Vous êtes sur la page 1sur 9

INALCO

/ Initiation /L1 : Histoire du monde arabe et du Moyen-Orient (ALI1A50C) CM7


Anne-Claire Bonneville et Chantal Verdeil
2017-2018

CM 7 Le Moyen-Orient dans l’Entre-deux-guerres
La formation de nouveaux Etats

L’Empire ottoman capitule le 30 octobre 1918 (Armistice de Moudros).


Le règlement de la guerre provoque un bouleversement complet de la région :
non seulement la carte politique est totalement remaniée mais les puissances
européennes sont en mesure d’exercer une influence politique directe.

I- Un règlement de la guerre en faveur des puissances alliées


1- des attentes très différentes exprimées à la conférence de la Paix
La conférence de la Paix de Versailles se tient entre janvier 1919 et juin 1919 à
Paris. Elle réunit tous les protagonistes vainqueurs de la guerre. Des délégations sont
invitées à venir présenter leurs attentes.

L’un des enjeux est de savoir qui va représenter les Arabes à la conférence.
Trois délégations les représentent et soumettent leur dossier en février 1919:
-Faysal, le fils du chérif Hussein, est invité en tant que représentant du Chérif
Hussein. Il est porteur d’un projet de Royaume arabe, qui s’étendrait sur l’Asie
arabe (en excluant la Palestine). Ce royaume serait une confédération qui
bénéficierait d’une aide plus ou moins active des puissances occidentales. Il s’appuie
sur les idées du président Wilson dont le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
-Les Français insistent pour que le comité syrien, des Syriens francophiles,
soient entendus. La délégation du comité syrien insiste sur la nécessité de l’unité
syrienne (jusqu’au Sinaï) et le refus du rattachement aux bédouins du Hedjaz.
Demande la France pour puissance mandataire.
-Une délégation libanaise issue de l’ancien conseil administratif du Mont Liban
est aussi conviée à s’exprimer. Elle demande la création d’un État libanais sur un
territoire plus vaste que le Mont-Liban proprement dit. Cet État serait protégé par la
France.
Une délégation sioniste est également invitée. Elle évoque ses droits
historiques sur la Palestine et revendique la liberté de l’immigration juive en
Palestine dont elle dessine le territoire. En 1918, le Yichouv est persuadé que grâce à
la déclaration Balfour et l’aide britannique, l’État juif est pour bientôt.

En revanche l’accès à la Conférence est refusé à certains groupes.


-Les Egyptiens. Peu avant la fin de la guerre, Sa`d Zaghlûl regroupe des
opposants à la politique britannique. Ils se constituent en délégation (Wafd) dont
l’objectif est d’aller à la Conférence de la Paix soutenir la cause égyptienne. Il
rencontre le 13 novembre 1918 avec le Haut-commissaire britannique qui oppose un
net refus à la demande égyptienne : le contrôle du canal de Suez est une
INALCO / Initiation /L1 : Histoire du monde arabe et du Moyen-Orient (ALI1A50C) CM7
Anne-Claire Bonneville et Chantal Verdeil
2017-2018
préoccupation stratégique majeure des Britanniques jusqu’après la Seconde Guerre
mondiale
-Les délégués mésopotamiens, en particulier chiites, sont également exclus du
débat par les Britanniques.
-Les délégués palestiniens qui s’inquiètent de la déclaration Balfour.

2 – l’invention des mandats


A la Conférence de la Paix, le président américain Wilson décide de la mise
sous tutelle des provinces arabes de l’EO : « Nous sommes d’accord sur ce point que ces
populations ne sont pas capables de se gouverner elles-mêmes. Il faut qu’elles soient assistées,
dans leur propre intérêt par une puissance occidentale ».
-> création de la notion de mandat
L'article 22 du Pacte de la S.D.N. (Société des Nations) adopté le 28 avril 1919 à
Versailles, pose les principes généraux du régime du mandat : les peuples des
territoires soit non européens retirés à l'ex-Empire allemand soit nés du
démembrement de l'Empire ottoman à l'issue de la Première Guerre mondiale sont
reconnus comme incapables « de se diriger eux-mêmes dans les conditions
particulièrement difficiles du monde moderne », il faut donc en assurer le bien-être et le
développement ; pour atteindre ce but, il est choisi de « confier la tutelle de ces
peuples aux nations développées, qui, en raison de leurs ressources, de leur expérience ou de
leur position géographique, sont le mieux à même d'assumer cette responsabilité et consentent
à l'accepter ». Cette structure nouvelle est placée sous le contrôle de la SDN.

Mai 1919, dispute entre Clemenceau et Lloyd George sur la répartition des
mandats … Envoi d’une commission américaine sur le terrain pour connaître les
vœux des populations -> commission King-Crane1 du 10 juin au 21 juillet 1919.
Le rapport rendu à l’automne 1919 est pour ainsi dire enterré car Wilson fait une
attaque peu après l’avoir réceptionné. L’enquête montre toutefois
-une opposition quasi unanime des Arabes au foyer national juif et rapporte les
inquiétudes des administrateurs britanniques.
-le souhait, dans les milieux musulmans de Syrie, du Liban et de Palestine, de l’unité
arabe et de l’indépendance,
-dans les milieux maronites et grecs-catholiques, de la présence française et de la
création d’un Liban indépendant.

fin avril 1920, conférence de San Remo. Elle règle la question de l’attribution
des mandats aux autorités mandataires. Le tracé reprend à peu près les lignes des
accords Sykes-Picot !
- Aux Britanniques : Mandat sur la Palestine et la Mésopotamie
- Aux Français : Mandat sur le Nord
Zones attribuées mais charge aux mandataires de les organiser.

1
Charles R. Crane et Henry Churchill King
INALCO / Initiation /L1 : Histoire du monde arabe et du Moyen-Orient (ALI1A50C) CM7
Anne-Claire Bonneville et Chantal Verdeil
2017-2018

3- le projet nationaliste arabe en échec


Dans le même temps, à Damas, les nationalistes arabes mesurent que leur
projet est en passe d’échouer. Parmi eux les personnalités les plus marquantes sont le
Syrien Jamil Mardam Bey, l’Irakien Nuri Said. Un Congrès syrien se réunit en juillet
1919 et élabore le « Programme de Damas » : rejet de l’art 22 de la SDN, rejet des
réclamations françaises sur la Syrie, souhait d’un gouvernement démocratique avec
l’émir Faysal à sa tête, souhait d’indépendance et de liberté économique avec la
Mésopotamie.
Fuite en avant des nationalistes : le congrès syrien se réunit le 7 mars 1920 et
proclame l’indépendance de la Syrie avec Faysal comme roi. >> politique du fait
accompli
De quelle Syrie s’agit-il ? : « La Syrie dans ses limites naturelles, la Palestine
comprise… Nous prendrons en considération tous les désirs patriotiques des Libanais, relatifs
à l’administration de leur contrée, dans ses limites connues avant la guerre, à condition que le
Levant se tienne à l’écart de toute influence étrangère. »
Il s’agit bien de reconnaître l’autonomie de la montagne libanaise dans un cadre
politique plus large
La Mésopotamie n’est pas incluse dans les limites du Royaume arabe.

Cependant, les puissances occidentales ne peuvent accepter de voir se former


une entité étatique sans leur consentement. En juillet 1920 les troupes françaises de
Gouraud marchent sur Damas, battent les troupes du royaume arabe à la bataille de
Maysaloun (24 juillet 1920), s’emparent de Damas le 25 juillet et chassent Faysal du
pouvoir.
Dans la mémoire collective arabe, l’épisode bref du Royaume arabe reste très
profondément gravé. Cette période est rapidement idéalisée. Mythe d’une parfaite
unité des Arabes autour de Faysal, « Roi légitime, reconnu à l’unanimité par le Congrès
syrien » (S. Arslan) : « Le peuple était prêt à tous les sacrifices. La sécurité dans la zone
internationale était telle que l’histoire n’en a pas enregistrée de pareilles dans ce pays. …
Chacun contribuait, selon ses moyens et ses aptitudes, à la consolidation du nouvel état des
choses » Réalité différente naturellement : au lendemain de la guerre, le pays est
ruiné, dévasté, sans structures solides, et le banditisme fait régner sa loi. En
expliquant que l’ordre règne, cela signifie que des troupes européennes, notamment
françaises, étaient inutiles dans le pays pour assurer précisément l’ordre.
Dans le discours nationaliste arabe, le Royaume arabe devient un âge d’or qu’il
faut retrouver. Il s’agit de réunir les Arabes dans une même entité politique. Les
nationalistes arabes dénoncent aussi la félonie des grandes puissances qui ont suscité
de grands espoirs d’indépendance et d’unité chez les Arabes puis les ont trahis.
Chérif Hussein, « victime de la perfidie, du mensonge et de la duplicité de l’Angleterre ».
INALCO / Initiation /L1 : Histoire du monde arabe et du Moyen-Orient (ALI1A50C) CM7
Anne-Claire Bonneville et Chantal Verdeil
2017-2018
Projet qui devient d’autant plus ardu à réaliser que la région est divisée en multiples
entités politique par les puissances mandataires.

II – Nouvelle carte politique du Moyen-Orient


1- l’organisation du mandat français
Pour faire face au nationalisme syrien et en vertu d’une tradition coloniale
ancienne, les Français s’appuient sur les particularismes locaux et culturels : Turcs à
Alexandrette, Maronites au Liban, Alaouites à Lattaquié, Druzes au sud de Damas,
Kurdes dans l’est.

La création d’un Etat du Grand Liban


Le 10 novembre 1919, Clemenceau, dans une lettre au patriarche maronite
Hoyek, accède au désir des Libanais de conserver un gouvernement autonome et
un statut national indépendant.
Six semaines après l’entrée des troupes françaises à Damas, l’Etat du Grand-
Liban est créé, le 1er septembre 1920. On rattache à la Montagne les régions utiles : la
côte avec ses ports et la plaine intérieure céréalière (traumatisme de la famine). Aux
arguments historiques, on a ajouté ceux de la viabilité économique.
->Le Grand-Liban naît sous la pression des chrétiens maronites, avec le
soutien français, comme un défi aux nationalistes arabes de Damas. Les
nationalistes arabes n’acceptent pas cette amputation territoriale. Il faut garder cela
en mémoire pour comprendre les évolutions politiques au Liban et de la Syrie.

Ce Grand Liban englobe des régions à majorité musulmane. Les chrétiens qui
représentaient 80% de la population du Mont-Liban ne sont que 55% dans le Grand
Liban de 1921. Par le jeu des poussées démographiques, le recensement de 1932
indique que les chrétiens ne sont plus que 50,7%. Il n’y aura plus après cette date de
recensement officiel !
Les musulmans sont minoritaires en 1921, 45%. Les sunnites sont les plus
nombreux, majoritaires dans les ports. Les chiites constituent la 3° communauté. Ce
sont des ruraux implantés dans les régions périphériques du nouvel État (au Sud et
dans la plaine de la Bekaa).
La majorité des populations du Liban périphérique, ou au moins les notabilités
qui les représentent, refusent toute légitimité au Grand-Liban et beaucoup
s’installent dans un refus total du nouvel Etat. La position des sunnites dans l’Etat du
Grand-Liban est particulièrement difficile dans la mesure où ils sont ravalés au rang
de « communauté ».

Le morcellement de la Syrie
Le général Gouraud, Haut-commissaire, organise le reste de la Syrie. En juin
1922, constitution de 4 Etats syriens : l’Etat indépendant de Damas, le
INALCO / Initiation /L1 : Histoire du monde arabe et du Moyen-Orient (ALI1A50C) CM7
Anne-Claire Bonneville et Chantal Verdeil
2017-2018
Gouvernement d’Alep, le Territoire autonome des Alaouites, le djebel druze
autonome.
Dans les années qui suivent, évolution dans la configuration de la Syrie : en
1925 la fusion des Etats d’Alep et de Damas sous le nom d’Etat de Syrie, comprenant
le sandjak autonome d’Alexandrette. A l’Est, administration directe française

>> Les nouvelles frontières désorganisent les circuits d’échanges. Ex :


Beyrouth, ville de la renaissance culturelle arabe et des échanges méditerranéens, se
trouve rattachée à l’entité centrée sur la montagne maronite et cesse d’être le
débouché naturel de Damas sur la Méditerranée. Tripoli est isolé de son arrière-pays
syrien.
Ces nouvelles frontières bouleversent également les modalités politiques des
sociétés locales, en faisant des communautés confessionnelles des forces politiques.

2- 3 entités dans l’espace britannique


Les Britanniques occupent la Mésopotamie, en raison de l’importance
économique et stratégique de cet espace2.
Les Britanniques cherchent à donner une façade arabe à la domination
britannique qui s’exerce. Ils organisent en décembre 1918 et janvier 1919 une
consultation populaire3. A cette occasion, expression chez les chiites d’un rejet de la
présence européenne. A la fin du mois de juin 1920, une insurrection éclate
principalement parmi les groupes tribaux du Moyen-Euphrate et dans les villes
saintes. LA répression est très sévère.
Dès le 11 novembre 1920, un gouvernement irakien est constitué sous la
direction de notables sunnites.

Tenue en mars 1921 de la conférence du Caire par les responsables


britanniques, autour de Churchill, pour définir la nouvelle carte politique de l’espace
mandataire qui a été confié à la Grande-Bretagne. 3 entités sont constituées :
- un royaume d’Irak qui correspond aux 3 anciennes provinces ottomanes de
Basra, Bagdad et Mossoul et qui sera confié à Faysal. Faysal est élu roi et couronné le
23 août 1921.
- une Palestine où s’appliquera la déclaration Balfour. Son avenir demeure
incertain : un Etat juif, un Etat arabe, un Etat binational ? Les tensions existent déjà
(ces évolutions sont développées dans le CM8) ;
-une Transjordanie. Le 16 Septembre 1922 est créé l’émirat de Transjordanie,
confié à Abdallah, l’un des fils du Chérif Hussein. La frontière avec la Palestine est
fixée au Jourdain et au milieu de la Mer Morte ; au Sud elle fait l’objet d’un
compromis avec Ibn Saud qui laisse Aqaba à la Transjordanie (1926).

2
Prise de Mossoul après la signature de l’armistice de Moudros, signe de cet intérêt très net pour la
zone pétrolière
3
« Etes-vous favorables à la constitution d’un Etat arabe sous contrôle britannique… -Si oui, désirez-
vous qu’un émir arabe dirige cet Etat ? … »
INALCO / Initiation /L1 : Histoire du monde arabe et du Moyen-Orient (ALI1A50C) CM7
Anne-Claire Bonneville et Chantal Verdeil
2017-2018
NB/ Abdallah a très tôt des visées sur la Palestine et est prêt à s’entendre dans ce but
avec les sionistes. Nous reverrons cela au moment de 1948.

è Les Britanniques se sentent quittes vis-à-vis des promesses faites aux


Hachémites !

3- la création du royaume d’Arabie saoudite


Situation dans la péninsule arabique
La domination ottomane ne s’étendait pas à l’ensemble de la péninsule arabique,
mais au Hedjaz et au Yémen à l’Ouest. et, à l’Est, le long du Golfe, des garnisons
étaient implantées du Koweit aux émirats.
Les petits émirats, pauvres dont la ressource principale est la pêche à la perle,
passent au XIX°s sous protectorat britannique au prétexte de lutter contre la piraterie
et d’instaurer une trêve générale dans la zone. En réalité, souci britannique d’assurer
le contrôle et la sécurité de la route des Indes. Ils restent complètement libres de
gérer leurs affaires intérieures mais les relations avec l’extérieur sont contrôlées par
les Britanniques. Installation des Britanniques à Aden également, protectorat sur
Koweit en 1899.
Au cœur de la péninsule, des petits Etats bédouins issus des grands groupes tribaux,
souvent en conflit

la conquête du Royaume
Le jeune ‘Abd-al-‘Aziz ben Abd al-Rahman ben Faysal Al-Sa‘ûd rêve de restaurer
l’Etat de ses ancêtres. Son ambition politique s’accompagne d’une prédication
religieuse wahhabite. La conquête d’Abd al-Aziz :
- Janvier 1902 : prise de la ville de Riyad avec quelques compagnons
-1906, il tient tout le Najd. Cumule le pouvoir politique et religieux. Prend à
dater de ce jour le nom d’Ibn Sa’ûd.
-1913, s’empare de la région côtière du Hasa s’ouvrant ainsi un débouché sur le
Golfe (et s’approprie ainsi de gigantesques réserves de pétrole encore inconnues)
Après la guerre, Ibn Sa’ûd se sent encerclé par les Hachémites: Hedjaz,
Transjordanie et Irak. Conflit entre les deux prend une tournure religieuse. Les
« Wahhabites » sont accusés d’être des hérétiques ; Ibn Sa’ûd accuse Hussein d’avoir
trahi l’Islam et les Arabes pendant la guerre. NB : Ibn Sa’ûd restera très méfiant vis-à-
vis des projets d’unité arabe au profit des Hachémites (à garder en mémoire pour la fondation
de la Ligue des Etats arabes).
Octobre 1924, prise de La Mecque et 1926, conquête complète du Hedjaz.
>>Problème pour les musulmans que cette arrivée des « Wahhabites » dans les
Villes Saintes : ils apparaissent comme « hétérodoxes » et opposés à bien des
pratiques religieuses traditionnelles.
-> Nécessité d’une politique de communication pour Ibn Sa’ûd pour rassurer ses
coreligionnaires : 1) présente la conquête comme une libération des Villes saintes de
la tutelle étrangère dans la mesure où Hussein est présenté comme « un agent des
INALCO / Initiation /L1 : Histoire du monde arabe et du Moyen-Orient (ALI1A50C) CM7
Anne-Claire Bonneville et Chantal Verdeil
2017-2018
puissances étrangères » 2) amélioration des conditions dans lesquelles s’effectuaient
les pèlerinages c’est-à-dire lutte contre exploitation commerciale des Lieux Saints ;
amélioration des transports, de l’hygiène, de la sécurité. Prostitution interdite, luxe
découragé. 3) Propose une consultation de tous les musulmans pour la gestion des
Lieux Saints : Congrès du monde musulman organisé le 7 juin 1926 à La Mecque4.
>>Importance de ce Congrès qui permet de réintégrer le « wahhabisme » au
sein de l’Islam officiel sunnite, après deux siècles de rejet.
Traité de Jeddah du 20 mai 1927 signé avec les Britanniques : conquêtes
saoudiennes reconnues. Ibn Sa’ûd renonce à ses ambitions sur les émirats du Golfe.
-> C’est le second État, après le Yémen, à accéder à l’indépendance et à une
reconnaissance internationale.

Dernier agrandissement territorial avec l’annexion de la région de l’Asir en


1933

4- La Turquie
Du côté turc, refus du traité de Sèvres signé par le Sultan en août 1920. Mustafa
Kemal prend les armes. Il s’agit de s’opposer au découpage territorial imposé par les
Européens et qui a réduit la Turquie à la portion congrue : le centre de l’Anatolie et
Constantinople.
1923, traité de Lausanne établit les contours de la Turquie. NB/ Il n’y a ni
Arménie, ni Kurdistan.

III- Résistance et conciliations


1- L’indépendance égyptienne arrachée
Les Egyptiens lettrés pensent que l’assistance apportée à la cause des Alliés mérite à
l’Egypte son indépendance. Les déclarations de Wilson affermissent cet espoir.
è vif mouvement en faveur de l’indépendance.
Le Wafd lance un mouvement d’agitation dans le pays : grèves, émeutes, sabotages,
attentats. Mouvement d’union nationale des coptes et des musulmans. Même les
femmes descendent dans la rue pour manifester. Répression.
Londres décide d’envoyer une commission, présidée par Lord Milner, pour trouver
une solution. Février 1920, le rapport Milner propose de faire évoluer le protectorat
en une alliance entre l’Egypte et la Grande-Bretagne.
Les Britanniques souhaitent alors entrer dans un processus de négociations mais ne
trouvent en face d’eux aucun interlocuteur5. Les Egyptiens posent comme condition
préalable l’indépendance du pays. Comme l’agitation ne faiblit pas, les Anglais sont
contraints de céder.


4
Il n’en sort rien de particulier.
5
Zaghlûl est libéré en avril 1919 et autorisé à se rendre à Paris où le protectorat vient d’être reconnu par
les différentes puissances. Zaghlûl maintient sa position d’intransigeance face aux Britanniques qui l’arrêtent à
nouveau en décembre 1921 et l’exilent aux Seychelles. Il est libéré après l’indépendance de l’Egypte.
INALCO / Initiation /L1 : Histoire du monde arabe et du Moyen-Orient (ALI1A50C) CM7
Anne-Claire Bonneville et Chantal Verdeil
2017-2018
>> le 28 février 1922, Royaume-Uni accorde unilatéralement son indépendance
à l’Egypte avec des réserves, comme la sécurité des communications de l’Empire et la
défense de l’Egypte, qui doivent faire l’objet de négociations. Ces réserves permettent
aux Britanniques de se maintenir dans la zone du canal. Dans les faits, pas de
modifications notoires à la présence britannique6
mais un sentiment d’immense victoire chez les Egyptiens : indépendance
acquise sans contrepartie, apparente… Sentiment de fierté et de supériorité renforcé.
L’indépendance obtenue, l’Egypte adopte de nouvelles institutions :
monarchie parlementaire instituée en 1923.

2- Agitation chiite dans le royaume irakien


Dans le royaume irakien, agitation chiite persiste : 1922 contre le traité anglo-
irakien qui consacre les intérêts de la puissance mandataire dans la région (contrôle
de l’adm par les Britanniques) ; en 1923 quand sont organisées des élections à
l’assemblée irakienne pour ratifier le traité. Les religieux chiites appellent au boycott.
Arrestation des chefs religieux et exil. Le traité est ratifié sous la menace de rendre
Mossoul à la Turquie.
En juin 1924, la constitution irakienne est adoptée. Les religieux chiites sont
autorisés à rentrer à condition de ne pas participer aux affaires politiques.
>> marginalisation des chiites. Le fossé confessionnel se creuse.
Classe politique irakienne constituée des grands notables urbains sunnites et
des anciens officiers qui ont participé à la révolte arabe (Nuri Saïd). Futures élites
éduquées dans l’adhésion au nationalisme arabe

3- révolte syrienne et établissement de constitutions


En 1923 dans le djebel druze, est nommé un gouverneur français, le capitaine
Carbillet, en violation du statut d’autonomie reconnu à la région en 1921 qui
prévoyait un gouverneur local. Carbillet veut détruire l’influence des notables et
délivrer les paysans de l’exploitation. Cette politique déclenche en 1925 une révolte
dans le Djebel druze.
Rébellion s’organise derrière Sultan al-Atrach qui fédère toutes les factions
druzes. Le mouvement, druze à l’origine, devient vite syrien et trouve un écho au
Liban.
>>C’est le plus grand mouvement populaire arabe des années 1920 avec un
caractère nationaliste syrien et arabiste. Y participent les notables nationalistes, la
moyenne et petite bourgeoisie urbaine musulmane, une grande partie de la
paysannerie.
Le 18 octobre 1925, l'attaque du Palais Azem, siège de l'administration française
en Syrie, marque un point fort de cette grande révolte. Damas est alors bombardée


6
une armée toujours sur le sol égyptien ; les officiers britanniques toujours à la tête des troupes
égyptiennes et des forces de police ; toujours des fonctionnaires britanniques dans les services égyptiens :
conseillers financiers, judiciaires, à la sécurité publique…
INALCO / Initiation /L1 : Histoire du monde arabe et du Moyen-Orient (ALI1A50C) CM7
Anne-Claire Bonneville et Chantal Verdeil
2017-2018
pendant 48h (20-21 octobre 1925). Le dernier bastion nationaliste est écrasé en juillet
1926.

Avec la révolte druze, les autorités françaises décident de laisser les deux pays
élaborer leurs institutions.
- Au Liban, la constitution est adoptée le 26 mai 1926, elle établit une
république parlementaire. L’article 95 de la constitution institutionnalise le
confessionnalisme politique au Liban : « les communautés seront équitablement
représentées dans les emplois publics et dans la composition du ministère »
>> La concrétisation du fait libanais rencontre une forte opposition dans une
partie de la population musulmane

En Syrie, une constitution est proclamée de façon autoritaire en 1930. En 1933


face au refus des députés de valider le traité préparé par la France, le Parlement est
suspendu >>période de tension et d’agitation qui s’ouvre

Conclusion
A l’issue de la Première guerre mondiale, le national arabe est le grand vaincu
politiquement. L’échec du projet d’unité arabe et le morcellement territorial sont
sources d’un vif ressentiment à l’égard des Occidentaux.
L’idéal unitaire arabe demeure mais en // développement d’un sentiment
d’appartenance à un Etat qui se met en place.
Concurrence également, dans l’Entre-2-guerres et après, du mouvement de
reconnaissance identitaire islamique avec la naissance des Frères musulmans.

Vous aimerez peut-être aussi