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ROYAUME DU MAROC

UNIVERSITE MOHAMED V
FACULTE DES SCIENCES ECONOMIQUES

JURIDIQUES ET SOCIALES-SOUISSI

MASTER COMMERCE INTERNATIONAL

REMISE EN CAUSE DE
L’OMC

REALISE PAR : ENCADRE PAR :

-EL GRAOUI YOUSSEF PROFESSEUR A. EL AIDOUNI

-AICHA MHMEDI

-ABDELAZIZ EL CADI EL ADRISSI

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SOMMAIRE

Introduction :

Partie I : Bilan des réalisations à l’actif de l’OMC

Chapitre I : La nouvelle structuration institutionnelle et suivi réglementaire :


I. Portée de la nouvelle structuration institutionnelle :
II. Suivi et renforcement réglementaire :

III. Les règles de l’OMC et la mondialisation :

Chapitre II : Réalisations à caractère économique :


I. Les effets de l’élargissement de l’OMC :
II.L’évolution des politiques commerciales à l’OMC :
III. Approche de l’OMC pour la réalisation du développement :

Partie II : Critiques et limites de l’OMC :

Chapitre I : Critiques de l’OMC :


I. Critiques portées au fonctionnement de l’OMC :
II. Critiques à l’égard des échecs des conférences ministérielles :

III. Critiques des altermondialistes :

Chapitre II : Limites de l’OMC :

I.L’OMC n’est pas un instrument de régulation des régulations économiques


internationales :

II. Le libre échange inachevé :

III. L’OMC et la pauvreté :

Partie III : Avenir de l’OMC :

Chapitre I : La réforme de l’OMC

I. La réforme proposée par les Etats-Unis :

II. Synthèse des appels de réforme de l’OMC :

Chapitre II : Les défis futurs de l’OMC en matière du commerce international :

I. Facteurs de transformation qui dictent l’avenir du commerce mondial :

II. Projection de l’impact des technologies numériques sur le commerce

Conclusion :

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INTRODUCTION
Aperçu introductif :

L’OMC dont le siège se tient à Genève (Suisse), est née le 1er janvier 1995, mais le système
commercial qu'elle représente a presque un demi-siècle de plus. En effet, en 1947, l'accord
général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) établissait déjà les règles du
commerce international.

De 1947 à 1994, le bilan de cet accord s’est cristallisé par la diminution des droits de douane
sur les produits industriels, mais négatifs pour les produits agricoles et les services ne
rentraient pas dans son champ de compétence.

Une réforme du GATT s'est révélée nécessaire devant les changements du commerce
international (importance des services, participation accrue des pays émergents) et le besoin
de plus en plus pressant d'une autorité arbitrale, ce qui a donné lieu à l’OMC.

On parle désormais de "pays membres" pour l'OMC alors que le GATT ne reposait que sur
des "parties contractantes", ce qui dénote que le GATT n'était guère plus qu'un nœud de
contrats et de compromis. En plus du commerce des biens, l'OMC s'intéresse aux services et à
la propriété intellectuelle

L'OMC compte 164 Membres au 29 juillet 2016 qui représentent plus de 98 ℅ , ainsi que des
observateurs qui sont, soit des Etats en cours d'intégration ou simplement des organisations
internationales, comme le FMI ou la banque mondiale. L'OMC est toujours une organisation
ouverte qui accepte encore de nombreux membres, dont notamment une pluralité de pays en
développement et qui ont le statut d'observateur comme Algérie, Andorre, Azerbaïdjan,
Bahamas, Bélarus, Bhoutan, Bosnie-Herzégovine, Comores, Éthiopie, Guinée équatoriale,
Iran, Iraq, Libye, Ouzbékistan, République arabe syrienne, République libanaise, Saint-Siège,
Sao Tomé-et-Principe, Serbie, Somalie, Soudan, Soudan du Sud et Timor-Leste

L'Organisation mondiale du commerce puise sa légitimité dans la volonté de ses États


membres de parvenir à libérer et réduire les inégalités dans les échanges commerciaux
internationaux, et par conséquent l'OMC est rapidement devenue l'un des symboles du
libéralisme et de la liberté des échanges.

En somme, l’OMC a pour mission d'assurer des échanges mondiaux, plus nombreux et plus
loyaux, en restant fidèle à la philosophie attachée au GATT, mais les méthodes ne sont plus
tout à fait les mêmes et les secteurs concernés par les négociations non plus.

Le champ d’action de l’OMC :


Il y a de nombreuses façons de considérer l'OMC. C'est une organisation qui s'emploie à
libéraliser le commerce. C'est un cadre dans lequel les gouvernements négocient des accords
commerciaux. C'est un lieu où ils règlent leurs différends commerciaux. L'OMC administre
un système de règles commerciales.

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C'est avant tout un cadre de négociation … L'OMC est essentiellement un lieu où les
gouvernements Membres se rendent pour essayer de résoudre les problèmes commerciaux qui
existent entre eux. La première étape consiste à discuter. L'OMC est le fruit de négociations et
tout ce qu'elle fait est le résultat de négociations. Les travaux menés actuellement par l'OMC
découlent en majeure partie des négociations qui se sont tenues de 1986 à 1994, dénommées
le Cycle d'Uruguay, et de négociations antérieures qui ont eu lieu dans le cadre de l'Accord
général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT). L'OMC accueille actuellement de
nouvelles négociations, dans le cadre du «Programme de Doha pour le développement» lancé
en 2001.
Lorsque les pays se sont heurtés à des obstacles au commerce et ont voulu les réduire, les
négociations ont contribué à libéraliser le commerce. Mais l'OMC ne s'emploie pas seulement
à libéraliser le commerce, et dans certaines circonstances, ses règles favorisent le maintien
d'obstacles au commerce – par exemple pour protéger les consommateurs ou empêcher la
propagation d'une maladie.
C'est un ensemble de règles … Au cœur du système se trouvent les Accords de l’OMC,
négociés et signés par la majeure partie des puissances commerciales du monde. Ces
documents constituent les règles juridiques de base du commerce international. Ils sont
essentiellement des contrats, aux termes desquels les gouvernements sont tenus de maintenir
leur politique commerciale à l’intérieur de limites convenues.
Bien qu’ils soient négociés et signés par des gouvernements, leur objectif est d’aider les
producteurs de biens et de services, les exportateurs et les importateurs à exercer leurs
activités, tout en permettant aux gouvernements de répondre à des objectifs sociaux et
environnementaux.
L’objectif primordial du système est de contribuer à favoriser autant que possible la liberté
des échanges, tout en évitant les effets secondaires indésirables. Il s’agit notamment de
supprimer les obstacles. Il s’agit aussi d’informer les particuliers, les entreprises et les
pouvoirs publics sur les règles commerciales en vigueur dans le monde et de leur donner
l’assurance qu’il n’y aura pas de changement soudain dans les politiques appliquées.
En d’autres termes, les règles doivent être «transparentes» et prévisibles. Et elle aide à régler
les différends ... C'est le troisième volet important des activités de l’OMC. Les relations
commerciales font souvent intervenir des intérêts contradictoires. Les accords, y compris ceux
qui ont été négociés laborieusement dans le système de l’OMC, ont souvent besoin d’être
interprétés. La meilleure manière de régler ces différends est de faire appel à une procédure
neutre établie sur une base juridique convenue. C’est l’objectif du processus de règlement des
différends énoncé dans les Accords de l’OMC.
Les travaux de l’OMC ne se limitent pas à des accords spécifiques énonçant des obligations
spécifiques. Les gouvernements membres débattent également de diverses autres questions,
en général dans le cadre des comités ou de groupes de travail spéciaux. Certaines sont déjà
anciennes et d'autres nouvelles pour le système du GATT/de l'OMC. Certaines sont des
questions spécifiques, d'autres touchent à plusieurs thèmes traités par l'OMC.
Certaines pourraient donner lieu à des négociations. Il s'agit notamment des questions
suivantes: • groupements économiques régionaux ; • commerce et environnement ;
• commerce et investissement ; • politique de la concurrence ; • transparence des marchés
publics ;• «facilitation» des échanges (simplifier les procédures commerciales, faciliter les
flux commerciaux au moyen de mesures allant plus loin que la levée des obstacles tarifaires et
non tarifaires) ; • commerce électronique ;• commerce et droits des travailleurs Cette question

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n'est pas inscrite au programme de travail de l’OMC, mais, comme elle a beaucoup retenu
l'attention.
Les arguments en faveur d’un commerce ouvert appuyé par l’OMC:
Du point de vue économique, la justification d’un système commercial ouvert fondé sur des
règles convenues au niveau multilatéral est fort simple et relève essentiellement du bon sens
commercial. Elle est cependant également étayée par les faits: l’évolution du commerce
international et de la croissance économique depuis la seconde guerre mondiale.
Les droits de douane sur les produits industriels ont fortement fléchi et sont en moyenne
inférieurs à 5 pour cent dans les pays industrialisés. Au cours des 25 premières années qui ont
suivi la guerre, la croissance de l’économie mondiale était de 5 pour cent par an en moyenne,
ce taux élevé étant en partie imputable à la réduction des obstacles au commerce. La
croissance du commerce mondial a été encore plus rapide, avec un taux moyen d’environ 8
pour cent pendant cette période.
Les données montrent qu’il y a un lien statistique indiscutable entre libéralisation du
commerce et croissance économique. D’après la théorie économique, ce lien s’explique par de
bonnes raisons. Tous les pays, y compris les plus pauvres, ont des ressources — humaines,
industrielles, naturelles, financières — qu’ils peuvent exploiter pour produire des biens et des
services destinés à être vendus sur le marché intérieur ou à l’étranger.
La science économique nous enseigne que nous pouvons tirer parti du commerce de ces biens
et services. Pour dire les choses simplement, le principe de l’«avantage comparatif» signifie
que les pays prospèrent d’abord en tirant profit de leurs ressources pour concentrer leurs
efforts sur ce qu’ils peuvent produire dans les meilleures conditions, et ensuite en échangeant
ces produits contre ceux que d’autres pays produisent dans les meilleures conditions.
Autrement dit, des politiques commerciales libérales — celles qui garantissent la circulation
sans restriction des biens et des services — accroissent la concurrence, encouragent
l'innovation et engendrent le succès. Elles amplifient le bénéfice que l’on peut retirer de la
production la meilleure, la mieux conçue et effectuée au meilleur prix. Le succès dans le
commerce, cependant, n’est pas un phénomène statique.
Telle entreprise parfaitement compétitive pour un produit peut le devenir moins qu’une autre
lorsque le marché évolue ou lorsque des techniques nouvelles permettent de fabriquer un
produit moins cher et meilleur. Les producteurs sont encouragés à s'adapter progressivement
et de façon relativement indolore. Ils peuvent fabriquer des produits nouveaux, trouver un
nouveau «créneau» dans leur branche d’activité existante ou se lancer dans des domaines
nouveaux.
L’expérience montre que la compétitivité peut aussi passer d’un pays à l’autre. Un pays qui a
peut-être été favorisé par des coûts de main-d’œuvre moins élevés ou par d’abondantes
ressources naturelles peut perdre sa compétitivité pour certains biens ou services à mesure que
son économie se développe. Toutefois, grâce à l’effet de stimulation exercé par l’ouverture de
l’économie, il peut redevenir compétitif pour d’autres biens ou services. Il s’agit là, en règle
générale, d’un processus graduel.
Néanmoins, la tentation de refuser le défi que représentent des importations compétitives est
toujours présente. Et les gouvernements des pays riches sont davantage susceptibles de céder
à l'appel de la sirène du protectionnisme, dans le but d'en retirer un avantage politique à court
terme, en accordant des subventions, en imposant des formalités administratives complexes et
en se retranchant derrière des objectifs généraux légitimes, tels que la préservation de

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l'environnement ou la protection des consommateurs, comme prétexte pour protéger les
producteurs.
La protection conduit à terme à des producteurs hypertrophiés et inefficaces offrant aux
consommateurs des produits dépassés et peu attrayants. En fin de compte, malgré la
protection et les subventions, les usines doivent fermer leurs portes et les emplois
disparaissent. Si d’autres gouvernements de par le monde appliquent eux aussi les mêmes
politiques, les marchés se contractent et l’activité économique mondiale ralentit. L’un des
objectifs que les gouvernements visent à travers les négociations de l'OMC est d’empêcher
une telle dérive destructive vers le protectionnisme, et qui va à l’encontre du but recherché.
Le but primordial du système est de faire en sorte que le commerce soit aussi libre que
possible – dès lors que cela n’a pas d’effets secondaires indésirables – car cela est important
pour le développement économique et le bien-être. Cela passe en partie par la suppression des
obstacles. Mais il faut aussi veiller à ce que les individus, les entreprises et les gouvernements
sachent quelles règles commerciales sont appliquées dans le monde et aient l’assurance
qu’elles ne seront pas modifiées brusquement. Autrement dit, les règles doivent être
“transparentes” et prévisibles.
Bien souvent, les relations commerciales mettent en jeu des intérêts contradictoires. Les
accords, y compris ceux qui sont négociés à grand-peine dans le cadre de l’OMC, ont souvent
besoin d’être interprétés. La façon la plus harmonieuse de régler ces divergences est de
recourir à une procédure neutre reposant sur des bases juridiques convenues. C’est le but du
processus de règlement des différends prévu dans les Accords de l’OMC.
Contexte de l’évolution du commerce mondial sous les auspices de l’OMC :
L'économie mondiale est en constante évolution, mais cette évolution n'est pas toujours facile
à anticiper. Pour autant, il convient d'en recenser certains des facteurs clés et d'évaluer leur
impact potentiel sur les perspectives et enjeux liés au commerce international comme sur le
devenir des pays en développement.
Une géographie économique en pleine évolution. L'émergence des pays du Sud a
profondément modifié la géographie économique mondiale de l'après-guerre froide. Leur
contribution au PIB mondial, aux échanges commerciaux et aux flux d'investissements, à
l'aide au développement et à l'innovation et au développement technologiques est
considérable.
Compte tenu de la densité de population et des taux élevés de pauvreté qu’on y enregistre, la
croissance de ces pays devra, et pourrait fort bien, continuer à augmenter à un rythme
supérieur à celui des pays membres de l'Organisation de coopération et de développement
économiques (OCDE).
Les nations émergentes du Sud constituent par ailleurs de nouveaux marchés en pleine
expansion pour d'autres pays en développement, et leur exemple est riche d'enseignements en
matière de croissance inclusive. Leurs besoins en matière de croissance en général, et de
croissance inclusive en particulier, doivent être pris en considération si l’on veut que le
multilatéralisme fonctionne plus efficacement.
Entre 2000 et 2010, la part cumulée de l'Union européenne et des Etats-Unis dans le
commerce mondial a diminué d'environ 7 pour cent, alors que celle du Brésil, de la Chine et
de l'Inde a augmenté dans le même temps dans des proportions comparables (taux calculés à
partir de la carte du commerce du Centre du commerce international).

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La croissance des pays émergents du Sud doit être mise à profit pour élargir et diversifier les
perspectives des autres pays en matière de commerce et de développement, notamment par le
biais d'initiatives trilatérales de coopération pour le développement entre les bailleurs du
Nord/du Sud, les bénéficiaires du Sud et les organismes d’exécution du Sud, ce qui suppose
notamment de tenir compte de l'importance du "savoir", troisième facteur essentiel de
production, après le capital et le travail.
L’OMC et la bonne gouvernance : quelle situation en cours ?
Toutefois, l'OMC (Organisation mondiale du commerce) apparaît comme une institution
internationale en crise : le cycle de négociations ouvert en novembre 2001 à Doha et qui
aurait dû s'achever le 1er janvier 2005 est dans l'impasse. Ces négociations devaient conduire à
une nouvelle libéralisation des échanges entre les membres de l'OMC, censée favoriser la
croissance et le développement de l'ensemble des nations, principalement des pays les moins
avancés
Le Programme de Doha pour le développement (PDD) avait pour premier objectif
l’intégration des pays en développement dans un « système commercial multilatéral
ouvert [et] fondé sur des règles [dans des conditions qui] correspondent aux besoins de leur
développement économique ». Des années plus tard, force est de constater que ce programme
ambitieux peine à aboutir. Après avoir été suspendues entre 2006 et 2008, les négociations
sont toujours dans l’impasse, malgré la réussite en demi-teinte de la conférence ministérielle
de Bali en décembre 2013, le « paquet de Bali » ne couvrant que 10 pourcent du mandat de
Doha.
En lançant à Doha un nouveau cycle orienté vers le développement, les États membres de
l’OMC avaient pris un double engagement : 1) corriger les déséquilibres occasionnés dans les
relations Nord-Sud par la mise en œuvre des accords de l’Uruguay round ; 2) dans le sillage
des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), mettre le système commercial
multilatéral au service du développement et de la lutte contre la pauvreté.
Le projet était ambitieux. Il s’agissait non seulement de réinterpréter les accords dans leur
forme, leur substance et leur finalité à l’aune du développement, mais aussi de doter les pays
en développement (PED) et les pays les moins avancés (PMA) de capacités commerciales
adéquates pour s’intégrer avec succès à l’économie mondiale. Cette nouvelle articulation
entre globalisation et développement devait passer par un réexamen des dispositions du
traitement spécial et différencié (TSD) « en vue de les renforcer et de les rendre plus précises,
plus effectives et plus opérationnelles » (paragraphe 44 de la Déclaration de Doha).
Problématique :
Rien ne va plus dans le monde des négociations commerciales. Depuis sa création il y a plus
20 ans, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) n’a pas été capable de conclure un seul
cycle de négociations. Les négociations du Cycle de Doha sont aujourd’hui suspendues.

Les conférences ministérielles se sont succédé sans qu'un accord ait pu être trouvé pour mettre
en œuvre le programme de Doha pour le développement. Pour les Etats-Unis et l'Union
européenne, il n'est désormais plus question d'évoquer ce programme. Mais pour l'Inde et les
autres pays en développement, il n'est pas question d'ainsi abandonner cet agenda, dont
l'objectif était précisément de répondre à leurs demandes. Il en résulte un premier élément de
blocage dans la négociation de la déclaration finale de la conférence ministérielle de Buenos
Aires.

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Un autre élément de blocage, à la fois inédit et plus fondamental, concerne le refus des Etats-
Unis d'inclure dans la déclaration finale (2017) une phrase affirmant le rôle central de l'OMC
dans les négociations commerciales internationales. En effet, l'administration Trump souhaite
privilégier les négociations bilatérales d'Etat à Etat, plutôt que le cadre multilatéral de l'OMC
qui permet aux pays en développement de se coaliser. L'administration Trump souhaite
également réviser la règle de la nation la plus favorisée (NPF). C'est donc le rôle de l'OMC en
tant que principal forum de négociations commerciales garantissant la non-discrimination
dans les échanges qui est remis en cause par les Etats-Unis.

Il en résulte que les négociations du projet de déclaration finale de la conférence ministérielle


de Buenos Aires ont dû être suspendues fin novembre par le président du Conseil général de
l'OMC, suite au veto des Etats-Unis concernant le rôle de l'OMC et aux divergences Nord-
Sud concernant la centralité de la dimension du développement.
Par ailleurs, comme a indiqué le porte-parole et directeur de l'information et des relations
extérieures de l'OMC, Keith Rockwell, dans une interview écrite accordée vendredi14 juillet
2018 à Xinhua, L'Organisation mondiale du commerce (OMC) fait face à des défis sans
précédent en raison des tensions commerciales,

'' Il est clair que de plus en plus de mesures commerciales restrictives seront appliquées, ce
qui aura un impact sur la croissance du commerce et l'économie globale", a déclaré ce
responsable.

Les tensions commerciales se sont intensifiées après l'imposition par les Etats-Unis de tarifs
douaniers élevés sur les produits d'acier et d'aluminium importés ainsi que sur les
marchandises chinoises.

"Le système commercial multilatéral a été créé spécifiquement pour des moments comme
celui-ci (...) La seule manière de régler cette situation au bénéfice de tous est de discuter et de
conclure un accord à l'OMC", a-t-il noté.

Dans un autre registre, les manifestations et les affrontements entre la police américaine et les
militants anti-mondialisation sont à peu près tout ce que l’opinion a retenu de la conférence de
l’OMC à Seattle en novembre 1999.

En somme, l’OMC est de plus en plus critiquée et fait face à une multitude de difficultés et
appelé à gérer moult dossiers épineux.

Annonce du plan :
Nous allons traiter dans une première partie le bilan des réalisations à l’actif de l’OMC, dans
une seconde partie nous aborderons les limites de l’OMC et les critiques à son égard, avant de
s’attarder en troisième partie sur l’avenir de l’OMC pour sortir de la crise.

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PREMIERE PARTIE : BILAN DES REALISATIONS A L’ACTIF DE L’OMC :
CHAPITRE I : LA STRUCTURATION INSTITUTIONNELLE ET SUIVI
REGLEMENTAIRE :
Le 1er janvier 1995, l'Organisation mondiale du commerce a été établie avec 128 Membres et
un statut permanent, ce qui en faisait à la fois la première nouvelle organisation internationale
de l'après-guerre froide et la dernière organisation internationale de l'après-Seconde Guerre
mondiale.
L'OMC a marqué un tournant décisif. Elle a le même statut juridique et organisationnel que
d'autres organisations internationales, comme le FMI et la Banque mondiale. Et elle s'était vu
confier de nouvelles responsabilités. Outre l'administration de l'accord existant sur le
commerce des marchandises (produits agricoles et produits manufacturés), l'OMC devait
superviser les nouveaux accords sur les services et sur la propriété intellectuelle, le processus
d'examen des politiques commerciales et l'organe de règlement des différends, qui avait été
renforcé.
Plusieurs réformes ont accompagné ces changements juridiques et administratifs, la plus
importante étant l'obligation de tenir des conférences ministérielles tous les deux ans pour
guider les travaux de la nouvelle Organisation. Ces changements formels apportés à
l'institution ont entraîné des changements informels importants. L'un des plus frappants a été
l'engagement croissant des Membres dans les activités courantes de l'OMC.
Cinq fonctions de base :
L'Accord de Marrakech, charte fondatrice de l'OMC, a conféré à l'OMC cinq fonctions
spécifiques –c'était la première fois que le rôle de l'Organisation était clairement défini et
expressément convenu par les Membres.

Ce rôle consistait :

-Faciliter la mise en œuvre, l'administration et le fonctionnement des Accords de l'OMC;

-Servir d'enceinte pour les négociations entre les Membres concernant leurs relations
commerciales multilatérales et de cadre pour la mise en œuvre des résultats de ces
négociations;

-Administrer le Mémorandum d'accord sur le règlement des différends, mécanisme juridique


pour le règlement des différends commerciaux;

-Surveiller les politiques commerciales nationales par le biais du Mécanisme d'examen des
politiques commerciales;

-Coopérer, selon que de besoin, avec le FMI et avec la Banque mondiale et les organismes
affiliés en vue d'assurer une plus grande cohérence dans l'élaboration des politiques
économiques au niveau mondial.

Outre ces fonctions essentielles convenues à Marrakech, l'OMC a aussi été chargée de fournir
une assistance technique et une formation aux pays en développement – fonction qui, depuis
plus de 20 ans, occupe une place de plus en plus importante dans les travaux de l'OMC et
mobilise de plus en plus de ressources à mesure que de nouveaux Membres accèdent à
l'Organisation et que son champ d'action s'élargit.

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I. PORTEE DE LA STRUCTURATION INSTITUTIONNELLE :
1. RENFORCEMENT INSTITUTIONNEL DE LA COOPERATION
COMMERCIALE MONDIALE :

Principes fondamentaux et règles contraignantes

Comme le GATT, l'OMC se fonde sur un certain nombre de principes essentiels qui se
retrouvent dans tous ses accords et qui sous-tendent le fonctionnement du système
commercial multilatéral.

L'un de ces principes, considéré comme un pilier de l'OMC, est celui de la non-
discrimination, qui prend deux formes. La première – le traitement de la nation la plus
favorisée (NPF) – interdit aux Membres de faire une discrimination entre leurs partenaires
commerciaux en accordant un traitement plus favorable à un ou plusieurs autres Membres. Le
deuxième principe – le traitement national – interdit également toute discrimination entre les
fournisseurs étrangers et les fournisseurs nationaux, exigeant que les produits similaires soient
traités de la même façon.

Un autre principe est celui de la libéralisation progressive, qui demande l'ouverture des
marchés par l'élimination graduelle des obstacles tarifaires et non tarifaires, compte tenu des
circonstances particulières des pays en développement et des pays les moins avancés (PMA).

Un dernier principe est celui de la prévisibilité. Pour garantir un environnement commercial


stable et prévisible, les Membres de l'OMC s'engagent, entre autres, à respecter des règles
contraignantes, à faire en sorte que les règles commerciales soient transparentes et connues du
public, à procéder à l'examen de la politique commerciale de chaque Membre, à notifier
régulièrement leurs mesures commerciales aux comités pertinents de l'OMC et à promouvoir
une concurrence loyale, conformément aux dispositions des Accords de l'OMC.

Là où l'OMC diffère du GATT, c'est que ses règles – à quelques exceptions près
seulement – s'appliquent à tous les Membres. Le GATT était aussi un système
juridiquement contraignant – et non un accord fondé sur l'effort maximal – mais un
certain nombre de ses dispositions – surtout après la création des « codes » du Tokyo
Round – étaient facultatives et les obligations contraignantes (y compris les
consolidations tarifaires) qu'il prévoyait n'étaient pas universelles.

L'un des principaux objectifs du Cycle d'Uruguay était non seulement d'étendre les règles du
système à des domaines tels que les services, l'investissement et la propriété intellectuelle,
mais aussi de les rendre universelles. Au lieu de l'approche « à la carte » du Tokyo Round
pour l'adhésion aux nouvelles règles, tous les Membres de l'OMC (à quelques exceptions
près) étaient désormais tenus de respecter tous les résultats du Cycle d'Uruguay.

Une organisation conduite par ses Membres où les décisions sont prises par consensus

L'OMC, comme le GATT, est pilotée par les gouvernements Membres. Toutes les grandes
décisions sont prises par l'ensemble des Membres – c'est-à-dire par les Ministres (qui se
réunissent au moins une fois tous les deux ans) ou par les ambassadeurs ou les délégués (qui
se réunissent régulièrement à Genève) – et elles sont normalement adoptées par consensus.

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À cet égard, l'OMC diffère de certaines autres organisations internationales, telles que la
Banque mondiale et le FMI, qui délèguent certains pouvoirs à un conseil d'administration ou
au chef de secrétariat de l'Organisation, et qui prennent les décisions à la majorité ou sur la
base de la pondération des voix. Cela reflète la nature contractuelle de l'OMC, fondée sur des
règles.

En principe et dans la pratique, il ne peut pas être attendu des Membres qu'ils mettent en
œuvre des engagements dont ils ne sont pas convenus. La règle du consensus empêche aussi
les Membres les plus puissants de dicter l'ordre du jour; elle oblige tout le monde à négocier
jusqu'à ce qu'un compromis se dégage, et elle légitime les résultats obtenus.

Structure organisationnelle de l’OMC :

Étant donné l'élargissement de son champ d'action et de sa composition, l'OMC a un ensemble


plus structuré et plus étendu de conseils et de comités au sein desquels les Membres peuvent
partager des renseignements, débattre des problèmes et prendre des décisions.

L'organe suprême est la Conférence ministérielle qui se réunit au moins une fois tous les deux
ans. L'obligation de tenir une conférence ministérielle formelle tous les deux ans a été
une innovation de l'OMC qui vise à renforcer la direction du système, à consolider les liens
avec les gouvernements nationaux et à encourager un engagement politique de haut niveau.

Les conférences ministérielles – ont commencé avec la Conférence inaugurale à Singapour en


1996 – réunissent les Ministres du commerce de tous les gouvernements Membres et offrent
une enceinte très importante pour discuter et décider de toute question pertinente au titre des
divers accords de l'OMC.

Compte tenu de leur plus grande visibilité et du niveau élevé des participants, les conférences
ministérielles génèrent invariablement des attentes de progrès et apparaissent de plus en plus
comme des occasions importantes de clarifier, orienter et dynamiser les travaux de l'OMC –
parfois avec succès comme à Bali en 2013, et d'autres fois avec moins de succès, comme à
Seattle en 1999.

Comme les Ministres ne se réunissent qu'une fois tous les deux ans, dans l'intervalle, c'est le
Conseil général qui est l'organe exécutif de l'OMC. Le Conseil général est chargé de
superviser tous les organes de l'OMC.

Pour les questions relatives au règlement des différends, le Conseil général se réunit en tant
qu'Organe de règlement des différends (ORD).

Pour les examens des politiques commerciales, il se réunit en tant qu'Organe d'examen des
politiques commerciales. Dans chaque cas, il s'agit bien du même Conseil général – mais son
mandat est différent.

Trois autres conseils, qui s'occupent chacun d'un large domaine du commerce, relèvent du
Conseil général : le Conseil du commerce des marchandises; le Conseil du commerce des
services et le Conseil des aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au
commerce. Ces conseils chapeautent eux-mêmes un certain nombre de comités subsidiaires
(le Conseil du commerce des marchandises, par exemple, chapeaute onze comités).

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Six autres organes (appelés « comités » parce que leur champ d'action est plus limité) relèvent
également du Conseil général et s'occupent de questions telles que le commerce et le
développement, l'environnement et les questions administratives.

Quand le Cycle de Doha a été lancé en 2001, les Ministres ont établi un Comité des
négociations commerciales (CNC), placé sous l'autorité du Conseil général, mais présidé par
le Directeur général de l'OMC. Ce comité, qui se compose aussi de tous les Membres de
l'OMC, supervise la conduite générale des négociations du Cycle de Doha. Le CNC se réunit
tous les deux ou trois mois environ, mais la fréquence de ses réunions dépend des priorités des
Membres à un moment donné et de l'état d'avancement des négociations.

Les présidents des différents organes rendent régulièrement compte au Conseil général des
progrès et des faits nouveaux survenus dans leurs domaines de compétence respectifs, la
fréquence de leurs rapports dépendant des mandats de chacun. Outre la supervision de ces
organes, le Conseil général supervise aussi le processus de désignation du Directeur général et
les travaux préparatoires de fond des conférences ministérielles.

Défis et atouts institutionnels :

Dans la mesure où les décisions à l'OMC sont généralement prises par consensus, sans vote,
les mécanismes consultatifs jouent un rôle essentiel pour aider les Membres – dans leur
grande diversité – à parvenir à un accord.

L'OMC – plus encore que le GATT avant elle – s'occupe de questions commerciales
extrêmement complexes, qui évoluent rapidement. Il n'est pas toujours facile de trouver un
équilibre entre les perspectives, les préoccupations et les intérêts très divers des 164 Membres
de l'Organisation.

Une approche courante dans le passé consistait à traiter les questions difficiles en petits
groupes avant de chercher un consensus parmi tous les Membres. Le Directeur général invitait
les délégations « représentatives » – individuellement, par deux ou par trois, ou en groupe de
20 ou 30 –, en général au niveau des chefs de délégation, pour tenter d'aplanir les divergences
et de trouver un terrain d'entente.

A mesure que le commerce est devenu plus important pour les intérêts économiques des pays
et que le pouvoir commercial au sein du système est devenu plus diffus, les pressions se sont
accentuées en faveur d'un engagement plus large, et non plus étroit, des Membres à l'OMC.

À cet égard, les négociations suivant l'« approche ascendante » qui ont abouti à la conclusion
de l'Accord sur la facilitation des échanges en 2013 constituent un modèle potentiellement
important pour d'autres négociations à l'OMC. Cette négociation « conduite par les Membres
» a sans doute été la plus inclusive et la plus transparente de toute l'histoire du GATT/ de
l'OMC.

Toutes les délégations intéressées ont participé activement aux discussions et à la conception
de l'Accord tout au long du processus de négociation, le Président faisant surtout office de
facilitateur, chargé de trouver un compromis sur la base des souhaits exprimés par les
délégations.

12
2. Institutionnalisation du règlement du différend :

L'une des caractéristiques essentielles de l'OMC est son système renforcé de règlement des
différends, qui est un résultat important du Cycle d'Uruguay. Le règlement des différends a
toujours été une fonction fondamentale du système commercial multilatéral, mais la création
de l'Organe de règlement des différends (ORD) représente un réel progrès par rapport à
l'approche suivie à l'époque du GATT, et cela à plusieurs égards importants.

Avant tout, l'efficacité du système a été améliorée car on a pris conscience qu'il était
important de régler rapidement les différends pour que l'OMC fonctionne efficacement et sans
encombre. Alors qu'aucun délai n'était fixé pour les différends soumis au titre du GATT,
l'OMC a établi une procédure plus structurée avec des étapes et des délais clairement définis.
C'est pourquoi l'OMC est dotée de l'un des plus rapides mécanismes internationaux de
règlement des différends, voire du plus rapide de ces mécanismes.

Dans la plupart des affaires, la procédure de groupe spécial est achevée dans un délai de 14
mois environ; et les rapports de l'Organe d'appel sont, à de très rares exceptions près, publiés
en moins de trois mois.

Une autre caractéristique importante du système de l'OMC est qu'il est désormais fondé sur
la règle du « consensus inverse », c'est-à-dire que l'établissement de groupes spéciaux
chargés du règlement des différends et l'adoption de décisions ne peuvent pas être bloqués à
moins que tous les Membres, y compris le Membre plaignant, ne conviennent de le faire. Cela
contraste avec l'approche du consensus suivie à l'époque du GATT qui permettait à un seul
Membre, y compris bien sûr le Membre défendeur, de bloquer ces étapes.

En outre, avec la création de l'Organe d'appel en 1995, que les Membres peuvent saisir pour
faire appel de questions de droit couvertes par les rapports des groupes spéciaux, s'est
constituée une jurisprudence faisant autorité qui contribue à la sécurité et à la prévisibilité du
système commercial multilatéral.

Les Membres ont davantage confiance dans le système, comme en témoigne la fréquence à
laquelle ils y ont recours. Alors qu'en 50 ans d'existence, le GATT a traité 121 affaires,
l’OMC affiche un résultat plus qu’exceptionnel dans le domaine du règlement des différends
commerciaux. En effet, avec plus de 550 affaires soumises depuis 1995, près de 400 décisions
rendues à l’intérieur d’un délai moyen de 10 mois, 90 % des décisions respectées par les
Membres et moins de 4 % d’affaires ayant nécessité l’imposition de sanctions commerciales
de la part du Membre plaignant, on est forcé de considérer que le « tribunal » de l’OMC
fonctionne bien et probablement mieux que tout autre tribunal international existant. L’ORD
est loin devant la Cour internationale de justice, principal organe juridictionnel des Nations
Unies, qui a examiné 161 différends depuis son établissement il y a plus de 68 ans, ainsi que
devant le Tribunal international du droit de la mer, qui a entendu 23 affaires depuis sa création
en 1996.

Le nombre croissant de différends portés devant l'OMC est simplement dû, en partie, à
l'expansion du commerce mondial et au renforcement des règles négociées lors du Cycle
d'Uruguay; mais le fait que l'OMC est saisie d'un plus grand nombre de différends montre
aussi que les Membres ont davantage confiance dans le système et qu'ils attachent de plus en
plus d'importance à la primauté du droit dans les relations commerciales internationales.

13
Un système de règlement des différends accessible

L'une des caractéristiques les plus frappantes du système de règlement des différends de
l'OMC est qu'il est accessible à tous les Membres, et pas seulement aux pays développés.
Jusqu’en 2015, les pays en développement Membres ont engagé 226 différends, contre 292
pour les pays développés Membres.

Certaines années, les plaintes déposées par des pays en développement ont été nettement plus
nombreuses que celles déposées par des pays développés. Par exemple, en 2010 et 2012, elles
représentent, respectivement, 65% et 63% des plaintes déposées, ce qui s'explique en partie
par la part croissante des pays en développement dans le commerce mondial et en partie par le
fait qu'ils ont de plus en plus confiance dans le système de règlement des différends.

Il arrive que certains Membres préfèrent ne pas agir seuls pour contester une mesure, mais
préfèrent s'allier à un ou plusieurs autres Membres. Le Mémorandum d'accord sur le
règlement des différends (Mémorandum d'accord) autorise l'établissement d'un seul groupe
spécial pour examiner les contestations visant une mesure formulées par plusieurs Membres.

Sans nul doute, l'une des raisons de la participation importante des pays en développement au
processus de règlement des différends est la possibilité d'avoir accès au Centre consultatif sur
la législation de l'OMC. Cette organisation internationale indépendante, établie en 2001 par
un groupe de Membres de l'OMC, a fourni une aide juridique gratuite ou à tarif réduit aux
pays en développement membres du Centre et aux PMA dans 45 procédures distinctes de
règlement des différends à l'OMC, soit en mandatant directement les juristes qu'elle emploie
ou, dans le cadre de six procédures, en faisant appel à des conseils externes.
Établissement d'un système de règlement des différends fondé sur des règles

Le système a obtenu des résultats tout aussi importants dans la réalisation de son principal
objectif, à savoir régler les différends entre les Membres de manière à assurer la « sécurité et
la prévisibilité du système commercial multilatéral » sont tout aussi importants. Cela a été
accompli principalement par l'établissement d'un système de règlement des différends fondé
sur des règles. Il s'agit là du deuxième grand fil conducteur qui a guidé le règlement des
différends à l'OMC ces dernières années.

14
En substance, dans un système fondé sur des règles, les différends sont résolus par
l'application de la règle de droit plutôt que par la voie diplomatique, comme cela était souvent
le cas dans le cadre du GATT. L'approche diplomatique du règlement des différends était
adaptée lors de la période qui a suivi la Seconde Guerre mondiale – où le système commercial
était constitué d'un groupe plus restreint de pays se réclamant des mêmes idées et où
l'intégration économique n'était pas aussi poussée.

Bien que le Mémorandum d'accord énonce des règles régissant la manière dont les différends
devraient se dérouler, il indique clairement qu'il est toujours préférable d'apporter une
solution mutuellement convenue au différend. Pour ce faire, il établit des procédures
destinées à encourager les parties à régler leurs différends sans avoir recours aux procédures
contradictoires formelles. Les parties sont tenues de juger s'il serait « utile » d'engager un
différend.

En outre, les groupes spéciaux existaient déjà dans le système du GATT, mais les
négociateurs du Cycle d'Uruguay ont créé une nouvelle institution juridique importante en
vertu du Mémorandum d'accord : l'Organe d'appel. On pensait que l'Organe d'appel ne
jouerait pas un rôle très actif dans le règlement des différends à l'OMC, ce qui pourrait
paraître surprenant au vu de l'abondante jurisprudence qu'il a produite et de sa solide
réputation en tant qu'organe juridictionnel international.

Les négociateurs du Cycle d'Uruguay pensaient que l'Organe d'appel serait rarement saisi;
alors que, dans les faits, environ 70% des rapports de groupes spéciaux ont fait l'objet d'un
appel. Lorsqu'il connaît des appels, l'Organe d'appel a un rôle important à jouer dans la
clarification des droits et obligations des Membres découlant des Accords de l'OMC. Dans le
même temps, il doit veiller à ce que ses décisions, ainsi que les rapports dont il est fait appel,
n'accroissent ni ne diminuent les droits et obligations résultant pour les Membres des accords
de l'OMC.
II. SUIVI ET RENFORCEMENT REGLEMENTAIRE :

La nouvelle OMC promettait d'instaurer une économie mondiale plus ouverte et plus intégrée.
Le Cycle d'Uruguay avait abouti à une réduction tarifaire globale de 40%, à la libéralisation
de nouveaux secteurs comme l'agriculture, les textiles et les services et à l'engagement ferme
d'engager des négociations sectorielles dans le cadre de la nouvelle Organisation.

Depuis lors, l'OMC a supervisé la mise en œuvre, l'administration et le fonctionnement des


accords de grande portée issus du Cycle d'Uruguay. Elle a poursuivi les objectifs du
programme incorporé du Cycle en offrant une enceinte pour la négociation de nouveaux
accords commerciaux. Bien que les négociations du Cycle de Doha ne soient pas encore
achevées, d'autres négociations portant sur des secteurs ou des questions spécifiques ont été
menées à bien dans des domaines allant des services jusqu'aux produits des technologies de
l'information, en passant par la facilitation des échanges, tandis que l'Accord plurilatéral sur
les marchés publics continue de s'élargir et d'attirer de nouveaux Membres.

1. Suivi de la réduction des obstacles :


Globalement, les droits de douane ont continué de baisser pour les pays développés comme
pour les pays en développement, la moyenne des droits appliqués s'établissant à seulement 8%
en 2014. Mais, pour un certain nombre de produits agricoles et de produits manufacturés, ces
droits représentent encore un élément important des coûts du commerce. Même s'il est clair

15
que la réduction ou l'élimination des droits de douane stimule les échanges et améliore l'accès
aux marchés, leur consolidation contribue aussi à l'intégration des économies en assurant plus
de prévisibilité.
Lorsque les Membres de l'OMC négocient des réductions tarifaires, ils négocient les niveaux
auxquels ils conviennent de limiter les droits de douane appliqués aux marchandises qu'ils
importent des autres Membres. Ces limites, appelées droits « consolidés », sont spécifiées
dans les listes de concessions de chaque Membre. Même si, pour certains Membres, il y a un
écart entre le niveau (plus élevé) des droits qu'ils se sont engagés à percevoir et le niveau
(plus bas) des droits qui sont effectivement appliqués, l'existence de consolidations tarifaires
est un facteur de prévisibilité et de transparence.

L'Accord sur les technologies de l'information (ATI) a été le premier accord de libéralisation
tarifaire négocié à l'OMC, et c'était aussi le plus important. Il a été conclu le 13 décembre
1996 à la première Conférence ministérielle de l'OMC, qui se tenait à Singapour. La
Déclaration ministérielle sur le commerce des produits des technologies de l'information a été
signée à l'origine par 29 Membres, mais ce nombre a rapidement augmenté; il était de 42 lors
de la mise en œuvre de l'Accord, au milieu de 1997.

Par suite de l'accession récente des Seychelles, l'ATI compte 52 participants (l'UE comptant
pour 1), dont la part dans le commerce mondial des produits des TI est d'environ 97%.
Conformément à l'Accord, les droits de douane sur divers produits des TI sont éliminés. Les
concessions tarifaires sont inscrites sur la liste de concessions de chaque participant à l'ATI
annexée à l'Accord sur l'OMC, de sorte que tous les Membres de l'OMC, même ceux qui ne
sont pas parties à l'Accord, peuvent bénéficier des possibilités commerciales offertes par la
libéralisation des droits de douane dans le secteur des TI en vertu du principe de la nation la
plus favorisée (NPF).

L'ATI a éliminé les droits d'importation sur un grand nombre de produits de haute
technologie, parmi lesquels les ordinateurs, le matériel de télécommunication, les semi-
conducteurs, les instruments scientifiques, etc. Le commerce des produits des TI était estimé à
1 600 milliards de dollars EU en 2013, soit près de trois fois plus que lorsque l'Accord a été
signé, ce qui représente environ 9% des exportations mondiales de marchandises. L'Accord a
beaucoup contribué à réduire le prix des produits des TI pour les consommateurs et les
importateurs.

Conscients des progrès technologiques importants réalisés depuis la conclusion de l'ATI en


1996, plusieurs Membres de l'OMC ont décidé en mai 2012 de lancer des négociations
sectorielles en vue d'éliminer les droits de douane sur une nouvelle génération de produits des
TI qui occupait une place de plus en plus importante dans le commerce mondial et la
croissance économique. Après 17 séries de négociations, plus de 50 Membres de l'OMC se
sont mis d'accord, en juillet 2015, sur la portée d'un deuxième accord élargi sur les
technologies de l'information. Parmi les 201 produits supplémentaires visés par cet accord
figurent de nouveaux semiconducteurs, les lentilles optiques, le matériel de navigation par
GPS …

L'un des changements fondamentaux apportés par le Cycle d'Uruguay a été d'interdire
l'utilisation de mesures non tarifaires spécifiques à l'agriculture et d'assujettir
l'ensemble du commerce des produits agricoles à des droits de douane ordinaires
exclusivement. Dans le cadre de ce processus dit de « tarification », les obstacles non
tarifaires ont été remplacés par des équivalents tarifaires, dont certains étaient très élevés.

16
À la conclusion du processus de tarification dans le domaine de l'agriculture, les Membres ont
reconnu qu'il fallait des mécanismes supplémentaires afin d'assurer l'accès aux marchés pour
les produits agricoles. La solution qu'ils ont négociée était celle des contingents tarifaires.
Dans le cadre d'un contingent tarifaire, les importations réalisées dans les limites d'un
contingent établi à l'avance sont assujetties à un droit plus faible que les importations hors
contingent, ce dernier droit étant souvent très élevé. Le but des contingents tarifaires était que
les quantités importées avant l'entrée en vigueur de l'Accord sur l'agriculture du Cycle
d'Uruguay puissent continuer d'être importées, tout en garantissant que certaines quantités
nouvelles seraient assujetties à des droits d'importation non prohibitifs.
2. Consolidation et élargissement du cadre réglementaire pour le commerce des
marchandises et services

Le Cycle d'Uruguay a modifié le mandat et le champ d'action du GATT/de l'OMC en


élargissant la portée des négociations commerciales, traditionnellement axées sur les droits de
douane, à de nouveaux domaines sensibles des politiques économiques nationales. En traitant
les services, les règlements techniques, les normes sanitaires, les droits de propriété
intellectuelle qui touchent au commerce et d'autres questions concernant les mesures prises à
l'intérieur des frontières, il a produit un cadre juridique plus solide et plus clair pour la
conduite du commerce international.

L'OMC a facilité la mise en œuvre, l'administration et le fonctionnement de ce cadre


réglementaire élargi.

Ajustement des disciplines relatives aux mesures non tarifaires

Comme les droits de douane ont régulièrement baissé dans le cadre du GATT/de l'OMC, ce
sont les mesures non tarifaires (MNT) – telles que les obstacles techniques au commerce
(OTC) et les mesures SPS – qui ont de plus en plus mobilisé l'attention.

Les MNT constituent un défi pour le système commercial multilatéral. Comment éviter que
des mesures appliquées conformément à des objectifs légitimes de politique générale ne
restreignent inutilement ou ne faussent les échanges ? Le système fondé sur des règles issu du
Cycle d'Uruguay s'est sensiblement élargi pour inclure un large éventail de MNT. Cependant,
l'intégration croissante des économies et l'extension du système fondé sur des règles ont créé
de nouvelles difficultés en matière de politique et intégré au débat divers acteurs qui soulèvent
de nouvelles préoccupations au sujet de la tension entre les règles internationales et la marge
de manœuvre nationale.

Renforcement des dispositions de l'Accord OTC

L'Accord OTC a été conçu pour maintenir un équilibre entre l'autonomie accordée aux
gouvernements en matière de réglementation pour poursuivre des objectifs de politique
publique et la nécessité d'éviter les obstacles non nécessaires au commerce.

Les dispositions de l'Accord OTC ont été renforcées grâce aux orientations adoptées par les
Membres depuis plus de 20 ans dans le cadre des travaux du Comité OTC. Dans le domaine
des normes internationales, par exemple, le Comité a établi six principes devant régir
l'élaboration de normes, guides et recommandations internationaux.

17
Renforcement des dispositions de l'Accord SPS

L'Accord SPS établit le cadre juridique relatif aux prescriptions visant la sécurité sanitaire des
produits alimentaires, la santé des animaux et la préservation des végétaux. Il a pour but de
permettre aux gouvernements d'appliquer des mesures pour faire en sorte que les
consommateurs soient approvisionnés en produits alimentaires dont la consommation est sans
danger.

Renforcement des disciplines multilatérales relatives aux licences d'importation et à


l'évaluation en douane

Depuis la création de l'OMC, les disciplines multilatérales relatives aux licences d'importation
ont encore été renforcées grâce aux travaux du Comité des licences d'importation. À titre
d'exemple, la procédure de notification à l'OMC des règlements et pratiques ainsi que des
changements qui leur sont apportés a été clarifiée, notamment en ce qui concerne le délai
accordé aux Membres pour présenter leurs réponses au questionnaire annuel sur les
procédures de licences.

L'Accord de l'OMC sur l'évaluation en douane, Grâce au suivi assuré par le Comité, les
procédures d'évaluation en douane des Membres de l'OMC sont devenues beaucoup plus
transparentes et prévisibles. Plus des trois quarts des Membres ont notifié à l'OMC leur
législation nationale sur l'évaluation en douane. En outre, certaines disciplines ont encore été
renforcées grâce aux travaux du Comité de l'évaluation en douane. Le Comité a par exemple
clarifié la manière dont le montant des intérêts et les importations de logiciels devaient être
traités aux fins de l'évaluation en douane, ainsi que la manière dont les Membres devaient
notifier à l'OMC les règles pouvant exister dans ce domaine.

Meilleure compréhension des aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent
au commerce (ADPIC)

En examinant la mise en œuvre de l'Accord sur les ADPIC, le Conseil des ADPIC a supervisé
le remaniement le plus complet, le plus divers sur le plan géographique et le plus ambitieux
des lois sur la propriété intellectuelle et des mesures destinées à les faire respecter qui ait
jamais été effectué.
À cette occasion, il a accumulé un ensemble exceptionnel d'informations fiables sur les
politiques dans le domaine de la propriété intellectuelle et dans les domaines connexes, qui
permet de mieux comprendre les choix divers en matière de politique et l'utilisation de
flexibilités par plus de 130 gouvernements nationaux.

Promotion de la réduction des subventions agricoles

Durant la période 1995-2013, l'utilisation de subventions à l'exportation par les Membres de


l'OMC telles qu'elles ont été notifiées à l'Organisation a fortement baissé. Cette évolution
positive peut s'expliquer par la hausse globale des prix internationaux depuis 2000, mais aussi
par les réformes entreprises par divers Membres.

18
Consolidation et extension des disciplines relatives au commerce des services

Avec l'instauration de l'Accord général sur le commerce des services (AGCS), le secteur de
l'économie mondiale le plus vaste et qui connaît la croissance la plus rapide a été intégré aux
disciplines de l'OMC.
Quelles sont les disciplines de l'OMC qui s'appliquent au commerce des services ? En
principe, l'AGCS repose sur les mêmes préceptes fondamentaux que le GATT. Ces préceptes
incluent des principes tels que la transparence, la prévisibilité de l'accès et la non-
discrimination, et la promotion des échanges et du développement grâce à une libéralisation
progressive.

III.L’OMC ET LA MONDIALISATION :
1. L’OMC : un régulateur de la mondialisation ?
L’OMC, est une véritable institution internationale disposant de la personnalité juridique et
apte à interpréter les accords commerciaux multilatéraux.
La création de l’OMC marque clairement « l’avènement d’une ère nouvelle » pour le
commerce mondial. Après que le GATT a érodé les obstacles douaniers au commerce
international, « la création de l’OMC correspond à l’uniformisation croissante des normes et
réglementations, des règles qui structurent le fonctionnement des marchés ».
L’OMC étend largement son champ de compétences : le « GATT de 1994 » reprend les
acquis du GATT en les complétant et en étendant ses champs matériels ; il incorpore toutes
les modifications depuis 1947 en ajoutant les nouveaux textes de l’Uruguay round. Mettant
fin à la pratique du « GATT à la carte », remplacé par le principe de « l’engagement unique
», l’OMC apparaît ainsi comme « un cadre institutionnel renforcé pour le commerce
international ».

19
La création de cette nouvelle institution internationale devait répondre au souci de renforcer
l’unité du régime juridique applicable aux échanges internationaux, de consacrer un véritable
droit international des échanges capable de faire respecter les règles justes et équitables du
multilatéralisme. Si l’OMC est néanmoins la preuve de l’émergence d’un « droit mondial du
commerce », d’une consolidation d’un processus de « juridictionnalisation » du droit
international des échanges.
Car les accords de Marrakech, fondement juridique de l’OMC, dotent l’Organisation d’un
véritable système juridique intégré, contraignant – là est la nouveauté –, avec une procédure
générale unique de règlement des litiges ; l’Organe de Règlement des Différends (ORD) et
l’Organe d’Appel Permanent (OAP) sont ainsi susceptibles de garantir une certaine cohérence
juridique, élaborant même une jurisprudence de l’OMC .
Le rôle de l’ORD et de l’organe d’appel est de faire respecter les accords de Marrakech ainsi
que les articles du GATT de 1994, mais l’organe d’appel, chargé d’examiner les seuls
problèmes de droit à l’exclusion des faits, en est arrivé à interpréter les accords. D’où «
l’émergence d’un droit sui generis ».
Si l’ORD n’est pas un tribunal mondial, restant une enceinte diplomatique, il produit tout de
même « un droit normatif et juridictionnel » auquel les Membres s’efforcent de se conformer.
En bref, « le système de règlement des différends est devenu la pièce maîtresse du
fonctionnement de l’OMC », devenant en quelque sorte son « bras armé », signant « la
principale avancée institutionnelle de l’OMC sur le GATT ».
Le renforcement d’un droit du commerce à vocation mondiale issu des accords GATT/OMC
annonce-t-il l’avènement d’une « mondialisation régulée » ? Il est certain que ce système,
malgré ses imperfections, a montré son efficacité à défendre le multilatéralisme et le principe
d’équité entre les Etats. L’ORD n’est pas un instrument de domination des puissants, ceux-ci
étant régulièrement « condamnés » à la suite de litiges.
Les nombreuses plaintes déposées depuis sa création témoignent du large crédit que les
Membres lui accordent, notamment les Pays en développement (PED), qui participent de
manière significative aux procédures de règlement des différends : « c’est là un indice
incontestable de la confiance qu’inspire ce système aux pays du Sud ». L’ORD est donc bien
un « régulateur du système commercial international ».
2. Portée des règles de l’OMC : Quel impact de la mondialisation des échanges sur les
Etats ?:
A l’OMC, on observe la tentative de concilier tant bien que mal libéralisation des échanges et
autonomie réglementaire des Etats. Certaines études ont souligné le retour en force des Etats
comme acteurs principaux des échanges commerciaux internationaux, notamment en insistant
sur le fait que ce sont les seuls protagonistes des négociations dans le cadre de l’OMC et du
système de règlement des litiges.
Mais, la rédaction des normes semble échapper toujours plus aux Etats, les experts des
comités techniques étant la plupart du temps salariés de grands groupes mondiaux disposant
d’énormes moyens pour investir dans la normalisation. « Les dispositions de l’OMC », selon
Graz, « entérinent une mise sur pied d’égalité de certains organismes privés du système
américain avec les principales organisations de la normalisation internationale, telles que
l’ISO ».

20
L’incidence globale de la libéralisation exigée par les accords de l’OMC tend sans surprise à
faire régresser le rôle de l’Etat et de la régulation publique. On entend souvent que l’objectif
de l’OMC est de réguler le commerce mondial, mais « la régulation à la manière de l’OMC,
c’est en fait une dérégulation imposée à chaque Etat membre » analyse Raoul- Marc Jennar.
Si « le droit de l’OMC est totalement étranger au concept de supranationalité », la portée du
système à l’égard des Etats, tenus de se conformer aux décisions de l’ORD et de respecter
l’ensemble des dispositions découlant des accords formant le « GATT de 1994 », « est de
nature quasi supranationale ». Pour Josepha Laroche, « la mondialisation de l’économie de
marché a d’ores et déjà profondément modifié les ordres juridiques ».

CHAPITRE II : REALISATIONS A CARACTERE ECONOMIQUE :


I. Les effets de l’élargissement de l’OMC :
Un objectif important de la nouvelle OMC était de parvenir à l'universalité de la portée et de
la couverture de l'Organisation. L’OMC a beaucoup progressé vers la réalisation de ces
objectifs.

Ses 33 nouveaux Membres (2014) représentent une part importante du commerce et de la


production au plan mondial et la portée des règles de l'OMC s'en est trouvée considérablement
élargie. En 2014, les nouveaux Membres représentaient environ un cinquième du commerce
mondial et du produit intérieur brut mondial (PIB) et plus d'un quart de la population
mondiale.

La Chine à elle seule comptait pour 13% du PIB mondial, 17% des échanges et 21% de la
population. L'OMC couvre déjà 98% des échanges mondiaux et 96% du PIB mondial, et
atteindra probablement l'universalité dans dix ans.

Des pays supplémentaires, ont engagé en vue de leur accession des négociations qui en sont à
des stades d'avancement divers. Il n'y aura plus qu’une dizaine de pays sur les 192 que
compte le monde qui ne feront pas partie de l'OMC et la plupart d'entre eux demanderont très
vraisemblablement bientôt à accéder.

21
1. Renforcement du cadre réglementaire de l’OMC :

Dans la mesure où les accords d'accession, ou « protocoles », sont des obligations


conventionnelles internationales, ils ont un effet de vaste portée tant sur le système
multilatéral que sur les économies nationales qui les ont conclus.

Renforcement des règles de l'OMC

Les 33 Membres relevant de l'article XII ont accepté 1 361 engagements spécifiques. pour tel
ou tel domaine. Les Membres relevant de l'article XII se sont engagés à notifier régulièrement
à l'OMC leurs programmes de privatisation, chose que les Membres plus anciens n'étaient pas
tenus de faire.

On peut aussi citer des engagements spécifiques dans des domaines tels que les droits de
propriété intellectuelle et les entreprises commerciales d'État. Ces dernières sont des
entreprises gouvernementales et non gouvernementales, y compris les offices de
commercialisation, qui s'occupent des marchandises destinées à l'exportation et/ou à
importation.

Lancement et consolidation des réformes internes

Dans le cadre de leurs négociations en vue de l'accession, les gouvernements accédants sont
invités à évaluer la conformité de leurs législations et pratiques commerciales avec les règles
de l'OMC.

22
Réduction des obstacles et élargissement des possibilités commerciales

L'accession de nouveaux Membres, en particulier de grandes économies comme la Chine, a


entraîné ces dernières années une nette diminution des obstacles commerciaux et une forte
expansion des possibilités commerciales.

Les gouvernements accédants ont fixé des plafonds tarifaires appelés « taux consolidés »
dans le jargon de l'OMC pour pratiquement tous leurs produits agricoles et non agricoles, ce
qui a permis d'améliorer sensiblement la fiabilité et la prévisibilité des régimes commerciaux
de ces pays.

Compte tenu de leurs engagements globalement plus libéraux, les Membres relevant de
l'article XII ont régulièrement enregistré une croissance commerciale plus forte que les
Membres originels, entre 1995 et 2013, le taux de croissance annuel moyen du commerce des
Membres relevant de l'article XII a été de 12,4%, soit près du double de celui des Membres
originels (7,4%). Après la crise financière de 2008, les Membres relevant de l'article XII se
sont rétablis plus vite que les Membres originels.

23
2. Doter les pays en développement des moyens de leur autonomie :

Pour créer un système commercial véritablement mondial, il faut d'une part, accroître le
nombre des Membres de l'OMC et, d'autre part, s'assurer que tous les pays tirent parti de leur
appartenance à cette organisation. L'idée que de nombreux pays en développement – et en
particulier les moins avancés d'entre eux – ne peuvent pas tirer pleinement parti des
possibilités commerciales offertes par les négociations commerciales parce qu'ils n'ont pas les
compétences techniques ou la capacité d'exportation nécessaires peut sembler aller de soi
aujourd'hui. Mais cela représente une avancée majeure dans la façon de penser de l'institution
depuis le Cycle d'Uruguay.

Avec la création de l'OMC et la prise de conscience croissante que de nombreux Membres


doivent surmonter d'importants problèmes d'ordre technique et liés au manque de ressources
pour mettre en œuvre les ambitieux résultats du Cycle d'Uruguay.

Attention croissante de l'OMC à l'assistance technique

À la demande des Membres, l'OMC est devenue au cours des dernières décennies un
fournisseur beaucoup plus important d'assistance technique aux gouvernements. Dans le
même temps, les progrès technologiques survenus dans les télécommunications et
l'informatique ont révolutionné la manière dont l'OMC exerce ses activités d'assistance
technique et de formation.

Globalement, ces changements se sont traduits par un soutien plus important fourni aux pays
en développement; depuis le lancement du Cycle de Doha à 2015, l'OMC a ainsi organisé
environ 4 500 activités d'assistance technique et de formation, dont ont bénéficié plus de
46 000 fonctionnaires gouvernementaux.
L'assistance technique a été dans une large mesure axée sur les PMA, le but étant de les aider
à mettre les questions commerciales au centre de leurs stratégies nationales de développement
et à s'intégrer dans le système commercial multilatéral.

L'Aide pour le commerce

L'Initiative Aide pour le commerce a été lancée conjointement par l’OMC et le FMI, pour
aider les pays en développement, et en particulier les PMA, à se doter de la capacité d'offre et
de l'infrastructure commerciale dont ils ont besoin pour tirer profit des Accords de l'OMC et
accroître leur commerce. Elle couvre l'assistance technique et le développement des
infrastructures, ainsi que le développement de la capacité de production, le but étant d'aider
les pays à investir dans des industries et des secteurs pouvant leur permettre de diversifier
leurs exportations.

Elle offre aussi une « aide à l'ajustement », dont l'objectif est de contribuer à couvrir les coûts
d'ajustement occasionnés par la libéralisation des échanges et la baisse des recettes publiques
tirées des droits d'importation.. L'OMC joue un rôle de catalyseur et de promoteur dans le
processus de l'Aide pour le commerce en faisant en sorte que les nombreux organismes
chargés du développement comprennent les besoins commerciaux des Membres observateurs
de l'OMC et apportent des solutions.

24
II. Evolution des politiques commerciales de l’OMC :
Depuis 2009, l’OMC suit régulièrement l’évolution des politiques commerciales et publie des
rapports de suivi du commerce. Ces rapports visent à rendre l’évolution des politiques
commerciales plus transparente et à donner aux Membres de l’OMC et aux observateurs un
aperçu à jour des tendances globales dans l’élaboration des politiques commerciales
internationales. L’exercice de suivi a été lancé à la fin de 2008, immédiatement après le début
de la crise financière, et il a considérablement évolué depuis.
Le rapport de suivi montre qu’entre la mi-octobre 2016 et la mimai 2017 les Membres de
l’OMC ont appliqué 74 nouvelles mesures restrictives pour le commerce, soit en moyenne
près de 11 nouvelles mesures par mois, ce qui représente une baisse significative par rapport
au précédent rapport annuel1 – qui indiquait une moyenne de 15 mesures par mois –, et ce qui
est la moyenne mensuelle la plus basse depuis 2008 (voir le graphique 7.1). Les mesures
restrictives pour le commerce comprennent l’introduction de nouveaux droits d’importation
ou d’exportation et l’augmentation des droits existants, la mise en place d’interdictions ou de
restrictions quantitatives à l’importation, l’établissement de règles ou de procédures
douanières plus complexes, et l’application de prescriptions relatives à la teneur en éléments
locaux. Ces mesures peuvent être temporaires ou permanentes.

Pendant la même période, les Membres de l’OMC ont introduit 80 mesures visant à faciliter
les échanges, soit une moyenne d’un peu plus de 11 nouvelles mesures par mois. C’est la
deuxième moyenne la plus basse depuis que le suivi du commerce a commencé en 2008 (voir
le graphique 7.2). La valeur du commerce visé par des mesures de facilitation des
importations (183 milliards de dollars EU) est plus de trois fois supérieure à la valeur estimée
du commerce visé par des mesures de restriction des importations (49 milliards de dollars EU)
et plus de six fois supérieure aux estimations pour les nouvelles mesures correctives
commerciales (27 milliards de dollars EU). Les mesures de facilitation des échanges
comprennent l’élimination ou la réduction des droits d’importation ou d’exportation, la
simplification des procédures douanières, l’élimination temporaire ou permanente des taxes à
l’importation ou à l’exportation et l’élimination des restrictions quantitatives à l’importation
et à l’exportation.

25
Les ouvertures d’enquêtes visant des mesures correctives commerciales ont représenté 44%
des mesures commerciales prises pendant la période considérée, dont 85% d’ouvertures
d’enquêtes antidumping. Les Membres de ’OMC ont toujours ouvert beaucoup plus
d’enquêtes visant des mesures correctives commerciales qu’ils n’en ont clôturé. La moyenne
mensuelle des ouvertures d’enquêtes enregistrées est restée élevée pendant la période
considérée, bien que légèrement inférieure au pic enregistré en 2016. La moyenne mensuelle
des clôtures d’enquêtes a également diminué pendant cette période, tombant à son taux le plus
bas depuis 2012 (voir le graphique 7.3).

26
L’Accord sur la facilitation des échanges (AFE) de l’OMC est entré en vigueur en février
2017. Les Ministres ont conclu les négociations sur la facilitation des échanges lors de la
Conférence ministérielle de Bali en 2013, où il a été décidé que l’Accord entrerait en vigueur
quand les deux tiers des Membres de l’OMC auraient achevé leur processus de ratification
interne et l’auraient notifié à l’OMC. Ce cap a été atteint le 22 février 2017, lorsque le seuil
des 110 acceptations a été dépassé. L’AFE vise à rationaliser, simplifier et normaliser les
procédures douanières et à faciliter le mouvement transfrontières des marchandises. La mise
en œuvre complète de l’Accord devrait réduire considérablement les coûts du commerce, de
14,3% en moyenne, pour les Membres de l’OMC.
Les principaux secteurs visés par l’ouverture d’enquêtes visant des mesures correctives
commerciales pendant la période considérée étaient le bois et les ouvrages en bois, les
véhicules et les meubles, articles de literie et lampes. Les principaux secteurs concernés par la
clôture d’enquêtes étaient les ouvrages en fonte, fer et acier, les machines et appareils et
l’aluminium et les ouvrages en aluminium. Le commerce visé par les ouvertures et les
clôtures d’enquêtes concernant des mesures correctives commerciales recensées dans le
rapport est estimé à 27 milliards de dollars EU et à 6 milliards de dollars EU, respectivement
(voir les graphiques 7.4 et 7.5).
Le graphique 7.6 montre la chronologie de la ratification de l’Accord par les Membres de
l’OMC. On voit que le nombre d’acceptations a régulièrement augmenté jusqu’en septembre
2015. Un premier pic a été atteint en octobre 2015, lorsque l’Union européenne a déposé son
instrument d’acceptation pour l’Union dans son ensemble et ses États membres. Une
deuxième augmentation marquée a été observée dans la période qui a précédé la Conférence
ministérielle de Nairobi en décembre 2015. Les ratifications de l’AFE sont largement
réparties entre les régions et les niveaux de développement. Le 7 avril 2017, l’Europe arrivait
en tête (avec 36 ratifications), suivie par l’Asie (25), l’Amérique du Sud et centrale et les
Caraïbes (20), l’Afrique (19), la Communauté d’États indépendants, y compris les anciens
États membres et les États membres associés (7), le MoyenOrient (5) et l’Amérique du Nord
(3).

27
III. Approche de l’OMC pour réaliser le développement :
Dans le cadre de sa coopération avec les autres organisations internationales, l’OMC joue un
rôle central dans la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et
ses Objectifs de développement durable (ODD), adopté par l’Assemblée Générale des Nations
Unies, qui sont déclinés en cibles à atteindre d’ici à 2030 dans des domaines tels que la
réduction de la pauvreté, la santé, l’éducation et l’environnement. Les ODD mettent l’accent
sur le rôle que joue le commerce dans la promotion du développement durable et
reconnaissent la contribution que l’OMC peut apporter au Programme à l’horizon 2030.
1. Comment le commerce contribue à la réalisation des principaux Objectifs de
développement durable
Pas de pauvreté : L’ouverture commerciale a aussi élevé les niveaux de vie grâce à un
accroissement de la productivité, une concurrence accrue, des choix plus diversifiés pour les
consommateurs et de meilleurs prix sur les marchés.
Faim «zéro» : L’élimination des subventions qui entraînent des distorsions sur les marchés
agricoles rendra les marchés plus équitables et plus compétitifs, ce qui aidera à la fois les
agriculteurs et les consommateurs, tout en contribuant à la sécurité alimentaire.
Bonne santé et bien-être : L’une des principales finalités de l’ODD 3 est de garantir l’accès
à des médicaments à des prix abordables pour tous. Un amendement important de l’Accord
sur les ADPIC de l’OMC est récemment entré en vigueur.
Égalité entre les sexes : Le commerce peut créer des possibilités pour l’emploi et le
développement économique des femmes.
Travail décent et croissance économique : La croissance économique inclusive et tirée par
le commerce renforce la capacité d’un pays à générer des revenus, ce qui est l’un des
prérequis essentiels pour parvenir au développement durable. L’Initiative Aide pour le
commerce de l’OMC peut faire une grande différence en complétant les efforts fournis au
niveau national pour renforcer les capacités commerciales.
Industrie, innovation et infrastructure : Les marchés ouverts ont été définis comme un
élément déterminant du commerce et de l’investissement entre les pays en développement et
les pays développés; ils permettent le transfert des technologies, ce qui entraîne
l’industrialisation et le développement.
Inégalités réduites : Les règles de l’OMC visent à réduire l’incidence des inégalités
existantes grâce au principe de traitement spécial et différencié en faveur des pays en
développement, qui permet aux pays en développement et aux pays les moins avancés de
recourir à des flexibilités, afin de tenir compte de leurs contraintes de capacité.
Vie aquatique : L’OMC joue un rôle important dans le soutien des efforts faits au niveau
mondial, régional et local pour lutter contre la dégradation environnementale de nos océans,
au titre de l’ODD 14. La décision sur les subventions à la pêche prise par les Membres de
l’OMC en décembre 2017 constitue un pas en avant dans les efforts multilatéraux réalisés
pour atteindre la cible 14.6 des ODD, au titre de laquelle les Membres s’engagent, entre autre,
à interdire les subventions qui contribuent à la surcapacité et à la surpêche.
2. La dimension économique du commerce dans les ODD :
Le commerce peut jouer un rôle important pour stimuler la croissance économique et soutenir
la lutte contre la pauvreté. Les possibilités d’accès aux marchés accrues qu’il offre peuvent
aider les pays à créer des emplois, à améliorer les revenus et à attirer des investissements.

28
Les ODD mettent l’accent sur le rôle joué par le commerce dans la promotion du
développement durable et reconnaissent la contribution que l’OMC peut apporter au
Programme à l’horizon 2030.
Par le passé, le commerce a joué un rôle majeur dans l’élimination de la pauvreté et la
promotion de la prospérité dans le monde en développement. En 1990, plus de la moitié des
citoyens des pays en développement vivaient avec moins de 1,25 dollar EU par jour. En 2015,
ce taux était tombé à 14%. Sans le commerce, ces améliorations remarquables n’auraient
jamais été possibles. Les données empiriques montrent que plus un pays est ouvert au
commerce, plus son économie progresse rapidement.
La part des pays en développement dans les exportations mondiales de marchandises a atteint
plus de 40% en 2009 et est depuis lors restée stable. En ce qui concerne le commerce des
services, cette part est passée de 25% à 35% environ. Les échanges entre les pays en
développement ont aussi gagné en importance, avec une part de 52% dans les exportations de
marchandises des pays en développement en 2013.
3. La dimension sociale du commerce dans les ODD
Le commerce joue un rôle essentiel pour répondre aux questions de la faim, de la sécurité
alimentaire, de la nutrition et de l’agriculture durable, concourant à la bonne santé, au bien-
être, à l’emploi et à la croissance.
Grâce aux gains réalisés au cours des dernières années, la proportion de la population du
monde en développement qui appartient à une classe moyenne plus connectée et mieux
éduquée a enregistré une hausse sans précédent. Il est important de faire en sorte que cette
tendance se poursuive, que les gains passés ne soient pas annulés en conséquence de la lenteur
de la reprise de l’économie mondiale depuis la crise financière et que les futurs gains n’aillent
pas principalement aux segments les plus riches de la société.
Diverses politiques sont appropriées pour différents pays, mais les données indiquent qu’un
mélange d’ouverture commerciale et de programmes de soutien, comme des programmes
d’éducation et de développement des compétences, destinés à ceux qui sont négativement
affectés par le commerce, aidera les pays à répondre à ces problèmes.
4.La dimension environnementale du commerce dans les ODD :
Pour atteindre les ODD, il est indispensable d’obtenir de meilleurs résultats en matière de
croissance économique et de protection de l’environnement. La poursuite de la trajectoire
actuelle de la croissance économique, non viable du point de vue environnemental, risque de
compromettre les perspectives d’avenir en ce qui concerne la croissance et le bien-être
humain, voire de réduire à néant une grande partie des progrès accomplis au cours des 50
dernières années dans ces deux domaines, selon une étude de l’OCDE.
Le commerce international, fondé sur le corpus OMC de règles commerciales mondiales
ouvert, transparent et non discriminatoire, joue un rôle important dans les efforts nationaux et
mondiaux fournis pour répondre à ces problèmes.
Le commerce a lui-même une incidence directe sur l’environnement, y compris les émissions
de gaz à effet de serre provenant du transport maritime et aérien international. Les efforts
visant à réduire cette incidence sont extrêmement importants pour parvenir au développement
durable. Néanmoins, le commerce peut aussi être un puissant outil que les pays se situant à
différents niveaux de développement peuvent utiliser pour soutenir une croissance
économique viable du point de vue environnemental.

29
PARTIE II : CRITIQUES ET LIMITES DE L’OMC :

Cela fait des années qu’on annonce la mort de l’OMC, surtout dans la presse. Tous les deux
ans, à l’issue de chaque conférence ministérielle, sa raison d’être est remise en cause. Ce point
de vue gagne de plus en plus les initiés.

Pourtant, l’OMC « livre la marchandise ». Du moins, elle le fait dans la majorité des cinq
fonctions qui lui ont été attribuées. Elle administre les accords en donnant entre autres un
coup de pouce aux pays en développement, que ce soit à travers ses missions de coopération
technique, les cours qu’elle offre, à Genève, à l’intention des fonctionnaires de divers pays,
ses chaires ou encore l’aide au commerce visant à permettre aux pays en développement de
développer les infrastructures en matière de libre-échange.

En outre, l’OMC affiche un résultat plus qu’exceptionnel dans le domaine du règlement des
différends commerciaux. L’OMC permet aussi le partage d’information via son mécanisme de
suivi des politiques commerciales qui impose aux Membres la notification des mesures
nationales ayant un impact sur le commerce international.

Certes, malgré une performance enviable en ce qui concerne une majorité de ses fonctions,
l’OMC piétine dans le domaine des négociations. Du moins, c’est l’image qu’elle renvoie
depuis sa création. L’OMC est aussi frappée de plein fouet par le mouvement
antimondialisation et prenait difficilement conscience que l’entrée en scène de nouveaux
joueurs par rapport aux années du GATT compliquait l’atteinte du consensus.

Les Membres de l’OMC se sont réunis à Buenos Aires pour la conférence ministérielle de
décembre 2017. Les espoirs ont vite été déçus. La présence d’une puissance américaine
remettant en cause depuis l’élection du président Trump les principes de base du libre-
échange peut expliquer en partie l’échec de Buenos Aires.

D’autre part, les zones de libre-échange se multiplient, rendant le droit de l’OMC marginal.
Pourtant, l’OMC demeure l’organisation qui autorise l’existence de ces zones. Évidemment,
la multiplication des accords commerciaux rend le principe de non-discrimination de plus en
plus théorique (dans la mesure où ces zones permettent précisément d’octroyer des
préférences à seulement certains partenaires commerciaux).

L’OMC essuie une vague contestation qui se manifeste par des critiques tantôt contre son
mode de fonctionnement tantôt contre l’enlisement des négociations qu’elle administre, outre
les critiques émanant de ses détracteurs antimondialisation. En définitive, on peut-on avancer
que l’OMC remplit ses fonctions compte tenu des règles de procédure dont elle s’est dotée,
avec des difficultés. On peut se demander si l’on n’attend pas peut-être trop de l’OMC ?

30
CHAPITRE I : LES CRITIQUES DE L’OMC :

Les critiques adressées à l’OMC peuvent être regroupé sous trois catégories, la première
concerne son mode de fonctionnement, la seconde concerne les résultats modestes des
négociations conduites sous ses auspices, et la troisième catégorie concerne la riposte des
altermondialistes contre le système défendu par l’OMC.

I. Critiques portés au fonctionnement de l’OMC :

1. Processus décisionnel de l’OMC

Le processus décisionnel de l’OMC est à examiner à travers le traitement des situations


suivantes :

Décisions prises par consensus :


L’OMC est dirigée par les gouvernements qui en sont membres. Toutes les grandes décisions
sont prises par l’ensemble des membres, soit à l’échelon des Ministres (qui se réunissent au
moins tous les deux ans), soit au niveau des ambassadeurs et des délégués (qui se rencontrent
régulièrement à Genève). Les décisions sont normalement prises par consensus.
En effet, les décisions prises par l’OMC sont faites par le consensus. Mais ce mode qualifié de
‘’l’unanimité’’, est signifié que toute les parties membres expriment leurs vote. Du même que
le consensus requiert l’unanimité des seules voies qui s’expriment.
Si on parle de consensus par définition il est nécessaire de mentionner qu’aucun membre de
l’OMC ne s’oppose à une décision c'est-à-dire que même une vote ne sera pas opposé, d’où la
participation de tous à la prise de décision quel que soit leurs niveau de développement. C’est
pour cela que l’OMC est dite ‘’un organisme qui ne distingue pas entre les PED et les PD’’.
C'est ainsi que l'OMC assure le caractère démocratique de son fonctionnement et empêche les
plus faibles d'être écrasés par les plus puissants. Cette règle représente la clef de voûte du
système commercial depuis plus de cinquante ans et, sur le plan de la procédure, équivaut au
principe de la nation la plus favorisée, qui fait bénéficier les plus faibles, sans condition, des
meilleures conditions d'accès aux marchés offertes par les plus forts dans le cadre de l'OMC.
En effet le consensus permet à tous les pays quel que soit leurs niveau de développement
d’exercer un droit de véto sur toutes les décisions prises. C’est à ce moment l’OMC trouve les
difficultés au niveau des décisions importantes.
Obtenir un consensus de 164 pays sur 20 sujets complexes est une véritable gageure. Les
revers qu'ont connus récemment les négociations de Doha ont conduit certains observateurs à
dire qu'il faudrait peut être changer le système de prise de décision à l'OMC.
La pratique de la décision par consensus et le principe d'un engagement unique voulant qu'il
y ait accord sur toutes les questions. pour qu'il puisse y avoir accord sur une seule sont ils
obsolètes? Ou au contraire un résultat ayant le soutien exprimé de tous les Membres donne t il
aux Accords de l'OMC plus de crédibilité et d'autorité?

31
L’OMC risque d’être handicapée par la lenteur et la lourdeur de ses procédures de prise de
décisions de son mode d’administration — une organisation de 164 pays membres et ne peut
pas être dirigée par un “comité plénier”. Une administration collective ne permet tout
simplement pas d’assurer un fonctionnement efficace ni d’examiner sérieusement des
questions de fond.
Le FMI comme la Banque mondiale ont un conseil d’administration chargé de donner des
instructions aux administrateurs de l’organisation, où siègent en permanence les principaux
pays industriels, qui disposent d’un droit de vote pondéré. L’OMC devra se doter d’une
structure comparable pour être efficace ... Or, pour des raisons politiques, les plus petits pays
membres y restent farouchement opposés.
On serait tenté de penser que la solution la plus radicale pour faciliter la conclusion du cycle
de Doha consisterait à revoir cette règle du consensus. En effet, laisser un seul pays faire
obstacle à la volonté de l'immense majorité des membres semble excessivement rigide.
Examen des enceintes de négociation informelles mis en place pour pallier aux
difficultés :
L'élargissement et l'approfondissement de l'OMC, décrits plus haut, modifient
nécessairement le déroulement des négociations. Sans même remettre en cause les structures
actuelles de négociation, créées par le cycle d'Uruguay et peut-être encore appropriées, il a été
question d'entreprendre des adaptations institutionnelles pour rationaliser les activités de
l'organisation et rendre optimal le fonctionnement des enceintes de négociation, plus
confidentielles, telles les « chambres vertes ».
Les discussions les plus importantes se tiennent dans une enceinte informelle parallèle à celles
officiellement prévues par les accords de l'OMC (Conférences ministérielles, Conseil général,
Comité des négociations commerciales, comités et conseils thématiques) : la « chambre
verte ». Réunissant de vingt à quarante négociateurs ministériels convoqués par le président
d'un comité ou par le Directeur général, cette formation restreinte s'est imposée pour faciliter
l'approfondissement des questions les plus ardues, impossibles à traiter en séance plénière.
Elle permet en effet de dégager un compromis et de jeter les bases d'un consensus plus large.
Ajoutant aussi que, la maitrise technique des dossiers de l’OMC au niveau des chambres
vertes est faites par les pays développés. En effet, elles sont maitriser en totalités par les pays
développés, et fixent l’ordre de jour des conférences ministérielles. Par contre la majorité des
Etats membres constitué par les pays en développement ont porté sur le consensus qui régit le
processus décisionnel de l’OMC.
Le caractère informel de ces chambres vertes, s'il présente l'avantage de la flexibilité, les rend
tout de fois suspectes de manque de représentativité, voire d'opacité. C'est pourquoi, afin
d'exploiter sans controverse le potentiel d'efficacité représenté par les chambres vertes, il
serait judicieux d'institutionnaliser ces formats de négociation plus restreints qui permettent
de préparer le consensus et donc d'atteindre des résultats. Cette institutionnalisation, sans
porter atteinte au principe du consensus, reconnaîtrait que le processus de prise de décision à
164 devient intenable.

32
La procédure qu'il conviendrait de formaliser ainsi devrait d'abord se fonder sur
la représentativité des membres de ces chambres vertes, au regard d'un critère soit
géographique, soit de niveau de développement. En outre, le processus devrait être non
seulement transparent, c'est-à-dire faire en sorte que chaque délégation soit tenue informée de
ce qui s'y passe (en ayant accès aux procès-verbaux des réunions), mais aussi inclusif, à savoir
permettre à toute délégation qui ne serait pas directement consultée de participer et d'apporter
sa contribution.
En revanche une contradiction entre deux volets se pose, le premier caractériser par la
majorité des Etats souhaitent le maintien du caractère des « chambres vertes » qualifié
d’informel. Et le second cherche à leur donné un caractère formel.

Les lobbies à l’intérieur de l’OMC :


A première vue, la description des acteurs est aisée. L’OMC est une organisation member
driven et les membres sont les États (avec quelques territoires douaniers autonomes comme
Hong Kong). Les négociations sont donc menées par les représentants des gouvernements
(ministres, ambassadeurs, hauts fonctionnaires).

Le Directeur général de l’OMC, et ses services, ne se substituent pas aux États membres. Ils
n’ont qu’un rôle d’assistance et de coordination. Cette dernière tâche peut néanmoins se
révéler stratégique en cas de crise. C’est le Directeur Général qui, à l’issue d’un Conseil
général, a décidé de suspendre les négociations de Doha en juillet 2006. Le Directeur général
peut également assumer une fonction de médiateur influent. Aux différentes étapes de la
négociation, il rédige les projets de textes (drafts) qui prennent acte des points qui lui
semblent acquis et laisse en blanc les points qui restent soumis à négociations ;
ces drafts donnent d’ailleurs souvent lieu à plusieurs versions révisées par les États membres
avant d’être soumis à discussion pour être, ou ne pas être, validés.
Toutefois, au-delà de ces acteurs visibles, d’autres intervenants défendent des points de vue
susceptibles d’être relayés par les négociateurs officiels. Plusieurs types de groupes de
pression sont physiquement présents dans les couloirs des négociations, notamment lors des
« grandes messes » des Conférences ministérielles.

Les premiers sont les organisations socioprofessionnelles. Menacées par l’ouverture de leur
marché aux importations plus compétitives, elles défendent, en général, des positions
défensives. C’est notamment le cas des puissants lobbies agricoles européens ou américains
(mais aussi japonais, coréens, etc.). Ces groupes avaient obtenu, dès les années 1950, que
l’agriculture échappe au mouvement général de libéralisation des échanges. Dans les années
1970, le lobby textile avait également réussi à faire adopter des règles dérogatoires aux
principes même du GATT en permettant aux pays industriels d’instituer des quotas
discriminatoires à l’encontre des pays exportateurs (accords multifibres).
Les seconds sont les représentants des grandes firmes exportatrices, souvent multinationales,
qui militent en faveur de l’ouverture des marchés aux biens et aux services ainsi que pour une
plus grande sécurité juridique en matière, notamment, de propriété intellectuelle. Lors de
l’Uruguay Round, ces groupes ont ainsi obtenu l’extension des règles du GATT aux services.
Ils ont réussi à faire adopter un accord sur la propriété intellectuelle qui les protège certes des
contrefaçons mais qui entretient parfois des situations monopolistiques contestables quoique
légales.

33
Si les États sont donc formellement les seuls négociateurs, ils restent néanmoins soumis à des
pressions internes et externes contradictoires qui exigent des arbitrages au coût politique
parfois élevé.

2. Un déséquilibre matériel entre les pays développés et les pays en voie de


développement :

Le problème majeur dont souffre l’OMC, même à l’instar des mesures prises, c’est le
déséquilibre entre les membres ayant des niveaux de développement différents. Il est en effet
difficile d'apporter une solution au difficile problème de la complexification croissante des
affaires traitées par l'OMC.

La croissance mondiale des échanges a aussi pour corollaire d'entraîner une technicité accrue
des problèmes lorsqu'ils surviennent. Or, il est indéniable que la libre utilisation d'experts
qualifiés, par les pays développés introduit un fort déséquilibre avec les pays en
développement qui ne disposent pas des mêmes moyens.
Se développe également une tendance à l'extrême diversification des thèmes traités par
l'OMC. L'OMC traite de multiples thèmes économiques particulièrement sensibles pour les
pays en développement comme les services. Cette multiplicité s'accompagne de facto d'une
extension de l'éventail des obligations qu'impliquent les décisions de l'OMC et d'une hausse
des coûts de mise en œuvre de ces décisions. On peut donc se demander si l'OMC est
véritablement capable d'intégrer les pays en développement et de leur donner la place qui leur
revient.
La nécessité d'une assistance technique des pays en développement au sein de l'OMC a
semblé faire l'objet d'un consensus. Il serait également nécessaire d'assurer la formation
d'experts venus des pays en développement par des cycles d'enseignement au sein des pays
développés. Des moyens logistiques (informatique et NTIC principalement) pourraient aussi
permettre aux pays en développement de mieux suivre les procédures de l'OMC.

Financement de l’Assistance Techniques Lié au Commerce :

La mise en œuvre des Plans biennaux d'assistance technique (AT), budgétisés à environ 19
millions de CHF par an, est financée au moyen du budget ordinaire (4,5 millions de CHF), des
fonds extrabudgétaires provenant des contributions volontaires de certains Membres et
d'arrangements de partage des coûts avec certains partenaires de l'OMC.
Comme c'est le cas depuis de nombreuses années, la mise en œuvre des Plans d'AT est de
nouveau financée principalement par des fonds extrabudgétaires (14,5 millions de CHF). Le
Fonds global d'affectation spéciale pour le Programme de Doha pour le développement
(FGASPDD) continuera à jouer un rôle central à cet égard car c'est le principal canal par
lequel les contributions des donateurs financent l'AT fournie par l'OMC.
On remarque que le budget dédié par l’OMC à l’assistance technique dépend en grande partie
des contributions des volontaires et partenaires.

34
3. Laxisme par rapport à la définition précise de la notion de pays en développement à
l'OMC : un handicap pour son fonctionnement

La notion de PED n’a jamais été clairement définie à l’OMC. En fait, est PED celui qui se
déclare comme tel. L’identification en tant que PED peut déclencher l’application de règles
dérogatoires au sein de l’OMC; Mais, la terminologie unique de PED pour un nombre très
élevé de pays est problématique, les PED constituant un groupe de pays de plus en plus
hétérogène où les écarts de revenus sont considérables.

En revanche, l’OMC distingue officiellement au sein de ses pays membres « les pays les
moins avancés » (PMA), catégorie définie par la Conférence des Nations Unies pour le
commerce et le développement (CNUCED) sur la base de trois critères ayant trait au niveau
de revenu, au développement du capital humain et à la vulnérabilité économique (CNUCED,
2010).

Les pays développés font face à des PED jouant pour être mieux écoutés « la carte de la
solidarité du monde en développement » (Pène, 2010, 330). Les coalitions que forment ces
PED ont donné naissance à des groupes parlant souvent d’une seule voix, mais ne poursuivant
pas forcément les mêmes objectifs. Ces alliances à géométrie variable ne dispersent pas
seulement des moyens, humains et financiers, souvent minimes, mais affaiblissent la
puissance des PED face aux pays développés en donnant l’image de pays aux revendications
mal établies et donc peu solides dans les négociations. En définitive, les PED semblent
davantage constituer un ensemble pour lequel l’absence d’une différenciation significative
entre les pays qui le composent entraîne deux conséquences dont ne peuvent que souffrir les
plus vulnérables d’entre eux.
Premièrement, la faible différenciation amène les pays développés à limiter le nombre et la
portée des dispositions du TSD, de peur que celles-ci ne bénéficient aux pays émergents et ne
constituent en cela un outil de concurrence déloyale. L’échec de l’OMC à définir de façon
non ambigüe ce que sont les PED constitue un sérieux inconvénient, conduisant à une érosion
de la confiance dans le principe du TSD lui-même.

35
Deuxièmement, l’insuffisante différenciation contribue au blocage des négociations actuelles :
d’un côté, elle conduit les pays développés, les États-Unis notamment, à radicaliser leur
position face à la revendication des grands pays émergents d’appliquer les flexibilités prévues
pour les PED et de l’autre, elle engendre une faible incitation chez ces mêmes grands
émergents à conclure un cycle qui se traduirait très probablement par un traitement moins
préférentiel pour eux, alors qu’ils sont protégés par les dispositions actuelles du TSD.

L’impasse dans laquelle se trouvent aujourd’hui les négociations relatives aux biens
industriels, plus précisément l’accès aux marchés des produits non-agricoles (AMNA), illustre
cette difficulté d’avancer dès lors que les pays émergents sont en première ligne. Aucun
accord n’a été obtenu à ce jour pour amener les PED, principalement les pays émergents que
sont l’Inde, la Chine et le Brésil, à pratiquer des réductions tarifaires pour l’accès aux marchés
des biens industriels des États-Unis, de l’Union européenne (UE) et du Japon. Prévu
initialement pour les PED, le cycle de Doha a dérivé vers un affrontement entre pays
développés et pays émergents.

4. Certains accords se caractérisent par un véritable déséquilibre au niveau des droits et


obligations impartis aux pays du Nord et aux pays du Sud :

C’est peut être à ce niveau que les critiques des pays en développement sont les plus vives.
Les pays en développement considèrent donc que, le partage entre droits et obligations
contenus dans ces accords qu’ils ont signés, se fait systématiquement à leur désavantage.

Accord sur l’agriculture :

Plusieurs observations peuvent être faites sur cet accord agricole.

La consolidation des tarifs pratiqués par les pays développés a abouti à des droits élevés,
empêchant les pays en développement d’exporter leurs marchandises. Selon une étude de
l.OCDE, les droits de douane appliqués par les pays industrialisés demeurent de l’ordre de 35
% pour les produits agricoles. Ces droits peuvent atteindre des niveaux prohibitifs : aux Etats-
Unis, par exemple, les droits sur le sucres s’élèvent à 244 %.

Les soutiens à l’agriculture sont hors de la portée financière de la plupart des pays en
développement. Il faut en effet rappeler, qu’à partir du début des années 1980, la plupart des
pays en développement ont engagé des programmes d’ajustement structurel drastiques avec le
FMI et la Banque mondiale, ayant conduit à une libéralisation profonde du secteur agricole et
à un retrait presque systématique de l’Etat du fait de l’affaiblissement considérable de ses
moyens. Les mesures de soutien interne ont donc été supprimées dans la plupart de ces pays.

La clause spéciale de sauvegarde, qui permet aux pays d’élever leur tarif douanier en cas de
hausse forte du volume d’importation ou de chute du prix d’importation, n’est disponible que
pour les pays qui n’ont pas choisi de consolider leurs droits à des taux plafonds, ce qui exclut
de fait la majorité des pays en développement.

L’Accord passe sous silence l’inégalité de traitement qui existe entre des pays
ayant arrêté leur soutien à l’agriculture, faute de moyens, et les pays
industrialisés ayant conservé d’importantes capacités d’intervention qui ont été
reconnues, voire renforcées, par les règles de l’OMC.

36
L’Accord sur les droits de propriété intellectuelle :

La signature de cet Accord, empêchera les économies sous-développées de se développer par


la mise œuvre de politiques de remontée de la filière, ainsi que l’avaient fait avant eux les
pays industrialisés. Ces derniers se sont en effet développés dans un contexte caractérisé par
l’absence ou la faiblesse de systèmes de droits de propriété intellectuelle, leur permettant
d’utiliser dans leurs stratégies d’industrialisation des procédés et des méthodes de fabrication
mis en place dans d’autres pays.

La mise en place d’un cadre multilatéral protégeant la propriété intellectuelle n’a guère
contribué à favoriser des transferts de technologies massifs en direction des pays en
développement. Alors que l’article 7 de l’Accord expose sa philosophie générale : la
protection et le respect des droits de propriété intellectuelle devraient contribuer à la
promotion de l’innovation technologique, ainsi qu.au transfert et à la diffusion de la
technologie, à l’avantage mutuel de ceux qui génèrent et de ceux qui utilisent les innovations
techniques.

L’ADPIC barre l’accès des pays en développement aux produits essentiels. Cet accord donne
en effet une position dominante aux acteurs privés, qui fixent eux-mêmes le prix que doivent
payer les Etats pour pouvoir accéder à leurs innovations. Or, les pays en développement ne
sont pas toujours en mesure de supporter ces coûts des produits essentiels.

Les pays en développement seront donc obligés d’acheter par exemple, des médicaments que
les multinationales facturent 2,4 fois, voire 10 fois, le prix qu’elles-mêmes pratiqueraient pour
les mêmes intrants en Europe ou aux Etats-Unis, afin d’éviter d’avoir à fixer des prix trop bas
à leur goût.

L’accord ne reconnaît pas les droits des agriculteurs, en particulier celui, fondamental, de
réutiliser les produits d’une récolte pour une récolte ultérieure. En ne reconnaissant pas ces
droits, l’ADPIC va conduire à une augmentation du coût d’accès et d’usage des intrants,
comme les semences, et favoriser le paiement de redevances et le rapatriement des bénéfices à
l’étranger.

II. Critiques à l’égard des échecs des conférences ministérielles :

* la conférence ministérielle de Seattle (1999) :

La Conférence ministérielle de Seattle (États-Unis) s'est réunie du 30 novembre au 3


décembre 1999. Son objectif était d'ouvrir un nouveau cycle de négociations multilatérales,
sur la base des accords de Marrakech (1994) qui avaient conclu le cycle de l'Uruguay et initié
l'OMC.
L'un des enjeux de la négociation portait sur l'élargissement des discussions aux sujets
suivants : la concurrence, l’investissement, la transparence dans les marchés publics,
l’environnement, les normes sociales.
Elle s'est conclue sur un échec : les délégations des 135 pays membres de l'OMC se sont
séparées sans lancer le "cycle du millénaire".

37
Trois causes principales expliquent cet échec :
"Les raisons classiques sont celles, qui, depuis toujours, ont été au cœur des négociations
commerciales internationales : les divergences entre les Etats-Unis et les Européens, en
particulier sur le dossier agricole, et le débat "Nord-Sud" entre les pays développés et les pays
en développement. Mais jusqu’au cycle d’Uruguay (dernier cycle de négociations du GATT,
de 1987 à 1994), des compromis avaient toujours permis, même difficilement, de lancer et de
clore les négociations commerciales internationales.

* La conférence ministérielle de Doha : ouverture d'un nouveau cycle de


négociations (2001) :

Réunie à Doha au Qatar du 9 au 14 novembre 2001, la 4ème conférence ministérielle de


l'OMC a finalement lancé un nouveau cycle de négociations, le Programme de Doha pour le
développement, deux ans après l'échec retentissant de la conférence de Seattle sur le Cycle du
millénaire
Mais cette conférence ou cycle de développement est aussi échoué grâce à un certain
nombre de problème on cite : la diversité et la quantité des sujets ou dossiers à traité (cette
conférence compte presque 24 dossiers) ainsi que le problème du dossier agricole et aussi
l’augmentation de nombre des pays participant à cette conférence.

* Conférence ministérielle de Cancun : 10-14 septembre 2003

Réunie à Cancun, la 5ème conférence ministérielle de l'OMC, s'achève sans position


commune, le 14 septembre 2003.
Pour la seconde fois, une conférence de l'OMC se clôt sur un échec, quatre ans après l'échec
retentissant de Seattle, et à mi-parcours du cycle du développement lancé à Doha en 2001.
Cette échec est due principalement à : tensions Nord-Sud, poids montant des pays émergents,
irruption des pays les moins avancés, difficultés américano-européennes, contestations
altermondialistes : Cancun était à coup sûr une conférence à haut risque.

* Conférence ministérielle de Hong Kong (2005) :

"Le cycle a été remis sur les rails" estime Pascal Lamy, le directeur général de l'OMC. La
tâche principale des pays membres à Hong Kong a été de trouver un accord en forme de
compromis pour préparer l'accord final marquant l'achèvement du Programme de Doha pour
le développement, auquel ils espèrent aboutir fin 2006.
Cette conférence concerne plusieurs dossier à savoir : les négociations agricole dont
lesquelles la conférence vise de supprimer les subventions à l’exportation des produits
agricole fin 2013, mais le problème qui se pose est que les pays en voie de
développement demandent de fixer la date à 2010.
Pour ce qui intéresse le coton : les subventions aux exportations de coton devront cesser à
partir de 2006. Toutefois, comme le rappellent les producteurs africains (notamment Bénin,
Burkina Faso, Mali et Tchad), 90% des aides aux producteurs américains de coton sont
internes. L'accord définit comme "objectif prioritaire" la réduction des subventions internes.

38
* Conférence ministérielle de Genève 2009 :

La 7e Conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) réunie du 30


novembre au 2 décembre à Genève (Suisse) n'est pas parvenue à relancer la négociation sur la
libéralisation des échanges internationaux dans le cadre du "Cycle de Doha". A l'issue de ses
travaux, son directeur général, le Français Pascal Lamy, a reconnu que des "divergences
subsistent sur le fond" et qu'il manquait "d'engagement" sur les questions qui sont en suspens.
L'impasse est imputable aux Etats-Unis qui sont revenus sur leurs positions de juillet 2008 en
demandant, notamment, aux pays émergents de nouvelles concessions. Ils l'ont fait par la voix
de Ron Kirk, le représentant américain au commerce. Les ministres réunis lors de la
conférence de l'OMC ont toutefois décidé qu'ils vérifieraient, avant la fin mars 2010, si les
progrès des discussions entre les hauts fonctionnaires peuvent permettre de convoquer une
négociation en bonne et due forme au cours de l'année prochaine.
C’est ce qui à pousser un certain nombre d’écrivains et chercheurs connues sous le nom
ATTAC (American Tactical Training Arms Center) à qualifie l’OMC comme étant ne
comprend rien sous un article publié le 4 décembre sur la presse ‘’l’OMC ne comprend rien’’
car l’OMC ne veut pas changer la procédure suivi dès son premier échec du Doha.

* Conférence ministérielle de Genève 2011 :

La huitième Conférence ministérielle s'est déroulée à Genève (Suisse) du 15 au 17 décembre


2011. Parallèlement à la séance plénière, au cours de laquelle les Ministres ont prononcé des
déclarations préparées, trois séances de travail se sont tenues sur les thèmes suivants:
"Importance du système commercial multilatéral et de l'OMC", "Commerce et
développement" et "Programme de Doha pour le développement".
Le problème qui se pose à propos de cette conférence c’est que les parties ne sont pas
arrivées à des résultats significatifs.

* Conférence ministérielle de Bali (2013) :

Grâce à des compromis de dernière minute, la conférence ministérielle de l'Organisation


mondiale du commerce (OMC), réunie à Bali du 3 au 7 décembre 2013, est parvenue à un
accord.
Un échec aurait achevé le cycle de Doha pour le développement, ouvert en 2001 et qui
végétait depuis. Un accord peut-être, mais un accord en trompe l'œil qui ne règle pas grand-
chose, car le développement définit en 2001 ne représente que 10% dans le ‘’paquet de Bali’’.
Les mesures sur la facilitation du commerce, qui allégeront les procédures de dédouanement
et réduiront les coûts du commerce, ne posaient pas de réels problèmes. Elles ne font que
souligner la complexité des thèmes qui n'ont pas été traités à Bali, car sans espoirs d'aboutir :
l'ouverture des secteurs agricoles et non agricoles, la propriété intellectuelle.

39
* Conférence ministérielle de Nairobi (2015) :

La 10e conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), la


première organisée en Afrique, s’est soldée à Nairobi sur un constat d’échec concernant le
cycle de Doha, mais a offert des avancées sur le front des subventions aux exportations
agricoles. Malgré la prolongation pendant 24 heures des discussions, les 162 pays membres de
l’OMC n’ont pu que constater leur désaccord sur la marche à suivre à l’égard du cycle de
Doha, dans l’impasse depuis 14 ans.
Cette conférence était pourtant largement considérée comme la dernière chance de le sauver.
L’agenda de Doha, serpent de mer de l’OMC, a pour but de libéraliser le commerce mondial
sur une base multilatérale, en réduisant les barrières commerciales et en révisant les règles
commerciales, et avec des bénéfices particuliers pour les pays en développement. La
déclaration finale adoptée à Nairobi reconnaît à la fois que certains Etats membres sont «
pleinement déterminés » à aller au bout du cycle de Doha, mais que d’autres ne le sont pas et
considèrent que « de nouvelles approches sont nécessaires pour obtenir des résultats
significatifs dans les négociations multilatérales ».
« Les membres ont des avis divergents sur la manière de mener les négociations », indique la
déclaration, qui échoue ainsi à réconcilier ceux qui souhaitaient continuer coûte que coûte à
négocier, même pour des progrès modestes, et ceux qui voulaient introduire de nouveaux
sujets. Dans le contexte d’enlisement du cycle de Doha, des pays avaient déjà préféré ces
dernières années négocier en dehors de l’OMC des accords régionaux, en concurrence directe
avec l’organisation basée à Genève. Michael Forman, le représentant des Etats-Unis – qui
préfèrent des accords bilatéraux, souvent à leur avantage – en a presque signé l’acte de décès
en estimant: « Si les opinions restent divergentes au sein des membres de l’OMC, il est clair
que la route d’une nouvelle ère pour l’OMC s’est ouverte à Nairobi ».

* Conférence ministérielle de Buenos Aires (2017) :

Les membres de l’OMC ont une fois de plus raté une occasion de s’attaquer aux déséquilibres
fondamentaux du système commercial mondial. Aucun accord important n’a en réalité été
atteint à Buenos Aires.

Ainsi, les pressions exercées par les géants technologiques de la Silicon Valley pour
l’extension des règles de l’OMC à la dérégulation de l’économie numérique du futur n’a pas
recueilli le soutien d’une majorité de membres.

L’OMC avait également un mandat pour trouver lors de cette conférence ministérielle une
solution permanente au problème des stocks agricoles publics, mais les membres de l’OMC
n’ont pas réussi à lever les restrictions que l’OMC fait peser sur la capacité des pays à nourrir
leurs populations les plus affamées et à améliorer les moyens de subsistance des paysans.
Aucun accord n’a été trouvé sur un mécanisme de sauvegarde spéciale (MSS) efficace, ni sur
la discipline des subventions qui faussent les échanges et nuisent aux moyens de subsistance
des agriculteurs dans le monde.

De même, aucun progrès n’a été fait sur la question clé de l’élimination des contraintes au
développement imposées par l’OMC. Les propositions en faveur du développement du groupe
des pays en développement (G90) ont été ignorées.

40
Par ailleurs, les membres n’aient pas été en mesure de trouver un accord sur les subventions à
la pêche, mais étant donné que certains membres se sont opposés à la préservation de la marge
de manœuvre politique pour le développement dans le secteur de la pêche, il est préférable de
poursuivre les consultations sur ce point à Genève.

Dans le même temps, la majorité des membres ont constaté qu’il n’est pas approprié à ce
stade d’entamer à l’OMC des négociations sur le e-commerce et ont choisi de simplement
réaffirmer le programme de travail existant pour les discussions sur le commerce électronique.
De même, la majorité des pays ont convenu que le droit des pays de réglementer dans l’intérêt
public ne devrait pas être davantage contrôlé par l’OMC et que de nouvelles disciplines
restreignant les « réglementations internes » ne sont pas nécessaires. En outre, la plupart des
membres ont convenu que de nouvelles négociations sous la bannière « facilitation de
l’investissement » ne sont pas justifiées et se sont prononcés contre un nouveau mandat sur
cette question.

D’autres questions qui ont été mises sur la table par certains membres, telles que les micro- et
petites et moyennes entreprises (MPME) et le thème « genre et commerce » semblent à ce
stade surtout être des portes d’entrée donnant un alibi pour introduire de « nouvelles
questions ».

En définitive, la seule décision concrète prise à Buenos Aires illustre bien la dynamique à
l’œuvre dans l’organisation : comme lors de chaque conférence ministérielle, tous les deux
ans, un « deal » a été conclu entre les USA et le reste du monde. Les USA concèdent un
engagement à ne pas poursuivre les pays tiers sur certains points liés à la propriété
intellectuelle, par exemple des programmes permettant un accès aux médicaments génériques
à bon marché. En échange, ils demandent un engagement du reste du monde de ne pas taxer
les produits transmis par voie électronique, comme par exemple une chanson sur iTunes. Là
où ce deal récurrent n’a jamais attiré beaucoup d’attention, il est présenté en 2017 comme le
seul résultat tangible de cette ministérielle. Il illustre malheureusement à souhait la dynamique
qui prévaut entre les membres de l’OMC, où les pays riches répondent aux demandes qui
concernent des droits fondamentaux par des exigences protégeant les profits de leurs firmes
transnationales.

III. Critiques des altermondialistes :

* Définition du terme altermondialiste :

Les mouvements altermondialistes : regroupent divers acteurs qui, opposés à ce qu'ils


appellent le « mondialisme néolibéral », jugé injuste et dangereux, revendiquent la mise en
place d'une autre mondialisation.
Leur diversité incite à parler davantage de mouvance que de mouvement au singulier. L'alter
mondialisme met en avant des valeurs comme la démocratie, la « justice économique et
sociale », la protection de l'environnement et les droits humains. Il s'agit donc pour ses acteurs
de concevoir et d’œuvrer à une mondialisation maîtrisée et solidaire, par opposition à la
mondialisation actuelle ou mondialisme.

41
* critiques adressées à l’OMC :

-Le mandat de l'OMC de réduire les obstacles au libre-échange est critiqué comme étant
défavorable à certains pays du Sud, particulièrement concernant l'agriculture. Ainsi le rapport
de la plateforme d'ONG françaises Coordination SUD intitulé « La protection des marchés
agricoles : Un outil de développement »conclut que « associée à des mesures de soutien à la
production » et « pendant une période de temps donnée », « la mise en place de mesures de
protection (des marchés agricoles) apparaît clairement comme une condition nécessaire pour
parvenir à développer la production locale et renforcer l’autosuffisance ». D’autre part, la
Politique agricole commune, qui subventionne les exportations agricoles des pays riches et
qui est dénoncée par les pays du Sud comme concurrence déloyale, fait débat au sein du
mouvement altermondialiste.
-La domination des pays industrialisés dans le commerce mondial est pointée comme raison
de l'impossibilité pour les pays pauvres et les groupes minoritaires de s'opposer aux décisions
de l'OMC. Ainsi, l'ONG Oxfam dénonce le fait que selon elle les intérêts des pays développés
prennent le pas sur le développement dans les négociations commerciales.
-Les altermondialistes, rejoints en cela par des auteurs et experts de tout bord, appellent à plus
de démocratie, plus de transparence et un nouveau rapport de forces plus favorables aux pays
en développement et aux politiques locales.
-La gouvernance de l'OMC, basée principalement sur les ministres du Commerce des pays
adhérents, est critiquée pour son manque de préoccupation dans les domaines sociaux et
environnementaux qui sont pourtant influencés par ses décisions. Le mouvement
altermondialiste a focalisé l’attention sur la question des effets du libre échange sur les
inégalités Nord-Sud, notamment les salaires et les conditions de travail dans les secteurs
d’exportation des pays en développement. Des questions politiques très concrètes se posent
aussi, comme de savoir si les accords commerciaux doivent inclure des clauses sociales
destinées à améliorer les salaires et les conditions de travail dans les pays pauvres. Dans le
meme sillage, un certain nombre de voix s’élèvent pour dénoncer le fait de la multiplication
des échanges internationaux serait la cause des dommages environnementaux sérieux.
-Les accords concernant la propriété intellectuelle comme les ADPIC sont également
dénoncés lorsqu'ils sont relatifs aux biens « vitaux » (aliments, médicaments, eau) ou aux
organismes vivants. Sont en particulier visés les OGM et le prix élevé de certains
médicaments comme ceux contre le SIDA. Certains groupes ont par exemple développé le
concept alternatif de brevet positif pour y remédier.

CHAPITRE II : LES LIMITES DE L’OMC :

L'OMC s'est imposée comme une institution incontournable des relations internationales. Or,
l'ampleur de la contestation en est d'ailleurs de plus en plus palpable. L'OMC n’a pu avoir une
véritable emprise pour la régulation des relations économique, en effet, parallèlement à
l’ordre de l’OMC, des blocs régionaux se sont accentués, d’autant plus un déséquilibre
géographique prévaut en matière des échanges internationaux. Dans un autre registre, le libre
échange considéré comme l’idéal de l’OMC semble se heurter à des contraintes exogènes. En
dernier, l’OMC en prônant que le commerce est un instrument de lutte contre la pauvreté,
s’introduit dans une bataille de longue haleine.

42
I.L'OMC n'est pas un instrument de régulation des relations économiques :

1. Prolifération du régionalisme :

L’organisation des relations commerciales internationales a en effet suivi dans les années
1990 deux évolutions a priori contradictoires. Parallèlement à la conclusion de l’Uruguay
round, il y avait la multiplication d’accords commerciaux régionaux (ACR), exceptions aux
règles générales du multilatéralisme mais, sous certaines conditions, tolérées par les accords
GATT/OMC.

Certains observateurs critiques du régionalisme y ont vu une menace potentielle pour le


multilatéralisme et la promesse de constitutions de blocs commerciaux, les ACR étant de
nature discriminatoire. Mais dans leur grande majorité les économistes considèrent les
accords commerciaux régionaux, s’ils sont « ouverts » et conformes aux règles de l’OMC,
sous l’angle des avantages qu’ils apportent au mouvement de libéralisation des échanges et
concluent à la globale compatibilité entre intégrations régionales et système multilatéral.

« Face à la lenteur des progrès des négociations commerciales multilatérales menées dans le
cadre du Programme de Doha pour le Développement (PDD), la course aux ACR s’est encore
accélérée ». Au 4 janvier 2019, 291 ACR étaient en vigueur. Ils correspondent à 467 notifications
présentées par les Membres de l'OMC (en comptant séparément les marchandises, les services et les
accessions).

Le trait caractéristique depuis le début des années 2000 est la prolifération d’accords de libre
commerce bilatéraux entre pays lointains

43
Cette montée en puissance du bilatéralisme et la multiplication des accords régionaux rend le
système de plus en plus complexe – un enchevêtrement d’accords que Bhagwati appelait «
plat de spaghetti ». Un rapport de l’OMC, en 2004, dénonçait « l’érosion de la non-
discrimination », à tel point que « ce que l’on a appelé l’écheveau des unions douanières, des
marchés communs, des zones de libre-échange régionales ou bilatérales et des préférences,
ainsi que la panoplie illimitée d’accords commerciaux les plus divers, a presque atteint le
stade où le traitement NPF est un traitement exceptionnel.

Il serait certainement préférable aujourd’hui de parler de traitement de la nation la moins


favorisée (NMF) ». Les accords régionaux peuvent très bien être compatibles avec les critères
retenus dans les accords de l’OMC qui, en les autorisant, reconnaissent leur caractère
dérogatoire donc exceptionnel. Mais désormais « l’exceptionnel est bien ancré, et la
dérogation est devenue la règle ».

Le rapport 2005 de l’OMC confirme ce constat : « ce bref aperçu des ACR et de leur
dynamique révèle un environnement commercial de plus en plus complexe caractérisé par la
coexistence du régime NPF et des multiples niveaux de préférences commerciales. Cette
situation est préoccupante pour l’intégrité du système commercial multilatéral ». Avec la
multiplication des accords et arrangements, allant parfois au-delà des accords de Marrakech,
le plus souvent lacunaires, « on se trouve juridiquement dans un véritable maquis inextricable
avec un libre échange sans contrôle, sans barrières et qui se développe sans contreparties afin
d’échapper aux rigueurs de l’OMC et à ses constants rappels à plus de transparence ».
L'accroissement du nombre d'ACR, associé à la préférence manifestée pour des accords de
libre-échange bilatéraux, a entraîné un phénomène de chevauchement des zones couvertes par
les ACR.

Chaque ACR ayant tendance à créer son propre mini-régime commercial, la coexistence dans
un pays de différentes règles commerciales s'appliquant à différents partenaires d'accords
commerciaux régionaux est devenue fréquente. La prolifération d'ACR, surtout lorsqu'ils sont
élargis au point d'englober des domaines politiques non réglementés au niveau multilatéral,
renforce les risques d'incohérences entre les règles et procédures des ACR mêmes, et entre les
ACR et le cadre multilatéral. Alors que l’inflation des accords régionaux des années 1990
n’était pas porteuse d’un tel risque, « la prolifération des accords régionaux » actuelle illustre,
pour Paugam, « une menace existentielle forte » pour l’OMC.

Mais face à ces réalités nouvelles, plutôt que nous demander si le régionalisme est compatible
avec le multilatéralisme, « ne vaudrait-il pas mieux retourner la question et nous demander si
le temps n’est pas maintenant venu pour le multilatéralisme de s’ajuster sur le régionalisme ?
». Il paraît légitime de déterminer quelle forme de régionalisme est la plus compatible avec le
multilatéralisme, mais, précisément, des accords régionaux discriminatoires ne renforceraient-
ils pas le multilatéralisme ? Si on considère que la constitution de zones régionales pourrait
faciliter la coopération, le multilatéralisme serait préservé dans le traitement des relations
interzones. A la lumière des difficultés rencontrées par le cycle de Doha à l’OMC, où
s’affrontent une multitude d’intérêts, « ce n’est pas l’excès d’intégration régionale qui gêne le
multilatéralisme mais son insuffisance ».

44
Mais les accords régionaux de type bilatéral, s’ils ouvrent la voie à l’arbitraire et à la
surenchère, renvoient au processus de libéralisation engagé à l’OMC – certes d’une manière
incontrôlable – qu’ils tendent finalement à renforcer, tout en fragilisant l’organisation. Ce
type d’intégration régionale, strictement économique, suit la logique de la mondialisation. Ces
ACR correspondent à la stratégie globale des multinationales, à la recherche de l’ouverture de
vastes marchés et de coûts de production toujours plus bas.

L’urgence de conclure le cycle de Doha est donc manifeste, Mais si le mouvement actuel
d’intégration régionale tend à affaiblir l’OMC en tant que garde-fou multilatéral du commerce
international, il tend à favoriser, comme les accords de l’OMC, une dynamique de
libéralisation.

2. Déséquilibre géographique et de spécialisation des échanges internationaux :

Déséquilibre géographique :

On assiste actuellement à un important remodelage de la géographie des échanges, mais sa


polarisation persistante traduite par l’intensité des échanges effectués au sein et entre les
principaux blocs régionaux reste une permanence forte, et le commerce intra et interzones
tend globalement à s’accroître.

45
Le fait que la plupart des échanges mondiaux se fassent autour de la Triade est néfaste aux
autres pays notamment ceux en sous développement et en développement. En effet, ces trois
puissances mondiales s’accaparent les richesses de la planète ne laissant en quelques sortes
que les « restes » aux états dits « pauvres ». Alors que certains accumulent des biens, les
autres se paupérisent du fait du manque de ressources.
Les populations du Sud sont des producteurs importants pour le reste du monde notamment en
ce qui concerne la production agricole et les matières premières. Cependant, ces pays
exportent à des prix bas sur des marchés du Nord qui eux se créeront des bénéfices que ne
ressentiront pas les petits producteurs des pays pauvres. On peut donc dire que le Nord
exploite en quelque sorte le Sud.
La répartition des richesses se fait donc essentiellement entre pays du Nord. Elle ne fait
qu’accentuer les écarts de développement et entrainer la paupérisation de nombreuses
populations. Cependant, des pays essaient et réussissent de plus en plus à s’imposer dans
l’économie mondiale. Ils représentent de véritables challengers pour la Triade et fondent leur
force sur des valeurs ajoutées.
De plus, la plupart des investissements de la Triade se font vers les pays du Nord. Ainsi, ils
enlèvent aux pays en développement ou en sous développement, la possibilité de s’enrichir
grâce à la création par exemple de nouvelles entreprises.

Déséquilibre de spécialisation :
Depuis 1948, l’insertion dans le commerce international n’a pas été égalitaire, on peut mettre
en évidence des perdants et des gagnants. Ainsi il semblerait que l’insertion dans le commerce
international ne mettent pas fin aux inégalités, et qu’au contraire elle tend à les accentuer.

En effet certains pays en particulier les pays d’Asie ont vu leur croissance économique
exploser grâce au développement de leurs échanges internationaux. A l’inverse les pays
d’Afrique ont vu leur situation se dégrader.

On peut mettre en évidence le fait que les pays gagnants, les pays les plus dynamiques sont
ceux spécialisés dans les produits dont la demande mondiale progresse le plus rapidement
(pays d’Asie). Alors que la spécialisation d’autres pays du sud n’est pas pertinente au regard
de l’évolution de la demande mondiale (Afrique et Amérique latine) d’autant plus que les
termes de l’échange sont bien souvent désavantageux pour ce type de produits.

46
II. Le libre-échange inachevé :

Le libre-échange correspond à une doctrine économique (c’est le laissez faire du libéralisme


économique), née au tournant des XVIII siècle, qui préconise la liberté du commerce entre les
nations et la suppression de toutes les entraves aux échanges (droits de douanes,
contingentements).
Adam SMITH, dans son ouvrage Recherche sur la nature et les causes de la richesse des
nations 1776, montre les avantages d’une division internationale du travail entre tous les pays
en s’opposant aux thèses mercantilistes qui considéraient le commerce international comme
un affrontement où un pays gagnait ce que l’autre pays perdait (l’enjeu étant les métaux
précieux). David Ricardo, aves « les principes de l’économie politique de l’impôt » 1817, est
le fondateur des théories libérales de l’échange international qui montrent que le commerce ne
désavantage aucun des participants, chacun ayant tout à y gagner.

1. Impact des crises du marché mondial des capitaux sur le libre échange :

Les années 80 ont connu un bouleversement majeur en matière de circulation des capitaux.
Auparavant se juxtaposer plusieurs réseaux nationaux (le marché national des capitaux étant
composé généralement d’un marché national monétaire pour le court terme et d’un marché
financier ou boursier pour le long terme) qui étaient cloisonnés, certains seulement étendant
peu à peu leurs activités au-delà de leurs frontières.
Il existe désormais un marché mondial des capitaux fonctionnant en continu, 24 heures sur
24. On parle ainsi de globalisation financière car d’une part toutes les formes d’épargne
viennent à la rencontre de toutes les formes de besoin de financement, d’autre part les
frontières traditionnelles s’estompent. Cette mondialisation financière repose sur une parfaite
mobilité internationale des capitaux, puisqu’à tout instant ceux-ci se déplacent d’un marché à
l’autre, d’une devise à l’autre, selon les évolutions des risques et des rendements anticipés
(rôle des taux d’intérêt).
L’explosion financière, en favorisant le développement d’opération spéculatives et peu
transparente (marché de gré à gré, c.-à-d. non réglementé, a accru l’instabilité du système
financier international tandis que la globalisation financière est un acteur est un facteur
favorable a l’extension d’une crise financière dans un pays ou pour une institution financière à
l’ensemble de la planète.
La crise financière de l’Asie représente la première crise financière mondiale qui a débuté en
1997 et représentant la première crise de la mondialisation. C’est l’occasion pour le FMI de
jouer un nouveau rôle international, tandis que se pose la question de contrôle des marchés
financiers élargis pas la déréglementation financière.
La crise financière débute durant l’année 2007 et se propage au reste de l’économie au travers
de la production, de la demande et de l’emploi.
D’après des travaux menés par Agnès BÉNASSY-QUÉRÉ et alii dans le cadre du CEPII
(Centre d’études prospectives et d’informations internationales), la crise financière est à
l’origine de l’effondrement du commerce international car, cette crise financière a eu pour
effet le resserrement des conditions de crédits, la chute des prix des produits de base,
l’augmentation de l’incertitude sur la signature des partenaires commerciaux et la forte
volatilité des monnaies ayant eu pour impact un recentrage de l’activité des entreprises sur
leurs marchés intérieurs.

47
Le rapport annuel du Directeur Général de l’OMC publié le 18 novembre 2009 montre
également que « la crise a entraîné un processus massif d’inversion de l’effet de levier dans le
secteur financier mesuré approximativement par la diminution de la part du crédit dans le PIB.
Cela s’explique en partie par la chute de la valeur marchande des actifs détenus par les
institutions financières, et en partie par l’aggravation des conditions macro économiques. Ce
phénomène a des effets directs sur le commerce mondial en raison de la réduction de l’offre
de crédit pour le commerce, et des effets indirects par la réduction de la demande globale liée
à une forte contraction du crédit. Ce processus d’inversion de l’effet de levier dans le secteur
bancaire international est sans doute loin d’être terminé. »
La Banque Mondiale corrobore ces arguments en montrant que le retard dans la relance des
échanges est lié, tout d’abord, à un manque de financement des importations et à un niveau
insuffisant des investissements qui a connu une baisse de 9,7% en 2009 et de 4,9% en 2010
selon leurs prévisions. En outre, la forte contraction de la demande mondiale qui elle-même
était à l’origine de la crise financière des subprimes s’est propagée à la sphère réelle. Les
consommateurs qui ont subi des pertes patrimoniales liées au secteur du logement et aux
revers boursiers ont choisi de différer leurs achats de biens durables (voitures, etc.).
Par conséquent, le chômage élevé qui s’est propagé peut représenter une tentation de
protectionnisme pour les États. D’autant plus que des économistes tels que Paul KRUGMAN,
Paul SAMUELSON ou Alan BLINDER ont nuancé leurs positions sur les bienfaits du libre-
échange. Par exemple, après l’accession de la Chine à l’OMC en 2001, Paul SAMUELSON
montre, dans un article publié en 2004, que le progrès technique peut conduire à une
disparition des avantages comparatifs des États-Unis se traduisant par une détérioration du
revenu par tête aux États-Unis. Le libre-échange ne représente plus les atouts décrits dans les
théories en faveur de l’ouverture des économies en raison des nouvelles caractéristiques du
commerce mondial. De nombreux travaux dans les années 1990 ont cherché à vérifier
l’influence positive du libre-échange sur la création de richesses. Dani RODRICK et
Francisco RODRIGUEZ affirment qu’il est peu possible de démontrer un impact positif ou
négatif de l’ouverture des économies sur le taux de croissance. En outre, Dani RODRICK
stipule que l’intégration d’un pays dans l’économie mondiale doit être comparée à d’autres
politiques de développement avant d’être choisie en raison des coûts liés à la mise en
conformité avec les règles établies par l’OMC.
Face à la crise, les États ont renforcé progressivement les restrictions commerciales mais ces
mesures restent contenues, d’après les dires de Pascal LAMY, Directeur Général de l’OMC,
dans une entrevue réalisée par le journal « Les échos » du 01 décembre 2009. L’économiste
Simon J. EVENETT a réalisé un bilan des mesures protectionnistes en décembre 2009. Cette
étude montre que 297 mesures de protection ont été instaurées depuis novembre 2008 dont un
tiers est lié aux politiques nationales de soutien aux banques, au secteur de l’automobile ayant
comme objectif la sauvegarde des économies plutôt que la mise en place de politiques
commerciales agressives. D’octobre 2008 à octobre 2009, nous assistons à une hausse des
restrictions commerciales qui ne porteraient qu’au maximum sur 1% des flux commerciaux
mondiaux. Ce pourcentage correspond aux échanges visés par les mesures et non à la baisse
effective des échanges. Cependant, les dirigeants de l’OMC pensent que ces mesures
protectionnistes temporaires peuvent s’enraciner et ils veulent réagir dès que la reprise sera là.

48
2. La mondialisation face aux enjeux sociaux et politiques :

On ne prend pas un grand risque en pariant que la plupart des vêtements qu’on porte ont été
produits dans les pays en développement. L’augmentation des exportations des biens
manufacturés en provenance des pays en développement est en effet l’une des principales
mutations de l’économie mondiale au cours des trente dernières années. Même un pays
désespérément pauvre comme le Bangladesh, dont le PIB par habitant représente moins de
5% de celui de la France, exporte plus de produits manufacturé que de produits primaires,
agricoles et minéraux.
Dire que les travailleurs des pays en développement qui produisent les biens manufacturés
destinés à l’exportation sont très peu payés, en regard des salaires versés dans les pays
développés, revient malheureusement à énoncer une banalité. Ces travailleurs gagnent
souvent moins de 1 euro par heure, voire moins de cinquante centimes. Et encore dans des
conditions de travail défavorables et qui sont généralement très mauvaises.
Il faut bien le reconnaître, dans un premier temps, une majorité d’économistes ont
d’abord jugé que le point de vue de ces mouvements altermondialistes était largement
infondé, et finalement peu sérieux. Ils ont simplement mis en avant l’analyse standard des
avantages comparatifs pour balayer d’un revers de manche ces critiques du libre-échange. La
théorie suggère que le commerce est mutuellement bénéfique pour tous les pays pratiquants
ces échanges, mais aussi que le commerce Nord-Sud doit favoriser l’élévation des salaires
dans les pays où la main-d’œuvre est relativement abondante. Cependant, le poids de politique
acquis aujourd’hui par les mouvements altermondialistes et l’affinement de leur
argumentation qu’on étudie les thèses qu’ils défendent avec plus d’attention.

3. L’homogénéisation condamne la diversité culturelle :

Une question encore plus délicate que les différences des normes sociales est l’effet de la
mondialisation sur les spécificités culturelles de chaque pays. Il semble a priori évident que
l’intégration croissante des marchés a conduit à une certaine homogénéisation culturelle. De
plus en plus en, en trouve tout autour du globe des gens qui portent les mêmes vêtements,
ingurgitent les mêmes aliments et les mêmes boissons, écoutent les mêmes musiques et
regardent les mêmes films et séries télévisées.
Il est difficile de nier que quelque chose se perd dans cette homogénéisation culturelle.
L’argument des défaillances du marché peut donc être invoqué pour justifier des politiques
visé à protéger les spécificités culturelles nationales. C’est sur le base de ces argument qu’en
1994 le gouvernement français a pesé de tout son poids lors des négociations de l’Uruguay
Round, pour obtenir que les industries culturelles soient en partie exclues de libéralisation
commerciale des services, il s’agissait avant tout de faire valoir « l’exception culturelle » pour
maintenir le droit d’accorder des subvention publiques à des production audiovisuelle.
Mais si l’argument de l’exception culturelle peut se justifier pour défendre le patrimoine et
les spécificités de chaque pays, il faut aussi prendre garde a ce qu’il n’entrave pas le droit des
individus à profiter de l’immense diversité culturelle que nous offre la mondialisation

49
4. Libre échange au détriment du commerce équitable :

Les différents accords conclus tout au long des cycles successifs de négociations dans le cadre
du GATT et l’élargissement depuis la création de l’OMC de la libéralisation des échanges à
de nouveaux secteurs économiques (services, télécommunications et propriété intellectuelle)
n’ont aménagé aucun encadrement juridique au commerce équitable.
Animé par une logique strictement libre-échangiste, l’objectif prioritaire de l’OMC est de
réduire les obstacles au commerce, la libéralisation successive et accrue des échanges
économiques, et non de rétablir l’équité dans les relations Nord-Sud, ni de se soucier de la
marginalisation croissante de millions de producteurs et paysans du Sud.

Bien que des régimes spécifiques bénéficiant aux pays en développement aient été aménagés,
ils sont loin de satisfaire les critères défendus par le commerce équitable. Les principes qui
sont à la base de ces accords, à savoir l’accès au marché, la clause de la nation la plus
favorisée et le traitement national, ont été conçus pour maintenir cet état d’inégalité dans les
échanges internationaux, faisant la part belle aux intérêts des entreprises et des États les plus
puissants, dont le premier souci est de démanteler toutes les entraves étatiques à leurs
capacités de pénétration des marchés étrangers et de faire bénéficier leurs produits de
traitements similaires aux produits nationaux, même ceux venant de la petite paysannerie des
pays agricoles du Sud.
Par ailleurs, force est de constater l’absence de dispositif juridique fiable à l’OMC concernant
la garantie d’une rémunération équitable des producteurs les plus marginalisés, les conditions
dans lesquelles les produits des pays en développement ont été fabriqués, les garanties
minimales en matière de protection de l’environnement et des droits sociaux fondamentaux.
Le constat est encore plus alarmant concernant la protection des peuples autochtones.

III. L’OMC et la pauvreté :

L'ouverture et la libéralisation des échanges internationaux sont aujourd'hui considérées par


presque tout le monde comme des éléments essentiels d'une stratégie de croissance et de
développement économique global. On considère qu'elles ont joué un rôle majeur dans la
remarquable expansion des pays industriels depuis le milieu du XXe siècle et dans la réussite
des nombreux pays qui ont décollé depuis 1970 environ.

La persistance d'une pauvreté généralisée et extrême est peut-être le plus grand échec de
l'économie mondiale contemporaine et le plus grand défi qu'elle doit relever au XXIe siècle.
Quel est le lien entre commerce et pauvreté ? Est-ce que le processus de libéralisation des
échanges commerciaux ou le maintien d'un régime de libre-échange peuvent être la cause de
la pauvreté ou si au contraire ils ont contribué à la faire reculer ?

Ouverture des échanges et lutte contre la pauvreté “La bonne gouvernance est peut-être le seul
facteur important pour éradiquer la pauvreté et promouvoir le développement ». Kofi Annan,
ancien secrétaire général des Nations Unies. La croissance de la population mondiale
aggravera les problèmes de pauvreté et de sécurité. L’OMC s’est engagé à travailler en faveur
des PVD et des PMA, mais jusqu’à ce jour, les règles du commerce mondial continuent à être
biaisées et à favoriser les pays développés.

50
Les théories économiques du commerce ont toujours soutenu qu’un pays qui participe au
commerce international bénéficie d’une croissance économique plus soutenue et que cette
ouverture peut avoir un impact positif sur la réduction de la pauvreté. L’analyse de l’impact
des accords de l’OMC ne va pas toujours dans ce sens : la croissance économique a eu lieu
dans certains pays mais les PMA n’ont pas atteint le développement espéré ni retiré
d’avantages économiques significatifs liés à l’ouverture du commerce.

Rapidement dressé, l’état des lieux de la planète aujourd’hui se présente comme suit :
-Près de la moitié de la population mondiale vit avec moins de 2 $US par jour.
-1,2 milliard de personnes vivent dans l’extrême pauvreté.
-Tous les jours, 50 000 personnes meurent de causes liées à la pauvreté.
-Toutes les trois secondes, un enfant meurt de causes liées à la pauvreté.
-Tous les soirs, 800 millions de personnes se couchent en ayant faim.
- 880 millions de personnes n’ont pas accès aux soins de santé élémentaires.

La pauvreté rend également les PMA plus vulnérables aux turbulences économiques (que
constitue par exemple la hausse des prix des aliments et du carburant), au changement
climatique, aux catastrophes naturelles, à la violence et au crime. Les habitants des PMA sont
souvent privés d’accès à l’éducation, de services de soins adéquats, de source d’eau potable et
de conditions d’hygiène élémentaires. Malgré les Objectifs de Développement du Millénaire.
La carte suivante montre les inégalités de la répartition des effets de la croissance économique
et l’aggravation de la pauvreté.

L’OMC peut jouer un rôle vital pour le développement, mais il manque le cadre conceptuel,
ainsi que la volonté politique, pour réorienter les règles du commerce international vers
l’objectif d’un bien-être mondial qui s’évaluerait selon des critères liés à la réduction de la
pauvreté et au développement durable. Les changements opérés et les efforts engagés pendant
le Cycle de Doha doivent être poursuivis. Cela permettrait au moins de restaurer la confiance
des PVD dans le système commercial multilatéral.

Malgré les changements de l’économie mondiale, le monde reste confronter à un défi majeur,
éliminé l’extrême pauvreté et améliorer les perspectifs des plus pauvres. Entre 1990 et 2010,
la proportion des personnes vivant dans l’extrême pauvreté a été réduite de la moitié, la plus
forte baisse a eu lieu dans la région de l’Asie de l’est et pacifique. Cependant 85% des
personnes vivant dans l’extrême pauvreté se concentre à l’Afrique subsaharienne et à l’Asie
du sud.

51
L’ouverture commerciale est essentielle pour réduire la pauvreté, mais on ne peut pas compter
sur elle seulement. La relation entre l’ouverture commerciale et la réduction de la pauvreté est
complexe. Les effets de l’ouverture commerciale sur la pauvreté passent par plusieurs canaux,
comme la croissance économique, la stabilité macroéconomique, l’impact sur les ménages et
les marchés, l’évolution des salaires et de l’emploi et l’impact sur les recettes publiques. Pour
chacun d’eux le commerce peut être un facteur clé pour réduire la pauvreté. L’analyse du role
du commerce dans la réduction de la pauvreté doit aller au dela de ses effets sur la croissance
économique. Pour déterminer comment le commerce pourrait contribuer effcicement à la
réduction de la pauvreté, il faut comprendre les contraintes auxquels les pauvres sont
confrontés, en examinant qui sont ces pauvres et ou ils se trouvent et quelles activités
économiques ils exercent.

PARTIE III : AVENIR DE L’OMC :

« Il n’y a qu’une lumière qui guide mes pas et c’est celle de l’expérience. Je ne sais pas
d’autre moyen de juger l’avenir qu’à partir du passé. »

Patrick Henry (acteur important de la révolution américaine)


Discours prononcé à la Convention de Virginie (1775)

Ou en sera le monde et son organisation du commerce dans une génération? C’est ce genre de
questions auxquelles les Membres de l’OMC devront répondre dans les années à venir. Les
réponses à ces questions seront nécessairement préliminaires et spéculatives, mais on peut,
comme l’a suggéré Patrick Henry, laisser l’histoire éclairer notre recherche.

On sait comment le Cycle de Doha s’est déroulé, mais ou l’on ne sait pas quel sera son sort.
On ne sait pas si les Membres réussiront à relancer les négociations sous une forme plus ou
moins identique à leur forme initiale (moins trois des quatre questions de Singapour), s’ils y
mettront fin purement et simplement, s’ils parviendront à un accord de ≪ Doha allégé ≫ ou
s’ils fragmenteront les négociations pour les mener dans le cadre d’initiatives distinctes.

52
L’impasse du Cycle de Doha montre néanmoins que les Membres ont encore à déterminer la
bonne répartition des taches, les pays développés et les économies émergentes ayant des
points de vue très différents sur la part incombant à chacun. Les Membres de l’OMC, plus
nombreux, ont moins de volonté d’aller vers un même but, que les parties au GATT qui
formaient une communauté plus soudée.

L’OMC avait à peine commencé à fonctionner quand les participants et les observateurs ont
commencé à proposer des moyens d’améliorer sa structure ou ses procédures. Le nombre de
propositions a augmenté après chaque revers subi par le système, en particulier après les
Conférences ministérielles catastrophiques de 1999 et de 2003 et le ralentissement général des
négociations qui en a découlé.

Mais il faut rappeler que le système commercial multilatéral n’aurait jamais été construit s’il
n’avait d’abord été imaginé. L’Organisation mondiale du commerce (OMC) n’est pas le
produit d’une seule idée, pourtant, ni même d’une seule école de pensée. Elle représente en
fait un point de convergence – et parfois de friction – entre trois domaines distincts de la
théorie et de la pratique. Le droit, l’économie et la politique ont, chacun, renforcé et limité la
capacité des pays a coopérer pour créer et maintenir un système fondé sur des règles et dont
les membres, très disparates par leur niveau de développement économique et leur puissance
politique, travaillent ensemble pour réduire les obstacles au commerce.

A ce stade, il est question de recueillir les idées pour revoir la voie d'une réforme la plus
globale de cette organisation.

CHAPITRE I : LA REFORME DE L’OMC :

Dans un premier temps, nous allons examiner les propositions américaines pour la réforme de
l’OMC, avant d’évaluer un éventuel retrait des Etats-Unis de l’OMC, suite aux menaces
proférés à ce sujet par Trump. Dans un second temps, nous nous arrêterons sur les appels de
réformes proposées par différents intervenant qui s’articulent autour d’une révision
institutionnelle et pour l’ajustement du commerce à des fins d’équité.

I. Réforme proposée par les Etats-Unis d’Amérique :

1. Approche américaine pour la réforme de l’OMC :

Il faut reconnaître qu’en termes d’échanges internationaux, l’enlisement du cycle actuel de


négociations, le « cycle de Doha » – commencé en 2001 et qui devait s’achever en 2015,
accentue le sentiment que l’Organisation mondiale du commerce (OMC) est totalement
dépassée.

Dès lors, la situation dans laquelle se trouve actuellement le système commercial multilatéral
est imputable à la stratégie consciente et délibérée des États. Sont en particulier responsables,
les États-Unis et l’UE, ainsi que, dans une moindre mesure, le G-3 (Brésil, Chine, Inde). Le
blocage en cours illustre les limites d’une approche fondée uniquement sur l’échange
réciproque de concessions commerciales, qui ne laisse d’autre rationalité s’exprimer que celle
de l’expansion des exportations.

53
L’économie internationale de 2018 n’a rien à voir avec celle de 2001 et encore moins avec
celle de 1995, date de création de l’OMC. Elle est plus hétérogène et moins asymétrique. Or,
les compromis commerciaux multilatéraux se sont nourris de l’asymétrie structurelle entre les
États, une puissance exerçant son hégémonie ou son leadership étant une condition
d’obtention d’un accord. Le rééquilibrage des rapports de richesse (en raison de l’émergence
de nouvelles puissances commerciales) conduit à une crise de leadership.

En réponse à cette crise, les États-Unis ont élaboré une stratégie vis-à-vis de l’OMC. L’USTR
(United States Trade Representative – Bureau du représentant américain au commerce) a
précisé les conditions d’un réinvestissement des États unis dans l’architecture commerciale
multilatérale lors de la onzième conférence ministérielle de l’OMC, en décembre 2017.

Elles se déclinent en cinq propositions.

Les États-Unis veulent tout d’abord l’affirmation de la centralité de l’OMC comme forum
pour la libéralisation des échanges. L’institution ne doit pas être réduite à sa fonction de
règlement des différends.

Ils souhaiteraient également que l’attitude de certains membres change : il leur est reproché de
négliger la négociation au profit de la « litigation », c’est-à-dire d’essayer d’obtenir par le
biais des différends ce qu’ils ne parviennent pas à obtenir par la négociation. Ainsi s’explique
le blocage américain concernant le renouvellement des juges-arbitres de l’Organe de
règlement des différends de l’OMC.

Troisièmement, selon l’USTR, le système gagnerait à clarifier le contenu du terme


« développement » : certains pays ne devraient plus prétendre à ce statut et aux droits et
dérogation aux obligations multilatérales qu’il autorise. De plus, si autant de pays souhaitent
des dérogations aux règles de l’OMC, car elles ne permettent pas leur développement, c’est
qu’il convient de réformer lesdites règles.

Quatrièmement, il faudrait renforcer les principes de transparence, vérifiabilité et crédibilité


des engagements car beaucoup trop de membres ne mettent pas œuvre ce qu’ils ont signé.

Enfin, l’OMC doit se concentrer sur l’efficience des marchés – la microéconomie de la


globalisation – avec deux axes prioritaires : la réforme des entreprises d’État et les standards
sanitaires et phytosanitaires. Ainsi que, plus largement, le protectionnisme réglementaire et
normatif.

Comment réformer l’OMC ?

Ces cinq propositions préfigurent un agenda de réformes de l’institution sur lequel l’ensemble
des membres devront se prononcer. Elles mettent en relief le problème de la différenciation au
sein des pays en développement et les comportements de « passagers clandestins » (free
riding) de certains pays (pays qui attendent la mise en place d’une politique de relance par les
autres membres, laquelle sera bénéfique à leurs propres exportations sans impacter leur
budget). Trois options sont envisageables : multilatérale, plurilatérale, ou multilatérale à
géométrie variable.

54
L’option de multilatéraliser le régionalisme, formulée par l’économiste Richard Baldwin, vise
à sortir du débat stérile régionalisme ou multilatéralisme. L’OMC reprendrait alors les acquis
des libéralisations régionales et préférentielles. Elle deviendrait l’institution de gouvernance
des accords commerciaux régionaux, veillant à la cohérence des engagements, à la réduction
de leurs effets négatifs et à la multilatéralisation des réglementations et dispositifs qui
fonctionnent.

L’option plurilatérale consiste quant à elle à basculer du modèle consensuel de négociation à


un modèle de masse critique d’États établissant des règles communes pour les secteurs
d’intérêt les concernant. L’OMC deviendrait un « club de clubs » d’États aux intérêts
convergents (like-minded countries). Les accords plurilatéraux existent déjà.

Ils tendraient à se multiplier : Trade in Service Agreement (TiSA), Accord sur les
technologies de l’information I et II, Accord sur les marchés publics, le futur accord sur
la libéralisation des biens et services environnementaux ou du e-commerce. Ces accords
seraient ouverts aux pays non membres, sous certaines conditions d’engagements et de mise
en œuvre.

Problème : ces deux options risquent de rencontrer l’opposition des pays tiers ou exclus de ces
négociations en comités restreints. Ce qui, dans une membre-driven organization, est
synonyme de blocage.

D’où une troisième option : un multilatéralisme à géométrie variable non pas en termes
géopolitique ou stato-centré, mais en termes substantiel. Il s’agit d’intégrer l’hétérogénéité
structurelle des États membres en la matérialisant dans des différenciations institutionnelles et
normatives. Cela reviendrait à instituer, dans les accords multilatéraux, des droits et
obligations différenciés, des clauses échappatoire en fonction de critères négociés, des clauses
pare-feu en cas de difficulté en matière de libéralisation ou de réglementation, voire d’initier
des dispositifs compensatoires et des procédures type « bâton-carotte » dans les accords, en
laissant liberté aux États de choisir les types d’obligations et de droits auxquels ils
souscriraient.

Ces flexibilités inciteraient aux compromis les plus inclusifs possible et indiqueraient que
l’OMC n’est pas uniquement conçue pour ouvrir les marchés, mais également pour les
réguler. Ce type de possibilité existe déjà dans l’Accord sur la Facilitation des Échanges de
2013. Celui-ci fonctionne, dans sa partie traitement spéciale et différenciée, selon une logique
comparable. Il s’agirait de la systématiser, de la consolider et de lui faire franchir un saut
qualitatif et quantitatif.

En définitive, seuls les États membres sont en mesure d’initier ces réformes. Déterminer
comment le système commercial peut être gouverné dans un monde caractérisé par une
intégration imparfaite, une hétérogénéité des préférences (y compris entre pays de même
niveau de développement et alliés) tout en incluant une reconnaissance des problèmes
globaux (climat, biodiversité, pauvreté) devrait être une de leur principale préoccupation. La
tâche n’est pas mince.

55
2. Les retombées d’une éventuelle sortie des Etats-Unis du système multilatéral :

Le président Trump a déclaré, jeudi 30 août 2018, que les États-Unis pourraient quitter
l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Il a très exactement dit : « S'ils ne
mettent pas d'ordre là-dedans, je me retirerai de l'OMC. »

Pascal Lamy : Il existe deux interprétations possibles de la déclaration de Trump. Il faut donc
se préparer à deux cas de figure. Peut-être veut-il retirer son pays de l'OMC, comme il l'a fait
pour l'Accord de Paris sur le climat. Plus généralement, il aurait entrepris de faire une croix
sur toute discipline internationale qui limite la souveraineté des États-Unis pour revenir à des
rapports bilatéraux. En matière de commerce international, ça s'appelle le mercantilisme. Vive
les exportations, à bas les importations ! Le commerce est une affaire de rapports de force
entre souverains et pas d'optimisation des systèmes de production en fonction des avantages
comparatifs des uns et des autres. Une doctrine qui a progressivement disparu au cours des
trois derniers siècles.

Les Etats-Unis "délivrés" des règles de l’OMC :


L’OMC constitue de fait un obstacle aux guerres commerciales dont Donald Trump a fait sa
spécialité depuis son entrée à la Maison-Blanche. Chine, Union Européenne, Mexique,
Canada.
En quittant l’OMC, les Etats-Unis se délivreraient donc de règlements que Donald Trump
considère comme des obstacles. Par exemple, les droits de douane aux Etats-Unis ne seraient
plus régulés et le pays pourrait librement pratiquer des "prix de dumping" - des prix inférieurs
aux coûts de production qui visent à gagner des parts de marché - et donc à favoriser la
production nationale.
Mais les Etats-Unis bénéficieraient-ils vraiment de ce repli protectionniste? Pas pour
longtemps, expliquait Akiko Suwa-Eisenmann, chercheuse à l’Ecole d’économie de Paris,
dans Les Echos : "A court terme, certains emplois dans les régions les plus vulnérables seront
effectivement sauvés. Mais les consommateurs seront tous affectés par le renchérissement des
importations".
La sortie de l’OMC pourrait à terme coûter davantage aux Etats-Unis qu’elle ne lui rapporte,
puisque le pays serait bien sur obligé, en retour, de faire une croix sur les avantages octroyés
par les pays membres. La clause de la nation la plus favorisée (NPF), l’un des principes
fondamentaux de l’OMC, garantit notamment l’égalité de traitement entre les signataires.
"Les producteurs américains qui utilisent des intrants importés perdront en compétitivité",
poursuit l’économiste.
L’importance des accords régionaux renforcée
Depuis le début de son mandat, l'administration Trump n’a pas cessé de décrier l’efficacité
des accords multilatéraux, favorisant les ententes plus confidentielles à deux Etats. "Nous
n'aimons pas les palabres infinies, nous préférons les actions bilatérales pour négocier. Les
réunions multilatérales prennent beaucoup de temps et nous sommes animés d'un sentiment
d'urgence", assénait le secrétaire américain au Commerce, Wilbur Ross. Donald Trump
pourrait donc tenter, en remplacement de l’OMC, de conclure des accords bilatéraux avec les
pays membres qu’il entend garder dans son giron commercial.

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Les Etats-Unis sont les premiers partenaires commerciaux de l’Union européenne, totalisant
16,3% des échanges de biens de l’UE en 2017. Alors en attendant la conclusion d’accords
bilatéraux, il faudra bien compenser la nouvelle politique protectionniste des Etats-Unis.
"L’importance de l’Union européenne s’en trouverait largement renforcée", explique Agnès
Bénassy, professeur d’économie à l’université Paris 1 Panthéon Sorbonne. "Dans le domaine
commercial, les accords régionaux représentent de véritables ceinture de sécurité". Les plus
petits pays européens souffriraient les premiers de l’augmentation des droits de douane
américains, perdant l’avantage de négociations menées via la voix forte de l’UE.
Le danger d’une contagion protectionniste?
La nouvelle politique américaine, de plus en plus protectionniste, est en porte-à-faux avec la
dynamique d’ouverture qui domine les échanges internationaux depuis la Seconde Guerre
mondiale. En 1995, l’OMC succède à l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce
(GATT), créé en 1947 sous l’impulsion des Etats-Unis pour instaurer un "code de bonne
conduite libérale et multilatérale". Sa place au sein de l’organisation fait craindre que les
autres membres ne la suive, ce qui marquerait un regain protectionniste au niveau mondial, et
non plus à la seule échelle d’un pays. Ce scénario s’est déjà produit dans les années 1930.
Alors que depuis la Première Guerre mondiale, les échanges internationaux se libéralisaient
de plus en plus, la crise de 1929 a occasionné un repli protectionniste, sous l’impulsion des
Etats-Unis. Promulguée en 1930, la loi Smoot Hawley a augmenté d’un seul coup les droits de
douane américains à l’importation. Par mesure de rétorsion, de nombreux pays avaient à leur
tour modifié leur régime de taxation. Les échanges mondiaux ont alors fortement diminué,
accentuant l’impact de la crise économique. "Maintenir les échange commerciaux
internationaux et donc éviter un retour au protectionnisme pendant la crise de 2008 explique
en partie le fait que l’on se soit mieux tirés de celle-ci que de celle de 1929", explique Agnès
Bénassy.
II. Contenu d’amples appels de réforme de l’OMC :

Les voix pour la réforme de l’OMC n’est pas l’apanage d’un seul intervenant, les réflexions
sur la réforme sont encore exploratoires et sont menées dans différents forums, il y a lieu de
noter que le sommet du G20 tenu le 01 Décembre 2018 à Buenos Aires a appelé, pour sa part
à réformer l'Organisation mondiale du commerce et s’est donné rendez-vous en Aout 2018
pour juger des progrès accomplis.

1. Réforme institutionnelle :

Il faut moderniser l’Organisation pour lui permettre de contenir les tendances


protectionnistes et de s’adapter aux importantes évolutions intervenues dans les structures et
les modalités du commerce international.

Dans les chantiers à ouvrir, prévoir dans le cadre des prochaines négociations deux réformes,
qui paraissent indispensables au bon fonctionnement et au développement du système
multilatéral :

57
En premier lieu, le développement des fonctions annexes à la négociation : recherche,
analyse, études. La capacité d’analyse économique de l’OMC doit être renforcée : Il paraît
indispensable de renforcer les équipes chargées de cette fonction. Ceci permettrait à l’OMC
de développer une véritable vision des évolutions économiques actuelles dans une perspective
Commerciale.

Ceci exige, en second lieu, le renforcement des équipes et des moyens.

Il conviendrait aussi de consolider la fonction « forum de discussion » de l’OMC afin que


cette dernière ne se réduise pas à uniquement à une enceinte de négociation pour la
libéralisation des échanges.

L’OMC se doit d’être un lieu de discussion et d’expertise – y compris contradictoires – sur


toutes les questions liées au triptyque libéralisation-réglementation-résolution des différends.
C’est ce qui constitue son cœur de métier.

De surcroit, il est question de changer la méthode de négociation pour éviter les blocages liés
au besoin de l’unanimité de ses membres, faire plus de suivi pour s’assurer du respect des
engagements.

Il importe aussi d’accroître la transparence des différentes pratiques et politiques


commerciales. La réforme devrait également examiner les moyens de différencier les
engagements pris par les pays en développement en fonction de leurs capacités
économiques respectives.

Et repenser à la différenciation entre les États membres. La distinction « pays développés »


d’un côté, « pays en développement » et « pays les moins avancés » de l’autre, date du siècle
dernier. L’économie mondiale est désormais plus hétérogène, hétérogénéité structurelle et
institutionnelle. Cela implique d’ouvrir un débat sur les critères de différenciation entre les
pays membres, garantie d’une meilleure efficacité.

«La fonction d'appel du système de règlement des différends de l'OMC est au bord de la
paralysie. Sans cette fonction fondamentale de l'OMC, le monde perdrait un système qui
garantit la stabilité du commerce mondial depuis des décennies.

Le système de règlement des différends de l'OMC et son organe d'appel jouent un rôle décisif
pour garantir la sécurité et la prévisibilité du système commercial multilatéral. Sans un
système d'exécution approprié, les règles multilatérales ne peuvent plus fonctionner
efficacement. Si aucune solution n'est trouvée pour sortir de l'impasse dans laquelle se
trouvent les nominations à l'organe d'appel, c'est tout le système qui est menacé.

Les propositions de texte s s'attachent à répondre à toutes les préoccupations exprimées en ce


qui concerne l'organe d'appel de l'OMC et incluent les pistes suivantes:
— mettre en place de nouvelles règles pour les membres sortants de l'organe d'appel, qui
indiquent clairement dans quels cas ils peuvent rester en place pour achever les procédures de
recours dont ils sont saisis;
— veiller à ce que les procédures de recours soient achevées en temps voulu, conformément
au délai de 90 jours fixé dans les règles de l'OMC, à moins que les parties au différend n'en
conviennent autrement;

58
— clarifier que les questions de droit qui font l'objet d'un recours devant l'organe d'appel
n'incluent pas des questions sur le sens de réglementation nationales;
— indiquer que l'organe d'appel ne doit examiner que des questions nécessaires à la résolution
du différend;
— instaurer des réunions annuelles entre les membres de l'OMC et l'organe d'appel, qui
permettent des discussions ouvertes sur des questions systémiques ou sur l'évolution de la
jurisprudence.

2. Pour un commerce mondial plus juste : Les paris sur le cycle de Doha

L’une des raisons pour lesquelles le cycle du développement s’effondre, c’est que, par son
mode de fonctionnement et sa structure, l’OMC comme son prédécesseur le GATT est une
institution mercantiliste, fondée sur le marchandage, où chacun recherche son intérêt. Le
concept même de cycle du développement implique de rompre radicalement avec ce
mercantilisme et de s’entendre collectivement.

Pour progresser, le cycle du développement doit respecter les recommandations suivantes :

Principes fondamentaux : les bases d’un accord équitable :

Les principes sur lesquels le cycle de développement doit reposer son comme suit :

-Tout accord doit être évalué en fonction de son impact sur le développement, tout ce qui a un
effet négatif sur le développement doit être exclu du programme des négociations. Le
secrétariat de l’OMC devrait être chargé de produire une analyse d’incidence en équilibre
général qui doit être sensible aux différences d’impact. L’élimination des subventions
agricoles des pays développés, par exemple, fera vraisemblablement monter les cours des
denrées agricoles, ce qui bénéficiera aux pays qui les exportent mais nuira à ceux qui les
importent. L’élimination de ces subventions se traduira donc par un transfert de bien-être.
Mais son effet ne sera probablement favorable au développement. Même si les pays
importateurs nets y perdent globalement, l’impact de la réforme sur la répartition est
potentiellement positif dans les pays pauvres, puisque les producteurs (population rurales)
comptent parmi les collectivités les plus pauvres de ces pays. Ces collectivités vont très
probablement y gagner, même si le pays, globalement, y perd parce qu’il est importateur net
de denrées subventionnées.

Enfin, il est de la plus haute importance de distinguer entre les dispositions qui doivent, en
principe, permettre à un pays d’améliorer sa situation par leur nature même ;les dispositions
qui vont peut-être le faire, mais peut-être pas ; et les dispositions qui sont fondamentalement
de nature redistributrice, ou les gains des uns sont largement contrebalancés par les pertes des
autres.

-Tout accord doit être équitable : La nature même des accords commerciaux interdit que
chacune de leurs dispositions paraisse équitable. Certaines ont pour but d’avantager une
partie, d’autres une autre partie ; c’est dans l’ensemble, pris globalement, qui doit paraitre
équitable. Le problème qui se pose c’est l’interprétation de l’équité.

59
-Tout accord doit s’élaborer équitablement : L’équité procédurale se concentre sur l’ouverture
et la transparence du processus de négociation et sur la façon dont se mènent les discussions.
La transparence est essentielle, car elle permet à davantage de voix de se faire entendre dans
le processus de négociation et limite l’abus des puissants.

-Le programme des négociations doit se limiter à des questions liées au commerce et
favorisant le développement. L’expansion du champs d’action de l’OMC a un prix, d’abord,
les pays en développement ont des moyens limité pour analyser et négocier un large éventail
de problème, aussi les ordre du jour chargé plombent les négociations et enfin cette possibilité
permet aux pays développés d’utiliser leur position de force dans les négociations
commerciales pour exploiter les PED sur toute une série de problème.
Pour tous ces raisons, il convient d’instaurer un principe de prudence pour guider l’expansion
de l’OMC. On ne doit pas inclure de nouveaux problème au programme du cycle de
développement que s’ils sont bien placés par rapport à trois critères : la pertinence du
problème pour les flux commerciaux, son impact positif sur l’environnement et l’existence
d’une raison logique de choisir l’action collective.

Traitement spéciale pour les pays en développement :

Tout d’abord, il y a une proposition d’accès au marché qui maintient le système commercial
fondé sur des règles, tout en faisant la différence entre pays riches et pays pauvres.

La difficulté consiste à concevoir un traitement spécial et différencié qui laisse aux pays du
sud la flexibilité nécessaire pour traiter leur problème de développement et réduise au
minimum les couts d’ajustement et de mise en œuvre, sans rendre marginal leur participation
au système commercial mondial ni les priver des bénéfices d’une libéralisation Sud-Sud.

Pour y parvenir, il faudrait que chaque membre de l’OMC accepte d’ouvrir son marché en
libre accès à tous les produits des pays en développement plus pauvres et plus petits que lui.

Le principe qui sous-tend cette proposition, c’est la participation de tous les pays à système
obligatoire d’accès préférentiel aux marchés, où les droits et les devoirs sont répartis de façon
progressive, suivant des critères objectifs.

Les avantages de cette proposition se déclinent comme suit :


-elle réalise une importante libéralisation
-elle réalise en particulier une importante libéralisation Sud-Sud
-elle répartit les obligations de manière progressive.
-elle permet au pays de gérer les importations les plus menaçante :cette proposition n’impose
pas aux PED d’ouvrir leurs marchés aux économies plus grandes et développés, cela leur
laisse la possibilité d’assurer à leurs principales industries une certaine protection contre les
importations provenant d’économie qui doivent leur avantage de cout à leur échelle.
-elle transforme des dispositifs préférentiels laissés à la discrétion des pays développés en
obligations biens définies dans le cadre de l’OMC.

En outre, l’OMC doit cesser de rechercher des accords qui imposent des règles obligatoires
dans le cadre de l’engagement unique, et de les remplacer par la répartition des disciplines de
l’OMC en essentielles et non essentielles ou les pays du sud pourraient etre autorisé à ne pas
s’y soumettre pour des raisons de développement.

60
CHAPITRE II : LES DEFIS FUTURS DE L’OMC EN MATIERE DU COMMERCE
INTERNATIONAL :

I. Facteurs de transformation qui dictent l’avenir du commerce mondial :

Les redéploiements géographiques du commerce et de l’investissement sont le reflet de


la modification des rapports de force :

Sans le commerce et l’investissement étranger, il est difficile d’imaginer comment certaines


économies émergentes auraient pu afficher une croissance aussi forte que celle que nous
avons observée.

L’augmentation des parts des économies émergentes et des économies en développement dans
les échanges et les investissements internationaux est une caractéristique marquante de la
croissance globale des mouvements internationaux de produits et de facteurs.

Le déplacement mondial du pouvoir économique offre de nombreuses possibilités nouvelles


et a aidé des millions de personnes à sortir de la pauvreté absolue. Toutefois, que le
déplacement du pouvoir constitue un défi pour la coopération internationale. Un changement
de cette ampleur suppose un sens politique et une vision de la part des dirigeants.

Production concertée: l’essor des chaînes de valeur internationales :

Le processus de production implique souvent plusieurs pays, chacun spécialisé dans


différentes tâches tout au long de la chaîne d’approvisionnement, depuis les toutes premières
étapes de la production jusqu’à la consommation finale. Cette réalité de fait nous fait
envisager le commerce d’une manière différente.

Parce que les composants sont produits dans des endroits multiples, nous ne pouvons plus
attribuer au produit final une origine unique. Il nous faut identifier les différents sites de
production qui ont ajouté de la valeur dans les différents pays. Cela vaut aussi bien pour la
production de marchandises que pour la production de services. Le fait de mesurer le
commerce en termes de valeur ajoutée plutôt qu’en termes de flux bruts a transformé la façon
dont nous considérons les relations commerciales.

L’image que donne le commerce mesuré en termes de valeur ajoutée met en évidence
l’ampleur et la nature de l’interdépendance des nations. Elle souligne le caractère
indissociable des importations et des exportations, dont témoigne la part croissante des biens
intermédiaires dans les échanges.

La coopération internationale en matière de commerce et d’investissement se fait de plus


en plus dans un cadre préférentiel :

Le commerce non discriminatoire, qu’ont toujours défendu le GATT puis l’OMC, a cédé de
plus en plus de terrain face aux accords préférentiels. Ce phénomène est imputable à une série
complexe de raisons et a multiplié les possibilités commerciales tout en mettant en cause le
principe central de non‑discrimination consacré par le multilatéralisme.

61
La montée du régionalisme soulève des questions importantes, tant sur le rôle que sur la
pertinence de l’OMC. Dans certains sous‑groupes de pays il peut être plus facile ou plus
intéressant d’un point de vue politique de s’ouvrir davantage au commerce préférentiel, mais
les avantages économiques d’une telle ouverture peuvent être limités. Les gouvernements
doivent se demander s’il y a de bonnes raisons de penser que la logique fondamentale de
non‑discrimination – pierre angulaire de la gouvernance commerciale d’apres‑guerre – n’a
plus d’utilité.

La technologie est le moteur de la mondialisation

Les progrès des technologies de l’information et de la communication et l’apparition de


l’ordinateur personnel, des téléphones intelligents et d’Internet ont révolutionné toutes sortes
d’industries. Un large éventail d’opérations commerciales se font sur Internet et ce sera de
plus en plus le cas à mesure que l’accès se généralisera.

L’activité commerciale est transformée par les manières nouvelles et innovantes de mettre les
communications électroniques au service de la production, de la consommation, de l’achat et
de la vente.

Ensemble, ces innovations ont rendu possibles le monde fortement intégré, la production à
flux tendu, les chaînes de valeur et la délocalisation de nombreuses tâches, facteurs qui
viennent tous renforcer la dépendance de l’économie mondiale à l’égard du commerce et de
l’investissement étranger pour les revenus, la croissance et l’emploi. De plus, la technologie
ne cesse d’évoluer.

II. projection de l’impact des technologies numériques sur le commerce

Pour étudier l'impact de la numérisation sur le commerce mondial, on étudie quantitativement


les effets des trois tendances suivantes : i) la redistribution des tâches de production due à la
robotisation et à la numérisation ; ii) la servicification du processus de production, avec
l'utilisation croissante des services liés aux TIC dans le reste de l'économie ; et iii) la baisse
des coûts du commerce découlant des changements technologiques.

Ces trois tendances se traduisent par des chocs quantitatifs dans les projections de référence,
qui correspondent au scénario du statu quo dans l'économie, sans changements
technologiques. Pour chacun des trois chocs, un scénario de base et un scénario de
convergence sont élaborés, ce dernier prévoyant une accélération des trois tendances dans les
pays en développement. Comme les évolutions technologiques sont très incertaines, les
tendances modélisées sont une indication de la direction que devrait prendre le commerce
mondial.

Cette section décrit l'impact des trois tendances des technologies dans les scénarios de base et
de convergence sur les résultats suivants : i) croissance annuelle du commerce ; ii) part des
pays en développement dans les exportations mondiales ; iii) évolution de la répartition
sectorielle et géographique de la production ; iv) évolution de la chaîne de valeur mondiale
mesurée par la part des biens intermédiaires importées dans la production brute et la valeur
ajoutée étrangère ; et v) part des services importés dans la production manufacturière. Les
valeurs du scénario de référence sont également présentées à des fins de comparaison.

62
On obtient quatre résultats principaux. Premièrement, les changements technologiques
devraient accélérer la croissance du commerce, à la fois du fait de la baisse des coûts du
commerce et de l'utilisation plus intensive des services des TIC.

Deuxièmement, la tendance à l'augmentation de la part des pays en développement dans le


commerce mondial peut être affaiblie si les pays en développement ne parviennent pas à
rattraper leur retard pour les trois phénomènes modélisés : la croissance technologique
associée aux nouvelles technologies, la réduction des coûts du commerce et l'augmentation
des services des TIC dans le processus de production.

Troisièmement, la tendance à l'augmentation de la part des exportations de services dans les


exportations totales est renforcée pour la plupart des pays par les évolutions technologiques
modélisées.

Quatrièmement, l'impact de ces évolutions sur l'organisation des chaînes de valeur mesuré par
la part de valeur ajoutée étrangère dans les exportations ou la part des biens intermédiaires
importés dans les exportations brutes est limitée. On constate cependant que l'augmentation
de la part des importations de services dans la production manufacturière brute se renforce
considérablement avec les changements technologiques, par suite de la servicification et de la
baisse des coûts du commerce pour les services.

Le tableau C.4 contient le premier grand résultat de l'analyse : les changements


technologiques devraient stimuler la croissance du commerce. Cela résulte à la fois de la
baisse des coûts du commerce et de l'utilisation plus intensive des services des TIC. Le
tableau compare la croissance annuelle du commerce dans le scénario de référence, le
scénario de base et le scénario de convergence. Il ressort clairement de ce tableau que les
nouvelles tendances renforcent considérablement la croissance du commerce dans les
différentes régions. L'impact est plus important dans les régions affichant une croissance du
commerce plus faible dans le scénario de référence. Comme attendu, les régions à faible
revenu affichent une croissance du commerce plus forte dans le scénario de convergence.

63
La figure C.25 présente le deuxième grand résultat de l'analyse : la tendance à l'augmentation
de la part des pays en développement dans le commerce mondial peut être affaiblie si ces pays
ne parviennent pas à rattraper leur retard pour les trois phénomènes modélisés, à savoir la
croissance technologique associée aux nouvelles technologies, la réduction des coûts du
commerce et l'augmentation de la part des services des TIC dans le processus de production.
La figure montre que la part des exportations des pays en développement (panneau du haut)
augmente avec le temps, mais beaucoup moins dans le scénario de base. La part des pays en
développement dans les exportations mondiales passe de 46% en 2015 à 57% dans le scénario
de convergence, alors qu'elle n'atteint que 51% dans le scénario de base sans rattrapage. Une
tendance positive analogue est observée pour la part des PMA (panneau du bas).

Le troisième grand résultat de l'analyse est que la tendance à l'augmentation de la part des
exportations de services dans les exportations totales est renforcée, pour la plupart des pays,
par les évolutions technologiques modélisées, comme le montre le tableau C.5. Cela tient au
fait que les coûts du commerce diminuent plus pour les secteurs de services et que la tendance
à la servicification entraîne une augmentation de l'importance des services dans l'économie et
donc aussi de celle du commerce. Au niveau mondial, la part du commerce des services dans

64
le commerce total passe de 21% en 2016 à 25% dans les deux scénarios, alors qu'elle se
maintient à 22% dans le scénario de référence (voir la dernière ligne du tableau C.5).

Quatrièmement, l'impact des trois tendances sur l'organisation des chaînes de valeur est limité.
Le tableau C.6, qui indique la part des biens intermédiaires importés dans la production brute,
montre que pour la plupart des régions, à l'exception de l'Union européenne, la part des biens
intermédiaires importés dans la production brute augmente dans les scénarios de base et de
convergence combinés. Cela s'explique une fois encore par le fait que les coûts du commerce
diminuent, ce qui rend plus attractif l'emploi de biens intermédiaires importés dans la
production.

Néanmoins, l'augmentation de la part des importations de services dans la production


manufacturière brute devient beaucoup plus importante avec les changements technologiques,
comme le montre clairement le tableau C.7. Cela tient au fait que la baisse des coûts du
commerce, en particulier pour les services, conjuguée à la servicification entraîne une
augmentation des importations de services des TIC.

65
CONCLUSION :

L’étude historique des relations commerciales avant la création du GATT/de l’OMC montre
clairement qu’il est important de conclure et de maintenir des accords institutionnels pour
soutenir les relations commerciales internationales.
Les institutions internationales peuvent péricliter et perdre leur pertinence si les
gouvernements ne s’en soucient pas, et plus ce déclin institutionnel est avancé, plus il est
difficile d’y remédier. Par ailleurs, il a été démontré à maintes reprises que, si elles ne
s’adaptent pas au changement, les institutions déclinent peu à peu et sont considérées comme
des vestiges d’un monde ancien mû par des intérêts différents de ceux qui façonnent le
présent.
Même lorsque les gouvernements sont disposés à s’adapter et à remanier leurs accords de
coopération en fonction des circonstances, les accords commerciaux resteront toujours
incomplets en un sens. En effet, ils ne peuvent pas prévoir toutes les éventualités. Si les
institutions et les dispositions contractuelles peuvent atténuer les incertitudes liées au
caractère incomplet des contrats, elles ne peuvent pas les éliminer complètement.

66
Cela a deux conséquences. L’une est que les différends découlent naturellement du caractère
incomplet des contrats. L’autre est que, pour y remédier, il faut trouver un équilibre délicat
entre, d’une part, la flexibilité et l’adaptation, et, d’autre part, la préservation de la
prévisibilité et de la stabilité
L’un des principaux problèmes auxquels le système commercial multilatéral est confronté est
de savoir comment intégrer les pays en développement de façon à répondre à leurs aspirations
en matière de croissance et de développement. Un autre problème persistant est celui de la
gestion des relations entre le système commercial multilatéral et les accords commerciaux
régionaux/bilatéraux.
À cela s’ajoute le fait que, pendant les dernières années au moins, les gouvernements ont dû
gérer le débat continu sur la forme et la teneur des règles commerciales multilatérales, en
particulier sur la question de savoir s’il faut inscrire de nouveaux thèmes au programme et
comment le faire. Dans un monde en mutation, les institutions doivent trouver de nouveaux
moyens de s’adapter à cet environnement changeant.
Enfin, le système a dû régler des différends commerciaux centrés sur la manière dont les
parties perçoivent leurs droits et obligations. Même si certaines parties souhaitent toujours
modifier le système de règlement des différends du GATT/de l’OMC, celui-ci a donné des
résultats remarquables au fil des années.
Mais qu’en est-il des défis futurs, des questions qui commencent à se poser et qui demandent
de nouveaux efforts de coopération? il serait hasardeux de dresser une liste des défis à venir,
qui serait de toute façon incomplète. Il est cependant intéressant d’examiner brièvement les
points susceptibles de retenir l’attention de la communauté commerciale internationale dans
les années à venir.
Les mesures de réduction des droits de douane prises aux niveaux multilatéral, plurilatéral et
unilatéral ont donné de l’importance à d’autres mesures qui déterminent les flux
commerciaux, les conditions de la concurrence et les possibilités de tirer des avantages du
commerce. Souvent appelées, de manière générique, mesures non tarifaires, ces mesures
englobent un large éventail d’interventions. Depuis longtemps, elles intéressent le
GATT/l’OMC et font l’objet d’accords négociés. Ces préoccupations prendront probablement
de l’importance dans l’avenir. Plus généralement, il s’agit essentiellement de savoir comment
la réglementation influe sur les conditions économiques et quels sont les défis posés par la
coopération internationale en matière de réglementation, en particulier pour réduire autant que
possible la discrimination entre les pays
La dernière question qui peut être mentionnée ici n’est pas une question nouvelle, mais elle
est certainement appelée à prendre de l’importance. Il s’agit des problèmes environnementaux
et de leurs liens avec le commerce. Si nous comprenons mieux aujourd’hui qu’il y a 20 ou 30
ans quelle est l’interaction entre l’environnement et le commerce, le public et les milieux
politiques s’intéressent davantage à beaucoup d’autres problèmes environnementaux plus
graves, comme le réchauffement de la planète. Il ne fait aucun doute que nous entendrons
parler beaucoup plus de la question de savoir comment le commerce et le système commercial
multilatéral aideront à relever les défis environnementaux.
En fin, malgré les problèmes qui se posent encore ou qui se poseront dans l’avenir, les années
d’existence de l’OMC constituent une expérience positive pour la communauté internationale.
Nombre de gouvernements, d’acteurs non gouvernementaux, d’analystes et de critiques
souhaitent améliorer le système, mais rares sont ceux qui contesteraient sa contribution.

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Bibliographie
Ouvrages et rapports :
-Pour un commerce mondial plus juste, Joseph Stigliz, Andrew Charlton, Edition
Nouveaux Horizons (2005)
-Economie Internationale, Paul Krugman, Maurice Obstfeld, Marc Melitz, Edition
Nouveaux Horizons (2015)
-Rapport d'information déposé par la délégation de l’Assemblée Nationale pour l’Union
Européenne sur la place des pays en développement dans le système commercial
multilatéral, et présenté par M. Jean-Claude Lefort, Député. (2000)

-Dossiers spéciaux : Commerce International, disparité des revenus et pauvreté, réalisé


par l’OMC(2000)

-Rôle du commerce dans l’éradication de la pauvreté, réalisé conjointement par l’OMC


et le Groupe de la Banque Mondiale (2015)

-Rapport sur le commerce mondial 2018 : comment les technologies numériques


transforment le commerce mondial réalisé par l’OMC

-OMC, régulation mondiale des échanges et préférence européenne, par Julien


Prévotaux, note de synthèse, juin 2006

-L’OMC à 20 ans : Réalisations et défis, réalisé par l’OMC en 2015

-Histoire et avenir de l’Organisation Mondiale du Commerce, réalisé par l’OMC 2013

-L’avenir du commerce: Les défis de la convergence, Rapport du Groupe de réflexion


sur l’avenir du commerce convoqué par le Directeur général de l’OMC Pascal Lamy
2013

-Les négociations commerciales multilatérales Rapport au ministre de l'économie, des


finances et de l'industrie Juillet 1999 Catherine LALUMIÈRE, Députée européenne
Jean-Pierre LANDAU, Inspecteur général des Finances

-L’intégration du commerce en vue de la réalisation des Objectifs de développement


durable, réalisé par l’OMC

Les articles :

-Communiqué de presse Réforme de l'OMC: l'UE propose une solution pour le


fonctionnement de l'organe d'appel, Bruxelles, le 26 novembre 2018

68
-Réformer l’OMC pour sortir de la crise du multilatéralisme, réalisé en 2018 par Mehdi
Abass, maitre de conférence Université Grenoble Alpes

-Comment refonder l'OMC pour sortir de la crise du commerce international ? réalisé


en 2018 par Mehdi Abass, maitre de conférence Université Grenoble Alpes

- OPINION : Réforme de l’OMC: une vision suisse Par Didier Chambovey,


ambassadeur suisse auprès de l'OMC

-Le commerce international face à la crise financière mondiale de 2007, centre des
ressources en Economie gestion

-L'OMC et les négociations commerciales multilatérales Jean-Marc Siroën 2007

Wébographie :

-https://www.medef.com/fr/actualites/lomc-est-en-danger-pourquoi-il-faut-la-reformer
-http://ses-noailles.fr/category/ex-cours-t/p3/
-https://www.cncd.be/Ministerielle-de-Buenos-Aires-l
-https://www.areion24.news/2019/05/09/lomc-une-organisation-sur-le-declin/
-https://www.senat.fr/rap/r05-423/r05-4239.html
-https://2buseco.blogspot.com/2016/07/la-remise-en-cause-de-lomc.html
-http://french.xinhuanet.com/2018-07/14/c_137324195.htm
-http://archive.ipu.org/splz-f/trade12/cuts.pdf

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