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Description du monde moderne
PAR FRANÇOIS TRICAUD
Marx, les
Si j'écris et qu'il faille absolument
quatre grouper :ces
noms suivants auteurs deux
Platon, Epicure, Kant,
par deux, je serai spontanément porté, sans pour autant
fermer les yeux sur leurs différences, à rapprocher d'une part
Platon de Kant, et d'autre part Epicure de Marx. La seule
justification des considérations qui vont suivre, qui puisse un
peu excuser leur banalité, c'est qu'elles invitent à rapprocher
plutôt Platon d'Epicure et Kant de Marx.
Il s'agit en d'autres termes de réfléchir sur l'opposition entre
ce qui est moderne et ce qui ne l'est pas. Je suis parfaite
ment conscient du caractère superficiel d'une telle approche de
l'histoire de la pensée : mon métier m'invite journellement à
l'attitude inverse, qui est l'étude aussi minutieuse que pos
sible de chaque auteur pris en particulier. Mais je pense aussi
que cette indispensable étude au microscope peut nous faire
oublier les grandes masses du paysage, et qu'il est salubre, de
temps en temps, de se retourner vers ces structures plus vastes,
qui sont comme le champ de force au sein duquel s'organisent
les structures plus fines constituées par exemple par tel ou
tel système philosophique.
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LE MONDE MODERNE
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FRANÇOIS TRIGAUD
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LE MONDE MODERNE
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FRANÇOIS TRICAUD
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LE MONDE MODERNE
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FRANÇOIS TRICAUD
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LE MONDE MODERNE
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FRANÇOIS TRIG AU D
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LE MONDE MODERNE
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FRANÇOIS TRICAUD
pris que par les savants, les philosophes par les philosophes,
et les peintres par une très petite frange du public cultivé.
L'autre raison que j'entrevois n'est pas qualitative, mais quan
titative ; peut-être la masse des « informations » (au sens
moderne) qui assaillent l'esprit humain est-elle trop grande
pour pouvoir être dominée à moins d'un long apprentissage.
Ce serait là un cas particulier du problème général de 1' « em
bouteillage » sur lequel je reviendrai. Peut-être enfin, diront
les optimistes, n'est-ce qu'un phénomène de sevrage : des
masses humaines ne passent pas de la civilisation agraire à la
civilisation industrielle sans subir quelques siècles de tâtonne
ments et d'incertitudes6. Et qu'est-ce que quelques siècles, si
l'homme est sur la terre depuis deux millions d'années ?
Quoi qu'il en soit, le fait est que les phénomènes de pointe
du monde moderne ne se retrouvent plus à l'échelle de la
masse que d'une manière affaiblie et déformée (est-il nécessaire
de préciser que nul n'appartient entièrement à la pointe ou
à la masse ? La frontière passe en chacun). Le premier phé
nomène de masse à mentionner, ce serait donc l'importance
même des phénomènes de masse, leur décalage peut-être crois
sant, au moins pour la période que nous vivons, par rapport
aux phénomènes de pointe.
S'il faut maintenant tenter une description un peu plus
détaillée, la méthode la plus simple consistera peut-être à suivre
le même ordre qui nous a servi à parcourir les phénomènes de
pointe, et, dans chaque cas, à comparer. A la rigueur intellec
tuelle, ancrée dans l'expérience de la pensée scientifique, répond,
au niveau de la masse, un mythe un peu enfantin de la science,
où celle-ci apparaît comme une puissance quasi magique, et
illimitée en droit. Au sens de l'historicité de la condition
humaine répond simplement, je crois, le sentiment aigu du
changement, perceptible désormais en beaucoup moins qu'une
vie humaine, et éprouvé tantôt dans la griserie, tantôt dans
le vertige. De l'idée de l'homme désormais responsable de la
création de ses valeurs, on ne retrouvera dans le phénomène
de masse que la ruine des valeurs traditionnlles. En effet, il n'y
a peut-être pas beaucoup de façons de fonder l'idée de devoir :
ou bien on accepte la difficile méditation kantienne sur l'auto
nomie de la raison (les deux racines du mot autonome, « soi
même » et « loi », étant ici également importantes) ; ou bien,
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LE MONDE MODERNE
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FRANÇOIS TR1CAUD
à condition de considérer celle-ci dans ses phénomènes de
masse). Mais on peut espérer, après tout, que cet affadissement
que subit l'esprit moderne à mesure qu'il se diffuse n'est qu'un
phénomène de retard, d'inertie, et qu'avec le temps un nombre
croissant d'hommes auront la possibilité de vivre l'aventure
de leur époque sous sa forme supérieure. Ce qui me paraît encore
plus grave que les cas où le phénomène de masse n'offre qu'une
image trouble du phénomène de pointe, ce sont les cas où ce
dernier ne se reconnaît plus du tout dans ses enfants, je veux
dire dans les phénomènes de masse qu'il a déclenchés. C'est ce
que j'appellerai les phénomènes de masse par contrecoup.
Le problème ici posé est comparable à celui des phénomènes
de diffusion vulgarisante, mais en partie seulement. Autrement
dit, à côté de cette maladie du monde moderne qui consiste
en ce que son esprit, dans ce qu'il a de plus vivant, ne parvient
que très médiocrement à animer la masse des sociétés modernes,
il existerait un autre mal, plus inquiétant encore, consistant
en ce que l'esprit moderne engendrerait dans le monde moderne
des effets à la fois massifs et accidentels, nullement inclus dans
le projet constitutif de la modernité. Là encore, il y a des pré
cédents. Les lecteurs du Traité de psychologie de Pradines
savent que pour lui la douleur serait apparue dans l'évolution
animale par l'effet d'un semblable contrecoup accidentel. Dans
un tout autre ordre, les guerres de religion sont évidemment
un effet de la prédication évangélique peu conforme à l'inten
tion évangélique. Il est donc bien douteux que ces ruses de la
déraison soient le privilège exclusif de notre époque. Je pose
cependant la question de savoir si elles n'y atteignent pas, qua
litativement et quantitativement, une ampleur remarquable.
Par définition, de tels phénomènes, relevant de la contin
gence, se prêtent mal à un recensement méthodique. En outre,
ils sont à coup sûr trop nombreux pour pouvoir entrer dans
un exposé unique. On n'attend pas de moi que je parle des
beatniks, de la guerre moderne, de l'importance des névroses
dans les sociétés industrielles, et de la difficulté qu'éprouve
le monde moderne à se faire une représentation cohérente du
statut de la femme 8. Devant ce foisonnement de problèmes j'ai
bien dû me limiter (sans ignorer ce que ma démarche avait
d'arbitraire) et je n'en signalerai que deux.
8. Parmi ces omissions inévitables, une des plus fâcheuses est sans
doute de n'avoir pas traité systématiquement de la « socialisation »
de la vie humaine, qui pour une part est la conséquence directe de
la volonté moderne d'organiser rationnellement tout ce qui peut
l'être, et qui pour une autre part se développe souvent sous une
forme anarchique et asservissante.
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LE MONDE MODERNE
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FRANÇOIS TRICAUD
Ceux qui ont bien voulu me suivre jusqu'ici ont sans doute
ressenti qu'après avoir suivi des lignes assez précises, mon
exposé est devenu de plus en plus tâtonnant à mesure que je
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LE MONDE MODERNE
François Tricaud.
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