 142, 9 qui est donné par M et toutes les
éditions. La variante de A donnerait plus de vivacité au discours :

l'auteur fait participer son public. Pour la valeur de la première


personne du pluriel dans le traité, voir Notice, p. 15.
176 ANCIENNE MÉDECINE
P. 130.

() 1. Depuis la fin du xix*" siècle, le texte des manuscrits

a été corrigé par les éditeurs et les critiques. La


conjecture de Reinhold

,
éditeurs modernes (Kuehlewein, Heiberg, Jones, Festugière).

8è Coray
Blass
;

;
,
D'autres critiques ont proposé d'autres corrections
* Gomperz
Wilamowitz,
;
-
oî a été reprise par les

<>
suivi par Radt
(p. 88). Pourtant le texte des manuscrits est très cohérent à partir
du moment où on réalise que le pronom de rappel (130, 1),
qui est opposé à (130, 1), ne renvoie pas seulement
à la catégorie de ceux pour qui il est bénéfique de prendre deux
repas, mais aussi à la catégorie de ceux pour qui il est bénéfique de
prendre un seul repas. Ces deux catégories forment le groupe des
personnes qui ont adopté leur régime pour des raisons impérieuses,
parce qu'il leur est bénéfique (la leçon de M est, de ce
point de vue, préférable à la leçon de A edd. ,car les deux
catégories ne sont pas opposées, mais sur le même plan). À ce
premier groupe s'oppose le groupe des personnes pour qui le
régime adopté n'est pas bénéfique en lui-même ( );
de fait, ce sont des personnes qui l'ont adopté non par intérêt et
par nécessité, mais par plaisir, ou pour toute autre raison
accidentelle. Ces deux groupes sont repris en chiasme dans la
phrase suivante : (130, 3) reprend
(= 2'' groupe), tandis que oî (130, 5 sq.) reprend

(= 1" groupe). L'idée essentielle qui définit le premier groupe est

et 130, 6 ).
toujours le caractère bénéfique du régime (comparer 130, 1

premier groupe sont ensuite développées par


des personnes prenant un seul repas), et par
...
Les deux catégories formant le
(catégorie
(catégorie des
personnes prenant deux repas).
Dans l'expression (130, 1), la présence de (à la
place du attendu) n'est pas une raison suffisante pour modifier
le texte comp. Sophocle, Philocièle, v. 91
; (au lieu de
) ;cf. Hérodote III, 127, 2 (au lieu de ), et voir
Kuhner-Gerth, Ausfùhrliche Grammatik ..., II 2, p. 187.
2. C'est la catégorie des gens qui ont intérêt à ne prendre qu'un
repas par jour, le repas du soir. Pour les troubles dus au
changement de leur régime, comparer Régime dans les maladies
aiguës, c. 9, Littré II, 282, 10-284, 6 (= Joly, c. 28, 48, 7-13), et
voir Notice, p. 64 sqq. Même lorsque ces gens, après le changement
(repas du midi), reviennent à leur régime (repas du soir), les
troubles continuent et s'aggravent. Cet exemple est destiné à
illustrer les troubles causés par une pléthore intempestive chez les
gens en santé (cf. début du c. 10).
3. Si les symptômes d'une digestion difficile sont acceptables
NOTES COMPLÉMENTAIRES 177

après la prise d'un déjeuner supplémentaire, il n'en est pas de


même du symptôme de diarrhée après la prise du dîner. Comme
me le signale Mirko Grmek, le médecin généralise abusivement
un ou plusieurs cas d'infections alimentaires, la diarrhée étant
fréquente dans les pays chauds.
6. C'est la catégorie des gens qui ont intérêt à prendre deux
repas. Pour les troubles dus au changement de leur régime,
comparer Régime dans les maladies aiguës, c. 9, Littré II, 288, 3-
290, 4 (= Joly c. 30, 49, 1-10) et App. c. 18, Littré II, 480, 11 -
482, 5 (= Joly c. 49, 88, 21 -89, 1). et voir Notice, p. 64 sqq.. Cet
exemple illustre les troubles causés chez les gens en santé par une
vacuité intempestive, et veut prouver qu'ils ne sont pas moins
grands que ceux qui résultaient d'une pléthore (cf. début du c. 10).
Il n'est pas nécessaire (malgré Radt p. 88) de changer

).
l'accusatif absolu en génitif absolu pour

)
rétablir un parallélisme exact avec l'exemple précédent (130, 10
L'auteur recherche, d'un exemple à l'autre, la variété
dans la symétrie. Comparer, dans les subordonnées, le passage du
pluriel au singulier (130, 10 et 130, 18 et,
dans les principales énumérant les symptômes, le passage du style
lié à l'asyndète.

P. 131.

1. est un terme technique qui signifie «évanouisse-


ment». La traduction par «perte de souffle» (cf. Festugière «le :

souffle lui manque») est insuffisante. Il s'agit de l'état où l'on perd

.
conscience; voir les explications d'Érotien et de Galien dans leurs
Glossaires
Galien (éd.
: Érotien (éd.
Kùhn XIX,

deux symptômes concernant


Nachmanson
87, 13)
19, 1)

2. Les divergences sont assez importantes entre A et


les yeux et l'urine (texte de A
creux, urine plus jaune et plus chaude»; texte de M
sur ces
«yeux
«yeux plus

:
M
:
et

jaunes, urine épaisse et chaude»). La leçon de A est confirmée par


la tradition parallèle du Régime dans les maladies aiguës voir :

Notice, p. 103 sq. L'observation médicale confirme, du reste, le


texte de A, comme me le signale M. Grmek.
M renvoient à un modèle

«
5. (cf. A) et
en onciale qui était soit soit 066.Depuis
l'édition Littré on a préféré la leçon de A à celle de M. La seule
justification avancée est celle de Littré (I, p. 594) m'a :

paru, médicalement parlant, plus d'accord que avec les


causes et la nature du malaise que décrit ici Hippocrate». La
confirmation de la justesse de ce choix est donnée 'par le passage
parallèle du Régime dans les maladies aiguës, c. 9, Littré II, 288,
6 sq. (= Joly c. 30, 49, 5) donné par A et M,
178 ANCIENNE MÉDECINE
lu et
p. 184,
commenté par Galien

VII, 242, 1 sq.


ventre dans le cas de pléthore (cf.
.)
(voir éd. G. Helmreich, CMG V 9, 1,
22 sq.); voir Notice, p. 103. Pour le ventre «brûlé»,
comparer aussi Épidémies I, c. 13, Littré II, 692, 2 (= Kuehle-
wein I, 205, 22) Affedions internes, c. 28, Littré

l'excès de chaleur dans le cas de vacuité.


6.
;

A l'excès d'humidité du

A Kuehlewein Jones Heiberg


s'oppose

Littré. Le verbe est un hapax dans la Collection hippocratique, ce


M:

qui rend difficile le choix entre les deux variantes. Le verbe est
attesté chez Aristote au moyen {Hist. animaux 587 b 10) comme à

préférer la leçon
.,
l'actif {Hist. animaux 537 b 13). La recherche stylistique des
couples homéotéleutes, constante chez l'auteur (cf. dans cette
même phrase
de A qui offre le

Le rêve, pour les Grecs, est avant tout une vision. Les
couple
) fera
d'homéotéleutes

accusatifs d'objet interne et qualifient les


visions du rêve (que le dormeur joue ou non un rôle actif dans la
vision). On
pourra comparer des effets analogues dans un cas de
c. 71, Littré VI, 610, 9 sq. (= Joly CMG 204,
pléthore en Régime,

()
()
4 sq) «Les sommeils ne sont plus agréables; au contraire, il est
:

fatal que le patient s'agite et s'imagine combattre».


Pour un exemple de vision «agitée» où le dormeur ne participe
pas, voir Régime, c. 90, Littré VI, 656, 2 sq. (= Joly CMG 226,
18) : «la vision de la mer agitée annonce
une maladie du ventre». Ces exemples tirés du Régime semblent
indiquer que désignent des spectacles
vus en rêve où tout est agité et tumultueux plutôt que des visions

-
«embrouillées et sans queue ni tête», sens proposé par D. op de
Hipt, Adjektive auf
19'72, p. 76

),
).
(cf. )
im Corpus Hippocralicum, Hamburg,
«trâumen verworrenes und 'wirres Zeug».
:

7. La digestion est conçue ici à la fois comme une domination


une cuisson (cf. et une fermentation (cf.
Le ventre doit se «rendre maître» des aliments et les
«cuire»; il ressemble à une marmite qui bout. De nouveaux
aliments rajoutés, alors que le ventre est en train de bouillonner,
ralentissent la cuisson, de même que de l'eau froide ajoutée dans

.,
de l'eau bouillonnante diminue ou interrompt le bouillonnement.
Encore pour Aristote, la digestion est une cuisson {Météorologi-
ques IV, 3, 381 b 7).
Pour le couple comparer Platon,
Timée 66 b Pour l'idée que des troubles
résultent d'une ingestion de nourriture nouvelle sur une nourriture

pléthore se forme
,
qui n'est pas encore digérée, comp. Aegimios d'Élée {Anonyme de
Londres XIII, 44 éd. Diels, p. 20) :

quand une nouvelle nourriture


,
est ingérée
«la
avant
NOTES COMPLÉMENTAIRES 179

que la première ne trouve la coction». L'expression ai


ne doit être traduite ni par «de tels estomacs» (Littré), ni
par «l'intestin en cet état» (Festugière). L'auteur hippocratique,
comme c'est régulièrement le cas dans la Colleciion, se représente
la comme une «cavité» et ne connaît pas le rôle de l'estomac
ou de l'intestin dans la digestion. Par ailleurs, «de tels ventres» ne
signifie pas «des ventres qui sont en cet état» (Festugière), c'est-à-
dire en état de bouillonnement, mais «les ventres de telles
personnes», c'est-à-dire des personnes qui, par nécessité, ne
prennent qu'un seul repas par jour. C'est justement parce que leur
ventre est lent à digérer qu'elles sont obligées de s'en tenir à ce
type de régime.

P. 132.

.) ,
\. Il une légère anacoluthe on attendrait
y a :

... comme on avait ...


{se. .
Le nominatif est sujet d'un sous-
entendu cf. quelques lignes plus bas
;

II me paraît moins satisfaisant de ponctuer et de


construire comme les éditions modernes depuis Littré qui mettent
une virgule après écrivent 5
(avec A'^""), font de
le sujet de et traduisent «celui qui a
:

l'habitude de prendre aussi un déjeuner, parce qu'il ... n'a pas eu


aussitôt l'apport d'une nouvelle nourriture... dépérit alors ()...
sous l'effet de la faim». Avec une telle construction, le parallélisme
entre les deux tableaux est considérablement rompu. Bien qu'il ait
reproduit le texte de Heiberg, Festugière opte visiblement pour la
construction adoptée ici «chez celui qui a l'habitude de déjeuner,
:

c'est parce qu'il n'a pas reçu un nouvel appoint de nourriture... :

.
dès lors il dépérit». Se (M uel A) commence une nouvelle
phrase comme dans le développement parallèle qui précède ai Se
La divergence entre ces deux manières de
construire existait déjà au xvi" siècle, bien avant la connaissance

supprimée par Zwinger'"» ,


à c. 10, 129, 16 sq.

un régime avec un ou deux repas (comp.


c. 10, 130, 3 sq.
(
) ).
de A. L'anacoluthe a été conservée par Cornarius (Lat.),

4. On est toujours dans le développement sur les gens en santé


(comp. et l'on
revient à la catégorie des gens pour qui il est indifférent de suivre

). Même pour
à

ces gens-là, les troubles dus à la vacuité se font sentir, mais après
une vacuité plus longue. L'auteur ne perd pas de vue qu'il veut
montrer que la vacuité cause des troubles tout comme la pléthore ;

mais il y a des degrés dans ces troubles qui tiennent à la plus ou


moins grande résistance des constitutions.
180 ANCIENNE MÉDECINE
5.
A. Pour
3 sq.
6.

de
+
M est
gén.,
. une haplographie de
on comparera, avec Radt
conservé par
(p. 90), c. 1,

renvoie à ce qui formait l'essentiel du dévelop-


pement précédent c'est-à-dire aux constitutions des gens qui ne
119,

peuvent pas s'écarter sans dommage, fût-ce pendant une demi-

)
journée, de leur régime habituel (que ce soit un seul ou deux
repas). La phrase qui précède immédiatement
n'était qu'une parenthèse.
( 8 —
7. L'auteur a un sens aigu de la continuité et de la gradation.
Il n'y a pas différence de nature, mais simplement de degré,
entre le normal et le pathologique, et il y a des différences à
l'intérieur du normal, comme il y en a, du reste, à l'intérieur du
pathologique (cf. c. 5). Ce principe de la continuité entre le normal
et le pathologique réapparaîtra au début du xix" siècle avec
Auguste Comte sous le nom de «principe de Broussais»; voir
G. Canguilhem, Le normal et le pathologique, "" éd., Paris, 1984,
p. 18 sqq.
Il est notable que dans un même traité de médecine grecque

puissent coexister deux conceptions qui apparaissent comme deux


modèles d'explication de la maladie distincts à un historien des
sciences : d'une part cette conception de la maladie comme
variation quantitative par rapport au normal (hyper- ou hypo-), et
d'autre part la conception dynamique de la maladie due à un
déséquilibre (dys-) impliquant une hétérogénéité des états normal
et pathologique (cf. c. 14); sur ces deux modèles d'explication,
voir G. Canguilhem, Le normal..., p. 12-14.
Sur le sens de «juste mesure», voir J. R. Wilson,
« KAIROS as Due Measure», Glotta, LVIII, 1980, p. 177-204 (pour

la Collection hippocratique, p. 202 sq.) qui ne mentionne pas


toutefois notre passage voir la thèse à paraître chez Klincksieck
;

de M. Trédé, Kairos : l'à-propos et l'occasion. Le mot et la notion


d'Homère à la fin du /v* siècle avant J.-C.
8. Après l'exposé des exemples destinés à démontrer l'idée

médecine (127, 15 ),
énoncée au c. 9, à savoir que les choses ne sont pas simples en
mais que l'activité du médecin est
complexe et requiert une grande exactitude (128, 9 sq.
),
l'auteur revient à cette
idée pour souligner non seulement les difficultés inhérentes à l'art,

,
mais aussi les progrès déjà réalisés. Ce passage très important est
transmis de manière fort différente dans la tradition indirecte
d'Érotien, qui offre une négation là où les manuscrits hippocrati-
ques n'en ont pas
«il est difficile, puisque l'art ne

possède pas une telle exactitude, d'atteindre le plus haut degré de


précision». La négation a été acceptée par Littré (et par Coray,
p. 140); elle n'a pas été reprise par les autres éditeurs modernes.
NOTES COMPLÉMENTAIRES 181

Toutefois, récemment, Radt


(p. 90 sq.) a présenté un vigoureux
plaidoyer en faveur de la négation («Es ist mir unbegreiflich, wie

man hier ohne das bei Erotian ùberlieferte auskommen kann»).


Mais Ermerins ad loc. note justement que cette négation est peu en
accord avec qui suit. Si l'art ne peut atteindre
un tel degré d'exactitude, comment est-il possible que des parties
de cet art aient déjà atteint un aussi haut degré d'exactitude? Par

une plus grande exactitude ).


ailleurs, au c. 9, 128, 10, il était dit que la tâche du médecin exige
( Il faut ajouter

que la citation d'Érotien n'est pas très sûre, car elle omet (ce
que ne fait pas Littré), mot dont la présence est très satisfaisante.
Ce qui est difficile pour la médecine, ce n'est pas d'atteindre le
plus grand degré de précision, c'est de l'atteindre toujours
). Un
(comparer c. 9, 128, 16 sq.

s'écarter, ni en deçà, ni au-delà (cf. du,


tel degré d'exactitude, c'est-à-dire celui qui consiste à ne pas
),
«point décisif» visé, de la «juste mesure» (cf. Hésiode, Travaux,
V. 694), n'est pas un idéal inaccessible à la médecine. Au contraire,
du

bien des aspects ()de la médecine l'ont atteint. Sans doute,

( ),
l'art n'a pas encore atteint l'exactitude dans tous les domaines

).
mais il ne faut pas oublier que des découvertes restent
à faire (cf. c. 2, 119, 14 sq.

P. 133.

. M Littré où A om. edd. ab Kuehlewein. Les éditeurs


:

modernes depuis Kuehlewein (et déjà auparavant Ermerins)


suppriment l'une et l'autre des variantes. Si la négation de A est

v. 1218
pas intolérable
..
impossible (voir la longue argumentation de Littré I, p. 596-597),

:
,
il n'en est pas de même de la leçon de M, qui modifie évidemment

et non A ...comp. Sophocle, Philodète,


La redondance ...
ne paraît
elle renforce l'idée de proximité («s'approcher
tout prés»). Toutefois, elle n'est pas attestée ailleurs. On ne peut
donc écarter l'hypothèse (déjà formulée par Coray, p. 141) que la
présence de deux synonymes et provienne de l'insertion

qui a glosé
ou bien
Philodète, .
' •

1218, où la variante
,
d'une glose dans le texte. Mais même dans cette hypothèse, c'est

.
et non l'inverse voir Ilésychius
;

Et comparer Sophocle,
a remplacé
certains manuscrits. De toute manière, la leçon
dans
de M doit être
conservée.
2. Avec cette phrase de conclusion se termine toute la première
partie sur l'apologie de «
ancienne médecine». Il est naturel que
tous les grands thèmes lancés dans le prologue ou abordés dans
cette partie s'y retrouvent existence de l'art et négation du
:

hasard méthode de recherche correcte et admiration devant les


;
182 ANCIENNE MÉDECINE
un mot apparaît
découvertes et progrès. Toutefois,
). pour

)
le ici la

première fois : (cf. déjà en c. 5, 124, 10 Si la


sensation du corps du malade 128, 13

.
(c. 9,

raisonnement
savoir; comparer
()
est le critère de l'exactitude

c. 14,
de l'homme de
135, 14 sq.
du savoir du médecin,
l'art qui
c'est le
construit ce

La perspective
est différente de celle du

raisonnement du médecin ()
traité de .4/, cil, Littré VI, 20, 7 (= Jouanna 237, 17) où le
vient suppléer la perception
du médecin dans le cas de maladies cachées (opposées aux
maladies visibles).

3.L'auteur revient à la polémique contre les novateurs,


dénoncés dès le début de l'œuvre, qui introduisent un postulat en
médecine. reprend du c. 1, 118, 2. La
méthode de réfutation consistera maintenant à partir de leur
théorie sur la cause des maladies pour montrer qu'elle aboutit

L'interversion de en
et indépendamment par Ermerins, redonne avec beaucoup
,
dans le domaine du traitement à des conséquences inapplicables.
proposée par Coray (p. 141)

d'élégance une syntaxe correcte à la phrase. Cette solution est


restée ignorée des éditeurs modernes qui ont adopté des solutions
ou moins correctes (la solution de Kuehlewein devant
adoptée par Jones^-^ et par Festugière, qui critique à juste titre la
.
leçon de \ adoptée par Heiberg, ne convient pas, car le
génitif adnominal ...
doit être enclavé entre l'article
et le substantif
façon correcte, mais cacophonique
),
ou moins élégantes (Gomperz écrit de
<> ).
. 134.

1 Le chaud et le froid, le sec et l'humide, forment deux couples


.

d'opposés, ce qui explique l'emploi de qui désigne à


proprement parler l'un des deux termes de chaque couple. Ce que
l'auteur reproche à ses adversaires, ce n'est pas de soigner par les
contraires, mais de n'admettre que quatre principes possibles, ce
qui ne rend pas
4.
été omis après .
compte de la complexité du réel.
Wilamowitz, p. 518 = 29 (cf. déjà Reinhold) pense que âv a
Ce n'est pas impossible la séquence
a pu se simplifier. Le sens serait «je pense que je
mettrais la personne interrogée dans l'embarras». Néanmoins,
:

l'emploi de l'aoriste seul est plus vif. L'auteur feint d'avoir posé la
question à son adversaire et de l'avoir effectivement mis dans
l'embarras.
5. En face de de M, de A^ est une lectio
difficilior.
Xénophon, Cyropédie, VI, 2, 28
signifie

ne pouvant convenir qu'au seul complément


«mouiller» pour
.,
pétrir le pain; cf.
Ce verbe
il faut
NOTES COMPLÉMENTAIRES 183

supposer l'omission d'un verbe après (ainsi cf. Notice, . ;

p. 114) ou déplacer après (avec Weber^ p. 240). En


utilisant les variantes de M et de A et en tenant compte de la

.( ) ,< >.
recherche constante de la parisose et de la paromoiose dans le
traité, on peut proposer avec Reinhold

. 65
Pour
et
comparer Homère, Odyssée, XXIV,
<8>
Hérodote , 86, 6. Gomperz (p. 237) propose :

. 135.

1. La division traditionnelleen chapitres brise parfois la


continuité du discours.
(
Cette phrase est la suite directe de
)
l'exemple pris, à savoir
apporte des différences

.
le pain

plus fines. A
à
enfin à ;
reprenant

; correspond.<>
correspond ici

correspond
Tout se dédouble et donne une impression de
elle ;

,
complexité. De la multiplicité des opérations résulte la multiplici-
té des qualités de l'aliment. Le postulat simpliste des quatre
principes chaud, froid, sec, humide, ne saurait en rendre compte.
2. Quelques termes techniques ont attiré l'attention des
glossateurs anciens; pour le pain voir Galien,

,
Glossaire, s.u. (éd. Kuhn XIX, 142, 9 sq.) qui
donne la définition suivante «pains bis (littéralement «sales»)
:

parce que toutes les farines sont mises ensemble et ne sont pas
blutées»; pour «non mondé», voir la glose d'Érotien
citée dans les Teslimonia «non décortiqué, car monder, c'est
:

décortiquer»; cf. aussi la glose de Galien citée dans les Test.


Pour un développement comparable sur la différence des effets
produits sur l'homme par les différentes préparations du pain et de
la galette d'orge, voir Régime dans les maladies aiguës, c. 10, Littré

II, 300, 3-7 (= Joly c. 37. 51 6-1 1) avec la même opposition entre
,

les pains de farine pure et de farine grossière voir Notice, p. 69 sq.



;

Nous comprenons que la proposition


concerne la galette d'orge. Les propriétés de chacune des
préparations de la galette également (), c'est-à-dire comme
celles du pain, sont grandes. Pour le sens du neutre «de
chaque préparation», comparer c. 13, 134, 15 à propos de
chacune des opérations pour la préparation du pain de blé.
3. C'est-à-dire que cet individu ne connaît rien à la médecine,
car l'objet de la médecine est de connaître les maladies (cf. c. 2,

()
.
120, 5 sq.). L'auteur établit une différence entre examiner
et savoir ()
comp. c. 1, 118, 12 '...
;

L'examen n'aboutit au savoir que par la découverte des


'
causes (comp. c. 2, 120, 7 sqq.
) ... ...

voir aussi tout le c. 20.


;
... '
184 ANCIENNE MÉDECINE
4. La construction de 8è est différente suivant les éditions.
Certains (Kuehiewein, Jones', Festugière) font dépendre du
verbe qui précède. D'autres (Heiberg, Diiler^) mettent au
contraire une ponctuation forte entre et Les .
manuscrits anciens A et M possèdent cette ponctuation forte. Ce
qui a gêné dans cette manière de ponctuer, c'est que
introduit «une protase qui n'aura point d'apodose» (Coray,
p. 144). On a donc modifié en (Coray, Littré par

, ,
exemple), ou envisagé de supprimer

de l'apodose en rapprochant Thucydide IV, 8, 9


devant
Radt (p. 95) a rappelé récemment que l'on peut avoir
'
et en renvoyant à Denniston, The Greek
Particles ..., p. 308 sq. Il est difficile de décider si
passage est apodotique ou a le sens de «même».
(Coray).
en tête

dans notre

P. 136.

1 . La construction de toute cette phrase a été très bien vue par


Littré (t. I, p. 602) «La plupart des traducteurs... ont supposé
'
,
:

que le membre de phrase qui commence par ou


appartenait à ; il faut le rapporter à qui
précède. Il en est de même pour le ils l'ont fait
rapporter à
dire à
Littré introduit après
».
; ilrapporter à ce qui suit, c'est-à-
faut le

Toutefois, le point en haut que


est impossible, car le participe
reste en l'air. Il est curieux de constater qu'il n'a pas

,
été suivi par les éditeurs modernes (par ex. Jones'^, Festugière)
qui retombent dans les erreurs passées. En proposant de
supprimer Wilamowitz montre qu'il n'a pas

126,
.
saisi la construction. Pour la construction et l'idée, comp. c. 7,
10-14 ... ...,

L'expression est pratiquement identique. Cette

)
comparaison montre aussi qu'il n'y a pas lieu de choisir ici
de A (avec Reinhold, Kuehiewein, Jones') plutôt que
de M (avec Littré, Heiberg, Jones^), puisque
(lege
est

)
donné par A et M au c. 7. Pour la même raison on choisira
de M recc. avec Littré et Reinhold et non
A avec les éditeurs modernes (y compris Heiberg et Jones^); cf.
aussi c. 20, 148, 1 ()
donné par A et M.

,
de

)
Cela étant dit, il reste que le parallélisme formel
masque une dissymétrie de la construction (le sujet
de est où... ... ...
tandis que le sujet de et une hiérarchie

()
est

(),
de la pensée. La question essentielle est la cause du mal
et non la thérapeutique

()
qui est ajoutée
par parenthèse. L'auteur ne veut évidemment pas dire que
l'homme «a besoin» de ce qui est le plus fort dans
chaque chose.
NOTES COMPLÉMENTAIRES 185

L'emploi très fréquent des neutres empêche de cerner au plus


près la pensée de l'auteur, qui, du reste, s'accommode très bien de

?,
l'imprécision de ces neutres. Que désigne-t-il par
Sans aucun doute la même chose qu'au c. 1, 118, 3
c'est-à-dire tout principe autre que le chaud, le
froid, le sec ou l'humide choisi comme postulat par les novateurs.
Mais l'auteur ne précise jamais ce que peuvent être ces autres
principes.
Les éditeurs, jusqu'à Littré compris, ont le texte de M recc.
2.
et entendent :«le degré extrême de toutes les qualités
existantes À partir de Reinhold et Kuehlewein, les éditeurs ont
t>.

adopté le texte de A (qui est la lectio difficilior) et les


traducteurs entendent «le degré extrême de chacune des qualités
:

()
existantes dans l'homme» (Jones', Festugière, Diller^). Mais cette

suit èv ).
traduction est trop restrictive, car elle ne s'appuie que sur ce qui
( D'après ce qui précède, il est clair
que l'auteur pense d'abord aux qualités existantes dans les aliments
.
explicite
il

.
qui sont trop fortes pour la nature humaine

reviendra sur cette idée dans toute la fin du chapitre à partir de


Se Il convient donc de laisser au terme
;

,
toute l'indétermination qui est la sienne (noter le changement
judicieux de traduction chez Jones «each of ail the component
:

parts of man» Jones', «ail the constituents» Jones^).


4. L'emploi de dans cette série de qualités qui
semblent toutes faire appel au goût, étonne. En dehors de

( /,
VAncienne médecine, ne s'applique jamais à une saveur. Il
signifie «humide, mou»; cf. par exemple Affections internes, c. 40,
Littré VII, 264, 6 sq. «Quand les chairs boivent beaucoup de
:

liquide et deviennent humides» M : ). Du sens de


«mou», on passe, comme c'est le cas pour à celui
d'«émollient». Faut-il franchir un pas supplémentaire dans
l'opposition entre ces deux qualités, et créer, pour ce seul texte de
VAncienne médecine, le sens d'« insipide» (ou «fade»), comme l'a
fait Gorraeus dans son édition de VAncienne médecine de 1544,
approuvé par Foes', s.v. :«insipidum recte vertit Gorrh.
quod est humoris aquei proprium»)? Ce sens d'« insipide» et de
«fade» est repris dans les dictionnaires modernes (Bailly et LSJ).
5. Tout en réfutant la thèse de ses adversaires, l'auteur expose
ses propres conceptions. Alors que ses adversaires réduisent les
causes des maladies à un ou deux principes (cf. cl, 118, 6
), l'auteur affirme que l'homme est composé de très nombreux
principes (). L'adjectif est du reste caractéristique d'un
auteur qui est sensible à la complexité de la réalité voir Notice,
;

p. 21. En dehors du traité, l'adjectif ne se rencontre dans la


Collection hippocratique qu'en Maladies IV, c. 34, Littré VII, 546,
24 sq. (= Joly 87, 4 sq.), dans un passage comparable où il est dit
186 ANCIENNE MÉDECINE
que
qualités
les
(
végétaux
S'
et la terre

affirmant que l'homme renferme une


renferment une très grande variété de

multiplicité de qualités
). En
élémentaires, l'auteur de V Ancienne médecine adopte une position
analogue à celle d'Alcméon de Crotone comp. ;24 DK
4 et voir
Notice, p. 57 sq.

pas lieu de déplacer .


6. Même explication de la santé et de la maladie dans le traité
de la Nature de l'homme, c. 4, Jouanna, 172, 13 sqq. avec la note
ad loc, p. 256; voir Notice, p. 55 sq. Malgré Radt (p. 96), il n'y a
après
7. L'auteur de V Ancienne médecine, à la différence de celui de
la Nature de l'homme, fait intervenir deux ordres de causes pour
expliquer les maladies les causes internes (à savoir la séparation
:

des humeurs à l'intérieur du corps) et les causes externes (à savoir


les qualités trop fortes des aliments). Mais les qualités qui provo-
quent la souffrance sont les mêmes, qu'elles soient à l'intérieur
du corps ou qu'elles proviennent des aliments; et le principe
d'explication de la souffrance est identique c'est l'absence de
:

mélange et de crase comparer et opposer le participe


;

(136, 13) et l'adjectif répété trois fois (136, 19 (bis) et


137, 2). Au lieu de supprimer en 136, 18 sq. avec
Reinhold, suivi par Kuehiewein, Ileiberg, Jones^ et Festugière,
ilvaut mieux le sous-entendre après
pas
et Ce n'est
le salé ou l'acide en tant que tel qui cause des dommages,
.
mais son degré extrême quand il est intempéré.

P. 137.

3. Le substantif masculin donné par . est plus rare

contre cinq fois ,


dans la Collection hippocratique que le substantif féminin
donné par M on y rencontre une quarantaine d'attestations de
qui est donc la lectio difficilior.
Pour le substantif masculin, comparer Vents, c. 14, Littré \'I, 12.

(
1

21 (= Jouanna 123, 6 avec


note 2 de la p. 123).

), 4. La leçon de M () la

est supérieure à celle de .

Si '

(
est en facteur commun
le minimum de trouble

de force ... [se.


(...
]).
) ,
comme le rappelle Radt, p. 96. La cause introduite par
elle explique à la fois
:

et le maximum
La leçon de A provient-
elle d'une interversion fautive? On pourrait lire
.
dire
'

5.Le texte des manuscrits est contradictoire; on ne peut pas


du même aliment qu'il ne comporte rien de fort
et qu'il forme un tout ... fort ();
(
cf. Littré I. 604, app. crit.

ad loc. Pour éliminer la contradiction, on a ajouté une négation


)
devant le second (cf. \'an der Linden d'après
NOTES COMPLÉMENTAIRES 187

Serv. apud Foes,


Reinhold, Kuehlewein)
Littré in app. crit.,
; on
Littré), ou on a
suggéré aussi des conjectures
a
supprimé

Kuehlewein, «Die Textesuberliefe-


(
rung der angeblich
Heilkunde»..., p. 193).

,
6. Sur les expressions
hippokratischen Schrift tJber die alte

'«en soi et à part soi» et


«qui n'est associé à aucune autre sorte
de qualité», les avis ont été très divergents. Selon Festugière (voir
sa longue note 54, p. 47-53), l'emploi prétendu technique de ces
expressions ne s'écarte pas de l'usage ordinaire au v'' siècle, et ne
présuppose pas déjà tout le système de Platon, comme le pensait

C. M. Gillespie, «The use of


Classical Quarterly, VI, 1912,
and
p. 179-203,
'
A. E. Taylor, Varia Socralica, Oxford, 1911, p. 215; voir déjà
in Hippocrates», The
particulièrement
p. 195 sq. Au contraire, selon Diller', p. 403 sq., «il s'agit d'une
terminologie technique qui s'explique difficilement sans la
connaissance des écrits de Platon». Tout en reconnaissant une
parenté plus grande que ne le dit Festugière entre VAncienne
médecine et Platon, Kiihn, p. 52 sq., ne croit pas comme Diller à la
postériorité de V Ancienne médecine par rapport à Platon et adhère
fondamentalement à l'analyse de Festugière; position analogue de
Herter^, p. 263 et n. 1 (avec la bibliographie).
Sur l'expression ' dans la Collection Hippocratique,
voir, outre Gillespie et Festugière, les compléments de J. Jouanna,

,
Hippocrale. La nature de l'homme..., p. 247-249; cf. Index Hippo-
craticus, s.v. A II, 2 b (seize fois). Emploi comparable de
' chez Anaxagore (à propos de l'esprit qui se tient
à part soi et n'est mélangé à rien d'autre). Concernant
on ajoutera à la note de Festugière que le verbe est fréquemment
employé dans la Collection hippocratique (dix-huit fois), et qu'il a
des emplois très concrets avec le datif au sens de «être associé à»,
«communiquer avec», notamment en parlant des parties du corps;
voir, par exemple. Articulations, c. 86, Littré IV, 324, 6 sq.
(= Kuehlewein II, 243, 7 sq.) «les
ligaments sont en communication les uns avec les autres».
L'expression la plus proche de celle d'Ancienne Médecine est dans
Pronostic, c. 7, Littré II, 130, 7 sq. (= Alexanderson 203, 4), à
propos des abcès purulents qui sont les plus favorables «quand

, ).
ils n'ont aucune communication avec l'extérieur» (â

vel
Quant à son sens se laisse cerner assez clairement grâce au
contexte. Selon l'auteur, le chaud n'existe pas séparément, mais il

).
est toujours associé à une autre qualité (cf. un peu plus loin, 138, 7
La seule difficulté est de savoir si
sorte» en sous-entendant un génitif pluriel tel que
signifie «une

(interprétation de Festugière qui s'appuie sur d'autres emplois de


188 ANCIENNE MÉDECINE
dans le texte par exemple c. 19, 145, 5
; cf. ) ou si

,
est

propriété. Sur
und
employé absolument («forme» d'une chose
prétation de Gillespie), toute réalité se manifestant à
une forme

in
, visible, et par
voir aussi H. Diller,
vorplatonischer Zeit»,
une

in
, : c'est l'inter-
la fois par un

une puissance ou
«Zum Gebrauch von
Medizingeschichle in unserer
Zeit, Festgabe fur E. Heischkel und W. Artelt, Stuttgart, 1971,
p. 23-30 (H. Diller ne revient pas toutefois sur cet exemple de
V Ancienne médecine).

P. 138.

1. Pour déconsidérer ses adversaires et souligner le décalage

entre leur théorie et la réalité, l'auteur esquisse une petite scène de


comédie. Le bon sens du malade désarçonne le médecin. Le terme
est un verbe familier de la comédie et en même temps un
terme médical qui signifie «divaguer» à propos d'un malade; voir
Épidémies I. c. 13, Littré II, 688, 15 (= Kuehlewein I, 205, 2)
«au sixième jour le malade divaguait» cf. aussi Épidémies
VU, c. 25, Littré V, 396, 7. L'auteur du traité de .4/ accuse aussi
() ;
:

ses adversaires de folie (c. 8, Littré VI, 12, 20-22 = Jouanna


232, 19-233, 2 ]).
Toutefois, la thérapeuti-
. . .

que par le chaud, le froid, le sec et l'humide ne devait pas paraître


au profane aussi extraordinaire que le laisse entendre l'auteur; cf.
Affections,

».
Weil (p.
2.
convient pas
c. 39, Littré VI, 248, 16 sqq.
par Radt (p. 96), pense que
88), suivi
dans
contexte et que
le
ne
provient de «
.
Il est vrai que dans la suite du texte il n'est plus
question de cette qualité associée au chaud. Mais est une
[ectio difficilior dont il est invraisemblable de penser qu'elle soit
issue de C'est en effet un terme rare en dehors de la
Collection hippocratique où on le rencontre quatre autres fois dans
des contextes analogues voir en particulier Régime dans les
;

maladies aiguës, c. 4, Littré II, 246, 2 (= Joly c. 10, 40, 8) à

trouble fâcheux» (
propos de la ptisane dont le mucilage «ne cause ni constipation ni
et Régime dans ),
trouble» (
les maladies aiguës, App. c. 18, Littré II, 486, 4 (= Joly c. 47, 89,

dans V Ancienne médecine,


).
21) à propos des lentilles «qui provoquent du resserrement et du
Dans ces deux traités comme
désigne un «trouble» du ventre.
Cf. aussi Maladies IV, c. 56, Littré VII, 606, 18 (= Joly 120, 17)
et Blessures de tête, c. 15, Littré III, 242, 19 (= Kuehlewein II, 22,
6). La leçon est ancienne, puisqu'elle a été lue par Érotien qui
glose par «mouvement tumultueux», «agitation» (voir les Testimo-
nia, ainsi que la Notice, p. 96).
3. Seule la leçon de
donne un sens au passage, que
M ,
NOTES COMPLÉMENTAIRES
lue
l'on
avec Kuehlewein,
interprète comme une
particule affirmative (Festugière) ou interrogative (Diller^). 11 n'est
189

pas nécessaire de corriger en {se. le malade) avec B. (cf.

Notice, p. 114) et Radt, p. 98. Pour («lun des chauds»),


comparer quelques lignes plus haut («l'un de ces
chauds»).
4. L'auteur songe d'abord à chacune des deux variétés de
chaud, le chaud acerbe et le chaud fade (cf. la suite du
raisonnement .), et accessoirement à chacune
des deux variétés de froid qui ont été introduites dans la phrase
précédente sous forme de parenthèse. Malgré la présence d'une
qualité identique (le chaud), l'effet produit par le chaud acerbe et
celui produit par le chaud fade sont différents, car ce n'est pas la
qualité identique (le chaud) qui est efficace, mais la qualité
différente (acerbe et fade).

P. 139.

, 1. Le texte grec présente un jeu étymologique et une


métaphore qu'il est difficile de rendre dans la traduction. Le terme
que l'on traduit par «propriété» ou «qualité» a encore
conservé, malgré son sens technique, une partie de son sens
originel de «force, pouvoir», comme l'indique le rapprochement,
dans la même phrase, avec le verbe de la même famille
«exercer un pouvoir souverain». La métaphore politique est
discrète mais elle existe probablement, ce qui n'est pas étonnant
;

dans un discours où la rhétorique n'est pas absente comparer ;

dans un autre discours hippocratique, celui des Vents, les termes


(c. 3, Littré VL 94, 3 = Jouanna 106, 3 avec la note 2 de

la p. 106 donnée p. 134) et (c. 15, Littré VI, 114, 17

= Jouanna 124, 16) employés à propos de l'air qui exerce sa


souveraineté dans le monde. Du reste, également dans les Vents,
est employé aux côtés de au c. 3. Cette métaphore
politique n'a rien de forcé, car elle s'insère naturellement dans un
exposé physiologique où le vocabulaire de la force prédomine voir ;

Notice, p. 58.
2. Voici un exemple, parmi d'autres, d'une interversion entre A
et M qui, sans affecter le sens, étonne. Là où un manuscrit a le
mot «froid», l'autre a le mot «chaud», et cela six fois dans la
même phrase. tout en connaissant A, suit l'ordre des
Littré,
recentiores (qui est celui de M). Depuis Reinhold, tous les éditeurs
ont adopté l'ordre de A. Mais personne ne donne la justification
de son choix. L'ordre de A peut paraître, à première vue, plus
naturel, car la séquence qu'il donne est
conforme à l'énumération traditionnelle dans tout le début du
traité (cf. c. 1, 118, 3; c. 13, 133, 9; 20; c. 14, 135, 18 sq.; c. 15,
137, 16; 19 sq.). Mais dans le contexte, l'ordre de M convient
190 ANCIENNE MÉDECINE
mieux. Le développement destiné à montrer que le chaud et le
froid sont les principes les moins efficaces commence déjà dans
l'ordre inverse de l'ordre habituel (... ).
Puis, lorsque l'un des principes se sépare pour causer des douleurs,
c'est le froid qui est envisagé d'abord comme cause, le chaud
venant se joindre à lui et dans le premier exemple donné, c'est
;

encore le froid qui survient en premier (140, 9 8ià


). L'ordre de M correspond donc mieux au contexte.
L'interversion dans A vient peut-être de ce qu'un lecteur a été
choqué de ne pas trouver l'ordre traditionnel. Quelle que soit la

Après 139, 9 ,
leçon originelle, on a un bel exemple, dans une branche ou dans

on lit dans A .
l'autre des manuscrits, d'une correction systématique du texte.
S'agit-il
d'une omission fautive de M ou d'une addition d'un lecteur dans la
branche de A? On s'accorde pour entendre qu'il s'agit des autres
qualités élémentaires choisies comme principes par les adversaires,
c'est-à-dire le sec, l'humide, et tout autre principe qu'ils ont bien
voulu choisir; cf. c. 1. 118, 3. Mais comme il n'est nullement
question du sec et de l'humide dans la suite du développement,
plusieurs éditeurs ou commentateurs (depuis que A est connu), ne
retiennent pas ces mots dans le texte (Littré, Ermerins, Wilamo-
witz, Jones 1-^, Festugière, Diller^, Radt); d'autres l'admettent
(Reinhold, Kuehlewein, Heiberg, Herter\ p. 250, n. 2). Comme les
parenthèses ne sont pas rares dans le traité, il n'est pas impossible
que l'auteur laisse entendre que tous les autres principes choisis
par les adversaires sans exception (chaud, froid, sec, humide, etc.)
ont moins d'effet que les qualités présentes dans l'homme (salé,

.
amer, doux, acide, acerbe, fade, etc.) comparer c. 14, 135, 17 sqq.

le
Mais
texte; cf.
il

Festugière, p. 54
;

peut s'agir aussi d'une note de lecture insérée dans


(= n. 58) et Radt, p. 98.

.
Dans le cas du froid ou du chaud, l'explication de la douleur
3.
est exactement la même que dans le cas des autres qualités (salé,
amer, doux, etc.); comp. c. 14, 136, 12 sq. —
14 La différence porte sur le traitement.
Comme le chaud arrive automatiquement lorsque le froid se
sépare, le mélange se reforme et la douleur cesse sans qu'il y ait
besoin d'intervention du médecin.
Tout ce passage est très brillant. La métaphore lancée par
l'emploi de se poursuit avec une subtilité qui a échappé
aux traducteurs. Les termes employés pour décrire les processus
à l'intérieur du corps conviennent aussi pour une situation de
crise où une expédition militaire rapidement montée vient mettre
fin à l'attaque d'un agresseur. L'expression exprime la

()
hâte du défenseur, à savoir ici le chaud, qui arriva sur les lieux
où s'est produit l'attaque du froid. Cette même
expression est reprise à la fin du développement dans une
NOTES COMPLÉMENTAIRES 191

structure annulaire (c. 16, 141, 8) où

et
rencontre entre des adversaires (cf.
qui se hâte n'a pas besoin de
ambigu il signifie bien entendu le «secours» du
:
).
d'une part confirme le sens et la construction de
d'autre part renforce l'idée qu'il s'agit d'une
Le défenseur
le sens de ce terme est
;

médecin traitant,
le «traitement» (comp. dans le traité en c. 13, 133, 11,
en c. 13, 133, 19, et voir, pour les emplois médicaux de
cette famille de mots dans la Collection hippocralique et dans le
reste de la littérature médicale, N. van Brock, Recherches sur le
vocabulaire médical du grec ancien, Paris, 1961, p. 244-248); mais
il signifie aussi «le renfort» de troupes auxiliaires, quand on monte

,
/
une expédition pour ce sens voir LSJ s.v. IL Quant à
;

son sens métaphorique est encore plus prononcé il s'agit des ;

préparatifs de guerre (cf. les nombreux exemples chez Thucydide


et Aristophane) mais il peut désigner aussi les préparatifs du
;

traitement; comp. dans Régime dans les maladies aiguës, c. 18,


Littré II, 368, 13 et 370, 11 (= Joly c. 67, 66, 16 et c. 68, 67,
4), l'emploi de à propos des préparatifs nécessaires pour
qu'un bain soit efficace; comparer aussi l'emploi assez fréquent
dans Ancienne médecine du verbe
voir Index). Dans ces conditions, on interprétera deux termes
dont sens est apparemment plus neutre,
le

la perspective de la métaphore. Il semble que


et
(cinq fois;

dans
a un sens
,
plus fort et plus précis que «moment, instant» et désigne
critique» ou
corps par suite
l'interprète
la
instant

de l'attaque du froid. Quant à


non comme un adverbe (le sens de «d'abord» ne
, «
«situation critique» dans laquelle se trouve le
je

l'intermédiaire de le )
convient guère, car l'intervention du chaud est décisive en
elle-même), mais comme un attribut proleptique (de
chaud accourt en hâte pour
:
par

)
combattre «en première ligne»; on pourrait entendre aussi qu'il
arrive le premier de tous sur les lieux. La métaphore va disparaître

dans la conclusion en c. 16, 140, 15 (


dans les exemples qui vont illustrer l'idée, mais elle réapparaîtra

et 141, 8 (cité supra). Pour une longue


métaphore de la guerre appliquée à la description des processus
internes, comparer Vents, c. 8, Littré VI, 100, 18 sqq. Jouanna =
113, 2 sqq. avec la note ad lac. (113, n. 2).
5. La suppression de devant proposée
par . (cf. Notice, p. 1 14) mérite considération cf. c. 13, 134, 7 sq.
;

dans un contexte analogue.


La séquence (A om. M) : est un exemple
parmi bien d'autres dans le traité d'une expression redondante
formée de deux termes analogues par la longueur et par les
sonorités voir Notice, p. 12 sq. Le parallélisme de l'expression me
;

paraît avoir souffert dans la tradition manuscrite. L'adverbe


192 ANCIEÎVNE MÉDECINE
(«encore») devant
...
plutôt
() ne convient guère dans

qu'il faudrait lire. Pour l'expression km


la phrase
(«plus... plus»). C'est
,
voir Kuhner-Gerth, Ausfûhrliche Grammatik ..., II, 1, p. 540; elle
est bien attestéedans la prose ionienne d'Hérodote (trois fois) et
surtout d'Hippocrate (quatorze fois). Une confusion (par mélectu-
re d'onciale) entre et est fort possible : comparer deux

,,
exemples dans la tradition du traité elle-même au c. 17, 141, 15
recte M : A, et au c. 22, 150, M. La corruption
1 recte A :

de en a pu Naiure de
se produire aussi en
l'enfant, c. 30, Littré VII, 538, 26 (= Joly 82, 22 sq.)
(scripserim codd. edd.) :

mesure que
«(Les seins) se relâchent de plus en plus au fur et à
accouchements se multiplient» (trad. Joly). Cette
les
traduction correspond plus à qu'à .
P. 140.

1. Dans sa double expérience, pour prouver que le chaud vient

spontanément lorsque le froid est provoqué et vice versa, l'auteur

)
conserve des parallélismes dans l'opposition (comparer 139, 17

et des constantes (140, 2 sq.


et 140,

Ce sont deux expériences opposées qui ont lieu dans les mêmes
conditions. Le même homme (malgré B., Weber^ [p. 241] et
1 sq.
... ).
Wilamowitz, l'article ajouté par M devant est une
erreur; ou alors, il faudrait ajouter devant dans la
même saison (l'hiver), se déshabille, prend un bain froid, puis se
),
rhabille et rentre à l'abri le chaud intervient contre le froid
: puis ;

il se déshabille, prend un bain chaud (ou allume un feu), remet les

mêmes habits et rentre dans le même abri le froid intervient :

contre le chaud.
L'adjectif est un hapax dans la Collection hippocrati-
que. Le terme régulièrement employé dans ce cas est
(cinquante-deux fois).
Des observations analogues à celles-ci sont faites dans les
Problemata d'[Aristote] I, 29, 862 b 35 sqq. «On peut s'en rendre :

compte ... à propos de ceux qui prennent des bains froids en hiver
et de ceux qui, en hiver, prennent des bains chauds ceux qui :

prennent un bain froid, après avoir frissonné un petit moment,


tant qu'ils se baignent, ne ressentent plus rien pendant le reste de
la journée sous l'effet du froid tandis que ceux qui ont pris un
;

bain chaud, passent la journée en étant assez sujets aux frissons».


3. Le singulier ... donné par A est préféré par Dihle
(p. 145) parce que cette phrase n'annonce qu'un seul exemple.
Radt (p. 99) critique cette argumentation et préfère le pluriel de M
... parce que l'auteur n'a pas en tête un seul exemple, mais
des milliers (140, 16
convaincante. La formule
qu'un seul exemple (—
). —
de la série, car la conclusion
)( ;
NOTES COMPLÉMENTAIRES
La critique

;
193

de Radt n'est pas


n'annonce effectivement
c'est le dernier exemple
— voir infra, n. 5)
vient clore le développement sur les gens en santé. C'est seulement
après cette conclusion que l'auteur ajoute, dans une sorte de
parenthèse, qu'il pourrait citer bien d'autres exemples. Si l'auteur
accorde à ce dernier exemple plus d'importance qu'aux précé-
dents, c'est parce ce que les effets produits par le chaud qui
succède au froid sont plus nets et vont jusqu'à occasionner une
affection cutanée, les phlyctènes. Ce dernier exemple est parti-
culièrement bien placé avant les exemples sur la succession du
froid et du chaud (ou vice versa) chez les malades.
4. La nuit, ils sont «enveloppés» dans les couvertures (compa-
rer. Épidémies II, *" sect., c. 31, Littré V, 138, 17

Pour le sens de
(I et II) et de
,
«couvrant le malade de couvertures») et ils sont «à l'abri».
voir J. Jouanna. «Sens et étymologie de
», R.E.G., XCV, 1982, p. 15-36.
5. On entend généralement cette phrase comme une exclama-

).
tion («tant est grande la facilité avec laquelle, etc.»), exclamation
destinée à justifier la phrase précédente où(
Mais la formulation générale de la phrase, valable
pour chacun des deux principes, conduit à penser que c'est plutôt
une conclusion à tous les exemples exposés à propos des gens en
...
bonne santé si la plupart de ces exemples illustrent la venue du
:

chaud (exemples n<« 1", 2 et 3), l'un d'entre eux concerne la venue
du froid (exemple n" l*»). Pour en asyndète conclusif, «telle

,
est donc la façon...», voir, par exemple. Maladie sacrée, c. 13,
Littré VI, 386, 11 sq. (= Grensemann 82, 9 sq.)

maladie naît et s'épanouit».


:

«telle est donc la façon dont cette

La métaphore
supra, p.

contre l'autre
avec
militaire,

-j- ace.
commencée au début du chapitre
139, n. 3), reprend. L'adverbe

=
exprime la
diligence avec laquelle chacun des deux principes se présente
( «contre»; cf. c. 17, 141, 15
note ad loc; cf. aussi c. 16, 141, 8
la
pour venir au secours du corps. La représentation est spatio-
temporelle. Littré a choisi une représentation plutôt temporelle
(«le chaud et le froid se remplacent alternativement»). La tra-
duction de Festugière («le froid passe au chaud et inversement»)
) (voir

dénature la pensée de l'auteur qui n'envisage à aucun moment


ici la transformation du froid en chaud ou inversement. Chaque

principe conserve sa nature, mais sa est plus ou moins


forte suivant qu'il est isolé ou mélangé. Pour deux principes
contraires qui sont liés et se présentent à la suite l'un de l'autre,
comparer Platon, Phédon, 60 b à propos de la douleur et du plaisir
(rapprochement déjà fait par Festugière, p. 54 =
n. 57).
194 ANCIENNE MÉDECINE
P. 141.

1. Après les exemples relatifs aux gens bien portants, voici un

à 141, 6
l'arrivée de la fièvre
:

Si la
( )
exemple relatif aux malades avec deux moments I) de 140, 17
le froid du frisson
:

2) de 141, 6
;
:

() entraîne

fièvre entraîne à son tour une arrivée du froid.


la
à 141, 7

structure d'ensemble est très claire, le détail de la première


partie reste très douteux et le texte est certainement altéré. À
partir de () (texte des manuscrits), la syntaxe
n'est pas claire (en particulier les membres de phrase introduits
par sesuccèdent sans verbe à un mode personnel). Le texte a
été diversement construit, diversement ponctué et diversement
corrigé. Avant Littré, on avait tendance à considérer que
— faisait allusion à une seconde fièvre moins aiguë
chez ceux qui n'ont pas eu un frisson aussi fort. A partir de Littré
(cf. déjà Corn. [Lat.]). on estime généralement qu'il s'agit d'une

seule et même fièvre à propos de laquelle l'auteur ajoute qu'elle


n'est pas dangereuse. Cette interprétation est en parfait accord
avec la suite de l'exemple et la conclusion qui en est tirée (elle

et lui enlève sa ).
n'est pas dangereuse car le froid arrive rapidement après la fièvre
L'auteur nie donc le caractère dangereux
d'une fièvre même quand elle est aiguë. C'est une position
paradoxale, mais dans le chapitre suivant, il préviendra les

.
objections qu'on pourrait lui faire.
Malgré cet accord général, les éditeurs et traducteurs varient
sur la syntaxe, la ponctuation et le texte. Littré (cf. déjà Corn.
[Lat.]) fait terminer l'interrogation après Depuis Rein-
hold, les éditeurs modernes pensent que () introduit une

).
à
.
Weber' (p. 241) l'arrêtent à ,
seconde interrogation parallèle à la première, mais ils ne
s'accordent pas sur la longueur de cette interrogation. Reinhold et
Kuehlewein, Heiberg, Jones*"^
Par ailleurs, ils modifient en (vel
Avec un tel texte, le sens est «n'est-il pas vrai que
:

,
non seulement cette fièvre n'est pas forte, mais qu'elle cesse au
bout de peu de temps?». Diller revient à la ponctuation de Littré.

,
Mais quelle que soit la position adoptée, celle de Littré ou des
éditeurs modernes, si l'on interrompt la phrase après
délimite dans ce qui suit une principale, positive ou interrogative,
avec un verbe au participe
Du point de vue de la syntaxe, il est impossible de séparer ce
participe du verbe à mode personnel
pensons-nous que le membre de phrase ()
on

ce qui n'est pas admissible.

qui précède. Aussi


— se
rattache syntaxiquement à ce qui précède et constitue une
parenthèse apportant une correction sur le caractère de la fièvre à
l'intérieur même de l'interrogation. Et en conservant le texte des
manuscrits avec une légère modification, nous entendons
)
B9
On
et
. NOTES COMPLÉMENTAIRES

Pour

a sous-entendu comme sujet


au sens de
+ participe concessif, voir LSJ s.v.
de ,
Kùhner-Gerth, Ausfûhrliche Grammalik ..., 112, p. 85A8.
sur la suggestion de
195

{se.

Langholf, «le frisson»


(du frisson)

comparer

suivante
(«le frisson») et
et .
fièvre se termine là où le frisson

, («le malade») et
La présence du frisson
().
C'est
qui détermine l'arrivée

Pour
(«la
en effet la présence du froid
du chaud (de
est resté le
le

«la fièvre».
()
ou du refroidissement
la fièvre), et la
plus longtemps
changement de sujet entre
fièvre»), comparer à la phrase

et ()
;

d'une fièvre aiguë est notée dans d'autres traités de la Collection


hippocratique; voir par exemple Épidémies III, c. 1, Littré III, 54,
2 (= Kuehlewein I, 22L 5 sq.) ;
ibid., c. 17, 3,

.
Littré III, 116, 12 (= Kuehlewein 1, 236, 9)
Pour un emploi comparable d'v
à propos d'une fièvre,
voir Épidémies I, c. 11, Littré II, 676, 7 (= Kuehlewein I, 201, 5).

Sur la relation entre le froid des pieds et la fièvre, ainsi que sur le
réchauffement des pieds à la fin de la fièvre, voir le passage très
éclairant du Régime dans les maladies aiguës (App.), c. 7, Littré
II, 420, 8 sq. (= Joly
pieds est généralement
prochaine de la fièvre
c.

le
13, 74, 13 sq.) :

signe d'une intensification


En
revanche, lorsque la fièvre cesse, au
...
()
«le refroidissement des

passage du pluriel (cf.


, )
contraire les pieds deviennent plus chauds que le reste du corps».
2. Pour trois verbes de cette phrase le sujet n'est pas exprimé.
Comme sujet de il faut sous-entendre le malade. Le
...
n'a rien de gênant. Il est inutile de changer
au singulier «le malade»
des manuscrits

. .
en (Weber^, p. 241), bien que ce changement soit minime.
Comparer, par exemple. Nature de la femme, c. 109, Littré VII,
424, 18 (= Trapp 126, 18) Le sujet de est
évidemment Reste le sujet de (aoriste d'expé-
rience). Radt, p. 99, considère que c'est également la fièvre et y
voit un «beau cas de res pro rei defectu»; cf. Kuhner-Gerth,
Ausfûhrliche Grammalik ..., 112, p. 569 sq. Mais cela reviendrait
à expliquer négativement le froid par le départ du chaud; or ce
n'est certainement pas ce que veut dire l'auteur; car on ne
comprendrait pas pourquoi le froid est plus intense après la fièvre.
La fin de la fièvre s'explique en réalité, selon l'auteur, par l'arrivée
en force du principe contraire, le froid. Le sujet de ne
peut donc être que «le malade» qui «se refroidit» (interprétation
traditionnelle). D'ordinaire l'actif est transitif (cf. par ex. c. 16,
139, 16 l'homme «refroidit» son corps), et le médio-passif signifie
:

«se refroidir» (c. 16, 140, 3; c. 18, 143, 2). Mais si l'emploi
intransitif n'est pas attesté ailleurs, il est très possible du point
de vue linguistique comparer les emplois intransitifs de
;

LSJ s.v. II.


196 ANCIENNE MÉDECINE
4. : potentiel sans . Voir Kûhner-Gerth, Ausfùhrliche
Gramalik ..., II 1, p. 225 sq. Dans les cas de ce genre, il est difficile
de savoir si la particule a disparu dans la tradition manuscrite,
ou si c'est une ledio difficilior.

P. 142.

1. C'est-à-dire l'amer, l'acide, le salé, etc. à l'exclusion du


chaud et du froid.
2. La métaphore militaire, commencée au début du 16 (voir
c.

supra, p. 139, n. 3) et prolongée à la fin de ce chapitre (voir supra,


p. 140, n. 5), n'est pas abandonnée. Le chaud, dans le cas de la

est présent en allié aux côtés


devant», «dirige», «commande» l'expédition
()
fièvre due aux causus, péripneumonies et autres maladies graves,
du principe qui «marche
Le ( ).
chaud n'est dans ce cas qu'une force auxiliaire comp. l'emploi de ;

en 139, 14 avec la note ad loc. Pour l'emploi de


dans un contexte militaire, voir Xénophon, Helléniques IV, 6, 1 :

)(),
la cité de Calydon «était l'objet des attaques des Acarnaniens
qu'assistaient en vertu de leur alliance (8tà
des contingents athéniens et thébains». Ici le
chaud n'est qu'un contingent auxiliaire de l'amer (ou de l'acide ou
du salé) qui mène l'attaque contre le malade et lui cause du
dommage, comme les Athéniens ou les Thébains sont chez
Xénophon des contingents auxiliaires des Arcaniens qui attaquent
Calydon.
La fin de la phrase, dans les manuscrits n'a pas une syntaxe
régulière. L'accusatif ne dépend de rien. Deux éditeurs ont

,
essayé de corriger le texte

en
Ermerins ajoute:

.
tandis que Reinhold suivi par Kuehlewein, Jones^ corrige
après

II n'y a pas lieu de modifier

bien attesté dans le traité; cf. 137, 3 et surtout 144, 6 sq.


L'anacoluthe, conservée par Littré, Heiberg, Jones^, Festugière,
est tolérable si l'on sous-entend après .
3. Cette phrase introduit une longue série d'exemples d'affec-
tions causées par les qualités telles que l'amer, l'acide, le salé, etc.,
et non par le chaud ou le froid. L'auteur prend d'abord des
exemples connus de tous maladies du nez (fin du c. 18; maladies
:

des yeux, de la gorge (début du c. 19); puis maladies causées par


l'amer (= bile jaune), par l'acide (c. 19 fin).

147, 12 (, ).
n'a pas ici un sens différent de celui qu'il a au c. 20,
Ce ne sont pas
«les signes» mais les exemples destinés à prouver. On a voulu
modifier la préposition devant en la remplaçant par
(Coray), (Ermerins Wilamowitz). Cela n'est pas nécessaire :

+ gén. signifie ici littéralement «en s'appuyant sur».


:
NOTES COMPLÉMENTAIRES 197

4. La phrasen'a pas de verbe; mais, dans un discours plein


de vivacité, il n'est pas gênant de sous-entendre, devant
+ace, un verbe de mouvement à l'impératif «venons-en».
Même explication dans VIndex Hippocraticus, s.v. C IV
(«subaudiendum fort,
fications proposées n'est indispensable
=
(
vel simile»). Aucune des modi-
vulg. Littré Ermerins
Kuehlewein Ileiberg Festugière ; + gén. Radt).
;

5. Le coryza est ici un «rhume de cerveau»; cf. M. Grmek, Les


maladies à l'aube de la civilisalion occidentale, Paris, 1983, p. 476.

par
et en rajoutant
)
Bien qu'il soit fréquent, il est rangé par l'auteur dans les maladies
graves.
7. Zwinger a rattaché une partie de la subordonnée introduite

(— à ce qui précède en supprimant


8è devant :

du nez en y portant la main. Cette interprétation mérite d'être


après
on s'aperçoit de la chaleur

signalée car elle a eu des adeptes au xix*" siècle (Coray, p. 154;

)
Gardeil, p. 434) et encore au xx•" siècle (Diller^, p. 217). Toutefois
la tradition manuscrite est très satisfaisante, comme le remarque
Jones^, p. 82. Le frottement continuel (cf. le présent duratif
de la main (pour se moucher!) irrite et ulcère le nez.
8. Quel est le sens du participe , concessif ou causal?
Gardeil, Littré, Jones''^, Festugière donnent un sens concessif (cf.
par exemple Littré «quoique sèche et peu charnue»), mais aucun
:

de ces traducteurs ne justifie sa traduction. Le sens causal est


donné par Ermerins, p. 39 («quippe carnis expers et durus»). Le
sens causal est le plus vraisemblable. Le nez étant peu charnu et

()
sec n'a pas d'humidité qui puisse prévenir l'inflammation et par
conséquent le stade ultérieur de l'ulcération. Comparer dans Airs,

secs ()
eaux, lieux, c. 7, Littré II, 32, 3-6 (= Diller 38, 20-23) les ventres
et sujets à s'enflammer
aux ventres mous et humides (...
:

sont opposés
).
9. L'enclitique «d'une certaine manière», donné par le
manuscrit M et les éditions, est très étonnant et ne convient pas du
tout au ton convaincu et démonstratif du discours. Il doit s'agir en
fait d'un interrogatif «Et comment donc cesse cette brûlure
:

du nez?». Pour la postposition de interrogatif, comparer

.
Vents, c. 3, Littré VI, 94, 19 (= Jouanna 107, 6) S'

...;
' .
Dans ce cas, il faut mettre un point d'interrogation après
La réponse vient en asyndète
... ..., Se
: ... ...,
On
comparera un passage tout à fait analogue dans Vents, c. 14,
Jouanna 124, 1-10 où l'interrogation (indirecte)
est suivie de la même asyndète (') et est reprise dans la
réponse par avec le même passage du présent au
parfait (le rapprochement entre des deux passages a déjà été fait
pour d'autres raisons, dans le cadre d'une étude sur la composition
annulaire dans la Collection hippocratique, par 0. Wenskus,
198 ANCIENNE MÉDECINE
Ringkomposilion, anknaphorisch-rekapilulierende Verbindung und
anknùpfende Wiederholung im hippokratischen Corpus, Gottinger
phil. Diss. Frankfurt, 1982, p. 194). Pour
principale après une subordonnée introduite par
144, 1 ' , en tète de la
comp. c. 19,
dans une phrase également parallèle pour le
contenu la seule différence est qu'il y a ici un
; apodotique (voir
J. D. Denniston, The Greek Particles ..., p. 179, qui ne cite pas
toutefois Hippocrate). Il est possible que certains aient déjà pensé
à cette solution cf. la traduction de Gardeil p. 435 «Cette ardeur
; :

enfin se dissipe, mais comment?».


10. Première attestation d'un thème qui prend une grande

),
importance aux c. 18 et 19. Le retour à la santé se fait non

.
seulement par le mélange des humeurs (cf. ici mais
aussi par leur coction (). Cf., dans la suite du c. 18,
(143, 3) et (143, 5) et au c. 19 (143, 13),
(143, 20), (144, 17), (145, 3), (145, 15). La
coction n'est rien d'autre que la cuisson des humeurs qui leur ôte
leurs propriétés fortes, exactement comme la cuisson ôte les
propriétés fortes des aliments (cf. c. 3, 122, 12 et c. 5, 124, 19 sq.).

à l'intérieur
(/
de l'homme (famille de), )
Toutefois l'auteur conserve un vocabulaire différent pour la
cuisson à l'extérieur de l'homme et et la cuisson
que ce soit la cuisson

,
des aliments dans la digestion (c. 11, 131, 17) ou la coction des
humeurs (ici et au c. 19, 145, 3).
11. Coray a changé en
génitif régi par : «davantage mélangée que
l'humeur précédente»; avec cette correction, «l'humeur précéden-
te» désigne l'humeur qui était acre au début du coryza. Cette
correction, qui est aussi celle de Reinhold, a été adoptée par
Jones'"^. En réalité, reprend
(142, 10 sq.). Il s'agit de l'humeur qui s'écoulait du nez
avanl le coryza. Cette humeur n'a pas cessé de couler aussi
pendant le coryza, mais l'humeur acre, comme tout principe
morbifique, s'est séparée et à la fin du coryza elle se mêle mieux à
l'humeur précédente. Il convient donc de conserver le texte des
manuscrits.

P. 143.

,
1 L'auteur envisage dans cette phrase les cas particuliers où le

),
.

coryza n'est pas causé par une humeur acre (cf. plus haut 142, 10
mais uniquement par le froid, sans qu'il y ait présence
d'une autre qualité telle que l'acre ou l'amer, l'acide, le salé, etc.
(comparer à 142, 3 avec la note ad
loc). On retrouve dès lors les cas de figure de la fin du c. 16 avec
passage rapide et spontané du froid au chaud et du chaud au froid.
De tels coryzas ne sont pas dangereux. Cette phrase constitue une
parenthèse. On revient avec ' aux cas de coryza les
plus fréquents, ceux qui sont causés par l'àcreté.
NOTES COMPLÉMENTAIRES 199

En
faveur du rétablissement d'un relatif au début de la

phrase, voir la longue note de Littré (I, p. 614 sq.). On ajoutera


que la relative introduite par olai est parallèle à —
(142, 9 sq.)du début du chapitre. C'est seulement par référence à

cette première relative que notre texte se comprend pleinement. Il

comme
.
faut sous-entendre
Il reste que la liaison
sujet de après
... Se, rétablie par Littré et acceptée

par Jonesi"2, est, à ma connaissance, sans exemple. Ermerins et


et

.
principale
écrire soit
(
Kuehiewein ont supprimé

' ...
Mais en conservant au début de la
), Kuehiewein choisit une cote mal taillée. Il faut
avec Ermerins, ou si l'on veut conserver
le apodotique, ... en supprimant '.
Au début

celle de A (
de la proposition principale, la suite du raisonnement
invite à choisir la variante de M avec Littré
),
), plutôt que
bien que cette dernière ait été choisie par tous
(
.
les éditeurs à partir d'Ermerins. Ce qui est important n'est pas de
montrer que les coryzas causés uniquement par le froid se
terminent de la même façon, mais que leur fin est différente de
celle des coryzas provoqués par l'àcreté de l'humeur le démons-

,.
:

tratif annonce les infinitifs et On

.
comparera en c. 19, 144, 7, dans un contexte parallèle, l'adverbe
démonstratif qui annonce la temporelle —
Pour cf.

C. 16, 139, 12-14 ... ... ...

...
;

cf. aussi c. 16, 141, 8 La métaphore


militaire se poursuit,mais avec beaucoup plus de discrétion.
désigne à proprement parler le chaud et le froid.

Reinhold), mettent une virgule après ,,


2. Les éditeurs du xv!•" à la fin du xix*" (y compris Littré et
faisant ainsi de
le verbe de la relative, tandis que les éditeurs modernes depuis

Kuehiewein mettent une virgule avant ce verbe devenant


ainsi le verbe de la principale. Ce changement de construction
s'explique par l'adoption
et non
de A qui a l'infinitif
de
l'indicatif
l'infinitif est une leciio facilior entraînée
3. La liaison
par
la leçon
de M. Mais dans A

introduit un second exemple (maladie des


yeux) après le coryza introduit par (c. 18, 142, 8 sq.). Le
.
par
4.
.,
troisième exemple (maladies de la gorge) sera introduit par
(c. 19, 143, 15). Les humeurs acres ulcèrent les paupières, comme

elles ulcèrent le nez dans le cas du coryza; comp.


142, 14
L'indéfini
et c. 18,

«jusqu'à un certain moment», donné


texte traditionnel, est si faible que Reinhold l'a supprimé;
le

il a été suivi par Kuehiewein et Diller^. La correction de Gomperz

(p. 221, 5), qui transforme l'indéfini en interrogatif, correspond


bien au style plein de vivacité du traité pour l'emploi des ;

interrogations, voir Notice, p. 12. Comparer le rétablissement de


l'interrogatif dans l'exemple précédent sur le coryza, dans
200 ANCIENNE MÉDECINE
un endroit parallèle (voir supra, p. 197 = p. 142, n. 9). Cette
correction deGomperz, jugée recherchée et inutile par Festugière
(p. 55 = n.approuvée par Radt (p. 101). Il est curieux
63), est
de noter que Littré, tout en ayant le texte traditionnel, traduit
comme s'il y avait un interrogatif (I, 617 «Douleurs, inflamma- :

tion, chaleur extrême, tout cela dure, jusqu'à quand?»). La


transformation de l'indéfini en interrogatif est beaucoup plus

de M
5.
(
ancienne que Gomperz elle était déjà opérée par un correcteur
M :

L'exemple des maladies des yeux


;

M^).
se termine par une
définition de coction qui est, selon l'auteur, à la fois mélange,
la
crase et cuisson des humeurs. Au sens strict du terme, la coction
est une cuisson (voir supra, p. 198 p. 142, n. 10). Il est singulier =
que l'auteur intègre ici le mélange et la crase dans la définition

.
de la coction, car dans ce qui précède ces processus sont mis sur
le même plan pour la coction et le mélange, voir c. 18, 142, 18,
:

;
pour la coction et la crase, voir c. 18,
143, 5 sq.
6. Troisième exemple les maladies de la gorge. : 8è
correspond à (143, 7) du deuxième exemple. La relative qui
introduit le troisième exemple se comprend par référence à celle

).
qui introduit

8. Les érysipèles
le deuxième

(litt.
:

«maladies qui font rougir


(se.

la peau»)
ne désignent pas ici des dermatoses, mais des érysipèles du
poumon, comme l'indique le contexte. Pour les érysipèles du
poumon, voir les rédactions parallèles de Maladies II 2, c. 55,
Littré VII, 84, 20 sqq. (= Jouanna 193, 8 sqq.), et Mala-
dies I, c. 18, Littré VI, 172, 1 sqq. (= Jouanna, Archéologie...,
p. 317 sq. = Wittern, 46, 1 sqq.). Affections internes, c. 6,
Littré VII, 180, 3 sqq. = Jouanna, Archéologie..., p. 192-200).
9. Littré donne à un sens temporel : «et c'est
alors que croît la maladie». Il a été suivi par Festugière («et c'est
à ce moment que
la maladie s'aggrave»), et Diller^ («und in dieser
Zeit Krankheit auf dem Hôhepunkt») parmi d'autres. En
ist die
serrant de plus près la représentation archaïque de la maladie
qui est sous-jacente (la maladie est un être qui se nourrit pour
prendre des forces et s'accroître;

un neutre reprenant
),—
on préférera voir dans
c'est dans ces substances
cf. c. 6,

:
125, 8 sq.

que la maladie puise ses forces. La préposition + dat. a le sens


intrumental causal; voir Kuhner-Gerth, .Ausfûhrliche Gramma-
lik ..., II 1, p. 464-466. Dans l'histoire des interprétations du texte
de {'Ancienne médecine, l'interprétation proposée ici est la plus
ancienne; par exemple Cornarius (Lat.) «et in talibus morbi :

firmantur», et Gardeil (p. 435) «ce sont ces qualités qui ... entre- :

tiennent ces maladies». L'aspect temporel est envisagé plus loin


en 145, 6.
NOTES COMPLÉMENTAIRES 201

10. Il

,
est naturel de considérer que le sujet de est le

.
même que celui de c'est-à-dire «les flux» par suite du
parallélisme ... Se. De plus, comparer
quelques lignes plus haut
et

à
II n'y a donc pas de raison de suivre les traducteurs tels

que Littré Festugière ou Diller qui préfèrent donner comme sujet


le complément de c'est-à-dire — .
P. lU.

1.L'interprétation proposée ici de cette phrase rejoint celle de


W. Mûri, p. 177. Le démonstratif renvoie à ce qui précède et
désigne les substances (ou humeurs) salées et acres contenues dans
les flux sur la gorge par ;
il faut entendre chaque affection

dont il est question dans cet exemple (enrouements, angines,


érysipèles, péripneumonies). Comme dans l'exemple des flux sur le
nez (coryza), l'auteur explique la plupart des cas par les qualités
intempérées (acre, etc.), tout en admettant, dans la phrase
suivante, comme il l'avait fait pour le coryza, que quelques cas
sont causés uniquement par le chaud ou par le froid. L'interpréta-
tion traditionnelle considère, en revanche, que annonce ce
qui suit ()
et que désigne chaque affection en général. Il
s'agit, dans ce cas d'une remarque générale que l'on peut traduire
ainsi «Ce qu'il convient, naturellement, de considérer comme la
:

cause de chaque affection, c'est ce dont la présence détermine


nécessairement mode d'être de chaque affection et dont le
le

changement en une autre crase détermine nécessairement sa


cessation». Une telle réflexion générale s'intègre mal dans le
raisonnement.
2. Cette phrase qui termine le développement sur les flux dans
la gorge et envisage le cas où ces flux sont causés uniquement
par le chaud ou par le froid est parallèle au passage du c. 18,
142, 20 sqq. où étaient distingués également les cas de coryza
causés uniquement par le froid. La combinaison des deux
particules donnée par A est rare (cf. Denniston, Greek
Parlicles ..., p. 420); mais ce n'est pas une raison pour la
supprimer, bien au contraire. Tous les éditeurs qui connaissaient
A ont banalisé le texte en supprimant () qui se trouvait pourtant
dans l'archétype (comparer 0K0CAT6 A et OKOTAN M); pour
la liaison dans la Collection hippocratique, voir Articulations,
c. 60, Littré IV, 258, 8 (= Kuehlewein II 209, 9) et Régime,

c. 35, Littré VI, 514, 3(= Joly CMC 152, 2).


L'expression ' a été rangée par
H. Diller\ p. 65, dans la sphère de la terminologie platonicienne
{Phédon 66a, 67b, 81c, Philèbe 29b, 53a, 59c, 63b). Mais
l'adjectif n'appartient pas seulement à la philosophie attique. Il
est bien attesté dans l'ionien hippocratique (17 fois), même dans
des ouvrages où toute influence de la philosophie est exclue voir, ;
202 ANCIENNE MÉDECINE
par exemple, Maladies II, 1, c. 4b, Littré VU, 12, 10 sq.
(= Jouanna 136, 1) à propos du sang qui coule rouge et pur.

4. Pour .
3. Allusion au c. 16 fin, 140, 16-141, 11.
voir J. D. Denniston, The Greek Particles ...,
p. 576. La progression est claire. L'auteur continue à exposer les
exemples commencés au début du c. 18. Il a exposé d'abord (c. 18,
)
)
142, 8 sq. le flux sur le nez; d'autre part (c. 19, 143, 15

)
le flux sur la gorge. Il expose de plus (c. 19, 144, 9

toutes les autres affections qui se subdivisent en plusieurs


cas: d'abord
humeur amère,
19, 144, 11 (c. l'épanchement d'une
bile jaune; puis (c. 19, 144, 18
la 8)
)
l'épanchement d'humeurs acides. Il n'y a donc pas lieu de modifier

()
en avec Reinhold Kuehlewein, même pour justifier la
présence de devant dans A.

c.
Le terme
17, 142. 2
a ici exactement la même extension qu'en
et c. 19, 144, 7 ( ). Il

s'agit des qualités telles


l'exclusion du chaud et du froid (ou du sec et de l'humide).
5. Radt (p. 102) trouve la forme
se demande s'il ne faudrait pas lire
,,
que l'acerbe, le salé, l'amer, l'acide, etc., à

«très inhabituelle» et
avec Zwinger
(= «quand une humeur amére se sépare»). En réalité, rien ne doit

-
être changé au texte des manuscrits comparer Régime dans les

) -
;

maladies aiguës (App.),


13)
7. A l'adjectif
(A. :
c.

M
10, Littré II, 450, 11
\') .
«soulevées», opposer en 145, 3 le verbe
(= Joly c. 29, 82,

et p. 410 (s.v. ).
«retrouver le calme plat»; voir Foes^, p. 324 {s.u.
Pour un emploi similaire de

.
propos de flux pathologiques, voir Régime dans les
à
maladies aiguës (App.), c. 5, Littré IL 408, 1 sq. (= Joly c. 8, 71,
16 sq.) :

. 145.

1. C'est le seul emploi de dans la Collection hippocratique.


La maladie de rage (ou hydrophobie) n'y est pas décrite. Le
la
terme n'a pas

... )
un sens différent du sens large qu'il a chez
ici

Homère («accès de fureur»; cf. Iliade IX, v. 238-239


ou chez les Tragiques («accès de
folie»; cf. Eschyle, Choéphores. v. 288. Prométhée. v. 883; Euripi-
de, Héraclès furieux, v. 866, avec la déesse Lyssa, v. 823, 878, 884,
:

899; Oresle, v. 254, 326, 401, 793, 845; Bacchantes, v. 851, avec la
déesse Lyssa v. 977). Il est étonnant que le terme (ainsi que
ses dérivés) soit beaucoup plus fréquent dans la tragédie que chez
les médecins. Est-ce un hasard si nous avons ici côte à côte
et «morsures»? ou avons-nous une référence implicite à la
morsure du chien enragé? Pour la relation entre la et le
chien dès l'époque classique, voir Aristophane, Lysistrata, v. 298
NOTES COMPLÉMENTAIRES 203
propos du feu) «comme un
(à :

chien enragé il me mord les yeux». Pour l'histoire de la rage dans


l'Antiquité, voir J. A. Hofmann, Babiei caninae ad Celsum usque
historia critica, Leipzig, 1827; J. IL Steele, «History of rabies» in
G. M. Baer (édit.), The nalural history of rabies, Londres / New
York, 1975; J. Théodoridès, Histoires de la rage. Cave canem,
Paris, 1986.
2. Le parallélisme entre les deux exemples est remarquable,

), (.
même dans la syntaxe. La cause de la maladie est d'abord donnée
dans une subordonnée 2.
les symptômes sont énumérés dans une
...
symptômes
).
précédente par
(1.

entendre le verbe de la première

[
(1.
om. ]
M
).
.
principale exclamative (1. oîai 2. olai) qui comprend trois

A] [2.
2.
Comme verbe de la seconde principale, il faut sous-
Enfin, la cessation de
la maladie est donnée dans une seconde phrase réunie à la
:

C'est ce parallélisme qui doit


...

.,
:

présider à l'établissement et à l'interprétation du texte. Il n'y a


pas lieu de modifier la seconde fois en avec Ermerins (qui
reprend la leçon d'un manuscrit récent) suivi par Kuehlewein,
Heiberg, Jones^-^. Le génitif est, la seconde fois, complé-
ment de comme il est, la première fois, complément de
Et de même que le terme auquel renvoie
est «les malades», le sujet de
malade». Le passage du pluriel («les malades»; cf.
singulier «le malade» n'est pas plus étonnant que le passage
inverse au c. 10, 131, 5-8 8
est «le
au

[se. le malade)...
)
)
{se. les malades).

Comme Radt (p. 103) l'a judicieusement souligné, l'affection


causée par les humeurs acides peut se terminer, comme celle qui

),
est causée par l'humeur amère, soit par l'évacuation de l'humeur à
l'extérieur du corps (cf. à comparer à
soit par son retour au calme et par son mélange à
d'autres humeurs à l'intérieur du corps (cf.

.
à

,
opposer à

3.
... voir note ad lac.). La liaison
;

est donc équivalente à «ou bien»; cf. Thucydide II, 35, 1


et ici même, dans la phrase suivante,

Depuis (145, 3) jusqu'à (145, 8), le passage a


été construit
nes.
1
différemment dans
Jusqu'à Littré,
— 2
le

; 3—
les éditions anciennes et moder-
passage a été découpé en trois phrases
;

Dans la première phrase, le verbe à mode personnel n'est pas


exprimé on sous-entend un verbe tel que
; ou cf.
— . ;
:

Corn. (Lat.) «concoqui autem et permutari, att'enuarique ac


:

crassescere in humorum speciem, per multas et omnigenes species


204 ANCIENNE MÉDECINE

parenthèse Stô — .
contingit». Depuis Ermerins, on considère que l'ensemble forme
une seule et même phrase, interrompue momentanément par une
Dans cette solution, il n'y a plus lieu de

par .
sous-entendre un verbe à mode personnel au début du passage et
l'on comprend que les infinitifs — sont repris

Mais quelle que soit la solution adoptée, il reste que le génitif


reprenant les infinitifs ne peut être complément de
qui demande l'accusatif. Coray est le premier à avoir
soulevé cette difficulté de syntaxe, et propose d'ajouter après
(p. 160 sq.); de façon indépendante, semble-t-il, Cornford
(in Jones^, p. 60) ajoute après .
Radt, p. 104 sq., propose le

.
changement plus drastique du génitif en

En réalité, le texte peut se comprendre sans modification si l'on


admet que renvoie non aux opérations indiquées

()
par les infinitifs, mais à toutes les «substances» contenues dans le
corps dont il a été question encore dans la phrase précédente; cf.
l'acidité qui se mêle à «toutes les autres substances»
du corps. On retrouve ainsi en composition annulaire, à la fin du
développement sur le peu de puissance du chaud et du froid, un

, .
écho de la formule initiale du développement (c. 16, 139, 4 sq.)
*

correspondance entre
Dans cette interprétation,
et
il y
:

.
employé au
corps ; cf.
à cette différence près que

et
le neutre pluriel est

c. 19 pour désigner les «substances» contenues dans le

quelques lignes plus bas '


À la fin du développement, comme au début, l'auteur
souligne la distinction fondamentale qu'il y a entre, d'une part, le
chaud et le froid et, d'autre part, les autres substances qui sont
dans l'homme. La phrase signifie donc, dans cette hypothèse, que
le chaud et le froid sont de toutes les substances du corps celles qui

de ) ,
sont le moins aptes à subir la coction, la transformation, etc.
La modification du texte proposée par V. Langholf (suppression

connue
aplanit les difficultés. On retrouverait l'expression bien
«le moins du monde». N'est-ce pas toutefois
une correction qui aboutit à une ledio faciliorl
5. Tout le passage depuis est transmis de façon fort
différente et fort peu satisfaisante par A et M à cela s'ajoutent les
;

incertitudes de la ponctuation (où s'arrête l'interrogation introdui-


te par ?). Ces deux causes réunies expliquent la diversité des
solutions qui ont été proposées et le nombre des corrections qui
ont été tentées.
Dans le texte de A, adopté par Kuehlewein, Heiberg et
Festugière, l'expression n'a pas de sens. Je lis
(cf. Reinhold ).Ainsi amendé, le
NOTES COMPLÉMENTAIRES 205
texte de A
au c. 16, 139, 8 sq. ( )
compréhensible et reprend une idée déjà exprimée
est

pour le chaud, la crase
:

se fait par le froid et vice versa, ce qui est nouveau dans ce passage-
ci, c'est l'insistance sur l'impossibilité pour le chaud et le froid

d'entrer en combinaison avec d'autres substances. Le pronom


reprend le chaud et le froid, tandis que
«d'autres substances» (du corps). Quant au pronom
développé par l'apposition
désigne
il est
(cf. Kùhner-Gerth, Ausfùhrliche
,
Grammaiik ..., II p. 658).

.
1,

Le texte de M diverge de celui de A notamment


en ce qu'il a
...
l'interrogative S" Sv
à la place de ...Dans M,
peut signifier «en quoi
pourrions-nous affirmer que cela est?», et venir renforcer ce qui a
été énoncé à la phrase précédente, à savoir l'impossibilité pour le
froid et le chaud de mûrir ou d'épaissir. Quant à
début d'une phrase sur le même plan que
il est le

...
l'interroga- ,,
tion —
M, est en substance celui-ci
peuvent subir, comme les autres
ment, ils peuvent sans doute subir la
pas de même nature que celle des autres
,, ,
formant une parenthèse. Le sens, dans la version de
alors que le chaud ou le froid ne
:

maturation et épaississe-
mais cette n'est
car chaud et
froid ne peuvent se mélanger qu'entre eux. Toutefois la fin du
texte de M n'est pas très claire.
Cornarius traduit par
«ettemperamentum ipsorum est, veruntamen inter ipsa mutuo
vim habens». Jones^ (après Cornford qui corrige inutilement le
texte), Radt, entendent l'interrogative de M au sens de
Diller^,
«Que pouvons-nous dire que cela est?» et la font suivre d'une
seconde interrogation commençant à «et existe-t-il une:

combinaison du chaud et du froid ayant une propriété autre que


celle qui vient de leur union réciproque ...?».

)
6. Dans cette définition de la santé, la métaphore (politique et
guerrière) affleure. Les termes qualifiant les substances qui
composent l'homme pourraient convenir aussi à des individus ils :

sont inoffensifs et pleins de douceur (cf. et vivent dans la


tranquillité et dans la paix (cf. ),
sans aucune manifesta-
tion de force et de prétention à un pouvoir personnel qui viendrait

,
causer du tort à la cité (cf.
c. 14, 136,
...
politique dans
14-16

la
). Comparer
la santé chez Alcméon DK 24 R 4
définition de
la
cf.

célèbre
'
;

métaphore

.
(et voir Notice, p. 57 sq.).
Le participe au neutre singulier a paru gênant. Il
a été modifié dans la vulgate, jusqu'à Littré compris, en
pour qu'il se rapporte au sujet Mais les
verbes
substances qui le composent (comparer
et• à 145, 3 ).
ne concernent pas l'homme mais les
à 145, 3
Si l'on veut rétablir la
206

et
à

comme sujet de la temporelle


ANCIENNE MÉDECINE
régularité de la syntaxe, on écrira avec Ermerins
rapportant
) ,
,
.
sujet sous-entendu de
ou l'on ajoutera avec Kuehlewein
<> — De
se

.;
toute façon, le choix de l'actif adopté par certains éditeurs
modernes (Heiberg, Festugière) n'est pas fondé. Les substances ne
cuisent pas, mais sont cuites le passif
143, 5 c. 19, 143, 13 143, 14
;

...,
s'impose cf. c. 18,
;

et 145, 3

P. 146.

1. Ce chapitre 20, où l'auteur définit sa méthode en médecine

en l'opposant à une médecine philosophique est le passage le plus

,
célèbre du traité. La thèse combattue par l'auteur est représentée
dans la Collection hippocratique en particulier par Chairs, c. 1 et
par Régime, c. 2; voir Notice, p. 29 sqq.
Le terme de qui ne se rencontre pas ailleurs dans la
Collection hippocratique, a le sens large et ancien de «savant»
comme chez Hérodote où sont qualifiés de les savants ou
sages de la Grèce dont Solon (I, 29, 1), les savants venus après
Mélampous (II, 49, 1) et Pythagore (IV, 95, 2) voir aussi en poésie
;

Pindare, Isthmiques V, 28 Eschyle, Prométhée, v. 62 et 944 Frag


; ;

314 Radt;
Euripide, Héraclides, v. 993, Suppliantes, v. 903,
Hippolyte, v. 921, Frag. 905 Nauck. Selon Diogène Laërce, Vie des
philosophes I, 12 est le terme ancien pour désigner les
savants, les sages et il ajoute les poètes «Cratinos, par exemple,
:

dans son Archiloque, appelle ainsi Homère et Hésiode». Le terme


n'a pas ici le sens précis et nettement péjoratif de «sophiste», de
professeur de sagesse enseignant pour de l'argent, comme chez
Platon à propos de Gorgias, Hippias, Protagoras, etc. Toutefois,
l'auteur critique ici le savoir de ces savants. Ainsi que le remarque
justement Festugière (p. 55 =
n. 67), ce sens large de
n'est pas nécessairement un argument pour une datation haute du
traité au v* siècle, car l'acception de «savant» se maintient
également au iv" siècle (et au-delà), chez Xénophon {Mémorables I,
1, 11 «ce qui est appelé cosmos par les savants»), Isocrate {Sur
:

l'échange 268 «les anciens savants» parmi lesquels AIcméon,


:

Parménide et Mélissos), et même chez Platon (par exemple

).
,
République 596 d le créateur de
: l'univers est un admirable
Pour la mise sur le même plan de «médecins» et de

).
«savants», comp. Aristophane, Nuées, v. 331-332

notionum
Sur le sens de
et
(...
voir C. Brandstaetter, « De
usu rhetorico», Leipz. Stud. zur
Class. Phil., XV, 1894, p. 129-274.
est soit un optatif potentiel sans (cf. c. 17, 141, 18), soit
un optatif oblique après (comparer Hérodote I, 70, 2 et
Platon, Charmide 156 b, et voir Kuhner-Gerth, Ausfùhrliche
Grammatik ... II 2, p. 364 sqq.).
,(
NOTES COMPLÉMENTAIRES 207
La variante de M n'est pas impossible. Pour l'infinitif

.
présent après
(^ Alexanderson,
c. 2,

futur
2.
Littré VL
230, 5
voir Pronostic,

468,6 (= Joly CMG 122,22)


Toutefois, quelques lignes plus bas (146,
est donné après A et M.
du substantif
C'est l'attestation la plus ancienne
c. 25,

à la fois par

si l'on accepte la datation traditionnelle du traité au v" siècle


Littré H, 188, 6
et Régime,

,
17), l'infinitif

avant J.-C. Le terme n'est pas attesté ailleurs dans la Colleclion


hippocratique il a déjà le sens technique de «philosophie», «savoir
;

(
spéculatif» impliquant une méthode, et non le sens large d'«amour

). ...
58 15
;

)
de la science», «amour de la sagesse». On sait que, selon les
Anciens, le terme de «philosophie» passe pour être une création
de Pythagore voir Diogène Laërce, Vies des philosophes ], 12
et Aétius L 3, 8 (^ DK
-
)
Pour les médecins qui tendent vers la philosophie, on
comparera Aristote, De sensu 436 a 20- bl «Parmi les médecins, :

ceux qui s'attachent à leur art d'une manière suffisamment


philosophique (oi commencent
leurs études médicales par l'étude de la nature (
)». Malgré les analogies, il subsiste une grande différence
cette tendance philosophique est condamnée par l'auteur hippo-
:

cratique, alors qu'elle est recommandée par Aristote.


3. La syntaxe de la proposition comparative introduite par
a paru irrégulière à certains (voir dernièrement Radt,
p. 106) les sujets n'ont pas de verbe. Pour

.
:

, Ermerins propose
Hirschberg
:

impossible de sous-entendre
et Pohienz

proposition précédente? Littéralement


d'autres... tendent vers la philosophie»
Gomperz ,
obtenir une syntaxe régulière on a supprimé le relatif oî
(Wilamowitz, Diller*), ou on a rétabli un verbe après la relative oî
— vel
Mais est-il
à tirer de la
«comme Empédocle et
:

«comme le discours=
d'Empédocle et d'autres... tend vers la philosophie», suivant une

.
brachylogie attendue dans les comparaisons.
V. Langholf propose de transformer le relatif (oî) en article (ot)

4.
4 (1001 a 12 sq.) oî : ,
et pense qu'il s'agit déjà de l'expression «les auteurs sur la nature»
que l'on retrouve à partir d'Aristote voir par exemple Métaphysi-
que
;

est très rare de rencontrer dans la Collection hippo-


cratique une allusion explicite à un penseur ou à un médecin.
Seules autres attestations le philosophe présocratique Mélissos de
:

Samos dans Nature de l'homme, c. 1, Littré VL 34, 6 (= Jouanna


166, 11), et les médecins Hérodicos {Épidémies VI, 3, c. 18, Littré
V, 302, 1 =
Manetti-Roselli 68, 12), Pythoclès {Épidémies V, c. 56,
Littré V, 238, 17 =
Épidémies VU, c. 75, ibid., 434, 1) et Mnési-
208 ANCIENNE MÉDECINE
maque {Épidémies VU, c. 112, Littré V, 460, 18). Cette mention

d'Empédocle n'a été connue qu'assez tard; elle ne figurait pas


dans les éditions du *"au xviii' siècle par suite d'une lacune
dans les manuscrits récents (due à un saut du même au même ;

voir Notice, p. 94). Elle n'est apparue qu'à partir de Littré (1839),
qui l'a trouvée dans le manuscrit .\ et notait (t. I, p. 620) «La :

citation d'Empédocle par Hippocrate n'est point une circonstance


à dédaigner dans l'histoire littéraire et médicale». Elle donne en
particulier des indications approximatives sur la date du traité ;

voir Notice, p. 85.


5. L'expression revient quatre fois dans ce chapitre ;

cf. aussi 146, 8, 9 sq. et 16. On a entendu soit «la nature humaine»
(Littré), soit la « Nature» en général (Nestlé, Hippocratica ..., p. 23,
n. 1 Festugière, p. 18). Comme l'expression stéréotypée
;

n'est pas accompagnée d'un déterminant, on est enclin à lui


donner un sens général, mais toute la discussion dans ce chapitre
porte sur le problème de savoir si la connaissance de la nature de
Vhomme est préalable à la médecine, ou si c'est l'inverse. La
recherche en 146, 9 sq. est définie en 149, 13-15 comme

l'homme (146, 5 sq.


... ...
...
). ;;
la science qui consiste à savoir «ce qu'est Vhomme, les causes de sa

formation, etc.». De plus, l'expression est développée


deux fois par des interrogations indirectes dont le sujet est
146, 16-18
Quant aux autres emplois de
dans le chapitre, ils concernent aussi la nature de l'homme
ou la nature des individus (148, 1 147, 17
). Dans le traité du Régime, la problématique est la même,

)
bien que la réponse soit opposée

6..
gière (p. 60
dépend de
= n.
il faut avoir, selon cet auteur,
:

une connaissance préalable de la nature tiumaine (c. 2, Littré VI,


468, 7 sq. = Joly, CMG 122, 23

.
:

avant de traiter correctement du régime.

rattacher à
70) et Diller^ préfèrent
Daremberg
(p. 616), Festu-
le

Au sens faible de «au début (de leurs ouvrages)», on a


préféré le sens fort de «en partant de l'origine». La méthode est
comparable à celle des théogonies ou cosmogonies; cf. Hésiode,

' '. ... ,


Théogonie, v. 114 sq.

8. En s'appuyant sur le fait que


/

le verbe ,
primitif est «égratigner, tracer en incisant», signifie à l'époque
bien «écrire» que «peindre»,
classique aussi traducteurs et
les
dont le sens

commentateurs modernes admettent que peut signifier ici


soit «écriture», soit «peinture» (voir Festugière, p. 60 sq. n. 71), =
et ils optent dans leur traduction tantôt pour «l'art du peintre»
(Jones\ Jones^ in not., Festugière) ou «l'art du dessin» (Littré I,
p. 621), tantôt pour «l'art de l'écriture» (Jones*, Diller'^; cf. aussi
Edelstein p. 114, n. 1 et Wanner p. 71, n. 25) ou «la littérature»
NOTES COMPLÉMENTAIRES 209

(Littré II, p. lu, Daremberg, p. 616, JonesV p. 53, n. 3). La


modification de la traduction chez un même auteur (cf. Littré et
Jones) montre que le deuxième sens a gagné du terrain chez les
modernes, alors que les traducteurs et lexiques anciens ne
connaissent que le premier sens {pictoria chez Cornarius et Foes ;

cf. aussi piciura chez Ermerins). Parmi les commentateurs récents,

on opposera Dihie, p. 146-150, qui choisit le sens de «art


(théorique) de la peinture» et C. W. Mulier («Schreibkunst oder
Malerei?». Sudhoffs Archiv, XLIX, 1965, p. 307-311) qui choisit le
sens d'«art de mettre par écrit».

(se. )
En réalité, de l'examen de tous les emplois du terme
au iv' siècle, il résulte qu'il n'y a aucune ambiguïté
possible. Le terme désigne toujours l'art de la «peinture», qui
imite le réel par les couleurs (vingt exemples chez Platon). De

,
même qu'Hippocrate est le représentant le plus éminent de la
dans le Prolagoras de Platon, de même, quand on parle de

)
on pense à Polygnote (Platon, Ion, 532e -533 a) ou à
Zeuxippe (Platon, Prolagoras 318 c). Cet usage étant rappelé, il n'y
a aucune raison de créer pour notre passage, malgré L.S.J. (s.u.
le sens d'«art de l'écriture», qui n'est pas attesté ailleurs.

Le passage de la Rhétorique d'Aristote (III, 12, 1413 b 20, cité par


Littré II, p. lu, pour justifier la correction de traduction qu'il
propose («la littérature» au lieu de «l'art du dessin») n'est pas

)
exactement comparable

)
()
(se.
dans la Rhétorique, l'expression
:

se comprend en sous-entendant (cf. 1413 b 8-9

on ne peut donc tirer de ce passage la preuve que


;

signifie «l'art de l'écriture». Cette mention de la peinture


par une comparaison
a peut-être été inspirée à l'auteur
)

célèbre faite par Empédocle, où l'art des peintres qui créent des
figures diverses à partir d'un mélange de couleurs sert de
paradigme pour comprendre la création des divers êtres mortels à
partir d'un mélange des quatre éléments (DK 31 23). Sur ce
rapprochement, voir déjà A. Cosattini, «Nota ad Ippocrate

. 9.
c. XX»..., p. 163-165.

précise le contenu de
Le substantif
qui reprenait
désigne «l'enquête» en général ou le
«savoir», la «science» résultant de l'enquête. Le terme est déjà
bien attesté dans la langue ionienne du v' siècle Heraclite DK 22 :

129; Hérodote 11,99, 1; 118, 1 1 19, 3 VII, 96, 1; Ilippocrate,


; ;

Art, c. 1, Littré VI, 2, 2 sq. = Jouanna 224. 3; Fœ/us de huit mois,


c. 9, Littré VII, 448, 12 sq. = Joly 171, 18; cf. aussi le traité plus
tardif des Préceptes, c. 13, Littré IX, 268, 14 et 270, 1. Voir aussi
dans la tragédie, Euripide Frag. 910, 1 Nauck. Pour le iV siècle,

Et
la (
voir surtout Platon, Phédon 96 a, où Socrate fait allusion à son
enthousiasme juvénile pour «cette science que l'on appelle enquête
sur nature»
l'explicitation de ce savoir dans
8
le Phédon («savoir les
).
causes de
210 ANCIENNE MÉDECINE
chaque être, pourquoi chaque être
pourquoi il existe»,
) ,naît, pourquoi

proche de l'explication
est très
que l'auteur de V Ancienne médecine donne de la recherche
il meurt et

tout
).
(«savoir ce qu'est l'homme, les causes de sa formation et
le reste»
La
' '
seule différence est que l'auteur hippocratique restreint
l'enquête à nature de l'homme.
la
10. est développé par les trois interrogations indirectes
introduites par (1. 17, 19, 19). L'originalité du médecin
hippocratique est de montrer que la connaissance de la nature
humaine n'est possible que par l'étude des relations entre le

..
régime qui agit et le corps qui pâtit, ces relations ne devant pas
être seulement observées, mais aussi expliquées. Sans une
connaissance causale de l'agir et du pâtir, il n'y a pas de savoir
véritable. Comparer Platon, Phèdre, 270 c-d et voir Notice, p. 81.
11. Le «reste du genre de vie» comprend les exercices et les
bains; c. 21, 148, 9 sq.
12. On discute pour savoir si est un masculin («chaque
individu») ou un neutre («chacune des choses qui sont dans
l'homme»). Gomperz, p. 222, n. 6, choisit le neutre en s'appuyant

..
sur ce qui suit II a été

suivi par W. Capelle, «Zur hippokratischen Frage», Hermès, LVII,


1922, p. 249, n. 2. Mais l'interprétation traditionnelle par le
masculin (par exemple Littré, Festugière) est plus naturelle;
comparer en 147, 2, le masculin L'expression —
appartient à un stade du raisonnement plus élaboré et ne
peut donc être utilisée pour justifier le genre de Comparer
la critique de l'interprétation de Gomperz par F. E. Kind,
«Bericht uber die Literatur zur antiken Medizin (1911-1917)»,
Jahresherichl ùber die Forischriite der klassischen Altertumswissens-
chaft, CLXXX, 1919, p. 7.

P. 147.

1 L'expression
. signifie littérale-
ment «quelle chose parmi celles qui sont dans l'homme». Dans ce
:

contexte, il ne s'agit pas des organes (Festugière), mais des


substances (salé, amer, doux, etc.) ou humeurs; voir c. 14, 136, 9
et comparer c. 20, 147, 17 qui est repris par
«une telle humeur». La «substance» à laquelle un
aliment est contraire se met en mouvement dans le corps en se
séparant du reste sous forme d'humeur et de flux. Nous sommes
dans le développement sur les affections causées par les
c'est-à-dire par les propriétés des humeurs. C'est seulement à
partir du c. 22 qu'il sera question des maux causés par les
,
,
NOTES COMPLÉMENTAIRES
«parties» du corps que l'auteur appelle
l'auteur définisse les en 149, 5 par
.
Le fait que

donc par une périphrase qui rejoint la nôtre ici, prouve


211

sans doute l'ambiguïté de l'expression mais à chaque fois cette


;

ambiguïté est supprimée par le contexte.


2. On a vu une ressemblance entre cette phrase et Platon, Lois,
I 638c, où sont blâmés «ceux qui, entendant louer le blé

comme bon aliment, aussitôt le critiquent sans s'être informés ni


()
de son effet ni de son emploi, sans savoir de quelle façon, à qui,
avec quoi, sous quelle forme, à quelques constitutions l'adminis-
trer». Effectivement, Platon, comme l'auteur de VAncienne
médecine, récuse un empirisme qui n'envisage pas la diversité des
cas et n'établit pas de relation entre l'effet produit et la cause.
Mais ce rapprochement n'autorise pas la modification dans le texte
de Platon de (blé) en (fromage) proposée par
Cornarius ou en (texte adopté par Festugière p. 65 [= n. 75]
sans commentaire); comparer la position prudente de E. des
Places, Platon, Œuvres complètes, XI, 1, Les Lois I-II, Paris, 1951,
p. 20, n. 2.
3. L'auteur choisit un état connu de tous, l'ivresse, comme

((
modèle pour illustrer ce que le médecin doit rechercher dans
chaque affection causée par un aliment. On retrouve les trois
points correspondant aux trois interrogations définissant le

correspond à ... )
programme de recherche du médecin 1. l'état du corps
:

2. la cause de cet état


;

)
corps qui est affectée (
).
correspond à 3. la substance du
;

correspond à

Les éditeurs et commentateurs se partagent entre M


adopté ici (Littré, Weber, Diller' p. 395, n. 37) et oi A
Kuhlewein, Jones, Heiberg, Radt, p. 108). Avec la leçon de A le
sens serait «et tous ceux qui connaissent cet état sauraient
:

que...». L'ivresse étant un état connu de tous, il n'y a pas lieu de


distinguer avec le manuscrit A une catégorie de gens qui
()
personne du pluriel '
connaîtraient cet état. Il suffit de voir un homme qui est
dans l'état d'ivresse pour en connaître la cause. La première
confirme que la connaissance de ce cas
est partagée par tous les auditeurs, spécialistes ou non-spécialistes.
4. L'exemple du fromage permet à l'auteur de progresser dans
son analyse. Non seulement l'influence des divers aliments sur le
corps n'est pas comparable (l'effet du fromage est différent de
celui du vin pur), mais aussi l'influence d'un même aliment sur les
différents individus n'est pas analogue. Néfaste pour la plupart
des individus (cf. Régime dans les maladies aiguës, App. c. 18,
Littré II, 484, 2 sq. = Joly c. 46, 89, 13-15 «Le fromage produit
:

la flatulence, la constipation et l'inflammation des aliments, etc.»),


le fromage est bénéfique pour certains d'entre eux. Cette
212 ANCIENNE MÉDECINE
observation, issue de l'expérience médicale, aboutit à une
conclusion importante sur la connaissance de la nature de
l'homme. La médecine, au lieu de commencer par une définition
générale de la nature humaine qui est un postulat, aboutit, par
l'étude des diverses influences du régime sur les hommes, à la
connaissance des diverses catégories de constitutions humaines.
Significatif est le passage du singulier au pluriel
(147, 17).

P. 148.

,
1. Les manuscrits et la plupart des éditeurs (Littré, Kuehle-

wein, Heiberg, Jones^, Festugiére) mettent un point après


et rattachent la phrase à ce qui précède. Mais Gomperz, modifiant

,
la ponctuation, rattache la phrase à ce qui suit
8<>'
on ne serait pas victime des erreurs suivantes
S' :

«si l'on savait cela,


dans les :

convalescences, etc.». Cette modification a été adoptée par Jones*,


et par Radt (p. 109 sq.) qui juge la correction nécessaire pour deux
raisons du point de vue de la syntaxe, l'emploi absolu de
:

est tardif; du point de vue du sens, le sujet de d'après le


malade
contexte doit être
...
le médecin et
).
non le
On
(cf.

ne peut toutefois
exclure une certaine souplesse aussi bien dans la langue que dans
146, 16 sq.

le raisonnement. En ce qui concerne la langue, l'emploi absolu de


est déjà attesté en c. 19, 145, 8, si l'on ne corrige pas le
texte. En ce qui concerne le raisonnement, l'auteur, qui s'adresse
à un public large comprenant à la fois des médecins et des pro-
fanes (voir Notice, p. 14 sqq.), a pu vouloir attirer l'attention
de l'ensemble de son auditoire par une formule frappante qui
estompe la distinction entre spécialistes et non-spécialistes. Si l'on
conserve l'interprétation traditionnelle, * est employé adver-
bialement en tète de phrase; comp. c. 16. 140, 16.

3. La proposition
personnel est

de
dépend de
sous-entendu à tirer de
vouloir rétablir un verbe à mode personnel en écrivant
(Wilamowitz) ou en proposant
.
2. C'est-à-dire le jour où les perturbations se produisent.
— son verbe à mode
;

Il est inutile de

à la place
(Jones^. p. 87). Deux
interprétations de sont possibles peut: signifier soit «que»
après le comparatif, soit «ou». Première interprétation «si tout ;

cela se trouve être meilleur, étant administré, que ne l'étant pas»;


deuxième interprétation «si tout cela, une fois administré, se
:

trouve être meilleur (que le régime habituel), ou non». Dans la


première interprétation, on admet que l'innovation de régime est
bonne; dans la seconde, qu'elle peut l'être, mais que cela n'est pas
nécessaire. Les traducteurs (Littré, Festugiére) ont adopté la
première interprétation. Toutefois, seule la seconde interprétation
NOTES COMPLÉMENTAIRES 213

permet de rendre compte de «si cela se trouve ainsi»,

)
qualifiant «le plus utile». L'auteur se place donc
dans l'hypothèse où l'innovation dans le régime peut être très
utile, mais ne l'est pas nécessairement.
4. A : M. Avec la leçon de A, il faut sous-entendre
un sujet au neutre tel que ( correspondant à

qu'avec
.
Avec la leçon de M, il faut sous-entendre le même sujet
de 148, 8, c'est-à-dire les malades, et traduire «si
les malades se trouvent avoir fait une innovation qui soit telle»,

.
c'est-à-dire fort utile.
6. L'idée qui domine les c. 20 et 21 est que le médecin doit
avoir une connaissance exacte de l'effet produit par le régime sur

...
l'homme comp. en
;
146, 17 sqq.
6 '
... 6

. 149.

Pour la question de l'authenticité des trois derniers chapi-


1.

tres,voir Notice, p. 18-22.


Le terme
«organes»; mais le terme grec ,
correspond ici à ce que nous appelons les
d'où est tiré le terme
français «organes», n'est pas répandu avant Aristote
traductions telles que «organes» ou «organisme» doivent être
; aussi les

évitées pour traduire les textes de la Collection hippocratique voir ;

H. loannidi, «Les notions de partie du corps et d'organe» in


F. Lasserre et Ph. Mudry, Formes de pensée dans la Collection
hippocratique, Genève 1983, p. 328. Le mot envisage les
parties du corps d'abord dans leur configuration, tandis que le
mot les envisage d'abord dans leur fonction cf. aussi ;

R. Joly, Le niveau de la science hippocratique ..., p. 163 «Le mot :

est typique : c'est en effet la forme de l'organe qui est


l'essentiel ... On y retrouve la même physique du récipient que
partout ailleurs {se. dans la Collection hippocratique), mais élaborée

((
en système très explicite».
2. On hésitera entre la leçon de M «que veux-
;

je dire par là?») et celle de A 8 «voici en


substance ce que je veux dire»). La leçon de M correspond bien à

; ;
la vivacité du style riche en interrogations directes
134, 9

;
9-11 — c. 16, 140, 17 sq.
;



comp. c. 13,

cf. aussi c. 19, 143, 12


;

(avec le commentaire ad toc); c. 22, 149, 11-14


:

c. 16, 141,

et voir Notice, p. 12. Pour l'interrogation donnée par le


;


manuscrit M, Coray (p. 166 sq.) compare aussi Platon, Banquet
178 d 1 d'un autre côté, en faveur de la leçon de
;

A, on comparera c. 24, 153, 10 donné par A et


M.
3. Le terme est un hapax dans la Collection hippocrati-
1

214 ANCIENNE MÉDECINE


que; comparer au c. 14, 136, 8 . Ces deux termes de la racine
*ak- désignent étymoiogiquement le «tranchant», c'est-à-dire la
«propriété incisive» de l'humeur qui agit sur le corps de l'homme

).
et cause les affections (cf. c. 24, 153, 8

originel.

9
5. Dans
.
Les termes ne sont pas totalement vidés de leur sens

4. Il faut probablement comprendre


creuses et évasées comp. 149, 12
;
que ces parties sont

cette longue énumération, les parties


et 150,

du corps sont

,
définies par leur forme (creux, rond, large, long), leur consistance
(dur.
orientation (suspendu, étendu).
Pour comp. 152, 6 . Le verbe ,
compact, mou, spongieux, poreux), et accessoirement leur

appartient primitivement au domaine végétal («être florissant» en


parlant d'une plante; cf. Régime, c. 90, Littré VI, 654, 17 =
qui

Joly
CMC 226. 12. à propos des arbres florissants, mais qui n'ont pas de
fruits) s'applique également dans la Collection hippocratique au
corps ou aux parties du corps (chairs, rate), notamment dans le
traité des Lieux dans l'homme où le terme est employé neuf fois.
Dans ce traité, le verbe a le sens de «grossir», «gonfler», «devenir
volumineux» et s'oppose à («dépérir»), à ou à
(«être atténué, dégonflé, maigre»). Les passages les plus éclairants
pour illustrer l'emploi dans V Ancienne médecine sont ceux où il est
question de la rate Lieux dans l'homme, c. 24, Littré VI, 314,

,
:

20 = Joly 61, 8 sqq. :

«c'est en effet pour les mêmes raisons que la rate grossit et

24 Joly 61, 10 et 12 sq. Le fait que la famille de ,,


que le corps dépérit»; cf. aussi ibid., Littré \'I, 314, 21 et
= qui est

, )
surtout attestée dans la poésie, soit bien représentée dans la
Collection hippocratique (voir Index Hippocraticus, s.v.
et atteste son origine ionienne.
6. Les propriétés des parties du corps dépendent avant tout de
leur forme. L'auteur consacre un long développement aux parties
dont la propriété est d'attirer, en l'introduisant par une interroga-
tion où sont citées trois sortes de parties : les parties creuses et
évasées, les parties dures et rondes, les parties creuses et resserrées
à une extrémité. Les propriétés de ces diverses parties seront
examinées successivement, d'abord les parties qui sont le plus
susceptibles d'attirer les liquides, c'est-à-dire les parties creuses et
resserrées à une extrémité (149, 14 — 150, 8 ), ensuite les
parties creuses et évasées qui peuvent recevoir le liquide, mais
sont moins susceptibles de les —
),
absorber (150, 11 Ta
attirer (150, 9

150, 12 ).
150, 1
enfin les organes durs et ronds qui ne peuvent ni attirer ni
— L'ordre
d'exposition est donc un ordre décroissant. Mais, en même temps,
cela correspond à l'ordre de l'énumération initiale (149, 5
NOTES COMPLÉMENTAIRES 215
...
la
149, 7
présentation,
). il y a
Ainsi, malgré la souplesse apparente de
une grande logique dans la conduite des
développements.

(
7.

150, 5 sq.
Comme les
dissection sur l'homme,

)
médecins hippocratiques ne pratiquaient pas
étaient obligés de recourir à la méthode
ils

analogique, et d'expliquer les phénomènes internes invisibles (cf.

). par les phénomènes externes visibles


Cette méthode est attachée au nom du
philosophe présocratique Anaxagore selon qui «les choses appa-
la

).
rentes permettent de voir les choses cachées» (DK 59 21 a
Le rapprochement entre ce passage
de V Ancienne médecine et Anaxagore a été fait depuis longtemps;
:

H. Diller,
1932, p. 16, qui
«). », (
voir 0. Regenbogen, «Eine Forschungsmethode antiker Natur-
wissenschaft», Stud. Gesch. Malhem. 12, 1930, p. 147 sq. et

compare
TA
Hérodote II, 33, 2
aussi
Cette méthode, il va de soi, n'est
Hermès, LXVII,

pas une création d'Anaxagore. Elle n'est pas différente de celle


qu'employait Empédocle pour expliquer le phénomène interne de
la respiration par l'analogie avec le fonctionnement de la
clepsydre (DK 31 100). Ainsi notre auteur, tout en condamnant
Empédocle pour sa méthode hypothétique en médecine, utilise
comme lui la méthode analogique.

l'expérience quotidienne
la bouche), puis de l'expérience médicale
(
Les phénomènes de référence sont ici tirés d'abord de
.
attraction de liquide par
:

attraction ( . :

de liquide par les ventouses). Sur cette «expérience» de l'aspira-


tion, voir G. Senn, «uber Herkunft und Stil der Beschreibungen
von Experimenten im Corpus Hippocraticum»
267 et 280.
8. L'optatif
par rapport au futur de M

le potentiel sans ,
.
de A paraît être une leclio difficilior
S'agit-il d'un potentiel sans
ou d'une omission accidentelle de la particule modale? Pour
voir Kuhner-Gerth, Ausfûrliche Gramma-
iik ..., II 1, p. 225 sq. L'omission accidentelle de s'expli-
..., p. 231, 261, 264,

querait assez bien par une haplographie dans la séquence


< AN> ANACnACAIC. Comp. l'absence de quelques lignes plus
loin (150, 15).

P. 150.

A partir dela leçon de A ,


Kuehiewein conjecture
1.

(forme ionienne de
et a été adoptée par Heiberg et Jones^. Mais
). La conjecture est séduisante
le texte de A peut se
comprendre sans changement : «et même (si) en plus (vous placez
un tuyau contre les lèvres)». est adverbial ;
quant à la liaison
... , souvent maltraitée par les éditeurs, elle signifie «et
216 ANCIENNE MÉDECINE
même», jouant le rôle de conjonction de coordination et
étant un adverbe; cf. J. D. Denniston, Greek Particles ...,
p. 535 sq. En partant de la leçon de A, on distinguera deux
moments l'un où l'on aspire avec les lèvres seules, l'autre où l'on
:

aspire en ajoutant une canule. Quand on réunit les lèvres,


l'aspiration est possible quand on ajoute une canule, l'aspiration
est aisée.
Le manuscrit A
;

[]
,
4. a conservé le verbe surcomposé
qui a disparu dans

mann
5. Comp. Maladie
86, 18 sq.)
la tradition de M.
sacrée, c. 17, Littré VI, 392, 9 sq.

«Le diaphragme n'a point de


le bien ou le mal qui survient».
[se. ) (= Grense-

cavité où recevoir
Pour l'omission d'un premier
6. (ici devant

la particule est exprimée dans un second membre (ici


alors que ),
), voir Kuhner-Gerth, Ausfùhrliche Grammatik ..., II 1, p. 249
(«attestations rares et douteuses»). L'omission est probablement
accidentelle; cf. supra, p. 215 (= n. 8 de la page 149).

P. 151.

1. Le sens général est très clair les parties spongieuses et


:

poreuses sont les plus aptes à boire le liquide environnant une fois ;

qu'elles ont bu le liquide qui a pénétré dans toutes les parties


poreuses, elles se durcissent et augmentent de volume car elles ne ;

peuvent rejeter le liquide comme le font les cavités, et notamment


le ventre, qui rejettent chaque jour. Mais la phrase
le liquide
comporte de nombreuses difficultés de détail et a donné lieu à de
nombreuses solutions divergentes issues parfois d'une mauvaise
lecture de l'accentuation des manuscrits anciens (M n'a pas en
150, 17, comme l'indique Ileiberg dans son apparat critique, mais
). Pour la revue des solutions anciennes, voir Littré I, p. 628,
n. 21, et pour la revue (incomplète) des solutions récentes, voir
Radt, p. 113. En s'en tenant à la leçon des manuscrits anciens et

'
en les combinant, on arrive à une solution qui est substantielle-

)
ment analogue à celle de Weber^ p. 237, qui écrit où

. Par rapport à Weber, j'ai


:

opéré trois choix diffé-


,,
rents :

1) Avec Kuehlewein, j'ai adopté la leçon de A qui est


une ledio difficilior (voir Denniston, The Greek Particles ..., p. 111 :

«This is the négative counterpart of »)


et j'ai supprimé
dont l'emploi adverbial paraît impossible aussi bien après où que
après oùSé.
manuscrit A en lisant
2) J'ai suivi le «cette cavité»
M,
et non, à partir de «le ventre lui-même». La leçon
de A implique que l'auteur pense aux parties creuses en général et
non exclusivement au ventre. Selon Radt, p. 113, n. 48, ne
NOTES COMPLÉMENTAIRES 217

' «ventre», et non une «cavité en général», à

,).
peut désigner ici que le

cause de (151, 2) et de (151, 5). En


réalité, si pense particulièrement au ventre, comme
l'auteur
l'indique il ne faut pas exclure d'autres cavités telles que

la vessie, citée justement par l'auteur comme exemple de partie

3) J'ai
et Jones") ,
creuse (cf. 150, 6
151, 6)
conservé
La vessie est une cavité qui évacue (cf.
chaque jour.
la et M (avec Heiberg
leçon des manuscrits
adoptée par Littré et
face à Galien
la majorité des éditeurs qui l'ont suivi (Ermerins, Reinhold,
Kuehlewein, Gomperz, Jones•; cf. Weber'). Littré voit dans la
leçon des manuscrits un de ces nombreux cas où la glose «a
A

expulsé la véritable leçon» (Littré I, p. 631, n. 1). Cela serait


assuré si les manuscrits hippocratiques donnaient la glose de
Galien (). En fait, la leçon de la tradition directe est aussi
rare que celle du Glossaire de Galien. Ce sont deux hapax. Le verbe
est un terme imagé dérivé de «le vase» et
signifie «se vider comme un vase»; comp. l'emploi de
LSJ s.v. Le verbe est, lui, dérivé du terme ionien
«en masse»; il signifie donc soit, comme ici, «se vider en masse»
(cf. l'explication de Galien

complètement» (cf. Ilésychius


ionienne de la famille de

).
en XIX, 98, 6), soit «s'amasser
L'origine
pourrait peut-être plaider en faveur
de la leçon de Galien mais la métaphore du vase est assez bien
;

appropriée ici les parties spongieuses ne ressemblent pas, comme


:

les cavités, à des vases qui peuvent se vider. On conservera donc la


leçon de la tradition directe, car la supériorité du mot glosé par
Galien n'est pas manifeste.
3. Le verbe (151, 6) doit être mis en relation avec
(149, 2). Le médecin, auteur de VAncienne médecine,
savait bien que l'induration de la rate, l'induration du poumon ou
l'induration des seins sont des affections.
4. Avec cette phrase commence un second développement sur
les configurations le premier traitait des propriétés ou des
;

affections des configurations relativement aux liquides à l'inté-


rieur du corps (cf. 149, 11
;150, 16 151, 1
150, 8
; )
; 150, 10
le second traite des
propriétés ou des affections des configurations relativement aux
;
;

vents à l'intérieur du corps (151, 7 152, 8


développement sur les affections causées par les vents est à
Ce; ).
rapprocher du traité des Vents selon qui toutes les maladies sont
causées par l'air. Comparer en particulier l'emploi de
«coliques» ici et en Vents, c. 9, Littré VI, 104, 6 (= Jouanna 115,
11), affection qui est mise en rapport, dans les deux traités, avec
les vents.
Le terme «cuirasse» est employé à partir de la Collection
hippocratique et d'Euripide {Héraclès, v. 1095), par extension, pour
218 ANCIENNE MÉDECINE
désigner la partie du corps recouverte par la cuirasse. Festugière,
p. 68 sq. (= n. 89) a raison de rappeler que le mot ne désigne pas
seulement la partie au-dessus du diaphragme, en citant notam-
ment
où il
le traité de
est dit
.4/,
que le foie s'abrite dans
d'Aristote dans Pari. anim. 686 b 5
c. 10, Littré

,
VI, 18. 3 (= Jouanna 236, 7),
le «thorax», ou la définition
"

supérieure est celle qu'on appelle le «thorax» qui va de la tête à


l'issue des résidus». On pourrait ajouter la définition de Rufus
« La
,
partie

,
d'Éphése, Du nom des parties du corps 11

«car nous appelons «thorax» (tronc) non


seulement l'espace qui s'étend depuis les clavicules jusqu'aux
hypochondres, mais tout l'espace compris entre les clavicules et
:

les parties honteuses». Ces définitions théoriques étant rappelées,


il reste que dans le traité de l'Ancienne médecine l'expression

suppose que désigne au sens restreint la «cavité


d'en bas» (= le ventre), tandis que désigne, également dans
un sens restreint, la «cavité d'en haut» (= la «poitrine»), ce qui
correspond au sens usuel de thorax en français. Festugière n'a
donc probablement pas raison de reprocher à Littré, pour ce

.
passage, sa traduction par «poitrine».
5. Gomperz ainsi que Heiberg, suivi par Festugière et Jones^,
ont choisi le passif

mais

en
,
Le sujet de
de .\™" (=«si la partie creuse n'a
pas été assez remplie»), alors que tous les autres éditeurs, y
compris Kuehlewein, ont adopté la leçon de M, l'actif
Contrairement aux indications de Heiberg dans son apparat
critique, le manuscrit A n'a pas de première main
comme le notait déjà Kuehlewein dans son
apparat critique. L'archétype de .\ M avait donc une forme active
--. est («le vent»), à tirer de la
,
phrase précédente même sujet à sous-entendre dans la phrase
suivante pour et
;

comp. 152, 8 sq. ;

C'est l'air qui, par ses mouvements à l'intérieur du corps, cause


... .
des perturbations et des affections.
Étant donné que cet air est mis en relation au c. 10, 130, 13
avec la prise des aliments, F. Steckerl («Plato, Hippokrates, and
The Menon Papyrus»..., p. 175 sqq.) rapproche ces passages de
VAncienne médecine du compte-rendu de V Anonyme de Londres sur
la doctrine d'Hippocrate (selon .\ristote), où les maladies sont

attribuées à l'air produit par les résidus de la digestion (éd. Diels


V, 35 sq. « Hippocrate
: dit que les vents sont cause de la
maladie»; VI, 11 sqq. «A partir des résidus montent des vents,
:

qui une fois montés, causent des maladies»; cf. aussi VI, 31-33; et
il voit dans ce traité l'œuvre d'Hippocrate lui-même ou de l'un de

ses disciples; voir Notice p. 82, n. 3. Le rapprochement est trop


ponctuel pour être décisif. S'il y a un traité à rapprocher du
NOTES COMPLÉMENTAIRES 219
compte-rendu de VAnonyme de Londres, c'est bien le traité des
Vents; voir J. Jouanna, Hippocrate, t. V. Des vents, De l'art...,
p. 39-47.
L'accusatif de M est une lectio difficilior par rapport
au
6.
nominatif pluriel
singulier () ()
de la vulgate ou au nominatif
de A. L'accusatif dépend de ...
à
tirer de la phrase précédente. Le pluriel de se rencontre neuf
autres fois dans la Collection hippocratique voir, par exemple,
Prorrhétique H, c. 40, Littré IX, 68, 20
;

.
P. 152.

1. Le complément introduit par a donné lieu à de


nombreuses interprétations et de nombreuses conjectures. Le
texte des manuscrits anciens signifie «comme dans les égorge-

.
ments » (A, qui donne le substantif composé non attesté
ailleurs) ou « comme chez les égorgés » (M). On ne voit pas comment
regorgement peut causer des «pléthores». La conjecture la plus
proche de la leçon des manuscrits est celle de Coray
(«les parties obstruées»), de Coray (p. 173)
s'appuie sur d'autres passages de la Collection qui mettent en
rapport les obstructions avec les engourdissements et les plé-
thores : Régime dans les maladies aiguës (App.), c. 6, Littré II,

410, 1-5 (= Joly c. 9, 72, 1-5); Maladies I, c. 20, Littré VI, 178,
22-180, 3 (=Wittern 56, 15-58, 1) et Maladies des femmes II,
c. 137, Littré VU
310, 19-20.
I,

)
2. Également, selon l'auteur des Vents, c. 9 (Littré VI, 104,
8 sqq. =
Jouanna 116, 1 sqq.), lorsque l'air heurte des parties du

.
corps qui sont molles, il cause des souffrances. La conjecture de
à la place de des manuscrits a été faite
indépendamment par Coray (p. 176) et par Littré qui s'appuient
tous deux sur 152, 9 Cette correction, tout en étant
possible (cf. par exemple Polybe 18, 46, 15) ne s'impose pas. Le
verbe est très correct (cf. par exemple Polybe 3, 19, 5 ou
[Aristote] Probl. 915 b 18); et les deux passages du texte que l'on
rapproche ne sont pas exactement identiques dans le premier, :

.
c'est l'air en mouvement qui heurte la partie du corps; dans le
second, c'est la partie du corps immobile qui résiste à l'assaut de

,
l'air. On peut donc avoir deux verbes différents

deux des hapax dans la Collection hippocratique.


4. Pour le sens de comp. 149, 8 8è
qui sont tous —

..
5. La correction de en faite par A^ a été adoptée
par Ermerins (p. 48) qui remarque que les Grecs disent normale-
ment et non Ermerins a été suivi par
Reinhold mais toutes les éditions modernes à partir de Kuehle-
;

wein éditent Cette expression est effectivement


attestée dans quelques autres passages de la Collection voir Index ;

Hippocraticus III, p. 492 a {s.v. II 2).


220 ANCIENNE MÉDECINE
P. 153.

et .
3. Dans les éditions anciennes du xvi^ au xix^ siècle, et même
dans certaines éditions modernes, un est ajouté pour relier
Mais le style asyndétique de toute cette
,
énumération, où il n'y a pas un seul

)
doit être conservé.
4. Il faut connaître en quoi les diverses espèces de configura-
tions du corps diffèrent entre elles relativement aux effets subis
sous-entendre ;
), (
(après fi
il faut cf.
quelques lignes haut
plus
pour que, connaissant exactement les causes de chaque
effet subi reprend évidemment et non
on puisse s'en préserver correctement. La méthode du
médecin est toujours la même elle consiste à connaître les causes

,—
:

des effets subis par le corps pour y remédier en s'opposant à la


cause. Comparer la fin du c. 20, 148, 2 sq. '

5. .A.près
.
et celle du c. 21, 148, 17-19

avoir traité des configurations (), l'auteur


traite des qualités
ces
().
deux développements au début du
Il suffitde se reporter à l'annonce de
c. 22 pour constater que

dépend de
Le fait que
,
forme un tout et que le
pas, contrairement à l'interprétation traditionnelle
génitif

«chacune des humeurs prises en elles-mêmes».


(qui annonce [ '])
soit placé
apparemment en troisième position du groupe s'explique en fait
:
n'en dépend

parce que est senti comme une unité l'expression «les ;

humeurs prises en elles-mêmes d est parallèle et s'oppose à «leurs


relations de parenté entre elles»
6. Le développement sur les
... ( est bref, car
...

il
).
a déjà été
partiellement traité, comme l'auteur le reconnaît explicitement.
Pour l'effet de la force des humeurs sur l'homme, voir les c. 14 et
19. L'infinitif parfait passif doit s'entendre soit comme un
infinitif d'ordre, soit comme un infinitif dépendant d'un à tirer
de la phrase précédente.

.
7. Pour la transformation par mélange, voir c. 19, 144, 4 sq.
* Le composé est absent
des autres traités de la Collection hippocratique à l'exception du
Régime où il est attesté dix-sept fois.
8. L'auteur s'appuie implicitement, pour déduire le passage du

du
famille de )
(«vin doux», famille de en )
doux à l'acide, sur l'observation de la transformation du jus de
raisin en vin, puis en vinaigre, ou, pour prendre les termes grecs,
(«vinaigre»,
sur ce point, voir Jones^, p. 90 et G. E. R. Lloyd,
;

Polarity and Analogy. Cambridge, 1966, p. 355.


9. Le texte de cette phrase, qui n'est pas sûr, est l'objet de
nombreuses discussions. Elles portent essentiellement sur les
NOTES COMPLÉMENTAIRES 221

.
divergences concernant
et accessoirement sur

Les manuscrits
leçon contraire, l'un
A et
les adjectifs signifiant «utile» et «inutile»
la

M
variante

phrase une
donnent par deux fois dans
(à l'homme),
donnant l'adjectif «approprié»
quand l'autre donne l'adjectif «inapproprié» (opposer d'un côté
vel

la
vel

A et M et d'un autre A

(().
M). Cela a entraîné des solutions fort divergentes :

la vulgate, suivie par plusieurs éditeurs modernes dans la mesure


où elle était
Gomperz, Heiberg,
confirmée par le

)
témoignage de A (Littré, Ermerins,
Jones'', Festugière), oppose l'humeur acide qui
est «la plus inappropriée»
douce qui est «la plus appropriée»

) Mais, comme
l'humeur douce se transforme d'abord en une humeur acide, ces
deux humeurs sont apparentées (cf.
. . .

il paraît donc

impossible qu'elles aient des effets contraires sur l'homme. Aussi


certains éditeurs ont harmonisé en combinant les leçons des
manuscrits et en choisissant dans les deux cas soit
et l'humeur

(Jonesi) soit (Reinhold, Diller"). L'humeur douce n'étant


jamais considérée dans le traité comme une humeur inappropriée,
on choisira, avec Radt, p. 115 sq., la solution de Reinhold et
Diller^
Reste

Selon LSJ, s.v.


comme le génitif de
,,
problème des variantes
le

, ,
A
M. Si l'on part de la leçon de A avec la double
A*

accentuation, il y a une incertitude sur la nature et le sens du mot.


le paroxyton

,
interprété
thaï which is iaken or ealen, est

,
une falsa ledio pour gén. de , laking of food,
food. Le substantif ', au sens de «aliments», est
employé une autre fois dans la Colleclion hippocratique en
Aphorismes H, 33, Littré IV, 480, 6 (= Jones IV, 116, 9). Mais on

entendre
il

) {se.

est naturel de comprendre ...


)
ne voit pas ce que vient faire ici un substantif. De même qu'il faut

. (se. )...
[se. Le problème consiste ici à comparer
les humeurs entre elles (cf. au début du chapitre
terme est donc vraisemblablement un adjectif modi-
Le ).
).

.,
fiant (se. L'adjectif se rencontre deux
fois dans la Colleeiion hippoeratique : Affeelions internes, c. 3,

Littré VII, 176, 14 sq.


, et
Littré VI, 260, &

.[],
Affections, c. 50, 1

II a clairement le sens d'« utile». En


conséquence, le passage signifie «l'humeur acide doit être la plus
:

appropriée des humeurs restantes qui sont utiles». Ermerins, suivi


par Reinhold, préfère supprimer
d'une glose marginale de
[]
voyant là les restes
Dans ce cas il faudrait écrire
.
222
de
Si l'on part leçon de M
la
ANCIENNE MÉDECINE

Kuehlewein l'infinitif consécutif


,
participe présent actif
qui n'a pas de sens dans le contexte, on peut conjecturer avec
(«la plus utile à
administrer»). L'idée d'un traitement à appliquer paraît impor-
tante.La conception juste sur la relation de parenté entre les
humeurs (ici la relation de filiation entre l'humeur douce et
l'humeur acide) permet d'en déduire une hiérarchie des valeurs
dans la thérapeutique.
Pourla répétition de dans le traité, cf. 119, 8 sq. et 150, 17-
151, 2; et dans le reste de la Collection hippocratique, voir Index
Hippocraticus, s.v. III et Addenda ad loc. pour la répétition de
;

.'
avec un intervalle très bref, comparer en prose Isocrate, Pana-
thénaique, 214
Euripide, Hippolyte,

la
Pour
10. , 960 sq. .
comp. c. 22, 149, 16
...
...
et en poésie

Nouvelle allusion à
méthode analogique qui consiste à éclairer les phénomènes
internes par comparaison avec les phénomènes visibles.
;

11. Pour terminer l'auteur insiste sur la validité de sa méthode


de recherche qui "doit permettre d'autres découvertes (comparer
la fin d'Airs, eaux, lieux, c. 24, Littré II, 92, 12 sq. = Diller 82,
14 sq. «en partant de ces observations, on pourra juger du
:

reste sans crainte de se tromper»), et il clôt son ouvrage par


une maxime de portée générale qui dépasse le strict domaine
de la médecine mais qui est conforme à l'idéal moral du méde-
cin hippocratique (comparer Épidémies I, c. 5, Littré II, 634,
8 sq. =
Kuehlewein I, 190, 3 «être utile ou ne pas nuire»).
:
INDEX VERBORVM

1,
21, 2.
1
{vel
9, 3; 4 (..).
22,
)
3; 12, 2 (ter).
9,
9, 3 20,

1.
; 2.

9, 4 ; 12, 2. 6, 1

7, 1 16, 6.
7, 2 (. .). 20, 5.
1, 1 ; 6, 3 (..) 9, ; 1 : 15, 1, 3.
10, 4 19, 5. ; passim.
2, 2 (ter). 3, 6.
10, 4. 1, 2 14, 4 19, 6
{vel
2; 14,
) 6;
1, 3 (. .)
22, 4;
; 4, 2; 12,
24, 2; 2
(..); 23,
20, 2.
;

1 ; 24, 1.
; 1 ;

(conj.). passim.
9, 3. 2, 2 16, 4 7.; ;

1, 1 ; 3, 4 (..) 11, 1 ; 14, 3 (..).


(..) ; 16, 1 (..) 20, 2; 21,
; 14, 4 5 17, 2 ; ; ; 19, 2 ;

2. 24, 1.

6, 3 ; 17, 2 ; 19, 3 ; 20,4; 13, 1.

21, 2; 23, 1. 9, 2 (..) ; 15, 3 ; 16, 1 ; 17,


10, 1. 3.
8, 2 ; 21, 3. 9, 2 (conj.).
14, 3. 1, 1 ; 8, 2 (..); 9,3;
1, 3 ; 2, 3 (bis). 4 (bis); 5; 5 (..).
7, 2; 18, 4. 9, 2 ; 5 ; 12, 1

3, 4 5 ; ; 5, 5 ;
12, 2 9, 4.
(..); 14, 5 (bis)\ 6 (bis) ; passim.
19, 5; 20, 4. passim.

1. Les termes précédés d'un astérisque ne sont pas recensés

dans les dictionnaires L.S.J. et Bailly. Cet index a été établi par
Laurence Villard.
. . . . . . .

224 ANCIENNE MÉDECINE


14, 2 ; 20, 3. 1, 3; 3, 3; 3 (..).
3 2, 2 3, 2 4,
1, ; ; ; 1 ; 10, 18, 3.
1; 15, 2; 19, 3; 22, 7. 3, 4 ; 10, 2 ; 16, 7;
6, 3. 17, ; 19, 2 ; 5 (bis) ; 20, 5.
13, 1 22, 8.
15, 4. 22, 8.
21, 1. 10, 3.
10, 3 ; 4. 11, 3; 20, 4.
11, 1. 15, (. t.).
2, 3. 1, 2.
11, 1. 4, 1

22, 6. 19, 1 (..) ; 5.


11, 3. 16, 2 ; 22, 7.
22, 3 (ter).
11, 2
14, 2.
; 21, 2. 9, 5, 2

17, 2
1
;

;
16, 6
13, 2
20, 3.
(..)
(..);
; 24, 2.
14, 6.

1, 3 (. .) ; 9, 3. 15, 4.
22, 7. 2, 2 ; 12, 2 ; 13, 2.
9, 4. 19, 7.
1, 2. 2, 2.
14, 5 ; 20, 3 ; 24, 1 19, 5.
(.., bis) ; 2. 18, 4.
22, 8. 14, 4 ; 5 ; 16, 1

22, 8. 14, 6.
8, 2. 9, 2.
22, 8. 11, 2.
14, 3 (. .). 11, 1 ; 12, 1.

7, 2 ; 14, 3 ; 20, 6. 3, 4 ; 9, 4.
3 1, 1 ; 3, 1 ; 2 ; (1er) ;
11, 1 (..) ; 12, 1 (..).
5 ; 6 6, 2 3 7,
; 2 (bis) ; ; 1 ; 9, ; 3, 3.
4 ; 2 11, 2 3
5 (bis) 10, 1 ; ; ; ; : 22, 7.
13, 1 (bis) 14, 1 2 (bis) 3 ; ; ; 1, 3 ; 15, 1

(bis); 4 (quinquies) ; 5; 6 13, 3 ; 19, 5.


(ter) 15, 1 ;4 quater) 16, 2 ; ; 8, 2 (..) 15, ; 2.
(ter); 17, 2; 19, 2; 5; 7 22, 7 (..).
(bis) 20, 1 (ier) 2 3 (bis)
; ; ; ; 3, 5.
4 (ter) 5 21, 3 22, 1 (bis)
; ; ; ; 2, 3 (bis) ; 12, 1

4; 24, 1. 22, 7 (conj.).


16, 6. 19, 5.
3, 4. 14, 1

passim. 3, 5.
22, 8, 9. 5, 1 (..); 24, 1.

6, 1 15, 3.
22, 8. 22, 1 ; 6 (ter) ; 8.
22, 8. 13, 1.

3, 3. 9, 3 ; 19, 6.
1, 1 ; 14, 3. 10, ; 2; 3; 4 (bis).
INDEX VERBORVM 225
10, 4; 11, 2. 10, 3.
19, 7. 13, 2.
5, 4. 24, 2 (bis).
3, 4 ; 5, 1 3, 1 ; 19, 7 ; 21, 2.
6, 1. 22, 8.
3, 5 ; 6, 2 ; 8, 2 (bis) ; 13, 14, 2.
2 ; 3 ; 14, 1 ; 6. 8, 1

14, 6. 9, 1 ; 14, 3 ; 20, 5.


12, 2. 19, 1.

1, 1 ; 2, 1 ; 3, 1 ; 3 ; 5, 1 ; 7, 16, 2 ; 8.
1 ; 3 ; 10, 3 ; 4 ; 16, 7 ; 20, 1 13, 1.

5, 1. 13, 2.
18, 2. 13, 1 ; 20, 5.
19, 5. 3, 3 ; 8, 2.
12, 1 (bis). 19, 2.
3, 4 ; 5 ; 5, 4 ; 8, 2 ; 9, 1 11, 1.

(bis); 2; 12, 1 (ter); 13, 1 1, 1 ; 23, 1

(bis). 3, 5.
^

16, 7. 3, 4 ; 6, 2 ; 14, 5 ; 6 ; 15,


11, 3. 2 ; 20, 3 ; 4 ; 21, 3.
4, 2.
9, 1

9, 5.
9, 4 ; 12, 2 (bis). 9, 4.
8, 2 (bis) ; 19, 1 passim.

& 8.
22, 3.

2, 3
17, 3
3, 5
; 3, 3
;
;

6,
22, 6.

;
1

17, 3
; 14, 6.
(. .) ; 22,
passim.
1, 3

21, 3.
3, 3.
passim.
1, 3
;

15, 2 ; ; 20, 2 ; 4 ;

16, 2. 14, 3 (bis); 4 ; 24, 1

16, 8 ; 19, 5 ; 21, 1 (bis).


passim. 19, 1.

14, 1 1, 2 ; 2, 3 ; 10, 3.
5, 4 5 7, 2 13, 2 ; ; ; ; 3 ;
2, 3.
14, 3 ; 16, 8 21, 2. ; 4, 2 ; 5, 2.
1, 3. 20, 2.
21, 2 (. .). 1, 1 ; 20, 1 ; 2.

19, 2 ; 22, 6. 9, 2.
5, 5. 4, 2.
8, 2. 22, 4.
14, 1

10, 4.

8 passim.
2, 2 (..).
16, 6. 3, 4 ; 9, 2 5 ; (ter) ; 10, 4 :

5, 2. 13, 1 ; 16, 8.
. .

226 ANCIENNE MÉDECINE


10, 4 (bis). 13, 2 ; 3 (conj.).
16, 5. 16, 7.
6, 2. 19, 1.

13, 3. 3, 6.
22, 5 (bis) ; 6. 1, 3 ; 9, 3 ; 19, 6 ; 22, 9.
() 1, 3 ; 2, 3 (bis) ; 3, 1 ; 5, 1, 2.

4; 5; 9, 1; 3; 11, 1; 2; 2 9, 3; 11, 2 (..).


(..): 12, 2; 13, 1; 15, 3 10, 3.
(..); 16,2 (..); 2; 8; 19, 10, 3.
3 20, 1 2 3 21, 3 22, 1
; ; ; ; ; ;
2, 3 ; 3, 3 (bis) ; 4 ; 5, 1 ;

3; 23, 1. 4; 9, 4; 10, 4 20, 2


; ; 3 22, ; 1.

passim. 18, 2 (bis) ; 19, 2 ; 5.

1, 3 6, 1 9, 4 13, 2 14,
; ; ; ; 18, 4 ; 19, 1 ; 2.

6; 18, 1. 5 (bis) 5, 4 5 7, 2
3, ; ; ;

1, 1 2 (bis). ; (bis) 8, 2 (bis) 9, 2 (..)


; ; ;

2, 3 (bis). 10, 2 4 12, 2 13, 1


; 14, 2 ; ; ; ;

19, 5. 3 6 (..) 19, 6 20, 4 21,


; ; ; ;

14, 1 ; 2 ; 16, 1 ; 19, 3. 3 22, 2 8 (bis) 24, 1 2


; ; ; ;

passim. (bis).

3, 3. 5 13, 3 14, 1 4
3, 4 ; ; ; ; ;

18, 3. 6 ; 15, 3 4 16, 1 8 17, 2 ; ; ; ; ;

16, 7. 3 ; 19, 4 5 6 7 20, 4 22, 1 ; ; ; ; ;

6, 2 (bis) 7, 2. ;
(bis); 24, 1.

3, 3 (bis); 4; 6; 7, 1 16, 1

(bis) ; 8, ; 13, 1 ; 2. 2, 2 (..) ; 7, 2 (..) ;

3, 1 (bis) ; 5, 2. 10, 4 (..); 20, 1.

3, 3 11, 3.
7, 2
;

;
5,
19, 7.
1 ; 13, 2. 1, 1 ;

{ -)
10, 4.
10, 4.

7, 1.
5, 3. 10, 4.
16, 5. 10, 4 (..).
18, 2.
3, 5 (..).
3, 5.
22, 9 (..). 16, 2 (..) ; 18, 2.
22, 9. 12, 1 ; 2.
22, 1 (..). 20, 6.
22, 1 22, 8.
2, 3 ; 20, 4 (bis). 16, 7.
> / > . . 1
16, 4.
16, 6.
1, 2 (bis) ; 7, 3 ; 10, 2 ;

14, 1 ; 6 15, 3
; ; 20, 6 (bis) ;

23, 1 (bis).
13, 2.
5, 5.
16, 3 ; 4 ; 7 ; 18, 3.
INDEX VERBORVM 227

4, 2. 13, 2 ; 15, 4 ; 16, 8.


14, 6. 5, 5 ; 9, 2.
10, 2. 20, 6.
passim. 9, 2.
7, 3 ; 12, 2 ; 15, 1 ; 19, 6 14, 3 4 (bis) ;16, ; 1 ; 20,
(bis) ; 23, 1 ; 24, 1 3 : 6 (bis) 22, 1 6. : ;

3, 4 (bis) ; 20, 6. 22, 7 (..).


14, 1 9, 3 (bis).
19, 4. 5, 2 19, 1
;

16, 3 4. ; 19, 5.
passim.
(voir
20, 3
). 24,
17,
9, 5.
10, 4.
1

,,
; 1

1, 1 ; 7, 2 ; 10, 2 ; 14, 14, 1

2; 5; 6. 22, 6.
1, 3 (bis); 10, 2 (bis). 22, 6 (..).
passim. 8, 2 9, 5. ;

2, 3 7, 2 ; ; 9, 5 (.1.)\ 2, 2 (bis).
13, 3 14, 1
; 2 ; ; 3 (bis) 5 ; ;
3, 3.
18, 2 19, 3 20,
; ; 3 (bis) 21, ; 18, 2.
3 22, 6 23, 1
; ; ; 24, 1 2, 2 ; 7, 1 ; 12, 2 (bis) ;

7, 2. 15, 1.

9, 5 ; 10, 2 ; 15, 4 ; 16, 24, 1.

1; 6. 14, 1

22, 8. 10, 2 ; 14, 6 ; 15, 4 ; 22, 6 ;

16, 4. 23, 1.

16, 7. 15, 4 ; 22, 3 ; 24, 2.


24, 2. 9, 4.
22, 6. 9, 4.
2 22, 1 ; ; 5. 22, 4.
14, 5 (..). 1, 3 ; 10, 1

22, 5 (..). 13, 1

3, 3. passim.
8, 2; 2 (.1.)\ 9, 2 passim.
(bis); 10, 1. passim.
19, 1. 22, 5.
22, 2; 3; 4. 22, 5 (bis).
5, 2. 11, 1.

20, 1. passim.
18, 1. 16, 2.
7, 2. 2, 2 ; 20, 1

22, 7. 2, 2.
22, 8. 10, 3.
3, 5 (..). 22, 8 (..).
passim. 8, 2.
22, 8. 5, 2.
22, 8. 22, 9 (..).
. . . . ..

228 ANCIENNE MÉDECINE


3, 5 ; 4, 2 ; 5, 4 ; 5 ; 7, 6, 1 ; 13, 1 ; 14, 6.
2 (bis); 11, 1. 8, 2.
22, 1. 10, 3; 11, 2.
4, 2. 10, 3 (..) ; 4 ; 15, 2.
19, 1 ; 22, 5 (. ., bis). 3 9, 1 2, ;

14, 2. 6 4, 2 7, 2.
3, ; ;

22, 2; 3; 5 (bis). 1, 2 2, 1 (quinquies) 2 ; ;

4, 1 (..) 2 3 3, 1 2 3 (bis); ; ; ; ; ;

9, 5. 4 6 5, 1 3 4 7, 1 8, 1 3
; ; ; ; ; ; ; ;

24, 1 (bis). 9, 3; 14, 3 (bis).


20, 3. 22, 1 2 (bis) 3. ; ;

10, 1 ; 2. 22, 7.
24, 2. 22, 7 (..).
6, 2; 3. passim.

22, 8.
15, 4.
14, 6.
1,

22, 9.
1 3 ; ; 2, 2 ; 10, 4.

'
1
{
,-,- [
,-,-0
15,
3,
5, 4.

(conj.)
'

1
5

; 3
;

•"
13, 2.

;
;

16,
2, 3
1
, ;
;

5
4, 2
; 22, 2
-, -6)
-,-)
; 14, 4
6 ;
1,
1.

8
:
;

9, 5 ; 13, 3 ; 21, 3. (.!.).


9, 3.
19, 2.
16, 3 18, 2.

U
;

13, 3 ; 15, 2. 13, 1.


passim. 11, 1.

3, 5 (. .). 2, 1 ; 2 ; 3 ; 3, 1 ; 2 ; 4 ; 4,
14, 6. 2 ; 5, 1 ; 3 ; 7, 2 ; 8, 3 ; 12, 2 ;

3, 1 ; 3 2 (..) ; 4, ; 6, 3 13, 1 ; 14, 3 (bis) ; 24, 2.


(bis) ; 8, 2 (ter) 2 (..) ; ; 13, 3, 6.
1; 14, 6; 15, 4; 19, 1 (..); 11, 1.

20, 3 ; 21, 2. 8, 1

14, 5.
3, 4 ; 5 (conj.).
19, 1

18, 2. passim.
22, 4 ; 23, 1 fi 8, 2; 23, 1.

7, 1 ; 9, 2 ; 21, 2. 15, 3 (conj.).


14, 2. 3, 5 ; 14, 3 (bis) ; 17, 2 ;

2, 2 (bis) ; 3 ; 3, 1 ; 12, 1 ;
3 ; 19, 3 ; 20, 1

13, 2 ; 14, 1 (bis) ; 2 ; 6 ; 16, 9, 4; 18, 1 (..); 2; 19, 2.


6; 17,2. 5, 2 ; 10, 1 ; 14, 6.
3, 3; 4, 2; 5, 2; 6, 3 (..); 14, 6 (bis) ; 16, 1 ; 19, 6.
7, 3 (conj.); 12, 1; 14, 2 12, 2 (bis).
(..); 16,3; 17, 1 (..); 19, 10, 1 (..) 14, 5 18, 2. ; ;

5; 21, 1; 22, 3 (..). 10,2; 11,3; 18, 2; 21, 2;


16, 6 (..). 22,6.
16, 6. passim.
INDEX VERBORVM 229

22, 8. 3, 3 8, 2. ;

19, 7. 9, 2 (..).
5, 1. 22, 7.
3, 4 2 (bis) 18, ; 8, 2 ; 9, ; 20, 2.
2; 20, 2; 21, 2; 22, 9 (bis). 20, 5 (..).
11, 1. 3, 4 (ier) ; 5 (bis) ; 4, 2
11, 1 ; 19, 7. 5,4(bis);6,3;S,2;2(.l.)
1, 3 (..). 9, 1 ; 5 ; 13, 1 ; 14, 3 (bis) ; 5 ;

6 6 ; (secl.) ; 16, 7 (conj.) ; 17,


1 ; 19, 1 ; 22, 8 (bis) ; 9.
8, 2 (..).
22, 1 ; 8. 3, 4 9, 2 4; ; ; 12, 1 ; 14,
1, 1 ; 3, 4 ; 5 ; 6. 1 ; 16, 4 ; 7 (v.l.) ; 22, 9.
6, 2 14, 4 6 20, 5 22,

)
1
12, 2. ; ; ; ;

20, 5. 8, 2 (conj.).
{vel 1, 1 ; 5, 1 ; 8, 2 ;
19, 5.
16, 3; 4; 22, 3.
14, 3.
9, 5 ; 15, 1 ; 20, 1

16, 3 ; 6. 19, 5.
17, 1 ; 19, 4 ; 5 ; 6. 20, 1.

1, 1 ; 10, 4 ; 13, 1 (ter) ; 2 14, 1.

(bis) 3 14, 3 15, 1


; ; ; ; 2 9, 4.
(bis); 3 (sexies); 4; 16, 1 passim.
(ier) 2 4 17, 1 2 (quater)
; ; ; ; ;
1, 3 11, ; 1 ; 2 ; 13, 1 ; 22,
3; 18, 2; 19,4 (bis); 6 (ier). 6 (?, ..).
16, 1. 21, 2.
8, 1 12, 1 ; 16, 2 ; 19, 5.
7, 2. 10, 1 ; 2 ; 21, 3.
3, 4 ; 7, 1 13, 2 ; 19, 5 ; 20, 6.
10, 4. 3, 4 ; 9, 2 4 ; ; 5 ; 20, 6 ; 22,
19, 5 ; 22, 7 ; 23, 1 8.
6, 3 ; 3.
17, 2.
4, 1 ; 7, 1 ; 19, 5.
13, 3; 19, 7. 2, 1 ; 10, 1 ; 12, 2 (bis) ;

2,3('./.;;3;4, 1 ; 9, 5 14,3.
21,2. 1, 2 ; 3, 1 ; 2 ; 5, 1 (bis) ;

16, 7. 4 ; 6, 3 ; 7, 1 ; 8, 1 ; 2 ; 9, ;

13, 1. 14, 2 ; 15, 2 ; 16, 2.


1, 1 ; 2 (bis) ; 2, 1 ; 3, 1 :
3, 3.
2 ; 6 ; 5, 1 fbis) ; 2 ; 3 ; 8, 3 : passii
12, 2; 20, 1; 2 (ter). 10, 4.
7, 1 ; 9, 4 (bis) ; 5 ; 20, 1 : 16, 6.
2; 3; 21, 2. 3, 5.
2, 1 ; 9, 2 ; 11, 1. 2, 3 ; 9, 3 ; 10, 1

20, 1 20, 1 ; 2 ; 22, 3.


. . . . . . . . .

230 ANCIENNE MÉDECINE


11, 2. 11, 1.

10, 3. 1, 1 (bis) ; 3 (ter) ; 2, 2 ; 3


19, 5. (quater); 5, 1; 3; 11, 2; 3
1, 1 ; 2, 2 ; 9, 4 ; 5 12, 2 : 15,1 4 ; ; 16, 6 ; 17, 1

(bis) ; 22, 7. 20, 1 ; 2 (bis) ; 22, 1 (bis)


15, 2. 24, 1 (bis).
8, 2 : 19, 1 23, 1

9, 4 ; 19, 1 ; 5. 19, 6.
16, 5 : 6 ; 18, 2 (bis) ; 3 ; 19, 1.

19,

(bis)
;
1

{vel
;
;

17,

2 15, 1 2 17, 3.
5.

)
3 (bis) 8, 2 9, 4 13,
1

3, 6 5, 3 7, 1

; ;
;
;

;
;

1 :
1,
2
15, 2.
9, 2; 11, 2 (bis).

:
12, 2
1

15,
; 5,
1
3
;
;

16,
14, 3.
7, 2 (..)
1 (..)
;

;
13
20
1, 3 (..): 22, 6. 1.

9, 2 10, 1 ; 2, 1 ; 24, 1

3, 5 13, 3 14, 4 6 ; : : 16, 4 ; 21, 3.


(..); 18, 4; 19, 1. 16, 3 ; 21, 2.
16, 6 22, 4 23, 1 ; ; 6, 3 ; 9, 2 : 13, 1 ; 2 ; 14
8, 2. 3 ; 4 : 5 : 17, 3 : 20, 5 ; 6.
18, 2 : 20, 6. 14, 4 (bis); 16, 1 (bis)
22, 7 (bis). 2 ; 19, 2.
16, 6. 19, 5.
16, 6 (. .). 13, 2 ; 19, 2 (..).
10, 3 ; 4 ; 11, 1 (bis) ; 13,
1 : 22, 6 (bis); 7; 23, 1.

10, 4 ; 22, 1 ; 2 (ter) ; 5 ; 7.


15, 1 3, 5 : 6, 2 ; 8, 2 ; 14, 1 ; 6.
21, 3. 22, 6.
14, 6. 9, 5 ; 21, 1 ; 22, 1 : 23, 1

18, 2. (bis).
3, 5 ; 14, 3. 22, 6 ; 7 ; 8.
8, 2 ; 13, 1 ; 2. 1, 1 (bis) ; 2, 3 ; 4, 2 ; 6,
10, 4. 3 ; 14, 6 : 16, 7 ; 20, 4 ; 22, 2 ;

14, 3. 4 ; 5 6 (bis) 8 24, 1


; ; :

5, 4 ; 5 ; 16, 1 ; 19, 3 ; 6 ; 6 3, 6 6, 2 2 (..) 3 12, : ; : :

(. .). 1 : 2 16, 3 7 18, 2 20, 6


; ; ; :

3, 5 ; 8,2. (bis).
18, 4 (. .). 10, 3 ; 4 ; 11, 1 ; 2.
5, 4 (..); 16, 1 (..); 22, 1

19, 3 (..); 6; 6 (..). 3, 4 4, 2 9, 4 5 10, 3


; ; : ; ;

9, 4. 14, 1 ; 15, 4 16, 8 19, 6 23, ; ; ;

9, 4. 1 (bis).
19, 2. 1, 1 ; 9, 5 ; 17, 2.
15, 4 (..) ; 22, 4. 16, 6.
8, 2.
8, 2; 20, 1 ; 3.
1, 1.

16, 3 ; 7. passim.
INDEX VERBORVM 231

9, 2. 16, 6.
5, 4. 10, 3.
22, 5. 10, 3.
9, 2 (..).
passim.
10, 2 13, 2 ; ; 19, 3 ; 4
(bis); 6; 24, 1. 19, 5.
22, 7. 1, 1 ; 6, 2 ; 13, 1 (ter) ; 2 ;

14, 6 ; 17, 3 ; 19, 4. 3 ; 14, 3 ; 15, 1 ; 2.


1, 3 ; 19, 5. 15, 4.
16, 1. 24, 1 (..).
5, 5.
9, 3 (bis).
11, 1 ; 19, 1 (bis) ; 20, 2.
passim. , , passim.
passim.
1, 2 4, 1 9, 5 10, 3 ; ; ; ; 15,
,, 2, 1 ; 2 ;
14,
4,
1

2
;

;
16,
8, 3
1

;
; 18,
15,
1.

1 16, 5 18, 3 19, 4 7


; ; ; ; ; 22, 19, 1 ; 22, 8.
8. 20, 1 (..).
passim. 1,1 3
6, 1 9, 3
; 13, 2, ; ; ;

19, 5. 1 ; 2 (ter) 15, 4 20, 1


14, 1 ; ; ;

3, 5 ; 5, 4 ; 13, 3 ; 14, 4 ; (bis) 3 (bis) 4 (..) 4


; 2 ; ; ; ;

( )
16,

18, 3.
1

{19, 7.
; 18, 2

10,
; 19,

15, 4

2; 11,
1 ; 5

;
;

17,

1.
6.

2 ;
6; 21, 2; 3 (bis); 22,1; 1
(..); 23,
18, 2.
5, 3; 11, 1; 12, 2; 13, 3;
2 22, 2 24, 1
1 (bis).

1 ;
14, 3 ; 15, 1 ; ; ;

14, 1 ; 4 ; 16, 6 ; 17, 2 ; 23, 13, 2; 20, 4 (bis).


1,3; 2, 3; 3, 3; 7, 2; 11, 3
(..); 13, 2; 14, 6; 16, 6; 7
(..); 19, 5 (bis); 20, 2

,
(bis) ; 4 ; 22, 6 ; 7 (bis) ; 8 ;

22, 7. 23, 1.

9, 4. 3, 4 ; 11, 3.
16, 7. \ ; 5,2 (..) b (..) ; ;

22, 9 (..). 6, 2 (..) 19, ; 4.


22, 9. passim.
4, 1 ; 14, 3 ; 16, 1 ; 20, 2 9, 4.
(bis). 5, 3.
2, 3 ; 8, 2 ; 16, 7 ; 23, 1 5, 4 (bis) ; 6, 3 (bis) ; 14,
8, 2 ; 9, 5 (bis) ; 17, 1 ; 1 ; 16, 7.
19, 2 10, 2 ; 14, 6.
1, 1 ; 3, 4 ; 5 ; 6 ; 6, 1 1, 2; 8, 3 (..).
(bis) ; 10, 3 ; 4 ; 14, 2 ; 21, 5, 2 (..) 7, 2. ;

(bis). 1, 2 20, 5 22, ; ; 5.


1, 2 ; 3, 2 (bis) ; 3 (bis) ; 4 5, 1 ; 7, 1

(1er) ; 4, 2 5, 2 ; ; 7, 1 ; 9, 2. 12, 2.
. .

232 ANCIENNE MÉDECINE


3, 6 ; 5, 1 2 (ter) 3 (ter) 3
2, 1 ; ; ;

14, 3 (bis) ; 4 ; 5 ; 16, 7 ; 17, (bis, ..)


3, 1 2 (..) 3 4 ; ; ; ;

2; 22, 8; 24, 1 (ter). (quinquies) 5 (ter) 5 (..) ; ;

19, 5. 6; 4, 1 ri>is>; 5, 1 (..); 3


5, 1 (v.l.); 20, 1. 4 5 (bis) 6, 1 (ter) 2 7, 2
; ; ; ;

3, 5. 3;8,2;3;3Cu./J;9,4;10, 1

10, 1 ; 2. /'fcis^; 2 foisj; 3 C6is> 4 ;

3, 5 (bis). (sexies); 11, 1 ; 3 (v.l.); 12,


20, 1; 23, 1. 2 ; 2 (quinquies)
13, 1 (bis) ; ;

14, 4 ; 20, 2 (..) ; 4. 14, (quinquies)


1 ; 3 2 ;

12, 2 ; 13, 1 ; 20, 1 ; 2 ; 21, (quater) 4 f/er; 5 C/er> 6 ; ; ;

3; 23, 1. (bis) 15, 1 2 (v.l.) 2 3


; ; ; ;

2, 1 ; 22, 8. ru./J;16, 1 (.l.);2(ter);3;


8, 2. 4 fftis;; 5 f'ftis;; 5 (^./.); 6;
, , passim. 7 8 (bis) 17, 2 (bis) 3 18,
; ; ; ;

6o3,b(.l.);b(.l.),5,2,b; 1 2 (bis)
; 3 Cè/s^ 19, 2 ; ;

6, 2 7, 2 (bis)
; 9, 1 (bis) ; ;
(bis) 3 5 (quater) 6 f'o/sj
; ; ; ;

10, 4 14, 5 6 15, 4 16, 3


; ; ; ; ; 20, 1 (bis) 2 r?ua/er; 3 4 ; ; ;

6 7 (bis) 18, 2 4 19, 1 2


; ; ; ; ; ;
(ter) 5 6 (quinquies) 21, 2
; ; ;

5 (1er) 7 20, 2 22, 1 (ter)


; ; ; ; r/er> 3 (bis) 22, 1 (^ftis; 2
; ; ; ;

7 (bis). 3 (quater); 4; 6 f^/er> 8 ;

1, 2 ; 3, 1 ; 2 ; 5, 1 ; 2 ; 8, r/er;; 9; 23, 1 (v.l.); 24, 2


1 ; 16, 7 ; 19, 4 ; 20, 6.
1, 3
2 (..) 3, 6 4,; 2, 2 ; ; ; 1, 2 ; 9, 3 ; 5 ; 10, 1 ; 16, 8 ;

2; 6, 3; 11, 3; 12, 1 14, 2; ; 19, 4 ; 21, 2.


19, 1 20, 1 (ter) 3 (ter) 5
; ; ; ; 1, 2 ; 2, 3 ; 5, 4 ; 10, 1 ; 4 ;

21, 3 22, 3 7 24, 1 ; ; ; 16, 6 ; 7 ; 20, 3 ; 4 ; 22, 7 ; 24,


20, 5. 2.
passim. 10, 4; 19, 1 (bis).
passim. 19, 1.

,,
(,
passim.
,) 10, 4.
passim.

20, 2. 2, 3 (bis) ; 14, 2 ; 22, 1 ;

passim. 23, 1.

2, 3 ('bis; 3, 1 3 4, 1 5, ; ; ; ; 2, 1.
1; 2; 6, 2; 9, 3 (..); 5; 10, 16, 7 ; 17, 2.
1 2; 11, 2; 14, 1;3 Cèis> 6
; ; 8, 2 (bis) ; 13, 2 ; 16,
(bis) 16, 2 17, 3 18, 3 19,
; ; ; ; 3.
5; 6; 21, 2; 22, 3. 22, 6.
21, 3. 14, 4 ; 19, 1 ; 6.
21, 3. 6,2 20, 3.
2, 3 (bis); 3, 4 5 6 (..); ; ; passim.
;

7, 1 14, 2 16, 8 17, 3 19,


; ; ; ; 11, 2 (..); 16, 6;
4 20, 1 4 6 21, 3 22, 2.
; ; ; ; ; 8 ; 18, 3.
10, 4. 7, 1 ; 13, 2 ; 3 ; 16,
passim. 5.
INDEX VERBORVM 233

7, 1 (. .) ; 16, 2. 22, 1 ; 8 ; 9.

9, 5 ; 16, 2 ; 5 (.1.)\ 7; 22, 8 ; 23, 1

)
17, 1 ; 18, 2 ; 19, 3. 3, 4 ; 9, 5 ; 10, 2 ; 14, 6
(bis) 22, 8.
13, 3
6,
10, 4.

1
;

;
20, 3
17, 3.
; 5.
6,3;3 (..)
{ ;

;7, 3 (bis)
3, 4 ; 5, 3 5
;9,3;
; ;

1, 2 (ter) 2, 1 2
(bis) ; ; ; ; 5; 10, 3; 11, 1; 16, 3 (bis);
3, 3 5 (..) 5 4, 1
; 5, 4 6, ; ; ; ; 7 17, 3 18, 2 19, 7 20, 6.
; ; ; ;

3 7, 1 8, 3 (bis) 9, 4 5
; ; ; ; 23, 1

10,4; 11,2; 12,2; 14, 2; 3 5, 3; 5; 14, 4.


6 15, 2 4 16, 1 7 18, 1
; ; ; ; ; 19, 6 (..).
3; 4; 19, 2 (bis); 5; 6; 7 10, 3 ; 22, 4.
(bis); 20, 2; 4 (v.l.); 5; 6 20, 3 ; ; 22, 6.
(bis) 21, 2 22, 5 23, 1 24,
; ; ; ; 22, 7.
1; 2. 9, 2 ; 10, 1 ; 21, 3.
3, 4 ^/er> ; 9, 4 ; 11, 2; 3; 22, 6.
13, 1 ; 14, 2 ; 16, 6 (bis) ; 19, 16, 5 (bis).
6 ; 20, 6 ; 22, 6 ; 8. 5, 1

22, 7. 23, ; 5, 3 ; 6, 1 (..) ; 8,


2, 3 ; 16, 7 ; 18, 2 (bis) ; 2 ; 9, 2 ; 10, 2 ; 16, 3 ; 4 ; 5
19, 2 ; 3 ; 4 ; 5 (bis) ; 6. (bis) ; 18, 2 ; 20, 3 ; 24, 1.

19, 6 (bis). 7, 3 ; 9, 3.
10,4 (..); 18,2; 19, 1 ; 24, 1

2; 23, 1. 20, 6.
2, 2.
18, 2
passim.
; 19, 2.
2, 1
(1, (bis) 5
18,
) ;
1 .

3,
1,
3 ;
1

4 (bis)
; 2 (bis)
;
;

22, 6. (..) ; 2 4, 2 ; 5, 4 ; 6, 3 ; 8,
9, 1 ; 20, 2. (quaier) 9, 1 2 3 4 5 ; ; ; ; ;

22, 5. (bis); 10, 3; 4; 11, 1; 12, 2


21, 2. (ter) 13, 1 (bis) 3 (bis) 14,
; ; ;

3, 4. 1 15, 3 (bis) 4 16, 4 (bis)


; ; ; ;

17, 1 ; 19, 2. 6 7 (bis) 8 18, 2 19, 6


; ; ; ; ;

16, 6. 20, 2 4 (bis) 21, 1 2 22,


; ; ; ;

11, 1 ; 18, 4 ; 19, 1 (bis) ; 3 9 23, 1


; ;

6; 7. 5, 5 15, 2 20, 4. ; ;

18, 3. 2, 3 6, 3 8, 2 12, 1 13, ; ; ; ;

16, 3. 1.

22, 3. 20, 3; 3 (v.l.); 4.


10, 4 ; 14, 3 (bis) ; 4 ; 5 ; 3, 3 (v.l.) ; 4 (bis) ; 5 ; 6 ;

17, 2 ; 24, 1 6, 3 ; 13, 1 ; 19, 5 (bis) ; 20, 3


19, 5. (bis) ; 22, 8 ; 9.
3, 1 ; 3 ; 4, 2 ; 13, 1 ; 2 ; 14, 5, 1 ; 15, 1

6 ; 15, 4 ; 20, 3 ; 4 ; 22, 6. 10, 2 (v.l.) ; 13, 2 ; 22, 2.


14, 4 ; 15, 3 (ter) ; 4. 16, 6 ; 7.
3, 5. 7, 3.
22, 8 (..). 9, 1
. . . . . . .

234 ANCIENNE MÉDECINE


3, 5.
16, 6 ; 19, 5.
19, 4. 18, 2 (bis); 19, 1 (bis).

22, 3. 18, 2.

passim. 19, 1.

6, 1
2, 3.

22, 3. 3, 4 ; 10, 2 ; 22, 3.


11, 2; 21, 3; 22, 6. 16, 7 (bis).

3, 3 ; 14, 3 ; 18, 3. 16, 6.

.
4, 2. 16, 5.
3 18, 2 (quaier).
2, ; 3, 6 ; 4, 1 ; 12, 1 ;

13, 2 ; 14, 3 ; 17, 3 ; 19, 6 ; 20, 6, 2 ; 3.

2 ; 22, 7. 5, 4 ; 5 ; 6, 1

19, 5. 17, 3.

22, 6. 19, 2.

15, 4.
15, 2.
14, 3 ; 15, 2 ; 22, 3.
3, 1 ; 2 ; 5, 5 ; 6, 1 ; 2 ; 22, 7.
8, 2; 9, 2: 10,3; 11, 1 : 13,2; 22, 3.
15, 2 ; 3 ; 18, 2 ; 21, 1 ; 2 ; 24, 1, 3 ; 20, 2.
1. 18, 1 ; 20, 5.
24, 1 (v-l.J. 19, 6.

7,
11,
24, 2.

3
1.

; 10, 4 ; 13, 2
5, 22, 3.

10, 4.
3;4;6, 2; 10,3; 11, 1

(..); 16,6; 18,2 (bis); 19, 16, 3.


5 ; 24, 1 1, 2 ; 5, 1 ; 8, 1 ; 11, 1 :

5, 3; 11, 2. 14, 2 ; 24, 1

1, 1 (. .). 13, 3 (..) ; 14, 6.


13, 2. 4, 2.
2, 3 ; 11, 1 ; 16, 1 ; 22, 18, 2 ; 22, 6.
8. 22, 6.

)
5, 3 ; 16, 2 : 18, 1 ; 19, 2 ; 10, 4.
20, 1. 15, 4.
14, 3 ; 24, 1 (rel 6, 2 ; 9, 3 ; 4 :

3, 5 ; 14, 1 22, 6; 23, 1.

22, 1 ; 6 ; 8 (bis). 20, 1 ; 2.


22, 8. 22, 5 (..).
13, 3 ; 16, 4 ; 6. 10, 4 19, 5. ;

17, 1 ; 2. 22, 6.
6, ; 16, 7 (bis) ; 19, 2 ;
22, 1 ; 6.
5. 20, 3.
3, 5 ; 13, 1 ; 2 ; 3 ; 14, 1 9, 3.
2, 2 ; 18, 2 (..) ; 20, 4. 5, 2 (..).
14, 2 ; 18, 2. 22, 1 ;2 (bis) ; 3.
INDEX VERBORVM 235
23, 1 14, 6.
22, 1 ; 2 ; 5. 12, 1 ; 17, 1 ; 18, 3.
10, 4 ; 22, 3. 10, 4; II, 2.
3, 4 5

)
9, 3. ; 9, ; 16, 2 ; 8.
22, 1 ; 2 ; 5 ; 23, 1 passim.
10, 3 ; 4. 20, 1

{uel 14, 4 ; 15, 8, 3 ; 17, 2.


3 (ier) ; 4 ; 24, 1 16, 7 (..).
24, 1 16, 7.
10, 4 (. .) ; 18, 2. 11, 1

14, 6. 3, 3 22, 3. ;

10, 4 ('..). 1, 1 ; 2 2, 2 3 ; ; ; 3, 1 ; 4, 1 ;

14, 1 2; 8. 3; 9, 5 (..): 12, 2


24, 1 (bis) ; 13, 1 ; 14, 3 ; 15, 1 ; 20,
10, 1 2.

2, 3 ; 9, 5 ; 10,2; 11, 1 ;
4, 1 ; 5, 1

20, 3. 3, 6.
18, 3. 1, 1

21, 1 (. .). 9, 5.
17, 3. 3, 6;7, 1 :3;8, 1 (..); 11,
20, 1 1 ; 13, 2 (bis) ; 14, 2 (..) ;

10, 3 (. .). 15, 1 2 16, 8 (bis) 19, 1


; ; ;
;

3, 1 ; 2 (bis) 6, ; 1 ; 3 ;
6 ; 20, 2 3 (ter) 21, 3 (bis) ; ;
;

10, 1 (ter) ; 2 3 4 20, ; ; ; 5. 22, 1.

* 22,

19,
21, 2.
19, 2

3, 4.
22,

21,
1

1
;
(. .).
2 (bis)
1

1
(. .).
; 3.
(bis)
(ter)
8, 1
(bis)
1,

10, 1
1

2 (quater)
;

;
; 5, 1

9, 3
2 4 13, 1 2
14, 2; 4; 5 (..); 15, 1
(bis) 3 (bis) 16, 2 3 (bis)
;
;

2 (..)
6,
4
3,

2
3

1
(ter)
6
(..)
;

;
4,

;
;

;
2,
2
7,
;

;
;

;
1 ; 2

;
;

;
;

;
3

10, 1 5; 17, 1 19, 1 (v.l.) ;b (bis) ; ;

11, 2. 20, 1 2 (ter) 3 6 21, 2


; ; ; ;

22, 3. (1er) 11, 8 (v.l.) 24, 1


; 2. ; ;

3, 5. 3, 3.
1, 1 (..) ; 2, 3 ; 3, 5 ; 6, 1 ;
19, 5.
9,5. 14, 2 (bis) ; 21, 3 (bis).
2, 2 ; 22, 1 (bis) ; 4 ; 6 ; 5, 4.
23, 1. 3, 3 5, 4 (v.l.) 8, 2 9, ; ; ;

3, 4 (..) 6, 1 9, 3 10, ; ; : 5 (bis); 11, 1 2; 12, 1; 2; ;

3; 11, 2; 13, 1; 14, 1; 5; 6; 14, 6 (bis); 15, 3; 16, 5


16, 1 3 (ter) 20, 6 (bis) 22,
; ; ; (v.l.); 5; 19, 2 3 (v.l.); 6; ;

2 7 23, 1
; ; 20, 5; 6; 22, I (v.l.) ;2; 4;7 ;

3, 6. 24, 1.

19, 3 ; 22, 3.
12, 2; 19, 7.
3, 4 (bis) ; 9, 5 ; 14, 4 ; 16,
10, 4 ; 14, 5. 1 ; 18, 2 ; 19, 2.
14, 6 (..). 23, 1
.. . . . . .

236 ANCIENNE MÉDECINE


11, 3. 5, 4 ; 14, 4 (bis) ; 18, 1 ;

19, 1. 22, 3.
3, 3 ; 9, 1 6, 1 (..); 9, 4 ; 18, 3 ;

10, 4. 19, 5 : 22, 4.


2 7, 2 13, 1 15, 1
5, ; ; ; ; 13, 2 ; 19, 5.
16, 3; 5; 18, 4; 19,3 (..); 19, 2.
4 20, 3 (..) 4. 1, 2 (..).

-
; ;

3, 3 (bis) 4 5 6 6, 1 ; ; : ; ; 2,2: 11,3:12,1; 2; 13,2;


7, 1 (bis); 11, 2 (bis): 14,6. 18, 4 ; 19, 6.
7, 2 12, 2 15, 3 20, ; ; :
13, 1

6; 21, 1:2 (bis); 22, 8. 2, 3: 11, 2.


20, 3 5 6. ; ; 6, 1

1, 2 12, 2. ; 20, 1

1, 2.
18, 2.
19, 1 (..).
3, 1 2 7, 2 ; 2 ; 3 ; 5, 1 ; ; 18, 2 (..).
8, 1 (bis) 2 (quater) 9, 1 ; ; 19, 1

10, ; 11, 3 14, 2 16, 2 3 ; ; ; 16, 6.


23, 1. 3, 5.
3, 5 6. ; 22, 9 (bis).
6, 3 13, 2. ; 16, 4.
9, 2 (..). 3, 5 (..).
1, 1 ; 13, 1 (ter) ; 2 ; 3 ; 14, 23, 1

3 ; 2 19, 2 22, 3
15, 1 ; : ; ; 6 22, 8:9.
(bis) 6 (..).; 14, 1 (bis).
22, 2 4 5 6. ; ; ; 10, 3 ; 22, 7 ; 8.
5, 4 13, 1 3 14, 1
; ; ; 2, 2 (..) ; 3, 4 (bis) ; 5
3, 3. (bis) : 7, 2 : 8, 2 : 9, 2 ; 12, 1 ;

2, 1 ; 13, 3 ; 15, 2. 13, 1 : 3 : 14, 3 (bis) : 20, 1 : 2


22, 8 (bis). (bis) ; 3 : 6 (bis) ; 22, 4 ; 6 ; 8 ;

13, 2 ; 15, 3. 9.

3, 4. 3, 3.
10, 2.
passim.
22, 8 (..).
1, 1 ; 3 (bis) ; 2, 3 ; 13, 22, 3.
1; 15, 1. 8, 2 ; 12, 2.
5, 2. 20, 5.
1, 1 (bis) ; 15, 1 10, 3.
22, 4. 22, 3.
5, 3. 9, 4 ; 16, 3.
9, 1. 1, 2 : 16, 6 ; 18, 2.
1, 1 ; 7, 1.
19, 1.

16, 6.
7, 1 ; 2 ; 16, 4 : 20, 10, 4.
INDEX VERBORVM 237

19, 5.
3, 3. 4.
{vel ) 16, 7 ; 18, 3 ; 19,

3, 4. 16, 5 ; 6 ; 18, 3.
1, 3; 6, 1; 11, 1; 13, 2. 1, 1 ; 13, 1 (ter) ; 2 (bis) ;

9, 1 (. .). 3 ; 14, 3 ; 15, 1 ; 2 ; 3 (bis) ;

1, 1 ; 3, 3 (bis) ; 4 ; 5, 2 ;
16, 1 (1er) ; 2 ; 3 ; 4 ; 17, 1 2 ; ;

7, 1; 10,2; 13, \ ,2;3 (..) 19, 4 (bis) ; 6 (ter).

14, 6 15, 2 20,5 21, 3.


; ; ; 16, 1

14, 2. 16, 7 (..).


4, 1 ; 5, 5 (. .).
16, 7 (. .).
2, 1; 3, 3; 4; 11, 1; 13,
1 ; 2 ; 16, 1 ; 7 18, 2 19, 5
; ; ; 13, 2 ; 18, 1

6. 3, 4 ; 13, 1 (bis) ; 2.
24, 1 10, 4.
14, 6 ; 18, 4 ; 19, 6 ; 20, 6 ; passim.
22, 1 ; 24, 1 (ter). 1, 2 3 3, 4 9, 1 14, 3
; ; ; ; ;

16, 4 ; 18, 2 ; 22, 8. 5; 15, 1; 4 (..); 16, 4; 6;


16, 1. 20, 3 (..) 21, 2 22, 6 24, ; ; ;

1.

&2,3(.1.);9,3; 15, 2 ; 22,


7; 8 (bis).
5, 4 ; 8, 2 (bis) ; 9, 1 ; 13,
10, 4; 22, 7 (bis). 2.
TABLE DES MATIÈRES

Notice 7

I. L'Ancienne médecine, discours épidictique . 9


II. La critique d'une médecine philosophique . 22
III. La médecine dans V Ancienne médecine .... 34
IV. Place de VAncienne médecine dans la
Collection hippocratique : relations entre
VAncienne médecine et le Régime dans les

maladies aiguës 63
V. L'Ancienne médecine et Platon 74
VI. L'auteur et la date du traité 81
VII. La tradition du texte 85

Conspectus siglorum 113

L'Ancienne médecine 118

Notes complémentaires 155

Index verborv.m 223


ACHEVE D IMPRIMER
EN JANVIER 1990
SUR LES PRESSES
DE
l'imprimerie a. BONTEMPS
A LIMOGES (FRANCE)

DÉPÔT LÉGAL : JANVIER 1990


iMPR. N° 6007-89, ÉDiT. N" 2738
/ m127:350 ^
(
ISBN : 2-251-00417-3
ISSN : 0184-7155 9"782251"004174

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