OBSTETRICS
Induction du travail après une version par
manœuvres externes pour siège réussie : un
sur-risque de césarienne?
J. Boujenah, MD;1,2 C. Fleury, MD;1 I. Pharisien, MD;1,2 A. Benbara, MD;1 M. Benchimol, MD;1
L. Carbillon, MD, PhD1,2
1
Pôle femmes et enfants, groupe hospitalier universitaire Paris Seine-Saint-Denis, site Jean-Verdier, Bondy, France
2
Université Paris 13, Sorbonne Paris Cité, Bobigny, France
Résumé
Objectif : L’objectif de ce travail est d’étudier l’effet d’une version par
manœuvres externes (VME) réussie sur le risque de césarienne
lors de la tentative d’accouchement par voie basse (TAVB) après
induction du travail.
Méthode : Étude de cohorte rétrospective observationnelle cas-
témoins appariés de type exposé-non exposé unicentrique.
L’ensemble des patientes qui ont accouché après une VME
réussie et qui ont bénéficié d’une induction du travail entre 1998
et 2016 ont été incluses. Au total, 88 patientes cas ont été
comparées avec 176 témoins (présentation céphalique
spontanée). L’appariement a été effectué sur l’année de
naissance de l’enfant, la parité, l’âge gestationnel, l’indication et le
mode d’induction du travail.
Le critère de jugement principal était le risque de césarienne. Une
analyse univariée puis une analyse multivariée par régression
logistique ont été effectuées.
Résultats : Le taux de césariennes était significativement plus élevé
après une VME (22 % c. 13,1 %; P = 0,039) en particulier en cas
de grossesse prolongée (55 % c. 8,2 %; p < 0,05). En analyse
univariée, l’âge (31 ans et 4 mois c. 24 ans et 6 mois; p < 0,01) et
le débit maximum d’ocytocine utilisé (72 ml/h c. 68 ml/h; p = 0,04)
étaient plus élevés dans le groupe cas. Après analyse multivariée,
le risque de césarienne était significativement supérieur après une
VME réussie (rapport de cotes [RC] ajusté : 1,946; IC à 95 % :
1,017-3,772) et après une maturation par prostaglandines (RC
ajusté : 1,951; IC à 95 % : 1,097-3,468) alors que la multiparité
diminuait ce risque (RC ajusté : 0,208; IC à 95 % : 0,114-0,377).
Conclusion : Une VME réussie accroît le risque de césarienne lors
d’une induction du travail ultérieure.
Abstract
Objective: To assess the effect of successful external cephalic
version (ECV) on the risk of caesarean section (CS) during
attempted vaginal delivery after induction of labour.
Key Words: Successful, cephalic, version, delivery, induce, labor
Auteur correspondant : Dr Jérémy Boujenah, Pôle femmes et
enfants, groupe hospitalier universitaire Paris Seine-Saint-Denis,
site Jean-Verdier, Bondy, France. jeremy.boujenah@gmail.com
Conflit d’intérêt : Aucun déclaré.
Received on July 31, 2017
Accepted on October 16, 2017
Methods: A unicentric matched retrospective observational case-
control cohort study with exposed and unexposed groups. All
pregnant women who had an induction of labour after a successful
external cephalic version (sECV) between 1998 and 2016 were
included. A total of 88 cases were compared with 176 controls
(spontaneous cephalic presentation), matching for the year of
delivery, parity, gestational age, indication and mode of induction
of labour.
The main outcome measure was the risk of caesarean. A univariate
analysis and a multivariate logistic regression analysis were
performed.
Results: The caesarean section rate was significantly higher after
sECV (22% versus 13.1%; p = 0.039) especially for postdate
pregnancy (55% versus 8.2%; p < 0.05). For the univariate
analysis, age (31 years and 4 months versus 24 years and 6
months; p < 0.01) and maximal speed of oxytocin infusion (72 ml/h
versus 68 ml/h; p = 0.04) were higher in the case group. The
multivariate analysis showed that the risk of caesarean section
was significantly increased after an sECV (aOR 1.946; 95% CI
1.017–3.772) and after the use of prostaglandins for ripening
(aOR 1.951; 95% CI 1.097–3.468), and decreased for multipara
(aOR 0.208; 95% CI 0.114–0.377).
Conclusion: Women who have a successful ECV are at increased
risk of caesarean section after subsequent induction of labour.
Copyright © 2017 The Society of Obstetricians and Gynaecologists of
Canada/La Société des obstétriciens et gynécologues du Canada.
Published by Elsevier Inc. All rights reserved.
J Obstet Gynaecol Can 2017;■■(■■):■■–■■
https://doi.org/10.1016/j.jogc.2017.10.033
INTRODUCTION
e siège représente 3 à 4 % des accouchements à terme1, 2
L et peut être considéré comme une présentation eutocique
lorsque les critères d’acceptabilité de la voie basse sont
respectés3, 4. Néanmoins, le choix de la voie d’accouchement
est l’objet de controverses depuis la publication du Term
Breech Trial en 20005. La publication d’études prospectives
et rétrospectives laissant supposer un excès de morbi-
mortalité néonatale a suscité un regain d’intérêt pour la
■■ JOGC ■■ 2017 • 1
OBSTETRICS
version par manœuvres externes (VME) visant à réduire le
nombre de présentations du siège à terme, en travail6.
Cependant, alors qu’une fiche d’information issue du Collège
national des gynécologues et obstétriciens français mentionne
que le pronostic d’un accouchement par les voies naturelles
en cas de VME réussie redevient le même que pour les fœtus
étant d’emblée en présentation céphalique, plusieurs études
récentes indiquent un sur-risque de césarienne en cours de
travail après une VME réussie7-17.
Cependant, ces études ne sont pas exemptes de biais et de
facteurs confusionnels. L’absence ou l’excès d’appariement
sur de nombreux facteurs (poids de naissance, terme, parité,
utilisation d’ocytociques pendant le travail, indication et in-
duction du travail, recours à la péridurale) limitent
l’interprétation et l’extrapolation des résultats18.
De plus, l’explication de ce sur-risque de césarienne n’est
pas démontrée (arrêt de la progression du travail et/ou
anomalies du rythme cardiaque fœtal [RCF])7.
Dès lors, afin de mieux comprendre cette association entre
une VME réussie et la pratique d’une césarienne en cours
de travail, il semble nécessaire de distinguer les femmes selon
qu’il s’agit d’un travail spontané (situation principalement
examinée dans les études) ou qu’elles ont bénéficié d’une
induction du travail (situation peu étudiée).
L’objectif de ce travail est donc d’étudier le pronostic
obstétrical d’une présentation céphalique après une VME
réussie lors d’une induction du travail.
MATÉRIEL ET MÉTHODE
Il s’agit d’une étude unicentrique rétrospective
observationnelle comparative de type cas-témoins historique
entre 1998 et 2016, au sein d’une maternité de type IIb avec
une politique uniforme de prise en charge des femmes dont
le fœtus est en présentation du siège après 36 semaines
d’aménorrhée (SA).
La recherche de dossiers a été effectuée à partir de la base
de données de la maternité, qui contient les informations
relatives aux caractéristiques maternelles, au déroulement de
la grossesse, à l’accouchement et aux issues néonatales. Les
femmes sont informées lors de leur inscription à la maternité
que les données sont enregistrées et utilisables dans le cadre
du Programme de médicalisation des systèmes d’information
(PMSI) pour l’évaluation périodique des procédures de prise
en charge, après collecte de leur consentement écrit. Cette
étude respecte le principe d’engagement de conformité de
la méthodologie de référence MR-001 (Loi n° 2016-41 du
26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé,
2 • ■■ JOGC ■■ 2017
article 193). Notre étude observationnelle respecte l’anonymat
des patientes et a été approuvée par le service éthique pour
la recherche clinique de notre hôpital.
Afin d’analyser l’issue obstétricale (accouchement spontané,
césarienne, extraction instrumentale), notre étude a inclus
toutes les femmes pour lesquelles une induction du travail
avait été nécessaire après une VME réussie, quel que soit
le délai par rapport à la VME, l’indication et les moyens
thérapeutiques du déclenchement.
Une VME réussie a été définie comme une tentative de VME
avec obtention d’une présentation céphalique à l’issue de la
procédure et le jour de l’accouchement.
Nous avons exclu les patientes ayant accouché avant
37 semaines d’aménorrhée, les patientes avec utérus cicatriciel
(en raison d’une pratique non systématique de la VME et
du déclenchement), les morts fœtales in utero et les inter-
ruptions médicales de grossesse, les malformations utérines,
et les fœtus avec une anomalie morphologique mineure ou
majeure. Afin d’exclure les femmes porteuses d’une mal-
formation utérine, nous avons exclu les patientes ayant
bénéficié, avant ou après la grossesse, d’une hystéroscopie
opératoire et les patientes ayant une malformation utérine
diagnostiquée à l’échographie du premier trimestre.
Durant la période d’étude, une tentative de VME était réalisée
entre 36 et 37 SA. La recherche d’un cordon autour du cou
n’était pas effectuée avant la VME. En cas de VME réussie,
la surveillance de la fin de grossesse était identique à celle
des grossesses avec une présentation céphalique spontanée.
Le groupe témoin a été constitué par un appariement de
1 patiente cas pour 2 patientes témoins (sans contre-
indication à une induction du travail ou à un accouchement
par les voies naturelles). Les critères d’appariement étaient
: le mois et l’année de l’accouchement (pour limiter le biais
lié aux changements de pratique), la parité, l’âge gestationnel,
l’indication (pour limiter le biais de sélection) et le mode
d’induction du travail (pour limiter le biais lié à l’évaluation
du score de Bishop).
Une des hypothèses de notre étude serait un trouble de
l’accommodation du fœtus après VME. Ainsi, nous avons
cherché à exclure les patientes du groupe témoin ayant eu
une version spontanée d’une présentation du siège. Pour cela,
les femmes qui avaient obtenu un rendez-vous en hôpital
de jour pour une VME et/ou ayant réalisé une
scannopelvimétrie n’ont pas été incluses comme témoins.
Dans les deux groupes, les caractéristiques maternelles (âge,
IMC, parité, prise de poids, résultat au dépistage du
streptocoque du groupe B), fœtales (anomalie de la quantité
 Induction du travail, VME réussie et risque de césarienne

de liquide amniotique, terme de la VME), de l’induction (âge
gestationnel, modalités, indication), du travail (recours à
l’analgésie péridurale, utilisation d’ocytocine pendant le travail,
liquide amniotique méconial, survenue d’anomalies du RCF,
débit maximum d’ocytocine, durée du travail), de
l’accouchement (spontané, césarienne, instrumental) et du
nouveau-né (poids, périmètre céphalique, circulaire) ont été
recueillies.
Concernant les indications de déclenchement :
une analyse multivariée en utilisant le modèle de régression
logistique descendante. La variable expliquée était donc la
survenue d’une césarienne. Les variables explicatives du
modèle étaient les facteurs d’ajustement jugés potentiellement
confondants (mode de déclenchement, parité) et ceux
retrouvés significatifs lors de l’analyse univariée (p < 0,05)
ou tendant à la significativité (p < 0,1).
RÉSULTATS

- En cas de diabète gestationnel, le déclenchement était
proposé à partir de 38 SA en cas de macrosomie ou
d’hydramnios ou de déséquilibre glycémique ou
d’insulinothérapie.
- En cas de pré-éclampsie (définie comme étant la survenue
d’une PA systolique >140 mm Hg et/ou PA diastolique
>90 mm Hg associées à une protéinurie supérieure à
0,3 g/24 h, après 20 SA), le déclenchement était proposé
dès 37 SA.
- Une induction du travail était proposée entre 37 et 41 SA
en cas de pathologie fœtale définie par une diminution des
mouvements actifs fœtaux (MAF) et/ou des anomalies
du rythme cardiaque fœtal à risque faible d’acidose (mais
répétées) ou à risque modéré d’acidose.
- Après 41 SA, une induction était proposée en cas de
survenue d’un oligoamnios ou de diminution des MAF
ou d’anomalies du RCF ou lorsque le terme de 41 semaines
et 6 jours était atteint.
- En cas de rupture spontanée des membranes, une induc-
tion était proposée après une expectative maximale de 24 h
ou d’emblée en cas de liquide amniotique teinté ou
méconial ou en cas de risque d’infection materno-fœtale
(dépistage du streptocoque du groupe B positif, protéine
C réactive >15, hyperthermie maternelle).
Le jour du déclenchement, l’évaluation du score de Bishop
était effectuée pour décider de la méthode. En cas de score
de Bishop <6, les prostaglandines intra-vaginales étaient
utilisées. En cas de score de Bishop ≥6, un déclenchement
par amniotomie puis ocytocine était pratiqué une heure plus
tard.
L’analyse descriptive des données a été réalisée au moyen
du test paramétrique de Student ou du test non paramétrique
Entre 1998 et 2016, 776 patientes avec un fœtus en
présentation du siège ont été répertoriées, soit 1,94 % de
l’ensemble des accouchements uniques survenus pendant
la période d’étude. Une tentative de VME a été proposée
pour 643 d’entre elles (soit 82,8 %). La VME a fonctionné
pour 202 patientes (31,4 %) et a échoué pour 441 patientes
(68,6 %). Parmi les patientes ayant eu une VME réussie, 88
(44 %) ont bénéficié d’un déclenchement. Ces patientes ont
été comparées avec 176 témoins appariés sur les critères
précédemment cités (Figure 1).
Concernant les caractéristiques maternelles (Tableau 1),
aucune différence significative n’a été constatée à l’exception
d’un âge plus élevé dans le groupe cas (31 ans et 4 mois c.
24 ans et 6 mois; p < 0,01).
Les indications d’induction sont présentées dans le Tableau 2.
La survenue d’une pathologie fœtale, d’une rupture spontanée
des membranes prolongée ou d’une grossesse prolongée
représentait plus des deux tiers des indications.
En ce qui concerne les caractéristiques du travail (Tableau 3),
l’âge gestationnel moyen à l’accouchement était
respectivement de 39 semaines et 5 jours d’aménorrhée
et de 39 semaines et 6 jours dans les groupes cas et
témoin. Un débit maximum d’ocytocine lors du travail
significativement plus grand a été observé dans le groupe
Tableau 1. Caractéristiques maternelles
Cas Témoins
n = 88 n = 176 Valeur P
n (%) n (%) [Intervalle de
m ± sd m ± sd confiance à 95 %]
Âge 31,4 ± 5,8 24 ± 6,3 <0,01

de Mann-Whitney. Le test du chi carré (avec corrections de IMC 24,7 ± 5,6 24,7 ± 4,6 0.88
Yates sur le calcul du chi carré quand l’effectif est inférieur Prise de poids 11,1 ± 5,4 10,4 ± 5,7 0.48
à 5) et le test exact de Fisher lorsque cela était nécessaire Parité 1
(effectif attendu inférieur à 5) ont permis d’analyser les varia- Nullipare 21 (23,8) 42 (23,8)
bles qualitatives. Les tests bilatéraux avec un p < 0,05 étaient Multipare 67 (76) 134 (76)
considérés comme significatifs. PV (+) SB 14 (16) 37 (21) 0.75
Oligoamnios 4 (4,5) 9 (5) 0.86
Pour estimer le rapport de cotes (RC) du risque de césarienne,
Hydramnios 6 (6,8) 3 (1,7) 0.77
ajusté sur les principaux facteurs de risque, nous avons mené

■■ JOGC ■■ 2017 • 3
OBSTETRICS

Figure 1. Diagramme.
776 patientes avec fœtus en siège

133 (17,1 %) patientes

sans VME réalisée (selon nos protocoles)

643 tentatives de VME

202 (31,4 %) VME réussies 441 (68,6 %) VME non réussies

114 (56,4 %) cas de travail spontané

88 (34,6 %) patientes cas avec induction du travail 176 patientes témoins

cas (72 ml/h c. 68 ml/h; p = 0,04). Aucune différence n’a non-engagement à dilatation complète) n’était pas différente
été observée quant à la survenue d’anomalies du RCF, à la dans les deux groupes (respectivement 30 % c. 56,5 % et
réalisation d’une analgésie péridurale ou à la survenue d’un 70 % c. 43,5 %; p = 0,08), bien qu’une tendance puisse être
liquide amniotique méconial. observée à plus de causes mécaniques dans le groupe cas
et plus d’anomalies du RCF dans le groupe témoin. Aucun
En ce qui a trait à notre critère de jugement principal, un prolapsus du cordon n’a été relevé.
accouchement par césarienne (en urgence, en dehors du
travail ou en cours de travail) était significativement plus En cas d’accouchement par césarienne, aussi bien la dila-
fréquent dans le groupe cas (22 % c. 13,1 %; p = 0,039). Pour tation cervicale moyenne lors de la décision (5 cm en
ce qui est des indications de césarienne, la répartition entre moyenne dans les deux groupes) que le nombre de patientes
une indication fœtale (anomalies du RCF, liquide amniotique en phase de latence (≤5 cm de dilatation) n’étaient pas
méconial, risque d’acidose) et une raison mécanique (échec différents dans les deux groupes (75 % c. 69,5 %). Le taux
du déclenchement, arrêt de la dilatation cervicale, de variété postérieure ne différait pas entre le groupe cas
(deux patientes, soit 9,9 % des césariennes) et le groupe
témoin (deux patientes, soit 8,6 % des césariennes).
Tableau 2. Indication du déclenchement
Cas Témoins Valeur P
Concernant la répartition des césariennes selon le terme, une
n = 88 n = 176 [Intervalle de différence statistique n’a été observée que dans le cas d’une
n (%) n (%) confiance à 95 %] grossesse se prolongeant au-delà de 41 SA, au cours de
Grossesses prolongées 14 (16) 28 (16) 1 laquelle le risque de césarienne était plus grand dans le groupe
RSM à terme 15 (17) 30 (17) 1 cas (37-37 + 6 SA : 0 % c. 4,3 %; 38-38 + 6 : 5 % c.
Pathologies fœtales 21 (23,8) 42 (23,8) 1 17,4 %; 39-39 + 6 : 10 % c. 21,8 %; 40-40 + 6 : 20 % c. 34,8
Pathologies obstétricales 12 (13,6) 24 (13,6) 1 %; résultats non significatifs; et >41 SA : 55 % c. 8,2 %;
Diabète 11 (12,5) 22 (12,5) 1 p < 0,05).
Macrosomie 1 (1,1) 2 (1,1) 1
En ce qui concerne les caractéristiques néonatales (Tableau 3),
Convenance 14 (16) 28 (16) 1
aucune différence n’a été observée quant au poids de

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 Induction du travail, VME réussie et risque de césarienne

Tableau 3. Caractéristiques du travail et néonatales

Cas Témoins
n = 88 n = 176 Valeur P
n (%) n (%) [Intervalle de
m ± écart-type m ± écart-type confiance à 95 %]
Terme (SA) 39 + 5 ± 8 jours 39 + 6 ± 10 jours 0,15
Utilisation de prostaglandines 23 (26) 46 (26) 1
Analgésie péridurale 81 (92) 149 (84,6) 0,21
Utilisation d’ocytociques 71 (80) 140 (79,5) 1
Débit maximum d’ocytociques (ml/h) 72 68 0,04
Durée du travail (AVB) 343 ± 189 340 ± 168 0,53
Liquide méconial 5 (5,7) 10 (5,7) 0,77
ARCF 37 (42) 63 (35,8) 0,37
Césarienne 20 (22) 23 (13,1) 0,004
Poids de naissance (g) 3 430 ± 485 3 394 ± 445 0,57
Périmètre céphalique (cm) 35,6 ± 1,3 35,4 ± 1,9 0,9
Circulaire 16 (18,2) 43 (24,4) 0,35
Apgar 9,7 ± 0,2 9,9 ± 0,1 0,9

naissance, au périmètre céphalique, au taux de circulaire, au
score d’Apgar ou à la réalisation d’une réanimation du
nouveau-né en salle de naissance (ventilation au masque, as-
piration sous laryngoscope ou intubation endotrachéale).
Après analyse multivariée (Tableau 4), le risque de césarienne
était significativement plus élevé après une VME réussie (RC
ajusté : 1,946; IC à 95 % : 1,017-3,772) et après une matu-
ration par prostaglandines (RC ajusté : 1,951; IC à 95 % :
1,097-3,468) alors que la multiparité diminuait ce risque (RC
ajusté : 0,208; IC à 95 % : 0,114-0,377).
DISCUSSION
Principaux résultats
Nous avons mis en évidence en analyse univariée, puis
multivariée un sur-risque de césarienne après induction du
travail pour les patientes ayant eu une VME réussie (RC :
1,97).
Ce résultat est concordant avec les deux méta-analyses
publiées sur le pronostic obstétrical (quel que soit le mode
d’entrée en travail) après une VME réussie7, 8. Une pre-
mière méta-analyse effectuée par Chan en 2004 retrouvait
un risque multiplié par deux de césarienne en cours de travail
après une VME réussie (avec cependant une importante
hétérogénéité conduisant même les auteurs à exclure une
étude de leur analyse)9. La publication de quatre nouvelles
études, dont certaines concluaient l’inverse, a conduit à une
nouvelle méta-analyse en 2014. De Hundt et ses
collaborateurs ont analysé trois études de cohortes et huit
études cas-témoins (n = 46 641). Leur conclusion indiquait
qu’une VME réussie était associée à une augmentation à la
fois du risque de césarienne pour dystocie mécanique et du
risque d’asphyxie fœtale (RR de 2,2 pour ces deux étiologies)8.
Néanmoins, cette méta-analyse incluait des études de puis-
sance et d’effectifs différents. Le test de non-concordance
d’Higgins, retrouvant une hétérogénéité modérée (i = 0,44,
soit >0,25), incitait à la prudence quant à la lecture de ces
résultats.

Tableau 4. Analyse multivariée – variable expliquée : Plus récemment, De Hundt et ses collaborateurs ont effectué
survenue d’une césarienne en cours de travail une analyse des facteurs de risque de césarienne pendant le
RC IC à 95 % p travail après une VME réussie à partir des données collectées
Âge 1,026 0,975-1,080 NS
pour une autre étude randomisée au sein de 25 hôpitaux des
Terme d’entrée en travail 1,142 0,907-1,407 NS
Pays-Bas10. Le taux de césariennes était de 13 % après une
VME réussie. En revanche, contrairement à nos résultats,
Dose max. d’ocytociques 0,995 0,990-1,001 NS
les auteurs ne retrouvent pas l’induction du travail comme
Analgésie péridurale 0,648 0,304-1,382 NS
facteur de risque indépendant de césarienne (RC de 0,64;
Utilisation de prostaglandines 1,951 1,097-3,468 p < 0,05
IC à 95 % : 0,26-1,6, c. RC de 1,951 dans notre étude).
VME réussie 1,946 1,017-3,772 p < 0,05
Cependant, le manque de données sur les indications et les
Multiparité 0,208 0,114-0,377 p < 0,05
modalités d’induction du travail dans cette méta-analyse ainsi

■■ JOGC ■■ 2017 • 5
OBSTETRICS
que l’absence d’analyse d’un effet centre peuvent expliquer
la discordance des résultats.
Notre étude montre que la multiparité semble être un facteur
protecteur de césarienne pendant le travail en cas de VME
réussie. Ce résultat est concordant avec la récente étude de
Krueger et ses collaboratrices (risque diminué par 2 de
césarienne en cas de multiparité)19. À l’inverse de nos résultats,
Vézina et ses collaborateurs ont observé en 2004 un sur-
risque de césarienne après une VME réussie, aussi bien chez
les nullipares que chez les multipares20. Cependant, leur
modèle n’était pas ajusté selon le caractère cicatriciel de
l’utérus, l’IMC et l’utilisation d’ocytociques pendant le travail.
Nous avons également observé en analyse multivariée un
sur-risque de césarienne en cas de maturation par
prostaglandines et non en cas d’utilisation d’ocytocine. Ce
résultat est concordant avec les principales études ayant
permis d’observer un sur-risque de césarienne en cas
d’induction du travail sur col défavorable21.
Limites, interprétation et perspectives
Notre analyse est rétrospective, bien que la collecte de
données informatiques soit prospective.
Au sujet du risque de césarienne en cours de travail, nous
n’avons pas de données sur le type de variété de la
présentation à l’entrée en travail (antérieure ou postérieure),
ni sur le type exact d’anomalie du RCF. Quant à l’induction
du travail, nous manquons de données sur le score de Bishop
lors de l’induction de la maturation. De plus, afin d’induire
le travail avec des prostaglandines, le recours à un dispositif
intra-vaginal avec libération prolongée de prostaglandine E2
et/ou à un gel de prostaglandine E2 était possible.
Néanmoins, cette étude est la première à analyser
explicitement le risque de césarienne après induction du travail
en cas de VME réussie. Plusieurs hypothèses peuvent être
formulées.
Un trouble de l’accommodation pelvienne pourrait s’observer
en cas de VME réussie. Le fœtus initialement en siège se
serait accommodé au bassin maternel en se positionnant de
cette manière. La réalisation d’une VME viendrait troubler
cette accommodation naturelle et favoriser la survenue d’une
présentation défléchie. Ainsi la présentation devenue
céphalique pourrait être haute, mobile, non modelée au bassin
et rendre la maturation cervicale plus difficile (score de
Bishop bas). Pour les accouchements au-delà de 41 SA, le
sur-risque de césarienne observé va dans le sens d’une
absence d’accommodation du fœtus sur le segment inférieur
lors du dernier mois après une VME. La tendance à plus
6 • ■■ JOGC ■■ 2017
de césariennes pour un motif mécanique (p = 0,008) dans
le groupe cas pourrait refléter ce trouble de l’accommodation.
D’autres auteurs ont émis l’hypothèse d’un sur-risque
d’anomalies du RCF après une VME réussie20–22. Les fœtus
en présentation du siège seraient selon eux plus fragiles23
et à risque d’acidose aux mêmes terme et poids que les fœtus
spontanément en présentation céphalique.
Enfin nos données concernant un âge maternel plus avancé
en cas de présentation du siège vont dans le sens d’une
récente analyse de cohorte24. Cette variable, insuffisamment
rapportée dans les publications antérieures, devrait être prise
en compte dans l’analyse statistique comme dans notre étude.
Dans la pratique quotidienne, nos résultats incitent à tenir
compte d’une VME réussie antérieure lors de la décision
d’induire le travail, en particulier si les conditions cervicales
ne sont pas favorables en raison d’une présentation haute
et/ou d’un segment inférieur non formé. Nos résultats ne
remettent pas en cause l’intérêt de la VME (en raison du
taux d’accouchement par voie basse élevé), mais apportent
de nouveaux éléments pour comprendre le sur-risque de
césarienne observé après une VME réussie.
CONCLUSION
Une VME réussie pourrait accroître le risque de césarienne
lors d’une induction du travail ultérieure. L’issue obstétricale
de ces grossesses ne redevient pas la même que celle des
grossesses où la présentation est spontanément céphalique.
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