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Les langues d Amérique Les langues d'Amérique 1547


1546

LE NASA YUWE m, n, k, mb, "à; ts, h, (/>>; s". En position de C, quand il y a C2 on trouve m, n,p, t, k,
Tulio Rojas Curieux A*, tsy, s, sy, h, l, {y, y, w. En position de C3, on trouve toutes les consonnes. Pour que
Université du Cauca la syllabe CCVC apparaisse, il est nécessaire que son nucléus soit accentué.
' '
L accent se réalise dans la syllabe, son cadre est le mot et il s exprime en inten-
'

sité. Il y a un seul accent primaire par mot. L accent est distinctif dans des paires de
mots constitués de la même séquence de phonèmes.
Contexte historique et culturel
Les Paez vivent dans le Sud-Ouest de la Colombie. Ils sont plus de 100 000
Morphologie
dans le département du Cauca. Sur une population totale dépassant 150 000 Paez,
on compte quelque 100 000 locuteurs actifs. Agriculteurs, ils mettent à profit les La langue possède des morphèmes lexicaux (libres ou liés) et grammaticaux
nombreuses possibilités que leur offre la cordillère des Andes, dont les sols varient (libres ou liés). Les lexèmes ont peu ou pas de variations dans leur combinatoire ; la
en fonction de l altitude. '
plupart des changements morphophonologiques touchent les grammèmes. La langue
La langue nasa yuwe (paez) avait été incluse dans la famille chibcha, mais des
'

possède des constructions agglutinantes sans aller jusqu au polysynthétisme.


études récentes la situent hors de ce cadre. Nous suivons la classification proposée Les règles d'apparition de certains allomorphes supposent parfois la notion de
par Landaburu (2000) et la considérons comme une langue isolée. La plus ancienne mot, comme dans le cas du morphème de flexion modo-pefsonnelle ou du morphème
étude connue est celle effectuée par un prêtre de Tâlaga, Eujenio del Castillo i
' '
d allatif. Les règles de formation exigent la présence d au moins un radical simple par
Orosco, au milieu du xviiie s. : Vocabulario paez-castellano, catecismo, nociones '

mot. (Radical simple : l élément de base sur lequel les différents procédés morpho-
gramaticales i dos plâticas. logiques s'appliquent pour la formation des mots. Nous avons recensé quatre classes
de radicaux lexicaux : nominal, verbal, verbo-nominal, qualificatif, et trois classes
de radicaux grammaticaux : déictiques, interrogatifs, quantificateurs.)
Phonologie La flexion s'exprime grâce à des suffixes ; deux types obligatoires de flexion :
Le système consonantique a trente-sept unités. Ordres articulatoires : la flexion modo-personnelle et la déclinaison (flexion fonctionnelle), ainsi qu'une
forme de flexion facultative.
-

labial : p , p>', p\ pyh, mb, mby, (p- p, m, w ;


-

apical : t t-v, /*,


,
"d, "dy, s, 5V, /, />, n, nv ; La dérivation est un procédé par affixation : piya- « apprendre », ka-piya?h-
-
laminai : ts ts>', tsh, tsyh, "dz,
,
"dz?, y ; « enseigner » (faire apprendre) we?we- « parler », nee-we'we- « recommander (de
,

-
vélaire : k /fcv, k><, k'h, "g, "gy,
,
h, hy. prendre soin) ».
Selon le mode d'articulation, on distingue instantanées et continues. Pour devenir un mot nominal, les radicaux qualificatifs et les radicaux verbaux
Instantanées : ont besoin d
'

un morphème dérivationnel -sa. Les radicaux nominaux peuvent être*


verbalisés en suffixant le morphème -«-vw qui donne un sens dynamique au nom.
"

de base : p py, t, ty, ts, tv, k, k1;


,
-

aspirées : pï pyh, tk, r-v\ ts'\ te"*, ]&, ky*1 ;


,

prénasalisées mb mby "d "dy "dz "dzy g,


" "
-

, , , , , , gy. Syntaxe
Continues : '
L ordre des constituants est (S)V dans une proposition intransitive ; l énoncé
'

-
fricatives sourdes : (p»', s, s", h, hy ; '

sonore : /£ ;
'
minimal peut être un seul mot puisqu on a un indice actanciel dans le mot prédicatif.
-
latérales : /, P ; Dans une proposition transitive l'ordre est (S)OV. Le caractère facultatif du mot qui
,

représente le sujet indique clairement qu il est coréférentiel avec l'indice actanciel.


'

-
nasales m, n, rf ;
-

approximantes : w, y. On distingue deux groupes de mots : les mots prédicatifs et ceux qui ne le sont
On a un système vocalique à quatre termes, et des sous-systèmes corrélatifs : pas. Selon ce critère, on proposera ici quatre classes de mots : prédicatif, nom,
oral, nasal, glottalisé et aspiré. Unités vocaliques fondamentales : hautes /, u, basses qualificatif et connecteur. Prenons pour illustrer ce point le radical kla « bétail ».
e, a. Une voyelle peut être nasale et aspirée ou nasale et glottalisée à la fois. Les On peut construire sur ce radical le mot prédicatif kla-a' « c'est (du) bétail »,
traits de glottalisation et d aspiration s excluent mutuellement.
' '
par suffixation du marqueur modo-personnel -a?. On peut aussi placer ce radical
La syllabe la plus simple a une seule voyelle ; les syllabes complexes ont un comme argument sujet : kla-0 yuh-a? « (du) bétail vient » : le radical « venir »
nucléus vocalique et des marges pré- ou postnucléaires. Le nucléus vocalique est reçoit alors la marque -a?. On peut enfin le placer comme argument objet : kla-a's
formé d'une seule voyelle. Formule générale : ((C C V CCj). Avant la voyelle, Cx theng-u-k « il voit le bétail » Comparons le radical kla à un autre radical, kite
'

« fleur » ; comme avec le premier on peut former un prédicatif : kite-a'1 « c'est


peut représenter toutes les consonnes. En position de C2, devant C,, on peut trouver ,
1548 Les langues d'Amérique
Les tangues d'Amérique

(la/une) fleur », ou un argument objet : kite-a}s tl'e"g-u-k « il voit la fleur » ; il peut


'
en outre être la base d un autre type de mot prédicatif à suffixe -ku : kite-ku « elle Un radical qualificatif
a fleuri ». Ainsi distingue-t-on des radicaux nominaux (« bétail ») et des radicaux celle d un mot qualificatif peut entrer dans la formation d'un mot prédicatif et dans
'

Lorsqu'il forme un prédicatif il reçoit la flexion .

verbo-nominaux (« fleur/fleurir »). Un troisième type de radicaux partage avec personnelle ; lorsqu'il foime un qualificatif, il ne reçoit aucun t modo- ,

les précédents sa capacité à constituer un mot prédicatif : "duh-a7 « c'est lourd » aucune autre marque mais, dans ce cas, il accompagne toujours unype
, demot
flexion ni
duh-ku « il s'est alourdi » ; il peut être par ailleurs épithète du nom : kla "duh-e
"
,

catif ou nominal : alkulkandzy « chien laid » ; ka"dzy yahky na « enautre prédi-


pensant laid »
,

[laicVpenser-dur) -

yuh-a? « (le/un) lourd bétail arrive ». Pour devenir argument, ces radicaux ont .

besoin d'une translation : "duh-sa-a?s the"g-u-k « il voit le lourd ». Ce sont des Les connecteurs ne portent pas de flexion ; de plus
radicaux qualificatifs. bases prédicatives L'ensemble est assez réduit : sa? « ils
.

et »ne atsa?
peuvent pas être des
« alors »
,

Le mot prédicatif est formellement défini comme étant celui qui porte la base « mais », Papaka « pour ça » ,
ïïapatsa « pendant ce temps ».
,
, napa
'

prédicative et la flexion modo-personnelle (contenant l indice référentiel). Nous


Types de prédication
'

appelons base prédicative la construction sur laquelle s affixent les marques de la


flexion modo-personnelle ; elle peut être constituée par un radical lexical ou par un
radical grammatical. Un mot prédicatif inclut un et seulement un indice référentiel Le paradigme de la lexion modo-personn
deux types de prédication à la 3e personne : un deelle noustypes permet de différencier les

f
'

qui renvoie à l argument privilégié de la prédication.


-d1 (sg.) et -ta1 (pl ) et l'autre suffixe -ku (sg ) et -fzs deux
'
.
sufixe l
(pl.) ; à la lre et à laes2emorphèmes
il n y a pas de différence personnes,
.

Radical nominal Radical verbal Radical verbo-nominal Radical qualificatif .

tulyu-thu mhî "


mem-i'kwe wala-tha?w
gu
La prédication stative inclut une entité dans une classe définie
-

« je suis Tulio » « tu travailles » « vous chantez » « nous sommes grands »


Elle a des afinités avec des propriétés, des qualités des états par une propriété.
Bases prédicatives :
les radicaux verbaux statifs et les di , .

dynamiques et diphasiques ; ce qui phasiques (il y a trois radicaux ve


Personnels
distingue les statifs des dynami rbaux : statifs
Démonstratifs Déictiques Interrogatifs
,
P-a a '
'

My-ngu -
ay-te-a7 mandz-na?
digme de flexion modo-personnelle à la 3= personne : les statifs suffi
ques est le para-
xent a? et les
dynamiques -ku ; les diphasiques peuvent prendre la flexion
' ' '
« c est toi » « c est ça » « c est ici » « combien est-ce ? »
de l'un ou de l'autre
-

Le symbole /-/ sur une voyelle marque la nasalité. deux groupes décrits, toujours à la 3e s de
nominaux, nominaux et grammaticaux personne),
:
les radicaux qualificatifs, verbo-
Le caractère omniprédicatif de cette langue est clair et l'on peut même avoir des
,
yat-te us-a?
'

radicaux grammaticaux comme centre de prédication (pour l omniprédicativité, voir RN-loc, RV stat -préd
"
tya-a''
" -

Launey, 1994).
.
.

dém préd.
« Il (elle/qqc) est dans la maison
-
.

» «C
'

Nous appelons « nom » la construction résultant de l'application à une base d'un


.

est lui (elle/ça) .


»
vik-a-
ensemble de marques de flexion. La base du nominal peut être lexicale ou gramma- v
na-te-a?
ticale ; elle est choisie d'abord dans les radicaux dits nominaux ou verbo-nominaux. RVdiph préd. .
-

déict-loc préd.
« Il (elle) est plein(e). » [rassasié(e)]
-
.

La base peut être formée à partir de radicaux verbaux ou qualificatifs ; dans ces cas ,
'
« C est là. »
'
elle aura besoin d un morphème translatif.
La flexion nominale est : kim-m?
RQ-préd .

-
nominatif : alku-0 « chien » ; « Il (elle/qqc) est noir(e) »
interrog préd. -
.

« Qui est-ce ? »
.

accusatif-datif : -ars au singulier et -H" au pluriel.


-

kite-à1
Ces marques peuvent indiquer le patient mais aussi le bénéficiaire. L'objet h uka-a'
'

RVN-préd
-

indéfini a la marque zéro : alku-a?s « au chien » ; sociatif : kalmena-vakb « avec .

quantif.-préd.
Carmen » ; allatif : yat-na « vers la maison » ; ablatif : yat-hu « de la maison » ;
« C'(elle/qqc) est (une) fleur .
>>
« C est tout
'

.
»
le morphème d'ablatif a parfois une valeur d'instrumental : ts Uy-hu « avec le nasa-a7
couteau ». On compte aussi les locatifs à valeur d'« inessif » : -te locatifj (vertical) ; RN-préd .

ka locatif2 (horizontal) ; -£% locatifj (suspendu) ; -su locatif4 (en diagonale). Les « II est Paez » (« Il est être humain »)
.

morphèmes dits « identificateurs » sont des éléments de flexion facultative ; ils ne


changent pas la fonction syntaxique du nominal. Ce sont l additif : himba-a?s-ga
'
La prédication dynamique inscrit une entité dans un processus
« au cheval aussi » et le similatif : yat-0-na'w « comme la maison ».
,
tive, ici peut être un radical verbal dynamique
,

verbal diphasique
.

La base prédica-
qualificatif ou un nom d ynamisé :
,
, verbo-nominal ,
Les langues d'Amérique Les langues d'Amérique
1551

wete-ku kite-ku me?m-0-ku


RV dyn.-préd. RVN-préd. RV dyn.-aort préd. .
-

« Il (elle) est tombé(e). » « Il (elle/qqc) a fleuri. >> « Il (elle) a filé » .

fik-ku nasa-n>ù-k kits-te/ùs-0-a'


RV diph.-préd. RN-Vb-préd. RN-loc. 1/RV stat aort.-préd. -

'

« Il (elle) s est rempli(e). » [rassasié(e)] « Il (elle) est devenu(e) Paez. » « Il (elle) est au ruisseau » .

"
duha-ku Une base prédicative de radical verbal diphasique peut recevoir l
RQ-préd.
d'aspect aoriste et les mor e morphème
'

« Il (elle/qqc) s est alourdi(e). » (fait non achevé) : phèmes de prédication dynamique (fait achevé) ou stati ve
mbeka-0 kse a's tiiu-0-k
La 3 e personne se distingue de la lre et de la 2e sur les points suivants : -

RN-nom
-

les lre et 2e apparaissent comme des personnes définies, tandis que la 3e perd
.

RN-accus. (dat.) RV diph .


-

aort.-préd .

« Le vesou a rendu José ivre »


des traits de définition (absence de forme propre - elle prend un déictique -, absence .

de différenciation selon le sexe) ; nwel-a? tùu-0-a?


-

l'opposition entre la prédication stative/dynamique apparaît seulement à la RN-top. RV diph . -aort .


-

préd.
3 e personne ; « Manuel est ivre » .

'
-

on utilise la 3e personne pour prédiquer l existence (cas particulier de locali- Les verbo-nominaux et les qualificatifs en combinaison avec le morphème -0
sation) : sena kwet ùsa? « il y a beaucoup (de) pierres », les phénomènes météorolo- reçoivent le morphème de
-

giques : nus kfik. « il a plu ». taP 0-ku « il (elle) a minci prédication


-

»
dynamique : mem-0-ku « il (elle) a chanté » ;
.

On peut énoncer que


Prédication, aspect et modalité cours (fait non achevé) dans les constructions ayant comme résultat une action en
,

les propriétés topologiques de l'aoriste sont celles d'un inter-


,

Le noyau de la prédication a deux éléments fonctionnels fondamentaux : la rela-


valle ouvert et sans frontières En revanche dans celles qui ont comme résultat .

,
action achevée une
tion prédicative et l'argument de prédication qui s'expriment morphologiquement les propriétés de l'aoriste sont celles d'un intervalle clos
,

dans l'ordre [base prédicative + flexion modo-personnelle] et s'intègrent dans un


dont le moment privilégié est l'instant en dehors de - et après - la frontiècompact,
re (ou la
,

mot.
classe d'instants hors de la frontière) .

Imperfectif : le signifiant de ce morphème est une voyelle dont l


Prédication sans distinction aspectuelle : ses énoncés sont formés par une base dé e timbre est
terminé par le radical verbal une base prédicative à radical verbal d
se combine avec l'imperfectif unSifait
.

prédicative et la flexion modo-personnelle (marque de prédication stative). La base


b
ynamique
en cours (non achevé) nous est présenté : si la
,

prédicative peut être un radical nominal, verbo-nominal, qualificatif ou verbal dyna-


'
ase prédicative est composée d'un radical verbal statif le fait présenté est achevé ,
mique nominalisé : rniv-a? « c est (un) chat » ; mem-a? « c est (un) chant ». ' .

Si l'on veut examiner, les variations aspectuelles des énoncés dont la base prédi- RV dyn.-imperf préd. -
.

cative est un nom on constate qu il faut un morphème qui le dynamise.


,
'

« Il (elle) file .
>>

kits-te ùs-ii'à'-ku
Prédication à distinction aspectuelle : les énoncés acceptant cette distinction RN-loc .

1 RV stat.-imperf.-préd
sont formés par une base prédicative l'aspect!, éventuellement l'aspect, et la flexion
.

,
« Il (elle) a été au ruisseau » .

modo-personnelle. La base prédicative est choisie parmi les radicaux verbaux,


verbo-nominaux qualificatifs ou des noms dynamisés. L'aspect, est représenté par
,
Les verbo-nominaux et les qualificatifs en combinaison avec le morphème d'im
perfectif reçoivent le morphème de prédication dynamique : mem-u-ku « il (elle)
-

le choix entre aoriste et imperfectif et l'aspect, renvoie à la dichotomie imminent/


' chante ».
progressif. L opposition aoriste/imperfectif est fondamentale car tout énoncé de la
prédication à distinction aspectuelle doit passer par ce filtre. Dans les schémas de constr uction ayant comme résultat un fait en cours
propriétés topologiques de l'imperfectif les
sont celles d'un intervalle ouvert et sans ,

Aoriste -0- : cet aspect combiné avec une base prédicative de radical verbal dyna- frontières
l'imperfectif sont celles d'un intervallerésultat
Dans ceux ayant comme une action achevée les propriétés de
.

mique nous présente un fait achevé Combiné avec une base prédicative de radical
.

clos
,

verbal statif il s'agit d'un fait en cours (non achevé). '


l instant se situant hors de la f compact, dont le moment privilégié est ,

rontière (ou classe d'instants hors de la frontière)


,

.
1552
.
Les langues d'Amérique Les langues d'Amérique

aspect, ne peut que s appliquer à un verbe déjà fléchi en aspect,.


'

L
'
deh-nyi-a1
"

RV dyn.-résult.-préd.
Imminent : -ya'p- « Il (elle) est endormi(e) .
»

ku'h-f-ya'p-a* L'é
RV dyn.-aort.-immin.-préd. tude de la modalité fait ressortir une opposition fondamentale entre assertif
« Il (elle) va danser. » et non assertif. Les catégories grammaticales de modalité (assertif non assertit) , ,

personne et nombre, se trouvent amalgamées dans la flexion modo-personnelle .

Progressif : -ts- Assertif: on l'utilise pour les événements états ou processus que le locuteur
,
'

me?m-u-ts-a ?
a vus, perçus, qu ils connaît ou dont il est certain (et avec lesquels il établit un
RV dyn.-imperf.-progr.-préd. degré supérieur d'engagement) ce qui peut être simultané ou non au moment de
,

« Il (elle) est en train de filer. » l'énonciation :

me'm-0-ku
ûs-u-ts-ar
RV dyn.-aort.-3sg. + assertif
RV stat.-imp.-progr.-préd. « 11 (elle) a filé. »
Litt. : « Il (elle) est en train d'être. »
(Ex. d'utilisation de cet énoncé : lorsqu un fil à plomb est sur le point de cesser son
'

Non assertif: on l'emploie pour les faits que le locuteur ne perçoit pas au moment
mouvement de balancier.)
de l'énonciation (et sur lesquels il ne peut s'engager pleinement) ; il se subdivise en
Le fait que les radicaux verbaux statifs puissent se combiner avec le morphème deux : l'un sert à exprimer la non-perception l'autre à exprimer une question :
,

de progressif et prendre la prédication stative nous oblige à différencier deux types suspensif: exprime un engagement plus éloigné avec l'événement que la
-

modalité « assertif » :
de « stativité » : l'une venant de l'aspect inhérent au verbe, l autre comme résultat
'

une combinaison grammaticale. La stativité de la combinatoire d'une base prédi-


'
"
d '
me' m-É>- ga
cative, avec imperfectif et progressif, peut s interpréter comme la description d'un RV dyn.-aort.-2sg. + suspensif
'

« Tu as filé
» (Litt. : « Il semblerait que tu as filé »)
processus dilaté, prolongé ou stabilisé, où le dynamisme le cède au statisme. .
.

Itératif
Dans la combinaison avec « assertif » le locuteur exprime une certitude tandis
,
,

Répétition de la dernière syllabe du radical lexical : uhka-ka-0-ku « il (l )a frappé


'
que dans la combinaison avec « suspensif », on a une valeur de doute souvent ,

plusieurs fois. » traduit en espagnol par serâ que « il semblerait que ». Cela n'implique pas de ...

question ni d'énoncé subordonné.


Duratif:-na -

interrogatif : employé pour demander corroborer une idée avoir une,

Il apparaît toujours, en construction analytique, sufixe au radical verbal auxilié.


,

infonnation :
"
deh-na iis-e-a?
RVdyn.-dur. RV aux.-aort.-préd. RV dyn.-aort.-2sg + interrogatif
.

« Il (elle) est en train de dormir. » « As-tu filé ? »

La durée exprimée grâce à cette construction avec duratifest différente de celle qui Dans l'énoncé déclaratif , on trouve une zone centrale et plusieurs zones périphé-
est exprimée avec le morphème de progressif dans la construction synthétique. Avec la riques de la modalité (v Rojas, 1998). .

première, on parle d une durée exprimée nécessairement au moment même où l action


'
'

se déroule ; ainsi, il est essentiel de faire référence à la position exacte de la personne Types d'énoncés
dont on parle, d'où la construction avec les auxiliaires positionnels. La durée exprimée
dans la construction synthétique peut s'étendre au-delà dans le temps. Deux types fondamentaux : déclaratifs et jussifs . Tous les déclaratifs ont une
représentation morphologiquement segmentable de l'argument de prédication dans
'
Résultatif l indice actanciel Ils peuvent être assertifs (expression de la localisation - situatifs
.

On peut le trouver dans la construction analytique (la frontière de culmination


,

positionnels, existentiels - ou expression de processus - statifs non statifs) ou non ,

est franchie) ou dans la synthétique (on voit le résultat) : assertifs (interrogatifs)


Les énoncés jussifs n'ont pas de représentation morpholo-
.

"
deh-nyi ùs-0-a? gique de l'argument de prédication. Les morphèmes jussifs se sufixent à la base
RV dyn.-résuh. RV aux.-aort.-préd. prédicative. Ils peuvent être impératifs, incitatifs exhortatifs, prohibitifs, dissuasifs,
,

« Il (elle) est endonni(e). » de conseil .


'

Les langues d Amérique Les langues d'Amérique 1555


1554

Phonologie
Lexique
Les six voyelles a, e, i, o, u, i s'opposent comme : hautes /, u, t, moyennes e ,

o, basse a ; d avant /, e, d arrière i, u, o, a ; étirées i, i, e, arrondies u o. Les onze


' '

,
'

consonnes s opposent selon le mode d articulation : corrélation de voisement de


'

plosives sourdes p, t, c, k et des sonores b, d,j, g ; sonantes w, r, fricative h ; selon


le point : labiales p, b, w, coronales antérieures t, d, r, coronales postérieures c j,,

vélaires k, g, laryngale h. Il y a des voyelles brèves et longues mais pas de paires


minimales, telles que baalba, car les racines sont bimores face aux suffixes plutôt
unimores.
Sation;Vb:verbalisateur.
Les segments voisés et h ont des allophones nasals. Les plosives sont simples
en début de morphème et géminées ailleurs, orales ou nasales. La labiale w peut
BIBLIOGRAPHIE devenir fricative au contact des voyelles d'avant et entre voyelles basses. La battue
'

alvéolaire r devient rétroflexe après les voyelles d arrière. Le phonème plosif palatal
Landabum J., Clasificaciôn de las lenguas indîgenas de Colombia Gonza lez de PérezM.-S. c est prononcé palatal par les aînés, alvéolaire affriqué ou fricatif par les jeunes.
lombia : una vision des-
et Rodriguez de Montes M.-L. (dir.), Lenguas indîgenas de Co La syllabe canonique est (C)V(V) ; V vaut une more. La structure phonologique
criptive, Bogota, I. Caro y Cuervo, 2000. lurilingue, des morphèmes révèle une préférence pour la syllabe CV et des lexèmes bimores.
Nieves R., Hacia una zonificaciôn dialectal de la lengua pâez, Colombia pais p Le mot est au moins bimore. Par ordre décroissant, le gabarit du lexique est CVCV,
Boletin de lingiiistica amerindia y afroamericana, n 3, 1995.
°

CVV, VCV, avec quelques W. Sont trimores des dérivés fossilisés et des idéo-
modalité dans la langue paez (langue amérin-
Rojas Curieux T., Prédication, aspect ettorat, Université Paris 7, 1996. phones. Une syllabe CVV est finale de morphème. Les six voyelles entrent dans des
dienne de la Colombie), thèse de doc syllabes à V identiques (QV . Des contraintes structurent le lexique : une suite
- La lenguapâez : una vision de su gramâtica, Bogota, Ministerio de Cultura, 1998. tautomorphémique VjVj ne peut avoir deux voyelles arrondies, ni deux voyelles
d avant, ni deux voyelles hautes dont Vj étirée ; ni Vj moyenne et Vj haute, ni V;
'

Voir également : du nahuatl clas- basse et V


Launey M., Une grammaire omniprédicative. Essai sur la morphosvntaxe moyenne ; l'étirée d'arrière est proscrite comme Vj. Une harmonie voca-
lique touctie les racines (C)VCV. Des contraintes qui pèsent sur V persistent dans
sique, Vans, CNRS, 1994.
(C)V1 CV-, : pas de voyelles arrondies, ni V, moyenne d'arrière et V2 haute d'ar-
rière. La qualité de C2 permet les combinaisons eCi et iCi (coronale), eCi (vélaire
Suites allomorphémiques Vj-Vj soumises à assimilation : progressive i-i -> //, e-i
LE TATUYO -

> ei (facultative) ; régressive de voyelle basse pa-e -» pee pa-o -> poo pa-i -»
Eisa Gomez-Imbert pii. Une voyelle longue est partiellement assimilée : V -Vj -» V Vj uu-a -» uaa.
CNRS Trois voyelles identiques se réduisent à deux quatre à trois.
,

La nasalité, trait du morphème et caractéristique de la langue, oppose racines


orales : bâa-jû-pâ-ra [bâajûpâja] « ils ont nagé » et nasales : ~bâa-jû-pâ-~ra
,

Contexte culturel , [mâapûpâja] « ils ont versé par poignées » (~ introduit un morphème nasal). Tout
lexème est nasal ou oral Les suffixes bimores aussi, sauf deux à more initiale
Les que,que tro, cents Tatuyo qui v.vent dans
.

vide Vn « pluralisateur d'inanimé » Vra « augmentatif ». Un suffixe unimore est


(Vaupés colombien, Nord-Ouest amazonien) parlen e ôa »
,

ou P [+ nasal] ~ra, [- nasal] wi « cl. tubulaire », non spécifié jû-pâ. Tous les segments
aie. Les premiers écrits sur la rég.on nomment «tam
t depeche
-

de c hasse et d un morphème nasal se nasalisent sauf les plosives sourdes (transparentes à la nasa-
'

(-paboa «tatous »). Ces riverains vivent du manioc amer e de , .ité) ; ceux des sufixes non spécifiés assimilés aussi ; un morphème [-nasal] bloque
de cueillette. Les langues des groupes allies P
0
' S différences
.
'
l extension dans le mot Une plosive sonore initiale de morphème oral se préna-
exogamie linguistique des Tukano. Ainsi, tatuyo IT mêmc W tonal,Pourla
.

'
l salise après un morphème nasal Les tons, haut et bas, sont portés par les mores.
hèmes, partagent la même ' Z Lyo-
.

en matière de morp Quatre schèmes sont attestés pour les noms bimores, ni « argile », m « sang », ûû
f sion consonantique ; le karapana possède la pala aie, c devenue h w
n
o « poisson sp », uu « tortue », trois pour les verbes wée « gauler », weé « enlever »,
cette langue à tradition
tablie par
orale, l'écriture phonologique est é .

wéé « ramer » Le sandhi produit assimilations, décalages en amont, polarisations


.

et failles .

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