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Acrosyndromes vasculaires
E. Puzenat, P. Humbert

Les acrosyndromes vasculaires sont l’ensemble des perturbations de la microcirculation du territoire


cutané des extrémités responsables d’une modification de couleur et/ou chaleur des téguments, de façon
durable ou réversible. Ils sont classés selon leur survenue paroxystique ou permanente ou selon leur
mécanisme de déclenchement (vasoconstriction ou vasodilatation de la microcirculation).
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Mots-clés : Acrosyndrome vasculaire ; Phénomène de Raynaud ; Acrocyanose ; Érythermalgie ; Acrorhigose ;


Engelures ; Acrocholose ; Syndrome des paumes rouges

Plan  Phénomène de Raynaud


■ Introduction 1 Clinique
■ Phénomène de Raynaud 1
Il s’agit d’un acrosyndrome vasculaire paroxystique classique-
Clinique 1
ment déclenché par le froid mais pouvant aussi survenir par temps
Physiopathogénie 1
frais, humide ou venteux.
Interrogatoire 1
Il atteint le plus souvent les doigts et les orteils, mais aussi
Examen clinique 2
parfois les oreilles et le nez.
Bilan paraclinique d’un phénomène de Raynaud 3
Il est plus fréquent chez les femmes.
Prise en charge du phénomène de Raynaud 3
Cet acrosyndrome vasculaire peut être primitif, on parle alors
■ Acrocyanose 4 de maladie de Raynaud, ou secondaire, on parle alors de syndrome
■ Érythermalgie 4 de Raynaud. L’objectif de l’interrogatoire et de l’examen clinique
■ Acrorhigose 4 est de les différencier. Les causes des phénomènes de Raynaud
secondaires sont listées dans le Tableau 1.
■ Engelures 5 Le déroulement de la crise est caractérisé par la survenue brutale
■ Acrocholose 5 de la succession de trois phases parfois inconstantes :
■ Syndrome des paumes rouges : syndrome de Lane 5 • une phase syncopale blanche, qui dure environ 15 minutes et
qui est constante. C’est cette phase qui permet de poser le diag-
nostic de phénomène de Raynaud (Fig. 1) ;
• une phase asphyxique bleue (Fig. 2) ;
 Introduction • une phase hyperhémique rouge, qui témoigne d’une vasodila-
tation réactionnelle.
Les acrosyndromes vasculaires sont définis comme l’ensemble
des perturbations de la microcirculation du territoire cutané des
extrémités (surtout la main), responsables d’une modification de Physiopathogénie
couleur et/ou de chaleur des téguments, de façon durable ou réver- Il s’agit d’un vasospasme paroxystique survenant soit :
sible. • sur des vaisseaux indemnes d’anomalies en dehors des crises ;
Les acrosyndromes vasculaires peuvent être classés selon leur il s’agit alors d’une maladie de Raynaud (forme primitive) ;
survenue paroxystique ou permanente ou selon leur mécanisme • sur des vaisseaux pathologiques même en dehors des crises, il
de déclenchement (vasoconstriction ou vasodilatation de la s’agit alors d’un syndrome de Raynaud (forme secondaire).
microcirculation).
On définit ainsi :
• les acrosyndromes vasculaires paroxystiques liés à : Interrogatoire
◦ une vasoconstriction : le phénomène de Raynaud ;
◦ une vasodilatation : l’érythermalgie ; Dans un premier temps, le médecin doit chercher des argu-
• les acrosyndromes vasculaires permanents liés à : ments en faveur d’une cause secondaire du phénomène de
◦ une vasoconstriction : l’acrocyanose, l’acrorhigose, les enge- Raynaud :
lures ; • âge de survenue tardif après 40 ans ;
◦ une vasodilatation : l’acrocholose, le syndrome des paumes • atteinte unilatérale et/ou atteinte des pouces ;
rouges : syndrome de Lane. • persistance des symptômes l’été.

EMC - Traité de Médecine Akos 1


Volume 9 > n◦ 3 > juillet 2014
http://dx.doi.org/10.1016/S1634-6939(14)56211-4
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Tableau 1.
Causes des phénomènes de Raynaud secondaires.
Unilatéral Bilatéral
Artériopathies Causes professionnelles Collagénoses Hémopathie Causes Causes médicamenteuses
Syndrome du canal et traumatiques (parfois Sclérodermie Cryoglobulinémie endocriniennes Bêtabloquants et collyres
carpien bilatéral) systémique Maladie des Myxœdème bêtabloquants
Syndrome du défilé Maladie professionnelle Lupus érythémateux agglutinines froides Thyroïdite de antiglaucomateux
thoracobrachial n◦ 69 des engins disséminé Dysglobulinémie Hachimoto Antimigraineux dérivés de
Athérosclérose vibrants : marteau Dermatomyosite et Syndromes l’ergot de seigle
Embolie artérielle piqueur, bûcheron, etc. polymyosite myéloprolifératifs Décongestionnants nasaux
Maladie de Buerger Anévrisme cubital : Connectivite mixte par voie locale ou générale
(thromboangéite maladie du marteau : (syndrome de Sharp) Bromocriptine
oblitérante) ouvrier, carreleur, etc. Polyarthrite Antiparkinsonien
Maladie de Takayasu Maladie des décrouteurs rhumatoïde Bléomycine
Maladie de Horton d’autoclave Périartérite noueuse Interféron alpha, etc.
Microtraumatismes Syndrome de
localisés : karatéka, Gougerot-Sjögren
volleyeurs, etc.

Figure 3. Mégacapillaires.

Figure 1. Phénomène de Raynaud, phase syncopale.

Examen clinique
En cas de maladie de Raynaud, l’examen clinique et l’examen
des mains sont strictement normaux.
En cas de syndrome de Raynaud, plusieurs anomalies cliniques
peuvent être mises en évidence selon la cause :
• en faveur d’une maladie auto-immune :
◦ acrosclérose et/ou sclérose cutanée ;
◦ cicatrices cupuliformes des pulpes des doigts ;
◦ ulcérations digitales ;
◦ mégacapillaires visibles à l’œil nu (Fig. 3) ;
◦ calcifications sous-cutanées ;
◦ télangiectasies, etc. ;
• en faveur d’une cause vasculaire :
◦ anomalie de palpation des pouls ;
◦ anomalie de l’auscultation cardiaque.

Manœuvres
Dans l’exploration d’un phénomène de Raynaud, l’examen cli-
nique doit comporter un certain nombre de manœuvres utiles
Figure 2. Phénomène de Raynaud, phase asphyxique.
dans la recherche étiologique.
Manœuvre de Allen (Fig. 4)
C’est un geste clinique utile dans l’exploration d’un phéno-
Dans un second temps, l’interrogatoire doit rechercher des mène de Raynaud afin d’en rechercher le caractère primitif ou
facteurs favorisant la survenue d’un phénomène de Raynaud secondaire. Elle consiste à comprimer simultanément les artères
secondaire : radiale et cubitale au niveau du poignet, puis à relâcher l’une
• activité professionnelle : engin vibratoire, etc. ; ou l’autre des artères après avoir fait effectuer au malade des
• pratiques sportives traumatisantes ; mouvements de flexion-extension de la paume afin de vidan-
• prise de médicaments vasoconstricteurs ; ger la vascularisation. On observe alors la revascularisation de
• tabagisme ; la paume et des doigts qui, lorsqu’elle est retardée ou inhomo-
• antécédent personnel ou familial de maladie auto-immune. gène (manœuvre positive), apporte un argument en faveur du

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• diamètre des anses capillaires : 7 à 12 ␮m ;


• flux sanguin normal ;
• atmosphère péricapillaire claire sans œdème ni microhémorra-
gie.
Dans la maladie de Raynaud, la capillaroscopie est normale en
dehors des crises.
En cas de sclérodermie systémique
Le paysage capillaroscopique est caractéristique. Il est composé
de capillaires géants ou mégacapillaires (diamètre supérieur à
50 ␮m) avec une diminution hétérogène de la densité capil-
laire et une désorganisation de l’arrangement des boucles de
capillaires aboutissant au stade tardif à un désert capillarosco-
pique.
Un examinateur entraîné peut ainsi faire le diagnostic de syn-
drome de Raynaud secondaire à une sclérodermie systémique à la
capillaroscopie.
L’aspect n’est cependant pas toujours aussi spécifique et peut
uniquement montrer la présence de capillaires dysmorphiques
avec exsudats et microhémorragies.
Figure 4. Manœuvre de Allen.
Prise en charge du phénomène de Raynaud
caractère secondaire du phénomène de Raynaud. La positivité de La prise en charge étiologique du phénomène de Ray-
la manœuvre de Allen traduit une atteinte organique des artères naud doit être réalisée en première intention lorsqu’elle est
de la main et prouve que le phénomène de Raynaud n’est pas un possible.
simple vasospasme sur des artères saines.
En cas de phénomène de Raynaud peu invalidant
Manœuvre du chandelier ou manœuvre de Roos (maladie de Raynaud)
Elle permet de diagnostiquer les syndromes de la traversée
thoracobrachiale responsables de phénomènes de Raynaud secon- Des mesures prophylactiques sont à privilégier :
daires. Le patient est assis, bras en abduction, coude à 90 degrés, • mesures de protection vestimentaire au froid avec le port de
épaules en arrière. Il réalise des mouvements d’ouverture et de gants, vêtements à manches longues, adaptation du poste de
fermeture des mains alternativement pendant trois minutes. En travail, etc. ;
cas de compression artérielle, apparaît une pâleur de la main et • éviction des médicaments vasoconstricteurs ;
des doigts, en cas de compression veineuse, une dilatation vei- • sevrage tabagique impératif ;
neuse du réseau superficiel du moignon de l’épaule et du pectoral • éviction des microtraumatismes.
homolatéraux avec cyanose du membre, en cas de compression
nerveuse, des paresthésies. En cas de phénomène de Raynaud sévère
(syndrome de Raynaud)
Bilan paraclinique d’un phénomène Un traitement médicamenteux peut être proposé en complé-
ment des mesures prophylactiques :
de Raynaud • les inhibiteurs calciques sont le traitement de première inten-
tion du syndrome de Raynaud sévère. La nifédipine (Adalate® )
Ce bilan est à réaliser devant tout phénomène de Raynaud aty-
est le seul inhibiteur calcique à avoir une autorisation de mise
pique, suspect d’être secondaire.
sur le marché (AMM) dans cette indication, à faible dose : 10 mg
matin, midi et soir. Il permet de diminuer la fréquence et la
Biologique : bilan auto-immun sévérité des vasospasmes au prix parfois d’effets indésirables
Recherche d’anticorps antinucléaires plus solubles (SSA, SSB, tels que des céphalées, des œdèmes des extrémités, etc. D’autres
RNP) plus anti-topo-isomérase (Scl70) plus anticentromère. inhibiteurs calciques sont couramment utilisés dont le type et
Discuter la recherche de cryoglobulinémie et d’agglutinines la dose à utiliser ne font pas l’objet d’un consensus. D’autres
froides. traitements ont reçu l’AMM dans cette indication comme la
prazosine (Minipress® ) ;
Radiologique • les dérivés de la prostacycline (Ilomédine® ) sont utilisés dans
les phénomènes de Raynaud sévères avec troubles trophiques
Rechercher une cause vasculaire avec la réalisation d’un écho- (ulcères ischémiques) en évolution. Ils bénéficient d’une AMM
doppler artériel des membres supérieurs et prise de pression dans cette indication. Ils s’utilisent par voie parentérale, à la
tissulaire transcutanée d’oxygène (TcPO2 ). posologie de 1,5 à 2 ng/kg par minute avec une durée de per-
Réalisation d’un électromyogramme (EMG) à la recherche d’un fusion de six heures, cinq jours consécutifs. Une adaptation
syndrome du canal carpien. des posologies sur trois jours est recommandée pour limiter
les effets indésirables et améliorer la tolérance du traitement.
Capillaroscopique Il n’existe pas de consensus sur les intervalles entre les perfu-
Cet examen non invasif et reproductible est à réaliser surtout sions qui sont en général répétées toutes les six à 12 semaines
en cas de phénomène de Raynaud bilatéral. L’examinateur appré- en fonction de la réponse clinique. Les effets indésirables à
cie la morphologie capillaire, la densité et le diamètre des anses type d’hypertension artérielle, de céphalées, de douleurs abdo-
capillaires, le flux sanguin et l’atmosphère péricapillaire. Il permet minales, diarrhées ou vomissements rendent son utilisation
de suspecter le diagnostic de sclérodermie systémique au stade de délicate et nécessitent une surveillance médicale hospitalière.
syndrome de Raynaud en révélant des anomalies spécifiques de la D’autres traitements semblent efficaces dans la prise en charge
pathologie. des syndromes de Raynaud sévères en diminuant la fréquence,
la durée et la sévérité des crises et en améliorant les troubles
Chez le sujet normal trophiques associés : le bosentan (Tracleer® ) : antagoniste mixte
• Morphologie capillaire : les capillaires sont disposés en épingle des récepteurs de l’endothéline (ETA et ETB) a reçu une AMM
à cheveux, à intervalle régulier ; dans le traitement préventif des ulcérations digitales ischémiques
• densité : environ dix à 14 capillaires par millimètre ; liées au syndrome de Raynaud en cas de sclérodermie systémique.

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Le sildénafil (Revatio® ) et le tadalafil (Cialis® ), inhibiteurs sélec- Tableau 2.


tifs des phosphodiestérases de type 5 (guanosine monophosphate Causes d’érythermalgie secondaire.
cyclique [cGMP]) pris par voie orale semblent également effi- Syndromes myéloprolifératifs
caces dans le traitement préventif du syndrome de Raynaud mais,
Hypertension artérielle
dans cette indication, ces traitements sont en prescription hors
AMM [1] . Diabète
Connectivites
Vascularites
 Acrocyanose Sclérose en plaques
Purpura thrombopénique idiopathique
Contrairement au phénomène de Raynaud, l’acrocyanose est Goutte
un acrosyndrome vasculaire permanent touchant les deux mains
Insuffisance veineuse
et les deux pieds. Les extrémités ont un aspect cyanosé, bleu, sont
froides et humides. Médicament : inhibiteurs calciques, bromocriptine, pergolide
L’hyperhidrose associée est caractéristique. L’acrocyanose Intoxication au mercure
atteint le plus souvent les femmes jeunes, surtout longilignes, et
s’aggrave au froid. Elle ne se complique jamais de troubles tro-
phiques (sclérose cutanée ou ulcération).
décrites. Il code pour la sous-unité alpha des canaux sodiques :
L’acrocyanose est liée à une vasodilatation de l’ensemble des
NaV1.7 [4] . Ces canaux sodiques sont principalement localisés
veinules des extrémités. Cette vasodilatation du secteur veinulaire
au niveau du ganglion rachidien dorsal et dans les neurones
provoque une stase veineuse dans ce secteur qui retentit en amont.
des ganglions sympathiques. Ils interviennent dans la nocicep-
Il y a donc diminution de la quantité de sang qui arrive au niveau
tion et dans la régulation vasomotrice. Les mutations de NaV1.7
des téguments, les mains sont froides ; le sang des capillaires est
entraînent l’activation des canaux sodiques. Les conséquences
désaturé, donnant un aspect bleuté aux mains.
sont une hyperexcitabilité des neurones nociceptifs responsables
Dans les cas d’acrocyanose typique, la cause est toujours idio-
de la douleur et de la vasodilatation artériolaires paroxystiques [5] .
pathique et il n’y a pas d’indication à réaliser des examens
Dans les formes secondaires, l’atteinte peut être asymétrique et
complémentaires.
débuter après l’âge de 40 ans. Les causes d’érythermalgie secon-
Les patients sont en général peu gênés (préjudice esthétique
daire sont regroupées dans le Tableau 2.
principalement) sauf en cas d’hyperhidrose sévère associée. Dans
Le diagnostic d’érythermalgie est clinique et repose sur la triade
ce cas, des séances d’ionophorèse (exposition des mains et/ou des
érythème, augmentation de la chaleur locale et douleurs paroxys-
pieds à un courant électrique continu véhiculé par l’eau) peuvent
tiques. Il n’y a pas d’examen complémentaire à réaliser pour aider
être proposées.
au diagnostic.
Les arguments cliniques pour le diagnostic de l’érythermalgie
sont l’existence de crises paroxystiques, douloureuses, atteignant
 Érythermalgie les extrémités, qui deviennent rouges, gonflées avec hyperhidrose
associée pendant les crises.
L’érythermalgie ou érythromélalgie est un acrosyndrome vascu- Les facteurs déclenchants sont toutes les situations susceptibles
laire se manifestant par des crises paroxystiques aiguës touchant de provoquer une vasodilatation sanguine : chaleur, orthosta-
les mains et les pieds, dont la durée varie de quelques minutes tisme, exercice physique, etc.
à quelques heures. C’est un acrosyndrome rare. Brutalement, Les facteurs améliorants sont toutes les situations susceptibles
le membre devient chaud, érythémateux avec apparition d’un de diminuer l’afflux sanguin dans l’extrémité : froid, surélévation
œdème accompagné d’une sensation de brûlure intense. Les crises de l’extrémité, etc.
sont favorisées par la chaleur et l’effort et calmées par l’exposition Les symptômes sont améliorés par la prise d’aspirine.
au froid ou par la surélévation du membre atteint. Les extrémités Les diagnostics différentiels de l’érythermalgie sont surtout la
sont normales entre les crises. neuropathie périphérique, les acrodynies et l’artériopathie.
L’érythermalgie peut être primitive ou secondaire. Sa prise en charge est difficile et non codifiée.
Son incidence a été estimée dans une étude américaine de Le traitement étiologique est à privilégier dans les érythermal-
2007 à 1,3 cas pour 100 000 habitants par an. Dans cette étude, gies secondaires.
les formes primitives étaient plus fréquentes que les formes Dans les érythermalgies primitives, ont été rapportés comme
secondaires (1,1 pour 100 000 habitants par an versus 0,2 pour efficaces :
100 000 habitants par an) [2] . • l’aspirine à la dose de 500 mg en une prise ;
Le mécanisme étiopathogénique de l’érythermalgie est une • les bêtabloquants par leur effet vasoconstricteur ;
vasodilatation artériolaire importante avec augmentation de la • l’indométacine ;
quantité de sang dans la circulation sanguine distale expli- • le pizotifène ;
quant la sensation de brûlure et la rougeur de la peau. Les • les antidépresseurs ;
symptômes sont améliorés par le froid qui provoque une vaso- • les antiarythmiques (mexilitine) ;
constriction, diminue l’afflux sanguin et calme la douleur. Ainsi, • les anesthésiques locaux ou systémiques (lidocaïne en perfu-
les patients atteints utilisent fréquemment de la glace ou des sion) ;
bains d’eau froide à visée antalgique, pouvant être responsables de • les antiépileptiques : carbamazépine, clonazépam, gabapentine.
complications. Une étude rétrospective réalisée sur 168 patients Ces traitements doivent être associés aux mesures d’éviction des
atteints d’érythermalgie rapporte des cas de nécrose digitale, de facteurs déclenchant les crises.
nécroses cutanées et de gangrène ayant parfois nécessité des
amputations. Des cas d’hypothermie sévère liée à des expositions
chroniques au froid ont également été décrits [3] .
L’érythermalgie primitive est rare, sporadique ou parfois fami-
liale, les crises sont souvent symétriques et débutent avant l’âge  Acrorhigose
de 40 ans.
Dans les formes d’érythermalgie familiale, la transmission est Cet acrosyndrome vasculaire touche surtout la femme jeune
autosomique dominante. Il s’agit d’une canalopathie : maladie et se traduit par des extrémités pâles et froides en permanence.
liée à une altération des canaux sodiques Nav1.7, entraînant une Ce trouble est fréquent et toujours bénin. En cas de présentation
neuropathie des fibres périphériques responsable de troubles vaso- clinique atypique (âge de survenue tardif, atteinte unilatérale),
moteurs et de douleurs. Le gène responsable est identifié : SCN9A les diagnostics différentiels à rechercher sont l’hypothyroïdie et
qui est localisé sur le chromosome 2q ; plusieurs mutations sont l’artériopathie.

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 Engelures  Syndrome des paumes rouges :


Elles sont la traduction d’une hypersensibilité au froid et syndrome de Lane
touchent plus souvent les femmes que les hommes. Ce sont des
lésions inflammatoires déclenchées par le froid et/ou l’humidité, C’est une anomalie microcirculatoire constitutionnelle réali-
comprenant des taches érythémateuses ou violines associées à sant un tableau d’érythème palmaire permanent. Il doit être
un œdème. Un prurit est fréquemment associé. Elles peuvent différencié des autres causes d’érythème palmaire (insuffisance
s’associer à un syndrome de Raynaud ou à une acrocyanose. La hépatocellulaire, cirrhose, grossesse, hyperœstrogénie, médica-
localisation la plus fréquente est les pieds, mais elles peuvent ments, etc.).
atteindre les mains, le nez, les oreilles.
Les diagnostics différentiels sont les lupus engelures chez la
femme jeune, la maladie de Buerger chez l’homme fumeur, les  Références
embolies de cristaux de cholestérol chez les patients de plus de
60 ans polyvasculaires, et les syndromes myéloprolifératifs. [1] Levien TL. Advances in the treatment of Raynaud’s phenomenon. Vasc
Le traitement est essentiellement préventif : protection contre Health Risk Manag 2010;6:167–77.
le froid, éviction des médicaments vasoconstricteurs, utilisation [2] Reed KB, Davis MD. Incidence of erythromelalgia: a population-based
study in Olmsted Country, Minnesota. J Eur Acad Dermatol Venereol
d’inhibiteurs calciques.
2009;23:13–5.
[3] Davis MD, O’Fallon WM, Rogers RS, Rooke TW. Natural history
of erythromelalgia: presentation and outcome in 168 patients. Arch
 Acrocholose [4]
Dermatol 2000;136:330–6.
Yang Y, Wang Y, Li S, Xu Z, Li H, Ma L, et al. Mutations in SCN9A,
encoding a sodium channel alpha subunit, in patients with primary
Il s’agit de sensations subjectives des extrémités à type de brû- erythermalgia. J Med Genet 2004;41:171–4.
lure sans anomalies objectives de couleur ou de température [5] Cummins TR, Dib-Hajj SD, Waxman SG. Electrophysiological pro-
de la peau. Pour certains, il s’agirait d’une forme incomplète perties of mutant Nav I.7 sodium channels in a painful inherited
d’érythermalgie. neuropathy. J Neurosci 2004;24:8232–6.

E. Puzenat (e1puzenat@chu-besancon.fr).
P. Humbert.
Service de dermatologie, CHU Saint-Jacques, Université de Franche-Comté, Inserm U645, IFR133, 25030 Besançon cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Puzenat E, Humbert P. Acrosyndromes vasculaires. EMC - Traité de Médecine Akos 2014;9(3):1-5 [Article
2-0668].

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