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Geneviève Belleville, Ph. D.

Trucs pratiques et motivationnels


pour la rédaction scientifique
Assieds-toi et écris ta thèse !
Trucs pratiques
et motivationnels
pour la rédaction
scientifique
Geneviève Belleville

Assieds-toi et écris ta thèse !


Trucs pratiques
et motivationnels
pour la rédaction
scientifique
Les Presses de l’Université Laval reçoivent chaque année du Conseil des Arts du Canada
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Maquette de couverture : Laurie Patry

Mise en pages : Mariette Montambault

ISBN 978-2-7637-2031-9
ISBN-PDF 9782763720326

© Les Presses de l’Université Laval 2014

Tous droits réservés. Imprimé au Canada


Dépôt légal 1er trimestre 2014
Les Presses de l’Université Laval
www.pulaval.com

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Table des matières

Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . XI

1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

2. La règle de base : bloquer du temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5


2.1 Établissez à l’avance (et réévaluez régulièrement) la durée de vos périodes
de rédaction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
2.2 Respectez vos rythmes naturels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
2.3 Éliminez (et non seulement limiter) les distractions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
2.4 Évaluez votre réussite en fonction des périodes de rédaction respectées,
et non de votre productivité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
2.5 Une fois la période terminée, arrêtez la rédaction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
2.6 Respect des plages de rédaction : soyez intransigeant et rigide . . . . . . . . . . . . . 12
2.7 Prenez des pauses et des vacances libres de toute rédaction . . . . . . . . . . . . . . . 13

3. Définir ses objectifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17


3.1 Les objectifs à long terme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
3.2 Les objectifs précis et hebdomadaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
3.3 Les objectifs de temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
3.4 Les objectifs de projet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

4. Les étapes de la rédaction : planifier, rédiger, réviser . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37


4.1 La planification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
4.2 La rédaction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
VIII Assieds-toi et écris ta thèse !
Geneviève Belleville

4.3 La révision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48
4.3.1 La structure de l’argumentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
4.3.2 La cohérence de la séquence des idées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
4.3.3 L’argument ou l’idée derrière chaque paragraphe : un paragraphe =
une idée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
4.3.4 La nécessité de chaque phrase . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
4.3.5 Le sens de chaque phrase : est-ce la meilleure façon de dire
les choses ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
4.3.6 La précision de chaque mot . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
4.3.7 L’orthographe, la grammaire et la syntaxe (sans oublier
la ponctuation) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

5. Démystifier l’inspiration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
5.1 Quelques trucs et stratégies pour entretenir l’inspiration . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
5.1.1 Écrivez régulièrement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
5.1.2 Le carnet d’idées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62
5.1.3 Le deuil du chapitre terminé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
5.1.4 Varier les tâches . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
5.1.5 S’arrêter sur une pente descendante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
5.1.6 Parlez ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65

6. Reconnaître et combattre la procrastination . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67


6.1 Reconnaître la procrastination : distinguer les mauvaises herbes
des bonnes plantes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
6.2 Créer un contexte impropre à la procrastination : empêcher l’apparition
de mauvaises herbes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
6.3 Combattre la procrastination : arracher les mauvaises herbes
dès qu’elles apparaissent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

7. Un démon appelé perfection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79


7.1 Êtes-vous perfectionniste ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80
7.2 Le triste sort de la personne perfectionniste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83
7.3 Se libérer de son attitude perfectionniste : sortir de la secte . . . . . . . . . . . . . . . 85
IX
Table des matières

8. Les traumatisés de la thèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91

9. Parlez-en ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107
9.1 À qui parler ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108
9.2 Lisez sur la rédaction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113

10. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119

Références commentées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123


Remerciements

J e tiens à exprimer toute ma reconnaissance aux personnes qui ont


révisé les premières versions de ce texte et qui m’ont suggéré de
brillantes révisions : merci à Caroline, Guillaume et Josée pour le
temps investi et pour avoir cru en ce projet. Cette confiance m’a donné
le courage nécessaire pour le mener à terme.
Merci à mes mentors, Charles, André, Stéphane, Jean-Marie et
Martin, qui m’ont toujours offert de judicieux conseils et qui m’ont
permis de survivre, de m’adapter et même de me plaire dans ce drôle de
monde qu’est le milieu universitaire.
Merci à mes super étudiantes qui alimentent constamment ma
réflexion et qui, par leur dévouement et leur inépuisable enthousiasme,
me forcent à me dépasser tous les jours : Katia, Héloïse, Alenka, Leslie-
Ann, Andréanne, Mylène, Marie-Ève et Flore.
Enfin, une grosse boule d’amour à Marie-Josée et à Jules. Si je
suis si organisée et efficace au travail, c’est parce que j’ai toujours hâte de
finir pour aller jouer avec vous.
1
1. Introduction

Au secours, Maman ! J’ai pas envie d’écrire !


– Tous les étudiants universitaires du monde

L a rédaction scientifique est l’entreprise la plus intimidante,


décourageante et anxiogène de l’expérience académique. Ces
sentiments sont partagés par la plupart des membres de la
communauté scientifique qui s’affairent à lancer des projets de recherche
et à en présenter les résultats : étudiants doctoraux, stagiaires post-
doctoraux, chercheurs, professeurs, etc. Lorsque vient le temps d’écrire,
tout devient magiquement plus intéressant : les courriels – même les
plus insignifiants pourriels –, les réponses aux appels que vous retardez
depuis quelques jours, votre page Facebook, le ménage, même le chan-
gement de litière du chat. Comment peut-on arriver à écrire, alors ? Et,
surtout, comment peut-on arriver à le faire sans que la rédaction ne
projette constamment cet aura de torture ou de pire corvée du monde ?
Peut-on arrêter de se soumettre à contrecœur aux activités de rédaction
2 Assieds-toi et écris ta thèse !
Geneviève Belleville

et simplement retrouver l’envie d’écrire ? Voilà les questions que j’ai


souhaité aborder dans cet ouvrage.
Ce livre s’adresse aux étudiants universitaires de cycles supé-
rieurs en rédaction. Il s’inspire des conseils que j’aurais aimé recevoir
quand moi-même j’écrivais ma thèse, des lectures et des expériences sur
la rédaction scientifique acquises au fil du temps et des principes de
base en psychologie pour augmenter le rendement et diminuer l’anxiété.
Il contient les conseils que je donne maintenant à mes étudiants (qui me
laissent croire, à tort ou à raison, que ces conseils sont appréciés). Avec
ce livre, j’aspire à vous donner le goût (et le temps) d’écrire plus et
d’écrire mieux.
Dans le texte, le mot « thèse » est utilisé par défaut, mais je ne
fais pas référence qu’aux étudiants au doctorat. Les expériences et les
recommandations concernent aussi les étudiants à la maîtrise qui rédi-
gent un mémoire ou un essai. Certaines recommandations pourraient
également s’appliquer à la réalisation de tous les travaux longs faits au
cours du baccalauréat. Néanmoins, je m’adresse d’abord aux étudiants
des cycles supérieurs, pour qui la rédaction est une expérience plus soli-
taire et moins balisée qu’au premier cycle. Ainsi, quand je parle de thèse,
je parle tout aussi bien de mémoire ou d’essai ; quand je parle de direc-
teur ou de comité d’encadrement de thèse, il peut tout aussi bien s’agir
d’un directeur du mémoire.
Le présent livre a été rédigé en pensant au travail de recherche
nécessaire à l’obtention d’un diplôme supérieur en sciences sociales,
plus particulièrement en psychologie. Cela dit, la plupart des principes
qui y sont décrits peuvent s’appliquer aux étudiants universitaires de
n’importe quelle discipline. Ces derniers me pardonneront, j’espère,
d’employer principalement, sinon exclusivement, des exemples prove-
nant de la psychologie clinique.
En ce qui concerne les difficultés à rédiger, l’approche se veut
tant préventive que curative. En ce sens, le livre s’adresse à tous les
étudiants présentement en rédaction : de l’étudiant de première année
qui se demande avec appréhension comment commencer son projet
jusqu’à l’étudiant plus avancé qui a tout fini, sauf sa thèse qu’il laisse
traîner depuis plusieurs années, en passant par tous les autres qui
cheminent parfois lentement, parfois péniblement, dans cette aventure
aussi extraordinaire qu’atroce qu’est le doctorat.
1 3
Introduction

L’approche que je préconise est celle de l’organisation. Je me


rends compte que j’acquiers de plus en plus une réputation de personne
hyper organisée et structurée. « Sainte-Geneviève-de-l’Organisation »,
m’a-t-on récemment lancé à la blague dans une réunion... C’est vrai que
la méthode, la structure et l’organisation figurent dans le haut de la liste
de mes valeurs professionnelles. Je me fie beaucoup aux principes
fondamentaux du renforcement (pour élever mon fils d’un an, oui, mais
aussi pour me forcer à écrire). Et je crois qu’on peut retirer du plaisir de
la rédaction seulement lorsqu’on arrête d’être à la dernière minute et à
la merci des dates limites.
Mais, attention, je ne suis pas de ces professeurs qui exhortent à
en faire toujours plus. Je ne crois pas être austère ni rigide, je ne suis
vraiment pas mariée à mon travail ! Bien au contraire. Pour moi, l’orga-
nisation est un outil permettant d’atteindre des objectifs professionnels
rapidement et efficacement et, surtout, d’avoir le loisir de passer à autre
chose. Travailler le moins longtemps possible afin de consacrer du
temps de qualité aux autres sphères de sa vie. Être hyper structuré,
dévoué et concentré au travail, pour mieux décrocher, relaxer, faire
autre chose et lâcher son fou par la suite. Bien travailler aux bonnes
heures afin d’avoir ses fins de semaine, ses soirées, ses heures de dîner
libres. Arrêter de penser que ça prend une intelligence supérieure à
toutes les intelligences supérieures du monde pour réussir. Arrêter de
croire que les habiletés de rédaction sont innées – on l’a ou on l’a pas –
ou proviennent d’une source d’inspiration occulte accessible seulement
aux génies de ce monde. La méthode pour écrire de façon régulière et se
garder motivé n’a rien de bien sorcier ni de si extraordinaire ; elle
demande seulement de l’organisation et une bonne dose de discipline.
L’objectif de ce livre est de vous offrir des stratégies méthodolo-
giques et motivationnelles pour vous aider à entreprendre, à poursuivre
ou à reprendre votre rédaction académique. Les trois premiers chapi-
tres seront consacrés aux principes organisationnels de base nécessaires
à une rédaction continue, fluide et la moins anxiogène possible. Je vous
donnerai des stratégies infaillibles – oui, oui, infaillibles ! – pour
augmenter votre productivité. Nous discuterons des façons d’être
proactif et intransigeant dans la détermination du temps pour écrire, de
l’importance de réfléchir à différents types d’objectifs avant de
commencer un travail et de la distinction essentielle entre différentes
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Geneviève Belleville

activités, soit la planification, l’écriture et la révision, entrant sous le


vocable de « rédaction ». Le chapitre 5 prend le temps de déconstruire
le mythe de l’inspiration et vous aidera à revoir vos attentes par rapport
à la nécessité de se sentir inspiré dans le processus de rédaction. Les
deux chapitres subséquents s’attaqueront aux deux ennemis jurés de
l’avancement de la rédaction : la procrastination et le perfectionnisme.
Ensuite, nous laisserons une place à ces étudiants malchanceux qui, à
cause d’une panoplie de facteurs indépendants de leur volonté, ont un
parcours doctoral particulièrement pénible qui empoisonne leur expé-
rience de rédaction. Enfin, le livre se conclura avec une discussion sur
l’importance de briser l’isolement et de parler des difficultés vécues en
cours de doctorat.
Laissez-moi vous faire une confidence. En rédigeant cet ouvrage,
je me suis souvent inquiétée du fait que je ne possède pas encore beau-
coup d’expérience dans la supervision d’étudiants. Au moment d’écrire
ces lignes, aucun de mes étudiants n’a encore déposé et soutenu sa
thèse ! En comparaison, plusieurs auteurs que j’ai lus à ce sujet ont beau-
coup d’expérience de direction et ont côtoyé de nombreux doctorants...
Cependant, je voulais écrire ce livre alors que le souvenir de mes propres
études supérieures et de la torture que peut facilement devenir la réali-
sation d’un mémoire ou d’une thèse est encore frais à ma mémoire.
Ainsi, vous me pardonnerez si j’ai inclus certains conseils absurdes ou
irréalistes émergeant de mon inexpérience idéaliste. Si, par le plus grand
des miracles, le livre connaît du succès et est ré-édité, je vous promets
d’infuser les prochaines éditions de plus de sagesse.
Sur ce, bonne lecture, mais surtout... bonne et heureuse rédac-
tion !
Ah oui, une dernière chose : l’utilisation de la forme masculine
dans le présent ouvrage découle du fait que seuls les hommes ont des
difficultés à rédiger et reconnaît la supériorité des femmes dans le
domaine de la rédaction.
Maaaais non !... c’est pour alléger le texte.
2
2. La règle de base : bloquer du temps

P our écrire votre thèse et augmenter votre dossier de publication,


tout ce que vous avez à faire, c’est de bloquer du temps pour la
rédaction.
Simple, non ? Je vous donne mon secret dès maintenant – même
pas besoin de lire le reste du livre : pour devenir un auteur prolifique,
vous devez réserver une période de temps régulière à la rédaction et
instaurer une discipline assez stricte pour la respecter systématique-
ment sans exception. Tous les auteurs sur la rédaction – dans le domaine
tant littéraire que scientifique – s’entendent sur ce point : bloquer du
temps de rédaction et s’y soumettre est la clé du succès.
Il s’agira pourtant de la consigne la plus difficile que vous n’aurez
jamais eu à suivre, de l’habitude la plus difficile à instaurer et à main-
tenir. En effet, réserver du temps pour la rédaction est un des problèmes,
sinon le problème le plus répandu chez les étudiants universitaires et
même chez leurs professeurs. Pour l’étudiant aux cycles supérieurs, les
périodes de rédaction doivent concurrencer avec les cours, les lectures,
les travaux longs, les stages, les assistanats de recherche et d’enseigne-
ment, les engagements étudiants, etc. Or, pour toutes ces activités, un
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Geneviève Belleville

responsable, un superviseur, un co-équipier, une note sur le relevé de fin


de session constituent autant de motivateurs extrinsèques1 qui vous
obligent à vous mettre au travail. Pour la rédaction de thèse, vous êtes,
plus souvent qu’autrement, laissé à vous-même. Seul à seul avec votre
ordinateur, vous pouvez éprouver de la difficulté à vous discipliner, à
vous organiser, à gérer vos nombreuses tâches. Il est normal de vous
sentir perdu et isolé. Vous devenez votre seul motivateur ; vous ne
rendez de comptes qu’à vous-même. Bien sûr, il faudra offrir quelques
comptes-rendus à votre directeur ou au comité qui vous encadre une
fois de temps en temps, mais cela suffit rarement à offrir la motivation
nécessaire pour garder le rythme.
La bonne nouvelle, c’est que vous n’êtes pas seul dans cette
situation. Vos professeurs aussi souffrent de cette carence rédaction-
nelle. La plainte peut s’entendre dans tous les corridors de toutes les
universités du monde : « On n’a pas de temps pour écrire ! », « Si on
n’avait pas tant d’autres tâches, on écrirait bien plus ! », « Vivement la
fin de semaine / les vacances / l’année sabbatique, afin que je puisse me
rattraper dans mes projets de rédaction ! » Les professeurs ont tous déjà
entendu que bloquer du temps de rédaction est la solution à leur
problème, mais qu’est-ce qui est le plus difficile : coller ses fesses à sa
chaise et faire aller ses doigts sur un clavier pendant deux heures alors
que tout son être hurle qu’il voudrait être ailleurs, ou suivre le discours
ambiant autour de la machine à café et blâmer la surcharge de travail
pour sa propre improductivité ? Un bémol ici : la plupart des profes-
seurs d’université – tout comme une bonne partie des étudiants au
doctorat – sont effectivement surchargés de travail. Néanmoins, il est
possible d’organiser ses priorités afin que ce ne soit pas les périodes de
rédaction qui soient systématiquement sacrifiées au profit d’autres acti-
vités. Le sacrifice systématique de la période de rédaction au profit des
autres tâches m’apparaît plutôt la preuve que rédiger est une des acti-
vités les plus difficiles qui soit.

1. La motivation – l’énergie et la mobilisation des ressources qui mènent l’exécu-


tion d’une tâche – a deux types de sources : intrinsèque, lorsque l’exécution
même de la tâche suffit à faire ressentir plaisir et satisfaction, et extrinsèque,
lorsque la promesse d’une récompense ou la peur d’une conséquence désa-
gréable motive le comportement.
2 7
La règle de base : bloquer du temps

Bloquer du temps pour rédiger est la meilleure stratégie pour


adopter un rythme adéquat qui vous permettra d’atteindre vos objectifs
académiques (et, oui oui, même rédiger et déposer votre thèse).
Comment s’y prendre ? Les étudiants, et je compte ma propre expé-
rience dans le lot, ne sont habituellement pas très bons pour déterminer
des périodes de rédaction. Ils attendent d’avoir de longues périodes de
disponibilité – un après-midi au complet, voire une journée ou une
semaine. Ils ne fixent pas de limite à leur période de rédaction, se fiant
sur la fin de l’inspiration ou le sentiment d’être « tanné » pour arrêter. Ils
sous-estiment le temps requis pour écrire. Ils ne se sentent pas obligés
d’écrire tant que la date limite du compte-rendu n’est pas imminente (et,
pour l’écriture de la thèse, les comptes à rendre viennent extrêmement
tard dans le cheminement scolaire). Résultat ? La rédaction est entre-
prise selon un horaire erratique, imprévisible, souvent sous pression.
Les sections à rédiger s’accumulent, les délais raccourcissent, l’anxiété
et la culpabilité gonflent. Le plaisir de rédiger, l’agréable manipulation
intellectuelle des idées, la curiosité initiale qui avait fait choisir ce
domaine de recherche s’estompent jusqu’à disparaître. Peu importe où
vous vous situez dans cette spirale descendante, vous pouvez décider
maintenant – dès maintenant – d’y mettre fin en planifiant tout de suite
– oui, tout de suite – votre prochaine période de rédaction. Allez-y :
prenez votre agenda. Prenez un rendez-vous avec vous-même. Bloquez
une période d’une ou deux heures, aujourd’hui si possible, pas plus tard
que demain. Pas de disponibilité ? Essayez avec une demi-heure.
Rendez-vous indisponible à ce moment. Encadrez la période entière
dans votre agenda. Inscrivez-y « rédaction ». Faites-le avant de pour-
suivre votre lecture.
Évidemment, une seule période ne suffira pas. Maintenant, vous
devrez planifier un horaire complet et régulier de rédaction. Cet horaire
sera déterminé selon vos propres contraintes et préférences. Je ne peux
malheureusement pas vous proposer de recette s’appliquant à tous.
Voici tout de même quelques principes à suivre dans l’établissement de
votre horaire.
8 Assieds-toi et écris ta thèse !
Geneviève Belleville

2.1 Établissez à l’avance (et réévaluez


régulièrement) la durée de vos périodes
de rédaction
Les périodes de rédaction devraient durer assez longtemps
pour vous permettre de vous plonger dans votre sujet et d’être relative-
ment productif (nous parlerons plus tard de la bonne façon d’évaluer sa
productivité), mais doivent être assez courtes pour constituer une tâche
tout de même surmontable les journées où vous n’aurez aucune envie
d’écrire. Les périodes de rédaction devraient également être assez
courtes pour revenir quotidiennement ou presque. La plupart des
auteurs s’entendent pour dire qu’une période quotidienne de rédaction
est la meilleure option, et je suis d’accord avec eux. La meilleure durée
sera celle qui vous permettra de vous mettre à écrire à tous les jours.
Selon le cheminement parcouru et celui qui reste à parcourir, vous aurez
plus ou moins d’activités qui entreront en concurrence avec les périodes
de rédaction. Lors d’une session particulièrement chargée, vous n’aurez
qu’une heure, ou même une demi-heure, par jour à consacrer à la rédac-
tion. Si vous avez plus de temps à consacrer à la rédaction, l’été par
exemple, choisissez des périodes plus longues. Attention, cependant, de
ne pas exagérer. Soyez honnête : êtes-vous vraiment capable d’écrire six
heures d’affilée tous les jours ? Peut-être et c’est tant mieux ; moi, non.
Si vous remarquez que vous sautez des périodes de rédaction, que vous
commencez beaucoup plus tard que l’heure prévue, que votre rédaction
est parsemée de longues périodes d’hésitation, vous devriez en déduire
que la durée choisie est trop longue. Rien ne vous empêche de varier la
durée des périodes de rédaction en fonction de vos disponibilités : 30
minutes le lundi, 3 heures le mardi, une heure le mercredi, etc. Si vous
avez la possibilité de garder une durée fixe tous les jours, cependant, je
vous le recommande : cela vous aidera à acquérir une bonne habitude
de rédaction.

2.2 Respectez vos rythmes naturels


Êtes-vous oiseau du matin ou oiseau de nuit ? À quel moment
de la journée êtes-vous plus facilement concentré, plus fatigué ? Si vous
dormez peu ou mal une nuit, quand en souffrez-vous davantage : dans
les heures suivant le lever, au milieu de la journée, dans les heures précé-
dant le coucher ? Lorsque vous suivez des cours, lesquels semblent les
2 9
La règle de base : bloquer du temps

plus intéressants ou semblent passer plus vite : ceux de l’avant-midi, de


l’après-midi, après le souper ? Le domaine de la chronobiologie nous a
appris que nous avons tous certains rythmes naturels qui font en sorte
que nous sommes plus ou moins actifs, motivés et productifs à certains
moments de la journée. Pour ma part, je suis une personne matinale.
J’aime me lever tôt. J’aime arriver au travail avant tout le monde et m’en-
fermer dans mon bureau pour rédiger. Cela dit, venez m’observer passé
midi : je peux fixer l’écran de mon ordinateur d’un air hébété des heures
durant sans qu’une seule idée ne me vienne à l’esprit. Écrire une phrase,
l’effacer, la réécrire, la ré-effacer... Changer les couleurs d’une présenta-
tion PowerPoint sans y ajouter un seul élément d’information supplé-
mentaire... Vous voyez le portrait ? Passé dix-huit heures, on n’en parle
même pas ; mon cerveau équivaut à celui d’un mollusque. Pour une de
mes bonnes amies, c’est le contraire : les matins sont une torture, mais
elle peut facilement avancer la discussion d’un article après avoir soupé.
(Quand nous partageons une chambre d’hôtel en congrès à l’étranger,
elle me regarde d’un air découragé m’activer le matin et, le soir, je zappe
mollement d’un canal de télévision à l’autre d’un air absent alors qu’elle
tape furieusement à l’ordinateur.) Découvrez votre propre type chrono-
biologique et respectez-le. Vous êtes plus productif le matin ? C’est le
moment d’y planifier vos périodes de rédaction. Gardez tout le reste –
réunions, lecture d’articles, recherches sur Internet – pour vos moments
plus inactifs. En préservant vos moments de rendement supérieur pour
la rédaction et en planifiant les activités plus faciles aux moments où
vous avez moins d’énergie, vous rentabiliserez le temps de vos journées
de façon optimale.

2.3 Éliminez (et non seulement limiter)


les distractions
Rien – absolument rien – ne devrait pouvoir vous déranger
pendant une période de rédaction. Et rien – absolument rien – ne
devrait entrer en concurrence avec une période de rédaction. Mainte-
nant que vous avez déterminé vos périodes de rédaction, protégez-les
farouchement. Vous vous faites déranger ? Reprenez le contrôle : ne
vous laissez plus déranger. Désactivez tout de suite l’alerte automati­
quement de réception de courriels. Fermez la sonnerie des téléphones
et fermez votre cellulaire (ne vous faites pas d’illusion avec le mode
10 Assieds-toi et écris ta thèse !
Geneviève Belleville

vibration : un téléphone qui vibre est tout aussi attrayant et distrayant


qu’un téléphone qui sonne). Fermez votre porte (barrez-la au besoin).
Pour certaines personnes chanceuses qui bénéficient d’un grand respect
de leur entourage, une enseigne « occupé » sur la porte suffit à prévenir
les visites surprises. Pour d’autres, on dirait que l’enseigne n’est qu’une
preuve que la personne est bel et bien à son bureau et attire les visiteurs
plus téméraires qui frappent discrètement en voulant « juste prendre
quelques secondes de votre temps ». Voyez ce qui fonctionnera le mieux
pour vous : vous déclarer occupé ou faire comme si vous n’étiez pas là
(porte barrée, rideau fermé, lumière éteinte, etc.).
Ironiquement, pendant que j’écrivais ceci, mon téléphone a
sonné. Normalement, j’aurais répondu même si je suis actuellement en
période de rédaction. (On n’est pas parfait ! Honnêtement, j’aspire tous
les jours à mettre en pratique moi-même chacun des conseils que je
vous donne, mais j’ai mes failles, et la sonnerie du téléphone constitue
l’une de mes plus grandes tentations, je l’avoue !) Cette fois-ci, cepen-
dant, étant justement en train d’écrire sur l’importance de ne pas se
laisser déranger, j’ai appuyé sur la touche de renvoi à ma boîte vocale.
Comble du désespoir : l’afficheur indiquait un numéro inconnu et la
personne n’a pas laissé de message. Le sentiment d’avoir manqué un
appel important fut atroce sur le coup. Mais, vous savez quoi ? La
douleur n’est pas demeurée très longtemps et, le temps de raconter
l’anecdote, je me sens plus satisfaite d’avoir poursuivi ma rédaction que
de m’être laissée distraire. (Même qu’à partir de maintenant je prendrai
bien soin d’éteindre la sonnerie de mon téléphone à chaque période de
rédaction.)

2.4 Évaluez votre réussite en fonction


des périodes de rédaction respectées, et non
de votre productivité
Vous aviez prévu rédiger pendant deux heures et vous êtes
parvenu à garder vos fesses collées à votre chaise devant votre ordina-
teur avec rien d’autre que le logiciel de traitement de texte ouvert
pendant chacune des 120 minutes ? Bravo, vous avez réussi ! Peu
importe si vous avez écrit 25, 250 ou 2 500 mots. Il y aura des périodes
où vous serez plus productif que d’autres (nous aurons d’ailleurs l’occa-
sion de discuter des trucs pour demeurer le plus productif possible dans
2 11
La règle de base : bloquer du temps

le chapitre sur l’inspiration). Selon votre niveau de fatigue, l’intérêt que


vous avez (ou cherchez désespérément) pour certaines sections de votre
thèse, la difficulté de la tâche à abattre, les derniers encouragements ou
critiques de votre directeur, les dates limites à respecter, le nombre de
jours qu’il reste avant le prochain congé et une foule d’autres facteurs
sur lesquels vous avez plus ou moins d’influence, votre productivité, en
nombre de mots, variera beaucoup d’une période à l’autre. Lors de
certains moments précieux que vous bénirez, vous aurez l’impression
d’entrer en transe et vos doigts danseront tout seuls sur le clavier pour
vous offrir en finale un produit d’une rare créativité et intelligence.
D’autres fois, chaque phrase, chaque mot de chaque phrase, vous arra-
chera un effort surhumain et votre cerveau refusera obstinément de
vous fournir la moindre idée originale. La plupart du temps, en réalité,
les choses se dérouleront comme suit : vous aurez une certaine difficulté
à vous y mettre (avec une certaine appréhension plus ou moins
convaincue de ne pas y arriver), vous commencerez de façon prudente,
vous attraperez un rythme de croisière intéressant pendant un certain
temps, avec certaines embûches ou défis parsemés au travers de votre
route. L’important est de respecter scrupuleusement la période de
rédaction planifiée, point à la ligne.

2.5 Une fois la période terminée, arrêtez


la rédaction
Une fois la période finie, arrêtez. Même si vous êtes particuliè-
rement inspiré cette journée-là, ne dépensez pas tout en une fois,
n’écrivez pas jusqu’à l’épuisement. À vouloir trop en faire, vous aurez
moins d’énergie et de motivation et serez alors plus enclin à laisser
tomber les périodes de rédaction au cours des jours suivants. À la place,
prenez 15 minutes à la fin de la période pour jeter pêle-mêle sur le
papier les idées sur lesquelles vous pourriez continuer toute la journée.
Cela vous aidera à recommencer la rédaction les journées où l’inspira-
tion est moins présente. Joan Bolker2 appelle cela to park on the down-
hill slope, ou s’arrêter sur une pente descendante. Je trouve que c’est une
image intéressante pour illustrer le fait d’arrêter de rédiger même quand

2. Joan Bolker, Writing Your Dissertation in Fifteen Minutes a Day, New York,
Holt Paperbacks, 1998.
12 Assieds-toi et écris ta thèse !
Geneviève Belleville

on a encore de l’inspiration, pour ainsi reprendre rapidement le même


rythme à la période suivante.

2.6 Respect des plages de rédaction : soyez


intransigeant et rigide
Les plages de rédaction doivent être respectées comme le sont
les plages de cours ou les heures de stages. C’est un rendez-vous que
vous prenez avec vous-même : vous n’êtes alors pas disponible pour
d’autres activités. Annulez-vous des cours pour pouvoir rédiger votre
thèse ? Appelez-vous votre superviseur de stage certains matins pour
lui dire « désolé, je ne pourrai pas rentrer comme prévu car j’écris ma
discussion » ? Laissez-vous tomber vos co-équipiers de cette façon ?
Non ? Alors pourquoi faire le contraire ? Les périodes de rédaction sont
communément annulées, reportées, mutilées pour faire place aux
cours, aux travaux d’équipe, aux stages... Pourtant, retournez voir la
constitution de votre programme d’études. Combien de crédits sont
alloués au cours, aux stages, aux activités de recherche ? Est-ce que le
temps alloué à chaque activité dans votre semaine est proportionnel au
nombre de crédits qui y sont attribués dans votre programme ? Lorsque
vous voulez bien réussir un cours, vous y accordez le temps de qualité
nécessaire pour assister au cours, faire vos lectures et étudier pour
l’examen. C’est le même principe pour la rédaction.
Peut-être attendez-vous la session d’été, alors que vos cours et
vos stages seront terminés, pour rattraper les heures consacrées à la
thèse. Je suis bien d’accord pour dire qu’il est plus facile de consacrer du
temps à la rédaction pendant l’été. Cependant, j’ai remarqué que trop
souvent les étudiants, surtout en début de parcours, idéalisent la période
de l’été. Ils voient les mois de mai à août comme une série de journées
vides où ils pourront demeurer assis huit heures par jour devant leur
ordinateur et où les sections de la thèse se déposeront régulièrement
une à une dans leur document comme par magie. Ne tombez pas dans
ce piège. L’été, il y a les vacances : les vôtres, bien sûr, mais celles aussi
de votre directeur de thèse, du secrétariat, du personnel de la biblio-
thèque et des services informatiques, etc. Un problème réglé en quel-
ques heures pendant les sessions d’automne et d’hiver peut prendre
plusieurs jours, voire plusieurs semaines, à régler pendant la session
d’été. Ensuite, pour se motiver à rédiger, il y a rien de pire qu’une journée
2 13
La règle de base : bloquer du temps

vide à l’horaire, c’est-à-dire une colonne blanche dans l’agenda, sans


indications claires de début ni de fin. Allez-vous véritablement consa-
crer huit heures consécutives à une rédaction assidue ? Et, même si
vous réussissez cet exploit, pensez-vous vraiment avoir la motivation de
recommencer le lendemain ? Le surlendemain ? Et ainsi de suite pendant
tout l’été ? Tous les jours de tout l’été ? Vraiment ? Pour vrai de vrai ?
Hmmm... permettez-moi de douter. Pendant l’été, il peut devenir néces-
saire d’augmenter le nombre de vos périodes de rédaction, mais, pour
votre propre bien, n’en augmentez pas indûment la durée. Rappelez-
vous le conseil donné au point 2.1 : si vous sautez des périodes pour des
raisons plus ou moins valables, si vous avez de la difficulté à commencer
à l’heure prévue, si vous entrecoupez vos périodes de rédaction de
consultation de courriels, de promenade sur Internet, de jasette avec les
étudiants du bureau d’à côté, le constat est clair : vos périodes de rédac-
tion sont trop longues. Enfin, pendant l’été, il y a le soleil, le gazon vert,
les terrasses, l’eau rafraîchissante des piscines, l’appel de la plage : vous
pouvez – et pour votre propre santé mentale et aptitude à conserver le
rendement requis pour réussir votre programme d’études, vous devez
– en profiter. Respectez une période de rédaction réaliste et, si vous
n’avez rien d’autre prévu à l’horaire cette journée-là, allez jouer dehors !
Voilà qui m’amène à mon dernier conseil.

2.7 Prenez des pauses et des vacances libres


de toute rédaction
Vous avez le droit et même l’obligation de vous arrêter. Prenez
des vacances et des pauses planifiées. Rédigez cinq jours sur sept. En
passant, c’est ce que j’entends quand je vous conseille de planifier des
périodes de rédaction quotidienne. Pour moi, les fins de semaine
demeurent un territoire absolument interdit au travail. J’avoue que je
n’ai pas toujours été en mesure de respecter la suprématie des fins de
semaine, surtout pendant mon doctorat. Les exigences d’un programme
d’études supérieures peuvent être telles que l’on doive sacrifier plusieurs
heures de fins de semaine à l’ouvrage. Je vous conseille tout de même de
planifier des périodes de rédaction uniquement cinq jours sur sept. Le
samedi et le dimanche peuvent devenir des journées idéales pour la
rédaction ; si c’est le cas, planifiez seulement trois autres périodes
pendant la semaine. Accordez-vous une fin de semaine de trois jours
14 Assieds-toi et écris ta thèse !
Geneviève Belleville

lorsqu’un gros projet est terminé. Arrêtez complètement pendant le


temps des fêtes (ou une partie du temps des fêtes, puisque les sessions
universitaires finissent quand même assez tôt et reprennent assez tard).
Arrêtez complètement pendant les vacances. Les gens qui amènent leur
portable sur la plage me font toujours pitié : soit vous décidez de
travailler et vous le faites dans un milieu propice (climatisé et à l’abri des
distractions), soit vous profitez de vos vacances. Travaillez ou profitez,
mais ne profitez pas de vos vacances pour travailler. Délimitez claire-
ment vos périodes de rédaction et ne les laissez pas déteindre sur vos
périodes d’arrêt, de relaxation, de ressourcement. Loin d’être des
caprices ou des indulgences, ces périodes d’arrêt et de repos sont néces-
saires pour vous garder productif, motivé et enthousiaste le reste du
temps passé au travail.
Personnellement, sous les conseils d’un auteur que je vous
recommande chaudement, Paul Silva3, je réserve une période de deux
heures par jour à la rédaction. Deux heures me semblent vraiment la
durée idéale : il m’est toujours possible de réserver deux heures consé-
cutives dans une journée. Deux heures, ce n’est pas tout un avant-midi
ni tout un après-midi, ce qui me laisse toujours le temps de faire autre
chose. Malgré toutes les exigences de ma profession, je peux me
permettre de disparaître deux heures (fermer la sonnerie de mon télé-
phone et fermer ma boîte de courriels, verrouiller ma porte de bureau)
sans trop en payer de conséquences lorsque j’émerge (le nombre de
courriels manqués en deux heures demeure gérable, et je ne sens pas
que j’ai loupé l’unique occasion incroyable qui arrive une fois dans une
vie qui aurait eu une influence définitive sur ma carrière). Et lorsqu’on
décide de s’y mettre vraiment et qu’on se coupe du reste du monde (et
avec la bonne technique, dont nous discuterons tout au long du livre
mais plus particulièrement au chapitre 4), c’est fou, mais absolument
fou, la quantité de matériel qu’on peut écrire en deux heures. Et imaginez
lorsqu’en plus on répète l’expérience toute la semaine et qu’on accumule
dix heures de rédaction productive et concentrée par semaine ! Je vous
assure qu’un tel rythme peut vous permettre de rédiger facilement votre
thèse dans les délais requis (en plus de réaliser trois ou quatre projets
d’articles supplémentaires en bonus). En réservant deux heures par jour

3. Paul J. Silva, How to Write a Lot, Washington, American Psychological Associa-


tion, 2007.
2 15
La règle de base : bloquer du temps

à la rédaction, vous serez étonné de ce que vous arriverez à faire. Plus


jamais vous ne serez à la dernière minute. De façon magique, vous
n’aurez plus à déborder sur votre temps personnel pour atteindre vos
objectifs. Vous aurez vos fins de semaine à vous et aurez la chance de
prendre des vacances. Vous pourrez vous permettre une journée d’école
buissonnière de temps en temps (gardez le secret, mais j’en prends en
moyenne une par mois). Mieux encore, et vous ne le crierez pas sur les
toits car vous allez vous faire regarder de travers par vos collègues, vous
remettrez vos projets à l’avance. Vous produirez davantage. Vous appré-
cierez enfin la rédaction.
Le meilleur conseil est maintenant donné, ce n’est pas plus
compliqué que ça. Si ma prose ne vous plaît pas, vous n’avez même pas
besoin de lire le reste du livre. Pour écrire votre thèse, tout ce que vous
avez à faire est de réserver du temps pour la rédaction et de le respecter,
de vous asseoir devant l’ordinateur et de taper sur le clavier. Commencez
maintenant. Ne laissez aucune exception s’infiltrer. Bloquer une période
quotidienne à la rédaction est un truc infaillible pour avancer la thèse de
façon efficace, renforcer son sentiment d’efficacité et de compétence,
limiter l’angoisse et les questionnements. Commencez maintenant et
n’arrêtez jamais.
16 Assieds-toi et écris ta thèse !
Geneviève Belleville

Encadré 2.1
Bloquez du temps pour la rédaction

1. Prenez votre agenda et bloquez du temps consacré à la rédaction.


2. Choisissez des périodes assez courtes (par exemple, deux heures).
La durée est idéale lorsque vous avez le temps ­d’atteindre de petits
objectifs de rédaction et qu’une fois la période terminée vous pour-
riez avoir encore envie de continuer.
3. Bloquez du temps tous les jours (c’est-à-dire cinq jours sur sept) ou
presque.
4. Écrivez au moment de la journée où vous êtes le plus en forme.
5. Éliminez les distractions de vos plages de rédaction.
6. Évaluez-vous en fonction des périodes de rédaction respectées, et
non de votre productivité.
7. Une fois la période terminée, arrêtez d’écrire.
8. Respectez vos plages de rédaction de façon intransigeante et
rigide.
9. Prenez des pauses et des vacances libres de toute forme de rédac-
tion (ou de travail).
3
3. Définir ses objectifs

M aintenant que vous avez réservé de belles périodes de rédac-


tion, il vous faut une méthode pour arriver à les remplir. Il
est utopique de penser que vous arriverez à écrire facile-
ment tout au long de votre période de rédaction sans une préparation
préalable. Vous avez maintenant réservé un véhicule pour vous rendre à
votre destination finale (ce pays mythique appelé Ph. D., ou M.A., ou
M.B.A...), mais il faut mettre de l’essence régulièrement pour espérer
avancer. Le plein fourni à la prise de possession de la voiture (c’est-à-
dire la motivation initiale à vous inscrire à un programme d’études
avancées, l’enthousiasme originel pour votre sujet de thèse) ne va pas
durer très longtemps.
Définir des objectifs, c’est mettre de l’essence dans la voiture,
c’est ce qui vous permettra d’avancer tous les jours. Ce n’est certaine-
ment pas la première fois qu’on vous parle de l’importance de définir ses
propres objectifs dans la réalisation d’un projet de thèse. Cependant, il
y a plusieurs types d’objectifs, et tous requièrent une planification
sérieuse et attentive. Tous les étudiants que je rencontre connaissent
l’importance d’établir des objectifs ; très peu le font de la bonne façon et
rares sont ceux qui portent une attention égale à tous les types d
­ ’objectifs.
18 Assieds-toi et écris ta thèse !
Geneviève Belleville

Tout d’abord, rappelons-nous les principes comportementaux


de base nécessaires à la définition d’objectifs. Un bon objectif est précis,
observable, mesurable et réaliste. Un objectif est précis lorsque sa défi-
nition et ses implications sont claires : « rédiger thèse » est à peu près le
pire objectif que vous puissiez avoir (et pourtant combien de fois l’ai-je
vu dans des agendas ou sur des post-it). « Rédiger section sur la préva-
lence du trouble panique dans la population générale », « Monter le
tableau des résultats de l’analyse de variance XYZ », « Faire le plan de la
discussion et repérer les articles en appui aux arguments avancés »,
voilà autant d’exemples d’objectifs précis.
Un objectif est observable et mesurable lorsqu’on peut discerner
facilement qu’on est en train d’y travailler et, encore plus important,
lorsqu’on peut déterminer facilement le moment où il sera atteint. Ça
peut paraître évident, mais méfiez-vous. Par exemple, « finir revue de
littérature » peut paraître un objectif adéquat, mais comment saurez-
vous réellement que vous l’avez atteint ? Si vous avez déjà entamé une
revue de littérature, vous savez que cette tâche peut rapidement se
transformer en un puits sans fond. L’objectif « évaluer les articles
mentionnés par PubMed avec les mots-clés prevalence et panic
disorder », en ce sens, est mieux formulé, car son atteinte est plus facile
à définir. Il est essentiel que vous sachiez le moment précis où vous
atteignez l’objectif : c’est un élément primordial pour entretenir votre
motivation. Vous devrez passer beaucoup de temps à la définition de
vos objectifs, mais ce temps sera rapidement regagné par l’efficacité que
vous aurez dans la rédaction. Pour reprendre l’analogie du voyage en
voiture, oui, effectivement, on perd du temps à arrêter régulièrement à
des stations d’essence pour faire le plein ou encore à regarder la carte.
Cependant, et je crois que vous serez d’accord avec moi, beaucoup plus
de temps sera perdu si vous tombez en panne d’essence sur le bord de la
route ou si vous vous perdez en chemin.
Enfin, un objectif est réaliste lorsque vous pouvez l’atteindre,
tout simplement. Le plus tôt vous pourrez vous convaincre de cette
affirmation, le plus rapidement vous acquerrez une bonne efficacité à la
rédaction. Supposons que vous avez réservé une période de deux heures
aujourd’hui et que votre objectif est « rédiger la description des partici-
pants de l’étude ». La période de deux heures est terminée, et vous
n’avez pas fini votre section. Quelle est votre hypothèse pour expliquer
la situation ? Soyez honnête : est-ce que des pensées du type « je ne suis
3 19
Définir ses objectifs

pas assez rapide », « je ne suis pas assez bon », « je ne suis peut-être pas
fait pour les études supérieures » vous ont traversé l’esprit ? Ces pensées
représentent autant de frein à votre réussite. Elles vous rendront anxieux
et démotivé et diminueront vos chances de respecter votre prochaine
période de rédaction : à quoi bon vous mettre à rédiger si vous n’êtes pas
assez bon de toute façon ? Si, pendant une période de rédaction
respectée et sans distraction, vous n’avez pas atteint votre objectif, c’est
l’objectif qui était « mauvais » et à changer, pas vous. Je crois que ça vaut
la peine de le répéter : si vous n’avez pas atteint votre objectif, c’est l’ob-
jectif qui est à changer, pas vous. Dépêchez-vous de réviser votre objectif
pour la fois suivante. La plupart du temps, le problème réside dans le
fait que le temps nécessaire pour atteindre l’objectif est sous-estimé.
Quand vous aurez atteint un objectif fixé dans une période de temps
déterminée, vous aurez effectivement défini un objectif réaliste. Le but
ici n’est pas de se donner à fond sur une courte période de temps, mais
d’être constant. La rédaction d’une thèse n’est pas un sprint, c’est un
marathon. Arrêtez de vous trouver « pas bon » et concentrez-vous à
définir des objectifs atteignables, peu importe ce que « atteignables »
signifie à cet instant précis de votre cheminement.
Picasso a eu sa « période bleue », moi, j’ai eu ma « période
quatre lignes ». À la fin de mon doctorat, j’étais si nauséeuse à l’idée
d’écrire ma thèse que j’aurais accepté avec plus d’enthousiasme de
récurer les égouts de la ville plutôt que d’ouvrir ce document maudit.
C’est alors que je me suis dit : « Écris juste quatre lignes. » Peu à peu,
c’est devenu mon mantra, mon but : écrire quatre lignes. Après ces
quatre lignes, mon objectif était atteint, et j’avais le choix : soit c’était
agréable et je continuais jusqu’à ce que ce ne le soit plus, soit j’arrêtais et
j’allais jouer dehors1. Et, croyez-moi, à plusieurs reprises, je me suis
rendue à l’université, j’ai écrit quatre lignes, puis j’ai pris le reste de la
journée à lire un roman étendue dans le gazon. J’entends déjà vos récri-
minations : « Franchement, on ne peut pas rédiger une thèse quatre

1. Cette façon de faire va à l’encontre de celle que je vous propose au chapitre 2,


et un peu plus tard au chapitre 5, soit de définir une période de rédaction
précise et d’arrêter une fois qu’elle est finie. Cela dit, cette anecdote illustre un
moment de mon cheminement académique où j’étais particulièrement
découragée par les tâches de rédaction et où, justement, je ne savais pas
comment adopter et maintenir de bonnes habitudes de rédaction.
20 Assieds-toi et écris ta thèse !
Geneviève Belleville

lignes à la fois, c’est beaucoup trop petit comme objectif ! » Évidem-


ment, cette « période quatre lignes » n’a pas duré éternellement. Elle a
quand même duré plusieurs mois, le temps d’apprendre sérieusement à
m’écouter davantage et à ré-apprivoiser l’écriture. Cela dit, si certains
procrastinateurs invétérés voulaient me prendre au mot, sachez qu’en
écrivant véritablement 4 lignes par jour, 5 jours par semaine, 48 semaines
par année, cela vous prendra un peu plus de 3 ans pour écrire un docu-
ment de 150 pages. Ce n’est pas idéal, mais ce n’est même pas si drama-
tique ! Il y a des étudiants qui étirent leur rédaction encore plus
longtemps !
Maintenant, faisons le tour des types d’objectifs que vous aurez
à définir. Il y a plusieurs types d’objectifs, tout aussi importants les uns
que les autres, et il est essentiel de s’attarder à chacun. Il y a les objectifs
à long terme, les objectifs précis ou hebdomadaires, les objectifs de
temps et les objectifs de projet.

3.1 Les objectifs à long terme


Les objectifs à long terme sont ceux que vous vous fixez pour
une session ou pour une période de quelques semaines prédéterminée
(par exemple, avant de partir en vacances, je veux avoir accompli
______________). Des exemples incluent « Rédiger le contexte théo-
rique du projet », « Défendre mon projet auprès de mon comité de
thèse », « Terminer les analyses et la section résultats », « Soumettre
une première version de ma thèse à mon directeur », « Soumettre mon
article 1 pour publication », etc. Il ne s’agit pas d’objectifs terminaux,
comme déposer votre thèse. J’utilise quand même l’appellation « long
terme », car, pour moi, ce sont des objectifs importants à garder en toile
de fond, mais ce ne seront pas ceux qui vous aideront à avancer dans le
quotidien.
Les objectifs à long terme sont les étapes du voyage, pour vous
rendre à votre destination finale. Ce sont ceux qui, une fois atteints,
vous offrent un sentiment intense de soulagement, de joie et de travail
accompli. Ce sont ceux qui méritent deux ou trois jours de congé, une
bouteille d’un meilleur vin qu’à l’accoutumée, un nouveau gadget élec-
tronique, une razzia chez votre disquaire ou libraire préféré, ou tout
autre gâterie qui envoie un message clair : oui, c’était difficile, j’ai réussi
et je suis fier.
3 21
Définir ses objectifs

Les étudiants que je rencontre sont habituellement assez bons


pour fixer leurs objectifs à long terme de façon précise, observable et
réaliste. Cependant, ils arrêtent là et se fient à ces objectifs pour les
motiver et leur indiquer quoi faire tout au long de la session. Concrète-
ment, dans leur agenda, on voit des répétitions de l’objectif à long terme
dans toutes les périodes de rédaction réservées (lundi : rédiger mon
contexte théorique ; mardi : poursuivre la rédaction de mon contexte
théorique ; mercredi : poursuivre la rédaction de mon contexte théo-
rique ; jeudi : poursuivre la rédaction de mon contexte théorique ;
vendredi : mort par excès d’ennui !). Évidemment, ce n’est pas aidant. Ça
vous prend un autre type d’objectifs, que nous abordons dès maintenant
en deuxième point.

3.2 Les objectifs précis et hebdomadaires


Chaque objectif à long terme doit être décortiqué en une série
de petits objectifs précis, comme autant de marches d’un escalier. Je
qualifie également ces objectifs d’hebdomadaires, car ce sont des
objectifs que vous devriez atteindre chaque semaine. Idéalement, le
temps nécessaire pour atteindre un objectif précis serait exactement
le temps que vous avez réservé pour une période de rédaction. Ainsi,
si je reprends mon exemple de réserver deux heures de rédaction par
jour, cinq jours par semaine, un objectif précis devrait être atteignable
en deux heures, et vous pourriez vous constituer une liste de cinq
objectifs à atteindre dans la semaine. Bien sûr, il peut arriver qu’un
objectif requière plus d’une période de rédaction afin de l’atteindre.
Mais ne vous laissez pas prendre au piège en rédigeant des objectifs
qui prennent régulièrement plusieurs périodes de rédaction. Trop
d’étudiants sous-estiment le pouvoir de mettre un crochet dans une
case à la fin d’une période de rédaction. Le crochet dans la case est un
motivateur incroyable, un renforçateur puissant : pourquoi s’en
passer ? Rédigez des objectifs que vous atteindrez à la suite d’une
période de rédaction donnée bien respectée, et succombez au plaisir
de cocher la case !
Par exemple, supposons que votre objectif à long terme est
« Soumettre mon article 1 pour publication ». D’abord, listez le nombre
de semaines qui vous restent pour l’atteindre (15 semaines). Ensuite,
déterminez toutes les étapes nécessaires à la soumission de l’article :
22 Assieds-toi et écris ta thèse !
Geneviève Belleville

(a) construire les tableaux de résultats à partir des analyses, (b) rédiger


la section résultats, (c) rédiger la méthode (sections participants,
mesures, procédure, traitement, analyses des données), (d) mettre à
jour ma revue de littérature, (e) rédiger l’introduction, (f ) rédiger la
discussion, (g) rédiger le résumé, (h) soumettre mon manuscrit aux
co-auteurs, (i) chercher quelques revues possibles auxquelles soumettre
mon manuscrit et les mettre en ordre d’importance, (j) mettre le manus-
crit en forme en fonction des directives de la revue, (k) mettre en forme
mes références, (l) apporter les révisions demandées par mes co-auteurs,
(m) envoyer mon manuscrit à la révision de l’anglais, (n) rédiger la lettre
de présentation (cover letter), (o) soumettre et célébrer ! Soyez le plus
exhaustif possible : une série d’objectifs du genre « Rédiger l’introduc-
tion, rédiger la méthode, rédiger les résultats, rédiger la discussion » ne
vous aidera pas. Remarquez également comment les étapes sont formu-
lées de façon à ce qu’il n’y ait pas de période d’inactivité lors de périodes
d’attente. En effet, après l’envoi du manuscrit aux co-auteurs (h), vous
pourrez vous occuper de choisir la revue à laquelle le soumettre (i),
mettre votre manuscrit en forme (j) et vérifier vos références (k). Vous
n’avez pas besoin de faire ces étapes avant d’envoyer le manuscrit à vos
co-auteurs. De la même façon, profitez du temps où votre texte sera à la
révision de l’anglais (m) pour rédiger votre lettre de présentation (n).
Soyez efficace dans votre planification. Enfin, la dernière étape est de
planifier vos objectifs en fonction du nombre de semaines que vous avez
pour les atteindre. Par exemple, semaine 1 : construire les tableaux,
semaine 2 : rédaction de la section résultats, etc. Soyez réaliste et
comprenez bien une chose : nous sous-estimons tous le temps requis
pour réaliser une tâche de rédaction. Soyez généreux dans l’allocation
du temps. La rédaction de l’introduction ne se fera certainement pas en
une période de deux heures. Et ne faites pas l’erreur de vous réserver
une journée complète en vous disant : j’ai huit heures devant moi, je
devrais être capable de rédiger mon introduction au complet. Au
contraire, découpez cet objectif en plusieurs petites sous-étapes attei-
gnables en deux heures : faire un plan détaillé de l’introduction, rédiger
les sections 1.1 à 1.4, rédiger les sections 1.5 à 1.7, réviser le texte (le
chapitre suivant, sur les étapes de la rédaction, vous donnera plus de
détails à ce sujet). Ainsi, si vous voulez atteindre l’objectif « Rédiger l’in-
troduction » lors de la semaine 5, vous saurez que vous avez besoin de
planifier quatre périodes de deux heures dans la semaine. Et pourquoi
3 23
Définir ses objectifs

ne pas en planifier une cinquième, juste au cas où il y aurait des


imprévus ?
Si vous avez de la difficulté à estimer le temps requis pour
atteindre chaque étape, bonne nouvelle ! Cela veut simplement dire que
vous êtes humain (et que vous n’avez pas eu cinquante expériences du
même genre dans le passé vous permettant d’arriver à une prédiction
précise). Respectez seulement les deux principes suivants : générosité
dans l’allocation du temps pour chaque objectif précis et révision régu-
lière et systématique des objectifs en fonction des tâches réalisées
chaque semaine. Il est possible que vous deviez réviser votre liste de
tâches et l’assignation de ces dernières aux différentes semaines
plusieurs fois dans le déroulement de votre travail. C’est normal et c’est
comme ça que vous apprendrez combien de temps est requis réellement
pour chaque type de tâche.
Les figures suivantes illustrent les objectifs que j’ai fixés le
28  mars 2011 en prévision de mon départ en congé de maternité le
22 juillet 2011. La première (figure 3.1) énumère mes objectifs à long
terme. Vous remarquerez mon niveau d’indulgence variable en fonction
des objectifs : pour certains (1 à 3), je voulais absolument soumettre
mon texte avant mon départ. Pour d’autres, j’avais de la difficulté à
estimer le temps requis en fonction du niveau de travail déjà accompli
sur chaque projet, alors j’ai pris comme objectif d’avancer le plus
possible les travaux, en me disant qu’une soumission avant mon départ
serait un agréable bonus, mais pas une nécessité.

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