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Association camerounaise de coaching scolaire

et de l’orientation scolaire, universitaire et


professionnelle

L’ENJEU PÉDAGOGIQUE DE
L’ORIENTATION PROFESSIONNELLE

KAME KEUSOM ANSELME JOSEPH


Psychologue scolaire

Les éditions A2C-SOSUP


Yaoundé Cameroun

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Introduction

L’orientation professionnelle désigne l’ensemble des processus et facteurs


sociaux et individuels conduisant à la répartition des individus dans les
différents métiers, professions ou emplois. Elle est étroitement liée à
l’orientation scolaire. En effet, d’un côté, certaines orientations professionnelles
exigent au préalable de s’engager dans certaines voies de formation. De l’autre,
de nombreuses séries ou filières de formation de l’enseignement général – bien
que ne prédéterminant de manière précise les métiers ou professions que l’élève
pourra ensuite exercer – conduisent néanmoins à circonscrire un ensemble plus
ou moins flou de métiers ou de professions possibles. (Mérieu).

De nos jours, l’orientation professionnelle est devenue un problème parce que


les métiers, ne s’exercent plus systématiquement de « père en fils » ou de « mère
en fille ». La grande majorité de nos concitoyens est assignée à refaire, à chaque
génération, un choix professionnel nouveau. (Mérieu). De plus, beaucoup de
ceux et celles qui s’engagent aujourd’hui dans la vie professionnelle changeront
sans doute plusieurs fois de métier avant leur retraite. En effet, les mutations
économiques, les évolutions technologiques et les changements sociétaux
rendent de moins en moins probable, l’hypothèse d’une carrière linéaire menée
de bout en bout à partir d’un choix initial et définitif, exception faite de la
fonction publique.

Aujourd’hui, quand un jeune s’interroge sur son avenir : « qu’est ce que je


deviendrai à la fin de mes études ? ». Quand les parents se demandent ce que
deviendront leurs progénitures à l’issue de leurs études. Quand l’enseignant ou
le chef d’établissement se pose la même question de savoir ce que deviendront
ses élèves après l’obtention de leurs diplômes. Ils sont tous envahis par
l’angoisse existentielle. L’orientation professionnelle est un véritable problème
existentiel.

Dans l'introduction de son ouvrage « L'orientation scolaire », Roger Gal pose


l'orientation comme formalisant le problème du bonheur, et plus précisément le
problème de la recherche du bonheur. Le problème se pose pour chaque individu
au sein de la société toute entière. Il s'agit donc pour chacun de trouver sa place
propre et cette quête passe d'abord, dans une société ordonnée sur les valeurs du
travail, par le choix des études et du métier. (Damée Franck)

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L'orientation scolaire et professionnelle se présente alors comme un acte de
construction de l'être social, un choix réflexif opéré au sein d'un collectif. En ce
sens, on peut dire que l'acte d'orientation scolaire et professionnelle dans nos
sociétés modernes, relève d'une symbolique comparable par certains aspects à
celle des rites initiatiques pratiqués au sein de nos sociétés traditionnelles par la
consultation du devin (qui prédit l’avenir), du sorcier (qui peut lancer le bon sort
ou le mauvais sort) des oracles (pour entendre les messages des ancêtres) (Père
Hebga), et par l’initiation et l’apprentissage des métiers exercer par ses parents.
Ces cérémonies et épreuves marquaient le passage des enfants à l'état adulte. Ils
devenaient alors des adultes en investissant des fonctions sociales pleines et
entières dans leurs villages. Il n’y avait pas de chômeurs si oui des paresseux.

Sorciers, oracles et devins remplissaient dans l’antiquité et dans nos sociétés


traditionnelles une fonction prédictive. Vous convenez avec moi que les
pratiques de conseil en orientation préexistaient bien antérieurement à leur
institutionnalisation au XX° siècle.

Sur un plan social, l'orientation scolaire et professionnelle pourrait donc être


considérée comme une forme transposée dans nos sociétés modernes des rites
divinatoires ou initiatiques qui caractérisaient nos sociétés traditionnelles.
S'orienter peut alors se comprendre comme naître à la vie d'adulte, ou plutôt
comme se naître donc, une auto-construction (Damée Franck).

Sur un plan existentiel, l'orientation considérée comme acte de choix réflexif


marque donc la responsabilité de l'individu envers son être à-venir (l'être qu'il
accouche par ses choix) et c'est de cette responsabilité que jaillit l'angoisse qui
nous révèle la finitude de notre condition humaine. Ici, l'orientation scolaire et
professionnelle, en tant qu'institution, est amenée à jouer un rôle d'appareil
d'exorcisation de l'angoisse existentielle au même titre que les rites de passage
pratiqués au sein des sociétés traditionnelles. (Damée Franck)

L’orientation professionnelle évolue par changement de paradigme scientifique.


Nous entendons par paradigme, la « conception théorique qui fonde les types
d'explication envisageables, et les types de faits à découvrir dans une science
donnée dans une communauté scientifique » (CNRTL, 2015). De l’antiquité
jusqu’au 21ème siècle notre ère, on recense six paradigmes historico-culturels
successifs (F. Danvers, 1988). :

3
Le paradigme des arts divinatoires

L’influence des Lumières relégua les anciennes techniques de divination qui


caractérisaient nos sociétés traditionnelles au rang des superstitions sans
fondements scientifiques. Dans le domaine de l’évaluation psychologique,
(Piéron, 1930) a critiqué les « méthodes charlatanesques en orientation
professionnelle qui risquaient de s’introduire dans l’orientation professionnelle
et la réduire à des pratique magiques.

Le paradigme des vocations

Mot dérivé d’une origine biblique : « Mouvement engageant toute la vie


affective et intellectuelle, qui porte quelqu'un à choisir une certaine profession »,
(Grand Larousse de la langue française, 1989). Dans le langage de la Révélation,
la vocation s’entend comme un « appel » (du verbe VOCARE avec pour
participe passé VOCATUM). Le nom est le plus souvent significatif de la
destinée de celui qui le porte.

L’appel porte sur le rôle qu’un homme ou une femme aura à jouer. A la
différence du destin, la vocation implique une finalité interne, une certitude
subjective, et s’inscrit dans la temporalité du plan divin sur le monde (l’action de
la Providence). (F. Danvers, 1988). Naville, (1972), conçoit la vocation comme
une sorte d’aptitude intérieure à appartenir à une profession donnée. Il souligne
les postulats religieux à la base de la théorie de la vocation et l’ambiguïté de
l’expression courante : « susciter une vocation » pour réfuter la thèse de la
théorie vocationnelle qui doit être écartée comme base d’une orientation
professionnelle objective.

Le paradigme d’une orientation basée sur les capacités

Le paradigme des capacités émerge avec le siècle des Saint-Simoniens. Entre


raison, imaginaire et utopie, il prône l’avènement d’une théocratie industrielle
fondée sur la hiérarchie des capacités.

Les trois grandes capacités fondamentales de la nature humaine sont : la capacité


intellectuelle ou scientifique ; la capacité sentimentale, ou religieuse, ou sociale ;
la capacité matérielle ou industrielle. La capacité se vérifie à l’occasion de la
tenue efficace de postes ou fonctions (capacité prouvée). Elle se distingue de la
capacité présumée (ou potentielle) à terme plus ou moins lointain. La capacité
désigne ainsi le talent ou l’habileté potentielle à accomplir quelque chose.

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Le paradigme des aptitudes ou l’idéologie des dons

La notion d’aptitude vient du latin, aptitudo, qualité de celui qui est apte ; aptus,
apte, propre à. A l’heure actuelle, les termes d’aptitude et de capacité sont
synonymes et tendent à se confondre dans le terme anglais ability. Faculté
évoquant une disposition naturelle. A la faveur des progrès de la
psychotechnique, la science des aptitudes, devenues réalité mesurable, va fournir
la garantie d’un ordre social légitime. Du côté de la psychologie scolaire, on
considérait que « la notion d’aptitude se substitue à la notion archaïque de
vocation.

Le paradigme de la convention des qualifications

Ce paradigme fait reposer la qualification sur l’acquisition d’un ensemble


d’habiletés professionnelles. La qualification désignait alors des « savoirs et
savoir-faire des ouvriers de métiers issus d’un apprentissage méthodique
complet »,

Les pratiques d’orientation semblent dépendre étroitement de l’organisation du


travail et des conceptions de la qualification. Il y a eu au XX° siècle, trois grands
modèles : le système professionnel de travail et l’orientation vers des métiers ; le
fordisme et l’orientation vers des emplois ; le modèle de la compétence et
l’orientation vers des fonctions professionnelles. (F. Danvers, 1988)

Le paradigme du modèle des compétences

La compétence : du latin competentia, « juste rapport », ce terme fut d'abord


utilisé dans le domaine juridique pour désigner l'aptitude d'une autorité à
effectuer certains actes, ou d'une juridiction à juger une affaire.

Pour les sciences de l’éducation, la compétence est un « savoir en usage »,


désignant une totalité complexe et mouvante mais structurée, opératoire c’est-à-
dire ajustée à l’action et à ses différentes occurrences (G. Malglaive, 1990). Non
observable directement, la compétence est induite de l’observation de
performances.

Beaucoup de psychologues s'accordent aujourd'hui pour reconnaître que la


compétence se prouve principalement dans la capacité à s'adapter à des
situations critiques, confuses, et à faire face à des évènements souvent
imprévisibles. Autrement dit, la compétence est inséparable de l'action et elle ne

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peut être véritablement appréhendée qu'au travers de l'activité par laquelle elle
s'exprime et dont elle permet la réalisation.

Dans le domaine de la psychologie du développement, parler de compétence,


c’est parler d’intelligence au sens le plus large du terme, de l’intelligence
opératoire du savoir. La compétence suppose en effet l’action, la modification
de l’environnement comme l’adaptation à cet environnement. (J. Bruner, 1983).

Dans la mesure où le fonctionnement intellectuel est dans une large proportion


invisible, « une pratique intensive du dialogue métacognitif est un atout évident
dans l’évaluation des compétences », Perrenoud, (2004).

La métacognition est la représentation que l’élève a des connaissances qu’il


possède et de la façon dont il peut les construire et les utiliser. Un des meilleurs
prédicteurs de la réussite scolaire est justement la capacité de l’élève à réfléchir
sur ses connaissances et à comprendre les raisonnements qu’il engage pour
utiliser et construire de nouvelles connaissances.

Pour développer des compétences métacognitives, l'élève devrait avant de


s’engager dans une filière d’études :

• essayer d'évaluer le degré de certitude des connaissances qu'il croit avoir;


• évaluer les difficultés qu'il a déjà rencontrées vis-à-vis des apprentissages
semblables;
• essayer d'anticiper les difficultés qu'il pourrait rencontrer;
• évaluer son attitude vis-à-vis cette nouvelle matière;
• identifier et évaluer les habiletés ou les aptitudes qu'il a pour ce nouvel
apprentissage;
• se donner un objectif personnel d'apprentissage en le choisissant lui-même
et en le justifiant;

La métacognition est indissociable de connaissance de soi et de confiance en soi.


C’est un des concepts-clés sur lesquels l’enseignant et le conseiller d’orientation
se basent pour élaborer la relation entre l’élève et le savoir. “ C’est par la
médiation cognitive que l’enseignant et le conseiller d’orientation donnent à
l’élève les moyens d’apprendre et d’élaborer son projet scolaire donc les clés
pour sa réussite scolaire (Barth, 1993).

Pour la psychologie du travail, l’apport de la notion de compétence est


primordial pour la connaissance des métiers, d’une tâche ou d’un ensemble
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d’activités. Les compétences peuvent être considérées comme des entités qui
«concernent la mise en œuvre intégrée d’aptitudes, de traits de personnalité et
aussi de connaissances acquises, pour mener à bien une mission complexe »
(Lévy-Leboyer, 1996).

En psychologie ergonomique, Leplat et De Montmollin, (2001), définissent les


compétences comme « ensembles stabilisés de savoirs, de savoir-faire, de
conduites types, de procédures standards, de types de raisonnement, que l’on
peut mettre en œuvre sans apprentissage nouveau ».

En se basant sur les définitions de la compétence du point de vue de la


psychologie du travail et de la psychologie ergonomique l’élève qui s’engage
dans une formation professionnelle ou un métier doit prendre conscience de ses
compétences :

• Des connaissances ou savoirs


• Du savoir-faire (compétence opérationnelle)
• Du savoir être ou attitudes (compétence comportementale, la motivation,
la créativité, responsabilités, discernement, etc.)
• Des méta-compétences, du sentiment d’efficacité personnelle (Bandura)
en trouvant une réponse aux questions : « qui suis-je ?, « qu’est-ce que je
vaux ?, « qu’est-ce que je dois ou sais ou peux dire sur moi » ?,) l’image
de soi et représentation de soi.

Cette prise de conscience de ses compétences se résume dans le terme


« métacompétence » qui est une compétence au second degré (Danvers, 1988).
Elle est la représentation que l’élève a des compétences qu’il possède et de la
façon dont il peut les construire et les utiliser pour choisir un métier ou une
formation professionnelle. Elle consiste à prendre du recul par rapport à ses
propres compétences pour les identifier et se les approprier dans un projet de
vie. S’orienter dans la vie se comprend comme une «métacompétence (Danvers,
1988).

L’une de trois missions du nouveau paradigme pédagogique adopté au


Cameroun, à savoir L’Approche Par Compétence (APC), consiste à aider chaque
élève (notamment celui de l’enseignement général) à construire sa
métacompétence. Ce qui est maintenant nouveau, c’est la conscience et
l’urgence d’aider les élèves à avoir pour visée de devenir compétent en tout

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domaine d’activité, de réaliser leurs potentialités et de se centrer sur leurs
habiletés plutôt que de se limiter à leurs déficiences.

Les caractéristiques de l’approche par compétences

L’APC est une méthodologie transposée dans le domaine de l’éducation après


avoir été initialement appliquée dans la formation professionnelle au niveau des
entreprises. Pour De Ketele (2000), l’APC « cherche à développer la possibilité
par les apprenants de mobiliser un ensemble intégré de ressources pour résoudre
une situation-problème appartenant à une famille de situations. ». Du point de
vue de ce paradigme pédagogique, les savoirs/savoir-faire/savoir-être doivent
être réinvestis dans des situations empruntées à la vie réelle. L’APC poursuit
selon Roegiers (2000) trois objectifs principaux :

1. « Mettre l’accent sur ce que l’élève doit maîtriser à la fin de chaque année
scolaire, plutôt que sur ce que l’enseignant doit enseigner. Le rôle de celui-ci est
d’organiser les apprentissages de la meilleure manière pour amener ses élèves au
niveau attendu ». Nous retrouvons là une référence directe à la centration sur
l’apprenant, et une quasi-reformulation de la définition d’un objectif.

2. « Certifier les acquis de l’élève en termes de résolution de situations


concrètes, et non plus en termes d’une somme de savoirs et de savoir-faire que
l’élève s’empresse d’oublier, et dont il ne sait pas comment les utiliser dans la
vie active ». En d’autres termes, il s’agit ici de l’évaluation en termes de savoir-
agir dans la réalité et non plus de restitution de savoirs déconnectés du réel.

Un mécanicien de réparation automobile doit avoir appris des éléments de


mécanique, de pneumatique et d'électricité automobile et d’électronique, mais il
n’est considéré comme compétent que s’il est capable d'utiliser toutes ces
connaissances pour détecter et réparer la panne d’une voiture. On peut alors dire
que cet élève a acquis une compétence. L’APC est ancrée sur les principes de
l’éducation active, à l’enseignement expérientiel de Dewey (à son célèbre
principe du « Learning by doing »).

3. « Donner du sens aux apprentissages, montrer à l’élève à quoi sert tout ce


qu’il apprend à l’école, à situer les apprentissages par rapport à des situations
qui ont du sens pour lui, et à utiliser ses acquis dans ces situations ».
L’adolescent est souvent à la recherche du sens à donner à un apprentissage :
« À quoi cela va-t-il me servir ? » L’enseignant pourra répondre à cette question

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en mettant en évidence les liens entre les apprentissages scolaires et les
compétences et les réalités du monde du travail.

Le thème de cette année scolaire porte sur « Professionnalisation des


enseignements pour la formation des citoyens aptes à soutenir la croissance ».
Ce thème soulève un problème, celui de savoir comment l’enseignant, qui n’est
pas le spécialiste de toutes les professions, qui n’est professionnel que de
l’enseignement et de la discipline dans lesquels il s’est spécialisé, peut
néanmoins professionnaliser son élève, ou encore le rendre professionnellement
employable. (Ndzomo-Molé).

La professionnalisation se réfère au processus de production des compétences


qui caractérisent une profession. La professionnalisation des enseignements
consiste de ce fait, notamment dans l’enseignement général, à mettre
systématiquement en évidence les liens entre les apprentissages scolaires et les
compétences et les réalités du monde du travail d’abord dans l’environnement
socioéconomique immédiate de l’élève, ensuite au niveau national surtout dans
les secteurs porteurs de l’économie nationale et cela tout au long du parcours
scolaire (curricula). Cette mission de l’APC contribue à la construction de la
métacompétance de l’élève qui est un facteur incontournable de l’orientation
professionnelle.

École devient orientante si le paradigme pédagogique de l’approche par


compétence y est vraiment est ancrée et ne se réduit pas à une simple profession
de foi. Il va s’en dire que dans ces conditions, l’orientation scolaire et
professionnelle s’impose comme un enjeu pédagogique. La mission de
l’orientation est soulignée comme étant l’engagement de tout le personnel
scolaire et d’autres partenaires pour faciliter chez l’élève le développement de
son identité et de sa maturité vocationnelle tout en l’aidant à planifier son projet
de vie-travail et à acquérir des valeurs et des compétences en employabilité.
(Gingras) Dans ce contexte, les conseillers d’orientation utilisent l’approche
orientante comme stratégie pédagogique.

Cette stratégie pédagogique vise le développement de l’élève dans toutes les


dimensions de sa personne en l’invitant à s’engager activement dans sa
démarche d’apprentissage et d’orientation et ce, grâce aux multiples expériences
vécues lors de l’application du principe d’infusion (intégration de notions
relatives à la carrière et au développement de carrière dans toutes les activités
scolaires et parascolaires) et du principe de collaboration (engagement concerté

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de tous les partenaires éducatifs dans la formation et l’orientation des élèves).
Une telle démarche favorisera les apprentissages des élèves et leur permettra de
mieux se connaître et de mieux connaître leur environnement. (Gingras)
L’approche par compétences prend tout son sens dans l’approche orientante
(Pelletier.)

L’approche orientante vise trois axes de développement chez l’élève :

1. Conscience de soi, de son potentiel et de ses modes d'actualisation

Connaissance de ses qualités, intérêts, talents; responsabilité face à ses succès et


ses échecs; aspirations personnelles et professionnelles; goût du défi; découverte
du sens du travail scolaire; connaissance des ressources du milieu scolaire;
enjeux liés aux choix et à la réussite dans les disciplines scolaires; voies
d'apprentissage offertes par le système scolaire québécois et leurs exigences.

2. Appropriation des stratégies liées à un projet

Lien entre la connaissance de soi et ses projets d'avenir; visualisation de soi dans
différents rôles; projets d'avenir en rapport avec ses intérêts et aptitudes;
stratégies associées aux diverses facettes de la réalisation d'un projet.

3. Connaissance du monde du travail, des rôles sociaux, des métiers et des


professions

Nature et exigence des rôles liés aux responsabilités familiales ou


communautaires; professions, métiers et modes de vie en rapport avec les
disciplines scolaires ou avec son milieu immédiat; produits, biens et services en
rapport avec les professions et les métiers; lieux de travail ( usines, commerces
et entreprises de la région ); fonctions principales et conditions d'exercice des
différents métiers et professions; exigences du monde du travail en comparaison
avec les exigences de son métier d'élève.

L’approche orientante propose donc diverses activités et projets fournissant à


l’élève l’occasion de faire des liens entre ce qu’il est, ce qu’il apprend et ce qu’il
veut faire, tout en demeurant responsable de sa démarche.

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L'approche orientante se fonde sur trois principes ou règles de fonctionnement

1 Le principe de l’infusion : (correspond à la 3ème mission de l’APC tel que


défini par Roegiers)

Le principe de l'infusion demande à l'enseignant d'intégrer au contenu de son


cours des références à la carrière et au monde du travail. Ce nouveau mode
d'exploration permettra d'atteindre plusieurs objectifs.

a) Il offrira tout d'abord la possibilité de contextualiser les enseignements


transmis en classe en rendant possible l'établissement de liens concrets
entre la matière enseignée et le marché du travail. Les jeunes pourront
ainsi avoir une idée plus précise des applications que pourront avoir les
notions qui leur sont enseignées dans l'exercice d'un futur métier ou d'une
future profession. Outre cette contextualisation,

b) ce mode d'exploration aura comme effet d'augmenter la motivation des


élèves par rapport aux différentes matières enseignées. En effet, en
établissant des liens concrets entre les matières et les professions, les
élèves seront plus conscients des applications possibles de leurs
apprentissages dans leur future vie professionnelle, ce qui aura
probablement comme effet d'augmenter leur motivation à apprendre.

c) l'exploration par matières scolaires offrira la possibilité non seulement


d'avoir une liste de professions liées à un concept précis enseigné dans
une matière, mais également d'avoir une multitude de renseignements à
jour et fiables concernant ces professions, les programmes de formation
rattachés à ces dernières, les établissements qui offrent ces programmes,
et les perspectives d'emploi.

Ce nouveau mode d'exploration constituera donc un outil incontournable autant


pour les enseignants qui désirent rendre plus concrets et accessibles les concepts
enseignés, que pour les autres intervenants du milieu scolaire qui souhaitent
élaborer des activités dans le cadre de l'approche orientante. Il pourra s'avérer
également très intéressant pour les élèves voulant explorer les professions liées à
certaines matières ou parties de matière qui les attirent particulièrement. (Denis
Pelletier).

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2 Le principe de la collaboration

Le principe de collaboration est aussi requis entre l’école et la communauté


puisque la réalité du travail se trouve dans les commerces, les entreprises et les
organismes publics et parapublics de tout ordre. Les visites d’entreprises, les
stages, les carrefours-métiers, les « zoom sur un métier ou emploi » les portes
ouvertes sont des événements et des alliances à établir. L’idée avec le principe
de collaboration est de donner accès à de l’information vivante et à de
l’observation en direct.

3 Le principe de la mobilisation

Le principe de la mobilisation concerne l’intérêt de l’élève à sa propre


orientation ainsi que sa motivation à faire des choix et à participer aux activités
d’exploration proposées. Sinon, l’approche orientante est sans effet. Comment
amener un jeune à s’intéresser à son avenir et à s’impliquer dans une démarche
personnelle? Que faut-il faire pour le faire passer en mode identitaire et
responsable? …

Le processus d’orientation suppose au départ une attitude motivée. Dans ce


cadre, c’est la manière d’intervenir auprès de l’élève qui sera susceptible
d’éveiller chez lui le désir de réussir et de s’orienter. Par exemple, en lui faisant
voir qu’il a un pouvoir sur l’environnement, qu’il peut réussir des buts et qu’il
est concerné par l’avenir. On parle donc de sentiment d’efficacité et d’estime de
soi.

Plusieurs acteurs sont appelés à jouer un rôle dans l’Approche orientante, à


savoir :

1. La Délégation Départementale ou Régionale

Fait la promotion de l’Approche orientante. Soutient les établissements dans la


réussite de ce projet. Prévoit des mécanismes de collaboration avec des
partenaires du monde du travail. Détermine des moyens d’évaluer les résultats
obtenus des services et des activités vécues dans le cadre de l’Approche
orientante. S’assure de mettre en place une équipe, avec les ressources
nécessaires, pour implanter de l’Approche orientante dans tous les
établissements scolaires de sa circonscription.

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2. La Direction ou l’Administration de l’école

Assure le leadership pour la mise en place de l’Approche orientante dans


l’établissement. Sensibilise et mobilise le personnel et les parents d’élève.
Supervise le développement de l’Approche orientante et facilite son
implantation.

3. Le Conseil d’établissement

Approuve la tenue des activités de l’Approche orientante proposées par la


Direction de l'établissement et soutient sa mise en place.

4. L’animateur pédagogique, le conseiller pédagogique et l’inspecteur


pédagogique

Agissent en tant que personnes ressources auprès des enseignants et des


conseillers d’orientation pour créer des situations d’apprentissage et
d’évaluation comprenant des contenus d’information scolaire et professionnelle
ou d’orientation.

5. L’élève

S’implique dans les décisions qui le concernent. Participe activement à toutes les
activités d’Approche orientante afin de mieux connaître ses forces, valeurs,
aptitudes, intérêts ainsi que le marché du travail. Apprend à utiliser les
différentes ressources de son milieu. S'informe et discute de ses choix scolaires
et professionnels avec ses parents et les conseiller d’orientation.

6. Les parents

Ont un rôle important à jouer dans l’implantation de l’approche orientante non


seulement auprès de leurs enfants mais aussi auprès de leurs camarades et de
l’école qu’ils fréquentent.

Auprès de leur enfant :

a) L’aider à découvrir ses forces, ses limites, ses talents, ses intérêts à travers
ses expériences de travail à la maison et ses activités de loisirs.
b) Parler avec lui de ses qualités, de ses goûts et de ses centres d’intérêts au
regard de ses choix de carrière.

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c) Parler avec lui de ses études, de son avenir professionnel, de ses choix
scolaires et professionnels en perspective.
d) L’encourager dans son cheminement scolaire et professionnel en
s’intéressant entre autres à ses réalisations scolaires.

Dans l’école :

a) Venir à l’école parler aux élèves de leur parcours professionnel, de leurs


professions, de leur métiers actuels, de l’utilité des diverses matières scolaires
dans leurs emplois et métiers.
b) Participer à l’implantation de l’approche orientante soit au niveau du
conseil d’établissement, à travers les associations des parents d’élèves ou
autres regroupements de parents.
c) Participer à des rencontres d’information et d’orientation scolaires et
professionnelles (carrefour-métiers) organisées par l’école.
d) Organiser pour des élèves une visite dans les entreprises où ils travaillent.

7. Les enseignants

a) Les enseignants sont les responsables quotidiens de l’apprentissage de


leurs élèves, de leur développement et de leur environnement; ce sont donc
eux qui sont davantage en mesure d’établir des liens entre les apprentissages
scolaires et les réalités du monde du travail. (Infusion).

b) Sans être des experts de l’information et de l’orientation scolaire et


professionnelle, ils contribuent de diverses façons au développement de
carrière de leurs élèves puisqu’ils peuvent leur donner la possibilité
d’explorer (stade d’exploration selon la théorie de Super) et de tester le
monde du travail et ses exigences et de s’explorer eux-mêmes en relation
avec ce monde du travail.

c) Ils doivent reconnaître que l’approche orientante n’ajoute et n’enlève rien


au contenu et aux compétences de leurs disciplines scolaires; ils sont plutôt
amenés à enseigner d’une manière différente et d’une façon qui devrait être
plus motivante pour leurs élèves et pour eux-mêmes à cause du sens qu’ils
donnent aux apprentissages.

Il importe de relever que tous les rôles ci-après mentionnés ne peuvent être
remplis par les enseignants sans une préparation suffisante et un support continu
d’un conseiller d’orientation scolaire et professionnelle.

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8. Le milieu économique de la localité

Collabore avec les différents intervenants de l’établissement en agissant à titre


de parrains ou de mentors d’élèves à l’occasion de stages d’observation ou des
carrefours-métiers, en présentant des démonstrations d’activités professionnelles
spécifiques en classe ou en milieu de travail

9. Les institutions d’enseignement

Les centres de formation professionnelle, les écoles et instituts spécialisés des


niveaux secondaire et postsecondaire, et les universités ont des rôles importants
à jouer auprès des élèves dans l’approche orientante pour favoriser leur
orientation et leur transition scolaires et professionnelles :

a) Rencontrer les élèves en classe et dans l’école, lors de journées-carrières


ou autres activités du genre, pour les informer sur les programmes
accessibles, les conditions d’admission, le fonctionnement de leur institution,
etc.
b) Faire des démonstrations des connaissances et habiletés nécessaires en
français, en mathématique, en sciences ou autres disciplines pour effectuer
diverses tâches professionnelles.

10.Le conseiller d’orientation

a) Veille à l’intégration du programme d’orientation-conseil tel que prescrit


dans le Cahier des charges du conseiller d’orientation scolaire au Cameroun
dans le projet éducatif de l’école. En sensibilisant le personnel enseignant et
les autres personnels de l’école au concept d’approche orientante.
b) Guide, conseille et supporte les enseignants dans la planification, le
développement ou l’adaptation de stratégies et d’activités d’information et
d’orientation scolaires et professionnelles; entre autres, il documente les
enseignants sur divers aspects du monde scolaire et du monde du travail.
c) S’assure que les enseignants ont en main le matériel didactique et les
ressources requises pour la réalisation des activités d’infusion.
d) Se préoccupe d’impliquer les parents dans le processus d’orientation de
leurs enfants.
e) Répond aux demandes des élèves individuellement ou en groupe grâce à
son expertise en counselling et en psychométrie à travers :

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– L’information scolaire et professionnelle,
– Les techniques de prise de décision en vue de choix scolaires ou
professionnels, transition scolaire ou professionnelle, etc.).
– La connaissance de soi par l’administration des tests psychométriques :
tests de motivation, les questionnaires d’intérêts professionnels, les tests
de personnalité et des tests d’aptitudes cognitives.

Nous sommes tous unanimes que l’orientation professionnelle est une


construction. Il n’y a pas des professions ou des métiers inscrits dans les gènes
des élèves. Les tests qu’administrent les conseillers d’orientation ne servent pas
à détecter les filières d’études et les métiers inscrits dans les gènes des élèves. Ils
servent tout simplement à aider les élèves dans la construction de leurs
métacognitions et de leurs métacompétences.

L’évaluation psychométrique en milieu scolaire poursuit deux objectifs :


l’évaluation pronostique (comme en orientation scolaire et professionnelle) et
l’évaluation diagnostique pour réguler l’apprentissage. En orientation, il s’agit
d’évaluer les aptitudes (les aptitudes peuvent être innées ou acquises) afin
d’estimer la probabilité de réussite d’un élève dans un apprentissage. Il peut
aussi s’agir d’analyser des situations de difficultés d’apprentissage, des besoins,
les profils, les pré-requis des apprenants, d’apprécier leurs compétences, leurs
difficultés éventuelles au début ou au cours d’un apprentissage, afin d’élaborer
des repères pédagogiques ou pour organiser la suite des apprentissages. Ce type
d’évaluation exerce les fonctions de prévention ou de remédiation.

Illustrons par un exemple précis en nous basant sur les tests psychométriques
administrés dans nos établissements. Ces instruments mesurent les aptitudes
cognitives de l’élève, à savoir deux types d’intelligence : l’intelligence fluide et
l’intelligence cristallisée (Cattell)

– L’intelligence fluide se rapporte à la pensée logique abstraite, aux


raisonnements déductif et inductif, à la capacité de résolution de
problèmes, à la capacité d’un individu à s’adapter à des situations
nouvelles, et à faire preuve de logique. Cette forme d’intelligence est en
lien direct avec la mémoire de travail. (tests mesurant l’Intel. fluide : D48,
D70, MGM, les Séries Progressive, etc.)
– L’intelligence cristallisée correspond à la capacité d’utilisation
d’habiletés, de savoirs et des expériences. Elle est l’expérience intelligente
créée avec le potentiel de l’intelligence fluide. L’Intelligence cristallisée est

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une composante fortement influencée par l’environnement. Elle a tendance
à progresser dans un environnement favorable. Cette forme d’intelligence
est liée à la mémoire à long terme. (tests mesurant l’Intel. Cristal. le BV11,
le PRC KRX 23, le TEST MÉCANIQUE, le Test de raisonnement
mathématique et autres tests de connaissances scolaires.

Tous ces deux types d’intelligence sont fortement corrélés à la réussite des
apprentissages. Les résultats à ces tests peuvent permettre de faire des
pronostiques sur la réussite d’un élève dans un apprentissage voire une
profession, à condition qu’on prenne en compte ses motivations et intérêts
professionnels, et les caractéristiques de sa personnalité.

Dans le cas de la prévention, de remédiation ou du suivi psychopédagogique, les


informations recueillies sur l’élève peuvent permettre à l’enseignant et au
conseiller d’orientation d’ajuster leurs stratégies pédagogiques de remédiation
en fonction du niveau des aptitudes cognitives de l’élève à condition qu’on
prenne en compte : la motivation scolaire de l’élève, son « image de soi » (le
sentiment d’efficacité personnelle), ses attitudes envers l’école, ses aspirations
scolaires, sa méthode de travail, les caractéristiques de sa personnalité,
l’engagement parental, et la supervision parentale.

L’une des caractéristiques de l’approche par compétences, c’est qu’elle donne la


possibilité à l’élève d’estimer les chances d’exercer les différents métiers de son
environnement socioéconomique, notamment ses métiers de rêve (en d’autres
termes son employabilité), à travers l’activité d’infusion qu’exercent les
enseignants en mettant en évidence les liens entre les apprentissages scolaires,
les compétences et les réalités du monde du travail.

La mauvaise note obtenue par l’élève n’est pas pour autant nécessairement une
preuve de son inaptitude. Quand un élève a des mauvaises notes dans une
matière, ou même dans la plupart. Au lieu de l’étiqueter comme «cancre», ou de
le classer comme « vaut-rien », c’est-à-dire inemployable à tout, excepté les
tâches serviles, Il est plus pédagogique de rechercher les raisons de ces
mauvaises performances, les causes d’inertie ou les obstacles épistémologiques.
(Ndzomo-Molé).

Pour Bandura les croyances d'un élève à l'égard de ses capacités à accomplir
avec succès une tâche ou un ensemble de tâches sont à compter parmi les
principaux mécanismes régulateurs de ses comportements. Les causes des

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déperditions scolaires sont en grande partie de nature pédagogique (Ndzomo-
Molé).

L’une des missions de l’approche par compétence c’est d’assurer à tous les
élèves des chances égales d’émancipation sociale. L’école n’est pas là pour
sélectionner une élite, mais pour former un maximum de citoyens dans une
société où le niveau de compétence moyen exigé par l’évolution technologique
et les idéaux démocratiques ne cesse de s’élever. Elle doit donc mettre en œuvre
une pédagogie de la réussite. Le respect des caractéristiques de chacun est une
condition d’un enseignement démocratique qui cherche à doter le plus grand
nombre d’élèves d’un “outillage” commun, tout en permettant à ceux qui
peuvent aller plus loin d’encore progresser (Mc Fadden et St-Pierre).

Cette mission entre en ligne droite dans l’un des objectifs primordiaux de
l’orientation scolaire au Cameroun, à savoir : promouvoir chaque élève au
niveau de formation le plus élevé auquel il peut accéder et faciliter son insertion
harmonieuse dans la vie professionnelle. Il ne s’agit rien d’autres que de réaliser
un des trois objectifs de l’éducation tel que formalisés par John Dewey, à
savoir : le développement naturel, la culture et l’efficacité sociale qui consiste à
une insertion harmonieuse et judicieuse des élèves dans la vie sociale et
économique.

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