Charles Aznavour Souvent il m'arrivait Devant mon chevalet Je vous parle d'un temps De passer des nuits blanches Que les moins de vingt ans Retouchant le dessin Ne peuvent pas connaître De la ligne d'un sein Montmartre en ce temps-là du galbe d'une hanche Accrochait ses lilas Et ce n'est qu'au matin Jusque sous nos fenêtres Qu'on s'asseyait enfin Et si l'humble garni Devant un café-crème Qui nous servait de nid Épuisés mais ravis Ne payait pas de mine Fallait-il que l'on s'aime C'est là qu'on s'est connu Et qu'on aime la vie Moi qui criait famine Et toi qui posais nue La bohème, la bohème Ça voulait dire La bohème, la bohème On a vingt ans Ça voulait dire La bohème, la bohème On est heureux Et nous vivions de l'air du temps La bohème, la bohème Quand au hasard des jours Nous ne mangions qu'un jour sur deux Je m'en vais faire un tour
Dans les cafés voisins À mon ancienne adresse
Nous étions quelques-uns Je ne reconnais plus
Qui attendions la gloire Ni les murs, ni les rues
Et bien que miséreux Qui ont vu ma jeunesse
Avec le ventre creux En haut d'un escalier
Nous ne cessions d'y croire Je cherche l'atelier
Et quand quelque bistro Dont plus rien ne subsiste