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Revue d'histoire des textes

La tradition manuscrite du Roman de Mélusine par Coudrette


Eléanor Roach

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Roach Eléanor. La tradition manuscrite du Roman de Mélusine par Coudrette. In: Revue d'histoire des textes, bulletin n°7
(1977), 1978. pp. 185-233;

doi : https://doi.org/10.3406/rht.1978.1165

https://www.persee.fr/doc/rht_0373-6075_1978_num_7_1977_1165

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Résumé
Le Roman de Mélusine en vers, par Coudrette, écrit aux alentours de l'année 1401, est postérieur
d'une dizaine d'années au récit en prose de Jean d'Arras. Le roman de Coudrette, comme il le dit
lui-même, est déjà la deuxième rédaction en vers de l'histoire des Lusignan. Quant à la première
rédaction, elle est perdue. Comme le texte de Coudrette tel qu'il a été publié par Francisque
Michel n'est qu'une transcription d'un manuscrit incomplet (Q), c'est nous qui publierons la
première édition critique.
Le texte du roman en vers est conservé dans vingt manuscrits : A Amiens, Bibl. mun. 411 ; Β
Oxford, Bodleian Library Bodley 445 ; C Cambridge, Univ. Library 1. 2. 5 ; D et Ε Carpentras, Bibl.
mun. 406 et 407 ; F Baltimore, Walters Art Gallery W 317 ; G Grenoble, Bibl. mun. 368 ; H Paris,
Bibl. de l'Arsenal 3475 ; L Londres, British Library Additional MS 6796 ; M à U Paris, Bibl. nat. fr. :
M : 1458, Ν : 1459, O : 1483, Ρ : 1631, Q : 12575, R : 18623, S : 19167, Τ : 20041, U : 24383 ; V
Valenciennes, Bibl. mun. 461 et W Aberystwyth, Nat. Libr. of Wales 5030 C.
Les manuscrits se répartissent en deux groupes principaux : ADEHNQUV et BCFGLMOPRSTW .
Dans la première série les manuscrits les plus importants pour l'établissement du texte sont D et
E, mais le second est l'œuvre d'un copiste si inattentif qu'il ne peut servir que de témoin à l'appui.
Ν semble être copié sur un manuscrit presque identique à D. Cependant, ce n'est pas D lui-même.
U est le seul manuscrit à avoir été corrigé systématiquement. H est un manuscrit trop tardif pour
être utile à l'établissement du texte.
Dans la deuxième série, BW représentent la tradition du correcteur attentif mais sans génie ;
CGLR et FM sont des manuscrits qui n'ont rien de très remarquable, sinon une tendance à
rajeunir la langue. OT et PS se trouvent tantôt dans la première série, tantôt dans la deuxième. Τ
copie les deux mille premiers vers sur O, puis s'apparente aux leçons du groupe de D. Ρ et S sont
très probablement l'œuvre du même copiste.

Abstract
The verse version of the Roman de Mélusine, by Coudrette, was written ca. 1401, some ten years
after Jean d'Arras had composed his prose romance. As Coudrette himself mentions, the history
of the Lusignan family had been told in rime before ; but no manuscript of this earlier version has
been preserved. Since Francisque Michel's publication of Coudrette's romance is only the printing
of a transcription of ms Q (which is incomplete), I am preparing the first critical edition of this text.
There are twenty manuscripts of the verse romance : A Amiens, Bibl. mun. 411 ; Β Oxford,
Bodleian Library Bodley 445 ; C Cambridge, Univ. Library 1. 2. 5 ; D. and Ε Carpentras, Bibl. mun.
406 and 407 ; F. Baltimore, Walters Art Gallery W 317 ; G Grenoble, Bibl. mun. 368 ; H Paris, Bibl.
de l'Arsenal 3475 ; L London, British Library Additional MS 6796 ; M through U Paris, Bibl. nat. fr. :
M : 1458, Ν : 1459, O : 1483, Ρ : 1631, Q : 12575, R : 18623, S : 19167, Τ : 20041, U : 24383 ; V
Valenciennes, Bibl. mun. 461, and W Aberystwyth, Nat. Libr. of Wales 5030 C.
These manuscripts may be divided into two main groups : ADEHNQUV and BCFGLMOPRSTW. In
the first group, the most important manuscripts for establishing the text are D and E, but Ε was
copied by a scribe so careless that it can only be used for support and emendation, not as the
basic text. Ν appears to be copied from a manuscript practically identical with D, and yet not D
itself. U is the only manuscript which was corrected systematically. Η is too late and faulty to be of
any use in establishing the text.
In the second group, BW are the work of careful, correcting scribes who lack imagination. CGLR
and FM are manuscripts of no great merit except as witnesses to the evolution of the language.
The copyists of OT and PS borrow from both groups, though more often from the second. Ρ and S
are very likely the work of the same scribe. Τ copied the first two thousand lines from O, then
followed an exemplar of the D group.
LA TRADITION MANUSCRITE DU ROMAN DE MÉLUSINE
PAR COUDRETTE

Mélusine, la fée fondatrice de la famille des Lusignan en Poitou, était


la troisième fille de Présine et d'Hélinas, roi d'Albanie. Elle avait pour
sœurs Palestine, qui devait garder le trésor de son père dans une montagne
en Aragon, et Mélior, châtelaine d'un palais en Gilicie (Asie Mineure).
L'histoire de chacune de ces trois filles nous est conservée dans le roman
de Goudrette. Ce sont Mélusine, son mari Raymond, et leurs fils qui ont
surtout retenu l'attention du romancier. Toutefois, celui-ci consacre les
douze cents derniers vers à Mélior et à Palestine. C'est pour cette raison
sans doute qu'il nomme son œuvre « roman de Parthenay ou de Lusignen »
et non pas « roman de Mélusine ». Quant à nous, nous conservons ce dernier
titre qui est d'usage courant.
L'histoire de cette fée n'a cessé d'intriguer les gens du Moyen Age
autant que ceux du monde moderne. Vouée à devenir serpent, tous les
samedis, du nombril à l'extrémité des pieds, Mélusine ne peut vaincre son
sort, mourir et aller au Paradis, que si elle trouve un mari qui promette
de ne jamais chercher à savoir ce qu'elle devient le samedi. Raymond, son
mari, manque à. sa parole. Mais, comme il ne raconte à personne ce qu'il a
vu, Mélusine demeure avec lui. Un jour, cependant, pris d'une colère subite
et aussitôt regrettée, il la dénonce devant toute la compagnie et elle doit
s'envoler pour toujours.
Le portrait de Mélusine n'est pas le symbole d'une force anti-chrétienne.
Bien au contraire, tout le récit est une parabole de la fidélité.
Jusqu'au siècle dernier, l'histoire était surtout connue par des
remaniements du roman en prose composé par Jean d'Arras entre 1387 et 1393.
Le récit en vers de Coudrette a été traduit en allemand et en anglais au
xve siècle, mais il ne semble pas avoir été apprécié en France après le
Moyen Age. Tous nos manuscrits datent du xve siècle ou des premières
années du xvie. Ce n'est qu'en 1854 que l'œuvre de Coudrette a été
imprimée. A cette date Francisque Michel a fait paraître à, Niort, chez; Favre,
une édition de Mellusine. Cette prétendue édition n'est qu'une
transcription, parfois inexacte, du ms. fr. 12575 de la Bibliothèque nationale (sigle Q
dans notre classement), auquel manquent plusieurs centaines de vers. Nous
décrivons dans cet article les vingt manuscrits du roman de Coudrette,
dont l'édition critique est en cours de préparation.
De Coudrette lui-même, qui se nomme deux fois à la fin du texte
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(cf. les explicit dans les descriptions), nous ne connaissons guère que le nom.
Π a mis le roman en vers pour Guillaume Larchevêque, seigneur de Parthe-
nay, mort le 17 mai 1401. Notre versificateur ajoute que ce triste événement
est arrivé avant l'achèvement de la mise en vers, et il remercie Jean de
Mathefelon, fils de Guillaume, de lui avoir donné l'ordre de terminer son
ouvrage.
Goudrette déclare n'avoir eu aucun mérite à composer le roman, car
il avait été mis en français autrefois, et même dans une version rimée.
Il se réclame de deux livres en latin trouvés dans la Tour Maubergeon du
palais de Poitiers, traduits en français, et d'un troisième livre qui était entre
les mains du comte de Salisbury. Quant aux conjectures concernant
l'identification de ces textes et leur rapport possible avec l'œuvre de Jean d'Arras,
on consultera L. Hoffrichter, Die âltesten franzôsischen Bearbeitungen der
Melusinensage, Halle, 1928, pp. 9-13, 22-23, 29-30 ; et L. Stouff, Essai sur
Mélusine..., Paris, 1930, pp. 43-49.
Le texte du roman de Goudrette comprend sept mille vers, auxquels
s'ajoute une litanie. Nous donnons le classement des copies à la suite des
descriptions de manuscrits. Les particularités les plus curieuses de ceux-ci
sont : les reliures anciennes des manuscrits Carpentras 407 (ms. E) et
Valenciennes 461 (ms. V) ; la ressemblance des écritures des manuscrits
Bibl. nal, fr. 1631 et 19167 (mss. Ρ et S) ; et l'histoire du ms. BodUy 445
(ms. B), qui semble indiquer un transfert en Angleterre survenu très tôt.
Gomme il y a neuf manuscrits de l'œuvre de Goudrette à la Bibliothèque
nationale de Paris, nous avons été guidée, dans l'attribution des sigles, par
le désir de réserver à ces manuscrits une série continue de lettres ; ce sont
donc les manuscrits M à U. Pour les autres manuscrits, dans la mesure du
possible, le sigle correspond alphabétiquement au nom du lieu où ils se
trouvent à présent. Nous n'avons pu faire cet accord pour les manuscrits
D, E, F et H.
Pour les filigranes, nous donnons les dimensions lorsque le dessin de
Briquet ne semble pas assez proche du nôtre pour faire croire que le papier
en question soit sorti du même battoir. Gomme nous n'avons pas vu les
documents dont Briquet s'est servi, il est entendu que tous nos
rapprochements sont donnés sous réserve.
Les écritures des textes de Mélusine dans les vingt manuscrits ont
été comparées avec les planches des cinq tomes parus jusqu'à présent de
G. Samaran et R. Marichal, Catalogue des manuscrits en écriture latine
portant des indications de date, de lieu ou de copiste, Paris, t. I, 1959 ; t. II,
1962 ; t. III, 1974 ; t. V, 1965, et t. VI, 1968.

DESCRIPTION DES MANUSCRITS

A. Amiens, Bibliothèque municipale 411.


Seconde moitié du xve siècle, papier ; filigranes : lettre Ρ gothique
avec fleuron, dans les cahiers 1, 11 à 13 (Briquet 8609, mais dimensions
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 187

75 X 38 mm.) ; armoiries : trois fleurs de lis avec t suspendu, dans les


cahiers 1, 2, 6 à 10 (Briquet 1739, 1741, mais dimensions 83 X 38 mm.) ;
ancre surmontée d'une croix, dans les cahiers 3 à 5 (Briquet 392, mais
dimensions 76 X 38 mm.) ; lettre Y surmontée d'une croix, fol. 67
(Briquet 9177, 9183, mais dimensions 70 X 23 mm.).
I + 157 + I feuillets ; foliotation moderne ; feuillets de garde, en
papier, contemporains de la reliure ; les fol. 97 et 157 v° sont blancs ; 295 X
217 mm., justification : 179 X 142 mm., deux colonnes de trente lignes ;
réglure à la mine.
Treize cahiers : 1-712, 818 (à, l'origine 7/7, fol. coupé entre 96 et 97),
9-1312, tous à, réclame sauf les 4e, 8e et 13e ; deux séries de signatures :
une série concernant les textes et commençant à, a pour chaque texte, et
une série pour l'ensemble du volume commençant à, c au second cahier.
On peut donc supposer qu'un premier texte a disparu au début du volume.
Écriture bâtarde (cf. Samaran et Marichal, I, PL 131, Ars. 2886 :
1472 ; ΙΓΓ, PL 195, Bibl. nat., lat. 12333 : 1474 ; V, PL 157, Reims, Bibl
man. 833 : 1471) ; les deux textes sont peut-être de la même main ; initiales
(une ou deux lignes) rouges ou bleues ; deux (quatre et cinq lignes) rouge
et bleue (fol. 1 et 47 v°) ; demi-reliure de 1824 par Paul LePrince, peau et
papier brun, dos à sept nerfs, pièce de titre au dos : « Boece ».
Contenu : ff. 1 a-96 a : Traduction en vers de la Consolation de
Philosophie de Boèce. D'après M. Roques « cette traduction, [...] longtemps
attribuée à Charles d'Orléans et en réalité œuvre d'un bénédictin anonyme,
qui la composa après 1372, n'est, en beaucoup de points, qu'un démarquage,
avec élimination des provincialismes et rectification des rimes, de la
traduction de Renaud de Louhans s1. L. Delisle connaît aussi ce texte, mais pas
ce manuscrit. Il a relevé des attestations de l'activité du copiste Raoulet
d'Orléans entre 1367 et 1396 ; il identifie le roi Charles du prologue avec
Charles VI, et signale que le Jehan de Langres esmailleur (acrostiche du
congié de l'écrivain) pour lequel R. d'Orléans a copié cette traduction
pourrait être le même que Jean de Langres « qui fut garde de l'orfèvrerie
de Paris en 1382, 1386 et 1394 »2.
Titre : Cy commence un livre notable
A oïr bon et profitable
Pour avoir en soy pacïence
Et est excellente science
D'entendement subtil et fort
Nommé Boëce de Confort.
Prologue inc. : Celui qui bien bat les boissons
Est digne d'avoir les moissons...

1. A. Thomas et M. Roques, Traductions françaises de la « Consolatio Philosophiae »


de Boèce, in Histoire littéraire de la France, t. 37, 1938, pp. 419-488 ; pp. 470-488 : IX.
Traduction en vers, par Renaud de Louhans, Frère Prêcheur (M. Roques).
2. L. Delisle, Anciennes traductions françaises de la Consolation de Boece conservées
à la Bibliothèque nationale, in Inventaire général et méthodique des manuscrits Français de
la Bibliothèque nationale, t. 2, Paris, 1878, pp. 342-344, 345, n. 1.
188 ELEANOR ROACH
Texte inc. : Chansons jadis souloie faire
Quant Vestude estoit en ses flours...
expl. : ... C'est Dieu le vif qui régnera
Tous temps, car jamais fin n'ara
Explicit
épilogue : Cilz qui bien estudîeroit
De ce livre cy la substance...
... Celui qu'en vraye obéissance
Tout bon cuer sert, craint, aime et croit.
Amen Amen. Ainsi sans point mesprendre
Voult le translateur congié prendre.
note du copiste : C'est le congié de l'escrivain :
Icy endroit fine Bo'èce
En qui peuent trouver Vadresce
Homs et femmes par ces recors...
... Vueillent garder de maulx liens.
i?. dit amen d'Orlïens.
Qui cest escript adroit verra
Nom et seurnom y trouverra.

ff. 98 a-157 a : Coudrette, Mélusine.


Texte inc. : Le philosophe fu moult sage
Qui dist en la premiere page
De sa noble Metaphisicque...
expl. : Nommez le comme il vous plaira.
Tantost Couedrecte se taira,
Maiz qu'il ait faite s'orison
Qu'a present veult, c'est bien raison,
Mettre en fourme de letanie
Pour toute la noble lignie
De Partenay devant nommée;
Et quant elle sera finee
Et en façon que l'ay comprise,
Dont la taille souvent on prinse,
Toute l'ouvrage sera faite;
Adoncques se taira Couldrecte.
Litanie : Glorieuse Trinité,
Incomparable deïté...
... Après nostre jour derrenier
Pardurable felicité. Amen.
Explicit le roumant de Lusingnen.

Possesseurs : Notes de possesseurs de la fin du xvie et du début du


xvne siècle : fol. 96 v° « Appartenant a Jehan Trencart ; Rohault » ; fol. 97
« Jehan Trencart et Anne de Vismes » ; fol. 97 v° « Le presen livre apartient
poin a Jehan de la Croy de..., mais a; L. Rohault Glerque » ; fol. 141 v°
« Je suis a Jehan Trencart mon sieur, janvier 1594 » ; fol. 157 « Jehan
Trencart, Anne de Vismes, Charles Trencart, Anthoine Trencart, Jacqualine
Trencart, Lois Trencart, 1614, Isabelle Trencart, tous demeram Amyens ».
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 189

Bibliographie : J. Garnier, Catalogue descriptif et raisonné des


manuscrits de la Bibliothèque communale de la cille d'Amiens, Amiens, 1843,
p. 331.

B. Oxford, Bodleian Library Bodley 445.


Première moitié du xve siècle, parchemin.
III + II + 158 + III feuillets, foliotation moderne ; les trois
premiers feuillets de garde et les trois derniers sont en papier ; les deux
feuillets de garde qui précèdent immédiatement le manuscrit sont en
parchemin et portent la même réglure que le texte ; le fol. 158 v° est blanc ; 258 χ
173 mm., justification 172 χ 89 mm., vingt-sept longues lignes par page ;
réglure à l'encre.
Vingt cahiers : l6 (répartis 3-3; cf. les deux feuillets de garde ci-
dessus), 2-208, la plupart à, réclame.
Écriture bâtarde (cf. Samaran et Marichal, I, PI. 93, Maz. 3795 : 1437 ;
III, PI. 144, Bibl. nat., lat. 8158 (colophon) : 1426 ; VI, PL 82, Dijon, Bibl.
mun. 740 : 1415) ; les deux textes sont de la même main. Titre rubriqué
au fol. 142 ; initiales (deux lignes) rouges ou bleues, les grandes (quatre
lignes) restent en attente ; beaucoup de place a été laissé pour les peintures,
qui devaient être nombreuses, de la hauteur d'un demi-feuillet ou plus ;
reliure début du xvine siècle, veau brun, fers à froid, dos à, cinq nerfs,
pas de titre au dos (renseignements de M. Pollard).
Contenu : fî. 1-6 v° : Calendrier parisien.
Ce calendrier ne met pas un nom à chaque jour de l'année ; nous ne
donnons ici qu'un choix des fêtes. Nous omettons les fêtes traditionnelles
de l'Église, des apôtres, des évangélistes (toutes rubriquées), ainsi que des
saints dont la mention portée en rubrique n'a rien de surprenant. Nous ne
retenons donc pas Etienne au 26 décembre, tandis que son invention le
3 août, fête particulière à Paris, se trouve dans notre liste. Le même critère
nous fait passer sous silence Eloy au 1er décembre, George au 23 avril,
Martin au 11 novembre et Nicolas au 6 décembre. Les fêtes que nous citons
sont réparties en trois catégories : les fêtes exceptionnellement rubriquées,
les fêtes rubriquées particulières à Paris et les fêtes de Paris non-rubriquées.
a) Édouart 16 mars, Fabien 20 janvier, Laurent 10 août (pourvu d'une
octave, voir ci-dessous), Martin 4 juillet, Nicolas 9 mai et Ursin 30
décembre ;
b) Denis 9 octobre + 4 décembre (translation à N-D ; son nom n'y figure
pas, seulement : Us reliques de Paris), Eloy 24 juin (transi, d'un bras à
N-D), Etienne 3 août, George 27 août (transi, à, S. Germ, des Prés),
Guillaume 10 janvier (fête de l'univ. de Paris), Julien 27 janvier
(patron des Menestriers), Louis 25 août, Marcel 3 novembre, Maur
15 janvier (transi, aux Fossés), Thomas [Becket] 29 décembre, Vincent
22 janvier (reliques à S. Germ, des Prés) ;
c) Clout 6 septembre, Denis 22 avril (invention), Geneviève 26 novembre
(miracle des ardens), Germain [l'Auxerrois] 31 juillet, Honorine 27 fé-
190 ELEANOR ROACH

vrier, Ladre 17 décembre, Maclou 14 novembre (reliques à S. Victor),


Marcel 26 juillet (transi, à N-D), Séverin 19 décembre (reliques à
N-D), Sulpice 17 janvier, Siméon 5 janvier, Victor 21 juillet.
Outre les fêtes déjà, mentionnées pour Notre-Dame (Denis, Eloy,
Marcel et Séverin), il y a aussi la commémoration de la réception d'un
morceau de la Croix en 1109 : le 4 août de la croix a Paris.
Signalons aussi l'orthographe la typhaine pour l'Epiphanie, et S.
François au 3 octobre (au lieu du 4) : cette date pour le saint d'Assise a été
relevée par Leroquais dans des livres d'Heures à l'usage de Paris. Les
fêtes à octave sont : Etienne 2 janvier, Jean 3 janvier (prenant donc la
place de Geneviève), Innocents 4 janvier, Pierre 6 juillet et Laurent 17 août 1.

ff. 7-142 : Coudrette, Mélusine.


Texte inc. : [L]e philosophe fut moult saige
Qui dist en la premiere paige
De sa noble Methaphisique...
expl. : Nommez le comme il cous plera.
Tantost Coudrette se taira,
Mais qu'il ait fait sOroison
Quant a present veult, c'est bien raison,
Mectre en forme de letanie
Pour toute la noble lignie
De Parthenay devant nommée;
Et quant elle sera finee
Et en façon de lay comprise,
Donc la taille souvent on prise,
Toute l'ouvrage sera faicte;
Adoncques se taira Coudrette.
Litanie : Glorieuse Trinité
Incomprenable deîté...
... Après nostre jour derrenier
Pardurable felicité. Amen.
Explicit Vistoire de la faee de Lusignen.

ff. 142-158 : Chastelaine de Vergi.


G. Raynaud remarque que dans les manuscrits tardifs « la dame de
Vergi devient la dame du Vergier sous la plume de gens qui n'avaient
jamais entendu parler de la châtellenie de Vergi en Bourgogne ». Comme il
est aisé de le voir, le ms. de la Bodléienne fait partie de cette catégorie.
Raynaud trouve des rapports entre Bodley 445 et deux manuscrits du fonds
français de la Bibl. nat. : fr. 1555 et fr. 780 (son article, p. 149) 2. Plus
récemment, A. Lodge8 a découvert que ce manuscrit se rapproche beau-

1. Cf. A. M. Le Fèvre, Calendrier historique et chronologique de l'église de Paris, Paris,


1747 ; Abbé V. Leroquais, Les Livres d'Heures manuscrits de la Bibliothèque nationale,
Paris, 1927, 2 vol. ; P. Perdrizet, Le Calendrier parisien à la fin du Moyen Age, Paris, 1933.
2. G. Raynaud, La chastelaine de Vergi, in Romania, t. 21, 1892, pp. 145 et 149.
3. A. Lodge, A new manuscript of the Chastelaine de Vergi, in Romania, t. 89, 1968,
pp. 552-553.
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 191

coup du ms. Angers, Bibl. mun. 548, surtout dans les deux cents vers de
la fin, qu'il cite en entier pour le manuscrit d'Angers à, partir du vers 950
de l'édition Raynaud et Foulet1. A titre de comparaison, nous citons
aussi la fin à, partir du vers 950.

Titre rubriqué : Cy commence le Rommant de la Chastelaine duVergy


Texte inc. : Une maniere de gens sont
Qui d'estre loyaulx semblant font
Et de sy bien conseil celer
Qu'il se convient en eulx fier...
expl. : Tant com s'amour avoir voulsist.
Et par cest exemple dit en 2 doit en
Celer s"1 amour par moult grant sen,
Car le descouvrir rien ne vault,
Mais le couvrir en tous temps vault
Contre felons enquerours
Qui enquierent d' autrui amours.
Or prions pour les deux amans
Et pour les autres bonnes gens
Que Dieu nous vueille tous aidier
Et nous garde tous d'encombrier. Amen.
Cy fine un g piteux rommans
Qui est de deux loyaulx amans,
C'est de la dame du Vergier
Et d'un beau gentilz chevalier.

Origine et possesseurs : Le manuscrit, de provenance parisienne


(cf. calendrier), était en Angleterre au xvie siècle. Les essais de plume
datant de cette époque (feuillets de garde en parchemin) ont été écrits en
anglais, en latin et en français, mais certainement par un Anglais (« Parlé
vous François? »). En voici le détail : Premier feuillet de garde en parche-
Tu τ*
min, verso : « j ~ λ λ » ; premier et second feuillets de garde en parchemin,
rectos : essais de plume en français (« Parlé vous François? »), en anglais
et en latin, quelques notes de musique ; second feuillet de garde en
parchemin, verso : « Mayster Redmayn of my lorde of norwiche house », « Radulf
Blomevylle esquier escripte par le mayn de son frer » ; fol. 1, en haut, de
la main de sir Th. Bodley : « Donum Franc. Gleéri Militis ; F. 3. 19 », en bas :
« By me Barthellmew Eden » ; fol. 34 : « Richard Redmayn owigth this
boke of Frenche ».
Ce manuscrit fut un don de sir Francis Cleer, Glere ou Clare, à sir Thomas
Bodley au début du xvne siècle. La famille de sir Francis avait eu des
relations avec la France : son arrière-grand-père était présent en 1520 à une
entrevue des rois de France et d'Angleterre ; son grand-père était trésorier
du roi en 1549 lorsqu'il était en France ; et le frère aîné de sir Francis était

1. G. Raynaud et L. Foulet, La Chastelaine de Vergi, Paris, 1921, pp. v, 552-


553.
2. dit en barré sur le manuscrit.
192 ELEANOR ROACH
tenu en si haute estime par la cour de France qu'il fut nommé membre de
l'ordre de saint Michel.
Les noms de Redman et Eden sont connus des registres du xvie siècle
de l'université de Cambridge, et semblent provenir surtout du Norfolk
et du Suffolk. Le père et le frère aîné de sir Francis Glere ont détenu,
chacun à son tour, la charge de « high sheriff » de Norfolk. Mais il n'est pas
possible de préciser davantage les liens entre eux et les Redman, Blome-
vylle et Eden qui ont apposé leurs noms sur le manuscrit, pas plus que de
savoir comment les Glere l'ont acquis.
Bibliographie : F. Blomefield, Essay [■■■'¡County of Norfolk, t. 6,
London, 1807, pp. 393-395. F. Madan et J. J. E. Craster, A Summary
Catalogue of Western Manuscripts in the Bodleian Library at Oxford, Vol. 2,
part 1, Oxford, 1922, p. 342, n<> 2386. 705. John et J. A. Venn, Alumni
Cantabrigienses, part 1, Cambridge, 1922-1924 : vol. 1, p. 168; vol. 2,
p. 84 ; vol. 3, p. 434.

C. Cambridge, University Library LI. 2. 5.


Deuxième moitié du xve siècle, papier ; filigranes : lettre Y surmontée
d'une croix, dans les cahiers 1 à 3, et 6 (Briquet 9182, mais dimensions
67 X 20 mm.) ; armoiries : bande, dans le cahier 3 (proche de Briquet 1046) ;
lettre Ρ gothique chargé d'un trait en travers du grand jambage, cahiers 4
à 8, 11 et 13 (Briquet 8568, mais dimensions 66 X 15 mm.) ; lettre Ρ
gothique, cahiers 9 à, 11, 13 et 14 (Briquet 8527, mais dimensions 55 X 20 mm.) ;
lettre Ρ gothique avec fleuron, cahiers 12 et 13 (proche de Briquet 8593) ;
lettre Ρ gothique chargé d'un trait en travers du grand jambage, cahier 15
(proche de Briquet 8571).
II -f- 170 feuillets j foliotation moderne ; feuillets de garde, en papier,
contemporains de la reliure ; les cinq derniers feuillets du manuscrit sont
blancs ; 288 χ 214 mm., justification : 195 χ 95 mm. ; vingt-trois à vingt-
cinq longues lignes par page ; pas de réglure.
Quinze cahiers : 1-512, 614, 710, 8-1312, 146, 159 (il n'est pas possible de
déterminer la disposition de ce cahier dont les feuillets sont foliotés 163,
164, 165, 166, 167 / couture / 168, 169, 172 et 174. Un bout de feuillet
coupé paraît entre 162 et 163, mais le texte est continu. Il s'arrête au
fol. 165 v°) ; réclames sauf aux cahiers 14 et 15 ; signatures anciennes aux
cahiers 6, 8, 10, 11 et 12 : b, d, f, g, h. Ceci ne correspond pas au texte ;
les folios 78 et 79, qui devraient normalement se trouver au milieu du
cahier 7, ont été placés au centre du cahier 6.
Écriture cursive (pour le texte de Mélusine, cf. Samaran et Marichal,
II, PI. 164, Bibl. nat., lat. 4941 : 1484 ; V, PL 111, Troyes, Bibl. mun. 1616 :
[1450-1458], et PI. 159, Troyes, Bibl. mun. 1496 : 1472) ; les trois textes
sont d'écritures similaires ; initiales (deux lignes) rouges ou bleues ; au
fol. 1, une grande (onze lignes) : Mélusine dans son bain, dans la lettre L ;
demi-reliure amateur du xvne siècle, dos et coins en peau brune, plats
en papier « plumage d'oiseau », dos à cinq nerfs, pièce de titre au dos :
« Liber Poematum MS. »
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 193

Contenu : fï. 1-148 : Coudrette, Mélusine.


Texte inc. : Le phylosophe fut moult saige
Qui dit en la premiere page
De sa noble Methafisique...
expl. : Nommé le comme vous plaira.
Τ an tost Coudrette se taira
Mais quant fait son orison
Quille fist pour ladicte maison
Myse en forme de letanye
Pour toute la noble lignie
De Partenay devant nommée,
Et quant elle sera finee
Et en façon de lay comprinse,
Dont la taille souvent on brise,
Toute Vouvraige sera faicte;
Adoncques se taira Coudrette.
pas de litanie

fï 149-161 v° : Chronique en prose de l'année 1403 à l'année 1454.


Texte inc. : L'an mil CCCC trois fut fait connestable de France le seigneur d'El-
bert par le roy, presens les ductz de Berry, de Bourgogne et de Bourbon
et pluseurs autres nobles seigneurs. Et puis s'en ala en Guienne et
conquesta pluseurs places sur les Anglois tant en Perigort comme en
Gascoigne.
expl. : L'an mil CCCC cinquante quatre morut le marischal de Jalongnes a
Tours ou mois de mars, et fut fait Poton de Saínete Traille marischal
de France. Cellui an morut mon seigneur de Villequier, mignot du roy.
Et sic est finis, sit laus gloria trinis.

Le ms. fr. 24383 de la Bibl. nat. (ms. U de Mélusine) contient la même


chronique ; le texte de C est inférieur à, celui de ¿7; cf. également le ms.
nouç. acq. fr. 4518, iî. 23-27 v° ; rédaction similaire dans les mss. fr. 1968,
fî. 143-150 v° et fr. 23998, fï. 110-118 v° ; rédaction abrégée daiib le ms.
fr. 5930, fï. 27-28 v°. Cette chronique anonyme semble inédite.
fï. 162-165 v° : Philippe de Clèves et Maximillien, copie de lettres
du mois de juin 1488.
Le texte de ces lettres apparaît dans les Chroniques de Jean Molinet 1.
Notre texte est plus complet que celui de l'édition et comprend même un
passage qui semble avoir été écrit sous la dictée, sinon par la plume, du
secrétaire de Philippe de Clèves. Nous espérons publier ces lettres ailleurs.

Titre : Copie des lettres escriptes au Roy des Romains par mon seigneur
Philippe de Clèves par lesquelles il se declare a V entretenement de la
'

paix faicte a Bruges ou mois de mai l'an mil iiii0 iiii™ viii.
Texte inc. : Mon tres redoublé seigneur, le plus déplaisant que jamais fus puis

1. Cf. G. Doutrepont et O. Jodogne, [éd.] Chroniques de Jean Molinet, t. 2, Bruxelles,


1935, pp. 46-56.
13
194 ELEANOR ROACH
que ay eu cognoissance, tant humblement que plus puis me recommande
a vostre bonne grace...
eXpl. : Mon tres redoublé seigneur, je prie a Dieu qu'il cous ait en sa sainte
garde. Escript a Gand le xxviiie jour de juing anno iiii™ viii.

Possesseurs : Ce manuscrit appartenait à, John Moore (1646-1714),


évêque de Norwich et Ely. Sa bibliothèque fut achetée en 1714 par le roi
George Ier, qui en fit don àl'université de Cambridge en 1715. Sur le premier
contreplat, ex libris : « Munificentia regia 1715 Georgius » ; au fol. 172 v° :
« dulcia non meruit qui non gustavit amara .1557. »
Bibliographie : Librorum Manuscriptorum... D. D. Joannis Mori...
Catalogue, Cambridge, s. d., p. 36, Item 9660. 474.

D. Carpentras, Bibliothèque municipale 406.


Début du xve siècle, parchemin.
TU + 98 + HI feuillets ; foliotation moderne, commençant au
premier folio avec le chiffre 2 ; les feuillets de garde, en papier, sont
contemporains de la reliure ; le fol. 99 est blanc ; 256 χ 217 mm., justification :
212 X 165 mm., deux colonnes de trente-trois à trente-quatre lignes ;
réglure à, la pointe sèche.
Quatorze cahiers : l3 (répartis 2-1, les deux premiers feuillets sont
sur onglets), 2-38, 4e (la feuille intérieure manque), 5-68, 73 (à l'origine
3 /3 ; restent les premier, troisième et quatrième feuillets), 8-138, 146
(répartis 4-2) ; pas de réclames.
Écriture bâtarde (cf. Samaran et Marichal, I, PI. 71, Maz. 646 : 1399 ;
II, PI. 73, Bibl. not., lat. 6069 H : 1397, et PI. 83, Bibl. not., lat. 5860 :
1414) ; titres rubriques dans le premier texte ; initiales (deux lignes) rouges ;
deux grandes (quatre et trois lignes) rouges avec de l'encre noire aux fol. 2
et 46 ; reliure du xviie-xvnie siècle, veau brun, filets dorés, dos à cinq nerfs,
pièce de titre au dos : « [Livre des m]eu[rs et le] No[bl]es [Jeu des] Eche[z]
Couldr[ette] R[om]an de Par[tenay]. »
Contenu : ff. 2-45 : Jean de Vignay, Jeu des Échecs moralisé.
Le texte est incomplet : manquent presque tout le chapitre neuf, le
début du chapitre dix, les chapitres vingt-deux et vingt-trois. Le
possesseur du xvie siècle, soucieux de marquer le livre comme son bien, a raturé
le nom de l'ordre de Jean de Vignay pour y insérer le nom de son ordre1.

Titre rubriqué : Le Here des meurs et offices des nobles sur le jeu des eschez,
translaté de latin en françoys.
Prologue : A tresnoble et excellant prince Jehan de France, duc de Normandie,
ainsné filz de Philippe par la grace de Dieu roy de France, frère Jehan
du Vignay vostre petit religieux entre les autres en vostre seigneurie...
par frère Jehan de Vignay hospitalier de V ordre de St Jacques [effacé
et corrige] militaire du S. Esprit.

1. C. Fuller, A Critical edition of Le Jeu des Esches moralisé translated by Jehan de


Vignay, Diss. Catholic University of America, 1974 (pour notre manuscrit, p. 115).
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 195
Texte inc. : En tous les mauvais signes qui peuent estre en un homme, c'est le
principal quant un homme ne double a courroucier Jhesu Crist nostre Père
qui nous forma et fist...
expl. : Et pour ce, chiers seigneurs, deprions le roy de qui toute grace et toute
vertus vient que il nous doint si vraiement démener nostre vie en ce
siècle que ce soit a la gloire du roy de paradis et de toute la glorieuse
compaignie des cieulx et a Vonneur des corps et au prouffit des ames.
Amen. Cy fine la moralité du Jeu des Eschez.

ïï. 46 a-98 à : Coudrette, Mélusine.


Texte inc. : Le philozophe fut moult sage
Qui dist en la premiere page
De sa noble Methaphisique...
expl. : Nommez le comme il vous plaira.
Tantost com Couldrette se taira
Maiz qu'il ait faite s'oroyson
Qu'a present veult, c'est bien raison,
Mettre en fourme de letanie
Pour toute la noble lignie
De Partenay devant nommée;
Et quant elle sera finee
Et en façon de lay comprise,
Dont la taille souvent on prise,
Toute Vovrage sera faute;
Adoncques se taira Couldrette.
Litanie incomplète : Glorieuse Trinité,
Incomprenable deîté...
... Et le chemin de sauvette
Noz péchiez plaindre et lermoyer.
Amen.
Finis Amen Deo gratias servabit [d'une autre main]

Possesseurs : Notes de possesseurs du xvie siècle : fol. 98 v° « de


Gallaup » ; fol. 99 v° « Se presant livre apartient a Regnault de [nom récrit,
illisible] chevalier de l'ordre hospitalier du saint esprit seigneur d'espunie-
ville 1. Geluy qui le trouvera yceluy rande et vouUontiers il poyra le vin a
seulx quil le trouveront, thesmoing mon sing manuel sy mys le 23ieme jour
d'april 1516 mil cinq sans et seze » ; fol. 45 v°, trois gravures sur bois et
deux blasons peints à, la main ont été découpés et collés sur le parchemin ;
grâce à l'obligeance de Monsieur le Conservateur, nous avons eu
l'autorisation de décoller les deux gravures du haut, ce qui nous permit de mettre
à jour les textes suivants, en écriture cursive du xvie siècle : fol. 45 v°,
à, gauche : « Davit hosu mea domine dominus meus in venit vocabo diebus
meis in venit sofrom meom... diebus sircondecZerunt me in vocab..· circo-
detíerunt mee... in venerunt me dec... in juris >? ; fol. 45 v°, à droite : « S'est
une dure départie de sen... J'ay. .. mon··· en be es g'yray finer ma vye.
C'est une dure departye de... ou j'ay mys mon cueur ; J. Corbeau »«Au-

1. Peut-être une bévue pour Espainville, hameau de la commune de Sonchamp, Seine-


et-Oise, arr. de Rambouillet. Nous sommes redevables de cette hypothèse à Mme Mulon.
196 ELEANOR ROACH

jourdhuy en jugement Guillaume /Gaultier m'a baillé 1... veu..., tesmoing


son sing manuel ycy mit ».
Le texte latin n'est pas une citation de la Bible, nous n'avons pas
identifié les deux noms que nous livrent les textes français : J. Corbeau et
Guillaume Gaultier.
Deux des gravures au fol. 45 v° représentent Mélusine sous sa forme
semi-animale : prenant son bain et s'envolant du château1. La troisième
représente une dame (par derrière, des poésies sur « dame Graces ») ; les
deux blasons, du xvne ou xvme siècle, portent l'un deux guisarmes,
l'autre une perdrix ; au troisième feuillet de garde : une gravure
représentant un roi dont le vêtement est orné d'un semis de fleurs de lis, et qui
reçoit un livre ; au verso de ce feuillet : un blason peint à la main, du xvne
ou du xvnie siècle, portant deux épées et une flèche. On lit sur le
premier feuillet de garde, au verso, la cote « No. 271 ».
Au xvie siècle ce manuscrit a donc appartenu à un Regnault,
chevalier de l'Ordre hospitalier du Saint-Esprit. Au xvine siècle il paraît
dans le catalogue manuscrit de la bibliothèque de Joseph d'Inguimbert,
fondateur de la bibliothèque de la ville de Carpentras. Il n'y a pas de
certitude sur son histoire au xvne siècle ; la mention « de gallaup » (98 v°)
laisse supposer qu'il aurait appartenu à la famille Galaup de Chasteuil,
dont l'un des membres, François (1588-1644), était un ami de Peiresc.
Mais l'inventaire des livres de Peiresc (Carpentras, ms. 640) ne connaît
pas notre manuscrit ; d'autre part, cet inventaire est incomplet et ne
distingue pas toujours les manuscrits des imprimés.
Bibliographie : Catalogus manuscriptorum Bibliothecae Publicae ab
[...]D. V. M alachia D'Inguimbert [...] C arpentoracti erectae, manuscrit du
xvme siècle (Carpentras, ms. 1257 I), f. 11 v° « Philos, rat. natural, G 271 ».

E. Carpentras, Bibliothèque municipale 407.


Milieu du xve siècle, papier ; filigrane : clef, pour tout le volume
(Briquet 3797, mais dimensions 49 χ 15 mm., pontuseaux écartés de
45 mm.).
120 feuillets ; foliotation ancienne en chiffres romains, et moderne
en chiffres arabes ; pas de feuillets de garde ; le fol. 120 v° est blanc ; 288 X
205 mm. ; justification : 203 χ 110 à, 120 mm. ; trente à, trente-cinq longues
lignes par page ; pas de réglure.
Huit cahiers : 1-716 et 88, sans réclames.
Écriture cursive (cf. Samaran et Marichal, ΙΓΓ, PI. 152, Bibl. nat.,
lat. 16393 : 1447) ; les deux textes semblent être de la même main ; initiales
(deux lignes) rouges ; deux grandes (quatre et trois lignes) : au fol. 1, rouge
avec du Jaune et du vert, au fol. 113, verte ; reliure ancienne, fin du xve siècle,
veau brun sur ais, ouvragé en damier à, losanges, dos à, cinq nerfs ; sur le

1. Ces deux gravures proviendraient d'une édition de la Bibliothèque Bleue de Troyes,


de 1677 : cf. A. Morin, Catalogue descriptif de la Bibliothèque Bleue de Troyes, Genève, 1974,
p. 309 (Bibl. nat., Réserve Y2 739).
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE >5 197

deuxième plat, étiquette en parchemin retenue par deux clous en laiton :


« remondin et meluzine » ; pièce de titre au dos, du xvine siècle : « Partenai
Ro[mm]an par Couldre[it] Facet [E]nseignemen[ts]. »

Contenu : ff. 1-113 : Coudrette, Mélusine.


Texte inc. : Le philozophe fut moult saige
Qui dist en la premiere paige
De sa noble Metaphisique . . .
expl. : Nommez le comme il vous plaira.
Tantost Couldrecte se taira
Mais qu'il ait faicte son oroison
Qu'a present veult, c'est bien raison,
Mectre en forme de letanie
Pour toute la noble lignie
De Partenay devant nommée;
Et quant elle sera finee
Et en façon de lay comprise,
Dont la taille couvent en prise,
Toute Vouvraige sera faicte;
Adont se taira Couldrecte.
Litanie : Glorieuse Trinité
Qui comprenable deîté...
... Après nostre jour dernier
Pardurable felicité. Amen.
Explicit Mellusigne.

fî. 113-120 : Facet en français (c'est une des cinq traductions des deux
Facetus latins éditées par Morawski)1.

Titre : Cy ensuivent les enseignemens Facet.


Texte inc. : Chaton qui fut moult saiges homs
Duquel plusieurs enseignemens avons
Fist ung livre qui nous aprent
A vivre bien et saigement.
expl. : En quelque lieu que tu voises
Garde bien que advîsié soyes
Quant tu dois parler ou taisir
Se tu veulx saige devenir.
Explicit le livre de Facet.

Possesseurs : Ce manuscrit a appartenu à Joseph d'Inguimbert


(1683-1757), fondateur de la bibliothèque de la ville de Garpentras. Ή ne
figure pas dans le catalogue des livres rapportés de Rome en 1737 par
d'Inguimbert, mais paraît dans le catalogue de ses manuscrits dressé de
son vivant. Sur le premier contreplat, d'une main du xvnie siècle : « Partenai
Roman fait par Couldreite plus les enseignements de Facet » et « 583 ».
Bibliographie : Catalogue manuscriptorum Bibliothecae Publícete

1. J. Morawski, Le Facet en francoys, Posnan, 1923, pp. xix-xxi, 20-39 [Société


scientifique de Posnan, Trac, de la Comm. Philologique, t. 2, fase. 1].
198 ELEANOR ROACH

ab [...] D. V. Malachia D^Inguimbert [...] Carpentoracti erectae, manuscrit


du xviiie siècle (Carpentras, ms. 1257 I), fol. 23 v° « Mithologi IV 583 ».

F. Baltimore, Walters Art Gallery W 317.


Seconde moitié du xve siècle, papier ; les filigranes ne peuvent pas
être mesurés car ils sont toujours pris dans la couture : lettres assemblées
M -f P, dans les cahiers 1 à, 6 (proche de Briquet 9595, pontuseaux écartés
de 26 mm.) ; lettre Ρ gothique, dans les cahiers 6 à 9 (proche de Briquet
8531) ; armoiries : une fleur de lis dans un écu surmonté de la croix de la
passion, dans le cahier 9, une seule fois (proche de Briquet 1550, 1557) ;
lettre Ρ gothique avec fleuron dans le cahier 10 (ne semble pas être dans
Briquet ; pontuseaux écartés de 20 mm.).
III -j- 118 + III feuillets ; foliotation moderne ; feuillets de garde
contemporains de la reliure ; les fî. 105 v° et 106 sont blancs ; 198 X 132 mm. ;
justification : 156 χ 82 mm. ; trente longues lignes par page ; réglure à,
l'encre.
Dix cahiers : 1-912 et 1010 (répartis 6-4 ; à, l'origine 6 /6, les deux derniers
feuillets ont été coupés), sans réclames.
Écriture cursive (cf. Samaran et Marichal, II, PL 139, Bibl. nat.,
lai. 7282 : 1468 ; III, PÍ. 170, Bibl. nat, lat. 10021 : 1461 ; VI, PL 126, Lyon,
Bibl. mun. 479 : 1466) ; initiales (deux lignes) rouges ou bleues ; la première
est rouge et bleue ; reliure du xvine siècle (ca. 1740, note de Miss Miner),
veau brun, filets dorés, pièce de titre au dos : « Roman de Meslusin ».

Contenu : ff. 1-118 : Coudrette, Mélusine.


Texte inc. : Le philosophe fut moult saige
Qui dist en la premiere paige
De sa noble Methafisique...
expl. : Nommer comme il cous plaira.
Si tost que Couldrecte se taira
Mais qu'il ait faicte s'oroison
Qu'a present veult, c'est bien raison,
Mectre en forme de lectanie
Pour toute la noble lignie
De Partenay devant nommé;
Et quant elle sera finee
Et en forme de lay comprinse,
Dont la taille souvent en prise,
Toute Vouvraige sera faicte ;
Adoncques se taira contre dicte.
Litanie : Glorieuse Trinité,
Incomparable deïté...
... Après nostre jour derrenier
Pardurable felicité. Amen
Explicit Melusigne

au fol. 118 v° : liste d'ouvrages d'une bibliothèque, d'une main du xve siècle.
Ce sont, pour la plupart, des auteurs latins classiques.
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 199

Possesseurs : On ne peut tracer l'histoire de ce manuscrit qu'à, partir


du xvine siècle. D'après les notes de Dorothy Miner dans le dossier de
la Walters Art Gallery, on pourrait suggérer Popon de Maucune pour l'ex
libris : on ne lit plus que POP... ; en 1798, le manuscrit appartenait à.
Augustin Imbert de Lille ; il fut vendu en 1849 par J. Barrois à, Lord
Ashburnham (n° 22 de la vente des mss Barrois de la collection de Lord
Ashburnham en 1901). Le manuscrit porte les cotes et les indications
suivantes : Premier contreplat : « 590 », « H. V. 7 », « 22 » ; derrière le papier
on perçoit l'ex libris « POP· · · » ; deuxième feuillet de garde : «22 in
Ashburnham sale June 1901 », « Barrois Mss, bought £ 16 H[enry] W[alters] » ;
troisième feuillet de garde, verso : « Ex libris Augustini Imberti insulani A0 1798».
G. Grenoble, Bibliothèque municipale 368.
Seconde moitié du xve siècle, papier ; le filigrane, toujours pris dans
la couture, ne peut pas être mesuré avec exactitude : tête de bœuf, pour
tout le volume (proche de Briquet 14316 ou 14317).
II -f- 141 -\- II feuillets ; le premier et le dernier feuillet de garde
sont contemporains de la reliure, les deux autres sont plus anciens (filigrane
POPE RLE) ; trois numérotations : une ancienne en chiffres romains
commençant par iii au premier folio et s'arrêtant au quatre-vingt dixième
folio ; deux numérotations modernes en chiffres arabes, l'une pour tout le
volume, mais qui compte deux fois les folios 32 et 33, l'autre commençant
par 90 au quatre-vingt dixième folio et allant jusqu'à, la fin. Seule celle-ci
est exacte, mais elle n'est que partielle. Les fol. 140 et 141 sont blancs ;
296 χ 197 mm. ; justification : 190 à 193 X 100 mm. ; vingt-trois à vingt-
cinq longues lignes par page ; pas de réglure.
Dix cahiers ; 1-216, 314, 42 (le 4e cahier est la feuille extérieure du
cahier 3), 5-916, et 1013 (répartis 8-5 ; à, l'origine, seize feuillets, il manque
les 13e, 15e et 16e feuillets du cahier original) ; la mutilation du dernier
cahier est sans conséquences pour le texte, lequel s'arrête au onzième
feuillet ; signatures en chiffres romains, en haut du premier feuillet des
cahiers, commençant au second cahier.
Écriture cursive (cf. Samaran et Marichal, II, PI. 122, Bibl. nat.,
lat. 6073 : 1458 ; III, PI. 179, Bibl. nat., lat. 15927 : 1467 ; V, PI. 138, Troyes,
Bibl. mun. 1041 : 1462) ; initiales (deux lignes) laissées en attente, suivies
d'une demi-ligne en grandes lettres gothiques noires ; reliure de 1966 en
cuir marron à, quatre nerfs, pas de titres au dos.
Contenu : ff. 1-139 : Coudrette, Mélusine.
Il manque environ deux cent trente vers à, la fin.
Texte incomplet inc. : [L]e philosophe fut moult sage
Qui dist en la premiere page
De sa noble Methaphesique...
expl. Ou mois de may si comme f avise
Morut le chevalier d'onneur.
Le serf en suyvyt son seigneur;
Telle grace puist il acquérir
Vers luy qu'il le puisse servir
200 ELEANOR ROACH

Lassus ou ciel en paradiz.


Atant de lui fine mes diz.
Deo gratias alleluia
En attendant
Poissy.
fol. 139 v° : Recette pour faire des pilules, d'une autre main du
xve siècle.
Possesseurs : Le manuscrit faisait partie de l'ancien fonds de la
bibliothèque de Grenoble. Dans l'introduction du catalogue sont énu-
mérés les manuscrits n'ayant pas appartenu à, Jean de Gaulet (1693-1771)
et pourtant désignés « Ancien fonds » ; comme le nôtre n'est pas dans cette
liste, on peut penser qu'il appartenait à, Gaulet, puisque le catalogue le
désigne « Ancien fonds ». Nous ne l'avons pas trouvé dans les catalogues de
vente cités par Maignien, mais Gaulet acheta parfois directement sans
l'intermédiaire d'un libraire.
Au fol. 93 recto, une prière pour la France, de sept octosyllabes, porte
l'indication Poissy. La même indication paraît à, la fin du texte ; elle semble
être du xve siècle.
Bibliographie : P. Fournier, E. Maignien et A. Prudhomme,
Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France.
Départements, t. 7, Grenoble, Paris, 1889, p. i, note 1 et pp. 258-259. E. Maignien,
La Bibliothèque de Grenoble et ses premiers bibliothécaires, Grenoble, s. d.,
pp. iv-v.

H. Paris, Bibliothèque de l'Arsenal 3475.


Fin du xve, début du xvie siècle, papier ; les filigranes ne peuvent
pas être mesurés car ils sont toujours pris dans la couture : lettre Ρ gothique
avec fleuron, dans les cahiers 1, 3, 4 (Briquet 8606) ; tête de bœuf avec une
tige à étoile, dans le cahier 2 (Briquet 14238) ; pot à, une anse, dans les
cahiers 5 et 6 (proche de Briquet 12476, 12481) ; licorne, dans les cahiers 7
à 9 (proche de Briquet 10021, 10022).
II + 106 -f II feuillets ; foliotation moderne jusqu'à 104 (fin du
texte) ; feuillets de garde contemporains de la reliure ; les fol. 104 v°, 105
et 106 sont blancs ; 183 X 135 mm. ; justification : 141 χ 91 mm. ; trente-
trois longues lignes par page ; réglure à l'encre.
Neuf cahiers : I10, 2-912.
Écriture hybride, gothique et cursive (cf. Samaran et Marichal, III,
PI. 215, Bïbl. nat., loi. 13310 : 1508) ; les initiales ont été laissées en
attente : deux lignes, et, au fol. Í , quatre lignes ; reliure du xvine siècle,
veau brun, filets dorés, armes de Madame de Pompadour sur les plats,
dos à cinq nerfs, pièce de titre au dos : « Melusine en vers ».

Contenu : fï. 1-104 : Coudrette, Melusine.


Il manque environ deux cent trente vers à, la fin.
Titre : Ensuit le Romant de Melusine la faee
Texte incomplet inc. : [L]e philozophe fut moult sage
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 201

Qui dit en la premiere page


De sa noble Methaphisique . . .
expl. : Ou moy de may si com j'avise
Morut le chevalier d'onneur.
Le serf ensuive son seigneur ;
Tel grace puist il deservir
Vers luy qui le puisse servir
Lassus ou ciel en paradis.
Atant de luy fine mes dis.
Qui fecit finem
Sit benedictus, amen.

Possesseurs : Ce manuscrit paraît au numéro 626 du catalogue de


vente de la bibliothèque de Madame de Pompadour. Dans la bibliothèque
du marquis de Paulmy, il eut deux cotes : « 1572 1-2. 303 » et « B. L. [Belles
Lettres] 1729 » (premier feuillet de garde) ; « 3475 » et « Paulmy» (fol. 1),
« 1442 » (dernier feuillet de garde).
Bibliographie : Catalogue des livres de la bibliothèque de feue madame
la marquise de Pompadour, 1765, p. 60.

L. Londres, British Library, Additional MS 6796.


Seconde moitié du xve siècle, papier ; filigrane : bœuf, pour tout le
volume original (Briquet 2783 et 2785, mais dimensions 48 X 51 mm.).
III -f- I + 121 -j- IV feuillets ; foliotation moderne ; les trois premiers
et les quatre derniers feuillets de garde sont contemporains de la nouvelle
reliure ; l'autre était contemporain de l'ancienne (filigrane J. Whatman,
1828) ; 278 χ 211 mm. ; justification : 196 à. 202 χ 85 mm. ; vingt-neuf à
trente et une longues lignes par page ; réglure à la pointe sèche.
Neuf cahiers : Ie, 214, 3-816 et 95. Lorsqu'on a refait la reliure en 1973
on a monté sur onglets les folios 7 à, 20 et 117 à, 121 ; il n'est donc plus
possible de voir l'ancienne composition de ces cahiers (constatée en 1969). Le
manuscrit a été mutilé très tôt, les sept premiers feuillets sont du xvie siècle,
recopiés sur un autre manuscrit. Le second cahier actuel était à, l'origine
un cahier de seize feuillets, et le premier du texte. Ayant perdu ses quatre
premiers folios, il commence au fol. 8 de la numérotation moderne ; on
lui a ajouté un demi-feuillet (d'un autre papier que les sept premiers
feuillets du volume), numéroté 9, dont l'écriture est du xvie siècle et dont le
texte supplée aux parties déchirées des folios 8 et 10 ; le 9e cahier était
réparti 3-5 : cahier de 6 feuillets dont on a coupé le dernier ; signatures
aux cahiers 3 à, 9.
Écriture cursive (cf. Samaran et Marichal, VI, PI. 125, Toulouse,
Bibl. mun. 894 : 1466) ; initiales (deux lignes) rouges ; ancienne reliure de
la première moitié du xixe siècle : demi-reliure amateur, peau brune et
papier brun et bleu, pièce de titre au dos : « Roman de Melusine. Mus.
Brit. Jure Emptionis. 6796 PLUT. CXVIIII.G. » ; nouvelle reliure (1973) :
demi-reliure amateur, maroquin bleu et toile bleue, pièce de titre au dos :
« Roman de Melusine. Brit. Mus. Additional MS 6796 ».
202 ELEANOR ROACH

Contenu : ff. 8-121 v° : Coudrette, Mélusine.


Nous ne tenons pas compte ici du début récrit au xvie siècle ; celui-ci
présente la particularité d'être copié sur le ms. Paris, Bibl. not., fr. 1483.
La ressemblance va jusqu'aux détails orthographiques.
Texte inc. : ...Le bel, le doux et le courtois
(au v. 243 de l'éd.) Le mieux enseigné de tauz trois.
Quant celle feste fut finee
Auxi que a la tierce journée
Et qu'il eurent beu et mengié,
Le conte de Forests print congié.
expl. : Nommez le corne il cous plaira.
Tantoust condroitte se taira
Mes qu'il ait faicte son oroison
Qu'il fist pour la dicte meson,
Mise en fourme de letanie,
Pour toute la noble lignée
De Partenay devant nommée;
Et quant elle sera finee
Et en façon de lay comprise,
Dont la taille souvent on prise,
Toute Vouvraige sera faicte;
Adoncques se taira Coudrecte.
Litanie : Glorieuse Trinité,
Incomprenable deité...
... Après noustre jour der renier
Pardurable felicité. Amen

Possesseurs : Au xvie siècle le manuscrit appartenait à, Leonor de


Rohan, princesse de Guéméné (qui épousa Louis de Rohan avant le 22 juillet
1561). En décembre 1825 il fut acheté par le British Museum au libraire
Baynes. Entre ces deux dates nous n'avons rien découvert sur son
histoire. Π porte les mentions suivantes : ancien premier contreplat :
« 117.C », « 123.G » [barré]; nouveau premier contreplat : « 117.C »;
quatrième feuillet de garde recto : « Purchased in Dec1" 1825 » ; fol. 8 : « Ce
libvre est a Leonor de Rohan, princesse de Guemene », suivi de son
monogramme.

M. Paris, Bibliothèque nationale, fr. 1458.


Seconde moitié du xve siècle, parchemin.
VI -f- 57 -+- VI feuillets ; foliotation moderne ; les feuillets de garde,
en papier, sont contemporains de la reliure (filigrane : armoiries de Louis
XIII) ; 293 χ 210 mm. ; justification : 205 χ 158 mm. environ ; deux
colonnes de trente-deux à, trente-cinq lignes ; réglure à, l'encre.
Cinq cahiers : 1-412 et 59 (répartis 6-3 ; à, l'origine, cahier de douze
feuillets 6 [6, les trois derniers feuillets ont été coupés), réclames pour les
trois premiers cahiers.
Écriture bâtarde (cf. Samaran et Marichal, I, PI. 95, Ars. 5099 : après
1437 ; PL 138, Ars. 3121 : 1481 ; VI, PI. 133, Lyon, Bibl mun. 744 : 1470) ;
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 203

initiales et peintures laissées en attente, des notes dans les marges, en petite
cursive du xv^ siècle, donnent des indications pour les peintures, qui
devaient être nombreuses ; les emplacements laissés en blanc sont de la
largeur d'une demi-colonne, de la hauteur d'un demi-feuillet ou plus ; reliure
du xvne siècle, veau brun, filets dorés, dos à six nerfs, portant deux G
entrelacés : chiffre de Gaston d'Orléans, pièce de titre au dos : « Noble
Methafisique ».

Contenu : ff. 1 a-57 d : Coudrette, Mélusine.


Texte incomplet inc. : [L]e philozophe fut moult sage
Qui dïst en sa premiere page
De sa noble Methafizique...
expl. : Et s'aucun demendoit commant
Vostre romant appelleray,
C'est le romant de Partenay.
Aincy, sire, Vappelle Ven,
C'est le romant de Lusignen.
Prenez lequel que cous voulrez
Car ainci nommer le porrez.

Cette fin est en milieu de folio ; les douze derniers vers du texte, la
litanie et Pexplicit manquent.
Possesseurs : Ce manuscrit provient de la bibliothèque de Gaston
d'Orléans, réunie à, la Bibliothèque royale en 1667 (cf. H. Omont, Anciens
inventaires et catalogues de la Bibliothèque nationale, t. 4, Paris, 1913, p. 278).
Au fol. 1 : « 7541 » (ancienne cote à la Bibl. roy.).

TV. Paris, Bibliothèque nationale, fr. 1459.


Fin du xve siècle, papier ; filigranes : au premier folio, clef de 62 χ
15 mm., pontuseaux écartés de 37 mm. (pas dans Briquet ; papier toscan
de Valle de Colle d'après Mme Basanoff) ; lettre G dans le reste du volume
(Midoux et Matton 366, proche de Briquet 8195, mais dimensions 50 X
34 mm.).
I + 120 + I feuillets ; foliotation moderne ; les feuillets de garde,
en papier, sont contemporains de la reliure (filigrane RH) ; 278 X 190 mm. ;
justification : 205 X 110 mm. ; vingt-cinq longues lignes par page ; pas de
réglure.
Huit cahiers : l13 (répartis 6-7 ; la feuille du milieu manque (lacune
de cent vers dans le texte) ainsi que, en principe, un feuillet au début pour
constituer un cahier 8 /8 ; ce cahier présente une particularité : le papier
du premier folio est différent de celui de tous les autres), 2-716 et 8n
(répartis 6-5 ; cahier 6 /6 à l'origine, dont le dernier feuillet a été coupé) ;
un cahier entier manque entre les septième et huitième cahiers actuels ;
réclames.
Écriture cursive (cf. Samaran et Marichal, III, PI. 199, Bibl. nat.,
lat. 17555 : 1477 ; PL 204, Bibl. not., lat. 16000 : [1482] ; VI, PL 143, Lyon,
204 ELEANOR ROACH

Bibl. mun. 396 : 1479) ; initiales (deux lignes) laissées en attente ; reliure
xvie-xvne siècle, parchemin teinté noir, dos à cinq nerfs ; titre au dos :
« Le roman de Lusig en. vers M. S. ».
Contenu : ff. 1-120 v° : Coudrette, Mélusine.
Texte inc. : [L]e philosophe fut moult saige
Qui dit en la premiere paige
De sa noble Methaphisique . . .
expl. : Nommés le comme il vous plaira.
Tantost con Couldrete se taira
Mais qu'il ait faicte s'oroison
Qu'a present çeult, c'est bien raison,
Mettre en fourme de letanie
Pour toute la noble lignie
De Partenay devant nomnee ;
Et quant elle sera finee
Et en façon de lay comprise,
Dont la taille souvent on prise,
Toute Vouvraige sera faicte ;
Adonc se taira Couldrette.
Litanie incomplète : [Gjlorïeuse Trinité
Imcompregnable deltté...
... Doulx Dieux, doulz Père charitable,
Garde nous des las du deable.
Possesseurs : Ce manuscrit appartenait à la bibliothèque de Colbert,
d'où il passa à. la Bibliothèque royale (cf. B. de Montfaucon, Bibliotheca
bibliothecarum manuscriptorum nova, Paris, 1739, t. 2, p. 973 a). Anciennes
cotes : « Codex Colb. 2721 » et « Regius 7541.3. » (fol. 1).

O. Paris, Bibliothèque nationale, fr. 1483.


Fin du xve siècle, papier ; filigrane : armoiries, une fleur de lis sommée
d'un lambel dans un écu surmonté de la croix de la passion ; le même pour
tout le volume (Briquet 1559).
I + 119 + I feuillets; foliotation moderne; feuillets de garde, de
papiers différents (filigranes : une coquille, AG), contemporains de la
reliure ; 291 X 207 mm. ; justification : 190 X 110 mm. environ ; vingt-neuf
à trente et une longues lignes par page ; pas de réglure.
Dix cahiers : 1-912 et 1011 (répartis 6-5; à l'origine β /6, le dernier
feuillet a été coupé) ; réclames aux cahiers 3 à 9 ; signatures pour tous les
cahiers.
Écriture cursive (cf. Samaran et Marichal, ΙΙΓ, PI. 211, Bibl. nal.,
lat. 12969 : 1501 ; Vr, PI. 149, Avignon, Bibl. mun. 227 : 1490); initiales
(deux lignes) rouges ; une grande (quatre lignes), or sur rouge et bleu
(fol. 1) ; demi-reliure du xixe siècle, dos en chagrin rouge et plats en
papier rouge marbré, dos à quatre nerfs, chiffre de Louis Philippe, pièce de
titre au dos : « Mellusine ».
Contenu : ff. 1-119 v° : Coudrette, Mélusine.
Ce manuscrit a servi de modèle au copiste qui a récrit les premiers
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 205

folios du ms Londres, British Library, Additional MS 6796 (voir la notice


du ms L).

Texte inc. : Le philozophe fut moult saige


Qui dit en la premiere page
De sa noble Methaphisique...
expl. : Nommé le comme il cous plaira.
Tantost finer le conviendra
Mais qu'il ait fait son oroison
Qu'a present veult, c'est bien raison,
Mectre en forme de tétanie
Pour toute la noble lignie
De Partenay devant nommée;
Et quant elle sera finee
Et en façon je Vay comprise,
Dont la taille souvent en prise,
Toute V ouvrage sera faicte ;
Adoncques se taira Coudiecte [ou coudrecte]
Litanie : Glorieuse Trinité,
Incomparable deïté...
... Après nostre jour derrenier
Pardurable felicité. Amen
Explicit.
Detur pro pena scritory pulcra pluella.

Possesseurs : Ce manuscrit appartenait à Jacques -Auguste de Thou


(1553-1617) ; de sa bibliothèque « Colbert acheta les manuscrits anciens,
qui lui furent livrés en 1680 » (cf. L. Delisle, Le Cabinet des manuscrits,
t. I, Paris, 1868, p. 471) ; le nôtre en faisait partie, et vint peut-être à la
bibliothèque royale avec les manuscrits de Colbert, quoiqu'il ne figure pas
dans Montfaucon. Cf. les anciennes cotes : au fol. 1, en haut : « Codex Colb.
1840 », « Regius 7555.3.3. » et en bas : « Jac. Aug. Thuani ».

P. Paris, Bibliothèque nationale, fr. 1631.


Seconde moitié du xve siècle, papier ; filigranes : lettre G, dans les
cahiers 1 à 3 (Briquet 8215) ; armoiries : trois fleurs de lis, avec une étoile
au-dessus et e suspendu, dans les cahiers 1 à 3 (Briquet 1729, mais
dimensions 98 X 38 mm.) ; soleil, dans le cahier 4 (Briquet 13907) ; étoile, dans
les cahiers 5 et 6 (Briquet 6056, mais dimensions 36 χ 38 mm.) ; sirène,
fol. 69 (Briquet 13862) ; étoile couronnée, aux fol. 80 et 82, et une autre
variante dans les cahiers 8 à 11 (proches de Briquet 6113) ; licorne, dans
les cahiers 12 à 18 (proche de Briquet 10060).
I + 200 + I feuillets ; foliotation moderne ; feuillets de garde, en
papier, contemporains de la reliure (filigrane : grappe de raisin) ; 280 χ
200 mm. ; justification : Troie, 222 à 224 χ 145 mm. ; Mélusine, 180 X
105 mm. ; Troie : trente-cinq longues lignes par page, réglure à l'encre ;
Mélusine : vingt-huit longues lignes par page, réglure à la pointe sèche.
Dix-huit cahiers : l13 (répartis 5-8; à, l'origine 8/8, les trois premiers
206 ELEANOR ROACH

feuillets ont été coupés), 2-516, 62 (répartis 1-1 ; à. l'origine 8/8, il ne reste
que les premier et dernier feuillets), 78 (fol. 80, 81 et 82 ; ce sont les trois
premiers feuillets d'un cahier incomplet dont on ne voit plus la
composition), 81 (début de Mélusine, au vers 548 ; peut-être un cahier de 12 feuillets
à l'origine) ;, 9-1712, et 189 (répartis 5-4 ; à l'origine 5/5, le dernier feuillet
a été coupé) ; réclames au texte de Troie, signatures au texte de Mélusine.
Nous avons utilisé le ms Bibl. nat., fr. 785 pour la reconstitution des cahiers
du texte de Troie.
Écriture cursive (cf. Samaran et Marichal, II, PI. 135, Bibl. nat.,
lat. 6713 : 1465 ; PL 158, Bibl. nat., lat. 4661 A : 1479 ; PI. 162, Bibl. nat.,
lot. 3459 A : 1482 ; ΙΓΓ, PL 163, Bibl. nat., lat. 17013 : [1456-1458]). Ce
manuscrit et le ms Bibl. nat., fr. 19167 (ms S de Mélusine) ont des écritures
très proches ; il n'est pas impossible qu'ils soient de la main du même
copiste. Le texte de Troie n'est pas de la même main que celui de Mélusine,
quoique d'une écriture cursive ; initiales (deux lignes) rouges ; reliure du
xixe siècle, veau racine, fers dorés, dos à cinq nerfs, recouvert de maroquin
rouge au chiffre de Napoléon I, pièce de titre au dos : « Destruction de
Troye Roman de Mélusine ».
Contenu : ff. 1-82 v° : Roman de Troie en prose (copie datée de 1485).
L. Constans connaissait notre manuscrit, et huit autres du roman
en prose, mais signale que la rédaction n'est pas uniforme 1. D'après
l'édition de Constans et Faral, le début de notre manuscrit correspond au
chapitre 5, p. 5 (éd. C. F. M. A.)z. La vigile de S. Mathieu tombe le 20
septembre.
Texte inc. : / /-ment Calcas les fist a force demourer. Si vous dirons après comment
Hz furent tous empoisonnez de la puantise des corps pourris pour ce
qu'ilz n'estaient pas enterrez, comment il leur couvint requerre paix et
trêves pour les corps ardoir et mettre en terre...
expl. : Mais a esté la vraie histoire au vray translatée et cy escripte par droite
compte comme je Vay trouvée sans y couvrir nulle mençonge en telle
maniere que nul n'y pourroit riens adjouster qui pour vérité deust
estre tenu. Et fut acomply. parfait, finy et achevé la vigile Saint Mathieu
Van mil CCCC m'íxlí et cinq. Cy fine Vistoire de la destruction de la
Grant Troye.

ff. 83-200 : Coudrette, Mélusine.

Texte inc. : Tay de douleur le cueur noircy


(vers 548 de l'éd.) Par trop merveilleuse adventure.
Par ma foy, dame, je vous jure
En cest estât la ou j'estoye
Ne me souvient que je faisoye...
expl. : Nommés lay comme il vous plaira

1. L. Gonstans, Le Roman de Troie par Benoit de Sainte-Maure, t. 6, Paris, 1912,


pp. 264, 269 [S. A. T. F.].
2. L. Gonstans et E. Faral, Le Roman de Troie en Prose, t. 1, Paris, 1922, p. 5 [C. F.
M. A.].
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 207

Tantost Coudrecte se taira


Maíz qu'il ait fecte s'oroison
Qu'a present feray, c'est raison,
Et en forme de letannie
Pour toute la noble lignie
De Partenay devant nommée ;
Et quant elle sera finee
Et en fasson je Vay comprise,
Dont la taille souvent Von prise,
Toute Veuvre sera parfecte ;
Adoncques se taira Coudrette.
Litanie : Glorieuse Trinité,
Inconprenable deïté...
... Après nostre jour dernier
Pardurable felicité. Amen.

Possesseurs : Le manuscrit a été acheté au xvine siècle pour la


Bibliothèque du roi. Il porte les cotes « 261 » barré, sur le premier contre-
plat ; « Suppl. Fr. 98e », sur le premier feuillet de garde ; « Codex inter
recens partos 67 » et « Regius 7630. 5 » sur le fol. 1. Au fol. 200 v°,
galimatias en français et deux fois le nom « Pierre Gaultier », d'une main du
xvie siècle.

Q. Paris, Bibliothèque nationale, fr. 12575.


Premier quart du xve siècle, parchemin.
I + 132 + I feuillets ; foliotation moderne ; feuillets de garde, en
papier, contemporains de la reliure ; 274 X 208 mm. ; justification : 182 X
112 mm., vingt-six à vingt-huit longues lignes par page ; réglure h, la mine.
Dix-sept cahiers + 2 feuillets : l4, 2-48, 57 (répartis 3-4 ; à l'origine 4/4,
feuillet coupé entre le fol. 29 et le fol. 30), 6-138, 14' (répartis 4-3 ; h
l'origine 4/4, feuillet coupé entre le fol. 104 et le fol. 105), 15-1 78 (au quinzième
cahier la feuille du milieu a été pliée à l'envers ; l'actuel fol. 111 devait
précéder l'actuel fol. 110), et deux feuillets séparés (le premier, fol. 131
actuel, était peut-être le premier d'un cahier 4/4, et le second, fol. 132
actuel, le premier d'un cahier d'une seule feuille ; ou bien, on peut supposer
un cahier 5/5 dont il ne nous reste que les premier et neuvième feuillets).
Écriture bâtarde (cf. Samaran et Marichal, II, PI. 68, Bibl. not.,
lat. 4015 : 1391 ; PL 78, Bibl. nat., lat. 2994 : 1406 ; PL 86, Bibl. nat., lat.
3205 : 1417) ; titres rubriques ; initiales (deux ou quatre lignes) : or sur
rouge et bleu ; au fol. 1, une (quatre lignes) bleue sur or, feuilles rouges,
vertes et bleues ; les peintures, au nombre de seize, sont de la largeur de
la justification et de la hauteur d'un demi-feuillet ou plus. D'après
Délaissé elles sont « dans le style du maître de Guillebert de Mets »* ; F. Wink-
ler situe ce maître entre les années 1410 et 1450 et les peintures de notre
manuscrit, d'après les costumes, aux alentours des années 1410 à, 1420 2;

1. La Miniature flamande : le mécénat de Philippe le Bon, Bruxelles, 1959, p. 24, n° 7.


2. F. Winkler, Die Flamische Buchmalerei..., Leipzig, 1925, pp. 29-30 et 193, pour
notre manuscrit.
208 ELEANOR ROACH

au fol. 4 v°, blason et emblème de Philippe de Glèves (f 1528) ; demi-


reliure du xixe siècle, dos en chagrin rouge et plats en papier rouge marbré,
dos à, cinq nerfs, chiffre de Louis Philippe, pièce de titre au dos : « Roman
de Parthenay ».
Contenu : ff. 1-132 v° : Coudrette, Mélusine.
C'est le manuscrit utilisé par Fr. Michel1 ; le texte y est incomplet :
deux feuillets manquent (dans les cahiers 5 et 14), et quatre cents vers à
la fin. Il est le seul à diviser le texte en chapitres, lesquels ne correspondent
pas aux divisions du texte dans les autres manuscrits.

Table : Cy commence la table de ce livre lequel est intitulé de Vis-


toire de Luzignen...
Cy fine la table du livre de Luzignen
Titre rubriqué : Cy commence le prologue du livre de Luzignen
Texte incomplet, inc. : Le philozophe fu moult sage
Qui dist en la premiere page
De sa noble Methaphisique...
expl. : De Maillerés la noble église
La gist, la est sa tombe mise,
Je Vay veue de mes yeulx.
Son testament fist tout au mieulx
Qu'il pot, mais tout quanqu'il laissa
Fist paier et puis trespassa;
Tout fu paie en sa presence //
Litanie incomplète : ... Saint Pierre, Saint Pol, Saint Andrieu,
Tous apostres amis de Dieu...
... Avec vous soions et logiés
Ou ciel ou n'a nulles complaintes //

Possesseurs : A la fin du xve-début du xvie siècle, le manuscrit a


appartenu à Philippe de Clèves, dont le blason (en mauvais état), Clèves
et La Marck, est encadré par deux Q couronnés, l'emblème de Philippe
(renseignements empruntés au fichier d'héraldique de IT. R. H. T.).
L'inventaire des archives du Nord nous apprend que « Charles-Quint recueillit
la plus grande partie de sa succession », et dans la liste des livres il y a bien
« le Melluzine, couvert de velours noir ». Le manuscrit est entré à la
Bibliothèque royale au xvine siècle ou après, puisqu'il portait anciennement la
cote « Suppl. français N° 630 » (fol. 1) ; il porte aussi le numéro barré « 248 »
(fol. 132).
Bibliographie : Inventaire sommaire des Archives départementales
antérieures à 1790 : Nord, Archives civiles, série B, t. 8, Lille, 1895, pp. 422
et 433.

R. Paris, Bibliothèque nationale, fr. 18623.


1460, papier ; filigrane : armoiries, une fleur de lis sommée d'un lam-

1. Fr. Michel, Mellusine : poème relatif à cette fée [...] par Couldrelte, Niort, 1854.
LA TRADITION MANUSCRITE DU (( ROMAN DE MÉLUSINE » 209

bel dans un écu surmonté de la croix de la passion, le même pour tout le


volume (proche de Briquet 1548).
Γ + 96 -f- I feuillets ; foliotation moderne ; feuillets de garde, en
papier, contemporains de la reliure ; les fol. 44, 45, 46 et 48 sont blancs ;
306 χ 213 mm. ; justification : Du Guesclin, 195 X 145 mm. ; Mélusine,
215 X 155 mm. ; Du Guesclin : trente-six à trente-huit longues lignes par
page, réglure à la pointe sèche ; Mélusine : deux colonnes de trente-six
à trente-huit lignes, réglure à la pointe sèche.
Huit cahiers + 2 feuillets : un premier cahier manque entièrement,
il était 6/6 ; nous nous sommes appuyée sur le ms Bibl. nat., fr. 18624 pour
la reconstitution des cahiers du premier texte : 1' (répartis 3-4, à l'origine
6/6, les trois premiers et les deux derniers feuillets manquent), 210
(répartis 5-5, à l'origine 6/6, les feuillets extérieurs manquent), 310, 412, 57 (pas
de couture visible ; filigranes aux fol. 40, 42, 43 et 45 ; on ne voit plus la
disposition de ce cahier), 6-816, et 2 feuillets (fol. 95 et 96).
Écriture bâtarde (cf. Samaran et Marichal, II, PI. 136, Bibl. nat.,
lat. 6772 : 1466 ; PI. 162, Bibl. nat., lat. 1573 A : 1483 ; VI, PI. 102, Avignon,
Bibl. mun. 764 : 1450) ; tout le manuscrit semble être de la même main ;
les deux textes présentent les mêmes particularités orthographiques
(confusion entre les lettres finales -r et -z, transcription de ç par cz) ; titres
rubriques au texte de du Guesclin seulement ; initiales (deux lignes) rouges,
pour les deux textes ; reliure du xixe siècle, veau racine, fers dorés ; dos à
quatre nerfs, recouvert de maroquin rouge, chiffre de Charles X ; pièce de
titre au dos : « Vie de du Guesclin ».
Contenu : fî. 1-42 v° : Chronique en prose de Bertrand du Guesclin,
incomplète du début1.

Texte incomplet, inc. : // bataille aloient redoublant. B. ordonna ses batailles


et du cousté de la riviere mist le conte d'Auc rre; en or-
dennant les batailles des gens d'armes, se misdrent ensembles
les variés et paiges des Franczoys qui les variez des Anglois
et Navarrois assaillirent.
expl. rubriqué : Et de vie a trespassement ala le bon roy Charles, qui tant
fut saiges, ou moys de septembre ensuyvant après son bon
connestable en Van mil CCC lui™ ans de la resurrection
nostre seigneur Jhesu Crist, qui les ames d'eulx vueille
recevoir en sa gloire parrdurable. Amen.
Et sic est finis. Deo gratias. finis.
Cy après ensuyvent les armes lesquelles portoit mon
seigneur B. du Guesclin.

fol. 43 ¡Ballade sur les armes de du Guesclin, attribuée par G. Raynaud

1. Fr. Michel, Chronique de Du Guesclin, Paris, 1830, pp. 462-463.


14
210 ELEANOR ROACH

à Eustache Deschamps 1 ; un vers rubriqué alterne avec un vers à l'encre


noire, pour les trois huitains.

Texte inc. : JJescu d'argent a ung aigle de sable


Ou a deux testes et ung rouge bastón
Portoit le preux, le gentil connestable . . .
expl. rubr. : Et soit nommé le diziesme des or,
Bertrán le preuz qui servit com proudom
L'escu d'azur a trois flours de lis d'or.
Scriptor sit sanuó et benedicta manus.
Anima scriptoris requiescat cum angelis
Cy est la fin du livre de messire Bertrán du Guescin, Lequel a traicté
par avant de ces faiz et vaillances Et a esté acomply le tiers jour
d'octobre mil iiiic soixante.

fï. 43 v°, 47 a-96 b : Coudrette, Mélusine.

Titre rubrique Cy après ensuyvent les hystoires de Raymond conte de Poitiers


et de Mellusigne sa femme et de leurs enfans cy après corne il
aparaistra plus a plain.
Texte fol. 47 inc. Le pkilozopke fut bien sage
Qui dist en la premiere page
De la noble Methaphisique...
expl. Nommez l'ay corne il vous plaira.
Tantoust Couldrecte ce taira
Mais qu'il ait faicte s'oraison
Qu'il fist pour la dicte maison,
Mise en forme de letanie
Pour toute la noble lignye
De Parthenay davant nommée;
Et quant elle sera finee
Et en faczon de lay conprise,
Dont la taille souvent on prise,
Toute l'ouvraige sera faicte;
Adonc se taira Couldrecte.
Litanie 0 glorieuse Trinité,
1nconprenable .. .
... Après noustre jour derrenier
Pardurable felicité. Amen.
Et sic est finis. Deo gratias.
Priez tous Dieu pour l'escripvain
Qui a escript cestuy romain.

Possesseurs : Ce manuscrit faisait partie de la bibliothèque du


chancelier Séguier au xvne siècle, puis passa par héritage à Henri-Charles du
Cambout, duc de Coislin, lequel légua toute sa bibliothèque à Saint-Germain-
des-Prés à sa mort, en 1732. Les mss Bibl nat., fr. 19167 et 20041 (mss S
et Τ de Mélusine) partagèrent le même sort ; c'est ainsi que tous les trois

1. G. Raynaud, Œuvres complètes de Eustache Deschamps, Paris, 1901, t. 10, pp. xxxvi-
xxxvii, pièce XXIX [S. A. T. F.~\ ; pour l'attribution, cf. pp. ii-m.
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 211

vinrent à, la Bibliothèque royale. Le volume porte les cotes et ex-libris


suivants : fol. 1, en haut : « 114 », « S. G. P., 1560 » ; fol. 1, en bas : « N. 2221 »
(cote à, Saint-Germain) ; sur une étiquette collée : « Ex Bibliotheca MSS.
COISLINIANA, olim SEGUERIANA, quam Illust. HENRICUS DU
CAMBOUT, Dux DE COISLIN, Par Franciae, Episcopus Metensis, &c ;
Monasterio S. Ge[r]m[an]i a Pratis legavit. An. M. DCC. XXXIT. »

S. Paris, Bibliothèque nationale, fr. 19167.


Seconde moitié du xve siècle, papier ; filigranes : armoiries : trois
fleurs de lis, avec une étoile au-dessus et e suspendu, dans les cahiers 1,
2, 3, 17 à 24 (Briquet 1729, mais dimensions 97 X 37 mm.) ; lettre Ρ
gothique barré avec fleuron, dans le quatrième cahier (Briquet 8663, mais
dimensions 75 X 17 mm.) ; étoile couronnée, dans les cahiers 5 à, 9, 25 et
26 (Briquet 6113, mais dimensions 45 X 23 mm.) ; licorne, dans les cahiers 10
à 17 (proche de Briquet 10060).
IX + 5 + VI + 293 -f Π feuillets ; foliotation moderne ; les feuillets
de garde et six feuillets intercalés entre les cinquième et sixième feuillets
du manuscrit, tous du même papier, sont contemporains de la reliure ;
le fol. 105 est blanc ; 276 X 200 mm. ; justification : Hélène, 185 χ 118 mm. ;
Mélusine, 185 X 105 mm. ; Pierre, 185 X 120 mm. ; vingt-six longues
lignes par page ; réglure à la pointe sèche.
Vingt-six cahiers : l5 (à l'origine, cahier de 10 feuillets, 5/5; il ne
reste que les 5 derniers feuillets), //6 feuillets contemporains de la reliure,
foliotés 6 à H / /, 211 (répartis 5-6 ; à l'origine 6 /6, le premier feuillet manque ;
le onzième feuillet n'a pas été numéroté, le cahier se termine donc au
folio 21), 312, 411 (répartis 5-6 ; à l'origine 6/6, le feuillet entre 35 et 36 a été
déchiré), 5-712, 811 (répartis 6-5 ; à l'origine 6/6, le feuillet entre 88 et 89
a été déchiré), 914 (fin du premier texte au fol. 104 v°, 105 en blanc), 1011
(répartis 5-6 ; à l'origine 6/6, le premier feuillet a été coupé, ce qui ne nuit
pas au texte, lequel commence au fol. 106), 1112, 1211 (répartis 5-6 ; à
l'origine 6/6, le feuillet entre 129 et 130 a été déchiré), 13-1912, 20-2110 (fin du
second texte), 2211 (répartis 5-6 ; à, l'origine 6/6, le premier feuillet a été
coupé ; ce qui ne nuit pas au texte, lequel commence au fol. 244), 23-2612,
et 1 feuillet, numéroté 303 (fin du troisième texte).
En comptant le folio non numéroté entre 20 et 21, on aurait 304
feuillets ; moins les six feuillets modernes numérotés 6 à, 11, nous avons 298
folios du manuscrit original. Une série de signatures pour chaque texte ;
nous avons utilisé le ms Bibl. nal., fr. 1489 pour la reconstitution des
cahiers de la Belle Hélène.
Écriture cursive, la même main pour tout le volume, sauf la chanson
du fol. 303 ; voir la discussion de l'écriture du ms Bibl. nat., fr. 1631 (ms Ρ
de Mélusine) ; initiales (deux lignes) rouges ; deux grandes (quatre lignes),
rouges et bleues, aux fol. 106 et 244 ; reliure du xvne siècle, à la Du Seuil :
basane olive, dos passé ; dos à six nerfs, pas de titre au dos.
Contenu : fî. 1-104 v° : Roman de la Belle Hélène de Constantinople.
212 ELEANOR ROACH

Ce roman semble être encore inédit. Π en existe des rédactions en vers


et en prose, la nôtre est en prose1.
Texte incomplet au début inc. : ¡ j envoia veoir se Helayne estoit preste et paree,
et Clarice s'esveille et dist que non. Adont se
démena moult laidement et dit que le roy estoit
tout prest pieça. Et lors appella Clarice sa dame
maiz point ne respondón. Adont elle se leva et
vint taster au lit faisant semblant qu'elle n'en
sceut rien, et puis dist qu'elle ne la trouvait point.

(ce début correspond au fol. 4 du ms fr. 1489)

expl. : ...et Henry et Helayne demourerent a Romme avec


le pappe Clement tant qu'ilz vesquirent et la, sans
revenir, trespasserent. Dieu en ait les ames et Dieu
octroie sa saínete gloire a ceulx qui en auront
mémoire. Amen.
Cy fine Vistoir de la belle Helayne de Constan-
tinnoble, royne d'Engleterre, mere de mon seigneur
saint Martin et cetera.

ff. 106-243 : Coudrette, Mélusine.


Texte inc. : Le philosophe qui fut moult sage
[N]ous dit en sa premiere paage
De sa noble Methaphisique...
expl. : Nommés lay comme il vous plaira.
Tantost Coudrette se tara
Maiz qu'il ait faicte s'oroison
Qu'a present feray, c'est raison,
Et en fourme de letanie
Pour toute la noble lignie
De Partenay devant nommée;
Et quant elle sera finee
Et en fasson je Vay comprise,
Dont la taille souvent on prise.
Toute Veuvre si sera fecte;
Adoncques se tara Coudrette.
Litanie : Glorieuse Trinité,
Incomprenable dette...
... Après le nostre jour dernier
Pardurable felicité. Amen.

1. Sur ce texte, cf. A. Chassagne-Jabiol, Évolution d'un roman médiéval à travers la


littérature de colportage : « La belle Hélène de Constantinople », in École nationale des chartes.
Positions des thèses... de la promotion 1974, Paris, 1974, pp. 45-50; A. H. Krappe, « La
Belle Hélène de Constantinople », in Romania, t. 63, 1937, pp. 324-353 ; R. Ruths, Die fran-
zôsischen Fassungen des Romans de la belle Helaine, Diss. Greifswald 1897 ; P. Verhuyck,
Les manuscrits du poème de « La Belle Hélène de Constantinople », in Studi francesi, t. 16,
1972, pp. 314-324, spécialement pp. 315 et 324.
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 213

Explicit Vistoire de Meluzine


qui fut fille du roy Helynas d'Albanye.

ff. 244-303 : Roman de Pierre de Provence et la belle Maguelonne de


Naples1.
Texte inc. : Après V Ascención nostre Seigneur Jhesu Crist, quant la sainte foy
catholicque eust commencé a flourir es parties de Galilee, en ung pays
nommé Prouvence, Languedoch, Guienne et Thoringes, il y açoit ung
noble conte, féal et catholicque crestîen, qui se nommoit messire Jehan
de Chérisse...
expl. : ...de laquelle église ladite Maguelonne avoit esté fenderesse, laquelle
se garde encorez aujourd'uy en Vonneur de la Trinité et des princes,
des appostres Saint Pierre et Saint Pol qui leur mérite en ont en paradis,
auquel plaise nous resjouyr en noz tribulacions en cestui monde et en
la fin nous face posséder le royaulme de paradis. Amen.
Cy fine Vistoire de la belle Maguelonne de Nappies et de son loyal amy
le noble Pierre de Prouvence.

f. 303 : Chanson ajoutée au xve-xvie siècle d'une autre main. Ce sont


deux strophes à neuf vers, aux rimes : a b a b b c b b c ; l'avant -dernier
vers n'est écrit qu'une fois, précédé de bis.
Texte inc. : Si de nouveau fay nouvelles couleurs
II n'en fault ja prandre esbaUsement . . .
expl. : Que j'en languis ainsi voila comment
Ce qui me plaist m'est chose langoureuse.

Possesseurs : « Ce manuscrit était, au xve-xvie siècle, en la possession


de la famille Trudelle. » (cf. H. Omont, Catalogue général des Manuscrits
français :' Ancien Saint-Germain français, t. 3, Paris, 1900, p. 261). Au
début du xvne siècle il appartenait aux Rangueil, et fut donné par l'un
d'eux, lieutenant général au bailliage de Valois, à un Faure. Nous n'avons
pu identifier ce Faure : son écriture (fol. 1, notes) ne ressemble pas à, celle
d'Antoine Faure, chancelier de Reims (t 1689), et François Faure (1612-
1687), évêque d'Amiens, sous-précepteur de Louis XIV, aurait eu douze ans
en 1624 (fol. 1, notes). Toujours est-il qu'il entra dans la collection du
chancelier Séguier, comme l'atteste une étiquette semblable à celle du ms fr. 18623
(voir notice du ms R de Mélusine), et il est cité dans la Bibliotheca de Mont-
faucon, t. 2, p. 1109 b, No. 777. (Coisliniana). Le manuscrit porte, sur le
premier contreplat, une étiquette de St. Germain (voir ms R de Mélusine) ;
au fol. 1, marge de droite : « St. Germ. 1673 », en haut et en marge : notes
de Faure sur les textes, en bas : « Ce present livre, manuscrit in-4° des trois
Romant m'a esté donné par mon cousin de Rangueil Lieutenant general au
baillage de Valois le XV Novembre 1624. Faure. » ; aux fol. 222 v° et 303 :
« Trudelle » ; fol. 223 : « Daniel Trudelle clerc » ; fol. 243 : « Charles Trudelle » ;

1. Cf. A. Biedermann, La belle Maguelonne, Paris-Halle, 1913,


214 ELEANOR ROACH

fol. 261 v° : « Geneviefve de Francieres fenme de maistre Daniel Trudelle » ;


fol. 152 et 188 : « Rangueil » (3 fois) ; fol. 230 : « Mariée Rangueil ».

T. Paris, Bibliothèque nationale, fr. 20041.


Fin du xve siècle, papier ; filigranes : pot à, une anse, dans le premier
cahier (proche de Briquet 12476, pontuseaux écartés de 38 mm.) ;
armoiries : une fleur de lis sommée d'un lambel dans un écu surmonté de la croix
de la passion, dans les cahiers 2 à 5 (Briquet 1552, 1557, mais dimensions
55 X 25 mm.) ; ancre surmontée d'une croix, dans les cahiers 6 à 9 (proche
de Briquet 381) ; pot à, une anse, surmonté d'une croix, dans le cahier 10
et le fol. 130 (Briquet 12.481, mais dimensions 72 X 25 mm.) ; armoiries :
trois fleurs de lis sur un écu tranché, dans les cahiers 11 et 12 (Briquet
1809, mais dimensions 57 χ 38 mm.) ; lettre Y surmontée d'une croix,
au cahier 12 (fî. 140-145 ; Briquet 9186, 9187, mais dimensions 75 χ 2.2 mm.).
II + 154 + I feuillets ; foliotation moderne ; les premier et dernier
feuillets de garde sont contemporains de la réfection du dos ; le second
feuillet de garde est contemporain de la reliure ; le fol. 107 est blanc ;
252 χ 182 mm. ; justification : Mélusine, 200 χ 85 mm. ; Villon, 200 χ
105 mm. ; trente-trois longues lignes environ par page ; pas de réglure.
Douze cahiers : 1-912 (le premier cahier est numéroté 1 à, 11, un feuillet
entre 8 et 9 a été oublié ; la fin du neuvième cahier est donc au fol. 107),
106 (répartis 3-3 ; à, l'origine 4 /4 ou plus ; un feuillet moderne, non numéroté,
entre 112 et 113 semble monté sur le bout déchiré d'un feuillet, l'autre moitié
du fol. 108 actuel ; filigrane aux ff. 110 et 112), il16, un feuillet (fol. 130,
du papier des cahiers 1 à, 10), 1224.
Écritures cursives, trois mains : une main a écrit les cahiers 1 à, 10 et
le fol. 130 ; une autre le fol. 107 v°, et une troisième les cahiers 11 et 12 ;
cf., pour la première main (texte de Mélusine), Samaran et Marietta!,
II, PI. 171, Bibl. nat., lai. 4652 : 1498; initiales (deux lignes) rouges ou
bleues ; une grande (quatre lignes) au fol. 1, rouge, bleue et encre noire ;
reliure du xvine siècle, veau fauve, filets dorés, dos à trois nerfs restauré,
pièce de titre ancienne : « Manuscrit de Villon ».

Contenu : ff. 1-106 v° : Coudrette, Mélusine.


Texte inc. : Le philosophe fut moult saige
Qui dit a la premiere page
De sa noble Methaphisicque...
expl. : Nommés le comme il cous plaira.
Tantost finer le convendrá
Mais qu'il ait fait son oraison
Qu'a present veult, c'est bien raison,
Mettre en fourme de letanie
Pour toute la noble lignie
De Partenay devant nommée;
Et quant elle sera finee
Et en fasson je Vay comprise,
Dont la taille souvent en prise,
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 215

Toute Vouvraige sera faicte;


Adoncques se taira Coudiecte.
Litanie : Glorieuse Trinité,
Incomparable dette...
... Après nostre jour derrenier
Pardurable felicité. Amen
Explicit.

ff. 107 v°-153 v° : Six ouvrages de François Villon.


Ce manuscrit a été étudié en détail par Jeanroy et Droz1 ; les ff. 113
à, 152 ont servi de « manuscrit de base » pour l'édition de Rychner et Henry2.
107 v° : Ballade des pendus.
108-112 : Les lais (le Petit testament Villon).
112 v° : Ballade de Γ appel.
113-152 : Le Grant testament.
152 : Épitre à ses amis.
152 v°-153 v° : Ballade de Fortune.
Possesseurs : Ce manuscrit faisait partie de la bibliothèque du
chancelier Séguier (voir la notice du ms R de Mélusine, Bibl. not., fr. 18623),
ainsi que le montrent les mentions du fol. 1 : en haut « S. Germ. 1662 »,
en bas « N. 2436 » et l'étiquette de S. Germain^des-Prés attestant la
provenance Séguier-Coislin.

U. Paris, Bibliothèque nationale, fr. 24383.


Milieu du xve siècle, parchemin.
I + 55 -j- I feuillets ; foliotation moderne (qui commence au premier
feuillet de garde) ; feuillets de garde, en papier, contemporains de la reliure ;
le fol. 55 v° est blanc ; 295 X 222 mm. ; justification 205 X 161 mm. ;
deux colonnes de quarante et une lignes ; réglure à l'encre.
Sept cahiers : 1-68 et 77 (répartis 4-3 ; à, l'origine 4/4, le dernier feuillet
a été coupé) ; au sixième cahier, les deux feuilles du milieu ont été
interverties : ordre de lecture : 43, 45, 44, 47, 46, 48 ; réclames, sauf aux troisième
et septième cahiers.
Écriture bâtarde (cf. Samaran et Marichal, II, PL 106, Bibl. not.,
lat. 4915 : 1448 ; PI. 123, Bibl. not., lat. 6784 : 1459 ; V, PL 135, Besançon,
Bibl. mun. 31 : 1461-1462) ; initiales (deux lignes) rouges ou bleues ; pas
de titres rubriques ; les peintures, au nombre de quatorze, sont de la largeur
de la justification et de la hauteur d'un demi-feuillet environ. Les sujets,
sauf trois ou quatre, ne sont pas les mêmes que dans le ms fr. 12575 (Q)x
et sont traités avec plus de vigueur ; blason, au fol. 2 a, dans la lettre du
début du texte : bandes rouge foncé et or sur fond gris ; reliure du

1. A. Jeanroy et E. Droz, Deux manuscrits de François Villon, Paris, 1932.


2. J. Rychner et A. Henry, Le Testament Villon, Genève, 1974, 2 vol., notamment
t. I, pp. 15-20.
216 ELEANOR ROACH

xviiie siècle, maroquin vert, filets dorés, dos à six nerfs, pièce de titre au
dos : « Histoir de Melusine ».

Contenu : ff. 2 a-48 d : Coudrette, Melusine.


Texte inc. : Ce philosophe fut moult saige
Qui dit en sa premiere page
De sa noble Methaphisique . . .
expl. : Nommez le comme vous plaira.
Tantost Coudrette se taira
Mais qu'il ait faute s'oroison
Qu'a present vueil, c'est bien raison,
Mettre en fourme de tétanie
Pour toute la noble lignie
De Pertenay devant nommée;
Et quant elle sera finee
Et en façon de lay comprise,
Dont la taille souvent on prise,
Toute Veuvre sera faicte ;
Adonques se taira la Coudrette.
Litanie : Glorieuse Trinité,
Incomparable deïté...
... Après nostre jour derrenier
Pardurable felicité.
Explicit.

ff. 49 a-55 a : Chronique en prose de l'année 1403 à l'année 1454.


Titre : Cy s' ensuivent les fais avenuz ou royaume de France depuis Van de
grace mil iiii' trois.
Texte inc. : L'an mil iiiic trois fut fait connestable de France le seigneur d'Albert
de par le roy, presens les ducs de Berry, de Bourgongne et de Bourbon
et pluseurs autres nobles seigneurs. Et puis s'en ala en Guienne et
conquesta pluseurs places sur les Anglois tant en Pieregord comme
en Gascongne.
expl. : L'an mil iiiic liiii morut le mareschal de Jalongnes a Tours ou mois
de mars, et fut fait Poton de Sainte Traille mareschal de France. Celui
an morut mon seigneur de Villequier, mignon du roy.
Cf. la notice du ms C (Cambridge, University Library LI. 2. 5).

Possesseurs : Ce manuscrit a appartenu, au xvnie siècle, à Guyon


de Sardière et au duc de La Vallière (il paraît dans les catalogues de vente
des deux bibliothèques) ; il fut acquis par la Bibliothèque royale à la vente
de cette dernière bibliothèque. Il porte les mentions suivantes : au premier
feuillet de garde, « Suppl. 53 », « La Vall. N° 2782 » (n° dans le catalogue
de vente) et encore « La Val. n° 53 » ; au fol. 2 : « Guyon de Sardière ».

V. Valenciennes, Bibliothèque municipale 461.


Milieu du xve siècle, papier ; filigrane : le pape dans sa chaire, portant
la tiare, la clef de saint Pierre à. la main (Briquet 7546).
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 217

II + 338 + 11 feuillets ; foliotation moderne (le premier feuillet du


manuscrit porte le numéro 2) ; les premier et dernier feuillets de garde, en
papier, sont contemporains de la réfection du dos ; le second feuillet de
garde initial et le premier terminal, en parchemin, portent des traces de
reliure ; c'étaient les anciens contreplats ; les feuillets 125 v°, 126, 200 v°,
205 v°, 206, 207 et 333 v° à 339 v° sont blancs ; 293 X 209 mm. ;
justification : Mélusine, 185 X 95 mm. ; Troie, 195 χ 90 mm. ; Modus, 180 χ
145 mm. ; Mélusine : vingt-neuf longues lignes par page ; Troie : trente-
trois longues lignes par page ; Modus : deux colonnes de trente-trois lignes ;
réglure à la pointe sèche.
Vingt-huit cahiers : 1-912, 1016, 11-1612, 1710, 18-2812 ; réclames.
Écritures cursives (pour le texte de Mélusine, cf. Samaran et Marichal,
III, PL 138, Bibl. nat., Ut. 14845 : 1414, et PL 151, lut. 8432 : 1444) ; titres
rubriques uniquement pour le texte de Modus ; initiales (deux lignes)
rouges : quatre grandes aux fol. 3 et 127 (cinq à six lignes, rouge, bleu et
encre noire), 201 et 210 (cinq à, six lignes, rouge) ; peintures du texte de
Modus, d'une demi-colonne de hauteur environ, laissées en attente ; reliure
du xve ou du début du xvie siècle, dos à, cinq nerfs, restauré, sans pièce
de titre ; elle est signée A. Fierlin. On connaît neuf autres reliures de lui,
qui ont fait l'objet d'une étude détaillée1.

Contenu : ff. 3-125 : Coudrette, Mélusine.


Texte inc. : Le philosophe fut moult saige
Qui dist en sa premiere paige
De sa noble Methafisicque . . .
expl. : Nommelle comme il vous plaira.
Tantost comme couldre le se taira
Mais qu'il ayt faitte s'orrison
Qu'a present veult, c'est bien raison,
Mettre en fourme de letanie
Pour toutte la noble lignie
De Pertenay devant nommée;
Et quant elle serra finee
Et en fachon de lay comprinse,
Adoncque se taira a coudritte.
Litanie : S'enssuit Vorison de Partenay et de Luseignen
(incomplète) O glorieuse Trinité,
Imprenable deîté...
expl. : ... Car en maint lieu
Ont Hz conquis maint noble fieu.
Explicit du rommant de Partenay et de Luseignen tout pour vray.

1. A. Bruchet, Quelques reliures estampées signées de la fin du XVe et du début du


XVIe siècle de la Bibliothèque municipale de Lille, in Mélanges d'histoire littéraire et de
bibliographie offerts à Jean Bonnerot, Paris, 1954, pp. 81-91.
218 ELEANOR ROACH

ff. 127 v°-200 : Abrègement du siège de Troie.


Il ne semble pas exister d'autre manuscrit de ce texte, qui est inédit.

Texte inc. : Moult de gens volroient savoir


Des sieges de Troies le voir
Et souvent demandé en ont
A ceulx qui Vistoire o'yt en ont,
Qui n'est mie souvent usée
Mais a pluiseurs moult desagree...
expl. : Aprez orent moult a souffrir
Avant qu'ilz allassent morir,
Car Dieu en prist grant vengement.
Mais de ce n'en diray noyent,
Puis que le siege est deffiné.
Chilz Dieux qui maint en trinité
Nous doinst a lui si obéir
Qu'a bonne fin puissons venir. Amen.
Cy deffine le Rommant de V abbregement du siege de Troyes.

ff. 201-205 : Abrègement des chroniques de Troie.


Cet ouvrage est bien connu. Lângfors note que quelques manuscrits
ont un prologue adressé au duc de Bourbon1. Il en existe d'autres
manuscrits à la Bibl. nat. ψ. 1415, 1671, 2861, 2375 et 5365), mais le texte semble
encore inédit.

Texte inc. : Jazon et Hercules vers Coicos s'en alloient


A Vun des ports de Troye raffreschir leur cuidoient...
expl. : Diix ans dura le siege, xii jours et vi mois.
viii0 et diix mille y moru des Grigoix,
Des milliers des Troiens vi: chinquante siix.
Cy fine Vabbregiet selon Daire et Dichis.
Explicit Vabbregiet des Cronicques de Troyes.

ff. 208-333 : Le Uvre des déduis du roy Modus et de la royne Ratio.


Notre manuscrit est signalé par Tilander dans son édition des livres
du roi Modus ; il lui attribue le sigle Ρ et remarque qu'il ne contient que
le Livre des déduis2.

Titre de la table : Chi s'ensieult la table et la maniere de trouver ce qui est deter-
minet en ce Here par parties comme s'ensieult.
Prologue inc. : Prologue. Au temps que ly roys Modus donnoit doctrine de tous
desduis, il disoit a ses apprentis : Seigneurs vous avez veu enti-
tulés les bestes asquelles pour les prendre on a de bons déduis..
Texte expl. : ... car la elaretet du feu fait souvent esbahir et esgarir les compai-

1. A. Langfors, Les incipit des poèmes français antérieurs au XVIe siècle, Paris, 1917,
p. 175.
2. G. Tilander, Les livres du roy Modus et de la royne Ratio, Paris, 1932, 2 vol. [S. A.
T. F.] ; voir le t. I, p. vin et §§ 3-137 de l'édition.
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 219
gnons et especiaîement par nuyt. Il est ychi pourtrait comment
Hz doibvent aler.
Explicit les livres de cacherie, de vénerie, faulconnerie et d'ar-
cherie etc.

Possesseurs : Ce manuscrit appartenait, de la fin du xve ou du début


du xvie siècle jusqu'au xvine siècle, à, la famille de Croy. Il a été la propriété
de Charles, prince de Chimay (f 1527), qui se qualifie « seigneur d'Avesnes »
(fol. 3). Cette inscription fut donc apposée après 1496, car Jean, roi de
Navarre, ne se déshérita conditionnellement de la terre d'Avesnes en
faveur de sa sœur, femme de Charles de Croy, qu'au dernier jour de février
1497 n. s.1. Anne de Croy, arrière-petite-fille de Charles, épousa en
premières noces Emmanuel de Lalaing (f 1591). Comme elle devint ensuite
femme de Philippe de Croy, comte de Solre, le manuscrit rentra dans les
biens de la famille de Croy. Le seing manuel du fol. 3, du xvne siècle, est
celui de Philippe Emmanuel de Croy (renseignement de M. Lefrancq).
Au xvme siècle, le duc Emmanuel de Croy dressa le catalogue de sa
bibliothèque ; nous y retrouvons, au fol. 11, notre manuscrit, sous la cote « L 8° »
(cf. feuillet de garde en parchemin). Le manuscrit porte les annotations
suivantes : feuillet de garde en parchemin verso : « L. 8me » ; fol. 2 v° :
« Y 3 » et « E. Lalaing » ; fol. 3 en haut : « Livre ou Histoire de Melusine
Croy » suivi d'un seing manuel ; en bas : « Ce livre de meluzine, de
l'abrègement du siege de Troye et le livre de cacherie, vénerie et faulconnerie
appartient a mon seigneur Charles de Croy Prince de Chimay, seigneur
d'Avesnes, Wavrin, Lillers, seigneur venerable etc ».

W . Aberystwyth, National Library of Wales 5030 C.


Début du xve siècle, parchemin.
I + 82 + I feuillets ; foliotation moderne ; feuillets de garde en
parchemin ; 247 X 180 mm., justification : 160 χ 105 mm. ; vingt-huit longues
lignes par page ; réglure à la pointe sèche.
Le manuscrit original, tel que nous avons pu le reconstituer d'après
les réclames et les signatures, comportait au moins quinze cahiers : l1
(à l'origine 4/4, il ne reste plus que le premier feuillet), 2-38 (ces cahiers
manquent entièrement), 42 (à, l'origine 4/4, il ne subsiste que les septième
et huitième feuillets du cahier primitif), 5-88, 94 (à, l'origine 4 /4, il ne reste
que les quatre premiers feuillets), 10-148, 153 (à l'origine 4/4, il ne reste
que les trois premiers feuillets). Le texte s'arrêtant environ neuf cents vers
avant la fin, même si le quinzième cahier était complet, il faudrait encore
onze feuillets pour terminer le texte.
Écriture bâtarde (cf. Samaran et Marichal, I, PI. 67, Ars. 522 : après
1395 ; PL 100, Chantilly, Musée Condé 875 : 1446 ; II, PI. 77, Bibl. naL,

1. Cf. Michaux aîné, Chronologie historique des seigneurs de la terre et prairie d'Avesnes,
Avesnes, 1844-1868, p. 375. Renseignements complémentaires dans les manuscrits 1001
(Généalogie des Croy) et 1034 (Catalogue des manuscrits de leur bibliothèque au xvme siècle)
de la bibliothèque de Valenciennes.
220 ELEANOR ROACH

lot. 5848 : 1403) ; initiales (deux lignes) rouges avec de l'encre noire, bleues
avec du rouge ; une grande, au fol. 1 (trois lignes) : bleue avec feuilles,
rouge, bleu, or ; une peinture, au fol. 1 (94 X 98 mm.) : Mélusine, dragon,
s'envole d'un château devant lequel se trouvent deux hommes avec un
sanglier entre eux ; reliure du xixe siècle, maroquin rouge, filets dorés, dos
à cinq nerfs, pièce de titre au dos : « Mélusine M.S. »

Contenu : ff. 1-82 v° : Coudrette, Mélusine.


Texte incomplet inc. : L[e\ philosophe fut moult sage
Qui dit en la premiere page
De sa noble Methaphisique . . .
expl. : Moult y a eu de chevaliers
Fors et appers et moult ligiers
Pour le grant trésor conquerir
Mais riens n'y porent acquérir,
Ains de povre heure y alerent
Car oncques puis n'en retournèrent.
Un en y ala d'Engleterre / /

Possesseurs : Ce manuscrit faisait partie de la collection « Appendix »


du comte d'Ashburnham déjà, en 1861 ; il figure dans le catalogue de vente
Sotheby May 1, 1899. La notice est la reproduction mot à, mot de celle qui
figure sous le numéro CLXIX du catalogue des manuscrits Ashburnham,
« Appendix ». Π fut acquis par Francis W. Bourdillon. La date précise de
son acquisition n'est pas certaine : d'après l'ex-libris, ce fut en 1897, mais
le manuscrit paraît toujours dans le catalogue Sotheby de 1899, deux ans
plus tard.
L. Delisle enregistre notre manuscrit dans sa table de concordance des
numéros du catalogue de Lord Ashburnham et du catalogue de vente
Sotheby ; il ne lui consacre pas de notice.
Le volume porte les cotes et ex-libris suivants sur le premier contre-
plat : « C. / Bdn 452 » et « 87 » [ou 81 ?] ; ex libris « From the Library of the
Earl of Ashburnham Appendix N° CLXIX May 1897 60 » ; ex-libris « The
National Library of Wales. The Library of Francis William Bourdillon
1852-1921 Purchased 1922 » ; sur le premier feuillet de garde : « 310 ».
Bibliographie : Catalogue of the Manuscripts at Ashburnham Place :
Appendix. London [1861], sans pagination, n° CLXIX ; Catalogue of a
Portion of the Collection of Manuscripts known as the « Appendix » made
by the late Earl of Ashburnham. Sotheby, sale of May 1, 1899, p. 61, Lot 108.
L. Delisle, Vente de manuscrits du comte d'Ashburnham, in Journal des
Savants, juin 1899, p. 322.

LE CLASSEMENT DES COPIES

La tradition textuelle de ces vingt manuscrits est assez uniforme. Les


lacunes matérielles mises k part, le récit se poursuit de la même manière
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 221

dans toutes les copies. Néanmoins, quand nous regardons de près le détail
des variantes, des groupements se laissent distinguer, qui ont deux pôles :
les manuscrits D et B. La supériorité de ces deux manuscrits s'impose à
la suite de sondages de collationnement effectués sur plusieurs centaines
de vers à, des endroits différents dans le texte. L'adoption de D comme
manuscrit « de base » n'a été effectuée qu'après une comparaison in extenso
de B avec D.
Après avoir présenté la répartition des manuscrits, nous traiterons le
groupe de D en premier lieu à cause de son importance et de son uniformité.
Π comprend les mss ADE(H)NQUV. Les autres manuscrits se répartissent
ainsi : BW, CGLR, FM (« les groupes autour de Β »). Quant à OT et PS,
ils suivent tantôt le groupe de 2), tantôt, et plus souvent, celui de B.
Rappelions ici les lacunes les plus importantes : L ne commence qu'au
vers 243, Ρ au vers 548 ; à Ν manquent les vers 307 à 409, et à W les vers
40 à 1668.
Nous n'avons pu relever jusqu'à présent que les variantes des vers 1
à 4000 *. La discussion qui suit ne se rapporte donc qu'à cette première
moitié du texte.

RÉPARTITION DES MANUSCRITS


Citons d'abord quelques passages où les manuscrits se divisent
nettement en deux groupes principaux, autour de D et B2.
Des lettres furent cachetées
Du grant seel au nouveau conte
874 Qui bel estoit et de grant compte.
C'est la leçon, pour le vers 874, des mss ADE(H)NQUV. A peu de chose
près, tous les autres manuscrits (W a une lacune) portent : La cronique
ainsi le conte. Ce vers étant hypométrique, FMPS écrivent raconte, et G
dit canonique.
Pour le mariage de Mélusine, son futur mari amène le comte de Poitiers,
lequel est salué par les chevaliers de l'entourage de Mélusine.
Le conte le salut rendy
A chascun, pas n'y attendy,
Selon qu'a lui appartenoit
Et du lieu de quoy il çenoit :
1091 Aux grans et aux petiz, au mendre,
Bien sot a chascun salut rendre.
Le vers 1091 se trouve tel quel dans les mss ADE(H)NQUV, OT et PS :
le comte répond avec une égale courtoisie au salut de chacun. Les autres
manuscrits, au contraire (BCFGLMR, W fait défaut), ont préféré écrire :
Aux grans plus et aux petis mendre.
Gieffroy, fils de Mélusine, lutte avec le géant Guedon. Celui-ci coupe les

1. Cet article a été écrit en 1976. Au moment de la correction des premières épreuves
la collation des manuscrits est achevée pour tout le texte.
2. Le vers numéroté est celui sur lequel porte notre commentaire.
222 ELEANOR ROACH

deux pattes de devant du cheval de Giefïroy ; monture et chevalier tombent


à terre,
Maiz Gieffroy tost du destrier sault,
3340 Espertément que riens n'y fault.
Lors a trait du fourreau Vespee,
Au géant va de randonnée
Sur le senestre bras le fiert.
Au vers 3340, les mss ADENPQSTUV célèbrent l'adresse de Gieffroy,
tandis que les mss BCFGLMRW anticipent l'action des vers suivants,
rendant superflu le Lors du vers 3341 : Au géant livre dur assault ; O suivait
le sens du premier groupe : Comme preux et vaillant vassault.
Le roi de Chypre, blessé mortellement, donne sa fille unique en mariage à,
Urien, fils de Mélusine. Il demande qu'on célèbre les noces tout de suite, et
Ainsi comme on levoit Dieu
De la messe en ce propre lieu
1731 Ou gisoit le roys maladis,
Vame rendi en Paradis.
BCFGLMPRSW écrivent, au vers 1731 : Ou couchiez estoit maladis. Il
leur manque donc un sujet ; OT donnent ce sujet en écrivant : Ou le roy
estoit maladis.
A travers ces quatre exemples, nous voyons les groupes se définir,
Ο Τ et PS se rangent avec les manuscrits du groupe de D dans les second
et troisième cas. Il nous semble discerner une supériorité de D sur B,
légère dans le deuxième exemple, plus nette dans le troisième, et sans
équivoque dans le quatrième.
Il suffît que Β omette un vers pour que les « groupes autour de Β »
se distinguent les uns des autres. Un exemple nous suffira ici, car nous aurons
à revenir plus loin sur chacun de ces groupes.
Raymond prie le comte de Poitiers de venir aux noces avec sa mère,
Ma chiere dame redoublée
1014 Qui tant est noble dame clamée (+ 1).
C'est la leçon de ADNQUV ; Ε : Qui est noble réclamée ( — 1) ; H : Qui est
chère dame clamée. Ensuite, nous avons les solutions suivantes : CGLR Que
fay de long temps honnouree ; FM Quant il eut la chose comptée ; OT Y
amenez s'il vous agree ; PS Et des dames de la contrée.
La restitution Qui tant est noble réclamée s'impose, mais la faute de D et
de son groupe est moins grave pour la tradition du texte que le désaccord
résultant de l'omission du vers par B.
La répartition des manuscrits étant faite, passons à, l'étude du groupe
de D.

Le groupe de D : D et N.
De tous les manuscrits du groupe de D, ADE(H)NQUV, Ν est le plus
fidèle à D. On pourrait croire que Ν est copié sur D, tellement ils se
ressemblent. Nous ne pouvons pourtant tirer cette conclusion, car Ν a par-
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 223

fois des vers qui manquent dans D ; il faut donc penser qu'il est copié
sur un manuscrit très proche de D. Voici deux premiers exemples qui
démontrent que Ν dépend d'un modèle très semblable à D.
Lorsque Raymond, qui a de graves soucis, rencontre Mélusine, il la trouve
si belle que
541 II entf oublia ses amis
Et ne scet s'il est mors ou vis.
D et U ont bien amis au vers 541, tous les autres manuscrits ont ennuis.
Ν s'est repris : II entre oublia ses ennuis [barré sur le ms] amis.
Raymond jure de tenir le serment qu'il fait à Mélusine, mais Goudrette
nous prévient :
Helas, dolent, il en menti,
Dont depuis grant douleur souffry
Et s'en perdit sa dame chiere,
684 Que tant perdy et tenoit chiere.
Β omet le vers, PS ont une autre leçon, mais à, l'exception de N, tous les
autres manuscrits lisent Que tant amoit et tenoit chiere ; Ν Que tant perdi
s'en tenoit chiere.
Par contre, voici deux cas où Ν maintient la tradition du texte face
à l'omission du vers par D.
Le comte de Poitiers avait une fille,
Eue fut moult belle et doulcette
172 [manque dans D]
D seul omet le vers 172, tous les autres, y compris N, ont bien : Laquelle
on appelloit Blanchette.
Mélusine dit à, Raymond qu'il ne doit jamais douter
Que pas de par Dieu je ne soye
620 [manque dans D]
D est de nouveau seul à omettre le second vers, tous les autres manuscrits
disent : Et qu'en ses vertus je ne croye.
Il est évident que Ν n'a pu être copié sur D.

Le groupe de D : Ε et V.
Ces deux manuscrits ont un caractère indépendant : ils ajoutent des
vers, quand la rime ou le sens sont difficiles, Ε fait des bourdons, et F a
des traits de dialecte du Nord. Mais ils vont souvent ensemble et il arrive
à E, en dépit de sa négligence, d'avoir la meilleure leçon pour le texte.
Lorsqu'il manque un vers à, D et que la tradition textuelle du groupe en est
bouleversée, nous retrouvons Ε et V allant de pair.
Dans le prologue, Coudrette nous dit qu'il a accepté de mettre en vers
l'histoire, et qu'il fera de son mieux
Au plaisir du doulx Jhesu Crist.
120 [manque dans ADNOQ]
EV, Τ et S ont les leçons suivantes, parmi lesquelles celle de EV est évi-
224 ELEANOR ROACH

demment la meilleure : Qui m'en (V nous) doint faire bon escript; T, qui
suit 0, est obligé d'inventer : Qui pour nous mort en croix sousfrist ; S
introduit également une banalité : Qui le monde crea et fist ; les huit autres,
y compris U, qui porte ici une correction, donnent : Mon seigneur respont :
« C'est bien dit. »
Dans un autre exemple, D et Β omettent un vers (434). Raymond, futur
mari de Mélusine, est dans un mauvais pas et s'en prend à, Fortune :
II est plus fol que beste mue
Qui point se fie a ton affaire
434 [manque dans ABCDG(H)LNOQU]
Cette omission amène les variantes suivantes : Ε Et est deceu qui ce vuelt
faire ; V II est deckeu sans nul contraire ; T, qui copie sur O, est obligé
d'inventer : Car tantost tourne ton viaire ; F MS Ha faulce, que m'as tu fait faire?
fí change la rime des deux vers :
Qui point se fie en son art
Or bien maintenant m'en apport.
Par ailleurs, les variantes montrent bien que ni Ε ni V n'ont été copiés
l'un sur l'autre.

Le groupe de D : le correcteur de U.
Quand U se range du côté des autres manuscrits contre le groupe de
D, c'est aux endroits où il a subi une correction. Il est le seul de nos
manuscrits qui ait été corrigé de façon systématique. La plupart du temps, on
ne peut pas identifier le manuscrit qui a servi de modèle au correcteur.
Mais dans deux cas très nets, nous pouvons affirmer que ce modèle fut ou
bien C ou bien un autre manuscrit similaire.
A la mort du conte de Poitiers,
823 Pleurent prestres, pleurent chanoine,
824 Par Poitiers chascun dueil demaine.
C'est la leçon de tous les manuscrits sauf C et £7, qui ont :
Pleurent prestres, pleurent chanoinnes,
Pleurent les ordres et les moinnes,
Par Poitiers chascun dueil demaine
Non pas ung jour mais la sepmaine.
Giefîroy, fils de Mélusine, est en colère contre l'abbé de Maillezais, car il est
convaincu que celui-ci a forcé son frère cadet, Fromont, à, devenir moine. L'abbé
plaide son innocence, et fait appel au frère lui-même, qui parle à son tour :
3595 Froymont lui dist : « Frère, vrayement,
3596 Et par le mien vray serement
II n'est que de par moy venu
3598 Que moyne estre m'a convenu... »
C et U, seuls et ensemble, portent :
Ce dit Froumont : « Frère, vrayement,
C'est par le mien esmouvement.
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 225

II n'est que de par moy venu


Que moigne suis d'abbaye vestu... »
On aimerait faire d'autres rapprochements entre ces deux
manuscrits, car ils ont aussi la même chronique à la suite du texte de Mélusine ;
mais ce n'est pas possible, car les autres corrections faites à U ne sont pas
toujours de C.

Le groupe de D : H, le manuscrit tardif.


Le lecteur aura déjà remarqué que nous avons mis la mention de ce
manuscrit entre parenthèses. Nous n'avons pas retenu les leçons de H pour
établir le corps des variantes. Π rajeunit la langue et prend des libertés avec
le texte. Il ne connaît plus l'ancien usage de tu et vous dans un même énoncé,
persiste donc à employer la forme vous pour les discours de Mélusine à,
Raymond, même quand l'emploi de cette forme rend le vers faux. En outre,
il est capable de récrire un passage, sans l'améliorer pour autant.
Un exemple suffira. Raymond et le comte de Poitiers chevauchent dans
les bois, ayant perdu leur chemin :
323 Lors un trop beau chemin trouvèrent
Parmi lequel s'acheminèrent.
Li quens dist : « Raymon, ce sentiers
S'en va, ce cuide je, a Poittiers.
Qu'en dictes vous, est il ce cy? »
328 Raimon dit : « Je le croy ainsi- ■■
H commence au vers 323 de la façon suivante :
Lors dist au conte de Poictiers :
« Raymond, vez cy ung grant sentiers
Qui a Poictiers va, se me semble.
Est il ainsi? Que vous en semble? »
Raymond dist : « Je croy que c'est il. »
De parler fut bien soutil. (·— 1)
II faudrait corriger au du premier vers en le pour retrouver le sens du
passage. Même si on le fait, la médiocrité du texte explique pourquoi nous
n'avons pas retenu H dans le corps des variantes.

Le groupe de D : conclusions.
La discussion précédente du groupe ADE(H)NQUV a relevé les
points suivants : Ν semble être copié sur un manuscrit semblable à D,
ce qui lui donne une valeur particulière dans la tradition du texte ; EV
vont parfois de pair ; U a été corrigé systématiquement d'après un
manuscrit qui doit ressembler fort à, C ; H est tardif et sans importance pour
l'établissement du texte.
Il nous reste donc à parler de A et de Q, et de la tradition textuelle
du groupe en général. Pour démontrer l'indépendance de A à l'égard des
15
226 ELEANOR ROACH

autres manuscrits et l'infériorité de Q, nous donnons deux exemples :


dans un cas, D a omis le vers ; dans l'autre, il a conservé la meilleure leçon.
Deux fils de Mélusine s'apprêtent à livrer bataille au roi d'Aussay, pour
l'obliger à lever le siège qu'il a mis devant la ville de Luxembourg :
Lors se mettent en ordonnance
1944 [manque dans DN]
Vont ferir sur leurs ennemis.
AUV Et prestemens sans atardance (U acordante) ; Ε De voulenté et de
puissance ; H En bessant chacun sa lance : Q Et arrengier sans detriance ;
BCF GLMOPRSTW : Ainsi comme gens de vaillance.
Il est évident que la suite du vers 1943 demande ou bien la solution de
AUV, ou bien un point à la fin du vers et une nouvelle phrase comme E.
Mais le vers de Q ne se comprend que si on lui prête une organisation
syntaxique empruntée aux deux autres vers. Tel quel, il ne donne aucun sens
satisfaisant.
Nous avons déjà, vu que V aurait plutôt tendance à se ranger du côté
de Ε (quoique ce ne soit pas le cas ici) ; pour démontrer l'indépendance de
A par rapport à, £/, il suffit de citer le cas du vers 322 Ou treuçent des lieux
moult divers, où A est seul à lire Ou de sentiers ot moult divers.
Passons maintenant à l'exemple où JD a gardé la bonne leçon, pour
voir quelles conclusions nous pourrons en tirer.
Giefïroy, fils de Mélusine, s'en alla combattre le géant Guedon qui
habitait cette partie de la Bretagne appellee encore aujourd'hui Guérande.
Ce sont ses premiers faits d'armes, et Coudrette nous annonce le résultat à
l'avance :
En Guarrande fort guerroya
2770 Et la sa vertu esprouva.
Ce ne sont que DEV qui écrivent ainsi le vers 2770. AMN l'omettent.
Τ suit maintenant le groupe de D, nous donnons aussi sa variante. H Et
tout son pouvoir employa ; Q En tous estas bien se porta ; Τ Le géant et moult
bien se porta (-f- 1) ; U Et maint honneur y conquesta ; à, peu de chose près,
tous les autres manuscrits ont : Car souventeffoiz guerre y a.
D'où l'on conclut : les manuscrits du groupe de Β n'ont exprimé qu'un
lieu commun ; nous avons eu raison d'écarter H de nos considérations ;
D et EV donnent au récit plus de relief.
De ces deux exemples il ressort que l'inspiration du copiste du ms Q
n'est que médiocre ; par contre, lorsque D et Ν omettent un vers, A est
un bon manuscrit de soutien pour la tradition du texte.
Outre les relations discutées sous les rubriques ci-dessus, il n'est pas
d'autre trait saillant à, remarquer dans le groupe de D. Après JV, le meilleur
manuscrit de contrôle aurait été JE, mais son copiste est trop inattentif.
Prenant donc D comme manuscrit « de base », lui-même appuyé par N,
nous rangeons les autres manuscrits du groupe dans l'ordre suivant quant
à leur valeur pour l'établissement du texte : EV, A, Q et U. U vient après Q
parce qu'il a été corrigé.
LA TRADITION MANUSCRITE DU (( ROMAN DE MÉLUSINE » 227

Les groupes autour de B.


Nous venons de voir que les mss ADE(H)NQUV forment un groupe.
Sous la rubrique « répartition des manuscrits », nous avons vu, dans les
quatre premiers exemples, que les autres manuscrits se réunissent parfois
dans un accord unanime contre le groupe de D. Mais le dernier exemple
nous a prévenus que les choses ne sont pas si simples.
En général les groupes que nous avons à traiter ici, CGLR, FM, Ο Τ
et PS, se distinguent les uns des autres le plus souvent lorsque B omet
un vers. Cette omission de la part de Β n'est pourtant pas nécessaire à, la
distinction de ces groupes, qui en d'autres endroits donnent des versions
différentes d'un vers de B. Ce qui nous fait croire qu'il ne fut pas leur
modèle direct.
Voici un exemple : Mélusine prévient Raymond, tout de suite après leur
mariage, que s'il rompt le serment qu'il lui a fait de ne jamais chercher
à savoir ce qu'elle devient le samedi, il la perdra. Alors lui et ses
descendants
Commenceront a decheoir
De terres, dOnneur, heritages,
678 Dont douleurs seront en leurs courages (+ 1).
C'est la leçon de D pour le vers 678; ANQUV remplacent douleurs par
dolens, ce qui est toujours hypermétrique ; Ε et H sont ici inutiles. Les
autres manuscrits nous présentent les solutions suivantes : B Si sera honte
a vo lignage ; Ο Τ Et aussi de vostre lignaige ; FM Et vous viendra moult
grans {M de) dommaiges ; PS Et vous vendra moult de (S grant) dommage ;
C Dont vous aurez trop grant dommaige ; GLR Et y aurez tres grant dommage.
B, nous le voyons bien, a trouvé une solution assez ingénieuse, mais il n'a
pas fait école. Laissant de côté pour le moment la situation de OT et PS,
il nous semble assez clair que, chacun à son tour, B, FM et CGLR se sont
trouvés ou bien devant un vers faux qu'ils ne savaient comment corriger,
ou bien devant un vers laissé en blanc.
Pour prévenir la question éventuelle du lecteur — question qui relève
de la critique textuelle et non pas du classement des copies — nous avons

choisi de suivre le groupe de D, corrigeant ainsi le texte :


Commenceront a decheoir
De terres, dOnneur, oVeritages :
Dolens seront en leurs courages.
Le sens est clair, bien que les règles de la ponctuation moderne ne s'allient
pas heureusement avec la syntaxe du xve siècle.

Les groupes autour de B : B et W.


Le manuscrit le plus intéressant de ceux qui n'appartiennent pas
au groupe de D est celui de la Bibliothèque Bodléienne, notre ms B. Son
copiste était attentif, mais capable aussi de faire des fautes ou d'améliorer
le texte. Ce manuscrit est donc empreint de traits personnels. W se range du
côté de B, et aurait été important pour la tradition textuelle, mais il a été
si sévèrement mutilé que son utilité est très limitée.
228 ELEANOR ROACH

Voici un exemple où BW s'écartent de la leçon de tous les autres


manuscrits : Gieffroy s'en va à la recherche du géant Guedon
Gieffroy s'en va devers Guerende,
Chevauche et la voye demande
Ou le géant trouver pourra,
3232 A lui combatre se vouldra.
BW seuls ont : A lui combatre s'en venra.
Mais en général les écarts de la tradition textuelle de BW n'ont pas de
graves conséquences pour la compréhension du récit. C'est seulement
pendant la chasse au sanglier que Β (W a une lacune) fait porter une espee par
le comte de Poitiers au lieu d'un espieu. Cela rend les vers faux et fait un
contresens.

Les groupes autour de Β : CGLR.


Abordons maintenant le groupe CGLR. Parfois ces quatre manuscrits
se réunissent contre la tradition textuelle de tous les autres :
2478 Vescu embrace a grant force
CGLR écrivent : Et si {G cil) y meet toute sa force.
Mais ils sont assez indépendants les uns des autres pour qu'il soit
impossible de trouver des liens de parenté entre eux.
Prenons cet exemple : à la fin d'une expédition, Anthoine, l'un des fils
de Mélusine, revient auprès de sa femme, épousée peu de temps
auparavant.
Et Anthoine a s'espousee
2718 Remet, que brief ot espousee.
C laisse le vers tel quel ; L emploie Demeure au lieu de Remet ; G S'en est
allé sans demouree ; 7? récrit ainsi les deux vers :
Et Anthoine o son espouse
O laquelle il fut grant pouse.
En d'autres cas nous avons constaté que chacun de ces quatre
manuscrits peut omettre un vers, ou en intervertir deux, sans que les autres en
soient influencés.
Les groupes autour de Β : F et M.
Les relations entre F et M sont difficiles à définir. Il semble que tous
les deux dépendent d'un même manuscrit. Cette constatation ressort du
fait que lorsque F omet un vers, cela n'a aucun effet sur M. Si M omet un
vers, F l'omet aussi ou bien porte la leçon des autres manuscrits. Il arrive
que M, mais pas F, ait un vers qui diffère tout à, fait de la tradition du
texte.
En voici un cas : le roi de Chypre, blessé à mort, annonce à ses barons qu'il
veut laisser son royaume
[...] a ma fille Hermine,
1676 En moy n'a point de medicine.
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 229

M écrit ainsi le vers 1676 : Ma vie forment se decline, mais F a suivi la


tradition des autres manuscrits. Il faut donc penser que les copistes de
ces deux manuscrits avaient un même modèle, comme nous l'avons vu
dans la discussion sur la répartition des manuscrits ainsi que dans la
section des « groupes autour de Β ». Le copiste de M prenait plus de libertés
avec le texte que celui de F.

Les groupes autour de Β : O et T.


O et Τ sont très intéressants comme groupe. Τ a eu O comme modèle
pour les deux mille premiers vers environ et il l'a suivi jusque dans ses
fautes. Par exemple, le comte de Poitiers commande une fête, et les barons
Vindrent trestous a la journée
204 Que le conte avoit commandée.
Au vers 204, OT ont : Que la court avoit ordonnée, alors que c'est le comte
qui a donné l'ordre et qu'il n'est jamais question de cour.
Lorsque O n'a pas le vers, Τ invente : la femme du comte de Poitiers ap-*
prend la mort de son mari, et Goudrette nous dit son deuil :
Moult dolente en fut sa mouillier
806 De lermes va son vis mouillier.
Gomme O a oublié le vers 806, Τ écrit : Qui Vamoit et tenoit moult chier.
Le cas suivant nous montre combien Τ dépend de O : en décrivant un
château construit par Mélusine, Goudrette dit que personne ne pourrait le
prendre
Tant feust acompaignié de gens.
1374 Le fort est moult bel et moult gens.
Les seules variantes du vers 1374 sont O Qui la furent mis dedens ( — 1) ;
et Τ S'yl y avoit des gens dedens.
Aux approches du vers 2000, O a tant de vers faux que Τ ne peut plus
lui faire confiance.
Τ se contente donc, d'abord, d'inventer : un roi se rend, capturé dans
une bataille par un des fils de Mélusine, lequel
Tüer le voult; si se rendi
1968 Et tost Vespee lui tendi.
O écrit : Et Vost lespee lui tendi. Τ trouve que l'armée entière n'a rien à
faire ici, il change donc le vers : Car tiié Veust s'il n'eust rien dit.
Mais bientôt Τ a recours à, un autre manuscrit, qui devait être du
groupe de Z), sans qu'il nous soit possible de préciser davantage.
La duchesse Crestienne annonce qu'elle prendra conseil des deux fils de
Mélusine qui lui sont venus en aide, et qu'elle suivra leur avis
De tout ce que auray a faire
2004 PuisquHlz sont gens de tel affaire.
C'est la leçon de tous les manuscrits (y compris T) ; R omet le vers 2004,
et O le remplace par Sans eulx ne vouldray riens faire ( — 1).
230 ELEANOR ROACH

Τ continue à, suivre son nouveau modèle même quand O a la meilleure


leçon.
En voici un exemple : en préparation d'un mariage,
Le roy fait doncques ordonner
Sa niepce la belle Esglentine
2666 Ainsi qu 'apartient a ro'yne,
Et Regnault fu mis en arroy
Ainsi qu'il appartient a roy.
Cette leçon de ADE(H)NQTUV pour le vers 2666 est, à cause de la
répétition du verbe deux vers plus loin, manifestement inférieure à celle des
autres manuscrits, dont O : Ainsi qu'il affiert a roy ne.
Puisque Τ a compris, aux alentours du vers 2000, que O était fautif,
il prend pour modèle un manuscrit qui devait appartenir au groupe de D.
Mais nous ne pouvons dire s'il a pris un de ceux qui nous sont parvenus,
parce que Τ a beaucoup d'imagination. Ce copiste paraît s'amuser à, changer
certains vers pour son plaisir.
Lorsque Coudrette décrit Mélusine dans son bain le samedi, il nous dit
que jusques au nombril elle était très belle,
3073 Maiz queue ot dessoubz de serpent
3074 Grande et orrible vrayement.
7', contre tous les autres manuscrits et sans raison apparente, modifie :
Mais du nombril jusques embas
Serpente estoit de toutes pars,
ce qui n'a même pas le mérite d'être une bonne rime.
Toujours est-il que O et Τ ont l'intérêt de nous faire connaître le
procédé d'un copiste (T) face à un modèle fautif : d'abord il lui fait
confiance, supplée au besoin des vers, puis trouve qu'il peut mieux faire en
cherchant un autre exemplaire à, copier, et finit par y mettre un peu du
sien.

Les groupes autour de Β : Ρ et S.


Ρ et S constituent notre dernier groupe, et comme nous l'avons déjà,
indiqué dans les descriptions de ces manuscrits, ils sont probablement du
même copiste. Il est difficile de déterminer lequel des deux fut copié sur
l'autre. En général, lorsqu'ils s'écartent de la tradition des autres
manuscrits ils ont tous les deux la même leçon : Ρ et S n'ont pas apprécié les
neuf syllabes du vers 2479, qui cependant n'embarrassèrent pas les autres
copistes ; ils ont changé les vers 2479 et 2480 :
2479 Uespee brandit par grant vertu (+1)
Un Crestïen a abatu.
PS ont récrit ainsi : Vespee brandist par ayr
Ung Poictevin en va ferir.
Dans deux cas seulement Ρ et S n'ont pas la même leçon : le premier
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 231

n'est pas décisif; le second, semble-t-il, montre que Ρ aurait été copié
sur S. Voici ces deux cas :
Les nobles de Bohême protestent qu'ils n'accepteront comme roi que celui
que leur souverain voudra bien leur donner :
2619 Ne ne recevrons chevalier
Fors cilz que vous vouldrez bailler.
Ρ Maiz ne recepvrons chevallier] S Maiz ne reffuserons chevallier (+ 1)·
S a dû comprendre, « Mais nous ne refuserons pas un chevalier que vous
aurez choisi pour être notre roi. » Que S ait copié son texte sur P, en faisant
une erreur, cela est possible. Mais rien ne prouve que P, copiant sur S,
et s'étant aperçu de sa faute, n'ait pas corrigé de lui-même reffuserons en
recepvrons.
Raymond n'a pas tenu sa parole, et Mélusine est obligée de le quitter pour
toujours. Avant de s'envoler, elle lui prédit son sort et celui de ses
descendants :
Saches qu'il te mesavendra
Ne jamaiz bien ne te prendra.
3969 Tousdiz déclineront tes faiz
3970 Ne jamaiz ne seront reffaiz
Et sera ta terre après toy
Partie par pars, or le croy.
Les mss APV omettent les vers 3969 et 3970, S écrit
Tousjours desclineront tes faiz
Tes tours, tes champs et tes palláis.
Si le copiste avait transcrit d'abord i5, il semblerait fort surprenant que
dans le ms S il ait retrouvé pour le vers 3969 la même leçon que les autres
manuscrits. Par contre, il n'y a rien d'étonnant qu'au vers suivant il ait
inventé quelque chose de son propre cru, car cela lui est arrivé ailleurs.
Du vers 3969, nous déduisons donc que notre copiste a transcrit
d'abord le ms S. Ensuite, en recopiant Ρ sur S, il a omis les vers 3969
et 3970, faute d'autant plus facile à faire que l'intelligence du passage n'en
est pas gênée.

Les groupes autour de Β : conclusions.


Nous avons vu, dans la répartition des manuscrits, que les groupes
BW, CGLR et FM vont souvent tous ensemble, sans que nous puissions
distinguer une filiation entre eux. Les relations des manuscrits dans chacun
de ces groupes restent ténues.
En contraste avec ces trois groupes, les deux autres sous-groupes,
OT et PS sont plus faciles à caractériser. Τ a copié sur O les deux mille
premiprs vers, puis choisi un autre modèle qui devait appartenir au groupe
de D. Il est vraisemblable que le même copiste a transcrit d'abord S et
puis Ρ d'après S.
Pourtant, quand il faut se prononcer sur le texte que suivaient les
232 ELEANOR ROACH

copistes de 0 et de PS, nous sommes dans l'embarras. Les exemples donnés


dans la répartition des manuscrits et au début de la discussion des groupes
autour de B nous montrent OT et PS soit ensemble dans le groupe deD,
soit ensemble parmi les manuscrits groupés autour de B. Il n'en est pas
toujours ainsi, et l'on retrouve PS plus facilement dans le groupe de D,
tandis que O semble avoir une préférence pour la tradition de B.
Pour décrire un des fils de Mélusine, Coudrette dit :
Et si ot visage estrange
1620 D'Orrible maniere et estrange.
Le vers 1620 est ainsi rapporté par les mss ADE(H)NPQS UV. Les autres,
BCFGLMORT (W présente une lacune), ont écrit le vers de la manière
suivante : Dont la couleur a chascun change.
Nous n'avons pu arriver à aucune conclusion satisfaisante sur les
rapports des cinq sous-groupes BW, CGLR, FM, OT et PS entre eux.
Quant à leur importance pour la tradition textuelle, ce sont BW et PS
qui sont les plus intéressants. CGLR et FM sont de bons manuscrits de
soutien qui nous montrent aussi la langue en train d'évoluer (ils écrivent plus
volontiers le conte que H quens, etc.). OT, comme nous l'avons dit, se font
surtout remarquer parce que Τ abandonne O pour un manuscrit du groupe
de D.

La tradition manuscrite : conclusions.


Il ressort de la discussion qui précède que la trame du récit est assez
uniforme dans tous les manuscrits, et les variations ne sont pas assez
grandes pour nous autoriser à, parler de rédactions divergentes ou de
remaniements profonds. C'est dans le détail des variantes qu'apparaît la
différence entre ces manuscrits. Les groupes qui se forment autour des
mss D et B ont chacun leur caractère particulier. Dans celui deD, les
manuscrits les plus importants pour la tradition textuelle sont Ν et Ε. Ν a
suivi un modèle qui devait ressembler beaucoup à, D. Quant à E, il a dû
suivre un très bon modèle, mais il était si peu soigneux qu'il ne saurait
être question de le prendre pour texte « de base ».
Les autres groupes, nous l'avons vu, ont tendance à, se concentrer
autour du ms B. Parmi eux, les manuscrits les plus intéressants sont B, à,
cause de l'intégrité de son texte, et PS parce qu'ils font un lien avec le
groupe de D. W serait plus important pour la tradition textuelle, s'il ne lui
manquait pas tant de vers (seize cents au début et environ neuf cents à la
fin), car son texte se rapproche beaucoup de celui de B.
Dans les exemples choisis pour la section « répartition des
manuscrits », nous avons montré du même coup que le texte de D était
cependant préférable à celui de B. Ce faisant, nous ne croyons pas tromper
le lecteur, mais il serait vain de nier qu'il n'est pas toujours facile de
trancher. C'est pour cette raison que nous avons détaillé avec tant de soin
les exemples des divers groupes, et n'avons laissé de côté aucun témoin
des groupes autour de B, dans l'établissement de l'apparat critique.
LA TRADITION MANUSCRITE DU « ROMAN DE MÉLUSINE » 233

L'inspiration poétique de Goudrette n'a rien de remarquable. L'intérêt


de son œuvre est dans l'histoire qu'elle présente. Gomme il n'a pas usé d'un
langage au-dessus du commun, nous n'avons pas à nous demander si le
tempérament poétique de l'auteur influence la langue, lorsque les
manuscrits nous présentent deux leçons différentes pour un même vers. Trop
souvent, nous sommes face à deux banalités qui nous laissent dans
l'embarras. Cependant, à force de lire et de relire le texte du Roman de Mélusine
et d'autres ouvrages du xive et du xve siècle, on finit par deviner les
expressions qu'aurait préférées l'auteur.
Notre choix de D, comme manuscrit « de base » ne s'est pas fait, nous
tenons à le dire, sur des critères purement subjectifs. La langue, la
supériorité évidente d'une majorité de vers, et un nombre relativement réduit de
vers faux ou omis ont déterminé notre préférence. D'ailleurs, au fur et à
mesure que le minutieux travail de collationnement se poursuit, nous
nous trouvons confirmée par l'évidence que nous donne la fréquentation du
texte.
Au terme de notre travail nous voudrions remercier vivement tous ceux
qui nous ont aidée au cours de nos recherches, bibliothécaires, savants et
amis qui ont revu le fond et la forme,
Et maintes autres bonnes gens
Qui ont le cuer moult large et gens.
Eleanor Roach.

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