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Burundi : Qu’a-t-il réellement promis ? Analyse thématique et sémiotique des


discours d’investiture du nouveau Président du Burundi.
Par Pr Gertrude KAZOVIYO
0. Introduction
Qu’a-t-il réellement promis ? Peut-on y croire ou les prendre comme des paroles qui
s’envolent ? La question mérite d’être posée. Henri Queuille disaient que « les promesses
n’engagent que ceux qui les écoutent ». Mais, dans la tradition africaine, la parole est force
et l’homme s’engage quand il parle. Il sait que la société le juge par rapport à ses dires.
À l’occasion des 100 jours du nouveau pouvoir de Gitega, il est tout à fait légitime de
revenir sur ces promesses électorales, il est important d’y réfléchir. « Cogito ergo sum »,
nous diraient les cartésiens.
Qu’est-ce qui motive alors cette réflexion et en quoi cette analyse est nécessaire ?
Quelqu’un dirait que tout récepteur intéressé est en mesure de décoder lui-même le
contenu de ces discours électoraux. Mais ce n’est pas toujours évident.
Comme l’indique Maingueneau (1997 : 38)1, le discours, tout en se développant dans le
temps et de manière linéaire, « peut dévier en cours de route (digressions, …), revenir à sa
direction initiale, changer de direction, etc. ». Cela peut dérouter un récepteur non avisé.
L’on observe, en effet, des jeux d’anticipation ou des retours en arrière au cours de la
communication et, cette « gymnastique discursive» peuvent porter préjudice à la
compréhension.
C’est dans ce sens que la nécessité d’une analyse thématique et sémiotique s’impose.
D’abord, elle permet de rassembler les éléments éparpillés à travers le discours, de les
regrouper et de les analyser de manière à dégager les principales unités sur lesquelles
on peut se focaliser. Ces principales unités sont appelées des « thèmes » ou (expression
synonyme, les « thématisations ») (Paillé 2016)2.
Ensuite, ce qui justifie la pertinence de cette analyse si petite soit-elle, c’est l’usage de
beaucoup d’expressions parémiologiques auquel les auditeurs ne sont pas
nécessairement habitués et qui échappent certainement surtout aux plus jeunes. Cette
analyse permet donc d’accéder au sens latent qui se recourbe dans ce genre
d’expressions.
Cette démarche vise donc à renforcer les compétences à la compréhension, et par
ricochet, faciliter le suivi à ceux qui sont intéressés par la programmation sectorielle et
l’action gouvernementale.

1
Maingueneau D., Analyser les textes de communication, Paris, Dunod, 1997
2
Paillé P. et Mucchielli A, « Analyse thématique in L'analyse qualitative en sciences humaines et sociales,
Armand Colin, (2012), pp 231 à 314, p.231
2

1. Méthodologie

1.1 Le choix du matériau d’analyse


Ce corpus dans lequel sont prises les unités pertinentes d’analyse est composé de trois
discours.
Le premier a été prononcé le 18 juin 2020 par Évariste Ndayishimiye, nouveau Chef de
l’État burundais à l’occasion de son investiture à ses nouvelles fonctions présidentielles
au stade Ingoma de Gitega, la capitale politique du Burundi.
Le second a été prononcé par le même orateur le 30 juin 2020, à l’occasion de la
prestation de serment de son gouvernement au palais des congrès de Kigobe, cérémonie
qui a été présentée comme le lancement de ce « gouvernement-laborieux » : « Aujourd’hui
donc nous nous réunissons dans ce palais pour lancer officiellement les activités de ce
gouvernement-bienveillant et laborieux », a-t-il bien précisé.
Le troisième est un message à la Nation délivré le 30 juin 2020 au palais présidentiel dit
Ntare Rushatsi House à Bujumbura par le nouveau chef d’État, à la veille de la cérémonie
du 58ème anniversaire de l’indépendance nationale.
L’on pourrait se demander pourquoi le choix de ces discours pour l’analyse des
promesses du nouveau pouvoir, alors que d’autres promesses ont été formulées lors de
la campagne électorale de mai 2020.
À cette interrogation, nous pourrions répondre que, sur le plan empirique, ces discours
nous semblent les plus pertinents quant aux programmes du nouveau leadership
burundais, bien plus que même les discours scandés en campagne électorale.
D’abord, ces discours interviennent au summum de la campagne électorale. C’est dans
ces discours d’investiture qu’on trouve les engagements les plus solennels et des
engagements qui intègrent même les préoccupations/promesses formulées par ses
challengers lors de la campagne. « Je voudrais annoncer que dans ce programme, il y a
aussi des idées de mes concurrents que j’ai bien notées », a-t-il bien souligné. Il s’agit donc
de discours programmes condensés des promesses annoncées lors de la campagne
électorale en générale.
Ensuite, ces discours sont prononcés au bout d’une campagne électorale très serrée, au
cours de laquelle une volonté de changement s’est ostentatoirement exprimée. Celui qui
a été donné pour vainqueur a donc besoin de mettre assez d’intelligence pour
convaincre et s’attirer la sympathie de tout ce monde, y compris ceux qui ne le
soutenaient pas nécessairement.
Enfin, comme nouveau dans ses fonctions, il a probablement envie de convier « tout le
monde » dans son heureuse aventure et de ne laisser personne derrière.
Nous travaillerons sur les textes officiels rendus publics par les services de la
présidence : (www.gov.bi) en kirundi.
3

1.2 L’analyse thématique et sémiotique


D’après Pierre Paillé et Alex Mucchielli (2016), l’analyse qualitative fait intervenir des
procédés de réduction des données. Afin de résumer et traiter son corpus, l’analyste fait
appel à des dénominations que l’on appelle les « thèmes » (ou, expression synonyme, les
« thématisations ». Selon qu’il s’avère nécessaire, l’analyse va jusqu’à la décomposition
de certains thèmes) et on parle de « sous-thèmes » 3.

Avec ces thèmes et/ou sous-thèmes, l’analyse permet de répondre à la question : Qu’y a-
t-il de fondamental dans ce propos, dans ce texte, de quoi y traite-t-on ?

Étant entendu que certains thèmes reviennent à plusieurs paragraphes, l’analyse


thématique va permettre de les sérier, de les regrouper, de les consolider afin d’en
faciliter la saisie.

La compréhension sera facilitée aussi par l’analyse sémiotique qui permettra d’accéder
au sens latent se trouvant dans le style alambiqué des compositeurs de ces discours.
L’accession au sens sera permise par la segmentation du « tout signifiant » en unités
formelles pertinentes exploitables au niveau de surface et au niveau profond.4

2. Les principales promesses du nouveau pouvoir de Gitega pour son


quinquennat 2020-2025

2.1 L’appellation du nouveau gouvernement : « mvyêyi et nkózi » (du cœur et du


boulot)

Tout le monde n’a pas tout de suite compris ce qu’il voulait dire par ce néologisme5 de
« rēta mvyêyi » lors de son investiture le 18 juin 2020 au stade Ingoma de Gitega. Est-ce
que pour dire qu’il mettra en place un gouvernement qui se préoccupera de tout le
monde sans exception à l’image d’une mère à ses enfants ? Ou plutôt d’un gouvernement
qui gérera les affaires en bon père de famille ? Les deux sens sont tout à fait possibles et
compatibles. Mais, avant d’aller en profondeur de ce néologisme, scrutons d’abord
l’origine et le sens du mot dans le langage courant.

2.1.1 Mvyêyi : les citoyens deviennent des enfants ?

Mvyêyi : un adjectif qualificatif dérivé du verbe « kuvyâra » / ku-vyâr-a/ qui signifie


selon le dictionnaire rundi-français6, susciter une nouvelle vie, produire du
fruit, engendrer, procréer, enfanter, mettre au monde, accoucher.

Kuvyâra se dit d’une personne physique, d’une femme par exemple qui met au monde et
à qui on reconnaît cette qualité d’être umuvyêyi.

3
Paillé P. Mucchielli A, L'analyse qualitative en sciences humaines et sociales, Armand Colin, (2016), pages 235
à 312, p.235
4
Fontanille J. Sémiotique du discours, Presses Universitaires de Limoges, 1998.
5
Néologisme (de sens) : Expression ou mot existant dans une langue donnée mais utilisé dans une acception
nouvelle.
6
Rodegem F.M., Dictionnaire rundi-français, Musée royal de l’Afrique centrale, Tervuren, Belgique. Annales-
série in n°8-Sciences Humaines-n°69, 1970.
4

Les caractéristiques intrinsèques d’« umuvyêyi » sont notamment « aimer ses enfants»
avec les mêmes sentiments, puisque c’est lui qui les a engendrés tous. Cela suppose qu’il
prend soins d’eux, qu’il veille sur eux de la même manière, etc.

Dire d’une personne morale comme le gouvernement (rēta) qu’il a engendré et devient
« mvyêyi » est donc un langage allégorique qui cherche à exprimer concrètement les
rapports du gouvernement et du peuple durant ce quinquennat.

Il attribue artificiellement à cette personne morale (rēta) les caractéristiques de celui


qui met au monde : l’amour de ses enfants, la préoccupation du lendemain pour eux, la
justice, l’équité, le souci permanent, etc.

Comme il s’agit d’une personne morale (rēta), ces caractéristiques deviennent des
objectifs à atteindre au lieu d’être des caractéristiques intrinsèques comme pour une
mère qui, naturellement met réellement au monde.

Le gouvernement mis en place par le président E. Ndayishimiye s’est donc fixé comme
objectif d’être un gouvernement qui aime tous les Barundi, un gouvernement juste,
rassembleur, équitable, se souciant en permanence du lendemain des Barundi.

Et pour arriver à être réellement « mvyêyi », le gouvernement peut utiliser cet objectif
comme une cette ligne de conduite. Il devient ainsi un slogan. C’est ce qui explique que
cette expression allégorique « rēta mvyêyi » revient souvent dans les discours des
autorités afin de garder les officiels sur cette ligne de conduite.

Rēta-mvyêyi a donc quelque chose à voir avec la gouvernance au niveau du pays (plutôt
qu’au niveau de la famille) : « la bonne gouvernance commencera par la mise en place de
rēta mvyêyi », a-t-il dit l’orateur président dans son discours d’investiture. Il a aussi à
voir avec la prise en compte des préoccupations des citoyens : « Rēta mvyêyi
commencera aussi par Sêbarŭndi7 qui aime les enfants de tout le pays, qui sait de quoi ils
vivent au quotidien et qui en retour le respectent et l’honorent » (Stade Ingoma de Gitega,
le 18 juin2020).

Ce langage allégorique transforme les citoyens en enfants.

Ce langage allégorique transforme par ricochet (dans l’esprit des récepteurs) les
relations gouvernants-gouvernés en parents-enfants, les gouvernants devenant des
parents et les citoyens devenant des enfants.

Ce langage a principalement pour visé, la mise en confiance de citoyens vis-à-vis des


nouvelles autorités en cette période difficile (le décès du Président sortant, l’entrée en
fonction anticipée du nouveau chef d’État, la mise en application d’une nouvelle
constitution controversée, etc.). Le nouveau chef de l’État a besoin de rassurer pour
obtenir l’adhésion du maximum de citoyen.

7
Terme noble utilisé à l’époque de la monarchie pour désigner le roi, considéré comme le père de tous les
Barundi pour s tradition rassembleuse et non discriminatoire.
5

Le problème de cette transformation de rapports est l’infantilisation des citoyens qui,


selon la constitution ont absolument un statut civique totalement différent de celui d’un
enfant dans le code de la famille.

Rien par un petit exemple : « Tout individu a le devoir de contribuer à la sauvegarde de la


paix, de la démocratie et de la justice sociale. » (Constitution Article 53).

Le citoyen dispose d’un rôle assez important dans la gouvernance de son pays et ce rôle
peut être compromis s’il se met en tête qu’il est un enfant qui doit tout recevoir de ses
parents.

2.1.2 Nkózi (laborieux) : un qualificatif mobilisateur

À l’occasion du lancement des activités du nouveau gouvernement, rēta-mvyêyi s’est vu


attribuer un autre qualificatif : rēta nkózi, un gouvernement laborieux, un gouvernement
assidu au travail.

Dans notre hypothèque, en appelant son gouvernement de cette manière, le Chef de


l’État veut l’engager au dur labeur de tout serviteur du peuple qui mérite cette place de
membre du gouvernement : « il y en a qui disposent de vos compétences qui attendent de
vous remplacer si vous décevez », les a-t-il prévenu. Faire partie de « Rēta mvyêyi », est
payant en terme d’effort.

« nkózi » est un adjectif qualificatif dérivé du verbe « gukóra », qui signifie « travailler ».
Rēta nkozi signifierait dans son sens dénotatif, « gouvernement ‘travailleur’ ».

Le qualificatif ’nkózi’, ‘travailleur’ est ainsi une redondance, c’est-à-dire une addition
d'un terme dont le sens est déjà présent dans l'énoncé. N’est-ce pas que le
gouvernement est l’instance qui exécute les programmes. C’est l’ « Exécutif ». Il exécute
les programmes, en travaillant.

Mais si le chef de l’État a dû ajouter « nkózi » alors que cela va de soi, il revient au
récepteur de chercher un autre sens, qu’il a voulu insinuer. Le sens connoté.

Ainsi, sur le plan stylistique, « rēta nkózi » est un pléonasme : une figure de style où
l'expression d'une idée est soit renforcée soit précisée par l'ajout d'un ou plusieurs mots
qui ne sont pas nécessaires au sens grammatical de la phrase.

L’idée qui est renforcée ici est, conformément à notre hypothèse, que le gouvernement
nommé par E. Ndayishimiye est plus conscient que jamais des difficultés que traverse le
pays et qu’en travaillant avec plus d’ardeur et d’intelligence que les autres
gouvernements, il pourra bien lever les défis. Ajoutons à cela qu’en anthropologie
linguistique, précisément en onomastique, le nom a une fonction mobilisatrice du
porteur. Il devient un programme à suivre dans sa vie. L’orateur connaissant le contexte
avait même rassuré tout le monde même les incrédules :

C’est « un gouvernement qui ne vient pas vous diriger mais qui vient résoudre vos
problèmes » (Kigobe 30 juin 2020).Il a établi ainsi les secteurs les plus urgents.
6

2.2 LES SIX SECTEURS LES PLUS URGENTS DU CHEF DE L’ÉTAT


Dans son discours de lancement des activités du nouveau gouvernement, le chef de l’Eta
E. Ndayishimiye a présenté six secteurs qui sont urgent et pour lesquels il a pris des
engagements. Il s’agit de la bonne gouvernance, la santé, l’agri-élevage, la jeunesse, les
personnes en retraites, le problème des déplacés intérieur
2.2.1 La bonne gouvernance : interdiction du pillage, de la corruption, du
gaspillage de la richesse nationale.
« Le pillage et le gaspillage de la richesse nationale, la corruption doivent être interdits.
C’est moi qui suis chargé de cela, je demande aux Burundais de m’aider ». (Kigobe 30 juin
2020).
Son prédécesseur avait déclaré « la tolérance zéro en 2005 ». Un arsenal juridique a été
mise en place pour cet effet. Des structures chargées de lutter contre ces fléaux de la
richesse nationale ont été mise en place et en 2010 il a déclaré la guerre aux auteurs de
tous ces maux. Beaucoup se souviennent de L’expression « Ibisaka vy’imbwa birahiye »
qui est restée dans la mémoire de beaucoup de citoyens. Les discours les plus forts ont
été prononcés, les engagements les plus déterminants ont été pris, mais le Burundi est
classé dans la catégorie des pays les plus corrompus avec un indice de corruption le plus
élevé8.
Tout le monde sait qu’il existe des lois anti-corruption mais la corruption et les autres
infractions connexes continuent et plongent le Burundi dans la profondeur du sous-
développement.
L’engagement du Chef de l’État vient donc à point nommé. Mais le départ ne semble pas
permettre l’optimisme. En effet, la loi anti-corruption du 18 avril 2006 portant mesures
de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, dans son
article 29 indique que
«Dans un délai n’excédant pas quinze jours à partir de leur entrée en fonction, le Président
de la République, les Vices - Président de la République, les membres du Gouvernement, les
membres des Bureaux de l’Assemblée Nationale et du Sénat sont tenus de déposer à la
Chambre Judiciaire de la Cour Suprême, une déclaration certifiée sur l’honneur exacte et
sincère, de leurs biens et patrimoine ainsi que ceux de leurs conjoints et enfants mineurs,
qu’ils soient propriétaires, usagers ou détenteurs habituels »9.
Cela n’a pas été fait malgré le rappel des organisations évoluant dans le domaine. Les
Burundais, peuvent-ils continuer à espérer que le bon exemple vient d’en haut ?

8
Transparency International, Indice de perception de la corruption 2019, p.2 www.transparency.org/cpi
9
Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des
infractions connexes
7

2.2.2.La santé de la population : Une volte-face salutaire dans la lutte contre le

covid-19 :

Contrairement à son prédécesseur qui reposait la lutte contre cette pandémie entre les
mains de dieu, le président E. Ndayishimiye engage tout le monde, à commencer par lui-
même hic et nunc (« ubu nyene »), à barrer la route à cette maladie à travers le slogan :
Ndakira,sinandura kandi sinanduza ( Je guéris, on ne me contamine pas, je ne contamine
personne).

Il déclare solennellement la guerre contre cette pandémie qu’il désigne comme ennemie
public numéro 1. Les mots sont très forts et témoignent de son engagement ferme.
Comme si le public avait longtemps attendu une directive aussi ferme et engageante
dans ce sens, ce programme fut longuement applaudi par le public se trouvant au palais
des congrès de Kigobe lors de l’investiture du nouveau gouvernement.

La fermeté dans la lutte contre la pandémie du COVID-19 est aussi perceptible dans la
manière de l’appeler : ce désastre, cette calamité, cette terreur … (ico kiza). Il le compare
à un ennemie : « l’ennemie, on le cherche partout où il est ». Une véritable déclaration de
guerre qui tranche avec le discours simpliste et crétinisant de son prédécesseur.
Cette fermeté est aussi dans les actions concrètes, mesurables et atteignables qu’il
annonce : « la mise en place des équipes de dépistage du covid-19 dans toutes les
provinces, sa surveillance permanente par les comités de sécurité». L’on ne saurait pas
se passer de cette autre promesse combien réformatrice, de faciliter l’accès aux services
de santé à tout citoyen de la base au sommet : « Nous allons faire en sorte que chaque
commune soit dotée d’un hôpital ».
Au moment où nous élaborons ce draft, la collecte de données en vue de mettre en
application cet engagement a déjà commencé. Il restera à voir comment on trouvera le
budget pour faire fonctionner ces structures combien exigeantes. Le défi sera de trouver
les ressources humaines et les équipements qui, s’ils ne sont pas disponibilisés poseront
un problème majeur de qualité. La question se pose aussi dans le secteur de l’éducation.
Beaucoup de classes ont été construites, malheureusement l’insuffisance des ressources
humaines et d’équipements pédagogiques restent un défi structurel causant un impact
sérieux dans la qualité de l’enseignement burundais.
2.2.2.1 La réduction du prix du savon
D’autres promesses sont annoncées comme urgentes dans la lutte de cette pandémie :
« tout de suite ». C’est notamment la diminution du prix du savon de moitié. Il souligne
que l’autre moitié sera payée par le gouvernement, chose qui a été longuement applaudi.
Extraordinaire effort du gouvernement, se dit le public applaudissant, qui n’avait pas
l’habitude de recevoir de tels cadeaux d’un gouvernement qui plutôt demandait chaque
jour des efforts aux citoyens pour financer les élections, venir en aide aux victimes des
inondations, acheter les bancs-pupitres pour les écoliers, payer les frais de sentinelle,
payer les honoraires des enseignants vacataires etc., un pays où les taxes sont revues
chaque année à la hausse etc.
8

Bref, on se demandait où le nouveau président allait tirer cet argent et croyait au


miracle. C’est le lendemain que le Directeur pays de la Banque Mondiale, Mme
Véronique Kabongo apportera des précisions, en indiquant sur son compte tweet du 1
juillet 2020, que la Banque Mondiale supporte le système de santé dans la lutte contre
Covid-19 et finance 1.6 millions de dollars pour contribuer à la réduction du prix du
savon sur tout le territoire.
2.2.2.2 La réduction du prix de l’eau
L’autre mesure qui fut longuement saluée fut la réduction du prix de l’eau dans les
centres urbains. Cette promesse est bien évidement salutaire. Toute la lutte de multiples
maladies doit se baser sur la lutte pour la propreté. Néanmoins, cette promesse risque
d’être vécue comme une gageure par la REGIDESO, la seule institution de l’État qui
travaille dans la production et la distribution de l’eau et de l’électricité au Burundi. Elle
connait déjà des problèmes structurels qui tardent à trouver solution. Néanmoins, les
actions annoncées sont dans la série des actions mesurables, atteignables, donc des
promesses crédibles.
2.2.2.3 Les mesures relatives aux ODD : à renforcer ?
Le chef de l’État a promis de poursuivre les mesures des gratuités inscrites relatives aux
OMD. La politique de gratuité des soins de santé pour les enfants de moins de 5 ans et la
gratuité des soins des mères qui accouchent reste bien entendu maintenue : « Ces
mesures ont beaucoup aidé les ménages et on verra comment en ajouter d’autres » a dit
le nouveau chef de l’État .
La principale préoccupation aujourd’hui, n’est-ce pas l’accès aux médicaments ? N’est-ce
pas qu’après consultation, bien de malades, y compris les mamans et leurs enfants,
rentrent par manque de moyens pour passer à la pharmacie ? N’est-ce pas que, suite au
manque de moyens financiers une cure est partagée ou prise à moitié pour préserver
une partie pour l’avenir ?
2.2.3 L’agriculture : « A chaque bouche, à manger ; chaque poche, de
l’argent »
« Nous avons pour objectif selon lequel chaque bouche ait à manger et que chaque poche
ait de l’argent » (Kigobe 30 juin 2020)
Cet engagement du chef de l’État est très osé mais il traduit peut-être l’ambition de
gagner le pari de la pauvreté dont le taux est passé de 67% en 2006 à environ 74,7% en
2018 pour le Burundi selon les estimations de la Banque Mondiale.
Beaucoup d’exemples de projets possibles et de promesses de soutiens ont été annoncés
avant de mettre en garde le ministère ayant l’agriculture dans ses attributions :
« Le Ministère ayant en charge l’agriculture doit être vigilant pour éviter que plus jamais
n’entre au Burundi des engrais nocifs pour notre sol et accablant la santé des citoyens ».
(Ntare Rushatsi House 30 juin 2020).
L’appel au travail du sol et de l’élevage est particulièrement lancé aux jeunes à qui il
promet l’aide au « décollage ».
9

2.2.4 La jeunesse
La jeunesse est la catégorie de la population burundaise qui est fortement frappée par le
chômage. Il promet de les aider à décoller :
« Je m’engage à vous aider à décoller, surtout ceux qui ont obtenus leurs diplômes mais qui
n’ont pas obtenus du travail » (Kigobe 30 juin 2020)
Les statistiques relatives au chômage des jeunes sont alarmantes et l’attente est
tellement longue.
Au moment où nous rédigeons ce draft, un recensement est en cours pour obtenir les
données en vue de la concrétisation de cette promesse. Les jeunes diplômés sans emploi
ont été appelés à se faire inscrire dans leurs communes et/ou quartier de résidence. Le
gouvernement s’est aussi engagé à accorder les moyens à ceux qui ont des projets
viables ainsi que des encadreurs choisis parmi eux et payés par l’État.
2.2.5 Les fonctionnaires de l’État : Humaniser les retraites
L’humanisation des retraites vient à point nommé. Les composantes de cette
humanisation promises par le chef de l’État sont :
- La redynamisation des institutions de sécurité sociales pour donner plus d’espoir
aux gens qui partent à la retraite,
- Les soins gratuits et une pension plus ou moins équivalente à leur dernier salaire.
- La protection et la défense du petit travailleur devant la loi au pays comme à
l’étranger.
Dans la mesure où ils sont sous-payés, certains retraités se voient comme envoyés à la
mort. Ils ne peuvent pas initier des projets avec ce qu’ils perçoivent comme rente. La
promesse du nouveau chef de l’État est qu’ils touchent au moins l’équivalent de leur
salaire au moment du départ à la retraite. Tout le monde a applaudit non pas parce que
la satisfaction est là, mais parce que c’est révolutionnaire d’entendre des promesses du
genre. Rēta mvyêyi L’attente ne sera pas trop longue, la promesse est si mesurable et
atteignable, on peut croiser les doigts.
Quant à la protection des petits travailleurs, le symbole du travailleur mal traité se
trouve dans les services de gardiennage et de téléphonie mobile où la loi a du mal à dire
son mot. D’autorité, le nouveau chef de l’État, pourra-t-il prendre les choses en mains ?
Visiblement il est au courant il désigne ce domaine clairement : « Igisata c’abenegihugu
badakingiwe mu kazi kabo ka misi yose » (Stade Ingoma Gitega 18 juin 2020). Le secteur
où les citoyens ne sont pas du tout protégés.
2.2.6 Les déplacés : la recherche d’une solution durable
Mu maguru masha, tugiye kuganira n’abateshejwe izabo igihe twari mu magume, twige
ingene na bo bobaho nk’abandi benegihugu (kigobe 30 juin 2020).
A plusieurs reprises, ces déplacés avaient été sommés de retourner sur leurs collines
mais ils n’osaient pas le faire. Si une solution concertée permettant aux déplacés et aux
restés sur les collines de revivre ensemble dans la quiétude est trouvée, elle
constituerait un pas géant vers la réconciliation des Burundais.
10

Au moment où nous élaborons ce draft, le ministère de l’intérieur, de la sécurité et du


développement communautaire a déjà fourni des instructions en la matière. On peut
attendre et voir.
2.2.7 Enseignement : réviser la politique enseignante pour accroitre l’
employabilité
L’employabilité est une thématique d’actualité même au niveau mondial. Le Burundi ne
veut pas rester à la traîne.
« Le gouvernement va bientôt réviser la politique enseignante pour que la jeunesse ait des
perspectives et sache quel métier elle entreprendra à la fin de ses études. (Kigobe le 30 juin
2020)
Mais cela faisait six mois que cette politique enseignante était validée (le 4 novembre
2019). La réviser dans une période aussi courte, n’est-ce pas un signe éloquent de la non
maitrise des questions qui se posent dans ce secteur. Ce secteur de l’éducation est
tellement sensible que la concertation devrait s’élargir à toute la communauté.
A part le problème d’insuffisante du matériel et des équipements pédagogiques à tous
les paliers de l’enseignement, il y a aussi insuffisante du personnel enseignant et tout
cela cause un impact réel au niveau de la qualité.
Au-delà de cela, il existe un problème réel aussi crucial, celui d’articuler l’enseignement
de la base au sommet dans une approche holistique. Peut-on penser que la réunification
des deux ministères ayant en charge l’enseignement fondamental et l’enseignement
universitaire et la recherche dans un seul qui s’appelle « Education nationale et
recherche scientifique » vise à résoudre ce problème ? Wait and see.
2.3 LES AUTRES SECTEURS
Nous qualifions les secteurs qui suivent de « moins urgents » dans la mesure où le chef
de l’État, dans son discours, a désigné ceux qui lui semblent les plus urgents dans
lesquels il a pris des engagements. Nous supposons que les autres secteurs, sans être
moins importants, ne sont pas aussi urgents que ceux qu’il qualifie de « plus urgents».

2.3.1 Droits de l'homme : « Tout va très bien Madame la Marquise »

Au Burundi, a dit le nouveau président, les droits de l’homme, ce n’est pas un problème.
Ils constituent un volet très important de l’éducation des enfants depuis les temps
immémoriaux.

« Nous avons grandi sachant qu’il est interdit de tuer même un lézard ». D’après le
président Evariste Ndayishimiye, dès le jeune, l’enfant burundais est éduqué au respect
des droits de l’homme :

« Depuis des temps immémoriaux, au Burundi, le meurtrier était banni, non seulement du
voisinage mais aussi du pays tout entier. Pratiquer un avortement était commettre un
sacrilège ». (Stade de Gitega 18 juin 2020).

Il promet la continuité. « Tout va très bien Madame la marquise » nous dirait Paul
Misraki.
11

L’orateur ne fera pas allusion aux violations des droits de l’homme mentionnés dans
l’actualité, notamment celles occasionnées par la contestation du 3ème mandat brigué par
son prédécesseur. Le public l’attendait pourtant à ce niveau, ceci était perceptible dans
certains médias qui faisaient la relecture des rapports de la Commission Internationale
d’Enquête créée par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies dans sa
résolution 33/24, adoptée le 30 septembre 2016.

Et pour anticiper sur ce débat connu comme sensible dans les relations diplomatiques
avec l’occident, il demande aux partenaires de ne plus d’ailleurs formuler une condition
relative aux droits de l’homme :

« Je viens consolider l’indépendance nationale, la souveraineté nationale, la liberté de


mouvement et d’action des Burundais et la protection de leurs droits civiques. Inutile de me
le redemander comme on a l’habitude de le faire, c’est ma priorité. » (Stade Ingoma 18 juin
2020).

Et pour baliser sur ce terrain, il attaque l’occident sur son propre terrain, s’insurge
contre l’homosexualité, l’euthanasie, etc. Il prend témoin son public : «Regardez vous-
mêmes ! », afin qu’il comprenne avec lui que la situation des droits de l’homme se porte
mieux au Burundi que chez ‘ces donneurs de leçons’.

Cette polémique a surpris car, parmi les attentes de ce changement, il y a la reprise de la


coopération suspendue depuis l’éclatement de la crise du troisième mandat de P.
Nkurunziza en 2015, caractérisée par une violation importante des droits de l’homme.

Rejeter un tel débat à l’avance est compris comme une fuite en avant, qui risque de
maintenir le Burundi coupé de ses principaux partenaires techniques et financiers, en ce
moment où ce pays se classe premier pays pauvre au monde avec un PIB de
727dollars10.

2.3.2 Un soutien ferme à la CVR et à la CNTB : Et la réconciliation ?


« Je voudrais annoncer publiquement que nous soutiendrons ouvertement ces commissions
chargées de la justice réconciliatrice afin qu’elles terminent bien leur travail » . (Stade
Ingoma de Gitega 18 juin 2020).
Par Commissions chargées de la justice réconciliatrice, le Chef de l’État a voulu peut-être
désigner la Commission VéritéRéconciliation (CVR) et la Commission Nationale Terre et
autres Biens (CNTB).
La Commission Vérité Reconciliation à l’œuvre, présidée par P.C. Ndayicariye, ancien
président de la Commissin Electorale Nationale Indépendante, lors des élections
organisées pendant la crise éclatée en avril 2015 et du Référendum de 2018, élections
qui se portèrent P.Nkurunziza à un 3ème mandat anticonstitutionnel.

10
www.gfmag.com/global-data/economic-data/Richest Countries in the World 2020.
PIB dans l’EAC dans le même classement : 1) Kenya= 3,875 2) Ouganda= 2,631
3) Rwanda=2,459 4) Tanzanie= 3,402 5) Sud soudan = 4,072.
(Consulté le 10 septembre 2020)
12

Ce soutien ferme à la CVR intervient au moment où son travail est décrié dans certains
milieux tutsi comme hautement hutisant et contreversé même dans certains milieux
hutu, victimes des crimes du passé douloureux.
En effet, cette commission est accusée de travailler dans l’impartialité, se préocuperait
d’une catégorie de victimes et négligerait une autre.
Pourra-t-elle remplir sa mission de « clarifier l’histoire, d’arbitrer de réconcilier»
(Accord d’Arusha article 8) ?
Rappelons que cette commmission est aussi partie sur des bases peu solides. Les textes
qui la régissent ont été votés dans la protestation des autres partenaires et les membres
désignés sous la contreverse des autres parties prenantes au conflit burundais, etc.
Ce serait par miracle que l’objectif de réconciliation tant souhaité par les Burundais
puisse être atteint dans une ambiance pareille.
La CNTB : Avec des nuances près, cette commission souffre des mêmes tares que la
précédente alors que les Barundi attendaient concensus au moins sur ces deux
contentieux.
Le président a promis justice, consolation et apaisement aux victimes des crimes du
passés. Il a promis de traduire en justice les auteurs pour donner une leçon au Barundi
et surtout aux jeunes qui doivent savoir qu’il n’ y a pas de crime qui soit imprescriptible.
Abahuye n’ivyago vy’ubwo bwicanyi nabo turazi ko bakeneye guhozwa no guhumurizwa,
abavyagirizwa nabo bagashengezwa kugira ngo Abarundi na cane cane urwaruka rw’ubu
na kazoza babonereho icigwa ko ata kibi cijana naho hohera igihe kingana iki. (Stade
Ingoma de Gitega le 18 juin 2020)
Ce discours parait rassembleur et compatissant pour les victimes de tous les crimes
commis dans le passé. Mais le chef de l’Etat, pourra-t-il tenir compte des critiques
formulées à l’endroit de ces commissions afin d’apporter un peu d’équité dans le
traitement de toutes les victimes.
2.3.3 La participation politique
Dans son discours le chef de l’État a fustigé les partis qui ne parlent pas le même langage
que le gouvernement. C’est une expression utilisée dans le langage courant pour désigner
globalement les partis de l’opposition.
« Qu’ils n’aient plus de place au Burundi ». A-t-il souligné. Mais, « Ne pas parler le même
langage que le gouvernement, n’est-ce pas justement l’expression qui colle à la chose
désignée de façon isomorphique? Ils ‘voient’ les choses autrement et leur rôle est
d’apporter justement d’autres propositions pour éviter le monolithisme.
Le rôle des partis de l’opposition c’est notamment de proposer des solutions alternatives
à la politique de la majorité en place. L’opposition c’est non seulement une instance tout
aussi importante que la majorité11, mais aussi une fonction incontournable en
démocratie. P. Charaudeau, ne met-il pas la majorité et l’opposition dans une même
instance discursive, vu qu’elles utilisent les mêmes stratégies.

11
Charaudeau P. , Le discours politique. Les masques du pouvoir, Vuibert, Paris 2005, p.42.
13

Il serait difficile de trouver une autre expression où le signifiant collerait vraiment au


signifié : Imigambwe ikebura reta ? (les partis qui donnent des conseils au
gouvernement). Cela ne convient pas pour des partis qui cherchent à prendre le pouvoir.
Imigambwe itari ku butegetsi ? (les partis qui ne sont pas au pouvoir). Mais, il y a des
partis qui se disent être dans l’opposition mais qui sont quand même au pouvoir. Ils sont
d’ailleurs désignés dans le langage courant par des expressions comme imigambwe iri
mu kwaha kwa reta, des partis sous l’aisselle du gouvernement’ ou encore imigambwe
ihetswe na reta , ‘les partis que le gouvernement portent au dos’, etc. ‘
Toutes ces deux expressions, qui sont le fait de l’opposition, stigmatisent aussi les partis
qui, dans leurs positions attendent celle du pouvoir pour les faire siennes et se conduire
en porte-parole. Ces appellations sont tout aussi réductrices que provocatrices.
D’après ces expressions, ils sont portés au dos comme des bébés. L’opinion use de la
provocation, elle leur présente une image négative de ses compétences, les dénigre pour
ainsi dire, au point qu’ils se ravisent et présentent d’eux une image de marque positive12.
En annonçant qu’il ne voudrait plus que les partis « qui ne parlent pas le même langage
que le gouvernement » n’aient plus de place au Burundi, une catégorie de récepteurs
avait compris qu’il proclame la suppression de l’opposition. Ce qui n’était pas vrai
évidemment. Mais en composant son gouvernement et en désignant les dirigeants dans
les autres structures de l’État, l’opposition a été tenue effectivement à l’écart. Ne pas
parler le même langage que le gouvernement est vu comme une trahison : « si tu ne
parles pas le même langage que le gouvernement du Burundi, tu parlerais le langage de
quel autre gouvernement ? » a précisé le nouveau président de la République dans son
discours d’investiture au stade Ingoma de Gitega.
A la formation du ‘gouvernement bienveillant et laborieux », le principal parti
d’opposition qui a eu le score le plus élevé a été écarté et ceux sont les partis de la
mouvance qui ont été associés : une aile de l’UPRONA et le PIEBI-Abanyeshaka. L’on a
compris que l’opposition stigmatisée ici est celle qui n’est pas dans la mouvance. La
participation politique promise sera-t-elle possible ?
2.3.4 Le dialogue : La promesse de l’inclusivité
[…] tout le monde aura la voix au chapitre

« A tous les Burundais, résidents au Burundi, à l’étranger ou réfugiés, faibles ou puissants,


je vous annonce que chacun a droit à la parole,
Que ceux dont les actes de sabotage avaient comme prétexte le manque de dialogue
comprennent que les portes sont ouvertes » (Stade Ingoma de Gitega le 18 juin 2020).
D’après le président de République, le dialogue c’est un élément de la culture. Les
Burundais ont toujours dialogué. Il rappelle tout un arsénal d’expressions proverbiales
valorisant le dialogue dont « umutwe w’umwe ntiwigira inama », « imiti ikora ikoraye »
très usitées dans le quotidien des Barundi.

12
Courtés J. Analyse du discours. De l’énoncé à l’énonciation. Paris, Hachette, 1991,
14

Que ce soit quelqu’un qui est au Burundi, à l’étranger ou réfugié, tout le monde aura la
voix au chapitre.
La promesse est évidemment trop forte pour un pouvoir qui a toujours trainé les pieds
pour répondre à l’invitation du facilitateur W.B. Mkapa à Arusha et qui n’a pas daigné
répondre à la dernière session de dialogue du 25-29 octobre 2018 à Arusha en Tanzanie
avec une partie de citoyens réfugiés à l’étranger.
L’ancien président tanzanien, Mr. W.Benjamin Mkapa, qui était facilitateur dans ce
dialogue, a dû remettre son tablier au président ougandais, Yoweri Kaguta Museveni,
médiateur dans ce dialogue, désigné par la Communauté Est-africaine.
En réalité le pouvoir burundais a toujours prôné le dialogue intérieur, alors que
l’opposition vivant en exil a toujours considéré ce dialogue comme un monologue.
Aussi, en suivant les médias, on a appris que les questions qui préoccuppent les
opposants en exil sont notamment : l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation, la
constitution révisée, le processus électoral, la nyakurisation des partis politiques,
l’intolérance politique, la CNTB, la CENI, la CVR etc., toutes devenues comme taboues.
C’est aussi un dialogue qui est déjà stigmatisé par le pouvoir. Chaque fois que
l’opposition l’évoque, le pouvoir le rejette en le désignant péjorativement par
amagaburanyama, le ‘rendez-vous du partage des postes’.
Ce qui donne à penser que pouvoir et opposition ne parlent pas du même dialogue, il y a
peut-être un quiproquo ? Mais, quand même ce dialogue tient à cœur le nouveau
président de la République à voir la force et l’insistance avec lesquelles il en parle : « Nta
muntu n’umwe, yaba muto canke mukuru, azobura ijambo mu gihugu ». Ce qui laisse à
penser qu’un changement de cap peut être attendu.et la logique serait de mettre un
cadre de dialogue.
- La mise en place d’un cadre de négociation ?
Lors de son investiture, ill a tendu la main aux partisans de la violence : « Que la violence
cesse dès maintenant »(Guhera ubu ivy’ingimba bihagarare )
Au moment où nous rédigeons ce draft, les médias parlent de groupes armés dans les
provinces Rumonge, Kayanza et Bujumbura et des victimes de leurs attaques sont
comptés. Plus d’un demi-siècle d’indépendance, les Barundi devraient trouver les voies
pour enterrer définitivement, leur hache de guerre.
Le nouveau chef de l’État, pourra-t-il mettre en place un cadre pour ce dialogue? C’est en
tout cas la suite logique de ce qu’il annonce : «umwe wese avuge ikimubakiye, twoye
kwiha amenyo y’abatwenzi ». (Que chacun dise ce qui ne marche pour éviter le discrédit
à notre pays). C’est clair que ce qu’il faut éviter c’est non seulement le discrédit pour le
pays, mais aussi et surtout la descente aux enfers du sous-développement. Avec plus de
70% de la population vivant avec moins de 1,9 $ US par jour et par habitant, le Burundi
fait partie des pays les plus pauvres de l’Afrique subsaharienne et des pays à faible
revenu13.

13
République du Burundi, Évaluation de la pauvreté au Burundi, Banque Mondiale, Région Afrique, 2016)
15

En invitant ceux qui se sont réfugiés à l’étranger, pour les convier peut-être à ce
dialogue, il pose une question qui ne doit pas être agréable aux personnes visées :
« Qu’est-ce qu’ils ont gagné ceux qui ont porté les accusations à l’échelle
international ? ». Il les a invités à rentrer, à apporter leurs contributions et à développer
le pays. Peut-être en mettant en place un cadre nécessaire pour ce dialogue, des
solutions pourraient être trouvées.
Bon nombre de convictions encrées dans la culture burundaise ont été développées dans
ces discours, dans le sens de sensibiliser tout le monde autour de l’importance
incontournable du dialogue. Si la promesse venait àêtre une dette, le nouveau chef de
l’État mettrait en place ce cadre de dialogue assez tôt. N’est pas que la paix et la sécurité
constituent un pilier important pour le développement.
2.3.5 La coopération : D’accord mais…on est souverain !
C’est surtout au palier international qu’il pose les conditions pour la coopération. La
priorité, semble-t-il, est la souveraineté de chaque peuple, parce qu’il n’y a pas de petit
peuple, il n’y a pas de petit État.
2.3.5.1 La coopération internationale
Malgré l’isolement international que vient de vivre le Burundi suite à la crise provoquée
par le 3ème mandat de Pierre Nkurunziza, le nouveau chef de l’État se dit fier et content
des relations entretenues entre le Burundi et les autres pays ainsi que certaines
organisations africaines. L’on pourrait se demander de quelle fierté il s’agit avec une
diplomatie presqu’au point mort depuis 2015. Mais, ce qui est peut être prometteur,
c’est l’engagement à les renforcer : « tugiye kuyikomeza ».
Il faut mentionner en passant que sur le plan international, c’est principalement la chine
et la Russie qui sont restés aux côtés du Burundi pendant ce quinquennat de crise
(2015-2020). Les missions diplomatiques présentes à Bujumbura fonctionnaient au
ralenti et sont restées discrètes. Mais à la prise des fonctions du nouveau chef de l’État,
les représentants des missions diplomatiques résidant à Bujumbura se sont bousculés à
Ntare Rushatsi House pour déclarer leur joie à pouvoir relancer la coopération.
La Chine et la Russie quant à elles sont restées sur terrain, occupées à renforcer ses
opérations de séduction pour garder leur place dans l’influence politique. N’est-ce pas
qu’ils ont été remerciés officiellement :
: ‘Umugenzi nyawe umubonera mu marushwa’, turakengurukiye cane ibihugu vyatugumye
hafi, biradushigikira mu gihe hari ibindi bihugu vyashaka kuduta mu cobo.
Il se déclare convaincu de la nécessité de la solidarité mondiale : le monde forme un
corps. Le nouveau président burundais rejette l’hégémonie de certains dirigeants : « Il
n’y a pas un État qui doit s’en approprier pour le gouverner seul alors que Dieu a donné à
chaque État son territoire. Il prône le dialogue international.
16

2.3.5.2 Plaidoyer pour le dialogue international


Pour le nouveau président burundais, le dialogue doit être privilégié sur des questions
divergentes ; l’usage de la force doit être banni. On se rappelle que pour apporter les
solutions à la crise provoquée par le troisième mandat, le Conseil de sécurité des Nations
Unies avait voté une résolution sur l’intervention d’une composante policière au
Burundi (Résolution 2303/2016).
Cette intervention policière de la communauté internationale a été vigoureusement
rejetée à Bujumbura, demandant que tout passe par le dialogue, en vain.
Réaffirmer la nécessité et la primauté du dialogue dans tout conflit, est-il un nouvel
engagement pour le nouveau pouvoir de Gitega, qui pourrait s’ouvrir à la communauté
internationale afin de briser son isolement ?Wait and see.
2.3.5.3 La collaboration avec l’ONU.
Dans plusieurs de ses rencontres, le conseil de sécurité a mis le Burundi sur son agenda.
Dans son discours, le nouveau gouvernement rejette ce fait d’ « être surveillé » :
Les Nations Unies doivent comprendre qu’on est plus dans le stade d’être surveillé dans
notre action. Il est plutôt le moment de travailler avec nous sur les questions liées au
développement durable et inclusif ».
Tout en affirme la nécessité de la solidarité entre les nations du monde, pouvoir issu du
CNDD-FDD a toujours brandit sa souveraineté (même à travers) et pointé du doigt le
colonisateur. Tout le monde se rappelle du ton des déclarations de l’actuel président de
l’Assemblée Nationale à l’époque où il était porte-parole du parti CNDD-FDD.
Curieusement les destinataires semblent ne pas comprendre la braise sur laquelle ils
sont grillés. C’est finalement qu’ils trouvent un interêt indiscutable en s’accrochant sur le
Burundi.
2.3.5.4 La coopération africaine : une panacée ?
Les organisations africaines dont il fait mention dans ses discours sont principalement
l’Union Africaine, l’East Africa Community. La demande d’entrée au SADEC a été rejetée
à deux reprises Mais le Premier ministre tanzanien Mme Samia Suluma Hassan qui
participait aux cérémonies d’investiture du nouveau chef de l’État, a annoncé que son
gouvernement aidera le Burundi à décrocher son adhésion au SADEC.
Le nouveau dirigeant, ce présente en conseiller africaniste : « nous profitons de cette
occasion pour lancer une conseil aux autres pays africains de se garder de mauvais
conseillers qui cherchent à nous diviser. »
Il promeut la circulation routière comme adjuvant de l’amitié entre les peuples
africains : Qu’est-ce qui manque au Burundi de se coaliser avec les autres pays membres
de la communauté de l’africque centrale pour développer le circulation routière, comme
c’est déjà fait en Afrique de l’est. « Birahimbaye mu muryango wa Afirika y’Ubuseruko
Uburundi burimwo » :
« C’est cela qui renforcerait l’union africaine et qui permettrait aux citoyens africains de
nouer des relations et de partager tout en voyageant ensemble ».
17

Mentionnons ici qu’il existe déjà un réseau de transport routier au niveau de la


Communuaté Est-africaine. Des citoyens burundais aujourd’hui ne sont plus obligés de
prendre l’avion pour aller au Kenya, au Rwanda, en Ouganda en Tanzanie ou au Soudan
du sud.
Peut-être les nouvelles initiatives porterait sur le développement du réseau routier de
l’Afrique centrale. Cette voie pourrait effectivement résoudre les problèmes
d’enclavement du Burundi et la légendaire problématique de la connexion aérienne
entre l’Afrique de l’Est et l’Afrique de l’ouest.
2.3.6 Les relations avec le Rwanda, la Tanzanie et la RDC
Ces trois pays sont très stratégiques pour la sortie du Burundi dans son enclavement
2.3.6.1 La Tanzanie
A part que les voies maritimes et routières tanzaniennes constitutent la principale porte
de sortie et d’entrée au monde pour le Burundi, la Tanzanie constitue le parrain
traditionnel du pouvoir burundais. Dans le public qui écoutait ces discours, se trouvaient
une forte délégation tanzanienne venue rehausser de sa présence les cérémonies de
prise de fonctions des nouvelles autorités burundaises. Dans son intervention, le
premier ministre tanzanien qui était à la tête de cette forte délégation, Mme Samia
Suluma Hassan, a annoncé que son pays s’engage à soutenir la candidature du Burundi à
la SADEC. C’est un joli cadeau quand on sait que cette candidature a été rejeté à deux
reprises. Une fois adhéré au SADEC, c’est d’autres portes qui seront ouvertes pour le
Burundi.
Mais c’est ce même SADEC qui a déclaré officiellement soutenir les efforts du Chef de
l’État de la RDC à pacifier l’est de la RDC, une question qui est fortement liée à la
pacification de toute la sous-région. Le Burundi ne privilégiera pas le bilatéralisme avec
la RDC, il devra s’impliquer aux côtés des autres pays de la sous région. Dans tous les cas
la Tanzanie est compris comme pincipal allié du pouvoir burundais surtout avant lors de
la recherche de l’indépendance et au lendemain de la victoire du CNDD-FDD. Au moment
où nous élaborons ce draft, Evariste Ndayishimiye vient d’effectuer une visite officielle
en Tanzanie, la toute première sortie depuis élection fortement critiquée par les
opposants. L’on se souviendra aussi que lors de son troisième mandat contesté de 2015-
2020, son prédécesseur Pierre Nkurunziza visitera uniquement ce pays, après avoir
échapé à un coup d’État, étant en visite dans ce même pays.
2.3.6.2 Le Rwanda
Si le nouveau président burundais n’a rien dit sur Rwanda dans ces discours de prise de
fonctions, ce n’est pas qu’il manque d’opinion envers ce voisin qui ne réagit pas même
quand il est provoqué. Le Rwanda quant à lui s’est réjoui du changement intervenu au
Burundi en 2020 et voudrait tourner la page de ses relations.
Le 27 mai, Kigali a félicité le nouveau président du Burundi par la voix de son Ministre
des Affaires Étrangères.
Le 9 juin, Kigali a observé le deuil pendant toute une semaine en mémoire du défunt
président Nkurunziza.
18

Le président Evariste Ndayishimiye, touché probablement par l’expression de ces


sentiments amicaux et fraternels abondera dans le même sens :
« Si nous ne soignons pas nos relations avec nos voisins et les amis du Burundi, notre
politique internationale ne produira aucun résultat. Les relations entre le Burundi et l’EAC
et les autres pays de la communauté internationale doivent être au beau fixe », avait-il
souligné dans son premier message à la nation.
Les déclarations bienveillantes de la part du voisin du nord ont continué.
Le 9 juillet, Madame Louise Mushikiwabo, au nom du Conseil permanent de la
Francophonie a déclaré que cette institution est faborable à la reprise de la coopération
entre l’Organisation Internationale de la Franconphonie et le Burundi, coopération
rompue depuis 2016.
Le 10 juillet, le chef de l’État rwandais, dans une séance d’entretien avec les médias
sociaux influencers a ouvertement tendu la main à son homologue burundais :
« Si le président E. Ndayishimiye et ses collaborateurs optent pour cette bonne voie, ils
nous trouveront au milieu du boulevard pour partir ensemble et consolider nos
relations diplomatiques et nous leur rassurons que de notre côté, nous n’allons
constituer aucun obstacle ». (P. Kagame dans social media influencers).
Il justifie même l’urgente nécessité de la reprise des relations en tant que voisins :
« Nos pays frères doivent renouer des échanges commerciaux et re-normaliser des
amitiés, ce qui est d’ailleurs l’idéal” (P. Kagame dans social media influencers).
Le 6 août à Busoni dans la province Kirundo, le chef de l’État burundais sortira de son
silence pour rejeter énergiquement l’offre de son voisin : :
« Le Burundi n’aura pas de relations avec un État hypocrite qui prend en otage des réfugiés
et qui hébergent des malfaiteurs qui ont endeuillé le Burundi au lieu de les extrader pour
qu’ils soient jugés ». (Busoni le 6 août 2020)
Les espoirs des citoyens des deux pays frères se sont sans doute effondrés : les
commerçants de Cibitoke qui écoulaient leurs tomates à Cyangugu, les Rwandais et
Burundais sur la frontières nord du Burundi qui traversaient la frontière pour de
diverses activités ont certainement accueillis ces déclarations la mort dans l’âme
Par la suite, le nouveau chef de l’État a décliné l’invitation de son homologue congolais E.
Tschisekedi à un mini-sommet qu’il organisait à Goma à l’intention des chefs d'État de la
sous-région du 13 au 15 septembre 2020. Il fallait peut-être éviter de rencontrer
l’hypocrite à Goma. Est-ce que c’est bien cela ?
2.3.7. Les réfugiés
A l’investiture du nouveau chef de l’État, cette question des réfugiés étaient très
attendue. Elle fait partie des questions sensibles et stratégiques pour l’évolution socio-
politique du Burundi. Le président Evariste Ndayishimiye a lancé un appel vibrant à tous
les réfugiés de rentrer :
Turasave impunzi zose z’Abarundi zitahuke Mu Burundi, nta nyagupfa…., Uburundi
buradukeneye twese.
19

Cet appel a fortement fait bouger les positions de certains réfugiés résidant dans les
pays voisins, puisqu’on en a vus rentrer à plusieurs, passant par les frontières et
accueillis par les officiels du gouvernement.
Mais il a aussi apporté des nuances à cet appel, nuances qui peuvent avoir poussé
d’autres réfugiés à hésiter et à renoncer au retour au bercail. Dans la globalité il les a
désignés en ces termes :
« (…)abatinya gutaha kubera ubwoba bw’ivyo bagiye bakoze canke bari bacuditse
n’abakoreye amarorerwa Abarundi ».(Stade Ingoma de Gitega le 18 juin 2020)
Par la suite, ce message qui semblait codé a reçu des réclamations : « iyo abikoze akuze,
babanza kumwihaniza kugira ntazosubire » (rigolades et applaudissements dans le
stade).
Ce message codé, est compris par les seuls initiés. Signifie-il que parmi ces réfugiés il y
en a qui sont attendus au tournant ?
2.3.8 État de droit et liberté d’expression
Kuva ubu ntakuniganwa ijambo kuko ni uburenganzira bwanyu imbere y’umuvyeyi ariyo
Reta. (Stade Ingoma de Gitega le 18 juin 2020)
Dès à présent, n’hésitez pas à prendre la parole, c’est votre droit votre gouvernement est
là pour le faire respecter.
Le nouveau chef de l’État a appelé les Burundais à lui faire confiance : « Désormais,
comptez sur moi, c’est moi la principale autorité de ce pays ».
Dans un pays où seul le parti au pouvoir et ses proches s’expriment librement, ces
paroles sont libératrices et mêmes révolutionnaires.
Ce qui est étonnant, c’est que 100 jours après ces déclarations autorisées, les personnes,
les organisations et entreprises médiatiques non proches du pouvoir, continuent à
s’imposer la censure. L’autocensure continue à accompagner les activités et les relations
quotidiennes jusque dans les milieux académiques.
Est-ce peut-être cette nuance qu’il a apportée qui fait hésiter les citoyens :
« Que ce soit les médias ou les organisations des droits de l’homme, les portes sont ouvertes
pour que vous appreniez au gouvernement ce qui ne marche pas chez les citoyens. Depuis
longtemps, aucun enfant n’allait parler des affaires de la famille à l’extérieur. Les linges
sales se lavaient en famille, discrétion oblige. Celui qui va continuer à emprunter une telle
démarche, nous tirerons la conclusion qu’il a perdu son éducation ou qu’il a un autre
patron ».
Dans tous les cas, son slogan appelle tout le monde à apporter sa pierre à l’édifice : « Turi
kumwe twese turashoboye ». Il reste peut-être à trouver une méthodologie qui rassure
tous les citoyens afin qu’ils apportent leur pierre à l’édifice conformément à la loi et à
leurs déontologies professionnelles.
20

2.3.9 La mise en place de l’Académie rundi : Qu’est-ce qui justifie les inerties ?
Tuzogarukira twongere duteze imbere Ururimi rw’Ikirundi, imico n’akaranga ka basokuru
tubicishije ku kigo gishasha c’Ubushakashatsi bwo kwitaho no kugarukira ururimi n’imico
vy’ikirundi (ACADEMIE RUNDI). (Stade Ingoma de Gitega le 18 juin 2020)
Plusieurs initiatives ont été prises pour promouvoir le kirundi afin d’en faire le tremplin
du développement. La politique linguistique a été adoptée par le Conseil des Ministres
en février 2014. Le décret régissant l’Académie rundi a été signé le 25 août 2014. La loi
sur le statut des langues a été promulguée le 3 novembre 2014.
Les missions assignées à cette institution prestigieuse de la langue et la culture qu’est
l’Académie rundi sont :
a) La protection et la promotion de la langue et de la culture rundi,
b) Le suivi de la mise en œuvre de la politique linguistique nationale,
c) La promotion de l’usage du kirundi au Burundi et dans la diaspora,
d) La codification des normes et des valeurs de la langue et de la culture rundi,
e) L’animation de toutes les activités en rapport avec l’enseignement et la recherche
sur le kirundi ainsi que la création des œuvres artistiques et linguistiques,
artisanales et culturelles,
f) La collaboration avec d’autres institutions locales, régionales ou internationales
poursuivant les mêmes objectifs.
Tout était déjà mis en place, sauf le budget pour le démarrage des activités de cette
institution. Et le budget, c’est une question de volonté politique de la part du décideur.
Néanmoins, un piège devra être levé. Dans la loi régissant la Maison de la culture,
promulguée le 2 décembre 2017, le législateur fait de l’Académie rundi un simple service
dans une direction ayant la culture dans ses attributions au sein du ministère de la
culture. C’est peut-être par manque d’information de ce que cette institution dans le
combat de la souveraineté d’un peuple.
Cette place dans l’organigramme du ministère de la culture ne permettra pas à
l’académie rundi d’atteindre les objectifs qui lui sont assignés. Des redressements
devront être apportés.
2.3.10 Le développement : prioriser l’énergie et les infrastructures routières
En vue d’attirer les investisseurs, il engage le gouvernement à mettre tout en place : la
construction de sept barrages électriques, l’augmentation de l’énergie éolienne, etc. Il
promet aussi le renforcement des voies routières pour faciliter la circulation des récoltes
à l’intérieur du pays comme à l’extérieur.
21

Conclusion
Les promesses formulées par le nouveau pouvoir burundais institué en juin 2020 sont
certaines nombreuses. Nous ne pensons pas les avoir reprises toutes. Mais celles qui
sont reprises ici montrent que les nouvelles autorités savent où se trouvent les besoins
urgents et les engagements sont pris, certains ouvertement, d’autres de façon indirecte.
Afin de mettre en exergue les principales promesses, nous avons passé en revue trois
discours prononcés pendant les jours qui entourent la prise des fonctions du nouveau
chef d’État et son gouvernement.
Nous avons combiné deux méthodes : l’analyse thématique et la sémiotique. Certaines
promesses, les unes plus concrètes que les autres ont été placées dans la catégorie des
secteurs les plus urgents. Les autres, tout aussi importantes que les premières sont
aussi détaillées. Les instances habilitées à assurer le suivi de ces promesses pourraient
bien évidemment encore creuser en profondeur de ces discours.
Quelques documents de référence
1) Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation, 2000.
2) Charaudeau P., Le discours politique. Les masques du pouvoir, Vuibert, Paris 2005.
3) Courtés J., Analyse du discours. De l’énoncé à l’énonciation. Paris, Hachette, 1991.
4) Fontanille J., Sémiotique du discours, Presses Universitaires de Limoges, 1998.
5) Global Finance Magazine, www.gfmag.com/global-data/economic-data/Richest
Countries in the World 2020.
6) Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la
corruption et des infractions connexes.
7) Maingueneau D., Analyser les textes de communication, Paris, Dunod, 1997.
8) Paillé P. et Mucchielli A, « Analyse thématique in L'analyse qualitative en sciences
humaines et sociales, Armand Colin, 2012.
9) Paillé P. et Mucchielli A., L'analyse qualitative en sciences humaines et sociales,
Armand Colin, (2016), pages 235 à 312.
10)République du Burundi, Évaluation de la pauvreté au Burundi, Banque Mondiale,
Région Afrique, 2016.
11)République du Burundi, La Constitution, 2018.
12)Rodegem F.M., Dictionnaire rundi-français, Musée royal de l’Afrique centrale,
Tervuren, Belgique. Annales-série in n°8-Sciences Humaines-n°69, 1970.
13)Transparency International, Indice de perception de la corruption 2019.
www.transparency.org/cpi

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