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L’un des enjeux est de savoir qui va représenter les Arabes à la conférence.
Trois délégations les représentent et soumettent leur dossier en février 1919:
-Faysal, le fils du chérif Hussein, est invité en tant que représentant du Chérif
Hussein. Il est porteur d’un projet de Royaume arabe, qui s’étendrait sur l’Asie
arabe (en excluant la Palestine). Ce royaume serait une confédération qui
bénéficierait d’une aide plus ou moins active des puissances occidentales. Il s’appuie
sur les idées du président Wilson dont le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
-Les Français insistent pour que le comité syrien, des Syriens francophiles,
soient entendus. La délégation du comité syrien insiste sur la nécessité de l’unité
syrienne (jusqu’au Sinaï) et le refus du rattachement aux bédouins du Hedjaz.
Demande la France pour puissance mandataire.
-Une délégation libanaise issue de l’ancien conseil administratif du Mont Liban
est aussi conviée à s’exprimer. Elle demande la création d’un État libanais sur un
territoire plus vaste que le Mont-Liban proprement dit. Cet État serait protégé par la
France.
Une délégation sioniste est également invitée. Elle évoque ses droits
historiques sur la Palestine et revendique la liberté de l’immigration juive en
Palestine dont elle dessine le territoire. En 1918, le Yichouv est persuadé que grâce à
la déclaration Balfour et l’aide britannique, l’État juif est pour bientôt.
Mai 1919, dispute entre Clemenceau et Lloyd George sur la répartition des
mandats … Envoi d’une commission américaine sur le terrain pour connaître les
vœux des populations -> commission King-Crane1 du 10 juin au 21 juillet 1919.
Le rapport rendu à l’automne 1919 est pour ainsi dire enterré car Wilson fait une
attaque peu après l’avoir réceptionné. L’enquête montre toutefois
-une opposition quasi unanime des Arabes au foyer national juif et rapporte les
inquiétudes des administrateurs britanniques.
-le souhait, dans les milieux musulmans de Syrie, du Liban et de Palestine, de l’unité
arabe et de l’indépendance,
-dans les milieux maronites et grecs-catholiques, de la présence française et de la
création d’un Liban indépendant.
fin avril 1920, conférence de San Remo. Elle règle la question de l’attribution
des mandats aux autorités mandataires. Le tracé reprend à peu près les lignes des
accords Sykes-Picot !
- Aux Britanniques : Mandat sur la Palestine et la Mésopotamie
- Aux Français : Mandat sur le Nord
Zones attribuées mais charge aux mandataires de les organiser.
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Charles R. Crane et Henry Churchill King
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Ce Grand Liban englobe des régions à majorité musulmane. Les chrétiens qui
représentaient 80% de la population du Mont-Liban ne sont que 55% dans le Grand
Liban de 1921. Par le jeu des poussées démographiques, le recensement de 1932
indique que les chrétiens ne sont plus que 50,7%. Il n’y aura plus après cette date de
recensement officiel !
Les musulmans sont minoritaires en 1921, 45%. Les sunnites sont les plus
nombreux, majoritaires dans les ports. Les chiites constituent la 3° communauté. Ce
sont des ruraux implantés dans les régions périphériques du nouvel État (au Sud et
dans la plaine de la Bekaa).
La majorité des populations du Liban périphérique, ou au moins les notabilités
qui les représentent, refusent toute légitimité au Grand-Liban et beaucoup
s’installent dans un refus total du nouvel Etat. La position des sunnites dans l’Etat du
Grand-Liban est particulièrement difficile dans la mesure où ils sont ravalés au rang
de « communauté ».
Le morcellement de la Syrie
Le général Gouraud, Haut-commissaire, organise le reste de la Syrie. En juin
1922, constitution de 4 Etats syriens : l’Etat indépendant de Damas, le
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Gouvernement d’Alep, le Territoire autonome des Alaouites, le djebel druze
autonome.
Dans les années qui suivent, évolution dans la configuration de la Syrie : en
1925 la fusion des Etats d’Alep et de Damas sous le nom d’Etat de Syrie, comprenant
le sandjak autonome d’Alexandrette. A l’Est, administration directe française
la conquête du Royaume
Le jeune ‘Abd-al-‘Aziz ben Abd al-Rahman ben Faysal Al-Sa‘ûd rêve de restaurer
l’Etat de ses ancêtres. Son ambition politique s’accompagne d’une prédication
religieuse wahhabite. La conquête d’Abd al-Aziz :
- Janvier 1902 : prise de la ville de Riyad avec quelques compagnons
-1906, il tient tout le Najd. Cumule le pouvoir politique et religieux. Prend à
dater de ce jour le nom d’Ibn Sa’ûd.
-1913, s’empare de la région côtière du Hasa s’ouvrant ainsi un débouché sur le
Golfe (et s’approprie ainsi de gigantesques réserves de pétrole encore inconnues)
Après la guerre, Ibn Sa’ûd se sent encerclé par les Hachémites: Hedjaz,
Transjordanie et Irak. Conflit entre les deux prend une tournure religieuse. Les
« Wahhabites » sont accusés d’être des hérétiques ; Ibn Sa’ûd accuse Hussein d’avoir
trahi l’Islam et les Arabes pendant la guerre. NB : Ibn Sa’ûd restera très méfiant vis-à-
vis des projets d’unité arabe au profit des Hachémites (à garder en mémoire pour la fondation
de la Ligue des Etats arabes).
Octobre 1924, prise de La Mecque et 1926, conquête complète du Hedjaz.
>>Problème pour les musulmans que cette arrivée des « Wahhabites » dans les
Villes Saintes : ils apparaissent comme « hétérodoxes » et opposés à bien des
pratiques religieuses traditionnelles.
-> Nécessité d’une politique de communication pour Ibn Sa’ûd pour rassurer ses
coreligionnaires : 1) présente la conquête comme une libération des Villes saintes de
la tutelle étrangère dans la mesure où Hussein est présenté comme « un agent des
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puissances étrangères » 2) amélioration des conditions dans lesquelles s’effectuaient
les pèlerinages c’est-à-dire lutte contre exploitation commerciale des Lieux Saints ;
amélioration des transports, de l’hygiène, de la sécurité. Prostitution interdite, luxe
découragé. 3) Propose une consultation de tous les musulmans pour la gestion des
Lieux Saints : Congrès du monde musulman organisé le 7 juin 1926 à La Mecque4.
>>Importance de ce Congrès qui permet de réintégrer le « wahhabisme » au
sein de l’Islam officiel sunnite, après deux siècles de rejet.
Traité de Jeddah du 20 mai 1927 signé avec les Britanniques : conquêtes
saoudiennes reconnues. Ibn Sa’ûd renonce à ses ambitions sur les émirats du Golfe.
-> C’est le second État, après le Yémen, à accéder à l’indépendance et à une
reconnaissance internationale.
4- La Turquie
Du côté turc, refus du traité de Sèvres signé par le Sultan en août 1920. Mustafa
Kemal prend les armes. Il s’agit de s’opposer au découpage territorial imposé par les
Européens et qui a réduit la Turquie à la portion congrue : le centre de l’Anatolie et
Constantinople.
1923, traité de Lausanne établit les contours de la Turquie. NB/ Il n’y a ni
Arménie, ni Kurdistan.
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Il n’en sort rien de particulier.
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Zaghlûl est libéré en avril 1919 et autorisé à se rendre à Paris où le protectorat vient d’être reconnu par
les différentes puissances. Zaghlûl maintient sa position d’intransigeance face aux Britanniques qui l’arrêtent à
nouveau en décembre 1921 et l’exilent aux Seychelles. Il est libéré après l’indépendance de l’Egypte.
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>> le 28 février 1922, Royaume-Uni accorde unilatéralement son indépendance
à l’Egypte avec des réserves, comme la sécurité des communications de l’Empire et la
défense de l’Egypte, qui doivent faire l’objet de négociations. Ces réserves permettent
aux Britanniques de se maintenir dans la zone du canal. Dans les faits, pas de
modifications notoires à la présence britannique6
mais un sentiment d’immense victoire chez les Egyptiens : indépendance
acquise sans contrepartie, apparente… Sentiment de fierté et de supériorité renforcé.
L’indépendance obtenue, l’Egypte adopte de nouvelles institutions :
monarchie parlementaire instituée en 1923.
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une armée toujours sur le sol égyptien ; les officiers britanniques toujours à la tête des troupes
égyptiennes et des forces de police ; toujours des fonctionnaires britanniques dans les services égyptiens :
conseillers financiers, judiciaires, à la sécurité publique…
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pendant 48h (20-21 octobre 1925). Le dernier bastion nationaliste est écrasé en juillet
1926.
Avec la révolte druze, les autorités françaises décident de laisser les deux pays
élaborer leurs institutions.
- Au Liban, la constitution est adoptée le 26 mai 1926, elle établit une
république parlementaire. L’article 95 de la constitution institutionnalise le
confessionnalisme politique au Liban : « les communautés seront équitablement
représentées dans les emplois publics et dans la composition du ministère »
>> La concrétisation du fait libanais rencontre une forte opposition dans une
partie de la population musulmane
Conclusion
A l’issue de la Première guerre mondiale, le national arabe est le grand vaincu
politiquement. L’échec du projet d’unité arabe et le morcellement territorial sont
sources d’un vif ressentiment à l’égard des Occidentaux.
L’idéal unitaire arabe demeure mais en // développement d’un sentiment
d’appartenance à un Etat qui se met en place.
Concurrence également, dans l’Entre-2-guerres et après, du mouvement de
reconnaissance identitaire islamique avec la naissance des Frères musulmans.