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Partie 1 : Le Rendez-Vous
Ils rient et nous partons. L’école d’ingénieurs que nous fréquentons est à
10 min seulement en voiture. Nous arrivons donc rapidement et nous
installons dans le petit amphithéâtre. Le cours commence.
Malgré le discours « passionnant » et incroyablement long du professeur
sur les théories des éléments finis, mon esprit se tourne à nouveau vers
les événements à venir de ce soir. Je ne peux pas m’empêcher d’être
rêveuse, en pensant à ce premier dîner avec Abdelkader. Rien qu’à
l’évocation de son prénom dans ma tête, je souris. Qu’est-ce que ce sera
de discuter enfin pour la première fois en face l’un de l’autre ? De se
regarder les yeux dans les yeux en échangeant sur les mêmes sujets
dont on discute depuis déjà un mois ? Vous l’aurez compris, Abdelkader
et moi ne sous sommes jamais rencontrés. Et ce soir nous nous
sommes enfin décidé à mettre fin à cette situation. Je l’ai connu par le
biais d’un ami, avec qui j’étais en train de discuter un jour sur MSN
quand il a commencé à me parler d’un pote à lui qui était juste à ses
côtés et qui avais envie de faire ma connaissance. Bien sûr, il avait vu
ma photo de profil. Sur le coup, je ne lui ai pas donné la permission de
lui filer mon MSN. J’étais déjà avec quelqu’un, et même si notre relation
s’approchait dangereusement de sa fin, je n’avais aucune envie de me
compliquer la vie avec un autre garçon déjà. Après plus d’une heure de
discussion, il finit par me convaincre de lui donner au moins une chance
de faire connaissance, que ça ne m’engageait à rien. J’ai appris bien
plus tard qu’en réalité c’était avec Abdelkader même que j’échangeais
dans l’essentiel de cette discussion ce jour-là. C’est donc lui-même qui
m’a convaincu et c’est ainsi que nous avons fait connaissance.
Le lendemain même, après des échanges très intéressants sur MSN, je
lui donnais mon numéro de téléphone (madame « je fais ma difficile
»…). Le soir même, nous avons passé pas moins de 2h au téléphone, à
parler sans s’ennuyer l’un de l’autre à aucun moment. C’était incroyable,
je n’aurais jamais pensé trouver un homme aussi intéressant sans même
l’avoir jamais rencontré. Cela s’est répété tous les soirs jusqu’à
aujourd’hui. En quelques semaines, nous sommes devenus clairement
accrochés l’un à l’autre. Nous avons appris beaucoup de choses l’un sur
l’autre, il me parlait de son boulot, ses projets, ses amis, et moi de mes
études. Chacun connaissait pratiquement le quotidien de l’autre. Et
pourtant aucun de nous n’a fait de proposition d’une rencontre, lui parce
que c’est un grand joueur et il aimait garder le contrôle de cette situation
(je l’ai appris plus tard) et moi parce que d’abord je suis très fière et
refuse de faire le premier pas avec un garçon, mais aussi parce que
j’avais déjà quelqu’un dans ma vie, si je peux appeler ça comme ça. En
effet, je n’avais pas encore clarifié la situation avec celui qui deviendra
bientôt mon ex, Gabriel, qui vivait dans une autre ville, à 200km de
distance et que je n’avais pas vu depuis plus d’un mois. Ma relation avec
lui n’était pas au beau fixe. Malgré 8 mois ensemble, je ne ressentais
rien qui me donnait envie d’aller plus loin. Gabriel est de confession
religieuse différente de la mienne et je sais que ma famille n’aurait
jamais accepté que je me marie avec un chrétien. Je suis musulmane.
Lui dit qu’il peut se convertir mais je ne suis pas assez malhonnête pour
lui faire faire une telle chose, alors que je sais au fond de moi que je ne
suis pas vraiment amoureuse. Pourtant il a tout ce qu’il faut, c’est un très
beau garçon, un peu métissé, pas très grand mais assez pour être à ma
hauteur lors des câlins debout (lol); il a un travail et est très attentionné
et amoureux. Je ne sais vraiment pas pourquoi je n’en pince pas plus
que ça pour lui. Bref, j’ai fini par expliquer à Gabriel que notre relation
devait prendre fin. Le pauvre, je pense qu’il s’y attendait déjà, il a semblé
le prendre avec philosophie, du moins au début. A peine 3 jours plus tard
Kader (Abdelkader) me proposait enfin un rendez-vous. Je n’ai jamais
avoué à Kader que je sortais avec quelqu’un, je ne sais toujours pas
pourquoi d’ailleurs… Bref, j’ai accepté l’air de rien, cachant mon
excitation et mon sourire béat (merci le téléphone). On a donc convenu
de se voir, enfin, aujourd’hui vendredi.
Vous devez vous demander comment cela se fait que j’accepte un
rendez-vous avec un homme sans même savoir à quoi il ressemble ? Ce
que je ne vous ai pas dit, c’est qu’en réalité il m’a envoyé au début une
photo de lui. Franchement, il est juste moyen niveau physique, je lui
donne un 5 à peine… Mais en fait je me suis très peu attardé sur cette
photo. Les filles ce mec a eu la capacité de me séduire, mais
complètement, rien qu’au son de sa voix et les échanges que j’ai eus
avec lui. Je vous jure que c’est vrai, je ne me suis donc vraiment pas
attardé sur son physique.
Moi : ça va Kader. Et toi, tu n’as pas eu trop de mal pour venir ? (Je fais
comme si de rien n’était)
Il me regarde, amusé. Il sait que je joue le jeu.
Le lendemain.
Kader et moi allons finalement regarder un film au cinéma. Oui, on a
décidé de faire dans l’originalité pour un second rendez-vous (lol).
Arrivés au cinéma, nous nous installons au fond. Durant le film, tout
naturellement nous nous retrouvons les mains emmêlées. Je n’analyse
pas tout le temps le comportement que nous avons l’un avec l’autre
depuis que nous nous sommes rencontrés, mais quand je m’y arrête un
peu, je me rends compte qu’on se comporte déjà comme si on est un
couple amoureux. On n’a pas besoin de se dire les choses, tout semble
venir comme si c’était ce qu’il y a de plus logique : les touchers, les
regards, les sourires… On passe un bon moment ensemble. A la fin de
la soirée, on se promène un peu sur les quais, pas trop éloignés du
cinéma et il me raccompagne ensuite comme la veille. On se fait la bise,
il n’essaie toujours pas de m’embrasser. Mais qu’est-ce qu’il attend enfin
?? Moi je n’attends que ça. Je rentre chez moi, un peu frustrée quand
même. Avant de dormir, il m’appelle, comme la veille.
© Partie 3 : La dispute
Je vois une petite ombre passer dans son regard. Qu’est-ce-que j’ai dit ?
Je continue de papoter comme si je n’avais rien remarqué, mais il me
répond à peine, en monosyllabes. Le serveur s’approche et nous sert.
K : ça va
Moi : hum, ce n’est pas l’impression que j’ai. Pourquoi tu ne me dis pas
ce qui …
Moi : Mais qu’est-ce qui te fait dire ça ? Il n’y a rien entre lui et moi, nous
sommes amis c’est tout.
Moi, souriant finalement et prenant les fleurs : merci (le cœur d’une
femme !)
Moi : …
Je lui prépare son café et un thé pour moi. Nous passons finalement le
reste de la journée ensemble. Cette fois nous décidons de sortir, sous
mon insistance surtout. Il y’a certaines ondes dans l’air, que je préfère
voir se dissiper, si vous voyez ce que je veux dire. Nous allons faire du
shopping, enfin surtout moi, sur les champs-elysées, du moins les
enseignes où mes revenus limités d’étudiante me permettent d’entrer.
Kader est très patient et me conseille sur mes choix, même si je vois
clairement que faire les boutiques est loin d’être son activité préférée.
Le soir, nous entrons dans une pizzeria et en sortons très tard. Il me
dépose ensuite chez moi.
Quelques jours plus tard, nous sommes le jeudi, et comme tous les
jeudis ou presque, une soirée étudiante se déroule dans une salle mise
à disposition dans un des bâtiments de la résidence. C’est l’occasion
pour les futurs ingénieurs de se défouler sur une petite piste entre potes,
mais surtout de se soûler.
J’y vais très rarement car je n’accroche pas tout le temps à leurs délires,
mais je décide d’y rejoindre mes camarades ce soir. Bien sûr, j’ai
prévenu Kader avant d’y aller, je n’ai pas envie qu’il me fasse à nouveau
une crise de jalousie…
Sébastien : Ami…
Avant même que j’aie le temps de réagir, je vois qu’on le tire par l’épaule
pour le repousser violemment de l’autre côté du mur. Je le regarde un
bref instant qui essaye de retrouver son équilibre. Je tourne alors mon
regard vers l’agresseur : Kader !
© Partie 5 : La colère
Sébastien : Ami…
Avant même que j’aie le temps de réagir, je vois qu’on le tire par l’épaule
pour le repousser violemment de l’autre côté du mur. Je le regarde un
bref instant qui essaye de retrouver son équilibre. Je tourne alors mon
regard vers l’agresseur : Kader !
Il se retourne vers Séb, s’adosse au mur et croise les bras. Malgré son
apparente nonchalance, sa colère est presque palpable. Visiblement, il
attend que ce dernier réagisse pour avoir l’occasion de lui régler son
compte.
Je m’interpose avant que ça aille plus loin : « Je suis désolée Séb…
Merci de m’avoir raccompagnée. Ça ira, on discutera demain ».
Il nous regarde à tour de rôle, hébété. Le pauvre, il ne comprend rien. Il
finit par se diriger vers les escaliers, en titubant légèrement.
Moi : je ne veux pas en parler ici. J’ai des voisins… Entre, je vais
t’expliquer et tu vas comprendre.
Il finit par entrer, lentement. J’avoue que j’ai un peu peur. Quand il passe
devant moi, je tremble un peu. « Mais bon Dieu, Ami ! reprends-toi. Tu
n’as rien fait de mal enfin ! ». J’essaie de retrouver mon calme et le suis
à l’intérieur. Il ne s’assoit pas, et garde le silence, les pouces enfoncés
dans les poches de son jean. Malgré la tension qui règne, je ne peux pas
m’empêcher de remarquer à quel point il est beau et imposant dans
cette posture.
Pfff ! J’ai vraiment envie de me donner une claque là !
Moi : Je n’ai pas pour habitude d’être infidèle… Je suis désolée que tu
aies assisté à cette scène, mais ce n’est pas de ma faute. Je…
K : bien sûr que c’est de ta faute. Je t’avais dit tout ça. J’étais sure que
ça allait arriver. Il sait au moins que tu es avec quelqu’un ?
K : les limites, c’est avec lui que tu aurais dû les poser. Tu crois quoi,
que je vais te laisser avoir n’importe quelle relation avec n’importe qui ?
Tu te trompes ma belle. Tu es à moi, c’est clair !
K : quoi ?
Moi : j’ai dit, tu sors de chez moi. Je ne suis pas le genre de fille à qui tu
peux te permettre de poser un ultimatum. Vas-y, casse toi et ne reviens
plus !
Je finis par m’assoir sur le lit, les coudes sur les genoux et la tête
baissée.
« Mon Dieu, qu’est-ce qui vient de se passer ? » La rage descend tout
doucement, pour faire place à une profonde tristesse. Je me laisse
glisser doucement vers l’oreiller et plie les genoux sur mes bras. J’éclate
en sanglots. « Seigneur, qu’ai-je fait ? »
Je pleure toutes les larmes de mon corps jusqu’à ce que la fatigue me
rattrape. Je m’endors dans cette position.
[Je ne respecte pas toujours mes promesses, mais cette fois, si!
Voici donc votre (longue) suite.
© Partie 6 : Le désespoir
Je finis par m’assoir sur le lit, les coudes sur les genoux et la tête
baissée.
« Mon Dieu, qu’est-ce qui vient de se passer ? » La rage descend tout
doucement, pour faire place à une profonde tristesse. Je me laisse
glisser doucement vers l’oreiller et plie les genoux sur mes bras. J’éclate
en sanglots. « Seigneur, qu’ai-je fait ? »
Je pleure toutes les larmes de mon corps jusqu’à ce que la fatigue me
rattrape. Je m’endors dans cette position.
Quand j’ouvre les yeux le lendemain matin, je me rends compte que j’ai
encore mes habits de la veille sur moi; les souvenirs de la soirée me
reviennent immédiatement…
Je me force à me lever. Dans la salle de douche, un coup d’œil dans la
glace me montre une image affreuse. J’ai les yeux complètement gonflés
à force de pleurer.
« Eh Ami, tout ça pour un garçon ! » Ma fierté reprend le dessus petit à
petit. « Je ne vais pas me laisser faire. Si je ne suis pas avec Kader, je
serai avec quelqu’un d’autre, et puis voilà. » Hum... Qui j’essaie de
convaincre là ?
Je sors trois quarts d’heure plus tard, pour l’école. J’ai réussi à camoufler
un peu les traces de la veille sur mon visage, grâce au maquillage.
Je retrouve Sébastien en bas comme d’habitude. J’aurais préféré l’éviter
mais je n’ai pas le choix, il faut bien que j’aille en cours. Lui aussi a l’air
gêné. Après s’être dit bonjour, nous nous parlons à peine durant tout le
trajet. Heureusement que ce n’est pas long.
Moi : huhun
Moi : Oh non, il est presque 20h. Je ne serai pas chez toi avant 21h; ça
va être galère de rentrer ensuite. Je vais être fatiguée…
Moi : Tchuipp
Moi : Pff ! Tu fais ce que tu veux. C’est ta vie. Bon, tu commandes les
pizzas ? Oranaise pour moi. Je vais poser mes affaires.
Je me dirige vers sa chambre. Badou vit dans un F2. Je dors toujours
dans sa chambre quand je suis là, et lui sur le canapé du salon. Je vais
donc poser mon manteau et mon sac à l’intérieur.
Moi : Mais il sait que je n’aurais pas répondu à son baiser. Tu sais quoi,
monsieur est même trop fier pour imaginer que j’OSE le tromper. Ce
sont ses propres mots. Ce qu’il me reproche, c’est d’être proche de
Sébastien, tout court. Tu te rends compte ?
Moi : Mais bien sûr. (Entre vous et moi, j’ai juste omis certains détails,
comme le fait de dormir chez « Choubi » par exemple… Ben quoi, qui
est fou.)
B : Mais oui. Ami, le mec retrouve sa petite amie dans les bras d’un
autre homme. Ok, ok, presque dans ses bras, si tu veux… Il est très
énervé et s’en prend à lui. Tu crois que dans le laps de temps qui suit, il
est capable de se ressaisir et de réfléchir posément à ce qu’il dit ? C’est
un homme, et il est fier, toi-même tu le sais. Tu as réagi trop vite.
Moi : Mais j’étais énervée aussi. Je n’ai pas le droit d’être énervée moi ?
Pourquoi tu le défends.
B : Oh, tu ne vas pas pleurer quand même. Allez, viens faire un câlin à
papa.
Moi : T’arrêtes toi ! Je te rappelle que t’as 2 ans de plus que moi.
Je suis tellement obnubilée par cette histoire que je finis par appeler
Karine sur le chemin du retour.
Elle décroche après une sonnerie : « Tu veux quoi ? »
Karine : Moi je sais plus hein. Depuis que Kader est là, tu ne me connais
plus. Je suis sûre que tu as des problèmes avec lui là.
Moi, honteuse : …
Karine, qui rigole : J’en étais sûre. Bon vas-y raconte. T’as de la chance,
que je t’aime hein.
Je souris et lui raconte tout ce qui s’est passé, ainsi que les conseils de
Badou. Je suis sûre qu’elle va me comprendre et prendre un peu ma
défense.
Je me trompe.
Je reste plantée là, je n’ose pas sonner. « Qu’est-ce que je fais ici ? Je
dois rentrer chez moi». Je recule d’un pas. « Je n’ai rien à faire ici. Je
vais appeler un taxi, l’attendre en bas. Je… »
Je reste plantée là, je n’ose pas sonner. « Qu’est-ce que je fais ici ? Je
dois rentrer chez moi. ». Je recule d’un pas. « Je n’ai rien à faire ici. Je
vais appeler un taxi, l’attendre en bas. Je… »
Kader reste planté là, devant sa porte, les bras croisés, la mine sévère. Il
ne parle pas et ne tente aucun geste vers moi.
Il est vraiment hautain quand même, je n’ai même plus envie de faire un
effort. Je m’apprête à m’en aller, en marmonnant : « ça ne sert à rien…
».
Je ne bouge pas.
Kader : Ami ?
Elle finit par daigner me regarder... Je vois qu’elle a l’air encore plus
furieuse. Et puis quoi encore ? J’ai fait mon choix, ce sera la fessée!
Ami :…
Ami : Kader ?
Moi : pardon ?
Ami : Je… j’étais énervée par tes paroles… Tu m’as blessée… J’ai réagi
excessivement… Je m’excuse.
Wow. Il y’a de quoi l’applaudir là. Elle s’excuse, les yeux baissés, l’air
honteuse ! Même si je ne la connais que depuis 4 mois, je sais qu’elle
est assez orgueilleuse, ce que je peux difficilement lui reprocher, car je
dois être certainement pire qu’elle. Là je sens que ces mots ont dû lui
écorcher la langue. Cette pensée me donne envie de rire et je ne me
rends pas compte que je souris déjà.
Je lui coupe la parole par un baiser. Cette fille parle trop. On a bien
mieux à faire…
Ami dort dans mes bras. J’adore avoir son corps menu lové dans le
mien. Elle m’appartient…
Elle a dormi comme un bébé, elle devait manquer de sommeil. Il est 8h
passées mais je ne veux pas la réveiller. Je sais que ça ne la dérange
pas de sécher les cours quelquefois et pour ma part, j’estime que je
peux me permettre d’être en retard ce matin, avec les horaires de
malade que je fais tous les jours.
Je la regarde dormir. En un sens, je la préfère dans cet état, au moins
elle n’est pas agressive. Je dois « éduquer » cette femme. Je ne lui ai
encore rien avoué mais je suis fou d’elle. Je veux qu’elle soit MA femme,
Mme Hann. Mais pour ça, elle doit comprendre et assimiler ce que
j’attends d’elle. J’ai besoin qu’elle comprenne que c’est moi le maître.
J’ai horreur de cette nouvelle génération de femmes qui confondent
l’émancipation au fait de porter la culotte à la place de son mari…
C’est la raison pour laquelle je suis sévère avec elle, je veux qu’elle soit
parfaite. Bon, j’avoue qu’il n’y a pas toujours que cette raison. Je ne sais
pas pourquoi, mais elle éveille en moi des instincts que je ne me
connaissais pas. Ma jalousie, la réaction que j’ai eu avec l’autre con là…
ce n’est pas moi. Je n’en suis pas fier mais je ne sais pas si je pourrais
agir différemment si ça se répétait. En fait, je suis sûr que je n’agirais
pas différemment, au contraire. Je me suis vraiment retenu ce soir-là. La
voir là presque dans les bras d’un autre homme… Non, ça m’énerve rien
que d’y penser.
Vous devez vous dire que si je l’aimais vraiment, je n’essaierai pas de la
changer sans doute. Vous vous trompez, cette fille me rend
complètement fou, et elle ne s’en rend même pas compte. Elle a
beaucoup de caractère, ce qui n’est pas pour vraiment me déplaire. Il
faut juste qu’elle apprenne à se « plier » quand il s’agit de moi. Ce que
j’aime le plus chez elle, en dehors de ce corps qui me donne toujours du
fil à retordre à essayer de résister à vous savez quoi, c’est qu’elle a un
grand cœur. Elle est généreuse et sait écouter. Je lui parle de mes
problèmes et elle a toujours les bonnes paroles pour me calmer, me
soulager. Je lui parle beaucoup de mon travail, de l’ambiance souvent
malsaine et concurrentielle que je subis au cabinet. Malgré son manque
d’expérience, elle me donne des conseils qui me sont toujours
bénéfiques quand je les applique. Quand je pense à elle, ce qui arrive
presque tout le temps depuis que je la connais, le son et les paroles
d’une chanson que j’aime beaucoup se jouent dans ma tête (lien par ici
:https://www.youtube.com/watch?v=dls6lgpBDyY&list=RDdls6lgpBDyY ).
Cependant, je ne peux pas supporter… Non, j’ai BESOIN qu’elle accepte
mon autorité, qu’elle sache qu’elle est à moi et qu’elle me le montre.
C’est comme ça et pas autrement.
Moi : Je valide.
Moi : De ?
Moi : Genre, il a pris une seconde femme ? Vous faites encore vos trucs
là vous ?
K : NOS trucs ?
Moi : Attention à ne pas t’immiscer dans leur couple chéri. C’est toujours
délicat ce genre de choses d’autant plus qu’ils ont des enfants.
K : Et alors, elle peut a tout ce qu’il faut pour bien s’occuper d’eux. Et si
ce n’était pas le cas, je m’en chargerais moi. De toute façon, elle peut
facilement trouver mieux que cet homme.
Moi : Ne dis pas ça. Tu ne sais pas ce qu’il y a entre eux. Je suis triste
pour elle, mais laisse-les régler leur problème. Et sois juste là pour
l’écouter et la soutenir, quelle que soit sa décision. SA décision, pas la
tienne.
« Mme Hann ? »
Karine : Donc toi c’est habillée comme ça que tu vas demander pardon à
ton Kader… la nuit !
Moi : Regarde-moi celle-là encore qui va s’imaginer des choses. Y’a rien
à dire ici. Tout est ok, là où il faut.
Je lui raconte notre soirée. Avant même que je finisse elle commence à
se marrer.
Karine : Miss « je me la joue dure ». Je savais que ça se passerait ainsi.
Il t’a envoûtée ce mec. Enfin quelqu’un pour te mater. Krkrkrkrkr
Moi : Pfff, prends pas ton cas pour une généralité hein.
Elle retrouve tout de suite son sérieux. J’ai envie de rire à mon tour, mais
je me retiens pour ne pas la vexer. Même si elle ne me l’a jamais avoué,
je sais que Karine en pince pour Badou. Elle sait bien que je le sais. Elle
ne me le dit pas parce qu’elle sait que jamais je ne serai d’accord avec
cette relation. Karine est une fille très jolie et attirante. Son teint chocolat,
son corps menu et surtout ses formes particulièrement bien
proportionnées laissent peu d’hommes indifférents. De plus elle a hérité
de sa grand-mère, qui est métissée, de longs cheveux. Elle n’a donc
jamais besoin de se mettre des rajouts, ce que j’avoue lui envier. Elle est
très belle, mais elle a un défaut : un gros faible pour les mauvais
garçons. Mais quand je dis mauvais garçon, ce n’est pas le genre qui
joue au dur et qui ne l’est pas vraiment hein. Non je parle des vrais sal***
qui savent clairement ce qu'ils font et l’assument très bien. Le pire dans
tout ça, c’est qu’elle est très sensible et quand ça ne va plus avec son «
amoureux » du moment, ce qui en général arrive très vite vu le genre,
elle est dévastée et c’est moi qui ramasse les morceaux. J’ai envie de la
voir faire le bon choix et être enfin heureuse, mais il faut croire qu’elle
doit être maso.
Depuis quelques mois déjà, j’ai remarqué certains regards entre elle et
Badou qui ne m’ont pas plu du tout. Depuis, j’évite au maximum de les
voir ensemble. J’adore Badou mais vraiment qu’il reste avec « ses filles
». Si je le vois changer un jour, on en reparlera.
© Partie 8 : La question
Depuis quelques mois déjà, j’ai remarqué certains regards entre elle et
Badou qui ne m’ont pas plu du tout. Depuis, j’évite au maximum de les
voir ensemble. J’adore Badou mais vraiment qu’il reste avec « ses filles
». Si je le vois changer un jour, on en reparlera.
Karine : ton ex ?
Moi : Oui je n’ai pas eu de ses nouvelles depuis notre rupture. Du coup
ça me surprend un peu qu’il m’appelle. Bref je ne vais pas décrocher.
On finit notre repas plutôt qu’on le voudrait car mon école n’est pas très
proche et je dois passer à la résidence pour me changer avant d’aller en
cours.
Je décroche : « Allô »
Moi : …
Moi : Gabi…
Moi : Gabriel Mendy ! Ecoute-moi stp. Tu sais très bien que ce n’est pas
aussi simple. Tu ne peux pas changer de religion juste parce que tu es…
amoureux. De plus, je ne veux pas te faire faire ça et tu le sais, je ne te
l’ai jamais demandé. Je suis désolée si je t’ai fait du mal, ce n’était pas
mon intention crois-moi. Mais ce n’est pas possible entre nous deux.
G : Pourquoi ?
Moi : Je suis avec quelqu’un. Voilà.
Moi : Oui
Moi : Tout ce que tu as besoin de savoir c’est que nous avions déjà
rompu toi et moi.
Ça y’est. L’école, c’est enfin terminé ! J’ai commencé mon stage de fin
d’études dans une célèbre boîte qui produit des matériaux de
construction, située à Courbevoie. Je fais partie officiellement d’un
bureau d’études et travaille sur un projet qui vient juste de débuter. Mais
pour le moment en tant que stagiaire, je me retrouve surtout à gérer
toutes les tâches ingrates. Je découvre les « joies » de la vie
professionnelle.
N’empêche, je compte faire mes preuves, même si je suis assez
impressionnée par ce milieu froid de béton, de verre et d’acier qu’est le
secteur de la Défense et toutes ces personnes tirées à 4 épingles, qui
courent partout, l’air tellement sûres d’eux. Oui, j’ai la ferme intention de
me faire ma place ici.
Le seul hic dans tout ça, ce sont ses crises de jalousie. Il ne supporte
pas par exemple quand je n’arrive pas à me libérer à midi pour déjeuner
avec lui, ou encore quand je préfère déjeuner avec des collègues.
Pourtant je suis bien obligée, je dois apprendre à m’intégrer dans mon
groupe et mon entreprise. Et pour cela, j’ai besoin d’entretenir la relation
professionnelle en dehors des heures de travail également.
Bref, même si ses remarques et les colères qu’il me fait ces jours-là
m’embêtent beaucoup, je l’avoue, j’essaie de ne pas trop en faire cas.
J’ai fini par comprendre sa personnalité et l’accepter. Après tout, si je
tiens à lui, je dois faire des efforts aussi pour lui convenir, n’est-ce-pas ?
Je suis amoureuse de cet homme, j’ai fini par me l’avouer il y’a quelque
temps. Je suis complètement amoureuse de lui.
Après les habituelles disputes sur le choix du film, on se décide enfin sur
un film d’épouvante. J’ai gagné comme d’habitude. Je suis bien installée
dans les bras de mon homme, qui a entouré ma taille de sa main,
presque en position de cuillère. Je lui glisse de temps en temps de la
glace dans la bouche… Le bonheur est vraiment dans les choses
simples.
Bizarrement il n’a pas l’air d’avoir la tête dans son match. Il me regarde
intensément, je crois qu’il m’observait déjà avant que je me retourne.
Moi : Oui, ma femme. Mon épouse quoi… Tu sais, porter mon nom, vivre
avec moi, supporter mes ronflements, me laver les pieds tous les soirs…
Là je la retrouve.
Cela fait plusieurs minutes déjà que j’attends à l’arrêt de bus de la gare
la plus proche de chez moi. Je rentre du travail et je suis tellement
fatiguée que je n’ai pas le courage de faire les 15 minutes à pied qui
séparent la gare et l’immeuble où je vis. Kader, lui, est encore au boulot.
Nous sommes fiancés depuis 3 semaines maintenant. Bon les fiançailles
n’existent pas vraiment là d’où nous venons, mais on va dire que nous
nous sommes promis l’un à l’autre, si vous voulez.
Le bus arrive enfin. Je patiente durant les 5 minutes de trajet. Juste
avant de descendre, mon téléphone sonne en appel. C’est Badou. Je
décroche rapidement : « Allô ? »
© Partie 9 : Le retour
Ce que vous ne savez pas, c’est qu’en effet il a tenté, trop de fois pour
que je puisse en faire le compte, de me joindre par téléphone depuis des
semaines. Il a envoyé aussi beaucoup de messages pour me demander
pourquoi je ne répondais pas. Je m’empressais toujours de supprimer
toutes les traces laissées sur mon téléphone de peur que Kader tombe
dessus.
On arrive chez moi. Gabi enlève sa veste et s’installe sur le petit canapé
2 places. Mon studio n’est pas très grand mais j’ai réussi à emménager
un coin chambre séparé du reste de la pièce par des panneaux japonais.
Je me dirige dedans et pose mes affaires. Je soupire : comment je vais
pouvoir gérer ça ? Et si Kader était au courant que mon ex est à cet
instant même chez moi ? Un autre homme pourrait tolérer ça et essayer
d’écouter mes explications, mais Kader, je n’ose même pas imaginer sa
réaction. Il faut que je gère rapidement cette situation.
Je vais dans le coin salon, tire une chaise et me tourne vers Gabi.
Moi : Je t’écoute.
Badou ?! Ce n’est pas possible. Je sais que Badou et Gabi, sans être les
meilleurs potes du monde, s’entendent assez bien et sont quelquefois en
contact. Mais Badou n’a aucune raison de donner des informations sur
moi à Gabi, mon ex, sans m’en parler.
G : Tu sais pourquoi.
Gabi : Tu sais bien Ami. Je veux qu’on se donne une autre chance.
G : On peut essayer…
G : J’ai fait beaucoup de route déjà Ami. Je suis fatigué. Je ne peux pas
prendre le risque de conduire dans ces conditions.
Bon, je ne lui dis pas ça. Il m’énerve. Des fois, je me trouve vraiment trop
gentille.
Moi : Tu peux rester dormir. Ce canapé n’est pas très confortable mais
c’est tout ce que je peux te proposer.
Moi : Par contre, je dois sortir tôt demain, donc il faut vraiment que tu
partes très tôt.
G : Ne t’inquiète pas.
Kader : Comme un vendredi soir. Mais ça n’a pas l’air d’aller toi. C’est
quoi cette petite voix ?
Moi : J’ai une migraine, là. C’est horrible. Je pense que c’est juste la
fatigue…
Moi : Hum, tentant ! Mais je pense que j’ai surtout besoin de sommeil,
babe. Il me reste encore un peu de doliprane sinon. C’est mieux si on se
voit demain.
(Silence…)
Moi : Kader ?
K : … Je t’aime.
Moi : Tu vas faire quoi de ta soirée alors ? (Je me sens un peu coupable)
Il dit ça d’un air faussement accusateur. Karim est son meilleur pote, à
Paris. Je l’ai rencontré quelquefois et il est assez sympa. Kader et moi
passons presque tout notre temps libre ensemble, surtout les week-
ends. Il doit donc voir beaucoup moins ses amis. D’où son allusion.
Kader : Oui ?
Quand Gabriel revient avec les kébabs, on s’assoit dans le salon devant
la télé, moi faisant attention à rester bien écartée et fixant l’écran. Je me
sens de plus en plus mal à l’aise et je suis tentée de faire silence radio
jusqu’à la fin du diner, mais apparemment lui veut faire la conversation.
G : Je tiens quand même à te dire que je suis content pour toi malgré
tout. J’aurais préféré être à la place de… Kader. Je pensais vraiment
que tu étais la femme de ma vie, tu sais… Tu ne peux pas savoir à quel
point je t’aime.
Là, je ne peux pas m’empêcher d’être touchée par ce qu’il dit. Tout de
suite, ces paroles me rappellent fortement celles d’une chanson que
j'aime bien (lien par ici --
> http://www.youtube.com/watch?v=IdSyx6r7Gps).
Moi : Cet été si Dieu le veut. (Je ne peux pas m’empêcher de sourire à
cette pensée). Dès que je finis mon stage, on ira à Dakar.
Moi : Merci.
Pendant que je fais mes prières dans le coin chambre, j’entends les
bruits de Gabriel qui se prépare sans doute pour se coucher aussi. Je
ressors rapidement pour lui laisser un oreiller et des draps.
Il est 3h du matin passées. Je n’ai pas fermé l’œil une seule fois. Je
m’approche doucement du coin où dort Ami et contourne les panneaux
sans faire de bruit. Je me tiens au seuil et la regarde dormir pendant
quelques minutes. Elle a ramené ses genoux à sa poitrine et le livre
qu’elle tient encore s’est refermé presque entièrement. Je m’approche
encore plus et me penche au-dessus d’elle. Je retire tout doucement le
livre et le pose sur le meuble à côté.
Je sors enfin de là, prend ma veste et mon portable posé sur la table.
J’ouvre doucement la porte d’entrée que je referme derrière moi.
© Partie 10 : Le début…
Je sors enfin de là, prend ma veste et mon portable posé sur la table.
J’ouvre doucement la porte d’entrée que je referme derrière moi.
Moi : Salut chéri. Je viens juste de voir ton message et tes appels. Ça va
?
Kader : Tu dormais ?
Moi : Oui, oui. Je ne sais pas ce qui m’a prise. Tu me connais… Dormir
jusqu’à 11h n’est vraiment pas dans mes habitudes.
Moi : hum, no. Ça va, je n’ai plus mal. C’était horrible, je n’en pouvais
plus.
Moi : Tu n’as vraiment pas l’air dans ton assiette toi, ce matin. Ta soirée
avec Karim s’est bien passée, au moins ?
Kader : Yep. Je suis juste fatigué, j’ai dormi tard et je me suis levé tôt. Je
vais récupérer un peu. Je viens te prendre après, ça te va ?
Moi : Non, ne t’inquiète pas. Tu vas bien dormir, c’est mieux. Je vais
faire des courses, appeler maman et faire d’autres petites choses en
attendant. Je prendrai les transports ensuite pour venir chez toi. Ok ?
Je raccroche. Je sens que mon homme est un peu fâché même s’il ne
me le dit pas. Il doit sans doute m’en vouloir un peu pour la soirée que
j’ai décidée de passer seule. En même temps, il exagère un peu, lui
aussi. Même si on a l’habitude d’être ensemble tous les week-ends, j’ai
quand même le droit de vouloir rester seule de temps en temps. Bon, je
vais éviter de la ramener aussi, vu que je lui ai menti quand même…
Ce qu’il nous faut, c’est une bonne soirée de retrouvailles. Gabriel est
parti maintenant, et pour de bon cette fois-ci. Je l’espère en tout cas.
Mieux vaut l’enterrer et me consacrer à mon homme pour me faire
pardonner…en secret.
Moi : Je sais maman. Je suis désolée, mais avec le stage je n’ai plus du
tout de temps. Je ne peux profiter que des week-ends pour voir mes
amis, faire mes courses et tout ça. Des fois même, je travaille chez moi.
Ben quoi, qui est fou ?! Vous ne croyez quand même pas que je vais
dire à ma mère que je passe tous mes week-ends dans les bras d’un
homme. La femme-là débarquerait ici-même pour soit me tuer, soit me
ramener illico presto au Sénégal.
Moi : Mais maman, je suis là non ? C’est même moi qui t’ai proposée de
nous retrouver !
Maman : Hum, ok ! En tout cas fais attention à toi dé. Ne fais pas de
bêtises.
Bon, malgré que j’ai envie qu’on passe une soirée agréable, il faut que je
lui parle sérieusement quand elle sera là. Je n’ai pas du tout avalé son
excuse d’hier. Elle ment très mal et j’ai senti qu’elle me cachait quelque
chose. Peut-être qu’elle voulait juste rester seule mais dans ce cas, je
préfère qu’elle me le dise tout simplement au lieu d’inventer des
excuses. En plus, elle a persisté à mentir ce matin, et c’est là que mes
doutes se sont confirmés.
Lui : Non… pas directement en tout cas. Ami m’a parlé de vous.
Il reprend : « Je suis venu pour vous dire de lâcher l’affaire avec Ami.
Elle ne sera jamais votre femme. Vous l’avez aidée à surmonter la
douleur de notre rupture mais je suis de retour maintenant, dans sa vie.
Là, elle est embêtée parce qu’elle se retrouve entre nous deux. Elle m’a
elle-même dit qu’elle ne sait pas comment rompre avec vous, que vous
avez été là pour elle, et tout ça.
Eh bien, je suis là pour faciliter les choses. Je ne vais pas pouvoir
attendre qu’elle se décide. »
Lui : Ah oui, c’est vrai. Je ne vous ai pas dit… On a passé la soirée d’hier
ensemble, chez elle… Et toute la nuit... Apparemment je lui manquais
beaucoup.
Hier…
Kader, d’une voix sourde : Sortez tout de suite de chez moi si vous ne
voulez pas que je vous tue.
Je suis un homme et je n’ai pas peur d’un homme. Mais la fureur que je
voie dans ces yeux ne me donne pas envie de rester.
Puis à quoi bon me battre. Après tout, je viens de lui faire plus de mal
qu’il ne m’en fera jamais.
Je recule vers la porte en essuyant une goutte de sang sur mon visage.
Il y'aura peut-être une suite ce soir, si.... on atteint 50 like dès ce soir
Kader, d’une voix sourde : Sortez tout de suite de chez moi si vous ne
voulez pas que je vous tue.
Je suis un homme et je n’ai pas peur d’un homme. Mais la fureur que je
voie dans ces yeux ne me donne pas envie de rester.
Puis à quoi bon me battre. Après tout, je viens de lui faire plus de mal
qu’il ne m’en fera jamais.
Je recule vers la porte en essuyant une goutte de sang sur mon visage.
J’arrive enfin chez mon chéri. Heureusement que j’ai pris un taxi, je ne
sais pas comment j’aurais pu y arriver avec mes talons là. Rien que
quelques pas me font souffrir. Décidément, je ne serai jamais un
mannequin.
Et tout ça pour lui. J’espère juste réussir à le détendre, mais ça ne
devrait pas être un problème.
Dans l’ascenseur qui me monte au 5e étage où se trouve l’appartement
de Kader, je profite de la glace pour me retoucher les lèvres avec mon
gloss et me remets un peu de parfum dans le cou.
Je ne sais pas si c’est le manque ou la culpabilité qui me fait faire autant
d’efforts. Bref, je ne veux plus penser à ça.
J’ai hâte de le voir.
Il est de dos.
Je m’approche sans rien dire. Debout derrière lui, je me penche pour lui
entourer le cou de mes bras et lui chuchoter dans l’oreille : « ça va mon
amour ? ».
Aucune réaction.
Il me parle enfin. Sa voix est tellement basse que j’ai un peu de peine à
l’entendre : « Tu étais où hier soir ? »
J’essaie de sourire et lui réponds, d’une voix peu assurée : Mais enfin, tu
sais bien… J’étais chez moi.
Moi :…
Moi : Mon… mon ex est venu chez moi. Je ne lui ai pas donnée mon
adresse, je te jure. Il l’a trouvée…
Moi : Quoi ? Non ! Non pas du tout… Il a juste dormi chez moi parce
que…
Kader : Lève-toi
Moi : Chéri, écoute-moi, je peux t’expliquer. Je n’ai rien fait de mal.
Je n’ai pas le temps de finir ma phrase. Il jette violemment son verre qui
atterrit sur le meuble de la télé et se casse en mille morceaux.
Je me lève brusquement, sous le choc.
Gabriel. Quel salaud ! Il n’y a que lui qui a pu lui dire. Il n’y a que lui qui
savait à part moi. Je n’aurais jamais dû lui faire confiance.
Maintenant que je réalise ce qu’il a fait, je me souviens de sa stratégie
pour avoir le nom de Kader. Prétendre être content pour moi et me
souhaiter du bonheur. Quel salaud !
Mais ce n’est pas lui qui m’a fait ça. Tout est de la faute de Badou. Je
sors mon téléphone de mon sac pour l’appeler, pendant que je marche
dans la rue.
Dès qu’il décroche, je lui crie dessus : « Tout est de ta faute, Badou…
sniff… tu n’aurais jamais dû lui donner mon adresse. Comment toi tu as
pu me faire ça, Badou ?! sniff »
Moi : Gabriel. Tu lui as donné mon adresse. Il est venu chez moi, et y a
dormi… sniff… Et maintenant Kader est au courant… sniff… Il lui a dit le
salaud. Tu te rends compte ? Je ne sais pas quand ni comment mais il
lui a dit qu’il a dormi chez moi… et c’est la vérité tu comprends ? Kader
est jaloux, Badou… sniff… et maintenant c’est fini, il ne va plus vouloir
de moi parce que je lui ai menti.
Moi : Ok.
Je suis sur mon balcon et je vois Ami marcher dans la rue. Elle semble
parler au téléphone.
Je la hais plus que jamais. Comment j’ai pu me laisser avoir à ce point,
moi de nature si méfiant. Je pensais qu’elle m’aimait, me respectait… Le
pire c’est que je n’arrive pas à m’imaginer vivre sans elle, malgré
l’énorme colère que je ressens. Si elle était restée, je l’aurais battue,
c’est sûr. Et ça je ne le veux pas. C’est peut-être une menteuse, mais
c’est Ami. Je connais ses principes, elle n’a pas pu faire ce que ce
connard a insinué.
Je n’ai pas pu m’empêcher de venir la surveiller du balcon, après avoir
vu comment elle a couru pour sortir. Elle doit avoir peur…
Je la vois s’assoir sur un banc. Elle a l’air d’avoir froid.
Je ne peux la laisser comme ça.
Je sors vite pour la rejoindre. Quand je sors dans la rue, elle est toujours
assise sur le banc, la tête penchée, s’entourant de ses bras. Je suis très
en colère et je ne sais pas encore si je vais lui pardonner mais je n’aime
pas la voir comme ça. Au moins je la déposerai chez elle.
Je ne suis pas encore arrivé quand je vois une voiture qui vient de faire
un demi-tour se garer devant elle. Elle se lève de son banc. L’homme
sort de la voiture qu’il contourne et la prend dans ses bras. Je la vois s’y
blottir et poser sa tête sur son torse, exactement comme elle le fait avec
moi.
J’ai pleuré sur tout le trajet en racontant à Badou ce qui s’est passé. Le
pauvre est désolé, il se reproche ce qui s’est passé. Je n’aurais pas dû
l’accuser, il n’aurait jamais fait ce qu’il a fait s’il savait ce qui s’ensuivrait.
Arrivés chez lui, je m’installe sur le canapé, perdue dans mes pensées.
Badou me ramène du thé. Je bois quelques gorgées et repose la tasse.
Il s’approche de moi et m’entoure les épaules de son bras : « Je suis
vraiment désolé. Je suis sûre que Kader et toi ça ira. Il est juste très en
colère, pour le moment. C’est normal. Laisse-lui le temps de se calmer.
Tu lui as quand même menti. Tu as été très naïve, tu sais. »
Kader abandonne mon bras et fait demi-tour pour retourner vers lui: «
Vous me cherchez, c’est ça ? Vous me cherchez ! »
Moi, me remettant entre eux : Badou, non, stp ! Kader, je vais partir avec
toi, ok, laisse-moi juste me rhabiller.
Non, en fait non. Je ne vais pas laisser ces deux-là seuls ici.
Moi : Non, c’est bon. Allons-y Kader. (Je me tourne vers Badou) Ne
t’inquiète pas, ça va aller. (Je lui fais un signe lui disant que je
l’appellerais).
C’est quand on foule le sol de la rue que je me rends compte que je suis
pieds-nus. Kader semble s’en apercevoir aussi, sans doute à ma
démarche, et me soulève dans ses bras. Je me retrouve perchée
comme un sac de riz sur son épaule.
Il fait quelques pas pour arriver devant sa voiture, me fait descendre et
ouvre la portière côté passager, sans rien dire. Bon, je suppose que je
dois entrer. Je n’ose pas lui dire un mot.
Kader : Déshabille-toi.
Kader : Déshabille-toi.
Moi : Pardon ?
Moi, en reculant : Kader, je ne sais pas ce que tu as dans la tête là, mais
tu es très en colère. Tu ne réfléchis plus…
Kader crie : « Enlève ce truc Ami ! Tout de suite ! »
Moi : NON
Je n’ai pas le choix, je tente ma chance et cours vers la porte. Dès que
je touche la poignée de celle-ci, je sens Kader me saisir par la taille. Je
m’accroche à la poignée que je ne veux pas lâcher, dans une tentative
désespérée. Je finis par céder sous la pression de Kader qui me tire.
En quelques secondes, je me retrouve sur le lit. Il m’a jeté dessus et se
tient debout en me regardant. Ses yeux brillent de fureur ? de désir ? Je
ne sais plus…
Mais il faut faire quelque chose. Je ne peux pas le laisser faire ce que je
pense qu’il va faire. Ce n’est pas comme ça que les choses sont
censées se passer, entre nous.
C’est quand même Kader, c’est mon futur mari !
Mon Dieu, c’est là que j’apprends que la force d’un homme n’a
absolument rien à voir avec ce qu’on peut imaginer tant qu’on ne l’a pas
subie. Je ne me suis jamais sentie aussi impuissante. J’ai l’impression
de n’être absolument rien du tout, de ne pas peser plus qu’une feuille
devant la puissance de l’homme qui est au-dessus de moi.
Cette puissance, je ne veux pas la subir. Non, non, je ne veux pas,
jamais !
En me fixant des yeux, il écarte mes cuisses de toute force avec son
genou et… me pénètre d’un seul coup violemment.
Ahhhhhhhhhhhhhhhh
Quoi ?! Désolée ?
Non. Elle est folle de penser ça. Ma Ami, toujours à penser aux autres
avant elle-même. Elle veut porter le monde entier sur ses petites
épaules.
Une profonde tristesse m’envahit. J’ai tellement honte ! C’est moi qui
suis censé la protéger. Au lieu de ça, je lui fais ce qu’il y’a de pire qu’elle
puisse vivre.
Je prends une pause, car je veux qu’elle n’oublie jamais ce que je viens
de lui dire.
Je ne réponds pas.
Moi : …
Elle pose enfin le drap sur elle et me crie : « Tu m’as violée, Kader ! Tu
m’as souillée ! Tu m’as fait mal ! Tout ça parce que dans ta tête j’étais
une p*** ?!
C’est ça que tu voulais, prendre ton pied, avec LA p*** que je suis,
histoire d’être au même niveau que les autres…? C’est ça, Kader ?
Ensuite quoi tu m’aurais jeté dehors comme une mer*** ?
Tu me dégoutes !! Je ne te pardonnerai jamais Kader, jamais ! Je te hais
! Je ne veux plus jamais te voir ! Sors ! »
Elle est hystérique. Debout de l’autre côté du lit en face d’elle, je fais un
geste pour le contourner afin de la prendre dans mes bras : « Ami.. »
J’ai mal. Mal pour elle, mal de ne pas pouvoir la consoler. Et mal pour
moi, parce que je sais que j’ai tout gâché. Elle ne voudra jamais me
pardonner.
[Coucou!! Voici votre suite les ami(e)s! Hope you enjoyémoticône heart
J’ai mal. Mal pour elle, mal de ne pas pouvoir la consoler. Et mal pour
moi, parce que je sais que j’ai tout gâché. Elle ne voudra jamais me
pardonner.
Il est presque 23h quand je reçois un appel sur mon téléphone. Le nom
qui s’affiche me surprend assez, surtout à cette heure-ci. Je crains qu’il
soit arrivé quelque chose. Je décroche rapidement : « Allô Kader ?»
Kader : Il s’est passé quelque chose… Ecoute, je suis garé dans ta rue.
Tu peux me rejoindre, stp ? Il faut que je t’amène voir Ami. Elle a
vraiment besoin de toi là.
Moi : Oh Kader, j’espère qu’il n’est rien arrivé de grave. J’arrive tout de
suite.
Kader : Attends… Tu peux euh, ramener une veste… pour elle ? Et des
chaussures ? Et… des vêtements qu’elle peut mettre ?
Kader : D’abord merci de venir avec moi. Je ne t’ai pas prévenu avant…
Mais je ne savais pas quoi faire d’autre. Tu es la seule personne que je
pouvais venir voir… Ami est chez moi.
Il s’arrête un moment de parler. Il dit tout ça les yeux fixés sur la route,
sans me regarder une seule fois. Je préfère le laisser continuer. Je suis
tournée vers lui et ne le quitte pas du regard. Il faut qu’il m’explique vite
ce qui se passe.
Kader : Elle a besoin de quelqu’un Karine. Elle a besoin de toi. Il faut que
tu l’aides.
Moi, un peu énervée : Kader, je vais aider Ami quoi qu’il se passe. Mais
je veux savoir ce que tu lui as fait. Tu n’as pas usé de violence Kader,
j’espère !
Kader : Je ne l’ai pas battue.
J’ai conscience que ma question est stupide. Pourquoi Ami aurait besoin
de vêtements pour une gifle ?! Mais là je ne sais plus quoi penser. J’ai
besoin de savoir rapidement et on n’est pas encore arrivés à destination.
Ouf, je suis au moins rassurée pour ça. Mais ça ne dure pas plus d’une
seconde. Qu’est-ce qui peut être plus grave que des coups ? Et que
Kader aurait fait à Ami ?
Moi, bien énervée cette fois : Tu l’as trompée ? Elle s’est battue avec
quelqu’un à cause de toi ?... Mais enfin, pourquoi tu ne me dis pas ce
que tu as fait !
Là, j’ai envie de gifler Kader. Bon, je vais éviter hein, je connais son
caractère. Déjà que je lui crie dessus.
Mais il m’énerve. C’est quoi, ces choses-là ? C’est sûr qu’il a fait quelque
chose de grave, sinon il n’aurait pas autant de mal à le dire.
Je ne sais pas ce qu’il a fait mais je le déteste déjà. Tous pareils ces
hommes.
Kader : Vous pouvez rester dormir ici, si vous voulez. Je vais à l’hôtel.
Attends stp, je peux t’appeler plus tard ? Pour savoir…?
L’image qui me revient le plus est celle des yeux de… de ses yeux juste
avant… La torpeur et les élancements de douleur dans mon bas-ventre
sont là pour me rappeler chaque fraction de seconde de ce moment. Je
n’ai jamais connu une douleur aussi forte, aussi brusque. Mais ce n’est
rien, comparé à celle que j’ai ressentie quelques minutes plus tard quand
ce salaud m’a avoué pourquoi il a fait ça.
Je suis plongée dans mes pensées quand j’entends la porte s’ouvrir. Oh,
non. Je ne veux pas le voir, plus jamais. Je sais que je suis chez lui mais
je m’en fiche. Qu’il aille ailleurs.
Je ne relève pas la tête. Je ne veux même pas qu’il me parle.
Karine : Oh Ami qu’est-ce qu’il t’a fait ? Qu’est-ce qu’il t’a fait ?
Elle crie : Vio quoi !! Seigneur ! Non, tu plaisantes. Il n’a pas osé faire ça
! Kader, te violer ?! Le fils de p*** !
En disant ça, elle tire son sac et fouille à l’intérieur. Elle sort son portable
et commence à le manipuler.
Karine, qui met déjà le téléphone à son oreille : Comment ça, arrête.
Moi : Je veux juste qu’il sorte de ma vie. C’est tout ce que je veux,
l’oublier… sniff
Oui. Extrêmement.
Mais je réponds: « ça va aller. Je veux sortir d’ici, rentrer chez moi. Mais
je… n’ai rien à mettre. Je n’ai que des sous-vêtements ici. Mon sac… »
Toutes mes affaires sont chez Badou. Même mon sac, mon portable et
mes clés.
Karine : Ne t’inquiète pas, j’ai ramené des vêtements pour toi. Kad… Il
m’a dit que tu en aurais besoin. On va aller chez moi, ok ?
Moi : Non, je ne veux pas m’assoir. J’ai juste besoin d’une seconde…
Voilà, ça va. Donne-moi les vêtements stp.
Elle me tend le sac et se dirige vers la sortie, sans doute pour me laisser
de l’intimité.
Moi : Attends Karine… Tu peux, euh, me donner un slip stp ? Y’en a
dans le tiroir là à gauche, celui du haut… Il y’a les siens aussi… Je ne
veux pas les voir.
Plus de trois quarts d’heure plus tard, nous sommes arrivées chez
Karine. Je ne peux pas m’empêcher de penser que si je me retrouve ici
c’est parce que ma vie a basculé du jour au lendemain. Je ne peux pas
encore rentrer chez moi et je ne peux pas aller à l’endroit où j’ai
l’habitude d’être. En l’espace de 2 jours, je suis passée d’une fille
amoureuse et confiante dans son couple à une fille violée. J’AI été
violée. J’ai perdu ma virginité et ce n’était pas mon choix.
Sous la douche, je laisse couler l’eau chaude sur tout mon corps, de la
tête aux pieds. Je veux effacer mes souvenirs mais chaque frottement
que je tente de faire me ramène à un toucher de lui. Je n’en peux plus !
J’ai une énorme boule dans la gorge. Je finis par éclater en sanglots.
Je crie, j’ai envie que cette boule disparaisse. Elle m’étouffe. J’entends
Karine frapper à la porte de la salle de bains, mais ça ne me calme pas.
J’essaie de m’arrêter de pleurer mais j’en suis incapable.
J’ai l’impression d’étouffer. Je me sens faible. Je m’appuie sur le mur et
glisse jusqu’à m’assoir sur le sol. L’eau est trop chaude, j’étouffe ! Je
veux respirer. J’arrête le robinet. Je continue de crier, complètement
assise sur le sol, en m’appuyant de mes mains.
émoticône heart ♥]
Kissou!! ♥]
Sous la douche, je laisse couler l’eau chaude sur tout mon corps, de la
tête aux pieds. Je veux effacer mes souvenirs mais chaque frottement
que je tente de faire me ramène à un toucher de lui. Je n’en peux plus !
J’ai une énorme boule dans la gorge. Je finis par éclater en sanglots.
Je crie, j’ai envie que cette boule disparaisse. Elle m’étouffe. J’entends
Karine frapper à la porte de la salle de bains, mais ça ne me calme pas.
J’essaie de m’arrêter de pleurer mais j’en suis incapable.
J’ai l’impression d’étouffer. Je me sens faible. Je m’appuie sur le mur et
glisse jusqu’à m’assoir sur le sol. L’eau est trop chaude, j’étouffe ! Je
veux respirer. J’arrête le robinet. Je continue de crier, complètement
assise sur le sol, en m’appuyant de mes mains.
Moi : Oui.
Karine : Je t’ai posé un pyjama sur mon lit. Est-ce que tu as dîné ?
Moi : Ok.
Elle semble hésiter un peu, puis me dit : « Ecoute Ami… je pense que tu
n’es pas encore prête à me parler. Ne te presse surtout pas. Tu me
parleras quand tu en auras envie. Mais… j’ai besoin de te poser une
question, c’est important. »
Moi : Ok.
De toute façon, comment pourrais-je dormir après ce que j’ai fait ? Ami a
raison. Je suis vraiment un salaud.
Mais quand j’entre dans la chambre, c’est une autre histoire. Je me tiens
au seuil et le lit complètement défait, témoin de la bataille qui s’y est
livrée, le peignoir qui traine sur le sol et surtout le drap de l’autre côté du
lit me rappellent la scène d’il y’a quelques heures.
Je suis dépité. Je pense et repense à Ami, mon bébé. A ses cris, ses
pleurs. Elle avait l’air d’avoir tellement mal. Et me dire que c’est moi qui
lui ai causé autant de souffrances m’est insupportable. Comment j’ai pu
la forcer ?! Comment j’ai pu croire qu’elle pouvait faire… ces choses ?
Elle est tellement innocente.
J’entre dans la chambre et vais ramasser le drap avec lequel Ami s’était
couverte. Je le manipule dans mes mains, triste, quand je remarque une
petite tâche sombre sur le tissu assez clair. Je devine tout de suite ce
que c’est.
Je veux la voir. Je veux voir Ami pour lui dire à quel point je regrette, que
je tiens à elle plus que tout, que je veux qu’elle soit ma femme et la mère
de mes enfants. Je veux lui demander pardon. Mon Dieu ! Et si elle ne
me pardonnait jamais ?
Parce que oui je compte faire d’elle la mère de mes enfants, ma femme,
quoi qu’il m’en coûte. Je sais que je la rendrai heureuse, avec le temps.
Je refuse de la perdre. J’attendrai le temps qu’il faudra. J’oublierai tout
ce qu’elle a pu faire. Elle est MA femme, et elle le restera.
J’ai tenté de joindre Ami ensuite, mais bien sûr, son téléphone était ici
avec tout le reste de ses affaires. Il ne me restait plus qu’à attendre
qu’elle me contacte, en espérant qu’elle puisse le faire.
Depuis lors j’attends, sans cesser de m’inquiéter, tout ça à cause de ce
connard.
Et là, comme si ça ne suffisait pas, j’apprends qu’il n’est même pas avec
elle. Où peut-elle bien se trouver, à cette heure-ci, sans les clés de son
appartement qui doivent forcément être dans son sac aussi ? Je vérifie,
et oui, elles sont bien dedans.
Il ne l’a quand même pas laissée dans la rue ?! Du peu que j’ai vu de lui,
je suis sûr qu’il en est capable.
© Partie 14 : La confrontation
Oui, je le tutoie. Au stade où on est, j’estime qu’il n’y a plus place aux
salamalecs.
Ses menaces puériles m’énervent au plus haut point. Mais ses questions
me ramènent d’un coup à un sentiment de culpabilité, encore plus fort
que ma colère. Pendant un bref instant, j’avais oublié le plus important.
La vérité est simple, si je ne suis pas avec Ami en ce moment, c’est
parce que je l’ai violée puis dénigrée et elle est partie. Je me sens à
nouveau abattu.
Badou : Pourquoi je veux le savoir…?! Mais parce que c’est mon amie
Kader, tu le sais déjà. C’est ma sœur ! Je me sens responsable d’elle, tu
comprends ça ? Ce que tu lui as fait ce soir, c’est aussi ma faute, mer** !
Moi : Ta faute ?
Moi : Elle est entre de bonnes mains, ne t’inquiète pas. Entre, je vais
t’expliquer.
Il hésite un peu puis finit par entrer. Je lui indique le salon et l’invite à
s’assoir. Il n’en a visiblement pas l’intention. Bon.
Badou : Pourquoi ?
Moi, honteux : Elle n’est pas… blessée, si c’est à ça que tu penses. Elle
n’est juste pas bien. Moi aussi, j’essaie d’avoir de ses nouvelles.
Je crois que j’ai répondu trop vite, là. La question de Badou n’est pas
dans ce sens, mais je suis obsédé par ce que j’ai fait. Lui n’a aucun
moyen de savoir ce qui s’est passé déjà.
Moi : Non ce n’est pas ça. Ecoute, je ne peux pas te dire ce qui s’est
passé entre nous. C’est privé.
Même si j’ai honte de ce que j’ai fait, ce n’est pas pour ça que je ne veux
rien lui dire, non. Je pense juste que c’est à Ami d’en décider elle-même.
C’est quand même du domaine de l’intime. Et franchement, moi-même je
ne souhaite pas que ce soit rendu public. Il s’agit quand même de la
mère de mes futurs enfants…
Moi : Elle est entre de bonnes mains… Mais elle ne veut pas me parler.
Peut-être que tu pourrais essayer de rappeler Karine ?
Badou : Comment ça ?
Moi : Karine ne va pas répondre à mes appels. Et…je veux juste avoir
des nouvelles de Ami. C’est important pour moi.
Il se retourne.
Une fille sensible comme Ami, en plus. Il doit la connaître quand même,
depuis des mois qu’ils sortent ensemble. Et il lui fait ça !
Je ne me demande même pas ce qui a pu se passer pour qu’ils en
arrivent là. Absolument rien ne justifie cet acte. Si c’était moi seulement,
il serait déjà arrêté et menotté à l’heure actuelle.
Moi : C’est une question stupide. Bien sûr que ça ne va pas. Chérie… je
sais que ça ne va pas te consoler, mais dis-toi qu’au moins tu as
découvert son vrai visage avant de l’épouser. Cet homme ne te mérite
pas.
Moi : Je sais ma chérie. Mais tu vas l’oublier, j’en suis sûre. Tôt ou tard.
Elle me regarde quelques secondes quand je dis ça. Elle ne dit rien,
mais son regard en dit assez. Non, elle ne va pas l’oublier. Pas
facilement, en tout cas. C’est le seul qu’elle ait aimé.
Je me lève pour aller me préparer, quand elle m’arrête : « Karine, tu
peux appeler Badou stp. Je lui avais promis de l’appeler. Dis-lui juste
que je suis chez toi, et que je dors. Que je suis fatiguée. Je ne veux pas
lui parler pour le moment ».
Karine : Je vais l’appeler demain, ok ? J’ai peur qu’il soit déjà couché.
Ami : Non, tu ne comprends pas. J’étais chez lui avant de… Tout à
l’heure. Il doit s’inquiéter. Je suis sûre qu’il ne dort pas.
Karine : D’accord.
Badou : Allô
Badou : Ok. Et comment elle va ? Kader m’a dit qu’ils se sont disputés.
Moi : Euh oui, ça l’a un peu chamboulée... Mais ça va mieux là. Elle dort
mais elle m’a demandé de t’appeler avant. Elle était trop fatiguée pour le
faire.
Badou : Ah bon ?... Bon écoute, l’essentiel est qu’elle aille bien. J’ai ses
clés et son sac. Je passerai demain les déposer pour qu’elle puisse
rentrer chez elle.
Ses clés ? Mais pourquoi Badou a les clés de Ami ? C’est donc là qu’elle
a toutes ses affaires… Décidément, il y’a beaucoup de choses qui
m’échappent dans cette soirée.
Il raccroche.
Badou !
© Partie 15 : La culpabilité
Il raccroche.
Je l’aime ! Il n’y a rien de plus vrai pour moi que ce fait. J’aime Ami.
Bon. C’est tout ce que j’ai. J’ai fait le con avec la femme que j’aime et
maintenant c’est tout ce que j’obtiens. Un message de son ami pour me
dire qu’elle va bien. Je suis tentée d’aller chez Karine, mais je vais faire
plus peur à Ami qu’autre chose. Surtout qu’à cette heure-ci, il vaut mieux
que je la laisse se reposer. Mais je voudrais au moins l’entendre !
Je n’en peux plus. J’ai besoin de parler à quelqu’un, là. Sinon je vais
devenir fou ce soir.
J’envoie un message à Soukeyna, ma sœur : « Tu dors ? »
Soukeyna : Oh, arrête de dire des bêtises. Tu sais très bien que je
préfère te parler que dormir. Puis je venais à peine de fermer les yeux.
Moi : Tu es seule ?
S : Oui je suis seule. Ce qui me sert de mari dort chez sa femme ce soir.
Je soupire. S’il y’a une seule personne à qui je peux parler ouvertement,
c’est bien Soukey. Elle sait tout de moi. Elle me connait sous tous les
plans. Même si j’essayais de lui mentir, ce serait en vain. Elle saurait tout
de suite que je ne dis pas la vérité. De plus j’ai vraiment besoin de me
confier à elle.
Je lui réponds : « J’ai fait une grosse bêtise, Soukey. La pire de ma vie
».
S : Pire !
Moi : Oui…
Moi : Je l’ai…forcée.
S : Etre avec toi ?? Mais dis les choses clairement Kader. Tchuiip !
Kader, dis-moi que ce n’est pas ce à quoi je pense, stp.
Moi : …
Moi : Je ne sais…
Moi : Je ne pourrai pas vivre sans elle. Si je suis devenu fou au point de
faire ces choses, c’est surtout parce qu’au fond de moi, je pensais l’avoir
perdue pour d’autres… Et là je risque de la perdre pour de vrai, par ma
propre faute. Et ça je ne peux pas l’accepter. Vivre sans elle, c’est pire
que de me retrouver en prison.
S : Ah bon ! Parce que tu sais déjà ce que c’est que d’être en prison ?
Moi : Oui.
Elle hésite quelques instants, puis me dit d’une voix plus douce : «
Ecoute chéri. Je t’en veux énormément pour ce que tu as fait. J’avoue
que je ne te reconnais pas. Je te savais colérique. Mais aussi jaloux et
possessif, au point de devenir violent, ça je n’en reviens pas. Je ne t’ai
jamais vu te comporter comme ça avec une fille.
Et puis tu as 28 ans Kader, comment tu peux croire à tout ce qu’on te
raconte sans réfléchir ? Si cet ex avait ce qu’il voulait avec Ami, tu crois
vraiment qu’il aurait eu besoin de venir t’en parler? Tu t’es vraiment
conduit de façon stupide. Et tu en tires les conséquences, maintenant.
On ne fait pas de mal à une femme Kader, encore moins celle qu’on
aime. Et tu vas t’en mordre les doigts, ça j’en suis certaine… »
Elle s’arrête quelques instants pendant que je digère ses mots, honteux.
Elle reprend : « Mais tu es mon frère et je t’aime. Bien sûr que je vais
t’aider. Je sais à quel point tu souffres actuellement, même si je suis
sûre que tu vas faire ton fier devant les autres. Seulement là, je ne sais
pas quoi te dire. Je suis dépassée par les événements.
Donc va te coucher et essaie de te reposer, même si tu ne dors pas.
Tout ça est encore très récent, et demain est un autre jour. Tu
m’appelleras l’après-midi d’accord ? »
Les dix heures sont passées ce dimanche matin quand je sens Karine
commencer à se réveiller. Pour ma part je suis réveillée il y’a plusieurs
heures mais je n’ai pas quitté le lit ni même changé de position depuis
lors. Je n’ai envie de rien. Je suis juste couchée là, les yeux ouverts et
sans arrêt en train de penser. Je voudrais pouvoir reposer mon esprit
mais je n’y arrive pas.
Cette nuit, la fatigue aidant, j’ai réussi à dormir finalement, bien que très
tard. Malheureusement ça n’a pas duré. Je me suis très vite réveillée et
depuis je cherche le sommeil en vain.
Je n’aurais jamais cru que la douleur la plus vive que je puisse ressentir
me serait infligée par l’homme que j’aime et qui prétendait m’aimer.
Même Gabriel avec ses mensonges ne m’a pas fait autant de mal que
Kader.
Il m’a pris deux choses qui me tenaient à cœur : ma virginité et ma
dignité. Pour la première, je n’aurais jamais voulu l’offrir à quelqu’un
d’autre qu’à lui, mais il l’a prise de la pire des manières… Pour la
seconde, je ne pensais pas que ce serait lui, parmi tous les autres, qui
me le prendrait. Et il l’a fait. Il m’a traitée comme un torchon sale qu’on
utilise pour s’essuyer les mains et qu’on jette quand on a fini. Si je
n’avais pas été vierge, c’est ça qu’il aurait fait. Me violer et me jeter
ensuite de chez lui. Comment on peut prétendre aimer quelqu’un et lui
faire ça ? Je ne le lui pardonnerai jamais.
Karine est toujours couchée derrière moi, même si je sais qu’elle est
réveillée. Je sens qu’elle me regarde. Je me redresse pour m’assoir et
lui souris. Je lui suis tellement reconnaissante de me soutenir. Ça se voit
qu’elle a de la peine pour moi. Elle est la meilleure amie dont je pouvais
rêver.
Moi : C’est parce que je n’ai pas encore pris ma douche. Ne t’inquiète
pas, je vais beaucoup mieux.
K : Ok, si tu le dis. J’envoie un message à Badou pour lui dire qu’il peut
passer dès qu’il est réveillé.
Une heure plus tard, nous sommes attablées Karine et moi dans la
cuisine. Elle a tenu à tout me préparer, du chocolat chaud à la tartine.
J’avais juste à rester assise et dire ce que je voulais. Je n’ai pas pu
m’empêcher de sourire, amusée, en la voyant s’occuper de moi comme
de sa petite fille.
Moi : Je n’ai juste pas faim. Si je mange encore, j’ai peur de vomir.
K : Ok, je n’insiste pas. Mais avant de mourir, pense à faire un testament
et me léguer tes chaussures.
Moi : Tu es folle.
Moi : Pour que tu me harcèles jour et nuit avec une assiette et une
cuillère sous le nez? Non merci.
Moi : Je sais… Ne le prends pas mal, mais j’ai besoin de rester seule
pour le moment.
Il est 11h et je suis presque arrivé chez Karine. J’ai fait fort quand même
ce matin pour être capable de me réveiller à 9h, surtout un dimanche.
J’ai activé hier soir deux réveils pour être sûr de me lever. Je ne voulais
pas que Ami se retrouve bloquée chez Karine à cause de moi, parce que
j’ai ses clés. Demai, c’est lundi, jour de travail, et elle doit sûrement
vouloir rentrer chez elle pas trop tard.
Sans compter le fait que j’ai envie de les voir, mes petites femmes.
Karine : Très bien. Et toi ? Je ne pensais pas que tu serais déjà réveillé.
Moi : Oh, j’étais levé depuis bien longtemps quand j’ai reçu ton message.
J’essaie de la prendre dans mes bras pour l’embrasser mais elle recule
vivement.
Je n’avale pas l’excuse. Je pense qu’elle est beaucoup plus touchée par
sa dispute avec Kader, qu’elle ne veut le laisser paraître. Son sourire-là
ne convaincs personne. Elle doit m’en vouloir encore un peu, vue sa
réaction…
En tout cas, je n’aime pas du tout la voir comme ça. J’espère qu’ils se
réconcilieront très vite.
Moi : Tu devrais faire une sieste tout à l’heure… Alors tu es prête ? J’ai
laissé tes affaires dans la voiture. Je te dépose chez toi.
Elle sourit.
Après avoir bu mon café, nous disons au-revoir à Karine et partons. Sur
la route vers chez Ami, j’essaie de faire la conversation mais elle me
répond à peine. A court de sujets, je finis par renoncer. Je ne veux
surtout pas lui poser des questions sur sa dispute avec Kader. Je ne
veux pas la rendre plus triste qu’elle ne l’ait déjà.
Ami : Merci.
[Bonsoir à tou(te)s !
Vous l'attendiez? La voici. Hope you enjoy émoticône heart ]
Ami : Merci.
K : C’était…
Moi : Oh tu ne crois pas sérieusement que c’est fini entre eux. Ils ont
décidé de se marier quand même. On ne se fiance pas pour rompre
ensuite du jour ou lendemain !
K : Badou tu ne sais pas ce qui s’est passé entre eux. Tu ne devrais pas
t’en mêler.
Moi : Eh bien moi si. Je sais exactement ce qui a causé leur dispute.
C’est pour ça que je veux parler à Kader.
Encore heureux qu’il me salue. Si lui n’est pas amoureux, je n’y connais
rien à l’amour. Bon, de toute façon, je n’y connais rien quand même…
Il parait soulagé : « Ok »
J’ai l’impression de rêver. C’est Kader qui me parle comme ça, presque
en suppliant ?
Je regarde ma montre. Il est presque 14h… Bon tant pis.
Assis dans la cuisine, devant mon café, je repense à ce qu’il m’a dit.
Donc Ami a récupéré son téléphone et est rentrée chez elle... Et si je
l’appelais ? J’hésite beaucoup quand même… Est-ce vraiment une
bonne idée ? Et si elle se braquait encore plus et que mes chances se
retrouvent ainsi réduites à néant ?
Bon, je ne vais pas l’appeler, je vais attendre de voir Badou d’abord…
Moi : ça va ?
Soukeyna : Oui.
Moi : …
Moi : Son meilleur ami l’a vue. Il m’a dit qu’elle va bien. Elle est chez elle.
C’est tout ce que j’en sais. Je voudrais…
Elle me coupe : « La pauvre fille. Elle doit se sentir seule. Ce n’est pas le
genre de chagrin que tu peux raconter à n’importe qui et te faire
consoler. En plus loin de sa famille… »
Elle soupire puis reprend : « Ah vraiment Abdelkader, c’est toi mon frère,
ça je n’y peux rien. Mais ce n’est vraiment pas toi que j’ai envie d’aider
en ce moment. »
Quand j’ai quitté Badou devant l’immeuble tout à l’heure et que je suis
montée chez moi, j’ai ressenti une vive solitude dès que j’ai pénétré mon
appartement. Ça m’a envahi d’un coup, comme un poignard. Pourtant, je
suis presque toujours seule quand je suis chez moi, je suis habituée.
Mais là c’était différent.
Dire que quand je quittais ce même endroit hier, j’étais pimpante et toute
heureuse de revoir Kader. Si seulement j’avais su ce qui m’attendait…
J’ai laissé tomber toutes mes affaires à l’entrée et me suis dirigée vers
mon lit.
Très lasse, j’ai fini par m’endormir, malgré toutes les pensées noires qui
peuplaient ma tête.
C’est mon papa qui m’a offert ce coran, la première fois que je quittais
Saint-Louis pour venir poursuivre mes études en France. C’était un de
ses exemplaires préférés. Je le lui avais moi-même demandé parce que
je trouvais la couverture belle et qu’il était traduit en français. Au début, il
a rechigné à me le donner, puis il a fini par accepter en me disant : «
Prends-en soin Aminata. Un coran n’est pas un meuble qu’on se
contente d’admirer. Le meilleur soin que tu peux lui apporter est de le lire
régulièrement ».
J’avais alors promis de le faire, toute contente de l’avoir convaincu.
J’avoue que depuis lors, je l’ai beaucoup admiré, mais rarement ouvert.
Aujourd’hui, je ressens le besoin de le faire.
J’ouvre une page au hasard et commence à lire les versets. Des larmes
ne tardent pas à rouler sur mes joues. Car bizarrement, j’ai l’impression
que les phrases que je suis en train de lire me sont destinées et sont en
rapport avec ce qui m’est arrivé. Ça parle des épreuves que Dieu fait
subir aux hommes, et du fait que seuls les endurants s’en relèvent avec
leur foi encore plus affermie.
Ce qui m’est arrivé est une épreuve par laquelle je devais passer.
Je n’ai jamais vraiment eu à vivre de réelles difficultés. Et cette épreuve
était peut-être un test. Je prends alors la ferme résolution de le réussir.
Je n’attends personne…
***Dans la tête de Kader***
Il est 16h30 quand j’arrive chez Badou. J’ai quitté plus tôt que nécessaire
pour ne pas être en retard à cause des bouchons. Mais au fond de moi,
je sais que c’était juste une excuse pour ne pas rester une minute de
plus à tourner en rond chez moi. Des bouchons, il n’y en a eu aucun et
l’appartement de Badou n’est vraiment pas éloigné du mien.
Badou : Un peu ?
Badou : Ok.
Là je ne sais pas quoi lui répondre. Il n’a rien à voir avec l’état actuel de
Ami, mais il ne le sait pas. Et je ne peux pas le lui dire.
Moi : Oui, mais je n’ai pas pu. Son portable était coupé.
Moi : Non… Je ne crois pas que ce soit ça. Ami ne veut plus me parler.
Badou : Bon Kader, je ne sais pas tout ce qui s’est passé entre vous et
je ne vais pas te poser de questions à ce propos… Par contre, je ne
veux pas causer plus de problèmes à Ami qu’elle n’en a déjà. Si tu
comptes la faire souffrir, arrêtons là tout de suite. Est-ce que tu aimes
vraiment Ami ?
Badou : Je te crois.
Moi : Merci.
Je secoue la tête : « Mec, je ne crois pas que ce soit une bonne idée. »
Moi : Non, ce n’est pas ça. Mais elle est en colère et…
C’est ainsi qu’une demi-heure plus tard, environ, nous nous retrouvons
devant l’immeuble de Ami.
Quand on arrive devant chez elle, je ne contrôle déjà plus les battements
de mon cœur.
La porte s’ouvre.
J’entends la voix de Ami : Badou ?
Quand on arrive devant chez elle, je ne contrôle déjà plus les battements
de mon cœur.
La porte s’ouvre.
Je ne sais pas pourquoi Badou est revenu. Je pensais lui avoir fait
comprendre que je voulais rester seule ; et j’y tiens vraiment !
Là, je lui ai ouvert la porte d’en bas et le temps qu’il monte, je décide
d’aller ramasser les affaires que j’avais jetées à la porte : mon sac et le
sachet qu’il m’a remis ce matin. La robe jaune que j’avais portée hier se
distingue dans le tas… Un fort sentiment d’amertume m’envahit et
m’enlève un peu la sérénité que j’avais réussi à gagner de ma lecture. Je
pense immédiatement au boxer enroulé dans la poche de mon sac à
main…
Ça y’est la grosse boule dans ma poitrine revient… Je prends un grand
souffle et ramasse les affaires que je vais ensuite ranger dans ma
chambre.
Je suis encore en tenue de prière, la tête couverte de mon voile, quand
Badou toque à la porte.
Badou : Ne m’en veux pas Ami. Je fais ça pour toi. Je t’ai vue tout à
l’heure et tu avais l’air malheureuse et…
Moi : NON !
Mon cri sonne trop fort à mes propres oreilles. Bon, il faut que je me
maîtrise. Mon cœur bat à cent à l’heure et je sens que je tremble.
J’essaie de reprendre mon souffle, me tenant toujours à deux pas de la
porte.
Je dois me calmer… Badou ne sait pas ce qui est arrivé et je ne tiens
pas à crier sur tous les toits que j’ai été violée.
Je regarde Badou, ignorant royalement Kader qui est juste à côté de lui.
J’ouvre la bouche pour lui répondre quand ce dernier m’interpelle : «
Ami.. »
Badou : Ami, je pense que vous devriez au moins vous parler. Vous ne
résoudrez aucun problème sans communication…
Moi :…
Moi : Quoi ?
Kader est toujours devant la porte. Je sens son regard qui me fixe, mais
il est hors de question que je le regarde. Je reviens vers la porte et la
pousse violemment pour la refermer. Kader met sa main dessus, ce qui
arrête le mouvement: « Ami ! Chérie, je t’en prie, regarde-moi »
Kader : Ami…
J’entends une porte s’ouvrir dans le couloir. Sans doute un voisin qui se
demande ce qui se passe.
Kader baisse la voix : Ami, tu peux m’ouvrir stp ? Je reste juste quelques
minutes, je te promets. Je veux juste… te voir encore un peu.
Je fais peur à Ami ! Pendant que je marche vers le métro, j’ai les yeux
embrouillés et l’esprit envahi par cette pensée : elle a peur de moi ! Je
voulais la « maîtriser » quand tout a commencé ? Eh bien voilà, j’ai ce
que je voulais. Maintenant elle a peur de moi. Et elle ne veut plus de
moi…
Je savais que c’était une mauvaise idée d’aller chez elle. Je le savais. Je
n’aurais jamais dû y aller. Me voir lui a forcément été difficile. Encore une
fois, j’ai été égoïste de ne penser qu’à mon envie de la voir.
Soukeyna avait raison, la dernière chose dont Ami a besoin
actuellement, c’est de me voir, moi, qui suis la cause de toute sa peine.
C’était terrible de la voir réagir comme elle l’a fait. Comme hier… J’ai vu
de la peur, de la rage et limite de la haine dans ses yeux.
Mais j’espérais quoi, au fond ? Qu’elle allait tomber dans mes bras juste
parce que je lui demande pardon ? Je l’ai violée, put*** ! C’est ça le mot
que je refuse d’accepter. Je l’ai violée… la femme que j’aime.
Tout a changé. Je réalise maintenant plus que jamais que plus rien ne
sera pareil. Je veux la reconquérir c’est sûr, mais je ne me leurre pas.
Rien ne redeviendra comme avant. Les choses sont allées trop loin.
La voir comme ça, sous son voile m’a fait encore plus réaliser à quel
point je me suis trompé sur son compte. Comment j’ai pu me comporter
de manière aussi stupide ? Ami est la meilleure femme dont je pouvais
rêver. Et j’ai peut-être perdu toutes mes chances de faire ma vie avec
elle…
Je suis perdu dans mes pensées durant tout le trajet en métro et RER,
pour retourner chez Badou. Ma voiture est garée là-bas et je vais juste la
récupérer et repartir. Je n’ai pas le courage de raconter à Badou ce qui
s’est passé.
Là, je viens de finir le boulot. Je ne peux pas dire que la journée était
excellente mais je me suis sentie à peu près normale. J’ai tout fait pour
toujours trouver de quoi m’occuper et éviter de penser aux événements
du week-end. Je me force à ne pas y penser. Et être entourée de
collègues de travail qui ne connaissent rien à ma vie privée, et donc ne
m’en parlent pas, m’y a aidé.
J’ai quand même reçu des appels de Karine puis Badou ce matin.
Heureusement, Karine n’est pas revenue sur l’histoire avec Kader.
Quant à Badou, je ne savais pas trop comment me comporter avec lui.
Je lui en veux pour hier mais en même temps je dois reconnaître que
sans savoir ce qui s’est passé vraiment, c’est difficile pour lui de me
comprendre. Quand il m’a posée des questions sur Kader, je lui ai juste
dit que je ne souhaitais pas en parler. Et il n’a pas insisté heureusement.
Sinon on se serait sûrement disputé.
Quand quelques minutes plus tard c’est enfin mon tour, je demande
d’une voix basse à la pharmacienne, en regardant sur mes côtés pour
contrôler que personne ne puisse m’entendre : « Bonjour. Je voudrais
une pilule svp »
Elle marche un peu et se baisse pour prendre une boîte dans une
rangée.
Pendant qu’elle l’enregistre sur sa machine, elle se sent obligée de me
poser des questions.
Elle : Vous les avez eus quand vos derniers rapports, madame ?
Hein ?!
Elle : Hum. C’est un peu juste quand même. Vous savez, vous ne
pouvez la prendre que jusqu’à 72h après les rapports. Au-delà ça ne sert
plus à rien… C’était vendredi soir ?
Moi : Oui.
Elle : Bon. Disons qu’il vous reste encore quelques heures. Mais je vous
conseille de faire quand même un test de grossesse dans une semaine
pour être sûre… Vous réglez comment madame ?
***
Presque une semaine plus tard, le samedi, je suis chez moi en train de
préparer du riz au poisson dans la cuisine. J’attends Karine qui vient
manger avec moi, et elle doit arriver d’une minute à l’autre. Elle a voulu
passer plusieurs fois pendant la semaine, surtout quand je lui ai parlé de
l’histoire de la pilule, mais je finissais toujours tard le boulot. D’ailleurs
elle passe à la pharmacie pour me ramener une boîte de test de
grossesse.
Elle s’en est beaucoup voulue pour l’oubli de la pilule mais je l’ai
rassurée. On a juste oublié toutes les deux et il ne reste plus qu’à
attendre maintenant.
J’affiche au quotidien plus de zen que je n’en ressens au fond de moi, à
propos de cette histoire d’éventuelle grossesse. Si ça se trouve, le bébé
de Kader est en train de grandir en ce moment-même dans mon ventre.
Mon Dieu, je ne veux même pas y penser !
Je suis tentée de ne pas lire le message mais ma curiosité est plus forte
« Hello Ami ! J’espère que tu vas bien ? Quoi de neuf ? Tu me manques.
Gabi. »
Karine arrive quelques minutes plus tard me trouvant dans cet état :
Karine, en enlevant sa veste : Qu’est-ce qui se passe ? Ça va ?
Moi : Non mais c’est l’autre là. Il m’énerve quoi. Il va raconter n’importe
quoi sur moi à Kader, et après il m’envoie un message pour me dire «
bonjour » comme si tout allait bien dans le meilleur des mondes.
Moi : De Gabriel ?
Moi : Je ne sais pas ce qu’il lui raconté exactement mais Kader semblait
convaincu que je n’étais plus vierge…
Moi :…
Moi : Quoi ?
Karine : Tu dis que ça n’a duré qu’une seconde avec Kader. Ça veut dire
quoi exactement ?
Moi : Ben… Il est…rentré et… est ressorti… tout de suite après. Tu vois
?
Karine : Ce n’est pas possible si les choses se sont passées telles que
tu me les décris.
Moi : …
Karine : Mais fais quand même le test demain. Juste pour être
rassurée… Moi en tout cas je suis soulagée.
[Hello!!
Désolée que ça arrive plus tard que prévu mais elle est là! Votre
nouvelle partie.
J'ai eu un gros imprévu qui m'a empêchée de poster plus tôt.
Cela fait plus d’une semaine que je n’ai pas vu Ami, 8 jours exactement.
Oui, je compte les jours. Je ne fais pas exprès. Mon esprit se fait un
malin plaisir de compter chaque nouveau jour qui se lève sans la voir ou
l’entendre, et de garder les chiffres bien en évidence dans ma tête.
Je ne pense qu’à ça. Je ne pense qu’à elle. Chaque minute que je passe
seul chez moi, je suis tenté de l’appeler ou de lui envoyer un message.
Mais vu comment ça s’est passé la dernière fois que j’ai succombé à la
tentation, je me retiens. J’ai décidé de suivre à la lettre les conseils de
Soukeyna. C’est une femme, elle comprend forcément les femmes
mieux que moi.
Pour éviter justement d’être tenté, je fais tout pour rester seul chez moi
le moins souvent possible. Toute la semaine j’ai fini très tard le boulot. Je
n’arrivais jamais avant 21h chez moi. Et ce week-end, j’ai surtout passé
du temps avec Karim. Samedi on a joué longtemps au foot, avec un
groupe qu’il avait déjà l’habitude de rejoindre. J’ai sauté sur l’occasion
quand je l’ai appelé au téléphone et qu’il m’a proposé de venir avec lui.
Ensuite dimanche, je suis parti manger chez lui et il en profité pour me
présenter sa petite amie. C’est une fille qu’il a rencontrée seulement 3
mois plus tôt et ils ont l’air déjà très amoureux.
Inutile de vous dire à qui leur couple m’a fait penser… Malgré moi, j’ai eu
un pincement de jalousie.
Le reste de ces deux journées, je crois avoir fait le tour complet de toute
la famille proche ou lointaine et de tous les amis quelle que soit leur
situation géographique. Je les ai tous appelés au téléphone.
Bien sûr, plus d’un étaient surpris. Il faut dire que pour certains, ils n’ont
pas eu de mes nouvelles depuis plus d’un an… Mais j’avais besoin de ça
pour m’occuper l’esprit.
Et ça a servi en plus à remplir mon quota de bonnes actions de la
semaine…
Quoique je ne suis pas tout à fait convaincu que tous étaient ravis des
nombreuses questions que je posais sur leur vie et de mes discours
quelquefois longs juste pour faire durer l’appel.
***
Plus d’une heure plus tard, je suis installé chez moi devant une assiette
vide de plat surgelé réchauffé et prends mon téléphone pour appeler
Badou.
Badou : J’avais bien deviné… Car Ami ne voulait pas en parler non plus,
quand je lui ai posé la question. Votre problème est grave quand même
vous deux.
Badou : Je n’ai jamais vu Ami réagir comme ça. Même avec moi elle est
distante maintenant.
Moi :…
Badou : Je trouve ça un peu bizarre. Mais t’es mon grand frère Kader et
je te respecte. Raison pour laquelle j’évite de poser trop de questions.
Ces deux-là pensent que je ne connais pas le vrai problème entre eux.
J’ai deviné la raison de leur éloignement depuis déjà un moment et
Kader ne fait que la confirmer à l’heure actuelle. Je peux paraître
insouciant mais je ne suis pas bête.
C’est simple, Kader me parle d’un tort qui semble plus grave que la
violence physique, et qu’il ne peut pas révéler pour protéger l’intimité de
Ami. Et Ami elle-même ne m’en a jamais parlé alors que d’habitude on
se dit tout.
C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles je ne lui en veux pas
vraiment. Je suis un homme et je suis bien placé pour savoir que
certaines tentations sont difficiles à résister. Et puis on est ce qu’on est,
nous les hommes, c’est-à-dire égoïstes… Quand certaines situations se
présentent, on a le défaut de vouloir en profiter en ne pensant qu’à notre
propre plaisir. C’est dommage mais ça peut arriver à n’importe quel
homme.
Mais Kader, contrairement à beaucoup d’hommes en commençant par
moi, regrette lui et il veut se racheter. Je suis certain qu’il aime vraiment
Ami. C’est juste dommage que celle-ci ne voit pas les choses comme je
les vois…
Kader : Ok… Je l’ai vue aujourd’hui, de loin. Tu ne lui dis pas stp. Elle ne
m’a pas vu elle.
Je suis rentrée chez moi tard ce soir, comme d’habitude depuis presque
un mois, mais sans regret. Finalement, la résolution que j’ai prise de
m’investir encore plus dans mon travail commence à avoir des effets
plus que positifs.
En dehors du fait que ça me permet de m’échapper de ma vie
personnelle qui a beaucoup changé, ça m’a permis aussi de me
construire une place de plus en plus solide au sein de l’équipe du projet
sur lequel je travaille.
Ce matin, j’ai été prise à part par le directeur du projet, qui est aussi mon
maître de stage. Il m’a annoncé que je ferai partie de l’équipe qui irait
faire les formations réservées aux « key-users » (utilisateurs clés) du
logiciel de gestion d’entreprise qu’on est en train de mettre en place.
Cette nouvelle est une aubaine pour moi. Je dois finir mon stage dans
moins de trois mois, et s’ils ont décidé de payer cette formation qui coûte
relativement cher, il y’a de grandes chances qu’ils me proposent aussi
de rester avec eux après le stage.
C’est donc de plutôt bonne humeur que j’arrive chez moi. A peine suis-je
entrée dans mon appartement vide et silencieux que cette humeur
commence à se dissiper. C’est le genre de nouvelles que j’avais pris
l’habitude de partager avec Kader… Ne pas savoir avec qui partager ma
joie l’a rapidement fait se dissiper. Je n’avais pas l’habitude de parler de
mes études ou de ma vie professionnelle avec Karine ou Badou. Je sais
que ce ne serait pas la même chose qu’avec Kader…
Je décroche : « Allô ? »
Soukeyna !
Donc ça y’est. Il considère qu’on a bien rompu cette fois. Eh ben tant
mieux.
S : Kader n’a pas voulu me dire pourquoi vous avez rompu mais
connaissant les hommes, je suis convaincu que c’est de sa faute.
Surtout qu’il avait l’air de se sentir coupable quand il m’a dit ça. J’ai
raison ?
Moi :…
S : Ton silence en dit assez. J’en étais sûre ! Ces hommes ! Kader est
peut être mon frère mais il est comme les autres. Ils font des bêtises
même avec la seule femme qu’ils aiment, au point de la perdre. Et après
ça vient se plaindre d’être malheureux ! Parce que pour l’être, ça il l’est
et c’est bien fait pour lui.
Moi :…
Il faut dire que Soukeyna m’a bien mise à l’aise. A ma grande surprise,
elle s’est beaucoup confiée à moi à propos des difficultés qu’elle
rencontre dans son mariage. Après l’effet de gêne du départ, j’ai été de
plus en plus touchée au fur et à mesure qu’elle me racontait ce qu’elle
endure. Je me suis sentie solidaire vis-à-vis d’elle. J’avais l’impression
qu’elle avait besoin de se confier.
Ce qui m’a le plus plu dans notre conversation, c’est qu’à aucun moment
elle n’est revenue sur l’histoire avec son frère. D’ailleurs elle ne semble
pas du tout être de son côté, ce que j’apprécie beaucoup.
Lui : Désolé, je ne voulais pas vous faire peur. J’ai rendez-vous avec M.
Bourrée et la réception m’a indiqué cette salle. On a une réunion à 8h30
mais j’avais besoin de venir plus tôt pour finir des choses. Vous le
connaissez ?
Je lui laisse le passage pendant qu’il entre dans la salle. J’allume les
lumières et lui indique un bureau : « Vous pouvez vous installer ici. Il n’y
a personne. »
© Partie 19 : La surprise
Je lui laisse le passage pendant qu’il entre dans la salle. J’allume les
lumières et lui indique un bureau : « Vous pouvez vous installer ici. Il n’y
a personne. »
Je suis tentée d’exprimer tout haut mes pensées mais il vaut mieux que
je me retienne. Après tout je ne suis qu’une stagiaire…
En disant ça, je fais un mouvement pour retirer ma main qui, selon moi,
reste un chouia trop longtemps dans la sienne.
Et puis c’est quoi ce sourire encore ? Je l’amuse ou quoi ?
Là c’est moi qui suis amusée. Déjà que je trouvais son accent bizarre
mais sa manière de dire « Aminata » est juste impossible.
Je tourne immédiatement les talons et vais poser mes affaires sur mon
bureau. Heureusement que je lui tourne le dos de là où je suis assise.
Ça me permet de rire discrètement.
Marc : Oui, c’est Aminata qui m’a ouvert la porte ce matin. Elle était la
première à arriver.
En disant ça, il me fait un clin d’œil. Euh, il se croit mon pote lui ?
Ma journée, bien que très intéressante s’est finie encore plus tard que
d’habitude. Mon binôme - dont j’ai fait la connaissance pendant la
réunion - et moi avons passé beaucoup de temps à travailler sur les
spécifications de notre périmètre.
Quand je rentre enfin chez moi le soir, je suis harassée. A peine ai-je fini
ma douche et mes prières que je me jette sur le lit. J’ai envie d’appeler
Karine mais j’ai peur de m’endormir pendant la communication… Je
regarde mon portable, hésitant à l’appeler.
C’est là que je vois un message reçu sur l’écran. Je n’avais pas entendu
la notification. Quand je l’ouvre, je vois que c’est encore Kader : «
J’espère que tu as passé une bonne journée mon cœur. Mes prières
t’accompagnent. Fais de beaux rêves. Kader. »
***
Au bureau, tout serait parfait s’il n’y avait pas Marc et ses regards plus
qu’insistants. Je ne sais pas pourquoi il me donne autant d’importance.
Je ne suis qu’une simple stagiaire et je ne travaille même pas dans son
domaine ! Mais il insiste pour avoir mon avis sur n’importe quel sujet
durant les réunions, quelquefois même il me met dans l’embarras, sur
des choses que je ne maîtrise pas du tout.
J’espère juste qu’il ne va pas me causer des problèmes. Je tiens
vraiment à ce qu’on me fasse une proposition d’embauche et je suis sur
le bon chemin pour l’obtenir. Qu’il ne vienne pas gâcher tout mon travail.
***
Je décroche : Oui ?
Oh non elle insiste. Omettre c’est une chose, mentir c’est une autre tout
à fait différente, surtout à Karine.
Karine : Et pourquoi ça ?
Moi : Parce qu’elle m’apprécie bien. Kader lui parlait beaucoup de moi
apparemment… Elle veut être là au cas où j’ai besoin de parler. Elle est
au courant de notre rupture et sans même savoir ce qui s’est passé,
n’est pas du tout du côté de Kader.
Karine : Son frère !
Moi : C’est bon Karine. Elle veut juste être mon amie, que je puisse me
confier à elle quand ça ne va pas…
Mais pourquoi elle mélange tout ? Qu’est-ce que Badou a à voir là-
dedans ?
***
Donc, week-end raté. C’est avec beaucoup d’espoir que j’ai repris le
boulot le lundi, espérant « souffler » un peu.
Malheureusement, ça ne se passe pas comme voulu. J’avais oublié le
cas « Marc ».
Le jeudi, il est 12h30 quand on finit une réunion de laquelle je suis sortie
particulièrement remontée contre lui. D’habitude mes collègues et moi
allons manger ensemble à la cantine de l’entreprise. Mais aujourd’hui j’ai
vraiment besoin d’une pause loin d’eux tous.
A peine ai-je terminé que Marc, qui était resté assis dans la salle de
réunion, lève la tête de son ordinateur et dit : « Ah ça tombe bien. Je vais
prendre un sandwich aussi. Je ne serai pas seul… »
Mais il ne s’arrête pas là : « C’est moi qui t’énerve comme ça ? Je t’ai fait
quelque chose ? »
Moi : Oui Marc tu m’as fait quelque chose. Plusieurs choses même.
D’abord pourquoi tu me poses toutes ces questions pendant les ateliers
? On dirait que je suis la seule key-user. Tout le monde a plus
d’expérience que moi sur les flux et les produits. Alors pourquoi c’est moi
que tu choisis de mettre dans l’embarras à chaque fois ?
Moi : Quoi ? Bien sûr que je suis à la hauteur. Mais pourquoi moi
seulement ? Je ne comprends pas ce que tu y gagnes en fait. Tu veux
me faire rater mon stage ?
Moi : Non Marc, tes intentions sont très claires. Ce que je ne sais pas,
c’est ce que ça t’apporte exactement. Passons ! Franchement Marc, tu
étais obligé de venir avec moi là, au lieu de manger avec les autres ?
Moi : Eh bien si, tu vois. Tu as vu comment les autres nous ont regardés
? Tu sais qu’ils sont en train de s’imaginer des choses là ?
Moi : Tu vois bien ce que je veux dire. Ils pensent que… qu’on…
Moi : Pardon ?
Je le regarde plus attentivement. Non il n’a pas l’air. Pour une fois il n’a
pas son sourire amusé. Il me regarde fixement comme s’il attend une
réponse.
Alors que moi, je ne sais juste pas quoi dire. Je suis trop surprise. Je
continue de le scruter pour détecter dans son regard une quelconque
lueur de moquerie.
On se tient là, face à face, au milieu de la grande rue sans s’occuper des
passants qui vont et viennent.
Et il reprend sa marche.
Je reste à la même place et le suis du regard pendant quelques
secondes, toujours sous le coup de la surprise.
Non, il doit sûrement plaisanter en fait.
Pensez fort à ça quand je vais vous faire une petite annonce tout à
l'heure émoticône smile
[Suuuuuurpriiiiise!!!
Donc voilà, je vais en voyage pro demain et je ne suis pas sure des
conditions sur place. Je vous poste donc en avance la dose de mercredi!
Une très longue émoticône smile
Enjoy!! ]
On se tient là, face à face, au milieu de la grande rue sans s’occuper des
passants qui vont et viennent.
Et il reprend sa marche.
Je reste à la même place et le suis du regard pendant quelques
secondes, toujours sous le coup de la surprise.
Non, il doit sûrement plaisanter en fait.
***
Je regarde l’écran sans réagir. J’ai peur que Marc soit vraiment sérieux
quand il dit que je lui plais. Et ça ne me convient pas du tout. Il va falloir
que je l’arrête avant qu’il ne se fasse trop d’idées.
Je reconnais qu’il a beaucoup de charme. Mais il n’est juste pas fait pour
moi. Autant qu’il s’intéresse à une de celles qui constituent sa cour
d’admiratrices et qui ne se donnent même pas la peine de s’en cacher.
Je pourrai même lui en suggérer une ou deux qui nous tympanisent avec
ça pendant les pauses café.
Moi : Ok.
Moi : Ok.
Donc je lui dis quoi pour l’arrêter net ? « Tu vois Marc, je n’aime pas les
blancs en fait, désolée. Donc merci mais non, toi et moi ce ne sera pas
possible»
Hum, je doute que ça le fasse ça, même si c’était vrai.
Quand j’arrive dans la petite salle de café, je vois Marc adossé à une
table haute avec 2 gobelets en plastique dessus. Il regarde les images
qui défilent sur l’écran de publicité interne.
Il sent ma présence et se tourne vers moi en souriant. Quand je
m’approche, il me tend le plus grand des gobelets : « Tiens, je t’ai pris un
thé. Je sais que tu ne bois pas de café. »
Une lueur sombre passe furtivement dans ses yeux clairs, qu’il baisse.
Puis il me regarde à nouveau et fait son éternel sourire.
Moi : Tu es belge !
Marc, en riant : Quoi ? Tu crois que c’est plus simple plus moi.
***
Moi : C’est moi qui suis désolée chérie. Je ne pouvais plus supporter de
te savoir fâchée contre moi. Alors tu vois, je me traine jusqu’ici pour te
demander pardon. Tu me pardonnes ?
Je simule une mine triste, les mains jointes. Ce qui fait rire Karine.
Je me tourne vers elle et glisse mon bras sous le sien avant de lui dire
plus sérieusement: « Karine, je ne cherche pas à t’écarter tu sais… pas
toi. »
Karine : C’est bon Ami. Tu as le droit d’avoir encore des sentiments pour
lui. Je comprends maintenant.
Moi :…
Moi : Comment ça ?
Karine : Oui. Tu as tout fait pour qu’il n’y ait rien entre nous. On n’en a
jamais ouvertement parlé mais je sais très bien que tu évitais qu’on se
voie et tu faisais toujours des remarques voilées qui visaient à me mettre
en garde. Je sais que tu pensais me protéger... Mais ça m’énervait, c’est
comme si tu décidais à ma place… Inconsciemment, je pense que je
voulais que tu voies ce que ça fait de voir sa meilleure amie critiquer
l’homme qu’on aime.
Moi : Karine, tu veux dire que tu aimes Badou ? Je pensais que c’était
juste… de l’attirance ?
Moi : Karine ?
Moi : Regarde-moi.
Je lui souris : « Arrête ton jeu Karine. Depuis quand tu vois Badou ? »
Karine : Oui, ne t’inquiète pas. C’est pour ça que je ne voulais pas t’en
parler même si c’était devenu insupportable de te le cacher. Je ne
voulais pas que tu le critiques encore. Je lui avais demandé de ne rien te
dire pour le moment… Il est adorable, tu sais. Ça me change de mes
précédentes relations. Mais toi, tu es son amie et tu le vois avec des
yeux différents.
Moi : Il n’arrête jamais Karine, pas un seul jour. C’est simple, dès que
mon téléphone bipe tôt le matin ou tard le soir, je ne me pose même pas
de questions. Je sais que c’est lui. Et le week-end dernier, il m’a aussi
envoyé un cadeau, un CD de compilation qu’il avait fait pour moi.
Moi : Exactement.
Moi : Mouai… Y’a un mec dans mon équipe, il m’a dit hier que je lui
plaisais. Je te jure que c’est tombé comme ça ! Alors qu’on n’était même
pas proches quoi, au contraire ! Et puis tout à l’heure, il s’est finalement
excusé pour ça, disant qu’il n’aurait pas dû. Je n’ai rien compris mais ça
m’a bien soulagée. C’est un collègue que je vais voir tous les jours et je
ne savais pas comment le rejeter sans créer de malaise, tu vois... Bref.
On a fini par parler d’autre chose et en fait il est vachement cool.
Moi : Oh, pas la peine de t’imaginer des choses toi aussi! Je te disais ça
juste comme ça.
Moi : Plutôt pas mal… Non, j’avoue, il est très beau en fait. Puis il a
quelque chose de rassurant, tu vois… Toutes les filles au bureau
craquent pour lui.
Moi : Moi je n’ai pas le temps pour ça. Je le trouve sympa, sans plus. Et
je pense qu’il peut m’être de bon conseil, professionnellement… Puis il
est vieux Karine! Il doit avoir au moins 35 ans !
Moi : Eh, je n’ai aucune intention de sortir avec lui, ok. Je regrette déjà
de t’avoir raconté ça.
***
Papa : Parce que c’est ce que tu es. Tu n’appelles jamais ton père.
Moi : Mais ça coûte cher les cartes, papa. Si tu veux que je t’appelle plus
souvent, envoie-moi un peu plus de sous.
Papa : J’étais sûr que tu dirais ça. Tu n’auras rien de moi, tu me ruines
déjà assez. Bon je ne vais pas durer. Je voulais juste te dire que je vais
au Maroc demain avec Malick qui m’accompagne (mon frère aîné). On
va passer quelques jours là-bas.
Papa : Tu sais comment ils sont les médecins ici… En plus, je veux en
profiter pour visiter Fèz.
Moi : Tu m’appelles quand t’es là-bas pour que j’aie ton numéro d’accord
?
***
Les jours se sont écoulés en se ressemblant les uns aux autres. Ma vie
est composée de mon boulot, les nouvelles de ma famille, mes amis et…
Kader.
Je ne l’ai pas vu depuis longtemps mais c’est tout comme car il trouve le
moyen de se rendre présent. Il continue de m’envoyer des messages et
des cadeaux chaque week-end. Le week-end dernier c’était une boîte de
chocolats. Le précédent c’était juste une carte postale où il avait marqué
des mots doux.
Il y’a trois jours, le matin, j’ai été surprise de ne recevoir aucun message
de lui.
J’avoue que n’ayant toujours rien reçu à 11h passées, j’ai commencé à
m’inquiéter. De nature, je suis très anxieuse et j’imagine toujours les
pires choses pour un rien. J’ai commencé à me demander s’il lui était
arrivé quelque chose.
Cependant, il était hors de question que je l’appelle. C’est juste qu’il vit
seul, et je n’étais pas sûre que quelqu’un puisse le secourir s’il lui était
arrivé quelque chose.
Moi : salut toi. Ecoute, je ne vais pas durer, on m’attend pour manger.
Dis-moi, tu as eu des nouvelles de Kader récemment ?
Moi : Euh, pour rien. Juste, tu peux essayer de l’appeler maintenant stp
? Juste pour voir s’il répond… Ne lui dis pas que c’est moi qui te l’ai
demandé hein !
***
J’en ressors 10 minutes après, plus qu’heureuse. Voilà, c’est fait. Je vais
rester ici, en tant qu’ingénieur projet junior. Mon manager m’a dit que les
RH m’enverront une lettre pour confirmer la proposition de rester avec
eux.
Je suis aux anges. Je m’empresse d’entrer dans l’open-space et de faire
un signe discret à Marc, en essayant de contenir mon excitation pour
que les autres ne me remarquent pas. Rien n’est signé encore, donc il
ne faut pas attirer le mauvais œil.
Marc me rejoint dans notre salle de café préférée. Avant même que je
n’ouvre la bouche, il me dit : « Alors ça y’est ? T’es embauchée ?
Marc : Bernard (mon manager) me l’a dit hier. Mais je voulais que ce soit
lui qui te l’annonce, rien que pour voir ta tête ensuite. J’avoue que ce
sourire en valait la peine.
En disant ça, il passe son doigt furtivement sur ma joue.
Le geste me gêne un peu, mais je suis trop heureuse pour m’y attarder.
[Et voilà!
Je ne vais pas avoir la 3g sur place donc ne vous étonnez pas si je ne
réponds pas aux commentaires. Peut-être le soir...
© Partie 21 : La décision
Il va passer son chemin. Mon Dieu, faites qu’il passe son chemin. Il a vu
que je suis avec quelqu’un, non ? Mon « petit ami » ! Il ne va quand
même pas oser venir me parler dans ces conditions, si ?
A moins que… Oh non, c’est Kader, il va faire un scandale à coup sûr !
Je n’aurai pas dû faire ça. Mon Dieu, je suis bête, bête, bête ! Je vais
avoir la honte de ma vie. Mais je ne peux plus reculer... Et là j’ai envie de
pisser !
Je me lève pour aller aux toilettes et vider ma vessie qui s’est remplie
sous le coup du stress. J’en profite pour bien me reprendre. Comment je
peux me mettre dans de pareils états pour Kader ? Ce n’est pas possible
quand même. C’est trop le pouvoir qu’il a sur moi ! Même après tout ce
qu’il m’a fait ! Il faut vraiment que ça change. Ce n’est juste plus
possible.
Je devrais suivre les conseils de Karine et sortir avec quelqu’un juste
pour écarter Kader pour de bon. J’en ai marre !
Quand j’ai bien rouspété dans ma tête et enfin repris mon calme, je sors
des toilettes et me dirige vers notre table. Je m’arrête subitement.
Non ! Ce n’est pas possible. C’est un cauchemar !
Qu’est-ce que Kader fait assis à ma place ? En face de Marc ?
Je les regarde tous les deux, me demandant lequel je hais le plus : celui
qui vient de me trahir ou celui que je hais tout court.
Je me dirige à pas lents vers la table pendant que Kader est en train de
se lever. Je m’arrête à distance respectable pour lui laisser le temps de
s’éloigner de la chaise. Mais c’est compter sans son audace. Au lieu
d’aller dans l’autre sens, il s’avance vers moi. Je recule pour éviter tout
contact.
Kader parle assez fort, visiblement pour se faire entendre par Marc: « Je
t’ai vue alors que tu allais aux toilettes, bébé. Je ne pouvais pas passer
sans venir t’embrasser. En attendant que tu reviennes, j’en ai profité
pour faire connaissance avec ton collègue… Marc, c’est ça ? »
En disant ça, il se retourne vers Marc, l’œil interrogateur. Marc lui répond
par un sourire clairement forcé. On dirait qu’il est énervé. Qu’est-ce qui
s’est passé ici ?
Kader continue, l’air content de lui: « Bon, je ne vous dérange pas plus
longtemps. J’étais juste venu prendre un sandwich… Assis-toi chérie. »
*
Je mets quelques secondes avant de me réveiller. Qu’est-ce qui vient de
se passer là ?
Petit à petit, mon incompréhension fait place à la colère. Mais pour qui il
se prend, enfin ?
Surpris par mon ton, il ne dit plus rien. On attend que le serveur arrive
avec nos plats et on commence à manger dans un silence religieux.
Marc finit par le rompre en parlant de banalités.
A force, je finis par retrouver le calme et un semblant de sourire.
Elle ne le sait peut-être pas, mais je lis en elle comme un livre ouvert. Et
ça n’a pas changé malgré tout ce temps sans l’avoir vue. Je sais le voir
quand elle ment, quand elle est gênée ou encore nerveuse. Je sais lire
en elle, quand je me donne la peine de bien vouloir le faire au lieu de
n’écouter que mes propres sentiments comme j’ai eu à le faire…
Je l’ai regardée et j’ai vu son malaise. J’ai alors compris qu’elle aussi
m’avait vu. Elle jouait donc peut-être la comédie, avec son grand sourire
et cette main qu’elle serrait.
Peut-être qu’elle me testait ? Qu’elle voulait voir comment j’allais réagir ?
Dans ce cas, voulant lui prouver que j’ai changé, j’ai décidé de passer
mon chemin.
On s’est regardé fixement quelques secondes les yeux dans les yeux,
une forte tension régnant entre nous.
Ça c’était la partie la plus difficile. Ma main me démangeait. J’avais
fortement envie de lui filer mon poing dans la gu**** maintenant que
c’était évident qu’il avait des vues sur Ami.
Marc marche à côté de moi sans parler, les mains dans les poches. Je
tourne la tête vers lui et il me sourit. Je lui rends un sourire sincère. Cet
homme est tellement patient. Je me sens encore un peu coupable pour
la manière dont je lui ai répondu tout à l’heure. Après tout, il n’a rien à
voir avec ce qui s’est passé.
Moi : Désolée pour tout à l’heure Marc. J’étais énervée mais ce n’était
pas contre toi.
Je lui dis : « Cet homme a été mon fiancé. Mais il ne l’est plus. Je n’ai
aucun homme dans ma vie. Et je ne cherche pas à en avoir. »
Gros mensonge.
***
***
Moi : Ah bon ? C’est intéressant ça. Je pourrai enfin connaître ton âge.
Moi : Pourquoi ?
Marc : ça te dit Disneyland ?
Moi : Euh Marc, je crois que j’ai dépassé l’âge. Hier encore, j’aurais dit
oui. Mais aujourd’hui, j’ai 24 ans, ok ?
Marc : Eh bien ce sera l’occasion non ? Viens stp. Tu vas voir, ça va être
fun.
Je regarde Marc qui, assis sur mon bureau, attend toujours ma réponse.
***
Moi : Tchuip !
Badou en profite pour me tendre un petit sac : « Tiens. C’est pour toi. »
Moi : Comment ça ? Attends, Karine n’est pas assez folle pour ça quand
même…si ?
Badou me tient là, sans rien dire, pendant des minutes, jusqu’à ce que
mes larmes s’arrêtent. Quand je relève enfin la tête, sa chemise est
toute trempée et tâchée de mascara.
Badou : Ami.
Ils m’ont remis leurs cadeaux et on a essayé tant bien que mal de finir la
soirée en profitant du gâteau et des boissons, sans grande excitation.
J’ai soufflé mes 24 ans sur cette note triste.
Karine et moi venons de quitter Ami. Pendant qu’on était ensemble tous
les trois, Kader m’a envoyé un message pour me demander comment
Ami avait réagi. Je lui ai répondu que je passerais chez lui dans la
soirée. J’ai bien réfléchi et il faut que je lui parle sérieusement. Même si
je ne suis pas d’accord avec Ami, je ne peux plus la laisser souffrir
comme elle le fait.
Karine dort chez moi ce soir et nous sommes dans ma voiture en route
vers Nanterre. Quand nous arrivons, je m’arrête devant l’immeuble et me
tourne vers elle : « Bébé, je crois que je vais aller voir Kader avant de
me coucher. Ça ne te dérange pas de m’attendre ? Je ne serai pas
long»
***
Vingt minutes plus tard, je suis assis avec Kader, chez lui.
Le pauvre… même s’il essaie de paraître serein, ça se voit qu’il a hâte
de savoir ce que j’ai à lui dire. Je ne sais vraiment plus quoi faire de ces
deux-là. S’aimer autant et se faire autant de mal… Je ne les comprends
pas.
Je lui dis : « Kad, je pensais qu’on était sur la bonne voie avec Ami, mais
là, honnêtement, je ne le crois plus. »
Moi : Je veux dire que ça ne marche pas… Elle est toujours aussi
furieuse, et toujours malheureuse. Et ça fait déjà plus de trois mois que
ça dure... Elle a craqué aujourd’hui. Elle ne va vraiment pas bien. Tiens.
Kader : Quoi ?!
Kader :…
Moi : Kader, c’est la plus belle preuve d’amour que tu peux lui donner. La
laisser vivre. Accepter de faire ce que tu te sens incapable de faire. Pour
elle…
Refléchis-y
[Ne vous privez pas pour aimer et commenter please. J'ai besoin de
réconfort ce soir émoticône frown
Love ♥]
[Hello!!
© Partie 22 : La paix
***
J’appelle Marc.
Marc : Bonjour. Tu n’es pas encore bien réveillée toi… Ne me dis pas
que tu ne viens plus avec nous.
Moi : Je suis désolée Marc. Je n’ai pas dormi cette nuit. Je suis
incapable de rester debout toute la journée à Disneyland.
Moi : Merci.
Moi : … Ok.
Allongé sur mon lit, je fixe le plafond de ma chambre comme si toutes les
réponses aux questions que je suis en train de me poser y sont inscrites.
J’ai pris hier une décision avec Ami, qui peut être très lourde de
conséquences : sortir complètement de sa vie. Je ne suis toujours pas
convaincu que cette décision puisse jouer en ma faveur, que ça puisse
l’amener à me pardonner un jour… Mais si ça peut au moins la rendre
heureuse, j’ai bien fait de l’avoir prise.
Mais je ne sais pas comment, moi Kader, je vais pouvoir vivre avec ça.
Comment je vais gérer mon quotidien ?
Il faut que je trouve le moyen de supporter de vivre plusieurs mois sans
Ami. Même si je ne la voyais plus, je gardais une sorte de contact avec
elle avec les messages et les cadeaux que je lui envoyais. Je n’avais
pas de retour, mais je savais que j’étais au moins dans sa vie à elle.
C’était déjà ça.
Moi : A ton avis… Mais c’est pour ça que je t’appelle. J’ai décidé de tout
arrêter. Tout ce que je faisais pour la reconquérir.
S : Ah bon ? Et pourquoi ?
Moi : Son ami, Badou, est venu me parler après l’avoir quittée hier. Il m’a
ouvert les yeux sur le fait que je lui faisais plus de mal que de bien.
S : Je vois. Mais je suis quand même fière de toi. Cette décision prouve
que tu es en train de changer.
Moi :…
S : Et ça va aller toi ?
Tout le monde peut croire que c’est fini entre Ami et moi, mais moi je
suis convaincu du contraire. Il n’y a que nous deux qui savons
réellement ce qu’on a vécu ensemble, ce qu’on a ressenti quand on était
seuls, à quel point nos sentiments étaient forts.
Il est 18h30 et je suis prête avant l’arrivée de Marc. Il m’a appelée il y’a
quelques minutes pour dire qu’ils quittaient Marne-la-Vallée. J’étais déjà
réveillée heureusement. J’ai pratiquement dormi toute la journée. Je n’ai
même pas mangé… J’avais plus besoin de récupérer.
Ensuite j’ai appelé maman et papa, surtout pour leur confirmer que je
passerai la fête du ramadan avec eux. En effet dans un mois à peu près
c’est le début du ramadan et ils ont insisté pour que je les rejoigne à
Saint-Louis pour le finir avec eux.
Papa veut absolument faire des prières pour moi pour mon premier vrai
travail.
Mais il fallait que je négocie d’abord avec mon boss. J’avais droit à une
semaine de vacances pour mon stage, dont je n’ai jamais profité, plus
quelques RTT (jours de repos) et congés anticipés que je pourrai
prendre. Au total, je vais pouvoir passer deux semaines pleines au
Sénégal. J’ai hâte de revoir ma famille.
Moi : Merci.
Marc : Viens.
On rejoint sa voiture garée à quelques mètres. Le fameux Gabin est
assis derrière sur son siège auto et nous observe, l’œil interrogateur. Il
ressemble trait pour trait à son père, en dehors de ses cheveux qui sont
blonds.
Moi : On va où ?
Marc : 15ème.
***
Des minutes plus tard, on arrive devant un très grand immeuble. Après
s’être garés dans le parking souterrain, nous montons dans l’ascenseur.
J’essaie tant bien que mal de faire la conversation avec Gabin, mais
pour le moment je n’ai aucune réponse de sa part.
Son père me dit qu’il est simplement fatigué.
Il rit.
Gabin :…
Gabin : Oui.
Je me tourne pour faire un clin d’œil à son père qui, amusé, a suivi toute
la scène.
Gabin se tourne vers moi, l’air douteux : « Tu es sûre que tu sais jouer ?
»
***
Marc : Désolée, les noix étaient surgelées. Je n’ai pas eu le temps d’en
prendre des fraiches.
Il s’approche de moi et pose ses mains sur mes épaules. Je recule pour
m’éloigner de ce contact.
Moi :…
Marc : Je ne vais rien te faire dont tu n’as pas envie. Je veux juste qu’on
passe une bonne soirée. Reste pour boire un verre stp. Détends-toi. Et
quand tu en as assez, je te raccompagne chez toi, d’accord ? Tu me fais
confiance non ?
Moi :…
Moi :…
Marc : Je vois. Je ne sais pas ce qu’il t’a fait mais ça t’a traumatisée…
Viens.
Oui, on est bien. En fin de mois de juillet, l’air est tiède et agréable et la
vue sur la Seine magnifique. J’arrive même à distinguer au loin la tour
Eiffel.
Je ferme les yeux une seconde et les rouvre. Je me sens en paix.
Marc me sert un verre de cocktail et on se met à discuter de choses
banales.
Quand il voit que je me suis calmée, il me dit : « Aminata, je suis ton ami.
Mais je veux être plus que ça, tu le sais. »
Moi : Marc…
Sans me laisser finir, il approche son visage et pose ses lèvres sur les
miennes. Je ferme les yeux, essayant de me trouver du courage pour
répondre à son baiser.
Mais il s’éloigne déjà.
Juste ça.
Juste une légère pression qui a duré à peine trois secondes. Il me fixe
de son regard et je comprends alors qu’il a fait ça pour me rassurer. Il
s’éloigne ensuite et se rassoit.
[Mon petit doigt me dit qu'il y'en a qui sont fachés contre moi, à cet
instant même.
[Bonsoir!!
Sans me laisser finir, il approche son visage et pose ses lèvres sur les
miennes. Je ferme les yeux, essayant de me trouver du courage pour
répondre à son baiser.
Mais il s’éloigne déjà.
Juste ça.
Juste une légère pression qui a duré à peine trois secondes. Il me fixe
de son regard et je comprends alors qu’il a fait ça pour me rassurer. Il
s’éloigne ensuite et se rassoit.
***
Le lendemain, c’est vers 11h seulement que je réussis à ouvrir les yeux.
Encore une fois j’ai dormi tard. Mais cette fois, ce n’était pas à cause
d’une insomnie. C’était parce que je me suis vraiment couchée tard. Je
suis rentrée chez moi à presque 3h du matin.
Marc et moi sommes restés très longtemps sur la terrasse, la main dans
la main. Nous avons beaucoup discuté mais nous profitions aussi du
silence quelquefois. Cette terrasse avait quelque chose de magique.
Marc n’a rien retenté vers moi tout le reste de la soirée. Il était juste assis
sur le fauteuil à côté de moi et tenait ma main en la caressant
doucement de son pouce. Ce simple geste avait des vertus calmantes.
J’étais détendue et je me sentais vraiment bien.
Marc m’a parlé un peu plus de lui. Avant hier, je ne savais pas grand-
chose de son passé. Il m’a raconté qu’il s’est séparé de la maman de
Gabin deux ans plus tôt après une relation de 5 ans, pour cause d’«
incompatibilité ». Ils s’étaient connus quand il travaillait en Belgique et
ont vécu ensemble plusieurs années. Quand ils se sont séparés, elle est
rentrée en France et lui a préféré venir y vivre pour être plus proche de
son fils. Depuis, il n’a connu aucune vraie relation, juste des histoires
sans lendemain.
J’ai voulu à mon tour lui parler de Kader, mais cette histoire est encore
trop fraîche. Je ne lui ai donc rien dit de plus qu’il ne sache déjà.
Heureusement, il ne m’a pas posé de questions là-dessus.
J’entends des bruits sourds puis Karine à nouveau : « Voilà, là c’est bon.
»
Moi : Je ne comprends pas, en plus. Qui te dit que j’ai passé la soirée
avec Marc ?
K : Ami, tu m’énerves.
K : Non ! Tu rigoles ? Marc lui aussi, il n’avait qu’à lui dire d’aller se
coucher. Ces toubabs ne savent pas éduquer leurs enfants quoi.
Moi : Ce n’était rien de plus qu’un bisou en fait. Mais ça m’a fait
énormément de bien. Il n’a même pas cherché à aller plus loin alors qu’il
en avait l’opportunité.
K : Tu ne le veux pas ?
Moi : Je ne sais pas… Peut-être... Je suis bien quand je suis avec lui. Il
ne me presse pas, il est tout le temps attentionné…
Moi : Fermer les yeux, ça non. Plus jamais. Mais j’ai envie d’essayer.
Moi : C’est tentant… Mais j’avais prévu de parler avec mes parents sur
Skype.
Marc : Ah oui, c’est vrai. Tu sais quoi, profite d’eux. Je suppose que ce
n’est pas tous les jours que tu leur parles. On a tous les jours pour se
voir, toi et moi.
Moi : Ok.
Je me rappelle qu’un jour du mois d’août, il n’y avait plus de place dans
aucune voiture parce que papa avait obligé tout le monde à aller au
verger avec lui pour la cueillette annuelle des noix de coco.
Avec deux de mes copines, on avait pris une natte qu’on avait étendue à
l’arrière du camion pick-up qui devait ramener les cocos. C’est comme
ça qu’on s’est toutes les trois étendues dessus et avons fait le trajet d’à
peu près vingt minutes faisant face au ciel, le vent nous fouettant les
joues. On aurait dit des moutons qu’on ramène du marché. Ça nous
avait fait bien rigoler. [Clin d’œil à elles qui me lisent. Love you ♥]
Ces instants sont sans aucun doute les meilleurs de mon enfance.
Je m’allonge sur mon lit, repensant à nos échanges, mais mes pensées
dérivent vite vers d’autres que je n’ai pas envie d’avoir. J’ai pris la ferme
décision de lutter contre moi-même et d’intervenir immédiatement quand
je commence à être triste. Je veux me battre contre cette douleur qui
m’envahit dès que je me retrouve seule, et qui est même oppressant
quelquefois.
Avant, je ne savais pas trop quoi faire dans ces moments-là, sinon
attendre que ça aille mieux le lendemain. Aujourd’hui, je sais quoi faire.
Je prends mon téléphone et j’appelle Marc.
Il décroche : « Princesse ? »
Moi :…
Moi : Oui c’était bien. Ils me manquent tellement tu sais. Toute la famille
me manque en fait. Des fois, je me dis que ce serait mieux que je
retourne travailler là-bas tout simplement. Il y’a quelques bonnes
opportunités tu sais. Par exemple…
Marc : Attends, attends. Ne t’emballe pas, voyons voir toutes les bonnes
raisons pour lesquelles tu devrais rester ici d’abord.
Quand il a quitté la Belgique deux ans plus tôt pour venir en France, ces
deux-là lui en ont beaucoup voulu mais Marc estimait qu’il pouvait gérer
correctement ses affaires depuis la France qui, après tout n’était qu’à
deux heures de vol. Après pas mal de discussions, les choses avaient
apparemment dérapées et Marc avait tout bonnement quitté l’entreprise
pour en finir net. Il en a profité pour recommencer une nouvelle vie ici et
se libérer du joug familial. Finalement il dit préférer sa vie actuelle, qui
est plus simple, même si sa mère lui manque un peu.
***
Le jeudi, pendant une pause-café rien que tous les deux, Marc me
demande soudainement, comme s’il venait d’avoir une idée : « Tu
prévois quoi ce week-end? »
Moi : Ok.
De toute façon, je n’ai rien à prévoir. Je n’ai pas une tonne d’amis et les
deux qui me sont proches sont collés l’un à l’autre tous les week-ends.
Et je suis sûre qu’ils préfèrent que je sois loin d’eux.
Je me retourne, surprise. Je lui indique des yeux que les autres peuvent
nous voir. Il me fait signe de sortir et sort lui-même de la salle.
Intriguée, je le suis et on ferme la porte de la salle derrière nous pour se
mettre dans la salle de café à côté.
Marc : On va quitter plus tôt aujourd’hui, ok ? J’ai une surprise pour toi.
Malheureusement, ça ne peut pas attendre.
Moi : Marc, je n’ai pas prévenu Bernard que je partirais plus tôt.
Moi : Mais c’est quoi cette surprise ? Ça ne peut pas attendre 17h ?
Moi :…
Marc : …Il est loin d’être bête. Donc c’est possible… Mais c’est surtout
quelqu’un de bien, Bernard. Je le connaissais déjà avant de venir ici. S’il
sait quelque chose, je suis sûr qu’il le gardera pour lui. Au pire, je lui
parlerai.
***
Des minutes plus tard, Marc et moi sommes dans la voiture qui roule à
pleine vitesse. Il n’a voulu répondre à aucune de mes questions sur
notre destination et maintenant il veut me tuer. Si je dois mourir dans
cette voiture, autant que je sache au moins pourquoi je suis dedans !
En disant ça, sa main droite lâche le volant pour venir prendre la mienne.
Ce geste me calme un peu.
Je demande donc, plus détendue mais toujours curieuse : « Mais c’est
quoi cette surprise ? »
Je le regarde : « L’aéroport ? »
Il sourit.
Marc : Calme toi, princesse. Stp. J’ai déjà pris les billets. J’ai réservé hier
soir. Je voulais te faire la surprise, c’est pour ça que je ne t’ai rien
demandé.
Marc : Aminata, si tu n’as pas ton passeport, ce n’est pas grave. Je sais
que tu as toujours une pièce d’identité sur toi, ça suffira pour notre
destination.
Moi : Marc ! Je n’ai pas mon passeport, pas de valise, mes vêtements,
rien du tout !! Je n’ai rien !
Pendant que je lui crie dessus, on pénètre dans l’enceinte de l’aéroport
et Marc va se garer au parking.
Là, je suis vraiment énervée ! Comment il peut décider comme ça de
tout mon week-end ? Qu’est-ce qu’ils ont ces hommes à vouloir décider
de MA vie ? Je suis une adulte mer** ! Je peux prendre mes propres
décisions. C’est décidé, je ne vais nulle part.
Dès qu’il arrête le moteur, je me tourne vers lui et lui dis : « Je ne pars
pas Marc. Je rentre chez moi. »
Moi : On va ou ?
Marc, le sourire lui revenant : Au Maroc. Agadir. Tu verras, tu ne vas pas
le regretter.
Marc : Aminata, c’est un cadeau. Disons que c’est pour fêter ton
embauche, ok ?
Moi :…
Heureusement qu’il ne m’a pas dit oui ! J’aurais été un peu dans la
mer**.
On passe rapidement le contrôle. Si seulement je pouvais voyager à
chaque fois sans bagages !
Dans la salle d’embarquement, j’envoie un message à Karine : « Je pars
en week-end au Maroc. Je suis à l’aéroport. A dimanche. Bisou. PS : Ne
dis rien à Badou stp. »
***
Comme s’il entendait mes pensées, Marc me sert un peu plus la main.
Je tourne la tête vers lui et le voit me sourire pour me rassurer. Ce qui
me redonne confiance.
On passe assez rapidement les contrôles de l’aéroport et sortons pour
prendre l’un des typiques taxis blancs garés devant.
Je le suis et on arrive dans une petite boutique où toutes les tenue sont
d’inspiration orientale tout en restant modernes. Je prends une grande
tunique longue, trois combinaisons tunique-short, un maillot de bain, un
chapeau et des sandales. Marc se prend aussi quelques vêtements
basiques et des sandales. Nous prenons tous les deux le nécessaire
pour l’hygiène, qu’ils ont, heureusement, dans cette boutique : sous-
vêtements, déodorant.
Je sens déjà que je vais passer un bon week-end. J’avoue qu’à cet
instant, tous mes soucis ont disparu. J’ai juste envie de m’étendre et de
profiter de l’environnement.
Moi : Tu vas où ?
Moi : Non. Marc m’a fait la surprise. Je n’avais aucune idée d’où j’allais
avant d’être proche de l’aéroport.
***
Plus tard, Marc et nous sommes un peu promenés dans l’hôtel avant de
décider d’aller dîner. Décidément ils ont tout vu en grand ici. Les
couloirs, le patio, la piscine, les chambres… L’hôtel possède plusieurs
restaurants mais Marc, connaissant mes goûts, m’a proposé celui des
fruits de mer, avec vue sur la plage.
Moi :…
Moi : J’apprends…
Moi : Oui.
Moi : Marc…
Marc : Regarde-moi.
[Et voilà mes chères! Je vous ai déjà dit d'aimer et de commenter? Non?
Jamais?
Eh bien aimez alors, commentez, et partagez la page avec vos amis qui
aiment lire! ça fait plaisir de savoir que ses efforts sont appréciés, n'est-
ce pas mes chers sous-marins émoticône wink
[La suite est là mes chers! J'espère que vous aimerez. Bonne lecture! ]
© Partie 23 : La rencontre
***
Je suis réveillée ce matin par des coups frappés à la porte. J’ouvre les
yeux, encore dans le brouillard me demandant où je suis. Un coup d’œil
autour de moi me remet très vite les idées en place. Moi, Aminata Fall, je
viens de me réveiller dans un hôtel, dans un autre pays, où je me trouve
avec un homme que je connais depuis quelques mois et qui n’est pas
mon mari. Je crois que j’ai définitivement perdu la tête. Qu’est-ce que je
fais ici ?
Marc continue de frapper à la porte.
Moi : Oui.
Il entre, hésitant.
Marc : Ça va ?
Je le regarde. Lui aussi, comment il peut être aussi beau et aussi frais le
matin comme ça ? Ce devrait être interdit. Je suis sûre que je ne
ressemble à rien moi, à cet instant, surtout avec mon tissage qui doit
être dans tous les sens.
Moi : Non, c’est moi qui suis désolé. Je ne voulais pas te réveiller…
Moi : 10h. Il ne nous reste pas assez de temps pour prendre le petit-
déjeuner tranquillement au restaurant de l’hôtel. Ça te va si je nous
commande quelque chose ? On mangera sur la terrasse.
Ami : Ok. Je dois juste prendre une douche et faire mes prières avant. Je
ne les ai pas faites hier soir.
Mais quand j’ai rencontré Aminata, j’ai vite compris que ce serait
différent. Déjà elle n’a rien à voir avec le type de filles que j’ai connues
jusque-là. Ce n’est pas lié à ses origines, c’est autre chose… Au début
son comportement m’a intrigué. Sans même me connaître, elle a érigé
une barrière invisible entre nous. Une pancarte qui me disait « Bas les
pattes, je ne suis pas pour toi. »
Le problème c’est que j’étais déjà séduit. Dès notre première rencontre,
quand elle a sursauté au son de ma voix, j’ai été attiré par elle. Je ne
sais pas encore l’expliquer mais elle m’a donné envie de la prendre sous
mon aile, de la protéger. Mais plus j’essayais d’attirer son attention, plus
elle avait l’air de m’en vouloir. Heureusement qu’elle m’a finalement
parlé ouvertement, ce qui m’a donné l’occasion de lui exprimer
clairement mes sentiments. Au final, j’ai réussi à me rapprocher d’elle en
tant qu’ami.
J’ai voulu lui enlever un peu de ce poids qu’elle semblait porter toute
seule, et elle me donne enfin l’occasion de le faire comme je le souhaite,
c’est-à-dire en étant plus que son ami.
Je sais qu’elle souffre encore, je sais qu’elle n’a pas oublié cet homme
qui l’a fait souffrir, mais au moins elle le veut. Et moi je veux l’aider à y
arriver, tant qu’elle m’en donne la chance.
Elle s’assoit, souriante, en face de moi : « Je n’ai pas été trop longue ? »
Moi : Et bien, je te propose qu’on sorte dès qu’on finit de manger pour
faire un tour en centre-ville. Tu découvriras le vrai Agadir, pas seulement
celui des hôtels. Peut-être aussi que tu trouveras des choses qui te
plaisent, à ramener ?
Elle me regarde puis dit : « Il est… aussi ami avec mon ex. On s’est un
peu éloignés, c’est pour ça que je ne t’ai jamais parlé de lui. »
Elle me regarde l’air étonnée comme si ce que je viens de dire n’est pas
ce qu’il y’a de plus normal. Malgré tout son caractère, j’ai l’impression
qu’elle se sent obligée de me justifier tous ses gestes depuis qu’on est
ensemble. Je me demande si c’est cet homme qui l’a habitué à se
comporter de la sorte ou si c’est juste sa personnalité. Je penche pour la
première supposition. Dans les deux cas, je n’aime pas ça.
Ami, en croquant avec appétit dans sa brique aux œufs : Bonne idée.
Moi : Ensuite, je te propose qu’on revienne ici pour s’offrir deux heures
de détente au spa. Qu’est-ce que tu en dis ?
***
J’entends Ami et j’ouvre les yeux pour la voir debout en face de moi,
emmitouflée dans un peignoir. Elle commence à en défaire la ceinture et
je n’arrive plus à détacher mon regard d’elle. Elle laisse glisser le
peignoir de ses épaules et… God!
Moi : Je me sens fatigué tout d’un coup… Il vaut mieux qu’on aille se
coucher.
Elle me regarde, l’air surprise : « Qu’est-ce qui se passe Marc… J’ai fait
quelque chose ? »
Je lui dis, d’un ton plus sec que je ne le voudrais : « Aminata ! Tu ne sais
vraiment pas de quoi je parle ? »
Elle me regarde l’air surprise, avant d’ouvrir plus grands ses yeux.
Moi : Oh ! Ok je vois…
***
Moi : Mais je vais voir ma famille, c’est normal que je sois contente. Et
puis franchement, je reviens dans deux semaines seulement.
Moi : Toi aussi tu vas me manquer. Mais tu vas voir Gabin ce week-end.
Moi, en souriant : C’est bon. Je ne jeûne pas aujourd’hui. Mais il y’a trop
de sénégalais ici, donc pas sur la bouche ok ?
Moi : Merci.
Je lui fais un clin d’œil et me tourne pour saisir le manche de mon trolley.
Je commence à partir pour embarquer quand j’entends Marc : « Aminata
?»
***
Sans surprise, tous les deux me collent aux fesses pour savoir si j’ai
ramené des cadeaux pendant que leur papa les rappelle, sans succès, à
l’ordre. Mais moi j’adore ça, je vais bien les faire mariner, ils vont voir.
On ne tarde pas à dîner ensuite, puis à discuter de tout et de rien. Avec
tout ça j’ai oublié de prévenir Marc et Karine alors que je suis arrivée
depuis plus de trois heures maintenant. Je finis par le faire juste avant de
dormir et après avoir enfin donné leurs cadeaux à mes neveux. J’envoie
juste un message à Karine et appelle Marc. Comme d’habitude, Oumou
m’a déjà acheté une puce pour mon téléphone.
***
Elle s’avance vers moi, toute souriante et les bras tendus : « Ma chérie !
Je te rencontre enfin. Comment tu vas ?»
Elle entoure mon épaule de son bras avant de dire : « Tu es aussi belle
que sur les photos. Je suis vraiment contente de te voir. »
Elle me prend par la main et on entre dans le salon. Je vois de dos une
dame assise dans un des fauteuils. Elle se retourne pour nous regarder
et… oh mon Dieu ! C’est le portrait craché de Kader, mais en femme !
Elle ne peut être que sa maman.
Je suis figée pendant deux secondes ne réalisant pas encore ce qui se
passe, mais réussis heureusement à me remettre rapidement en
affichant un sourire sur mon visage.
Whaaaaat ?!!
Les sous-marins, un petit effort? (dire que j'ai été longtemps sous-marin!
Maintenant que je suis chroniqueuse je sais ce qu'elles ressentent. 2000
personnes lisent, presque 800 qui aiment la page et seulement 200 like
pour les parties. Qu'est-ce que je dois comprendre?? ]
[Suuurpriiiiise!! Pour fêter le 1000, une partie ce soir, une demain et une
samedi!
Enjoy! ♥]
© Partie 24 : L’amour
J’enlève mes chaussures avec des gestes que moi-même je sais
maladroits, avant de me diriger vers la maman de Soukeyna pendant
qu’elle se lève pour m’accueillir.
Whaaaaat ?!!
***
Maman Dieynaba (c’est son prénom) : Kader m’a beaucoup parlé de toi.
Assieds-toi, ma fille.
Je lui réponds, n’osant même pas croiser son regard : « Euh… non tata.
»
Soukeyna : « Maman, tu vas faire peur à Ami. Tu ne vois pas qu’elle est
timide. »
Euh, ce n’est pas vraiment le genre d’aide que j’espérais. Mais pourquoi
elle ne lui dit pas que Kader et moi ne sommes plus ensemble ?
MD : Oui, je vois ça. Mais je suis sa maman. Il n’y a pas de mal. N’est-ce
pas ma fille ?
Moi : Non…maman.
Voilà que je m’y mets aussi. Mais quel choix j’ai ? Je vais lui dire quoi
exactement : « Désolée tata, mais votre fils m’a violée me prenant pour
une pu**. Donc j’ai préféré rompre avec lui. Vous ne m’en voulez pas
trop ? »
Hum, je doute très fort que ça le fasse.
Voilà ce que je vais faire… je vais continuer de sourire comme une
idiote, je joue le jeu et dès que je sors d’ici, elle ne me reverra plus
jamais.
Donc c’est arrivé là-bas ! La maman de Kader connait mon père, alors
que Kader ne m’a jamais dit avoir parlé de moi à sa mère.
MD : Pourquoi tu ne lui as pas dit ? Ça lui fera plaisir de savoir qu’on est
ensemble.
MD : Oui je vais bien mon fils. Ta femme est juste assise à côté de moi.
Elle est toute belle là, dommage que tu ne la voies pas.
Non ! Elle n’est pas en train de parler avec Kader quand même !
Kader :…
Kader :…
Moi :…
Kader : Stp, dis quelque chose. Juste pour qu’elle ne se doute de rien…
Elle est contente de te voir… Je ne veux pas la décevoir stp.
Moi : Ok.
Elle me sourit, faisant mine d’être triste : « Tu ne m’en veux pas trop ? »
Moi :…
C’est vrai qu’on était déjà certains que maman accueillerait bien Ami. Je
lui avais déjà parlé d’elle depuis longtemps, depuis que j’ai voulu
l’épouser en fait. Elle en était plus qu’heureuse. Je pense que dans un
coin de sa tête, elle craignait que je finisse par épouser une française. La
connaissant, ça l’aurait tuée. Dès que je lui ai parlé de Ami, elle a
commencé ses enquêtes là qu’elles ont l’habitude de faire, pour
connaître sa famille. Depuis, elle me demande toujours de ses
nouvelles, même après notre rupture. Bien sûr, je ne lui ai jamais dit
qu’on a rompu. Normal, je n’ai jamais renoncé à Ami.
Moi : Arrête ça… Mais qu’est-ce qu’elle m’a fait la mère là ? Pourquoi tu
l’as laissée m’appeler ?
Elle rit avant de reprendre : « Et puis, elle n’est pas au courant de tout
non plus. On ne peut pas lui en vouloir. »
Moi : Raconte.
S : Il n’y a rien à raconter à part que Ami est très belle. Comme prévu,
maman l’a adorée. Puis elle est très polie. Elle parlait à peine mais j’ai eu
l’impression que c’était surtout parce qu’elle ne s’attendait pas au comité
d’accueil qu’on lui a réservé… Kader, tu aurais dû te retenir ! La fille là
est bien.
S : C’est le cas hein ? Désolée bébé, mais elle me l’a dit elle-même. Et
elle dit que ça se passe bien entre eux.
Moi : Mais elle ne peut pas l’épouser. Je pense savoir qui c’est, c’est un
blanc et ça m’étonnerait qu’il soit musulman.
S : Moi, je ne sais pas hein. Que peux-tu faire de toute façon, tu pars aux
Etats-unis dans trois semaines…non ?
S : Je ne sais pas quoi te dire Kader. Il ne reste plus qu’à espérer qu’elle
repense à mes conseils.
Badou : Allô
Moi : Ça pourrait aller mieux. J’ai reçu des mauvaises nouvelles là.
Moi : Je vois…
Badou : On s’y attendait un peu non ? Je pense que ce n’est pas plus
mal. En s’éloignant elle verra qu’elle t’aime toujours.
Moi : Je ne sais pas man… Je ne le sens plus là. Il s’appelle Marc n’est-
ce pas ?
Badou : Quand même Kader, ça ne fait que très peu de temps que tu as
décidé de la laisser souffler. On parlait de mois, là... Tu ne devais pas
partir d’ailleurs ?
Badou : Pars et oublie tout ça. Tu verras à ton retour. Ami ne va pas
disparaître entre temps.
***
Ça y’est, on entre à Saint-Louis. Même les yeux fermés, je m’en serais
douté. J’ai un peu descendu la vitre du taxi et l’air plus frais qui pénètre
dans mes narines ne laisse aucun doute. C’est toujours comme ça
quand j’entre à Saint-Louis, l’air change. Cette ville est bénie.
Quelques minutes après, le taxi se gare enfin devant chez moi. Je vois
Awa, une des deux domestiques de maman, assise sur le banc devant la
maison. La voir là me fait rire. Elle n’a pas changé, elle s’assoit toujours
dehors quand elle n’a rien à faire, qu’il pleuve ou qu’il vente.
Dès qu’elle me voit, elle se lève en souriant de toutes ses dents et
s’approche du taxi. J’en sors pour l’embrasser. Elle me fait des signes
que je ne comprends toujours pas même après avoir vécu des années
avec elle. Awa est muette de naissance et il n’y a que maman, sa grande
amie/ennemie devant l’éternel, qui est capable de la comprendre. Il faut
voir quand elles se disputent, c’est un vrai spectacle pour lequel je
paierais, rien que pour y assister.
Elle finit par rentrer dans la maison pour demander de l’aide pendant que
le chauffeur m’aide à sortir les valises du coffre. Quelques secondes plus
tard, deux cousins en sortent et viennent nous aider.
[J'espère que vous avez aimé. Moi j'ai adoré l'écrire. Hommage à nos
mamans. Qu'elles soient présentes ou absentes, leur valeur est
incomparable.
Love émoticône heart émoticône heart ♥]
[Coucou!
***
Ça y est ! Je suis enfin chez moi. Mes bagages sont montés dans une
chambre d’ami. C’est là que je vais m’installer, ne pouvant plus
prétendre à mon ancienne chambre, qui est déjà occupée. Notre maison
est un vrai temple. Entre les vacanciers, les invités de passage, les
cousins lointains venus du village pour leur études, il y’a toujours du
monde. Je ne sais vraiment pas comment papa fait. C’est simple, avec
lui, tu n’as même pas besoin de prévenir, tu viens juste t’installer et dire
au revoir quand tu veux repartir.
Mais celle que je plains le plus dans tout ça, c’est maman. La pauvre,
c’est elle qui se retrouve à devoir s’occuper de tout ce monde.
Heureusement qu’elle ne travaille pas. Le gros point positif maintenant,
c’est qu’elle n’a jamais le temps de se sentir seule, ce qui est bien vu
que presque tous ses enfants sont partis de la maison.
Quelques minutes plus tard, nous nous sommes retrouvés tous les cinq,
avec Khady et Mariétou, ma petite nièce, dans le salon. Discutant de
mon voyage et d’autres choses, nous étions confortablement installés
dans l’aura créé par le bonheur des retrouvailles. Ensuite, nous avons
coupé le jeûne avec toute la maisonnée. Je ne les ai finalement quittés
que pour prendre une bonne douche avant les prières.
A présent, après avoir bien dîné et souhaité bonne nuit à tout le monde,
je suis montée sur la terrasse, me retrouvant seule. Il est 22h passées et
j’ai eu envie de respirer l’air frais venant du fleuve et de l’océan, avant de
me coucher. Les bras croisés sur le rebord du mur et le menton posé
dessus, j’ai l’impression d’avoir à nouveau 15 ans. Je me mettais
exactement dans la même position, au même endroit.
Marc : Hum c’est bien. En tout cas, moi j’ai déjà hâte que tu reviennes.
Moi, en riant : Marc, laisse-moi au moins profiter de ma famille un peu…
Comment va Gabin?
Moi : Si, mais je sens que je ne vais pas arriver à dormir toute seule…
Stp parle-moi jusqu’à ce que je m’endorme. N’importe quoi, juste parle-
moi.
Marc : Hum. Laisse-moi voir… Je t’ai raconté comment j’ai sauvé il y’a
quelques jours un magasin de bijoux de tout un groupe de braqueurs
armés ?
***
Ça fait maintenant deux jours que je suis à Saint-Louis. Hier j’ai passé
toute la journée à la maison, sans sortir. Je voulais profiter de ma famille
même si maman commençait déjà à me harceler avec les nombreuses
tatas et tontons que je suis censée aller rendre visite. Certaines choses
ne changent malheureusement pas… Mais j’ai tenu bon et pour être
tranquille, je l’évitais et allais discuter avec le reste de la famille.
Aissatou : Ami, toi tu ne changes pas quoi ! Pourquoi tu ne m’as pas dit
que tu venais ?
Moi : Mouai, on n’est pas vieilles non plus. Il n’y a pas besoin de se
presser.
A : Donc avec ton copain dont tu étais super amoureuse là, tu ne veux
pas te marier ?
Moi : Je ne suis plus avec lui. C’est fini.
Je ne veux pas lui parler de Kader parce que je serais obligée de lui
expliquer ce qui nous a fait rompre. Et surtout je n’ai aucune envie de
parler de lui.
Moi : Oui.
A : Ok, énerve-toi si tu veux. Mais tu sais très bien que j’ai raison.
Jamais tu ne te marieras avec lui.
Moi : Pff n’importe quoi. De toute façon, je n’ai pas prévu de me marier
un jour.
Moi : Bon. C’est bon, je ne te raconte plus rien. Je rentre chez moi.
Moi : Allô.
Moi : Je ne suis pas à la maison en fait. Je suis sortie rendre visite à une
amie…
Moi : …
MD : Ami ? Tu m’entends ?
J’ai envie de lui crier que non, on n’a pas duré ensemble, non il n’y aura
pas de mariage et non ça ne sert absolument à rien qu’elle appelle ma
mère à part me compliquer la vie. Elle va me demander ensuite qui est
Kader et je ne veux pas lui en parler.
Mais comment je peux dire ça à maman Dieynaba, maintenant, alors
que deux jours plus tôt on lui a fait croire que Kader et moi étions
ensemble ? On s’est même parlé devant elle !
Moi : Bisou.
Je la regarde, dépitée.
A : Ok laisse-moi réfléchir…
Elle tapote son doigt sur ses lèvres l’air de réfléchir avant de reprendre :
« Donc. La mère de ton ex t’appelle. Tu te redresses comme si c’était le
pape. Et tu l’appelles maman ? Reparle-moi de la définition d’ex stp. »
Moi : Arrête. C’est bien mon ex. Mais sa maman pense qu’on est
toujours ensemble et qu’on va même se marier. C’est compliqué… là
elle veut que je lui donne le numéro de ma mère pour qu’elle l’appelle.
Mais je ne vais pas le faire.
Elle m’énerve.
***
Je suis rentrée juste avant l’heure de couper le jeûne. Maman est assise
dans le salon avec les autres. Elle n’a pas d’expression particulière sur
son visage quand elle me voit, mais discrète comme elle est, ça ne
m’étonne pas.
Elle me regarde puis sourit, l’air émue : « Alors, tu n’as pas des choses à
me dire ? »
Moi : Moui.
Moi : Il n’y a rien à dire maman. Maman Dieynaba se trompe. Elle pense
que son fils et moi allons nous marier.
Grrrrr !
Maman : Comment ça se fait qu’elle pense que vous allez vous marier ?
Il veut t’épouser ?
Malgré la situation, j’ai envie de rire. Maman veut croire dur comme fer
que sa fille n’est jamais sortie avec des hommes. Si elle savait…
Moi : C’est vrai que je sortais avec lui et qu’il m’a demandée en mariage.
Mais on a rompu.
Moi : Oui ?
Elle me sourit et prends ma main qu’elle sert entre les siennes : « Hey,
c’est fini. Ton père va très bien. »
Maman : Toi aussi ma fille. N’oublie pas de faire une prière avant de
dormir.
Moi : D’accord maman.
***
Mes deux semaines à Saint-Louis arrivent déjà à leur fin. Même si elles
ne se sont pas vraiment passées comme prévu, j’ai quand même adoré.
Retrouver ma famille, passer du temps avec eux, c’était tout ce que je
voulais. La fête de la « korité » s’est très bien passée. Tout le monde
était à la maison cette fois, même Oumou dont le mari a accepté de
venir chez nos parents pour cette fois. Toute la famille était au complet.
De nouveau j’ai vu mon père et mes frères aller ensemble à la mosquée,
avec, cette fois-ci, les petits derniers de la famille. L’ambiance si
particulière des jours de fête m’avait plus manqué qu’autre chose.
Toutes les femmes de la maison se sont mises aux fourneaux pour
préparer les plats. Maman et papa avaient l’air d’être plus que jamais
heureux de voir tous leurs enfants et leur famille ensemble.
En parlant de papa, le voir tous les jours a fini par me rassurer sur son
état. Il n’a presque pas changé. Il a certes pris de l’âge mais c’est
toujours le même homme solide et qui inspire tellement de respect
autour de lui. Comme avant, il se levait tous les jours à 3h30 du matin
pour prier jusqu’à l’heure d’aller au travail. Comme avant, il se retirait
tous les jours après le déjeuner dans son coin pour lire le Coran. Et
comme avant il ronflait comme un camionneur dans le salon tous les
soirs, alors que chacun se demandait qui allait avoir le courage de le
réveiller, qu’il aille enfin se coucher pour nous permettre de suivre
tranquillement la télé.
Donc voilà, je pars dans quelques minutes et mes bagages sont déjà
prêts. Aissatou est venue passer la journée à la maison pour qu’on se
dise au revoir en même temps que la famille. Le chauffeur de papa est
déjà garé en bas. On va pouvoir y aller. On descend tous ensemble,
maman, papa, Khady, Aissatou, ma petite Mariétou, même Awa et puis
moi.
Arrivés en bas, sur le pas de la porte, mon père m’arrête puis inscrit sur
le sol un mot invisible avec son doigt. Il me demande ensuite de le
franchir avec le pied droit. Comme d’habitude… Je commence à pleurer.
Comme d’habitude…
Je finis par papa et maman. Je prends maman dans mes bras et la serre
très fort en pleurant. Je n’ai pas envie de la lâcher et elle non plus. Mais
on est bien obligées.
Ensuite, je me tourne vers papa qui prend mes deux mains dans les
siennes pour faire une prière. Tout le monde tend ses mains, dans le
même geste. Quand il finit, il garde ma main droite et y inscrit à nouveau
quelque chose. Ensuite il baisse ma main mais la retient toujours sans
rien dire.
***
Je suis arrivée à Paris depuis plus de trois heures maintenant. Marc est
venu me chercher à l’aéroport. Je ne sais pas ce que je ferais sans lui.
Encore attristée par la séparation d’avec ma famille et le retour en
France où il fait déjà si froid, je trouve un énorme réconfort à l’avoir là
avec moi. A l’aéroport, je n’ai pas pu m’empêcher de le serrer fort dans
mes bras, même s’il y’avait beaucoup de sénégalais autour.
Là, chez moi, on s’est commandé une pizza pour dîner. Allongés devant
la télé sur le canapé, je lui raconte mes vacances, du moins ce qu’il ne
sait pas déjà. Il me caresse doucement le bras. On est jeudi et je ne
reprends le boulot que lundi. Mais Marc a posé son vendredi pour qu’on
reste ensemble. Karine et Badou doivent passer demain après le boulot
et on va dîner ensemble tous les quatre.
Badou n’était pas pour que je vienne ici mais je l’ai convaincu qu’il fallait
que je le fasse. Rien qu’une fois avant de partir. Je resterai entre quatre
et six mois aux États-Unis. Ça dépendra des besoins de la mission.
Quatre mois à me poser des questions sur Aminata pendant qu’elle sera
avec un autre homme. C’est juste impossible. J’ai absolument besoin de
me rassurer.
Sous mon insistance, Badou a fini par se renseigner auprès de Karine
pour avoir la date exacte du retour de Ami. Je n’ai pas voulu perdre de
temps et suis venu le jour même de son arrivée. Je pars dans quatre
jours déjà.
Quand la porte commence à s’ouvrir, j’ai peine à croire que mes prières
sont exaucées. Mais je n’ai pas le temps de m’en réjouir car je vois
devant moi…Marc.
*
[A demain pour la suite mes chers! J'espère que vous avez aimé? La
suite sera meilleure.
© Partie 26 : La nouvelle
Quand la porte commence à s’ouvrir, j’ai peine à croire que mes prières
sont exaucées. Mais je n’ai pas le temps de m’en réjouir car je vois
devant moi…Marc.
***
Mais qu’est-ce qu’il fait là à cette heure-ci lui ? Il est presque minuit. Ami
ne dort pas avec lui quand même ? Il pourrait essayer de…
Stop. Je dois m’arrêter. Ami m’a fait confiance et je l’ai trahie. Je suis
mal placé pour juger un autre homme. Il n’y a que de moi dont elle
devrait se méfier. Et surtout je n’ai plus aucun droit sur elle.
Moi : Pardon ?!
Elle se lève et s’approche de quelques pas, les bras croisés. Elle n’a pas
l’air en colère. Elle est trop calme… Ce qui, je ne sais pourquoi, ne me
rassure pas.
Moi : Ami. Je sais que je t’ai fait du mal, et je le regretterai toute ma vie.
Crois-moi. Je le regrette amèrement. Je n’en dors plus. Tous ces mois,
je n’ai pas été en paix, pas une seule fois. T’avoir fait ça est la pire chose
que je pouvais te faire. Tu sais…que je t’aime. Plus que tout. Je ne peux
pas…
Elle me regarde une seconde, l’air surprise, puis elle commence à rire.
Moi :…
Quand j’entre dans ma voiture, je reste assis dedans sans démarrer, les
yeux brouillés par les larmes que je n’ai plus honte de laisser couler.
Pour la première fois de ma vie, je comprends les personnes qui se
suicident.
Je suis encore debout dans le salon quand je vois enfin Ami ouvrir la
porte et entrer. Elle ferme la porte derrière elle mais reste debout devant,
la main toujours posée sur la poignée.
Je penche ma tête vers elle et lui dis : « Non, je ne pars pas. Désolé,
mais je ne peux pas te laisser dans cet état. »
Elle se tourne alors pour me faire face et avant même que j’ai le temps
de la regarder, elle tire ma tête vers elle pour m’embrasser. Je réponds
immédiatement à son baiser, malgré la surprise.
Elle enroule ses bras autour de mon cou, se dresse encore plus sur la
pointe de ses pieds et m’embrasse fougueusement, le souffle coupé.
Nos langues s’entremêlent et elle colle sa poitrine contre le mien. Elle
s’accroche à mon cou comme si elle avait peur de se noyer. Je ne l’ai
jamais vue comme ça et ça me surprend beaucoup. Mais je suis
incapable de résister à la douceur de sa bouche et les formes de son
petit corps que je sens collé contre moi. Je sens ses seins sur mon
torse. Je la tiens par la taille et la tire encore plus vers moi. Elle m’excite
tellement que je sens déjà mon pantalon prêt à craquer.
Ami descend ses bras et glisse ses mains sous mon tee-shirt pour se
mettre à caresser presque rageusement mon torse et mon ventre dans
des mouvements désordonnés. J’ai envie d’enlever le tee-shirt et le jeter
pour profiter encore plus de ses mains. J’ai envie de défaire ma ceinture
et… Un éclair de lucidité me fait me rendre compte qu’elle n’est pas
dans son état normal. Et si elle n’arrête pas tout de suite, je vais lui faire
l’amour là, debout contre le mur. Ami ne mérite pas ça, pas pour sa
première fois.
Je puise dans toutes mes forces pour séparer ma bouche de la sienne et
lui tenir, doucement mais fermement ses poignets. Elle se redresse pour
essayer de m’embrasser encore puis se débat un peu pour libérer ses
poignets. Elle finit par abandonner et baisse la tête. Ça y’est, elle s’est
calmée.
Je lui lâche les poignets et lui remonte doucement le menton pour la
regarder. Mais elle garde les yeux fermés.
Moi : Princesse ?
Moi je n’ai pas envie de dormir. J’ai le cœur lourd. J’ai dans mes bras la
femme que j’aime qui vient de pleurer toutes les larmes de son corps
pour l’amour d’un autre.
Moi : Marc.
Je finis par lui sourire : « Oui je vais très bien maintenant. Alors on
prépare quoi aujourd’hui pour le dîner avec Karine et Badou ? »
***
Karine : Mais Marc, tu ne vas pas me laisser finir la bouteille toute seule
quand même.
Marc rit : « Je ne te conseille pas de la finir… Mais c’est bon pour moi,
merci.
Quelques minutes plus tard, nous nous levons Karine et moi pour
débarrasser la table et laver la vaisselle. Marc s’apprête à se lever pour
nous aider mais Karine lui retient la main.
Karine : Ah non non Marc. Chez nous, c’est les femmes qui font ça. Je
ne sais pas ce que Ami te fait faire d’habitude, mais ce soir tu t’assois et
on s’occupe de tout.
Elle sourit et on va toutes les deux dans la cuisine avec nos assiettes.
Dès qu’on pose celles-ci, elle s’approche de moi en chuchotant : « Dis
donc, Marc il est sérieux hein. Il ne boit pas d’alcool pour toi ? »
K : Mais tu te rends compte que s’il fait ça, c’est qu’il veut que vous alliez
plus loin.
Moi : Je ne sais pas quoi faire. Je veux juste être avec lui tu comprends.
Je suis tellement bien avec lui. Il me rend heureuse.
K : Oui je le vois bien. Mais sois au moins assez honnête pour le voir toi-
même. Si tu n’aimes pas Marc, ne le fais pas attendre et mûrir de faux
espoirs.
Moi : Pourquoi Badou n’est pas venu ? Son excuse de migraine là, il
croit tromper qui ?
Karine hésite avant de répondre : « Il n’est pas venu parce qu’il a préféré
aller chez Kader. Ils se sont parlé au téléphone tout à l’heure. Je ne sais
pas ce qu’ils se sont dits mais en tout cas il lui a promis de passer dans
la soirée. Je me suis un peu disputée avec lui à ce propos d’ailleurs. Ça
ne se fait pas d’annuler une invitation comme ça pour une autre. »
Je sais pourquoi Badou est allé voir Kader. Mais à cet instant, il y’a une
autre chose qui m’alarme dans la voix de Karine.
K : Yep.
Moi : Tu es sûre ?
K : C’est bon Ami. Arrête de toujours voir le mal partout quand il s’agit de
Badou. Ça me soûle.
***
Trois mois sont passés depuis que je suis rentrée du Sénégal. La vie a
repris son cours normal et je me sens à nouveau comme avant mon
départ en vacances, c’est-à-dire vivant bien ma relation avec Marc et
oubliant toutes les autres mauvaises ondes.
Moi : Tu la trompes ?
B : T’es sérieuse là ? Qu’est-ce qui te fait penser ça ? Bien sûr que non,
enfin. Pourquoi je voudrais la tromper.
Moi : Parce que c’est ce que tu fais. Et là je vois bien que tu mens.
Moi : Badou, Karine n’est pas comme les autres. C’est notre amie avant
tout. Tu disais qu’on était les sœurs que tu n’avais pas. Tu te rappelles
de qui est Karine ?
Moi : Parce que je la connais. Elle ne me dit rien mais ça fait des mois
que j’ai remarqué qu’elle n’allait pas bien. Et le fait qu’elle ne me le dise
pas m’a fait penser que c’est justement ce que je craignais depuis le
début, que tu la trompes… Et maintenant, en te parlant, je viens d’en
avoir la confirmation.
Moi : Dans ce cas, sois correcte avec elle. Traite-la comme une femme
qu’on aime. Ne la trompe pas !
J’ai un peu élevé la voix sur ces dernières paroles et Badou me regarde
attentivement.
Moi : On ne parle pas de Kader ici, ni de moi. Fais ce qu’il faut Badou.
Reprends-toi avant qu’il soit trop tard. Il est hors de question que je
continue de regarder Karine souffrir encore longtemps. Si tu ne fais pas
ce qu’il faut pour te rattraper et lui redonner le sourire, je l’extirperai moi-
même de cette relation par tous les moyens et tu ne pourras plus jamais
la récupérer. Je m’en assurerai, crois-moi… Et puis Badou, vous vivez
presque ensemble mer**, qu’est-ce qui te manque ? Quel problème vous
avez avec vos braguettes sérieux !!
Moi : Ne la prends par pour acquise. Ne fais pas cette erreur. Fais-toi
pardonner, oui, mais fais surtout en sorte de ne pas recommencer. Elle
ne te pardonnera pas toujours. Et le jour où elle arrêtera de te pardonner
est le jour où tu l’auras perdue pour de bon.
Il acquiesce, l’air pensif. J’espère qu’il a bien compris cette fois. Mais je
n’ai aucun moyen de le savoir. Avec les hommes, on n’est vraiment sûrs
de rien.
***
Une semaine est passée depuis cet événement. On est lundi et je suis
au boulot en début d’après-midi quand je reçois un appel de Badou. Ça
me surprend parce qu’on ne s’appelle jamais pendant les heures de
travail.
Je sors pour répondre : « Allô. »
Badou : Ecoute, il faut qu’on se retrouve chez toi, tout de suite. C’est une
urgence.
Badou : J’ai compris, mais laisse tomber. Il faut vraiment qu’on se voit
tout de suite. Je suis déjà en route vers chez toi.
Moi : Bernard, j’ai une grosse urgence et il faut que j’aille tout de suite
chez moi. Je suis désolée. Je poserai un RTT après.
Bernard : Mais oui, vas-y tout de suite Aminata. J’espère que ce n’est
rien de grave.
Bernard : Vas-y.
Moi : Moi, je suis en train d’attendre le RER là. Je suis hyper stressée.
Badou vient de m’appeler pour le rejoindre pour une urgence et je ne
sais pas de quoi il s’agit. Mais j’ai un mauvais pressentiment, je ne sais
pas pourquoi.
La voix : Ami ?
Khady prend le téléphone. Elle a une voix terrible quand elle me répond :
« Ami. »
Moi : Oh non !
Je crie en même temps que je glisse du siège avec mes sacs et mon
portable.
[Il m’a été extrêmement difficile d’écrire cette partie, surtout la fin. Mais il
fallait que je le fasse, il me fallait me vider de certaines choses…
Désolée pour tous ceux à qui ça rappelle de mauvais souvenirs… C’est
une partie de mon vécu, comme beaucoup d’autres dans cette même
histoire.
J’ai failli abandonner vers la fin. Mes doigts tremblaient sur le clavier et je
ne voyais plus bien ce que j’écrivais à cause des larmes. Mais je l’ai
finie.
Par contre, pour une fois, je n’ai pas relu. Je ne pouvais pas… Désolée
alors pour les fautes et les formes…
©
Partie 27 : Les cendres
Khady prend le téléphone. Elle a une voix terrible quand elle me répond :
« Ami. »
Moi : Oh non !
Je crie en même temps que je glisse du siège avec mes sacs et mon
portable.
***
Je sens des bras me retenir avant que j’arrive au sol. Je lève la tête
distinguant à peine le visage de la dame en face de moi. Elle ramasse
mes affaires et les pose sur le siège à côté. Gémissant de douleur, je
l’observe elle et les gens autour de moi comme si je regardais un film. Ils
parlent et je sais qu’ils parlent de moi. On me regarde, je voudrais
m’arrêter de pleurer pour qu’ils arrêtent de me regarder, mais la voix de
Khady ne cesse de revenir dans ma tête. Ce n’est pas possible, ce n’est
juste pas possible…
Je ne l’ai même pas laissée continuer. Peut-être que papa est juste très
malade… J’entends une dame dire « Comment on peut annoncer ce
genre de nouvelles comme ça ? » Je me demande si elle parle de moi.
C’est bien vrai alors, j’ai reçu une terrible nouvelle, celle de la mort de
mon père… Je n’ai pas rêvé. Je sens mes larmes couler encore plus.
Je tends les mains vers lui pour reprendre mes affaires et lui dis : «
Merci monsieur. C’est…bon. »
Je relève les genoux et croise mes bras dessus pour y poser ma tête.
Quelques instants plus tard, j’entends la voix de Badou : « Ami. »
Je relève la tête vers lui. Il vient vers moi et me soulève, puis me prend
dans ses bras dans lesquels je sanglote pendant plusieurs minutes.
Quand je me calme enfin, on finit par se diriger tous les deux vers la
sortie de la gare, Badou portant mes affaires et me tenant les épaules.
***
Marc m’a appelée hier et c’est Badou qui a décroché le téléphone, lui
annonçant la nouvelle. Il est alors venu le soir-même chez moi et est
resté avec nous trois. Je ne pleurais plus, je regardais juste dans le vide
et essayais d’écouter leurs discussions. Badou me posant des questions
sur le voyage que j’allais faire, dont il était en train de s’occuper de la
réservation. Marc me rassurant sur les absences que j’allais avoir au
travail et sur le fait qu’il préviendrait Bernard. Il m’a aussi proposé de
partir avec moi mais j’ai refusé. C’était une très mauvaise idée de le faire
rencontrer ma famille, surtout dans ces conditions…
Avec le recul, je me dis que c’est finalement une très bonne chose que
Marc soit apparu dans sa vie. Il l’a aidée à retrouver le sourire après sa
rupture avec Kader et ça se voit qu’il l’aime vraiment. Je n’ai aucun
doute là-dessus depuis que je l’ai rencontré hier. Ça se voyait qu’il était
désespéré de ne pas trouver les mots ou les gestes pour consoler Ami.
Aussi désespéré que Karine et moi. On l’a tous sentie ailleurs et sans se
le dire, je pense qu’on a tous compris qu’on était loin de suffire à calmer
sa peine. Elle ne voulait pas venir vers nous, elle voulait partir ailleurs,
sans doute être avec sa famille. Ce qui était tout à fait normal.
Quant à elle et Marc, je ne les ai jamais vus ensemble avant ces deux
derniers jours, même si Karine m’assure qu’ils sont parfaits l’un pour
l’autre.
Moi-même, je ne peux rien dire des sentiments qui lient Ami à lui. Par
contre, j’ai bien vu comment elle réagit à l’évocation du nom de Kader. A
chaque fois que je lui parlais de lui, j’ai senti son intérêt derrière
l’apparence insouciante qu’elle essayait d’afficher. Elle n’est pas
seulement en colère contre lui. Je suis certain qu’elle l’aime aussi.
Tout ça m’a poussé à essayer de joindre Kader depuis hier soir, même si
je l’aurais fait dans tous les cas. Je n’ai pas son numéro de téléphone
aux Etats-Unis et je ne voulais pas demander hier à Ami de me donner
le numéro de Soukeyna. C’est la seule personne qui pourrait peut-être
avoir les coordonnées de Kader. Malheureusement je ne la connais pas
personnellement.
En dernière tentative, j’ai envoyé hier soir un message sur son numéro
français au cas où il l’utiliserait, même si c’était improbable.
Je n’ai eu aucune nouvelle depuis.
***
Kader :…
Kader, d’un ton plus pressé : Bon merci encore Badou. Je te rappellerai.
Seulement, j’aurais voulu lui parler, l’entendre. Juste une fois, une toute
dernière...
Tard dans la nuit, je suis réveillée par une musique arabe que je connais
très bien pour avoir appris la chanson qui l’accompagne quand j’étais
petite, à l’école coranique. Mon père m’y a mise quand j’avais quatre ans
et c’est la première éducation en-dehors de celle de la maison que j’ai
jamais reçue.
Cet endroit rappelle que rien n’a d’importance dans la vie, sinon d’aimer
et de profiter des personnes qu’on aime, tant qu’on a l’opportunité de le
faire. Aimer c’est aussi prier, c’est vivre le sentiment qui nous rapproche
le plus de Dieu, quelle que soit notre confession d’appartenance.
On arrive à un grand carré entouré d’un petit mur blanc carrelé. Assane
m’explique que c’est papa qui l’avait acheté et fait construire quelques
mois plus tôt… comme s’il préparait sa mort. Il m’explique qu’il avait fait
alors la remarque qu’il y’avait dedans assez de place pour toute la
famille. Ça l’avait fait rire à l’époque...
***
Vers le soir, mes pensées vont vers mes amis que j’ai laissés à Paris et
qui doivent sûrement s’inquiéter de ne pas avoir de mes nouvelles. Je
me rappelle que je n’ai appelé aucun d’entre eux à mon arrivée pour les
rassurer.
Moi : Oui, oui. Je vais bien. Je suis désolée, je n’ai pas pensé à
t’appeler.
Moi : Oui…
Moi : Non Marc. C’est mieux que tu ne viennes pas… C’est compliqué…
En plus tu dois rejoindre ta famille pour le nouvel an, non ?
Moi : D’accord.
Moi : Merci.
Après avoir raccroché, je reste un instant pensive. Est-ce que mon père
aurait aimé savoir que je sors avec Marc ? Je ne le pense pas. C’est
quelqu’un de bien, mais il est trop différent du mari idéal dont rêve
chaque parent sénégalais, les miens y compris. Malgré la peine que je
suis en train de vivre, j’ai un pincement de culpabilité par rapport à lui. Je
me rends compte que je l’ai mis de côté depuis que j’ai reçu la nouvelle
de mon père, alors qu’il était là et ne demandait qu’à me consoler. Les
paroles de Karine me reviennent en tête…
Je finis par sortir de ces pensées et appelle Badou qui, justement, est
avec Karine. Je les rassure sur ma situation et ils me promettent d’être là
à mon retour « avec un gros stock de câlins ». A ces mots, je souris pour
la première fois depuis plus de 2 jours.
Ce soir heureusement, la plupart des gens sont partis plus tôt et presque
seuls les membres de la famille sont réunis dans le grand salon.
Nous dînons puis restons dans le salon à discuter de certaines modalités
pratiques liées au décès de mon père : les comptes, l’héritage... Malick
dirige la conversation. Je laisse les plus grands échanger, la tête ailleurs.
Plus tard, sans qu’on s’en rende compte, le sujet de discussion dévie
vers des anecdotes sur papa, chacun se rappelant d’une discussion ou
d’une scène avec lui. On se retrouve même à rire à en évoquer certains
quelquefois amusants.
On rit, on laisse couler des larmes, puis on rit encore… Et toute la
soirée, on baigne dans une ambiance douce et lourde à la fois, remplie
d’émotion. Un lien invisible et solide nous relie pendant ces instants,
nous tous qui partageons un amour pour une même personne et la
douleur de l’avoir perdue.
A ces souvenirs, mes larmes reviennent de plus belle. Tellement que j’ai
à nouveau l’impression d’étouffer. N’en pouvant plus, je décide de quitter
le cimetière.
Arrivée devant lui, je pose juste ma tête sur son torse et l’enlace. Il hésite
un moment avant de me serrer dans ses bras.
*
[Alors envie de connaître la suite?
Rendez-vous mercredi!
©
Partie 28 : L’incompréhension
Arrivée devant lui, je pose juste ma tête sur son torse et l’enlace. Il hésite
un moment avant de me serrer dans ses bras.
Il est presque 20h et je viens juste d’arriver à Dakar. Mon voyage a été
long et fatigant. J’ai quitté Detroit vers 21h hier et n’ai pas réussi à dormir
plus de quelques minutes dans l’avion.
Quand j’ai raccroché avec Badou hier, ma décision était déjà prise :
partir rejoindre Ami à Saint-Louis. J’ai tout de suite commencé à
chercher un vol sur internet. J’ai pu heureusement en réserver un en
dernière minute, qui partait trois heures plus tard. J’ai juste pris un aller
simple.
Du coup, j’ai dû partir précipitamment, presque sans bagages pour ne
pas le rater. Ce n’est que sur le chemin vers l’aéroport que j’ai prévenu
Soukeyna de mon arrivée. Elle n’était d’ailleurs pas au courant de la
nouvelle du décès.
Moi : Difficilement. En plus, elle est très sensible Ami. Tu ne peux même
pas savoir à quel point… C’est pour ça qu’il fallait que je vienne.
Moi : Je ne sais pas Soukey. Je n’en ai aucune idée. Mais il fallait que je
sois avec elle. Je n’aurais pas été tranquille sinon… Tu connais mes
sentiments pour elle. Tu me comprends ?
Moi : Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée. Vous allez faire
peur à Ami.
Moi : Bon… De toute façon, c’est pareil pour moi. Si ça se trouve, elle ne
voudra même pas me parler.
S : Bien sûr qu’elle va te parler. Ami t’aime quoi qu’il se soit passé. J’en
suis sûre. Je pense qu’elle a besoin de toi.
Moi : C’est ce que pense Badou aussi… Mais honnêtement, je n’en suis
pas aussi sûr que vous. La dernière fois qu’on s’est vus elle a été claire
avec moi. Elle avait vraiment l’air de me haïr tu sais… Mais qu’importe,
je ne pouvais pas ne pas venir. C’est moi qui l’ai fait souffrir au départ, tu
comprends. Et puis là, le décès en plus de tout le reste… Je ne pouvais
pas juste rester loin et l’ignorer. C’est presque un devoir d’être là… Mais
pour ce qu’il est de nous deux ensemble, je n’ai plus aucun espoir.
S : …Tu verras bien assez tôt… En tout cas je suis fière de toi, bébé. Tu
as commis une faute impardonnable mais je sais, moi, que tu regrettes
et que tu ne recommenceras pas. Je prie juste pour que Ami s’en rende
compte aussi…
Et moi je prie juste pour qu’elle accepte mon aide dans ces moments,
quel que soit ce dont elle a besoin.
Elle rit de joie non retenue en répondant : Qu’est-ce que tu veux ? Ton
père s’occupe bien de moi… Tu m’as manqué hé Seydi Hann.
Moi : Oui papa, merci. C’était long mais ça va. Et toi alors, tu as arrêté
de voyager ou quoi ? Depuis quand je ne t’ai pas vu à Paris ?
Papa : Je n’ai plus l’âge. Je laisse ça aux jeunes… De toute façon tu n’y
es plus là. En plus, tu ne donnes plus de tes nouvelles depuis que tu es
aux Etats-Unis.
Je leur réponds, faisant mine d’être indigné : « Donc c’est comme ça que
vous m’accueillez ! Je n’ai plus qu’à reprendre l’avion alors. »
Maman : Oui, vas-y. Les clés sont dans un des pots du salon… J’ai
essayé d’appeler Ami depuis que j’ai reçu la nouvelle tu sais. Mais sans
succès. Pareil pour sa maman.
Moi : Elles ne doivent sûrement pas garder leur téléphone avec elles,
avec les funérailles et tout.
Moi :…
Je l’aime ma mère, mais des fois vraiment elle est fatigante avec ses
questions. Je fouille dans mes bagages faisant mine de ne pas l’avoir
entendue.
En fait ce n’est pas tout à fait vrai. En réservant mon billet d’avion, je n’ai
absolument pas tenu compte de mon travail et surtout ma mission pour
laquelle je ne me suis même pas fait remplacer. C’est seulement
pendant mon escale à Paris que j’ai appelé mon chef qui y était. Je lui ai
juste expliqué que j’avais une urgence à Dakar, sans donner de détails,
et que j’ai dû abandonner le reste de l’équipe. Le moins que je puisse
dire est qu’il n’avait pas l’air ravi. Je risque d’avoir quelques problèmes à
mon retour, mais pour le moment ce n’est pas le plus important.
Maman me pose encore des questions pour lesquelles je lui donne très
peu de réponses, espérant qu’elle finira par se fatiguer.
Excédée, elle finit par me dire : « Arrêtez de vous comporter comme des
gamins Ami et toi. Si vous vous aimez, mariez-vous une bonne fois pour
toutes. Vous avez tous les deux l’âge. Si vous aviez été plus sérieux et
vous étiez mariés il y’a plusieurs mois déjà, vous auriez eu la
bénédiction de son père. J’espère que son décès vous mettra à tous les
deux du plomb dans la tête que vous compreniez que vos disputes-là
n’ont aucune espèce d’importance. »
Je ne réponds pas. Elle a raison mais ce qu’elle ne sait pas, c’est ce que
j’ai fait à Ami pour qu’elle ne veuille plus de moi. Et elle ne sait pas non
plus que j’ai tout fait pour qu’elle revienne dans ma vie et que j’ai dû
finalement abandonner par dépit.
Maman, en soupirant : Ok. Mais vraiment essaie de voir avec elle pour
passer aux choses sérieuses. Je n’aime pas ça du tout…
Moi : Je ne vais pas la forcer maman, enfin. Bien sûr que je veux
l’épouser. Tu crois que je serais ici si ce n’était pas le cas ? Je l’aime !
Maman : Ne t’inquiète pas. J’ai un peu trop insisté mais je veux juste ton
bien.
Moi : Je sais.
Elle finit par sortir et me laisser seul. Je prends mon téléphone, tenté
d’appeler Ami, mais j’ai peur qu’elle me demande de ne pas venir la
voir.
J’appelle alors Badou. Je lui dis que je suis à Dakar et lui demande de
m’expliquer comment faire pour aller chez Ami à Saint-Louis. Malgré sa
surprise, il s’exécute et me donne toutes les informations dont j’ai
besoin.
***
Je suis déjà garé dans la rue de Ami et il n’est que 6h40 du matin.
Finalement, j’ai quitté Dakar vers 4h, n’arrivant pas à fermer l’œil de la
nuit. Oui, j’ai conscience que c’est insensé tout ça… Mais je n’ai pas pu
m’en empêcher.
Moins de dix minutes plus tard, je les vois s’arrêter devant un endroit qui
m’a tout l’air d’un cimetière. Pendant que je m’approche, Ami descend et
entre à l’intérieur.
Elle va forcément voir son papa… Ma pauvre chérie, elle doit
terriblement souffrir, pour y aller si tôt.
Mais à ma grande surprise, ce n’est pas ce qui se passe. Ami vient vers
moi, sans aucune hésitation. Puis elle m’enlace en posant sa tête sur
moi. Mon Dieu, qu’est-ce qui se passe ?
Je la garde dans mes bras un long moment, sans rien dire. J’ai tellement
peur que ça s’arrête.
Quand elle s’arrête de pleurer, le bon sens me rappelle qu’on est dans la
rue devant un cimetière et il y’a de plus en plus de monde qui passe.
Mon Dieu je n’arrive pas à y croire. C’est Ami que je tiens dans mes
bras. Elle est venue toute seule vers moi et maintenant elle est blottie
dans mes bras et je sens son odeur. J’ai juste l’impression d’être dans
un rêve.
Si seulement elle ne souffrait pas autant. Elle a maigri et son corps est
frêle dans mes bras. J’ai envie de lui caresser la tête mais ai peur de
faire un quelconque geste.
On reste là dans cette position, jusqu’à ce que je finisse moi aussi par
m’endormir.
Ce sont les rayons du soleil, de plus en plus forts, qui me réveillent plus
tard. Je me penche pour regarder Ami, elle dort encore. Je réussis à
sortir doucement mon téléphone de ma poche pour regarder l’heure,
9h45. Nous sommes là depuis presque deux heures. On ne peut pas
rester ici, en pleine rue.
Ami a l’air très fatiguée et je n’ai pas le cœur à la réveiller. Je me penche
et l’embrasse doucement sur le front. Mais ça la fait bouger puis ouvrir
les yeux.
Elle me regarde puis baisse rapidement les yeux. Oh non, pas déjà !
Elle semble réfléchir un instant, en jouant avec ses doigts les mains
jointes. Ne me regardant toujours pas, elle baisse la tête pour répondre :
« Non. »
Non ? Je ne comprends pas, elle veut rester ici ? Il faut qu’elle dorme au
moins. Je pourrai l’attendre quelque part. Je suis sûr maintenant que je
peux l’aider… Au moins elle a dormi dans mes bras.
Elle s’assoit à côté du fleuve sur le rebord d’un petit mur, et se retourne
pour regarder l’eau. Elle ne me regarde pas, alors que moi, je suis
incapable de la quitter des yeux. Je m’assoie à côté d’elle.
Ami : Non, c’est passé. Mais je l’ai voulu… Et ça, ce n’est pas le genre
de choses que je peux dire à ma famille.
Ami : Tu as ton téléphone ? Ils ne savent pas que je suis sortie. Je veux
envoyer un message à Oumou.
Elle se retourne enfin vers moi pour me demander : « C’est Badou qui t’a
prévenu ? »
Mais je ne suis pas sûr qu’il serait devenu mon ami s’il avait vraiment su
ce que j’ai fait.
Ami : Je n’ai pas envie de rentrer pour le moment… C’est bien d’être
avec eux, mais tout là-bas me rappelle papa. Ça fait bizarre de ne pas le
voir. C’est dur.
Moi : Je sais. Je suis désolé que tu souffres autant. Mais rappelle-toi que
ton papa t’aimait et qu’il était fier de toi. Il n’aimerait pas te voir
malheureuse.
Moi : Ami, ne te culpabilise pas. Ton père savait que tu pensais à lui, j’en
suis sûr. Tu ne l’as pas négligé, d’accord.
Ami : Oui.
Ami : Je ne veux pas rester seule… et je veux rester ici pour le moment.
Moi : Il le fallait…
Ami : Pourquoi ?
Moi : Parce que… je devais être avec toi. Par rapport à ce que tu vis…
Elle soupire sans rien dire. On reste encore assis dans le silence. Je ne
sais plus quoi lui dire. J’ai toujours mon bras qui l’enlace. Je profite de
ces instants sans réfléchir plus que ça. La paix et le silence, la chaleur
du corps de Ami, son odeur, l’eau, le léger bruit des palmiers…
Elle a l’air de se sentir bien aussi. Badou avait peut-être raison alors.
Peut-être que Ami avait bien besoin de moi. Et ça, ça valait la peine que
je quitte ma mission et la rejoigne.
Elle se redresse pour me dire : « Je veux bien aller dormir dans l’hôtel…
Mais je ne veux pas rester seule. »
Très surpris, je la regarde. Ça veut dire qu’elle veut que je reste avec
elle ? Même si ça m’enchante, je ne crois pas que ce soit une bonne
idée. Elle n’est pas dans son état normal. M’accepter comme elle le fait,
c’est comme si elle avait décidé d’oublier la réalité. Mais si on se
retrouve tous les deux dans une chambre, tous seuls, la réalité va lui
retomber dessus. Elle va avoir peur et c’en sera fini de notre trêve.
Je lui dis : « Je ne pense pas que ce soit une bonne idée que je reste
avec toi. »
Moi : Non. Non ce n’est pas ça du tout. Mais… je ne veux pas que tu
aies peur.
Moi : Oui.
J’ai envie de lui répondre que je ne néglige pas du tout mon travail, c’est
juste qu’elle est plus importante à mes yeux. Mais je préfère me taire.
Bon, là je suis persuadé que Ami est en plein délire. Elle devrait dormir
maintenant. Je fais comme si je n’ai rien entendu.
Mais elle ne s’arrête pas là. Elle lève la tête et me regarde : « Kader ? »
Moi : Oui.
Ami : On va se marier ?
Moi : Ami…
Moi : Bien sûr que si. Il n’y a rien que je souhaite de plus.
Moi : …
*
*
[Coucou!!
©
Partie 29 : Le choix
Bon, là je suis persuadé que Ami est en plein délire. Elle devrait dormir
maintenant. Je fais comme si je n’ai rien entendu.
Mais elle ne s’arrête pas là. Elle lève la tête et me regarde : « Kader ? »
Moi : Oui.
Ami : On va se marier ?
Moi : Ami…
Moi : …
***
Il est clair pour moi que Ami n’a pas parlé dans son état normal. Ce n’est
pas possible qu’elle veuille se marier avec moi après tout ce qui s’est
passé et alors que j’ai passé des mois à essayer de la convaincre que je
regrette, sans succès. Avec le chagrin d’avoir perdu son père et le
manque de sommeil, tout ne devait pas être très clair dans sa tête. Je
pense qu’elle ne réalisait pas vraiment ce qu’elle disait.
Et elle risque de regretter quand elle va se réveiller. J’espère seulement
qu’elle me laissera au moins rester dans sa vie. Je veux l’épouser plus
que tout, mais pas comme ça. Pas pour qu’ensuite, elle regrette, se
demandant ce qu’elle fait avec moi.
Quant à moi, juste rester dans sa vie pour le moment et lui prouver que
je regrette et que je peux la rendre heureuse si elle me donne une
chance me suffit.
Elle est encore dans mes bras mais il faut que je me lève maintenant.
J’ai des prières à faire depuis ce matin.
Je la soulève légèrement et pose sa tête sur l’oreiller, tout doucement
pour qu’elle ne se réveille pas. Ensuite je me lève et tire un peu plus la
couverture sur elle. Elle se recroqueville à nouveau sur elle-même.
Je la regarde dormir et sens une émotion très forte naître dans mon
cœur. Ce n’est pas possible d’aimer quelqu’un à ce point. Je n’aurais
jamais cru que ça pouvait m’arriver… Je me penche pour lui embrasser
le front doucement puis me redresse pour sortir de la chambre.
Je lui rends son sourire et lui dis : « Je ne t’oublie jamais dans mes
prières… Désolé de t’avoir réveillée. »
Ami : Non, ce n’est pas grave. Il est tard et j’ai assez dormi.
Quand on finit tous les deux, je lui dis : « Tu veux manger quelque chose
?»
Ami : Non, je n’ai pas faim. Mais on peut aller à la maison pour que tu
manges, toi.
Les présentations ?
Elle me regarde aussi, l’air de rien, puis me dit : « Je vais lui en parler
aujourd’hui. Elle connait déjà maman Dieynaba de toute façon… Sinon,
j’ai mon oncle qui est à la maison… Tu pourras le rencontrer aussi. Peut-
être même qu’on peut se marier avant qu’il rentre ? »
Ami : Pour le mariage ? Oui. Bien sûr… Pourquoi ? Tu ne l’étais pas, toi
?
Moi : Non, ce n’est pas ça… Mais je ne comprends pas… C’est tellement
surprenant que tu acceptes tout d’un coup qu’on se marie. Il ne vaut pas
mieux qu’on en parle d’abord ? Sérieusement je veux dire.
Ami, en se dirigeant vers la salle de bain : Prends juste un truc pour toi.
Je n’ai pas faim…
Quand elle finit, elle se tourne vers moi et me regarde, avant de venir
s’assoir en face de moi sur le lit. Puis elle baisse la tête, l’air perdue et
ne dit rien.
Son comportement depuis que je l’ai revue m’a rendu un peu plus
confiant. Même si j’hésite encore à faire des gestes vers elle, je sens de
plus en plus que c’est ce qu’elle souhaite.
Je lui tends donc la main et lui demande de venir à côté de moi. Elle se
redresse timidement et me rejoint. J’attire sa tête sur mon épaule et
l’entoure de mes bras.
Elle s’arrête un peu et rajoute d’une voix cassée : « Même si tu m’as fait
beaucoup de mal. »
Je baisse les yeux pour éviter son regard. Je ne sais pas quoi lui
répondre. J’ai juste mal, très mal.
Elle reprend : « Ce que tu m’as fait est horrible. Je n’arrive pas encore à
réaliser que tu en aies été capable, même après tous ces mois… J’ai
voulu te rayer de ma vie. Je ne pouvais pas comprendre que tu aies fait
ce que tu m’as fait en prétendant m’aimer. Mais je sais bien que tu
m’aimes… Et, malgré moi, je t’aime aussi. Je n’y peux rien. »
Je vois une larme rouler sur son visage quand elle dit ça.
Je fais entrer le serveur qui nous pose les mets commandés sur la table.
Quand il sort, j’invite Ami à venir manger mais elle secoue la tête.
Moi : Tu seras toujours la plus belle pour moi… allez viens stp.
Un instant, elle lève les yeux vers moi pour me dire : « Tu retournes
quand aux Etats-Unis ? »
Moi : Je ne sais pas encore, j’ai pris un aller simple. J’ai déjà raté cette
fin de semaine, on est déjà jeudi… et lundi c’est le nouvel an. Ce serait
bien si je pouvais être là-bas mardi ou mercredi. Mais si tu veux, je reste
avec toi.
Ami : Non, non. Il faut que tu ailles bosser. Tu n’as pas besoin d’être là
pour le mariage.
Je détourne mon regard. Malgré tout ce qu’elle m’a dit, je ne suis pas
convaincu qu’il faille se marier aussi rapidement. Il faut qu’elle se sente
vraiment prête. Je ne veux pas l’influencer.
Ami : Tu sais très bien que ce n’est pas une bonne idée. Ne t’inquiète
pas, je peux rester avec Karine en t’attendant.
Moi : Ok… Par contre Ami, je pense qu’on devrait attendre un peu.
Moi : Bon. Tu vas les faire. En attendant, nos familles font plus ample
connaissance.
Moi : Oui mais il y’a mon père aussi et les autres membres de ta famille.
Moi : Ami…
Elle me regarde plusieurs secondes sans rien dire, l’air perdue, comme
si elle venait de réaliser quelque chose.
Puis elle murmure : « Marc »
Moi : Tu m’avais dit que tu l’aimais la dernière fois qu’on s’est vu…
Ami : Oui.
J’attends qu’elle continue mais rien ne sort plus de sa bouche. Oui ? Oui,
quoi ? Elle l’aime ou non ? Je crois que je vais devenir vraiment fou avec
Ami. Je ne sais jamais à quoi m’attendre avec elle.
Moi : Oui. Au fait maman et Soukeyna comptent venir chez toi demain,
pour présenter leurs condoléances.
Ami : Ah c’est bien. Peut-être que tu devrais venir en même temps aussi
?
Pourquoi j’ai pris la décision de me marier avec lui ? Parce que j’en sens
le besoin tout simplement. J’ai besoin d’être avec lui, et urgemment. Je
peux difficilement l’expliquer et peut-être que personne, connaissant ce
qui s’est passé entre nous, ne pourra le comprendre.
Alors qu’il me tenait dans ses bras au bord du fleuve et que je sentais la
chaleur de son étreinte, j’ai compris tout simplement que je ne pourrai
pas affronter l’avenir sans lui à mes côtés. Je suis fatiguée de me
compliquer la vie.
Il est mon premier et il l’a été de la pire des manières. Pourtant je veux
qu’il soit mon dernier. Je n’ai aucune idée de comment je vais affronter
l’intimité avec lui. Pour le moment, même l’embrasser est quelque chose
à laquelle je dois me préparer.
Mais ce qui est clair dans ma tête est que j’ai besoin de lui. C’est la seule
chose dont je peux jurer.
Moi :…
Marc : Pourquoi ?
Plus tard, bien après le dîner, je me retrouve avec maman, toutes les
deux seules dans sa chambre, apprêtées pour dormir. Je suis couchée
sur le lit et tournée vers elle. Elle me regarde, l’œil interrogateur, sentant
sans doute que j’ai des choses à lui dire. Je la regarde aussi, me
demandant d’où elle peut puiser cette force qu’elle affiche depuis le
décès de papa. Mes sœurs m’ont dit que même le jour de l’enterrement,
elle est restée stoïque, très calme pendant que tout le monde autour
était agité. Même quand elle pleure, ses larmes coulent doucement. Elle
ne fait aucun bruit, ne ferme pas les yeux. Elle se contente juste de les
essuyer.
Je renifle et essuie mes larmes, avant de lui dire : « Il y’a quelqu’un qui
veut m’épouser. Et… je le veux aussi. »
Moi : Oui.
Maman : Aminata, je suis contente qu’il veuille faire de toi sa femme, qui
que ça puisse être. Mais tu fais attention en attendant d’accord ?
Moi : Ne t’inquiète pas pour ça maman.
Maman : Kader ?
Maman : Ah bon… Ce ne sont pas tous les hommes qui sont capables
de faire ça… C’est pour ça que tu as accepté finalement ?
Moi : Oui et non. Pas son geste, mais le fait de le revoir. C’est lui que
j’aime.
J’hésite avant de répondre… Oui le Kader qui ne m’a pas violé est
quelqu’un de bien. Mais il regrette ce qu’il a fait. Et ça ne m’a pas fait
arrêter de l’aimer…
Moi : C’est avec lui que je me vois me marier, maman. J’en suis sûre.
Maman : C’est bon, alors. Quand est-ce que vous voulez vous marier ?
Moi : Eh bien. D’abord, maman Dieynaba va venir ici demain avec sa fille
et sa nièce. Elles veulent présenter leurs condoléances.
Moi : Ce n’est pas grave. C’est normal… Kader devrait sûrement venir
avec elles aussi, comme ça tu le connaitras.
Maman : D’accord… En tout cas, si vous vous mariez, il n’y aura aucune
célébration, au moins pour des mois, avec le décès de ton père.
Moi : Non, je ne veux rien célébrer. Mais je veux quand même qu’on se
marie rapidement. Seulement, je dois d’abord retourner en France
pour… me préparer. En plus Kader n’a pas encore fini sa mission aux
Etats-Unis.
***
Le lendemain, vendredi, on reçoit donc à la maison la visite de la famille
de Kader. Ce dernier s’est coordonné avec elles pour arriver en même
temps.
On les installe dans les fauteuils du salon et je les quitte un moment pour
appeler maman qui est en train de prier dans sa chambre. On revient
ensemble dans le salon.
Maman et maman Dieynaba se font une accolade puis s’assoient toutes
les deux sur le canapé. Les formules de politesse et de condoléances
commencent. Soukeyna et Aida discutent avec moi et mes sœurs, tandis
que Kader discute avec Malick et Assane.
Je ne vois pas le visage de Kader mais je sens son regard posé sur moi
de temps en temps.
Environ vingt minutes plus tard, les invités sont installés autour d’un plat
de riz au poisson, soigneusement présenté par Awa et moi. Même si
j’avais déjà mangé, je m’assoie avec eux pour leur tenir compagnie et
les servir, comme maman me l’a appris.
A la fin, ils restent encore presque une heure, à échanger des banalités.
Mon oncle Doudou nous a rejoints entre temps et leur parle comme papa
l’aurait fait, essayant d’en savoir plus sur la famille de Kader. Je pense
que maman a dû lui parler de ce qu’ils représentent pour moi.
Kader : Bien sûr c’est toi la plus belle... J’ai pris un billet pour le retour.
Je quitte St-Louis dimanche matin. »
J’ai un pincement au cœur à ces mots. Je n’ai aucune envie qu’il parte.
Kader : Bon. Sinon, on peut se voir ce soir si tu veux. Tu crois que ça ira
avec ta maman ? On peut aller où tu veux.
***
Une semaine plus tard, me voilà de retour à Paris, à l’aéroport Charles
de Gaulle. Je m’attends à voir Marc d’une seconde à l’autre. Il a insisté
pour venir me prendre et je n’avais aucune excuse valable pour refuser.
Malgré la tristesse du retour des funérailles, j’appréhende énormément
de le revoir.
Après avoir passé les portes coulissantes avec mon chariot, je l’aperçois
debout regardant dans ma direction.
*
*
*
*
Encore une fois faut pas facher, moi je raconte seulement émoticône
wink
[Coucou!!!
Comme vous êtes bien là, voici votre suite! lol! Hope you
enjoy émoticône wink ]
*
*
©
Partie 30 : La vérité
Après avoir passé les portes coulissantes avec mon chariot, je l’aperçois
debout regardant dans ma direction.
Il commence alors à marcher rapidement vers moi, un grand sourire sur
le visage. Je lui souris aussi, mais mon cœur bat très vite. Quand on
arrive l’un devant l’autre, il me prend dans ses bras et me serre très fort.
Puis il se redresse et avant même que j’aie le temps de réaliser, il
m’embrasse… passionnément.
***
Arrivés chez moi, Marc descend le peu de bagages que j’ai. Je vais
rester chez moi toute la journée, mais dès ce soir Badou va venir me
récupérer pour m’emmener chez Karine. Je lui ai demandé si je pouvais
rester quelques jours chez elle, sans lui expliquer les raisons.
En fait, je ne vais pas supporter de rester seule chez moi, le temps que
Kader revienne en France.
Quelques minutes plus tard, je suis assise sur le canapé du salon, assez
fatiguée. Je n’ai presque pas dormi dans l’avion, trop occupée à penser
à tout ce que j’aurai à gérer une fois à Paris. Vivre normalement comme
avant, malgré le décès de papa, supporter l’absence de Kader qui, déjà,
me manque terriblement et surtout affronter les jours à venir avec Marc.
J’ai imaginé tous les scénarios possibles mais rien ne me semble assez
bien pour lui dire que c’est fini entre nous.
Avec tout ça, j’ai manqué une nuit de sommeil et là je sens que je vais
dormir d’une minute à l’autre.
Marc, en me tirant la main : Viens dormir alors. Mais pas ici. Mieux vaut
que tu te changes et te mettes au lit. Tu dormiras mieux.
Je sais que le mieux serait que je lui demande de s’en aller même si je
sais aussi qu’il n’accepterait pas facilement. Mais c’est surtout que là, j’ai
aussi peur de me retrouver seule. Du coup, je ne lui dis rien.
Moi : Tu peux me passer mon téléphone dans mon sac stp? Je dois
prévenir ma famille que je suis bien arrivée.
Je prends mon courage à deux mains pour lui dire : « Je… préfère
dormir seule. Tu ne m’en veux pas ? »
L’appartement est plus froid maintenant et j’ai une forte envie de pleurer,
mais je n’en veux pas à Marc. Je n’ai aucun droit de l’utiliser en exigeant
qu’il reste là juste pour que je ne me sente pas seule en attendant Karine
et Badou.
Moi : D’accord.
Kader : Oui hier, et maman était juste aux anges. Ça faisait plaisir...
Donc maintenant, dès que tu…
Marc : Non, j’étais juste sorti nous chercher à manger. Je ne voulais pas
te déranger en cuisinant.
Moi : Ok…
Kader : Oh, non. Ne sois pas désolée… Je n’oublie pas que j’ai déjà
beaucoup de chance que tu me parles encore.
Moi : Je suis déjà prête. Il faut juste que je parle à Marc d’abord. Il a été
là pour moi, je le lui dois.
Mais vraiment ce n’est pas facile. Elle dit qu’elle va « gérer ça » mais ce
Marc m’inquiète. Il m’a l’air d’être très attentionné avec elle. C’est
insupportable de l’entendre l’appeler « princesse ».
Et si Ami est sortie avec lui après notre rupture et ce pendant des mois,
n’est-il pas possible qu’elle se laisse à nouveau convaincre ? Après tout,
elle dit elle-même qu’elle « le lui doit ». Mais quoi exactement ? Qu’est-
ce qu’il a fait pour elle ?
Cette fois, je regrette vraiment de ne pas l’avoir suivie dans son désir de
se marier rapidement. Là, je n’ai envie que d’une chose, appeler mes
parents et lancer la machine. Je ne veux plus attendre d’être certain que
Ami soit vraiment prête car si je suis sûr d’une chose, c’est qu’elle sera
heureuse avec moi. Je compte user de tous les moyens pour la rendre
heureuse.
Pour le moment, je vais retourner travailler à fond sur cet audit et en finir
au plus vite. Je ne veux surtout pas qu’il y’ait une quelconque
prolongation de ma mission après les trois semaines restantes.
Marc : J’ai pris des soochies et des brochettes. J’espère que tu as faim
parce que j’en ai pris beaucoup.
Quand on finit, je ramasse les boites et papiers et vais les poser dans la
cuisine.
Je reviens ensuite me rassoir sur le canapé.
Moi : Oui.
Mais mon Dieu, comment je vais bien pouvoir gérer ça ? J’ai déjà eu des
ruptures mais celle-ci est de loin la plus dure que je doive faire. Cet
homme est la perfection. Toute femme rêverait d’être avec lui… Si
seulement je l’avais connu avant Kader… peut-être qu’alors c’est de lui
dont je serais amoureuse aujourd’hui ?
Non, ce n’est pas vrai. Il n’y a aucun moyen que je sois amoureuse d’un
autre homme comme je le suis de Kader.
Moi : Marc…
Oh non, pas ça. Il pense que ce sont nos différences qui posent
problème.
Marc : Ecoute, je ne sais pas ce qui s’est passé au Sénégal qui t’aie fait
peur. Mais tu peux m’en parler. Peut-être qu’on trouvera une solution
ensemble ? Mais tu ne peux pas juste fuir.
Mon Dieu ! Comment lui faire comprendre que je le quitte parce que
j’aime un autre homme ? Ce même homme qui m’a fait souffrir, alors que
lui-même s’est occupé de me guérir.
N’en pouvant plus, mes larmes commencent à sortir. Des fois, je me
déteste vraiment. Pourquoi est-ce que je pleure tout le temps ?!
Marc : Ne dis pas ça. Je sais qu’on est fait l’un pour l’autre.
Moi, un peu à bout : Non, on ne l’est pas !
Marc : Aminata…
Moi : Je suis désolée Marc. J’aurais voulu que ce soit le cas. Je te jure
que c’est ce que je souhaitais. Je le voulais vraiment ! Mais il faut qu’on
ouvre les yeux, maintenant. La vie est trop courte pour la passer à
mentir. Mentir aux autres et se mentir à soi-même. On n’est pas faits l’un
pour l’autre Marc.
Moi :…
Marc : Mais c’est quoi alors ?! Pourquoi tu veux tout arrêter maintenant
?!
Moi :…
Moi : Marc !
Moi : …
Les choses avec Badou se sont gâtées depuis quelques mois déjà. J’ai
pendant des semaines soupçonné qu’il me trompait et j’en ai finalement
eu la confirmation, deux semaines plus tôt, de sa propre bouche.
Comme quoi, Ami avait raison…
Pendant tout le temps que j’avais ces soupçons, dont en fait j’étais
quasiment sûre sans vouloir me l’avouer, j’ai voulu en parler à Ami. Mais
je ne pouvais pas car j’étais sûre qu’elle s’en serait prise à Badou, ce
que je ne voulais surtout pas. Car au fond de moi, j’avais peur qu’il
décide juste d’en finir avec moi et de retourner à sa vie d’avant.
Je ne veux pas perdre Badou. Malgré tout ce qu’il est, je sais que c’est
quelqu’un de bien.
Puis, il y’a un peu plus de deux semaines, alors qu’on se trouvait chez
lui, il m’a avoué lui-même qu’il me trompait. Malgré la douleur que j’ai
ressentie de confirmer finalement les signes que j’essayais d’ignorer, j’ai
eu surtout peur au début qu’il ne m’annonce que c’était fini entre nous.
Comment j’ai pu être assez stupide pour laisser un truc pareil m’arriver
?
Je suis contente que Ami vienne chez moi. Déjà ça m’évitera de rester
chez Badou d’ici à ce que je lui annonce la nouvelle. Ensuite, je ne serai
pas seule, non plus. Au moins, on sera là l’une pour l’autre.
Je voudrais parler à Ami dès aujourd’hui de ma grossesse, mais j’ai peur
de l’accabler plus, avec son deuil.
Je ne sais vraiment plus quoi faire. Je suis perdue.
Je les fais entrer et les embrasse. Je garde Ami plus longtemps dans
mes bras.
Moi : Comment ça ?
Plus tard, dans la soirée, nous venons de finir le dîner et sommes tous
les trois assis dans le salon, discutant de banalités.
On est vendredi et Marc aurait pu nous rejoindre aussi, mais il n’est pas
là. Je pense que Ami ne lui a pas proposé de venir.
Je lui demande : « Pourquoi tu n’as pas dit à Marc de venir avec nous ?
Vous étiez ensemble, non ? »
Badou qui avait l’air plus concentré sur la télé jusque là, se redresse
aussi pour regarder Ami, qui répond : « C’est…compliqué. »
Ami : Oui.
Ami : Karine…
Ami : Karine !
Badou : Quoi ?!
Encore ébahie par les paroles de Ami, je me retourne vers Badou pour
avoir son soutien.
Mais je m’arrête net. Il a l’air tellement en colère qu’il commence à me
faire peur.
Il regarde Ami fixement. Je vois les nerfs de ses tempes battre. J’ai
l’impression qu’il va exploser d’une seconde à l’autre. Je ne l’ai jamais vu
comme ça.
D’une voix sourde, il dit : « Vous marier Ami ? Tu ne vas jamais te marier
avec ce fils de p*** »
[Coucou!!
©
Partie 31 : La promesse
Encore ébahie par les paroles de Ami, je me retourne vers Badou pour
avoir son soutien.
Mais je m’arrête net. Il a l’air tellement en colère qu’il commence à me
faire peur.
Il regarde Ami fixement. Je vois les nerfs de ses tempes battre. J’ai
l’impression qu’il va exploser d’une seconde à l’autre. Je ne l’ai jamais vu
comme ça.
D’une voix sourde, il dit : « Vous marier Ami ? Tu ne vas jamais te marier
avec ce fils de p*** »
Je la fixe droit dans les yeux, espérant lui faire comprendre l’ampleur de
ce qu’elle dit : « Ami, tu te rends compte de ce que tu dis ? Comment tu
peux défendre un homme qui t’a violée ? Mer** mais il t’a fait quoi ce
connard ! Comment tu peux lui pardonner et penser à te marier avec !! »
Karine : Tu n’as pas besoin de partir pour si peu Ami. Reste stp. On peut
parler tranquillement. On est amies non ?
Moi : Ami, calme-toi. Tu n’es pas dans ton état normal là.
Ami : Pourquoi ? Parce que j’ai perdu mon père, je suis incapable de
réfléchir ?
Karine : Chérie, stp. Tu n’as pas besoin de ça. Tu ne dois pas rester
seule. Reste avec moi. Essaie de comprendre ma réaction. Cette
décision est tellement insensée…
Elle ne répond toujours pas et entre dans l’ascenseur qui vient d’arriver.
Je la suis à l’intérieur et lui dis : « Bon ok, je vais te déposer. »
Ami : Je peux rentrer toute seule. Je ne suis pas une enfant. Je sais
réfléchir, je sais marcher et je sais prendre des décisions !
Moi : Mais il est tard là. Es-tu sûre d’avoir toutes tes correspondances ?
Et tu pleures en plus. Je ne peux pas te laisser partir comme ça.
Moi :…
Je viens juste d’arriver chez moi. Malgré le long trajet que je viens de
faire, j’ai toujours de la rage en moi. J’en ai tellement marre de tout. On
dirait que je suis condamnée à me battre. D’abord Kader, ensuite papa,
ensuite Marc et maintenant mes amis. Quand est-ce que je vais enfin
souffler ?
Non seulement je suis condamnée à souffrir, mais en plus de ça je fais
du mal aux personnes qui ne m’en ont jamais rien fait. Je pense à Marc
qui n’a absolument rien à voir dans tout ça, il ne m’a jamais rien fait de
mal, et pourtant il souffre à cause de moi. Suis-je donc maudite ?
Et Badou et Karine. Comment osent-ils me parler de la sorte ? Comment
Karine a pu me trahir ? Ce secret est tellement lourd, et c’était la seule
qui le connaissait en dehors de Kader et moi. J’aurais voulu le garder
pour moi toute seule mais il se trouve qu’elle l’a su. Et maintenant Badou
le sait aussi. Et il se permet de me menacer de le dire à tout le monde.
C’est ma vie, à la fin. Ils pensent que je suis incapable de la gérer toute
seule? C’est à moi de décider quoi dire et quoi taire. C’est mon secret !
Et c’est à moi de faire mes propres choix. Quel que soit ce qu’ils
pensent, c’est quand même ma vie. Comment Badou peut se permettre
d’exiger quoi que ce soit sur ma vie ?!
Et maintenant tout le monde va savoir. J’ai décidé de lier ma vie à celle
de Kader, et je ne supporte pas qu’on puisse le juger mal. Personne ne
sait ce qu’on a vécu ensemble, en dehors de cette erreur. Personne
n’était là avec nous.
Mais Badou se trompe s’il croit qu’il peut empêcher ce mariage d’avoir
lieu. Au contraire, je vais le hâter, avant qu’il n’aille ouvrir sa grande
bouche. Personne ne pourra interrompre notre mariage après qu’il aura
eu lieu.
Je ne peux pas les laisser faire. J’ai besoin de Kader. Je n’y arriverai pas
sans lui. Il m’a fait mal mais je suis persuadée que c’est le seul qui peut
me guérir. C’est le seul qui a réussi à me réconforter après le décès de
papa.
Il a l’air inquiet.
Moi : Kader.
Je ne compte pas lui raconter ce qui s’est passé. Car il risque de ne pas
accepter ce que je vais lui demander, ensuite.
Kader : Non non, il n’est pas tard ici. Je viens juste de dîner là… Je sens
que quelque chose ne va pas. Dis-moi ce que c’est stp.
Moi : Oui…non. J’ai parlé avec Marc, mais ça va, tout est clair
maintenant.
Kader : D’accord… et où est Karine ?
Kader : Oui, mais je pense qu’il vaut mieux que tu sois avec Karine
quand même, en…
Moi : Demain.
Moi : Parce que je le veux c’est tout. Qu’est-ce qui nous en empêche ?
Kader : Ami. Tu sais que je veux t’épouser. Il n’y aucun doute sur ça.
Mais je ne veux pas non plus que tu regrettes ensuite. Excuse-moi mais
malgré tes explications, tes dernières décisions sont assez…
étonnantes. Et je ne veux pas profiter de ta faiblesse, tu comprends
bébé ?
Moi : Non, je ne comprends pas. Tout est bien clair dans ma tête Kader.
Je sais ce que je veux.
J’entends Kader inspirer fort à l’autre bout du fil. Puis il semble réfléchir
quelques instants avant de répondre : « Ok, mon amour. Je vais
demander à papa d’appeler ton oncle demain pour fixer une date.
Ensuite… »
Moi : Kader.
Quand je raccroche, je vois deux messages écrits que j’ai reçus. L’un
vient de Badou et l’autre de…Marc.
Je lis d’abord celui de Marc, qui est arrivé il y’a moins de 5 minutes : «
Désolé pour ma réaction de tout à l’heure. Tu n’as pas besoin de ça en
ce moment. Bonne nuit. »
Mais mon sommeil a disparu et toutes mes pensées se dirigent déjà vers
mon père. Je serre la couette sur moi et pleure en silence, jusqu’à ce
que, fatiguée, je trouve enfin le sommeil.
***
Comme s’il entendait mes pensées, Kader m’appelle, alors qu’il doit être
4h du matin là-bas.
Je décroche : « Kader ? »
Moi : Ok.
Moi, tentant de le rassurer : Ils vont venir, ne t’inquiète pas. C’est trop tôt
là.
Quand je raccroche, je reste assise sur mon lit, repensant à tout ce qui
s’est passé depuis le décès de papa. Toute ma vie a basculé depuis et
ça ne fait qu’un peu plus de deux semaines. Et pour clore tous ces
chamboulements, je vais me marier.
Dire qu’il y’a moins de trois semaines, j’étais dans les bras d’un autre
homme, Marc.
Cette semaine avec lui au boulot a été particulièrement dure. Tous les
jours, Marc s’est comporté tout à fait normalement ou presque. Il
travaillait normalement, discutait avec tout le monde, s’adressait à moi
normalement quand il avait besoin de quelque chose… mais il ne me
regardait jamais. Je n’ai pas une seule fois vu ses yeux me regarder. Et
au fond de moi, ça m’a fait mal. Je n’ai pas l’habitude de le voir
m’ignorer, pas après qu’on ait été si proches. Avant de sortir ensemble,
nous étions d’abord amis. Et il est évident maintenant qu’on ne le sera
plus jamais. Mais il va me manquer…
Bon, dans tout ça, je suis toujours aussi stressée. Je me mets une série
sur mon ordinateur pour m’occuper l’esprit. J’ai envie d’appeler maman
mais il n’est que 8h au Sénégal, et maman se rendort toujours après la
prière du matin.
Moi : Oui.
Moi : Salut.
Moi : Je ne t’ai pas appelé pour me disputer. Tu crois que tu peux venir
chez moi cet après-midi ?
Karine sonne chez moi vers 15h. Entre temps, je me suis changée pour
mettre une simple robe en wax que maman m’avait fait coudre. Bien sûr,
je ne mets aucun maquillage et attache juste mes cheveux en arrière.
Moi : Quoi ?!
Karine, en reniflant : Oui. Il m’a dit qu’il ne pouvait pas assumer un bébé.
Moi, complètement ahurie : Ce n’est pas possible. Il n’a pas pu dire ça.
C’est son bébé aussi. Il doit s’en occuper. Ce n’est pas comme si il avait
le choix quand même.
Moi : Karine, j’ai l’impression que tu ne parles pas de Badou là. Ce n’est
pas possible qu’il ait agi ainsi. Peut-être… peut-être qu’il lui faut juste un
peu de temps pour réaliser. Tu vas voir, je suis sûre qu’il va revenir à de
meilleurs sentiments. Tu n’es pas tombée enceinte toute seule après
tout.
Moi : Mais bien sûr que tu ne peux pas avorter. Ne parlons même pas de
ça.
Karine : Je m’en veux tellement d’avoir été aussi stupide. Faire l’amour
sans me protéger tu te rends compte ?
Je lui frotte le dos pour la calmer. Ma pauvre chérie. Je ne lui parle pas
de ses parents mais ce sont eux qui m’inquiètent le plus dans cette
histoire. Sa famille est très conservatrice et je crains le pire. Mais je ne
vais pas l’embêter avec ça pour le moment. Avec ce bébé dans le ventre
et ce salaud de Badou qui l’a rejetée, elle a assez de quoi s’occuper.
Celui-là, il va m’entendre. Heureusement qu’il vient tout à l’heure, il sera
obligé de faire face à Karine. Mais je pense qu’il est juste sous le choc
pour le moment. Je n’imagine pas du tout Badou irresponsable.
Avec tout ça, je ne peux pas parler avec Karine du mariage pour le
moment. De toute façon, elle saura forcément bien assez tôt.
Je hoche la tête.
Karine : Je n’en suis pas sûre Ami. Tu aurais dû le voir. J’aurais mieux
pris la chose s’il avait été en colère. Mais là il m’a juste dit très posément
qu’il n’était pas prêt à assumer un bébé. Il n’avait pas l’air de dire ça
sous le coup de la colère. C’était juste une…affirmation, toute simple.
C’est déjà trop tard ma chérie. Je m’assois mieux sur le canapé et la tire
pour qu’elle vienne à côté de moi. On va changer de sujet pour éviter
qu’elle parle plus de Kader et que je finisse par me fâcher.
Karine : Ami !
Vers 17h, Badou arrive enfin. Je lui ouvre la porte et le laisse entrer
pendant qu’il me dit en marchant : « Ça ne se fait pas d’écarter son frère
de la sorte Ami, quel que soit ce… »
Karine : Badou.
Badou se retourne pour me regarder, l’air de dire : « C’était donc pour
ça. »
Karine et moi regardons Badou, bouche bée. Non, je n’en crois pas mes
oreilles. Je n’en reviens pas que Badou puisse dire ce qu’il vient de dire
aussi calmement.
Badou se lève pour lui faire face. Il crie lui aussi en lui répondant : « Et
alors Karine. Comment pouvais-je savoir que tu allais tomber enceinte
juste comme ça, la seule fois où on ne s’est pas protégés ! »
Badou : Tout ce que je veux, c’est que tu avortes, un point c’est tout. Ce
n’est pas la fin du monde, plein de personnes le font tous les jours.
Je vois Karine de plus en plus enragée. Ce n’est pas bon dans son état.
Avant que ça dérape, je me mets entre eux.
Moi : Bon, vous vous calmez maintenant. Crier ne va pas résoudre vos
problèmes. Karine, assis-toi stp.
Alors que Karine continue de pleurer, Badou hésite puis se rassoit sur sa
chaise, silencieux. Je sens qu’il a envie de venir vers Karine mais il a
peur. Bien fait pour lui !
Moi : Oui.
Kader : Je le suis aussi, j’avoue. Mais moi c’est parce que je ne veux pas
faire d’erreur avec toi... Je te suis tellement reconnaissant de me
redonner une chance, bébé. Je n’arrive toujours pas à y croire. Tout
s’est passé si vite. C’est complètement fou… Tu es la femme la plus
extraordinaire que je connaisse. Personne d’autre n’est capable de faire
ce que tu as fait. Tu as un cœur en or. Et je jure de faire de toi la femme
la plus heureuse qu’il soit, Aminata Fall. Tu verras. Je t’aime tellement.
Voilà une chose que je ne lui ai pas souvent dit depuis qu’on s’est
réconciliés. Et pourtant, c’est la vérité. J’aime vraiment cet homme. A un
point que personne ne peut comprendre, surtout après ce qu’il m’a fait.
Depuis le jour où je l’ai revu, devant le cimetière, tout ce que j’ai voulu,
c’est devenir sa femme. Finir enfin tout ce qu’on avait commencé au
moment où ce drame est arrivé entre nous.
Me marier avec lui, c’est fermer cette page. C’est clore tout ce chapitre
et recommencer une nouvelle vie. Et j’ai hâte.
Je ne suis plus stressée. J’ai hâte de devenir la femme de Kader.
Je fais face à Karine et lui dis tout bas : « Ne crie pas Karine, d’accord…
Je vais me marier. On est en train de célébrer en ce moment-même mon
mariage avec Kader. C’est pour ça que je vous ai faits venir. »
Karine : Mais…
Je lui pose la main sur la bouche et lui fourre le téléphone dans la main.
Puis je lui souris. Elle me regarde quelques instants, l’air perdue. Je la
comprends. Puis elle semble se résigner en soupirant. Toutefois sans
sourire…
Plusieurs minutes à patienter plus tard, c’est officiel. Je suis mariée avec
Abdelkader Hann. Maman est en ce moment même au téléphone, en
train de m’adresser ses prières. Puis elle me passe mes sœurs, qui me
félicitent et prient à leur tour, pour Kader et moi.
Ça me rend triste parce que j’aime Badou. Mais tant pis, il finira par
revenir à de meilleurs sentiments.
***
Là, il devrait arriver d’une minute à l’autre. Il m’a appelée tout à l’heure
de l’aéroport, en début d’après-midi. Pour le recevoir, j’ai mis une petite
robe noire et des bijoux. Je me suis aussi coiffée et maquillée. J’ai
l’impression que ça fait un siècle que je ne me suis pas maquillée.
A part ça, depuis ce matin, j’ai préparé la cuisine, du « Soup Kandj » (riz
et sauce à base d’huile de palme et de gombo). Maman, sachant que
Kader venait, m’a appelée pour me donner plein de conseils sur
comment je dois l’accueillir. Et je les ai tous suivis jusque-là.
Brusquement, une voix nous ramène tous les deux sur terre : « Kader. »
Badou s’avance alors vers Kader en même temps que je lui crie dessus :
« Badou ! »
[Et voilà mes chers! J'espère que vous avez aimé? Désolée pour les pro
marc! émoticône frown
Moi, j'ai mal au cœur parce que je vais devoir me faire rare jusqu'à
vendredi émoticône frown.
la suite vendredi donc émoticône wink
*
©
Partie 32 : Les craintes
Brusquement, une voix nous ramène tous les deux sur terre : « Kader. »
Badou s’avance alors vers Kader en même temps que je lui crie dessus :
« Badou ! »
*
*
***Dans la tête de Kader***
Je rêve où c’est Badou qui vient de me frapper là. Alors que j’essaie de
comprendre ce qui se passe, j’entends la voix de Ami qui crie son nom.
Je tourne la tête et vois Badou qui revient à l’assaut. Bon, pas le temps
de réfléchir à ce qui se passe. Un homme qui me cogne, je le cogne
aussi et on discute après.
Ce qui me ramène tout de suite sur terre. Je me retourne vers elle. Elle
me regarde, l’air effrayée. Oh, non. Tout sauf ça… Je lui ai fait peur à
nouveau, en me montrant violent devant elle. Ce que je m’étais promis
de ne plus faire…
Alors qu’on entend la porte d’un voisin s’ouvrir, Badou baisse son regard
sur Ami et lui parle avec violence en m’indiquant de la tête : « Tu veux
vraiment que je te laisse avec lui ? Ça te plait de te faire violer, c’est ça ?
»
Là, c’est trop. Je viens tout juste de comprendre l’attitude de Badou mais
j’en reviens encore moins de la manière avec laquelle il parle à Ami. Qui
qu’il soit, il n’a pas le droit de parler à ma femme de la sorte.
Furieux devant ce triste spectacle, je regarde Badou. Mon coup d’il y’a
quelques secondes a l’air d’avoir calmé ses envies de me cogner mais
maintenant il parle mal à ma femme. Je ne le connaissais pas comme
ça. Je vais tenter de le raisonner une seule fois et s’il persiste, je le tire
dehors et on va régler nos comptes d’homme à homme.
Ami : Kader…
Elle exerce plus de pression sur mon bras, sans doute pour que je n’en
dise pas plus. Et Badou me regarde d’une manière tellement haineuse
que je vois ses veines sauter sur son front.
Je le dégoûte, ça se voit. Je le dégoûte tellement qu’il n’a pas envie de
me répondre.
Tout d’un coup, je me sens abattu. Cette situation est quand même
triste. C’est Badou là ! C’est mon pote et c’est le frère de Ami. Il a tout
fait pour que je me réconcilie avec elle. Et moi je lui ai menti, même si
c’était surtout pour protéger l’intimité de Ami.
Finalement, quoi de plus normal que sa réaction devant la découverte de
la vérité ? N’aurais-je pas moi-même agi pareillement pour protéger Ami
ou Soukeyna ? En dehors de ce qu’il vient de dire, forcément sous le
coup de la colère, toute sa réaction est normale. Quant à moi, j’ai fait
bien pire sous le coup de la colère. Et c’est la raison de notre présence à
tous les trois ici. Si on en arrive là, c’est entièrement de ma faute. Je ne
peux pas blâmer Badou.
Sincèrement désolé, je lui dis : « Ecoute man. Je sais que tu ne vas pas
me croire, mais je suis désolé pour ce que j’ai fait. Je voulais vraiment te
le dire mais je ne pouvais pas… »
Quant à Ami, l’air soulagée, elle tire mon bras pour entrer dans
l’appartement. Je commence à rentrer mes bagages, le cœur lourd, me
demandant si, en fin de compte, je ne suis pas réellement le monstre
que Badou semble voir en moi.
Moi : Mais il pense que je vais te faire souffrir encore… Et si c’était vrai ?
Si un jour, à nouveau, je me mettais en colère et te faisais du mal ?
Ami : Tu en as l’intention ?
Ami : Non. C’est ce que tu VAS faire. Si tu m’aimes assez pour ne pas
vouloir que je souffre encore, tu vas pouvoir combattre tous tes démons,
tous, et tu vas y arriver.
Puis je lui dis, submergé par la fatigue : « Je n’ai pas faim bébé. Je suis
juste très fatigué. »
Je ferme les yeux et me glisse un peu plus bas pour enfouir mon visage
dans son cou, en lui enlaçant la taille... Ma femme.
Elle m’entoure de son bras comme si j’étais son enfant, et continue de
me caresser la tête.
*
*
Ça fait au moins une heure que je tiens Kader dans mes bras. Il dort
comme un bébé et je n’ose pas bouger pour ne pas le réveiller.
Pour ma part, je n’ai aucune envie de dormir. Tout à l’heure, j’ai cru qu’il
avait l’intention de me faire l’amour. J’ai su ensuite que ce n’était pas le
cas, mais ça m’a fait réaliser qu’on en viendrait forcément là, et très
bientôt. Le problème, c’est que je ne suis pas prête. Mais alors pas du
tout !
J’adore être dans les bras de Kader, j’adore quand il m’embrasse. Mais
faire l’amour, c’est autre chose.
Je sais que je suis sa femme et que c’est mon devoir de le satisfaire sur
ce plan aussi. Quand j’ai accepté de l’épouser, je savais que ça ferait
partie du contrat. Mais maintenant que je suis dedans, et qu’il est là avec
moi, je réalise vraiment ce que signifie d’être mariés. Je n’ai aucune idée
de comment je vais faire…ça. C’est énorme ! Je ne veux même pas y
penser. Je sais déjà ce que ça fait et je ne le supporterai pas, j’en suis
certaine. Tout ce que je veux c’est être avec lui et qu’on oublie cette
partie. Je m’en passerai très bien tout en étant heureuse avec lui. Je n’ai
absolument pas besoin de ça.
Depuis une heure qu’il est collé à moi, je cogite, imaginant toutes sortes
de façons d’empêcher ce qui arrivera inéluctablement.
Et jusque-là, rien de ce que j’imagine ne semble faire l’affaire.
Découragée, je sens des larmes monter à mes yeux. Je pleure en
silence, jusqu’à finir par m’endormir.
***
Quand j’ouvre les yeux bien plus tard, la place à côté de moi est vide.
J’entends le bruit de la douche, donc Kader doit y être.
Je vais alors dans la cuisine et sors une nappe et des couverts que je
mets sur la table basse du salon. Je retourne dans la cuisine pour
préparer un plateau de boissons quand j’entends la porte de la salle de
bain, juste en face de celle de la cuisine, s’ouvrir. Je me retourne
instinctivement et vois Kader, de dos, en train d’en sortir. Comme
hypnotisée, je n’arrive pas à détacher mon regard de son corps pendant
quelques secondes. Le corps humide, ma toute petite serviette autour
des reins, il est presque nu. Et… tellement sexy ! Quand il se retourne, je
détourne vivement ma tête, extrêmement troublée. Je me sens bizarre.
Qu’est-ce qui m’arrive ?
Kader : Ça va ?
Kader : Ok.
Ouf. Il s’en est allé. Il n’a pas l’air d’avoir remarqué mon trouble,
heureusement. Je sens que la vie au quotidien va être plus compliquée
que prévu…
***
Plus tard, nous avons fini de manger et sommes à moitié allongés sur le
canapé, enlacés. Ça me fait quand même bizarre de me retrouver avec
lui à nouveau dans cette situation. C’est comme quand on sortait
ensemble, sauf que cette fois nous sommes bel et bien mariés.
Nous avons mis de la musique soul jouant très bas et restons juste dans
les bras l’un de l’autre, profitant du calme et du plaisir d’être ensemble.
Je lui suis reconnaissante pour ses paroles mais le problème c’est que je
ne pense pas être un jour prête. Je préfère ne rien lui répondre.
Il rajoute : Rassurée ?
Surtout pour changer de sujet, je lui dis : « On part quand chez toi ? »
Après réflexion, je lui réponds : « Je ne pense pas que ce soit une bonne
idée. »
Moi : Elle t’a posé des questions sur moi ? Je veux dire sur… ma
virginité ?
Kader : Oui.
Kader : Je lui ai dit que tu étais comme il faut et que je suis comblé.
Kader : Comment ça ce n’est pas vrai. Bien sûr que ça l’est. Elle n’a pas
besoin de savoir quand je l’ai su…
Je vois une ombre passer dans son regard quand il dit ça.
Moi : Quoi…
Kader : Maman veut que j’appelle ta mère, pour lui dire que « je suis
content ».
Mais je n’ai pas le temps de finir. Kader s’est redressé au-dessus de moi
et a commencé à me chatouiller la plante du pied, que je retire
instinctivement. Mais il enchaine sur l’autre pied et commence à faire
semblant de me mordre le ventre. Puis il continue de me chatouiller et
me mordre partout, y mettant toute son énergie… Je n’en peux déjà
plus. Je ris aux éclats et lui donne des coups de pied pour qu’il arrête.
Mais il n’arrête pas du tout, me menaçant de continuer si je ne le supplie
pas. C’est cruel ! A bout de forces, je finis par craquer et le supplie
d’arrêter.
[Coucou !!
Voici enfin votre suite du samedi. J’espère que vous aimerez ! ]
*
*
©
Partie 33 : Le recommencement
***
Je baisse les yeux sur mes mains. Kader a raison, je tremble. J’essaie
d’arrêter mais je n’arrive pas à me contrôler.
Moi : Oui.
Côté intimité, on fait très attention tous les deux depuis l’incident du
dimanche. En gros, on se fait des bisous, des câlins, on dort dans les
bras l’un de l’autre, mais ça s’arrête là. Pas de caresse, ni de baiser trop
poussé.
Et c’est là le côté anormal de notre relation. J’en suis bien consciente.
Mais vraiment je ne peux rien y faire pour le moment…
Pourtant, même avec si peu, je ressens de plus en plus de sensations
que je n’arrive pas à m’expliquer. Ce n’est pas nouveau car je les
ressentais aussi lorsqu’on sortait ensemble. Mais là il y’a quelque chose
en plus… Bref.
Après ce très long week-end, j’ai enfin repris le travail le jeudi. Ce jour-là,
je n’ai pas vu Marc de toute la journée. Depuis l’annonce de mon futur
mariage avec Kader, la situation était restée la même jusque-là, entre
Marc et moi. Il était extrêmement froid, ne m’interpellant que dans un
cadre strictement professionnel et ne me regardant jamais. J’ai fini par
m’habituer malgré la peine que ça me faisait. Je ne faisais plus attention
à son attitude mais par contre je n’ai pas perdu celle de me retourner et
de le voir derrière moi, les yeux fixés sur son écran.
Quand je ne l’ai pas vu le vendredi non plus, j’ai demandé à Bernard,
mon manager, s’il était malade. Sa réponse m’étonna au plus haut point.
Marc a quitté le projet, à sa propre demande. Voilà, je n’ai pas plus de
détails que ça. Il est parti sans dire au revoir, même pas un mail… A
moins qu’il l’ait envoyé à tous, sauf à moi.
Bref, j’ai éprouvé une grande peine en l’apprenant, et en suis encore
attristée. C’est de ma faute, ce qui est arrivé. Marc ne méritait pas ça…
En parlant de Kader, ils ont vidé l’appartement, Karim et lui, hier après-
midi. Ils ont dû louer un camion et répartir les meubles entre les caves
de chez nous et de chez Karim. Là, je pense qu’il reste surtout à tout
nettoyer, ce que Kader compte faire cette matinée. Il a déjà emmené
l’essentiel de mes vêtements aussi et ses affaires qui étaient ici.
D’ailleurs, on est en train de quitter mon appartement ensemble. Comme
ça ne lui fait pas faire un grand détour, il va d’abord me déposer chez
Karine à Boulogne et partir ensuite à Chatou.
Bien plus tard, vers 11h, je suis avec Karine dans un magasin de
meubles à Nanterre. On compte y prendre l’essentiel des meubles
lourds. J’avais déjà vu leurs articles sur internet. Ensuite pour la petite
décoration, on va aller aux 4 temps voir ce qu’on peut y trouver. La
journée risque donc d’être remplie.
Karine et moi faisons un premier tour pour repérage. Durant une heure,
on a pris plusieurs photos dont on va ensuite discuter, installées dans un
restaurant du coin. On se fait une pause d’une heure avant d’y retourner.
Là, je sais ce qu’elle essaie de savoir. Mais je ne vais pas lui donner la
satisfaction de lui répondre aussi facilement.
Karine, l’air amusée : Oui Ami. C’est ce que les personnes mariées sont
l’une pour l’autre habituellement.
Moi : Mais je suis très heureuse d’être mariée à Kader, tu sais. Il est
adorable avec moi. Mais c’est juste que je me suis aussi rendue compte
que le mariage, ce n’est pas n’importe quoi… Tu vois.
Je l’arrête : « Non. »
Karine : Et vous avez essayé ?
Karine, l’air surprise : Ok… C’est bien ça… C’est ce que tu voulais non ?
Karine : Arrête de te casser la tête. Kader a bien fait de t’avoir fait cette
proposition. Si vous allez trop loin, trop vite, vous risquez de démarrer
mal et de regretter ensuite. Tu ne veux pas devenir plus traumatisée que
tu ne l’es déjà.
Karine : Dans tous les cas, prends ton temps et fais ce que tu sens.
C’est tout. Kader vivra avec.
Karine : Au moins deux fois par jour. Mais je ne décroche jamais. Je sais
déjà ce qu’il a à me dire.
Moi : Et s’il avait changé d’avis ? Je ne lui parle plus non plus, donc je ne
peux pas savoir ce qu’il a dans la tête. Mais toi, c’est différent. Il est
amoureux de toi et tu portes son bébé…
Moi : Ça, c’est entre lui et moi… Et je ne le défends pas, je veux juste
ton bonheur à toi. S’il y’a une chance que le père de ce petit bébé qui
grandit là-dedans le reconnaisse et joue correctement son rôle de père, il
ne faut pas la négliger. Pas juste parce que tu es en colère… Ce bébé
doit être votre priorité à tous les deux.
Ecoute ce que Badou a à te dire. Stp. Et s’il te reparle d’avortement, ce
qui m’étonnerait, je t’aiderai moi-même à l’effacer complètement de ta
vie. C’est ok ?
Nous passons les deux heures plus tard à indiquer les meubles et autres
– luminaires, linges, tapis, etc – qu’on a choisis et passer la commande.
J’ai failli crier quand on nous a annoncé le prix final. Par précaution, j’ai
préféré appeler Kader pour confirmer que je peux y aller, avec sa carte
bancaire. Il a ri, visiblement touché que je fasse attention à ça, avant de
me dire de me lâcher. Je sais que Kader n’a pas à se plaindre côté
finances entre son boulot pas trop mal et la fortune de sa famille
apparemment non négligeable. Je décide donc d’en profiter, pour une
fois que je peux « me lâcher », ravie.
J’ai pu aussi réserver une livraison pour aujourd’hui, avant 18h. Karine
accepte de rentrer avec moi pour attendre la livraison ensemble, mais
avant ça on va rapidement à la Défense pour voir ce qu’on peut trouver
aux 4 Temps.
Kader ne sera pas à la maison, quand on va y aller Karine et moi. Je
préfère lui faire la surprise de découvrir notre nouvel appartement. Je
vais me faire aider par Karine pour la déco, et par les livreurs, avec qui
c’est déjà convenu, pour le reste.
Karine glisse son bras sous le mien, sentant sans doute mon malaise, et
nous entrons toutes les deux ensemble. Le couloir d’entrée et le salon
sont presque vides. Il ne reste que la télé posée au sol, en attendant le
nouveau meuble tv. Cette fois, d’autres souvenirs commencent à me
submerger, les agréables…
Karine : Non, ne t’inquiète pas. Ce n’est pas loin. Je vais y aller toute
seule.
Après ma douche, je mets une très jolie robe longue, couleur saumon et
relève mes cheveux, avant de me maquiller consciencieusement. Je suis
à la maison, mais je rajoute quand même de hauts talons à tout ça. J’ai
envie de célébrer ce premier soir chez nous, qu’on en garde de bons
souvenirs.
Même avec le travail, elle se débrouille pour que je mange presque tous
les jours un nouveau plat. Le pire c’est que ce n’est vraiment pas
nécessaire pour moi, j’ai l’habitude de me débrouiller avec ce que j’ai
sous la main. Et j’aurais été quand même heureux avec elle sans tout
ça. Mais elle est intraitable. Comme elle insiste, je me laisse aller
finalement. Et je me régale tout simplement.
Il y’a trois jours, on est rentré ensemble du boulot et je l’ai sentie très
fatiguée même si elle ne me le disait pas. Cette fois, j’ai refusé net
qu’elle fasse la cuisine. A la place, je lui ai proposé de préparer des
tortillas espagnoles, l’un des très rares plats que je sais faire. Du moins
je le pensais… Car quand j’ai vu la grimace furtive qu’elle a faite à table,
j’ai eu un sérieux doute sur mes capacités culinaires. Elle m’a menti en
disant que c’était très bon mais la pauvre, elle ne sait pas que je sais
toujours quand elle ment. Finalement, je lui ai proposé de commander
une pizza, ce qu’elle a fini par accepter après quelques fausses
réticences.
Après cet épisode, je doute fort qu’elle me laisse entrer dans la cuisine
une autre fois.
Ce qui me fait penser qu’elle fait tout ça pour compenser autre chose. Et
je n’aime pas qu’elle agisse de la sorte. Je ne veux pas qu’elle se sente
coupable de ne pas se donner à moi.
Je sais très bien moi-même que si elle ne le fait pas, ce n’est pas du tout
par caprice mais vraiment parce qu’elle a un blocage.
Elle n’a pas l’air de me croire quand je lui dis que je peux attendre le
temps qu’il faudra.
Pourtant c’est bien le cas. Je suis prêt à attendre des mois et des
années…
Bon, pas des années, il ne faut pas exagérer non plus.
Mais j’ai le sentiment qu’on n’en arrivera pas là. Malgré son blocage, je
vois bien à quel point Ami est troublée quand elle me voit dans certaines
situations. Depuis que j’ai remarqué sa réaction du premier jour quand je
suis sorti de sa salle de bains après ma douche, je fais exprès de recréer
ce type de situations. Et ça marche toujours.
Je vois aussi comment son corps réagit quand je la touche ou
l’embrasse. Elle ne le sait peut-être pas encore, mais elle me désire
aussi. Tôt ou tard, elle finira par avoir envie d’aller plus loin, elle aussi.
Quand elle sort enfin, je n’essaie plus de comprendre quoi que ce soit.
Je la regarde, hypnotisé par sa beauté. Cette robe verte sur elle, elle est
juste sublime !
Elle sourit nerveusement, attendant ma réaction. Elle n’a même pas
conscience de ce qu’elle dégage.
J’essaie de garder un air sérieux, mais finis par éclater de rire : « Bien
sûr que non, mon amour. »
Puis je me penche pour l’embrasser avant de lui dire : « Ils n’ont qu’à te
regarder. Ça ne sera dur que pour eux car c’est avec moi que tu rentres
ce soir. »
Ami : …
Moi : Chérie ?
Elle tourne enfin son regard vers moi : Euh… oui. Ok ça me va.
Alors que je lui pose cette question, je me retourne pour voir ce qu’elle
regardait. Et je comprends tout de suite ce qui se passe. Je me retourne
calmement à nouveau vers elle.
Ami : Il y a…
Moi : Je sais.
Ami me coupe, inquiète : Kader, je crois que Marc vient vers nous.
Moi : Quoi ?
*
*
[Et voilà ? Vous avez aimé ?
Passez un excellent week-end et à lundi !
[Bonsoiiiiiir!!!
Enjoy! ]
*
*
©
Partie 34 : Le pas
Ami me coupe, inquiète : Kader, je crois que Marc vient vers nous.
Moi : Quoi ?
Ah, non, tout sauf ça. Je pose rapidement ma main sur la sienne posée
sur la table, afin de le calmer. Je regarde ensuite Marc.
Moi : Tu sais bien ce que je veux dire. Je suis en train de diner avec…
Kader inspire fort à cet instant, ce qui attire mon regard sur lui. Il essaie
visiblement de maîtriser sa colère. Je prie à l’intérieur de moi pour qu’il y
arrive, lui serrant un peu plus la main. Il me regarde furtivement et me
serre aussi la main. Il essaie de me rassurer, apparemment.
Je reste coite suite à ces mots, puis je baisse la tête, ne sachant quoi
répondre.
Je sens le regard de Kader et Marc sur moi. Ils attendent tous les deux
ma réponse… qui ne vient pas.
Mes souvenirs vont vers les moments que Marc et moi avons passés
ensemble et tout ce qu’il a fait pour moi. Je suis incapable de le renvoyer
comme ça, ou de mal lui parler. Pas Marc. Mais comment me comporter
avec lui devant Kader ? Mon mari !
Je lui réponds en souriant : « J’ai dit ça juste pour le faire partir… J’ai eu
peur de ce qui pouvait arriver s’il insistait… Tu comprends ? »
Il me fixe du regard alors que son visage semble se détendre un peu
plus.
Je lui rends simplement son sourire sans rien dire. Je me sens gênée
car en réalité, je ne mentais pas à Marc. Je pense vraiment qu’il a besoin
qu’on se parle et je le lui dois comme il l’a lui-même dit.
Mais je suis une femme mariée avant tout. Je ne peux pas juste décider
de rencontrer un homme comme ça, surtout quand il s’agit de mon ex. Et
ça m’aurait étonné que Kader accepte ça, quelles que soient ses bonnes
résolutions.
***
Moi, sans arrêter ce que je fais : Il faut que je prépare à dîner, mon
cœur.
Moi : De Marc ?
Kader : Oui. Ecoute, je sens que ça te fait de la peine ce qui s’est passé.
Et je ne vais pas prétendre que je suis ravi de ça… Mais je te fais
confiance avant tout, et je pense que si tu es triste c’est parce que tu…
l’estimes… J’ai tort ?
Kader : Je pense que si. Je ne veux pas être égoïste et je ne veux pas
que tu accumules des choses qui te peinent. Je ne vais pas te mentir,
c’est difficile pour moi d’accepter ça. Mais j’essaie de me soigner, tu
vois.
Il dit cette dernière phrase en souriant. Je lui rends son sourire, touchée
par son geste.
Moi, plus sérieusement : Mais tu n’es pas obligé. Je peux ne pas le voir,
ce n’est pas grave.
Kader, reprenant son sérieux aussi : Non, vas-y. Je veux que tu le voies
et que vous parliez. Mais après ça bébé, je veux que la page soit fermée
sur lui. Ok ?
Moi : Ok.
***
Quelques jours plus tard, je suis assise avec Marc dans un restaurant
situé à quelques pas seulement de mon entreprise. Je lui ai proposé de
me rejoindre à la pause de midi à cet endroit que nous connaissons tous
les deux.
Il est arrivé avant moi et m’attendait devant le restaurant. Je lui ai juste
dit bonjour quand je l’ai rejoint, évitant de lui faire la bise. Nous
demandons une table et nous asseyons face à face.
Marc : Ça m’a fait un choc quand je t’ai vue entrer dans le restaurant aux
bras de… ton mari ?
Moi : Oui. Je l’aime. Je suis désolée Marc mais je dois être honnête avec
toi, que tu puisses fermer la page. J’ai toujours aimé Kader…
Marc :…
Moi : Marc…
Marc : Très bien… Il sera bientôt avec moi pour les vacances d’hiver.
Moi : Marc. Je suis une femme mariée maintenant, quel que soit ce qui
s’est passé entre nous. Si j’ai accepté de te voir, c’est parce que comme
tu me l’as dit, je te le dois. Je te dois plus que ça Marc. J’étais
malheureuse avant que tu arrives dans ma vie. Et j’ai retrouvé le sourire
grâce à toi. Mais maintenant je suis avec quelqu’un d’autre. Et on s’aime.
C’est fini toi et moi.
Finalement, je lui dis : « Je suis heureuse avec Kader et lui l’est aussi
avec moi. Nous nous aimons tous les deux. Et c’est tout ce qui
compte…
Marc, tu auras toujours une place spéciale dans mon cœur. Je ne
pourrai jamais oublier les moments que nous avons passés ensemble. »
Marc : Merci.
Marc, sans hésiter : Non Aminata. Je ne crois pas qu’on puisse être
amis.
Marc se lève en même temps que moi. Avant que j’aie le temps de
réaliser, il me prend dans ses bras et me serre fort contre lui.
J’essaie de le repousser, paniquée : « Marc, non ! »
***
Et pendant ces trois mois, non seulement il ne s’est jamais plaint, n’a
jamais essayé de me convaincre, mais surtout ne m’a jamais montré une
quelconque frustration. Pourtant je sais bien qu’il en ressent, de la
frustration. Je ne connais peut-être pas grand-chose au sexe mais je ne
suis pas bête non plus. Kader lui-même m’avait expliqué ce qu’il
ressentait dans certaines situations en ma présence. Donc non, ça ne lui
est pas juste passé du jour au lendemain comme ça. Surtout qu’on vit
ensemble !
Et moi, dans tout ça, j’en suis toujours au même point, c’est-à-dire
complètement bloquée à l’idée d’y passer. J’ai des envies certes, mais je
ne souhaite pas aller jusqu’au bout.
Et je me sens de plus en plus mal vis-à-vis de Kader. Maintenant, je suis
bien consciente que dans le cadre d’un mariage, ne pas faire l’amour
n’est pas une option. Et ce n’est pas parce que Kader se montre patient
que je dois prendre ça pour acquis.
Je suis justement en train d’y penser car Kader, qui fouille actuellement
dans le placard vient d’en tirer sa main, un petit tissu noir pendant à son
doigt.
Il m’enlace alors que je lui réponds : « Tu n’es pas mal, non plus… Hum,
si tu m’embrasses, je pense que tu auras besoin de te nettoyer la figure
avant de partir... »
***
Moins d’une heure plus tard, on arrive chez Karim. Quand je vois sa
femme, je suis ravie en la voyant habillée aussi d’une tenue
traditionnelle. Elle est ravissante.
C’est avec gentillesse qu’elle nous accueille chez elle. On s’installe tous
dans le salon au départ mais quelques minutes plus tard, je me retrouve
dans la cuisine avec Marie pour l’aider à préparer des plateaux d’amuse-
bouche.
On discute comme si on se connaissait depuis longtemps. Ça tombe
bien qu’elle soit quelqu’un d’aussi ouverte que moi. Il n’y a aucune gêne
entre nous.
Elle me dit d’un air malicieux : « Vous formez un beau couple, Kader et
toi. »
Moi, en souriant : Merci. Je peux dire pareil pour vous. Les beaux
enfants que vous allez avoir !
Je ris, amusée, sans répondre. Elle plaisante bien sûr, Karim aussi est
très beau. Ça se voit qu’ils sont juste très complices.
Marie : Tu sais, je ne sais pas vous, mais nous on n'y pense pas encore
aux bébés. On a envie de bien profiter l’un de l’autre avant.
J’évite de faire la parallèle avec Kader et moi. Car pour faire des enfants,
il faudrait déjà commencer par essayer de les concevoir...
Elle dit ça en s’asseyant sur le bras du fauteuil où est assis son mari,
entourant ses épaules de son bras.
Kader : Pas de problème. Ç’aurait été trop beau qu’elles n’aient pas
protesté.
Nous passons tous les quatre une soirée très agréable. Marie a préparé
du « yassa au poisson » en plat principal, accompagné de jus de «
bissap » blanc.
Kader avait raison, c’est une vraie sénégalaise. Vu son comportement et
sa manière de s’exprimer, on ne dirait pas qu’elle a d’autres origines.
Karim a, lui en tout cas, de la chance d’avoir une femme « djongué » [qui
s’occupe bien de son mari].
A presque 23h, nous sommes encore chez eux, installés dans le salon,
écoutant de la musique et discutant de tout et de rien.
Marie s’est installée sur les genoux de son mari alors que Kader et moi
sommes sur le canapé. L’ambiance est calme et agréable, même si je
commence à vouloir rentrer, fatiguée.
Je voudrais que mon couple soit aussi épanoui que le leur a l’air de
l’être. Après tout, c’est à ça qu’est censé ressembler un nouveau couple
marié, non ?
Sur la route vers notre appartement, Kader s’enquiert de mon état, sans
doute inquiété par mon silence. Je me force à le rassurer, discutant de
banalités, mais au fond de moi je cogite.
***
Après qu’on ait fait le ménage et que Kader se soit installé devant ses
éternelles émissions de sport, je me retire pendant très longtemps dans
la salle de bains. A part me regarder dans la glace toute nue en
imaginant ce qui va se passer, je prends du temps pour m’épiler
correctement les parties intimes comme me l’a conseillé Oumou.
Vers 21h, juste après le dîner, je vais prendre une douche, puis me mets
une crème légèrement parfumée sur tout le corps.
Je veux qu’absolument tout se passe bien et que ce moment, même s’il
est difficile pour moi, soit inoubliable pour Kader.
Après m’être essuyée le corps, je mets une petite robe nuisette en soie,
couleur crème, sans rien en dessous.
Dans ma tête, je fais tourner toutes les formules positives que je connais
pour me donner du courage, même si mon cœur bat à un rythme
effréné.
Je prends mon courage à deux mains et lui dis d’une traite : « Je suis
prête. »
Danser ? Ce n’est pas pour ça que je suis prête. Aurait-il mal compris ?
Je le suis quand même, obéissante, posant ma tête sur son torse. Je
souris, amusée, me rappelant de l’époque où, adolescente, je dansais
du slow dans les soirées. Ça me détend un peu plus. Je ferme les yeux
et ne pense plus à rien, me plongeant dans la douceur de la musique et
le confort des bras de Kader.
Quand je sens la main de Kader écarter mes jambes, j’ouvre les yeux
immédiatement. Il continue en relevant mes genoux, maintenant mes
jambes écartées.
Mais cette fois, il ne me répond pas. Oh, non, est-ce déjà trop tard pour
reculer ?
Au lieu d’arrêter, Kader, les mains toujours sous mes genoux empoigne
mes fesses, puis descend plus bas sa tête et…
Oh ??
…
[Alors vous avez aimé? ET vous l'avez trouvé très longue n'Est-ce-pas?
Alors la suite sera pour jeudi. c'est simple, je suis tellement crevée que si
je poste demain, ce sera juste nul!
[Bonsoirrr!!
©
Partie 35 : La faim
Mais cette fois, il ne me répond pas. Oh, non, est-ce déjà trop tard pour
reculer ?
Au lieu d’arrêter, Kader, les mains toujours sous mes genoux empoigne
mes fesses, puis descend plus bas sa tête et…
Oh ??
…
Lui tenant doucement mais fermement les fesses, j’explore son intimité
en la taquinant de ma langue jusqu’à ce qu’elle commence à pousser
des petits gémissements étouffés. Elle se cambre alors vers moi,
complètement offerte.
Sa chaleur et son odeur m’enivrent complètement et je creuse en elle,
comme assoiffé. Je suis de plus en plus excité alors que j’essaie de
toutes mes forces de me maîtriser. Il faut vraiment que je résiste…
Levant les yeux un instant, je vois Ami les yeux fermés, le visage crispé
et les mains agrippant avec force le drap. La voir ainsi prendre du plaisir
me booste encore plus que je ne le suis déjà.
Je continue alors de jouer avec elle, faisant participer mes doigts cette
fois. Je la surveille et fais attention à ses moindres réactions pour la
satisfaire encore mieux.
Au bout d’un moment, elle pose la main sur ma tête alors que j’entends
ses gémissements devenir plus saccadés et sens son corps se tendre
encore plus. J’exerce alors un peu plus de pression avec ma langue, en
introduisant mon doigt en elle, ce qui lui fait pousser immédiatement un
long cri rauque.
Mission accomplie.
Elle ouvre enfin ses yeux et me regarde furtivement, avant de les baisser
à nouveau sans rien dire. Je la sens gênée…
Moi : Ça va ?
Elle ferme à moitié les yeux, ensommeillée, et répond d’un air sincère: «
Hum… Trop bon. »
Quelques secondes plus tard, elle semble déjà être entrée dans un
sommeil profond. La voir ainsi réveille en moi un sentiment fou de
tendresse.
Je me sépare doucement d’elle en lui embrassant le front tendrement,
avant de tirer la couverture plus haut pour qu’elle ne se réveille pas.
Quant à moi, j’ai besoin de faire un tour dans la salle de bains…
***
Plus de deux heures plus tard, je suis assis dans le salon, devant la télé,
incapable de trouver le sommeil.
Malgré une bonne douche fraîche tout à l’heure, tout mon esprit est resté
tourné vers ma femme et son corps…
Quand je suis sorti de la salle de bains, elle n’avait pas bougé de là où je
l’avais laissée, encore profondément endormie. Il a bien fallu que je me
résigne au fait que ce soir n’allait pas être celui de ma libération.
J’ai alors juste baissé le volume de la musique qui jouait encore, avant
de remettre mon djellaba et sortir de la chambre.
Trainant le drap, elle avance vers moi en disant d’une voix boudeuse : «
Je me suis réveillée… Tu n’étais plus là. »
Elle entoure mon cou de ses bras, ce qui fait un peu tomber le drap et
montre la naissance de ses seins. Puis elle approche sa tête de la
mienne.
Et me voilà à nouveau excité. Cette fois, il n’y a rien à faire. Ma femme
ne va pas m’échapper. C’est elle qui me cherche là, quand même.
Il n’en fallait pas plus pour me convaincre. Sans même prendre le temps
de l’embrasser, je la soulève en me levant, faisant tomber exprès le drap
sur le sol. Je ne veux rien sur elle à part mon corps.
Mais quand elle baisse les yeux sur mon pantalon de pyjama que je suis
en train d’enlever, je vois son expression changer du tout au tout. Elle
me regarde, ou plutôt certaines parties de mon corps déjà au « garde-à-
vous », les yeux écarquillés et l’air paniquée.
Elle hoche la tête, hésitante, puis dit : « Tu ne… vas pas me faire mal ?
»
Ami : Ok.
Je descends sur sa poitrine et prends tout mon temps pour jouer avec
ses seins, que je caresse et presse légèrement, pendant que ma bouche
lèche, titille et mordille ses tétons fièrement dressés. Ça lui plait. Je
l’entends pousser à nouveau des gémissements.
Voilà. Encore un pas de franchi. Cette fois, elle n’a pas peur au contact
de ma virilité. Elle en veut même plus, apparemment.
Pour m’en assurer, j’enfouis ma main entre ses cuisses et glisse un doigt
dans son intimité. C’est bon, elle est enfin prête. Je la caresse un peu
pour la détendre encore plus puis retire ma main tout en lui écartant
délicatement les jambes à l’aide de mon genou.
Je relève la tête pour la regarder. Elle me regarde aussi, les yeux mi-clos
et la bouche entrouverte.
Je me penche dans son cou et lui suçote l’oreille tout en continuant mes
mouvements. Je sens ses tétons frotter mon torse. Mon Dieu ! Comment
j’ai pu résister à ça aussi longtemps ! Je ne veux plus jamais me séparer
de ce corps, plus jamais.
Quand elle commence à crier, tout mon être se tient prêt à accompagner
son plaisir. Je lui donne un dernier coup, furieusement, et nous
explosons tous les deux en même temps, moi poussant un râle et elle
criant mon nom…
*
*
[Hello!!
La suite est là. Elle est moins longue que ce à quoi je vous ai habitués
ces deux dernières semaines. je reviens un peu aux longueurs des
premières parties.
Enjoy ♥]
©
Partie 36 : L’éveil
Avant même d’ouvrir les yeux, je sens mon corps lourd et courbaturé.
Nos ébats de la nuit me reviennent alors en tête, et je sens une chaleur
monter de mon bas-ventre… J’ai donc vraiment vécu toutes ces choses
cette nuit, ce n’était pas un rêve...
J’ouvre enfin les yeux et vois la lumière du soleil pénétrer la chambre.
Je lui secoue l’épaule en disant d’un ton alarmé : « Bébé, il faut qu’on se
lève ! »
Hein ? Je le suis des yeux oubliant de lui répondre, ébahie par son
aisance à marcher tout nu devant moi et encore plus troublée par la
vision de… ses fesses.
Mon Dieu, qu’est-ce qu’elles sont sexy ! Et j’avais ça dans mon lit…
toutes les nuits…
Je les observe comme figée, jusqu’à ce qu’il disparaisse complètement
dans la salle de bains.
Euh, qu’est-ce qu’il vient de dire là ? Ne pas travailler ? C’est quoi cette
histoire.
Moi : Je…
K : Tu vas où ?
J’en reviens quelques minutes plus tard, après m’être vidé la vessie. J’ai
eu mal alors que je me lavais…
Moi : Mais on n’a pas posé de jour, toi aussi. On ne peut pas s’absenter
juste comme ça, sans prévenir.
Mon sourire se fige alors que je saisis ce à quoi il fait allusion. Je sens
des picotements dans mon bas-ventre en même temps que me
remontent les souvenirs de la nuit. C’était tellement… Je n’ai pas de mot.
Kader : J’ai BESOIN de passer la journée avec toi, mon amour. Pas toi ?
C’est d’une voix beaucoup plus douce que je lui dis : « On va raconter
quoi ? »
Moi : Mais…
Moi : Oui.
K : A quel moment ?
Moi : Kader…
K : Ami, c’est important pour moi. C’est ce que je crains le plus, tu vois.
Je ne veux plus jamais te faire mal.
Moi : Mais ça n’a pas duré ! J’ai eu mal juste au début quand tu…
entrais.
Moi : Mais parce que… c’était bon aussi. Je ne voulais pas que tu
t’arrêtes.
Moi : Non, je t’assure. Après c’était juste… c’était... Je ne sais pas trop.
Moi, la langue plus déliée : Par contre, j’ai eu mal tout à l’heure, en
faisant pipi.
K : Ah bon ? Comment ça ?
Moi : Euh… mais c’est passé hein. Je le disais juste comme ça.
Je m’arrête, hésitante.
K : Dis-le chérie.
Il découvre mes seins et passe son doigt autour d’un téton, effleurant ma
peau.
K : Ça, ça t’excite ?
K : Et ça ?
K, la voix enrouée : Et ça ?
C’est avec difficulté que j’ai dû quitter les bras de ma femme ce matin,
mais il fallait que je sorte, depuis le temps que je voulais faire ce que je
m’apprête à faire.
De toute façon, c’est tous les jours un peu plus difficile de quitter Ami,
surtout depuis qu’on est enfin devenu de vrais amants. Depuis ce
dimanche béni jusqu’à aujourd’hui samedi, deux semaines se sont
passées et pas une nuit sans que nous ayons fait l’amour, au moins une
fois.
Pourtant, même si ma faim est loin d’être assouvie, je suis encore très
étonné que Ami réponde aussi positivement à mes assauts. Que dis-je…
elle les cherche même des fois.
En fait, je crois que j’ai dévergondé ma femme. Et ma foi, j’en suis
l’homme le plus heureux du monde.
Même quand je la sens très fatiguée, elle s’excite dès qu’on se
rapproche d’un peu trop près, et se donne ensuite complètement à moi.
Il m’arrive même d’insister pour qu’elle se repose. Mais elle me regarde
toujours avec ses yeux boudeurs, me demandant si je ne la désire plus.
Moi, ne plus la désirer… Hilarant ! Je n’ai jamais besoin de plus pour me
laisser convaincre.
Il est grand temps que Badou et moi ayons une petite discussion.
[Bonsoir !!
*
*
*
©
Partie 37 : La réconciliation
Il est grand temps que Badou et moi ayons une petite discussion.
***
Badou reste à la porte alors que je suis déjà entré, attendant qu’il se
décide à accepter de me parler.
Sans me regarder, il dit : « Kader, je n’ai pas envie d’avoir des
problèmes avec toi. Je suis fatigué. Sors de chez moi. »
Badou : Je n’ai vraiment rien à te dire. Ami a fait son choix. Parfait. C’est
à ses risques et périls. Maintenant, vous faites votre vie comme vous
l’entendez, mais laissez-moi en dehors de ça.
Moi : Oui, je m’en rends bien compte. Et j’essaie tous les jours de me
racheter. Qu’en est-il de toi ?
Badou, énervé : Parce que je lui ai fait quelque chose moi ? De quoi j’ai
à me racheter ?
Moi : Bien sûr que tu lui as fait quelque chose. Votre amitié compte pour
elle, tu vois. Vous êtes-vous reparlé une seule fois depuis que tu es
passé chez nous ?
Badou :…
Le visage de Badou s’assombrit. Pas que j’en sois étonné, mais je vois
que c’est un sujet sensible.
Badou : N’essaie pas de comparer ton acte ignoble avec notre problème
à Karine et moi.
Et mes prières s’exaucent car Badou referme la porte sans rien dire.
Puis il se retourne et se dirige à l’intérieur sans me regarder. Je le suis et
on s’assoit tous les deux dans le salon.
Il ne fait même pas l’effort de se tourner vers moi. Je cherche mes mots,
ne sachant par où commencer devant son attitude. En même temps, je
ne m’attendais pas vraiment à ce qu’il me reçoive les bras ouverts. Mais
il faut que je lui parle. Je ne le fais pas seulement pour moi, mais aussi
et surtout pour ma femme.
Je me décide enfin à briser le silence en lui disant : « Je ne t’en veux pas
de m’en vouloir… Je m’en veux moi-même quoi qu’il en soit. Ce que j’ai
fait à Ami est quelque chose d’horrible… Ok, on est mariés maintenant,
mais au fond de moi je ne peux pas prétendre être tout le temps heureux
et je sais que c’est pareil pour elle. L’avoir à mes côtés qui me montre
tous les jours son amour malgré ce que je lui ai fait est une bénédiction
et une punition en même temps. Je regrette… Je donnerais n’importe
quoi pour retourner en arrière et pouvoir changer les choses, même
aujourd’hui, et être dans l’impossibilité de le faire me torture tout
douement…
Je me demande tous les jours comment j’ai pu lui faire ça à elle. Je n’en
reviens pas encore… Je sais très bien que ça n’a rien à voir avec ce qui
s’est passé entre toi et Karine.
Tu as raison de penser que je ne mérite pas Ami. Je pense pareil que
toi.
Mais elle est quand même ma femme, c’est son choix et personne
n’arrivera à me séparer d’elle. »
Je m’arrête une seconde et regarde Badou dont l’attitude n’a pas évolué
d’un iota. Ce qui ne m’arrête pas. Car en fin de compte, j’ai juste besoin
de parler enfin librement de ce qui me ronge, quel que soit ce que Badou
en pense.
Mais je n’ai pas seulement accepté cette vérité. J’ai découvert aussi que
la seule manière que j’ai d’être normal, c’est, paradoxalement, d’être aux
côtés de ma femme. Peut-être parce que le fait que je lui ai fait tant de
mal a été un choc pour moi, mais voilà. Elle… me calme... Elle m’éduque
en quelque sorte. Elle m’a soutenue là où personne ne m’aurait soutenu.
Elle a un cœur énorme. Elle me change… me rend plus fort face à mes
bas instincts.
J’ai honte de le dire, mais avec une autre femme, je ne me ferais pas
confiance. Honnêtement…
Pourtant, aux côtés de la mienne, je suis sûr et certain que je vais arriver
à changer. Je me souviendrais toujours du mal que je lui ai déjà fait. Et
je ne pourrais jamais lui en faire à nouveau.
Je veux la rendre heureuse plus que toute autre chose. Je l’aime... Elle
est ma bénédiction, la plus belle chose qui me soit arrivée. Elle est
juste… »
Je prends mon téléphone pour appeler Kader et vois qu’il m’a déjà
envoyé un message : « Bon réveil ma femme. Je suis sorti et je ne rentre
pas maintenant. Appelle-moi quand tu veux. »
Bon, comme il va bien, je vais d’abord prendre une douche et prier avant
de l’appeler.
Environ une heure plus tard, j’entends enfin la voix de mon chéri : «
Coucou mon amour. Bien dormi ? »
Moi : Mouai... Ce n’est pas moi qui ronfle la nuit, en tout cas.
Moi : Ok, mais ne t’inquiète pas pour moi. Je peux rentrer seule.
K : Non, tu rentreras avec moi, c’est mieux. Reste autant que tu veux et
ne te soucie pas de l’heure. Tu me fais signe quand tu veux rentrer et je
viens te prendre ok ?
Moi : Ok.
Un peu moins de trois heures plus tard, je suis chez Karine et on est
déjà toutes les deux dans la cuisine en train de préparer à manger.
Karine n’attendait que moi pour commencer car aujourd’hui on a décidé
de manger du « mafé » et elle ne sait pas le faire toute seule.
Elle soulève son pull-over pour me montrer son ventre presque plat.
K : Ne m’énerve pas avec ça Ami. Ce n’est pas revenir dans ma vie que
Badou souhaite. Il a juste honte de lui-même et essaie de sauver la face
en sachant que de toute façon ce bébé naîtra qu’il le veuille ou non.
K : Et pourquoi je ferais ça ?
Moi : Parce que tu l’aimes et lui aussi t’aime, et vous allez avoir un
enfant. Combien de fois il a essayé de te parler ? Au moins, écoute ce
qu’il a à dire avant de tirer des conclusions hâtives.
Moi : Tu es trop têtue Karine… Vous êtes-vous une fois parlé depuis
votre dispute chez moi.
Moi, avec espoir : Ah bon ? Et alors, vous vous êtes dit quoi ?
K, la voix enrouée : Arrête stp… Je ne sais pas ce que je veux, ok. Je lui
faisais confiance mais après tout ce qu’il m’a dit là… je ne peux pas
oublier comme ça.
Moi : Arrête de penser au pire. Je suis sûre qu’en fin de compte, tout
s’arrangera.
K : Oui, bref. Je m’en fous un peu… L’essentiel c’est que mon bébé aille
bien.
Moi : Tu as raison.
Moi : Oh, c’est bon. Ne me casse pas les oreilles. On l’a fait. T’es
contente ?
Moi : Eh ! Tu ne parles pas des fesses de mon mari, d’accord. Non mais
!
K : Parce que ça fait partie de ton vécu, aussi. Ne l’envoie pas aux
oubliettes. Le danger, c’est que le jour où ça ressort, ça peut te faire très
mal et pas seulement à toi, mais à Kader aussi. Vous en avez parlé au
moins une fois ?
Moi : Pour quoi faire ? Et depuis quand tu t’inquiètes pour Kader, toi ?
K : … Mais encore ?
Moi : Tu veux que je te raconte comment je fais l’amour avec mon mari ?
Je finis par lui donner satisfaction : « C’était trop trop bon ! Je n’en
reviens pas encore… »
Karine crie et tape des mains comme une petite fille : « Enfin ! Ma copine
a goûté la chose, oh ! Il était temps hein ! Tu as vu ce que tu as raté
toutes ces années ! »
K, d’un ton suppliant : Allez stp stp. Ça me manque moi. Ça fait des
mois, oh ! Fais plaisir à ta copine.
Moi : Oui mais je ne peux pas parler de certaines choses. C’est trop
intime.
K : Dis m’en au moins un peu plus. Aie pitié d’une femme enceinte.
K, le regard suppliant : …
K : Ma copine !
Moi : La toute première fois, il ne m’a pas vraiment fait l’amour… Enfin si
mais pas avec… le « trésor », tu vois ?
K : Ami, t’es sérieuse là ? Mais vous faisiez quoi avant avec Kader ? Ou
Marc ou tous tes autres copains ?
K : Wow. Moi qui croyais savoir tout de toi… Et je suppose que tu n’as
jamais été en dessous d’une ceinture non plus… si tu vois ce que je
veux dire ?
Je vois bien mais je refuse de répondre et lui donner une autre raison de
se moquer de moi.
Moi : On faisait des choses quand même. Bref, ça n’a plus d’importance.
Aujourd’hui en tout cas, tu ne peux rien m’apprendre, ma belle.
K : Oh, n’en sois pas aussi sûre ! On ne joue pas dans la même
catégorie, toi et moi… Si tu savais tout ce qu’on a fait avec…
Elle s’arrête d’un coup, réalisant qu’elle allait parler de Badou. Son
visage s’assombrit.
Moi : Hum. C’est bon en tout cas. Si j’avais su, j’aurais commencé dès le
premier jour.
K : Pourquoi ça me dérangerait ?
***
Bien des heures plus tard, nous venons de passer avec Karine une
soirée trop agréable. J’adore être avec mon mari mais il suffit que je
retrouve Karine pour me rendre compte que rien ne peut remplacer les
moments qu’on passe ensemble. Ceci même si on se chamaille tout le
temps. Mais au fond c’est ça aussi qu’on aime.
J’ai appelé Kader pour qu’il vienne me prendre. D’ailleurs il n’était pas
encore rentré chez nous. Alors que je l’attends, je me demande quand
même où il a bien pu passer toute la journée.
Je décide d’en faire part à Karine : « Tu sais quoi, je n’ai aucune idée de
l’endroit où Kader a passé la journée. Il fait exprès de ne pas me le
dire... »
K : Bien sûr. Il est beau gosse et il y’a plein de jolies filles à Paris.
Pourquoi il se priverait ?
K : Non, c’est toi qui es conne de penser à des choses pareilles. Le mec
est fou de toi. Il n’y a aucun moyen qu’il aille voir ailleurs.
K : Ne lui demande pas ça. Vous devriez parler plutôt d’autre chose.
Moi : De quoi ?
K : Du drame que vous avez vécu. Tant que tu ne lui auras pas
pardonné, vous n’avancerez jamais vraiment. Mais pour ça, il faut
d’abord que vous en parliez ouvertement au lieu de reléguer ça en
arrière-plan.
Moi : Karine, à quoi ça va nous avancer ? Ce qui est arrivé est arrivé et
nous sommes passés à autre chose. Qu’est-ce qui te prend tout d’un
coup à insister sur ça ? Kader et moi allons très bien. Tout ce que nous
vivons va finir par effacer le passé. J’en suis sûre.
Je regarde Karine et n’en reviens pas qu’elle dise tout ça. Mais enfin,
qu’est-ce qui s’est passé ? C’est un effet secondaire de la grossesse ou
quoi ?
Je n’ose même pas lui poser de question de peur qu’elle change d’avis
sur Kader.
K : Pourquoi tu me demandes ça ?
Kader, souriant : Salut Karine. Tu vas bien ? Mme Hann ne t’a pas trop
fatiguée ?
Kader rit et ils se font la bise pendant que moi je les observe, n’en
croyant ni mes yeux ni mes oreilles.
Plus pour la forme, je lui demande, déjà ravie : « C’est pour moi ? »
Hein ?!
Karine prend le sac et les fleurs que mon mari lui tend, le visage éclairé
d’un large sourire.
Elle s’écrit : « Des fleurs et… de la glace ! Hum Kader, tu sais comment
traiter une femme toi. »
Et moi, je suis bouche bée devant le spectacle qui se déroule sous mes
yeux. C’est officiel, j’ai raté un épisode et un gros.
Plus d’une heure plus tard, nous sommes allongés sur le canapé avec
notre gros pot de glace, regardant la télé en discutant.
Mais c’est le moment propice pour poser la question qui me brûle les
lèvres.
Kader : Hum ?
Kader :…
Moi : Je veux juste savoir, c’est tout… Mais si tu ne veux pas répondre,
c’est que la réponse est oui.
Moi : Oui.
Quoi ? Donc Kader a été avec une autre fille que moi !
Moi, mentant : Ce n’est pas grave… Je veux juste savoir. C’était qui ?
Moi : Tu as aimé ?
Kader : Aimer quoi ? Ami !
Moi : Ok.
On reste un instant sans parler, jusqu’à ce que Kader dise : « Il n’y a rien
de bon à la télé. On se fait un film ? »
Moi : …
K, moqueur : Mon amour à moi, ne boude pas toi aussi. Tu sais bien qu’il
n’y a que toi qui compte pour moi. Si on était encore ensemble, je ne
connaîtrais jamais une autre fille.
Je sais déjà où tout cela va finir, mais je ne lâche pas l’affaire : « Tu veux
juste… ».
Les lèvres de mon mari sur les miennes me font taire immédiatement. Je
ne me fais pas prier pour répondre immédiatement à son baiser alors
que sa main glisse déjà sous mon short.
***
Plus d’une heure plus tard, je suis dans les bras de mon mari, sur le
canapé, comblée. Je m’endors doucement, me promettant
intérieurement de bouder plus souvent à l’avenir.
*
*
*
[Hello dears !
Voici votre suite du samedi, qui arrive 2/3 parties avant la fin.
Hope you enjoy really ]
*
*
*
©
Partie 38 : La demande
Je sais déjà où tout cela va finir, mais je ne lâche pas l’affaire : « Tu veux
juste… ».
Les lèvres de mon mari sur les miennes me font taire immédiatement. Je
ne me fais pas prier pour répondre immédiatement à son baiser alors
que sa main glisse déjà sous mon short.
***
Plus d’une heure plus tard, je suis dans les bras de mon mari, sur le
canapé, comblée. Je m’endors doucement, me promettant
intérieurement de bouder plus souvent à l’avenir.
***
On part ce soir et j’ai fini plus tôt pour rejoindre Kader à la maison. Lui
n’a pas travaillé cet après-midi, disant qu’il préférait s’assurer que tous
nos bagages étaient bien bouclés. L’excuse ! Je n’y crois pas du tout
mais il est tellement mystérieux depuis quelque temps que je ne me suis
pas fatiguée à essayer de comprendre. Surtout que les bagages en
question, on les a déjà tous préparés hier. Bref…
Il est bien chez nous quand j’y arrive. Mais nous n’y restons pas
longtemps. Nous allons à Nice en avion et ne devons pas perdre trop de
temps pour ne pas rater le vol.
Kader me dit d’aller vite me préparer, le temps qu’il appelle un taxi pour
nous emmener à l’aéroport. Comme ça on n’aura pas à payer des frais
de parking pour toute une semaine.
Arrivés en bas, je ne vois pas de taxi garé alors que Kader m’a dit avant
de descendre qu’il était arrivé.
Voyant qu’il se dirige vers le parking extérieur de l’immeuble, je lui
demande : « Et le taxi alors ? »
Kader : Euh… je croyais qu’il était déjà arrivé. Viens je récupère quelque
chose dans ma voiture.
Ma voiture ?!
Kader : La tienne.
N’y croyant toujours pas, je regarde devant moi et vois plusieurs voitures
garées, la tête trop embrouillée pour faire attention à leur aspect. Puis
j’appuie sur le bouton de déverrouillage, les doigts tremblants. Et je vois
les feux de l’une d’entre elles clignoter. Non ! Ce n’est pas possible, je
n’arrive pas à y croire.
Je me tourne vers Kader en criant : « Tu es fou ?! »
Il ferme la porte et fait le tour pour s’assoir à son tour. Je regarde partout
dans la voiture alors que Kader démarre.
Moi : Elle est vraiment à moi ?!
Moi, jouant déjà avec le tableau de bord : Oh ! Merci mon cœur. T’es
adorable.
Moi : Super. Je n’en ai jamais conduit, mais il parait que c’est plus
simple.
K : Comment ça encore ?
Je préfère mentir et lui dire : « Euh… Je veux dire… Une autre surprise,
encore… après la voiture ?
Moi : Hum, c’est sûr ça ? Je veux que ma voiture soit entre de bonnes
mains moi.
***
Il est plus de 20h, heure locale et nous décidons de prendre une douche
avant de sortir se promener et chercher un endroit où manger.
La salle de bain est très grande et possède un grand miroir tout au long
du mur. J’adore. Après une agréable et longue douche, je me mets en
sous-vêtements que j’ai choisis affriolants pour préparer l’après-dîner.
Ensuite, tentée par le miroir gigantesque, je m’entraine à prendre des
postures sexys (du moins je crois qu’elles le sont) à adopter avec Kader
plus tard, histoire de l’exciter.
Je me prends carrément pour un mannequin de lingerie. Et que je
redresse la poitrine… et un doigt sur les lèvres… et la main sur la
hanche… et les fesses cambrées... Je finis par renoncer avec cette
dernière tentative, découragée. Dieu ne m’a vraiment pas dotée à ce
niveau. Je boude en sortant ma crème pour le corps, quand j’entends un
bruit derrière moi. Je lève le regard sur le miroir et vois Kader.
Kader, amusé : Oh, quelque part entre Naomie Campbel et Tyra Banks.
Quelques instants de plaisir plus tard, il fait glisser le string qui tombe sur
mes chevilles. Puis il recule un peu et j’ouvre les yeux pour le voir en
train de se déshabiller. Je tente de me retourner pour lui faire face, déjà
prête à le recevoir, mais il arrête mon mouvement en posant sa main sur
mon dos. Je ne bouge plus, obéissante.
***
J’ai dû finalement prendre une autre douche, avec Kader cette fois. Nous
sommes ensuite sortis pour nous promener dehors, profitant de l’air
doux du soir.
A quelques dizaines de mètres de marche de l’hôtel, nous tombons sur
un restaurant isolé, très typé et simple. Il est tenu par le vieux Habib [pub
pour lui], qui nous fait passer une bonne soirée non seulement avec sa
cuisine délicieuse et pas chère, mais aussi par ses attentions et sa
discussion passionnante sur ses expériences et ses « amis » en France.
K : Tout de suite les grands mots. Je t’ai quitté à peine deux minutes et
tu parles d’abandon... Et tu me voyais en plus… Tu aimes les problèmes
toi, maintenant…
Moi :…
Quand je me réveille presque trois heures plus tard, je ne vois pas Kader
dans la chambre. Il doit sûrement être sorti se promener, s’étant réveillé
avant moi. Je prends une douche et voyant ensuite Kader toujours pas
revenu, je m’habille d’une jolie tunique près-du-corps, en voile bleu clair,
assortie d’un pantalon de la même couleur. C’est simple, léger et joli. Je
me maquille et me fais un brushing.
Kader ne tarde pas à revenir ensuite. Quand il ouvre la porte, je vois qu’il
est déjà habillé pour la soirée aussi. Tout en blanc, il est juste trop beau,
surtout quand il sourit en me voyant. Je sens le bonheur d’être sa femme
envahir mon cœur.
***
On arrive quelques minutes plus tard au restaurant où une table nous est
proposée mais Kader me propose d’aller d’abord nous promener un peu
sur la plage, histoire de laisser l’air frais de la mer nous ouvrir encore
plus l’appétit.
Bien sûr, j’accepte et on se retrouve main dans la main sur la plage,
marchant lentement.
Kader : Ce n’est pas assez pour moi… Ami… je sais qu’il manque
quelque chose. On a un passé…
Moi :…
K : Tu refoules des sentiments en toi. Tout s’est passé si vite entre nous.
Je ne voulais pas qu’on se marie comme ça. Si je n’avais pas autant eu
envie de t’avoir à mes côtés, j’allais refuser que ça se passe ainsi... Tu
vois, je connais tes rêves, ceux que tu as eus depuis toute petite. Tu
m’en parlais, tu te rappelles ? Le grand mariage, la robe blanche, tout
ça… Je n’ai pas oublié. Si je ne t’avais pas fait du tort, c’est ce que tu
aurais eu. Et je pense que c’est ce que tu mérites.
Mon cœur bat vite alors qu’il sort une petite boîte bleue couverte de
velours et me la tend en levant ses yeux sur moi.
Kader : Encore ?
Moi : Bébé, lève-toi, tu es complètement…
Une voix m’interrompt soudainement derrière : « Juste dis oui oh, qu’on
en finisse. »
Karine, en venant vers moi : « Un homme est à genoux devant toi Ami.
Tu peux t’occuper de ça d’abord ? »
Quoi ? Ah oui c’est vrai. Mais c’est quoi tout ça ? Pourquoi Kader me
demande en « mariage » et comment ça se fait que Karine soit là ?
Karine est maintenant à côté de nous quand Kader répond, l’air heureux
: « Par avion, je suppose… Je l’ai invitée à nous rejoindre. Elle est
arrivée ce matin. »
Elle me dit en riant : « Tu ne veux pas regarder ce qu’il y’a dans la boîte
?»
Puis il prend ma main et celle de Karine, nous obligeant à lui faire face.
On le regarde toutes les deux, ne comprenant rien à ce qu’il fait.
Il regarde derrière nous puis se tourne vers Karine, en lui disant : «
Reste calme, stp. »
Moi : Badou !
Sans rien dire de plus, Badou se met devant elle et lui dit simplement : «
Je te demande pardon… Je t’aime et je veux ce bébé, avec toi. »
Puis il s’agenouille aussi. Décidément, les films des blancs ont fait leurs
effets auprès de nos hommes machos.
Wow. C’est tellement mignon que je sens des larmes monter à mes
yeux. Je me colle à Kader derrière moi, qui me serre doucement. Je
regarde Karine, le cœur battant. Je prie fort pour qu’elle dise oui. Tout
dépend d’elle maintenant.
Je l’observe et vois plusieurs sentiments passer sur son visage :
l’incompréhension, la peur, puis l’émotion. Elle commence à pleurer.
Badou est toujours agenouillé et a l’air d’hésiter entre se lever ou rester
dans cette position. Il regarde Kader, sans doute pour l’appeler à l’aide.
Avant que celui-ci ne réagisse, je quitte ses bras et prends Karine par les
épaules, lui chuchotant à l’oreille : « N’oublie pas que tu l’aimes. »
Je lui dis plus fort pour qu’il entende : « Elle a dit oui ! »
Je me retourne alors vers Kader, les larmes coulant sur mes joues,
tellement heureuse que je ne sais pas quoi lui dire. Je sens une énorme
boule d’émotion envahir ma gorge. J’ai envie de lui crier mon amour pour
lui, lui montrer toute la force de ce que je ressens.
*
*
*
[Et voilà. Je vous donnerai un rendez-vous plus tard, je ne sais pas si ce
sera lundi ou mercredi…
[Hello!!
*
*
©
Partie 39 : La préparation
Je lui dis plus fort pour qu’il entende : « Elle a dit oui ! »
Je me retourne alors vers Kader, les larmes coulant sur mes joues,
tellement heureuse que je ne sais pas quoi lui dire. Je sens une énorme
boule d’émotion envahir ma gorge. J’ai envie de lui crier mon amour pour
lui, lui montrer toute la force de ce que je ressens.
Je n’en reviens pas encore qu’on soit tous les quatre assis là, Ami,
Kader, Badou et moi, à des milliers de kilomètres de chez nous. Nous
sommes attablés sur la terrasse du restaurant de l’hôtel, mangeant et
discutant comme nous ne l’avons jamais fait. Je réalise en effet que c’est
la toute première fois que nous nous retrouvons tous les quatre,
ensemble. Pourtant, malgré tous les événements arrivés sur presque
deux ans de relations, l’ambiance est détendue et tout le monde a l’air
heureux.
Je reste un moment plongée dans mes pensées, suivant la discussion
de loin. Avec cette prise de recul, je me rends quand même compte que
cette situation a de quoi être étonnante. La vie peut parfois prendre de
ces tours…
Nous sommes fiancés depuis moins d’une heure, alors que juste avant
c’était encore une « persona non grata » dans ma vie.
En fait, j’exagère un peu sur ce point. Car si je suis vraiment honnête
avec moi-même, cela fait déjà un petit moment que je pense à
l’éventualité de lui pardonner et de le laisser entrer à nouveau dans ma
vie, ou plutôt de celle du petit garçon que nous allons avoir. De toute
façon, quel choix j’avais ? Que je le veuille ou non, c’est son père et il a
finalement pris la décision de le reconnaître et jouer son rôle.
Et, que je le veuille ou non, je suis toujours amoureuse de lui.
Mais malgré ce que me disait Ami, je ne croyais pas jusque-là qu’il avait
envie de se remettre avec moi, en particulier. D’où ma surprise quand,
tout à l’heure, je l’ai vu ici et qu’en plus il m’a demandé en mariage.
J’étais juste choquée. Pendant un moment, j’ai voulu refuser, repensant
à ce qu’il m’avait fait. Puis Ami m’a dit l’une des deux seules choses qui
pouvait me faire changer d’avis, juste le simple fait que je l’aime. Ce
serait me mentir que de prétendre le contraire.
L’autre fait non négligeable est qu’il est le père de mon bébé. La
meilleure chose qui puisse arriver à mon fils est de grandir auprès de
deux parents qui s’aiment.
Seulement… est-ce que Badou m’aime vraiment ? Qu’est-ce qui me dit
qu’il ne fait pas ça juste par devoir ou pour racheter son geste ? S’il
m’aimait vraiment, nous aurait-il rejetés, le bébé et moi, la première fois
?
Badou, affectueusement : « Ça va ? »
Je hoche la tête en souriant sincèrement, remarquant l’affection dans le
regard qu’il pose sur moi à cet instant.
Peut-être bien qu’il est amoureux de moi, finalement…
Nous nous retournons tous les deux sur Kader quand il dit : « Karine,
dis-nous si tu commences à te fatiguer. Tu as voyagé et surtout, on
n’attend pas de bébé nous… »
Moi, en lui souriant : Merci Kader. Mais je suis juste enceinte, pas
malade.
J’aurais quand même dû me douter quand il m’a expliqué son plan qu’il
y’avait anguille sous roche. Même en voulant faire une surprise à Ami en
lui faisant sa demande ici, il n’y avait pas vraiment de raison qu’il veuille
que moi, seulement moi, les rejoigne pour y assister. Je me souviens
m’être demandé à quoi cela allait servir que je sois présente, mais je ne
m’y suis pas attardée plus que ça. J’étais surtout contente pour Ami et à
l’idée qu’on puisse passer des vacances ensemble.
Maintenant, les choses sont claires pour moi…
Alors que je pensais être la complice de Kader dans son plan débuté
depuis des semaines, je découvre qu’en réalité, je faisais moi-même
partie du plan. En fait, les deux seules personnes qui savaient tout
étaient lui et Badou.
J’ai fini par accepter et il est venu me rejoindre dans un café après le
boulot. Ce jour-là, j’ai découvert un Kader que je ne connaissais pas. Il
m’a parlé très honnêtement et j’ai compris que, malgré tout, il ne
souhaitait rien d’autre que le bonheur de sa femme. J’ai senti de la
sincérité dans ses paroles et, sans tolérer ce qu’il lui a fait, j’étais quand
même assez rassurée sur le futur commun de ces deux-là. J’espère
juste que Ami trouvera en elle la force de lui pardonner un jour.
En tout cas, pour ma part, je l’ai revu plusieurs fois depuis lors et on s’est
rapproché l’un de l’autre. J’ai presque envie de dire qu’il est mon ami
maintenant.
Je l’ai aidé à choisir la voiture et la bague de fiançailles pour Ami. Il fallait
voir comment il était excité et impatient de les lui offrir. Mais il a fallu
attendre le mois de mai pour avoir des vacances et la voiture n’était de
toute façon pas encore livrée par le concessionnaire.
Finalement, je découvre que la magnifique bague au prix scandaleux
que j’ai moi-même choisie avec Kader pour Ami, m’était en réalité
destinée.
J’ai rarement passé une soirée aussi agréable que celle que je viens de
passer, en compagnie de mon mari et de mes deux meilleurs amis. Elle
était juste parfaite.
Tout ceci est tellement parfait que quelque part, j’ai une certaine crainte
que ce soit trop beau pour être vrai et que quelque chose se passe qui
va tout gâcher…
Ce soir, je ne veux pas que ce soit lui qui s’occupe de moi. Je suis déjà
une femme comblée et la seule envie que j’ai est de combler aussi mon
homme.
***
Quant à moi, Omar, c’est mon aîné. Je le considère comme mon premier
bébé. Je ne sais pas pourquoi, peut-être les sentiments qui me lient à
ses parents, mais ce petit être me touche d’une manière spéciale. Je
l’adore.
Maman Dieynaba est venue nous rendre visite l’été dernier. Elle est
restée deux semaines avec Kader et moi, avant de partir en Italie pour
rendre visite à sa sœur. Ma relation avec elle s’est encore plus soudée
durant ce petit séjour. J’avais pris quelques jours de congés pour qu’on
passe du temps ensemble, ce qu’elle a beaucoup apprécié. Ayant toutes
les deux le même gros défaut d’acheteuses compulsives, on s’en est
donné à cœur joie avec la carte bancaire de Kader et un peu la mienne
quand même. Mais ma belle-mère est bien plus grave que moi, elle a
carrément la folie des grandeurs, elle. Madame ne fait ses courses
qu’aux Galeries Lafayette. Et qui paie dans tout ça ? Kader bien sûr.
Moi ça me faisait rire mais ce n’était pas du tout le cas de mon pauvre
mari qui, malgré tout, n’osait rien lui dire.
Sinon, tout s’est plutôt bien passé entre elle et moi, ce qui me rassure
beaucoup. Je prie pour que ça continue ainsi, surtout quand on rentrera
au Sénégal un jour. Avec toutes les histoires qu’on raconte sur les
relations belle-mère et belle-fille, j’ai un peu de crainte… Mais quoi qu’il
puisse se passer dans le futur entre nous deux, je suis convaincue que
c’est quelqu’un de bien, qui a des défauts comme tout le monde. De
plus, elle adore son fils et le fait passer avant tout, ce qui nous fait un
point en commun loin d’être négligeable.
Quant à ma maman, elle s’est peu à peu remise du décès de papa mais
maintient sa décision de ne plus jamais se remarier. C’est peut-être
égoïste de ma part et de celle de mes frères et sœurs, mais on ne fait
rien pour l’en dissuader, malgré les demandes qu’elle a déjà reçues. Un
des meilleurs amis de papa a fait d’ailleurs partie de ses prétendants et
lui en a beaucoup voulu pour son refus. Il semble que ce soit de l’avis
général quelque chose de normal qu’un proche du défunt « reprenne » la
veuve, mais pour ma part je ne comprendrai jamais ça. Et heureusement
que maman a refusé parce que je l’aurai mal pris qu’elle accepte de se
marier avec cet homme.
Tout le reste de la famille va très bien.
Maman est couchée sur le lit alors que je range ses affaires et celles de
Mariétou dans le placard. Je sens son regard sur moi et me tourne vers
elle en lui souriant. Je suis tellement contente qu’elle soit là… chez moi.
Moi, en riant : Comment ça comme une vraie femme. JE suis une vraie
femme.
Moi : Non mais… Bien sûr qu’il mange ce que je cuisine. Qu’est-ce que
tu crois ? Je cuisine très bien. Qui a préparé les côtelettes d’hier soir à
ton avis ?
Moi : Mais c’était normal maman. Tu n’arrêtais pas de lui dire de m’aider
et en plus tu me surveillais derrière les vitres là. Je te voyais tu sais. Tant
qu’à faire, j’ai préféré la laisser continuer hein. Comme ça au moins tu
étais tranquille. De toute façon, c’est moi qui avais déjà fait l’essentiel,
alors bon... Et puis j’ai préparé un jour du couscous aussi. Cette fois-là,
personne ne m’a aidé.
Maman, l’air déterminée : Je lui raconterai tout dès ce soir. D’ailleurs j’ai
ramené des photos à lui montrer. Il verra ta bouche sans dents là que tu
avais à 6 ans.
Et elle se met à rigoler. Moi, je n’ai pas du tout envie de rire. Je boude en
continuant de ranger ses affaires. Elle verra tout à l’heure quand elle va
manger mon « soup kandj ». Elle ne va même pas en revenir.
J’ouvre le sac et vois ce qui semble être des sets de draps et taies
d’oreillers.
Maman : C’est mon drap là, celui que tu voulais me piquer quand tu l’as
vu à Saint-Louis. Je ne l’ai mis qu’une fois. Et l’autre je te l’ai commandé.
Oumou a le même.
Je tente de la consoler : « On est là, nous, maman. Tous tes enfants qui
t’aiment… Tu es notre maman. Occupe-toi de nous. On t’aime tellement
et… tu vas voir, on va te rendre heureuse. Tu auras tout ce que tu
souhaites. Je te promets… »
Mais mes mots ne la consolent pas. Elle pleure de plus belle. Je ne l’ai
même pas vue pleurer à ce point il y’a un an et demi quand papa est
décédé. J’ai peur qu’elle ait retenu une grande partie de sa peine en elle
depuis lors. Et le fait de nous voir, Kader et moi, fait peut-être remonter
des souvenirs…
Je la tiens longtemps dans mes bras, pleurant doucement avec elle et lui
caressant le dos. Je me sens tellement impuissante.
Toute la peine d’avoir perdu papa remonte au-dessus, accompagnée de
celle de voir ma maman pleurer si amèrement.
C’est finalement Mariétou qui, entrée dans la chambre nous interpelle et
nous oblige à nous calmer.
***
Kader, se penchant sur mon oreille : Oui. Mais avant ça, je me disais
qu’on pourrait s’isoler quelques minutes dans la salle de bains, toi et
moi. J’ai un truc très important à te dire.
Moi : Bébé, t’es pas sérieux quand même. Ton papa, ta maman, ma
maman et tout ce beau monde, sont assis dans le salon et toi tu veux
qu’on passe devant eux et qu’on aille faire des choses dans la salle de
bains.
Moi, tentant difficilement de reprendre mon sérieux : J’ai dit non ! Allez
va t’assoir si tu veux manger. Badou et Karine vont arriver d’une minute
à l’autre en plus.
[Hello!!
*
©
Partie 40 : Le lien
Moi, tentant difficilement de reprendre mon sérieux : J’ai dit non ! Allez
va t’assoir si tu veux manger. Badou et Karine vont arriver d’une minute
à l’autre en plus.
Kader recule et je me tourne pour le regarder.
Il se tient à carreau, affichant une mine faussement triste en tirant la
lèvre comme un enfant à qui on refuse un bonbon. Il me lance : «
Méchante femme. »
***
Cette dernière et maman sont dans le salon, avec Mariétou et mon petit
Omar. Elles sont chargées de s’occuper de lui aujourd’hui. Elles sont
déjà habillées de leurs grands boubous froufroutants et n’arrêtent pas de
venir dans ma chambre et dans celle d’à côté pour nous presser. Elles
vont réussir à nous stresser ces deux-là !
Karine est déjà prête, elle. Aminata l’a coiffée et maquillée. Et debout là
derrière moi, dans sa robe bleue ciel, elle est juste à tomber. J’en
connais un qui va avoir hâte d’être à ce soir.
D’ailleurs, j’en connais un autre qui, lui, n’est pas content du tout en ce
moment. Monsieur mon mari. On a eu une petite dispute juste avant qu’il
parte tout à l’heure. Je lui avais demandé de dormir à l’hôtel les deux
prochains jours pour que je puisse passer du temps seule avec maman
avant qu’on parte en voyage. Il avait accepté, mais quand tout à l’heure
j’ai répondu à ses « assauts » en lui disant que ce ne serait pas avant
trois jours, il a rapidement changé de tête.
Lui croyait que ne pas dormir ensemble voulait simplement dire ne pas «
dormir » ensemble, juste dormir. Il a prévu par exemple qu’on se
retrouve dès après le mariage à l’hôtel. Sauf que moi, ce n’était pas du
tout ça dans ma tête et je le lui ai expliqué. Le moins que je puisse dire
est que ça ne lui a pas fait plaisir du tout. Il faut dire que je l’ai un peu
mis au régime depuis une semaine environ, prétextant tout et n’importe
quoi pour refuser. En plus, tout ça juste après ma période de
menstruations.
En réalité, c’est fait exprès, mais lui ne le sait pas. Je lui prépare
tellement de choses que j’avais envie de l’affamer avant, pour mieux le
satisfaire. Bref, j’ai senti tout à l’heure que j’avais peut-être un peu trop
exagéré.
Du coup, je l’ai enlacé, embrassé, câliné un peu pour le calmer. Il s’est
un peu déridé mais voyant son expression quand il sortait de la
chambre, je sentais qu’il n’en resterait pas là.
Elle est droite et très près du corps sur toute la longueur, en s’évasant
légèrement au niveau du bas des jambes. Le tissu intérieur en soie
s’arrête au bustier, tandis que le voilage très fin extérieur couvre toute la
longueur, ainsi que mes bras. Le tout a l’air assez sage jusqu’à ce que je
me retourne, pour voir un décolleté en V tellement plongeant dans le dos
qu’il atteint presque mes reins. Là, c’est sexy ! Un long collier blanc,
pendant en arrière viendra l’orner dans quelques secondes. En tout cas,
pour une fois, je trouve que ça met vachement en valeur mes fesses.
Les filles à côté ne tardent pas à nous rejoindre, en entendant nos voies
joyeuses. Et on se retrouve toutes à faire des trucs de filles, c’est-à-dire
s’exclamer, se complimenter, se toucher, bref… Heureusement que les
mamans viennent nous rappeler à l’ordre. On doit partir…
M.D. : Non, on n’a plus le temps. Il voulait justement dire que tout le
monde est à la mairie et qu’ils n’attendent que nous. Ton père est déjà
en bas avec la voiture.
Ah c’est donc pour ça qu’il était sorti. Je suis sûre que Kader le savait en
plus, car à aucun moment il ne m’a reparlé de la voiture qui
m’emmènerait au mariage. Moi-même, je n’en parlais plus, obnubilée par
tout le reste de la logistique à gérer ces derniers jours, et supposant que
lui s’en occuperait.
Papa Seydou, bougonnant : Mais si, mais si. Allez, on y va. Entrez les
filles.
Toutes installées, papa Seydou démarre en même temps que les deux
autres voitures.
Direction la mairie.
Le maire est déjà arrivé et Ami n’est pas encore là. Je ne devrais
pourtant pas être étonné, il faut toujours s’attendre à ce genre de choses
avec les femmes…
Une quarantaine de personnes sont déjà devant la salle, en train
d’attendre. On forme des petits groupes de discussion. Je plaisante avec
mes neveux venus d’Angleterre et leur maman, jetant régulièrement un
coup d’œil vers l’entrée pour voir si le dernier groupe tant attendu arrive.
Et ils finissent par faire leur entrée, papa et sa cour de femmes, dont la
mienne. Elle entre parmi les derniers, tellement belle que j’en suis figé, le
souffle coupé. Déjà que je la trouvais belle en la quittant ce matin,
drapée de son « meulfa » et sans maquillage, et là elle est juste
parfaite.
Un sentiment d’amour et de fierté mélangés m’envahit. Elle s’avance
vers nous et je ne bouge pas au début, presque intimidé devant tout ce
monde, ne sachant pas comment réagir. Je finis par m’avancer vers elle.
J’ai envie de l’embrasser mais je me contente de lui prendre la main. La
sentant un peu stressée, je lui souris et serre sa main un peu plus.
Je l’attire vers la salle en lui disant : « Le maire est déjà là, chérie. »
Un quart d’heure plus tard, tout le monde est installé. Nous nous
trouvons sur la première rangée avec Karine et Aziz, les témoins, Badou
et les parents, Omar dans leurs bras et Mariétou.
***
Tous les bruits autour de moi me font un peu tourner la tête, alors que je
regarde mon mari, si beau dans son smoking gris clair. Il m’essuie
doucement la larme qui vient de tomber sur ma joue. Pourtant, je vois
bien que lui aussi va pleurer. La musique et la puissante voix qui chante
en « pulaar » créent une atmosphère extrêmement touchante.
Alors que maman me prend dans ses bras, je vois maman Diey
esquisser des pas de danse. Elle a enlevé son voile et le tournoie au-
dessus d’elle à la manière des danseuses « toucouleur ».
Et là, elle se met à faire des « you-you ». Kader éclate de rire.
Il fait ses pas de danse et, un pied devant l’autre à tour de rôle,
s’approche de moi. Euh, j’espère qu’il ne va pas me proposer de danser
quand même. J’ai beau avoir des ancêtres peuls, je ne sais absolument
pas comment danser de cette manière.
Heureusement, il se contente juste de déposer le voile sur mes épaules
avant de m’embrasser. Mais je suis trop gênée pour répondre à son
baiser. Tout le monde applaudit et j’entends d’autres « you-you » retentir
dans la salle.
Quelques minutes plus tard, nous quittons la salle pour reprendre les
voitures. Cette fois, je m’installe dans la Bentley avec mon mari, et Aziz
nous sert de chauffeur.
***
Tout est magnifique. Je ne pouvais pas rêver mieux pour mon mariage,
à part que toute ma famille et Aissatou soient aussi présentes. Mais
maman Dieynaba a promis, ou plutôt « décidé », qu’on fera une fête
traditionnelle dès qu’on posera les pieds à Dakar, Kader et moi.
Dans le bateau, un cocktail apéritif est servi sur le pont supérieur à tous
les convives. Une centaine de personnes, de la famille de Kader et un
peu de la mienne, nos amis et collègues à tous les deux et bien sûr des
enfants. D’ailleurs, une animation est prévue pour eux spécialement, un
magicien chargé de les « éblouir ».
Les convives les plus agés, dont nos parents et quelques tantes et
oncles sont retournés dans notre appartement avec bébé Omar.
Je discute encore un peu puis prends mon temps pour rejoindre Kader.
Dès que j’arrive dans la salle, il vient vers moi et me prend par la main. Il
y’a quelques personnes encore installés aux tables et des serveurs
occupés à ranger.
Kader : Je n’en peux plus bébé. Tu as vu ta robe ? C’est bien celle que
j’ai achetée ?
Là, je regrette de l’avoir fait attendre. Le mec est excité par une longue
robe aux manches longues !
Moi : Kader…
Kader : Chut…
Il se redresse une seconde, juste pour dire : « Trois jours de plus Ami ?!
Trois jours !! Je ne peux pas ! »
***
Quelques minutes plus tard, nous sommes tous les deux pantelants et
essoufflés, lui s’appuyant sur le plan et moi reposant la tête sur son
torse.
Je n’en reviens pas encore des sensations que je viens de vivre. C’était
tellement rapide, tellement brut, et mon Dieu tellement bon ! Je crois
finalement que Kader n’était pas le seul à être en manque…
Désolé ? Parce qu’il croit être le seul à avoir pris son pied ici ?
Je le regarde et ai envie de rire et de pleurer de joie en même temps.
C’est fou ce que j’aime cet homme.
***
Deux jours plus tard, nous nous envolons pour l’île de la Réunion.
Deux semaines de rêve, dans un lieu de rêve où notre fils est conçu.
Presque neuf mois après notre lune de miel, ma femme et moi sommes
dans la salle d’accouchement depuis plus de quatre heures maintenant.
L’attente est insupportable et la pauvre n’en peut plus. Apparemment, le
bébé refuse de pointer son nez même si « le col est complètement
ouvert »… Charabia médical.
Je tiens la main de Ami en lui caressant le bras. Ces derniers jours, elle
n’a pratiquement pas dormi, entre les brûlures d’estomac et les coups du
bébé. J’aurais voulu l’aider mais j’étais juste impuissant, me contentant
de la câliner et lui parler.
Depuis le temps qu’on lui a fait l’anesthésie, les effets calmants ont
commencé à disparaître d’après ce qu’elle me dit et le médecin lui a
ordonné de ne plus appuyer sur la commande augmentant la dose. Elle
gémit chaque minute un peu plus depuis lors, avec les contractions.
Une grosse contraction finit par arriver qui la fait presque crier. Je me
précipite pour sonner la sage-femme qui arrive rapidement dans la salle
et fait ses contrôles. Elle nous dit que c’est le moment et appelle deux de
ses collègues. Elles se mettent à trois face à Ami.
Au bout d’un moment, on entend enfin les pleurs de mon fils. Allah !
J’ai l’impression que mon corps vient de se vider de toutes les forces
accumulées durant les vingt-six années de ma vie. Mais c’est enfin fini.
Je ne ferai plus jamais de bébé, promis.
Alors qu’on pose sur mon ventre le petit être nu, tout pâle et tout chaud
qui a partagé mon corps pendant près de neuf mois et vient tout juste
d’en sortir, une barrière jusqu’à présent inconnue se rompt au plus
profond de mon âme déversant un océan de lave.
Il tourne son regard vers moi, et là, sans que je m’y attende le moins du
monde, éclate d’un unique sanglot en se penchant sur mon épaule. Je
sens ses larmes chaudes mouiller le tissu de ma blouse. Je ne l’ai
jamais vu comme ça, jamais…
Mes larmes coulent doucement alors que je lui caresse la tête pour le
calmer.
Les sages-femmes sont encore occupées entre mes jambes, mais elles
n’existent plus pour moi. Elles n’existent plus pour nous.
[Hello!
Partie 41 : Le phœnix
***Trois ans plus tard***
MM : na na na na
MM : na na na na
MM : na na…
MM : Ah oui !
Kader, regardant son fils, haut perché : Qu’est-ce qu’elle râle tôt le matin
comme ça, maman ?
MM : Euh…
MM : Ouai !!
K : Rien. Tu as fini ?
MM : Oui.
La chanson en question est celle qui jouait la première fois que Kader
m’a fait l’amour. Je me demande pourquoi je n’arrive pas à l’oublier…
K : J’ai faim.
Moi : J’ai presque fini. On mange dans le salon ? J’ai déjà mis la table.
Tu sors à boire ?
K : Ok.
MM : …
Il met ses chaussons et traine les pieds, en sortant du salon, les yeux
larmoyants.
Je pose l’ipad sur la table basse et vais m’assoir à côté de Kader, pour
déjeuner.
Je bougonne : « Il a de la chance que ce soit son anniversaire celui-là.
Sinon, je lui aurais fichu une belle baffe, qu’il apprenne à me parler.
Impoli, va ! »
Je sens Kader lever son regard sur moi pour m’observer, avant de dire :
« Sérieusement, tu vas bien ? Tu n’as pas l’air en forme, ce matin. »
K : Tu es sûre?
Moi : Mais il ne fait pas encore très beau. C’est mieux si je mets ça au
four...
K : Mais non. Il ne fait pas froid non plus. Autant profiter du jardin,
maintenant qu’on en a une. Ça va être plus fun en plus.
Moi : Tu es sûr?
K : Mais oui.
Moi : Bon, ok. Karine ramène les gâteaux en plus. Donc je préparerai
juste la sauce, la salade et les apéritifs.
Moi : Maman Dieynaba a appelé hier quand j’étais au boulot. Elle voulait
savoir si on irait cet été au Sénégal.
K, en riant : Elle m’en a parlé aussi. Mais comme je lui ai répondu que
non, je suppose qu’elle pensait avoir plus de chance avec toi… Tu lui as
dit quoi ?
Moi : Que je t’en parlerais d’abord… Peut-être qu’on devrait y aller
finalement…
Bref, nos vacances seraient parfaites… si seulement il n’y avait que ça…
Eh bien, non. Il faut à chaque fois faire le tour de toutes les tatas,
tontons, cousins, tata du cousin de l’ami du tonton… et même jusqu’aux
villages les plus reculés… et ce dans les deux familles… et toujours en y
laissant un billet de dix mille ou cinq mille francs CFA.
Ah non, c’est dur au Sénégal !
Nous sommes même allés une fois au Fouta, mais ce voyage là était
quand même agréable.
***
Quelques heures plus tard, les premiers invités arrivent, la famille Thiam.
Eux sont, bien sûr, déjà venus nous rendre visite. Ils ne découvrent donc
pas la maison. Omar et Mouhamed se précipitent dans le jardin alors
même que nous sommes encore en train de nous dire bonjour.
Mouhamed, heureux de voir son copain, ne fait même pas attention aux
vœux de Karine et Badou, ni au cadeau que cache ce dernier dans son
dos. Je les laisse quand même y aller, notant qu’il fait finalement plus
beau dehors que ce que je craignais… Kader et Badou vont s’installer
dans le salon d’où ils peuvent les surveiller de la porte vitrée, tandis que
je vais dans la cuisine avec Karine pour poser les gâteaux et mettre les
apéritifs au four.
Je regarde ma copine assise sur l’un des tabourets, l’air plus épanouie
que jamais. Badou, Omar et elle rentrent tout juste depuis une semaine
d’un voyage à Ouagadougou. Tout a l’air de bien se passer entre eux et
avec leurs familles respectives, ce qui n’était vraiment pas évident au
début. Karine a également eu à voyager à Saint-Louis chez les parents
de Badou depuis la naissance de Omar, justement à une période où
nous aussi y étions. C’était seulement une semaine de vacances mais
nous avons passé de très bons moments et je lui ai fait découvrir mes
endroits préférés…
Moi : C’est vrai. Il n’aime pas me voir maigrir, mais je n’y peux rien… J’ai
vraiment du mal avec la nourriture, surtout en ce moment.
Moi : Oh oui ! Tu n’as vraiment pas à t’inquiéter pour ça. Ce n’est pas
tous les jours rose mais je suis très heureuse, crois-moi.
K : Bon, tant mieux alors… Tu ne devineras jamais qui j’ai vu lundi là. Je
veux t’en parler à chaque fois au téléphone mais on papote tellement
que j’oublie complètement.
Moi : Qui ?
K : Un revenant… Marc !
Moi : Oui, j’étais au courant qu’il y était retourné. D’ailleurs, il était même
rentré en Belgique aux dernières nouvelles. Je suis quand même
surprise que ce soit lui qui s’occupe de ça. Ce n’est pas du tout son
domaine…
K : Ouai, en tout cas il n’a pas changé le gars. Toujours aussi beau
gosse ! Je n’ai pas pu m’empêcher de lorgner sur ses doigts pour voir s’il
n’avait pas de bague…
Moi : Curieuse, va !
Moi : Oui bon. On ne sait pas ce qu’il y’a dans sa vie, non plus… Tant
qu’il est heureux… Bref.
Une heure plus tard, nous venons de déguster un très bon repas, même
si je n’ai pas pu trop en profiter. Mon mari a assuré dans la cuisson de la
viande. Et il a l’air tellement fier de lui, là !
Je le flatte en lui disant : « T’as assuré chéri. C’était trop bon. Pas trop
cuit. Juste parfait ! »
Ne t’emballe pas non plus… Tant que c’est juste pour griller la viande, ça
va. Pour le reste, je préfère ne pas mourir empoisonnée.
Je ne lui réponds rien pour ne pas lui gâcher son plaisir et fais un geste
moqueur vers lui en regardant une Karine amusée. Cette dernière se
lève pour m’aider à débarrasser les tables.
Marie et les deux autres filles du groupe, Sokhna et Nathalie nous aident
aussi et on se retrouve toutes les cinq dans la spacieuse cuisine. Après
avoir rangé la vaisselle en papotant, nous nous installons spontanément
sur les tabourets. Je sens que ça va être un moment entre filles, comme
je les aime.
Je décide de servir le dessert plus tard et me lève juste de temps en
temps pour m’occuper du « attaya » [thé] sur le feu.
Nathalie : Attends, tu as vu son bidon là ? Moi j’ai été claire avec lui. Il se
met au sport sinon, pas touche à « kikine. »
Marie : Toi aussi Nathalie ! Tu ne peux pas te refuser à ton mari quand
même. C’est…
Sokhna : Mais c’est la religion qui le veut Karine. On n’y peut rien.
Marie : Voilà ! C’est ça qu’elle ne sait pas et elle ouvre sa bouche là. Tu
sais quoi, on dit même que quand tu te refuses à ton mari, les anges te
maudissent toute la nuit.
Marie : Ok, restez là, Karine et toi, à faire vos toubabs. Je souhaite du
fond du cœur que Badou et Tapha aillent voir ailleurs. On verra alors si
vous ouvrez toujours votre bouche pour dire des bêtises. Tchuipp ! Moi
en tout cas, c’est comme Karim veut, quand il veut et où il veut ! Ahh oui.
Moi : Okhoo les filles, on s’en fout. Nathalie, fais ce que tu veux de «
kikine ». Et toi Karine, arrête de jouer ta rebelle là. « On se sait ». Tu
trembles dès que Badou s’approche à moins d’un mètre. Alors bon, tais-
toi hein… Mais toi quand même Marie, tu me sidères. Dévouée à Karim
comme ça. « Khana da nga am mamou laobé ? » [Aurais-tu par hasard
des ancêtres laobés ?]
Karine : Parle pour toi. Moi je comprends hein. Tu n’as qu’à apprendre le
wolof.
On éclate de rire.
J’observe nos hommes qui sont à présent dehors avec les enfants.
Kader et Karim sont en train de jouer au ballon avec eux. Quand Kader
chipe le ballon juste devant Mouhamed, ce dernier s’énerve et lui tape la
cuisse rageusement. Kader le soulève alors et lui fait faire des
acrobaties, faisant mine de le laisser tomber par terre. Mon petit cœur
est mort de rire. Les autres enfants s’approchent d’eux, espérant eux-
aussi avoir leur « tour de manège ».
Je les observe, attendrie, ne suivant plus la conversation en cours. Mon
mari est vraiment adorable avec les enfants.
Mon mari…
Doucement, mes pensées basculent vers les débuts de mon histoire
avec cet homme.
Abdelkader Hann !
L’homme qui a fait basculer ma vie, un soir d’octobre, il y a déjà six ans.
Les sentiments qui me lient à lui n’ont, depuis lors, cessé de grandir. Et
ce malgré toutes les difficultés, les peines et les épreuves qu’on a
traversées. Et Dieu sait qu’il y’en a eu… Mais, quel que soit ce qu’on a
vécu, il a toujours été là, à mes côtés. Toutes ces étapes, nous les
avons traversées ensemble et continuons de le faire. Je suis consciente
du fait que ce qui nous lie n’est pas ordinaire. ET je remercie tous les
jours le bon Dieu pour avoir placé mon âme-sœur sur ma route.
Combien de personnes vivent et meurent sans jamais rencontrer leur
âme-sœur ? Quelquefois, je me demande même ce que j’ai fait, moi,
pour mériter ce bonheur.
Certes, tout n’est pas parfait, même maintenant qu’on s’est retrouvé, je
l’espère, à jamais. Le combat ne s’arrête pas quand on s’est trouvé. Au
contraire, c’est là qu’il commence, là que l’éternité nous attend.
Il nous arrive de vivre des tensions, des disputes mais jamais sur des
sujets importants. Et nous trouvons toujours le moyen de nous
réconcilier très vite. J’ai mes défauts et il a les siens. Mais nous
travaillons sur les plus graves, ceux dont on sait qu’ils pourraient nous
coûter. Nous sommes déjà passés par la difficulté et la séparation et
avons appris de nos erreurs. Nous savons ce que c’est que de ne pas
être ensemble et pour ça, nous ne prenons rien pour acquis, travaillant
tous les jours à préserver l’amour de l’autre.
Un problème récurrent de notre couple est le fait que nous ayons tous
les deux des vies professionnelles très prenantes. Nous nous déplaçons
beaucoup et ça peut quelquefois générer des frustrations, que nous
essayons tant bien que mal de gérer... Donc, non, ce n’est pas parfait !
Mais finalement, qu’est-ce que la perfection ? Qu’est-ce qui est parfait ?
Et surtout, la perfection peut-elle nous rendre heureux ? S’il n’y avait pas
eu ce problème, il y’en aurait une autre, peut-être plus grave.
Ce qui me rend heureuse moi, c’est simple. Me lever tous les matins,
aux côtés de mon homme ou non, mais avec la certitude de l’amour qu’il
me porte et avec la plénitude de l’amour que je lui porte. Le reste
importe peu…
Je lui fais confiance et je sais qu’il ne me fera jamais souffrir
intentionnellement. Même si je sais bien que je vais encore souffrir. C’est
la vie… Aimer fait souffrir. Vivre fait souffrir. Kader m’a fait souffrir… Puis
il m’a guéri.
Avec lui, même le temps qui passe ne me fait pas peur. Je sais que je
me relèverai de toutes les épreuves tant que j’aurai son amour.
Où que je me trouve, quoi que je dise, quel que soit mon ét at, je
continue de l’aimer. Chaque jour un peu plus.
Je l’aime.
Et quand je me dis que ce n’est pas possible d’aimer quelqu’un plus que
je ne l’aime déjà, je découvre avec étonnement que je l’aime encore
plus.
Plus qu’hier et sans doute moins que demain.
J’ai fait le choix de vivre pleinement cet amour avec lui, de me donner
entièrement et sans aucune limite, et je ne l’ai jamais regretté, lui me le
rendant au centuple.
Malgré certaines peurs des fois que quelque chose arrive et change tout,
je reste confiante au fond. Je veux vivre et vieillir aux côtés de mon mari.
Je veux rire avec lui, souffrir avec lui, me battre pour lui, pleurer pour lui.
Je veux voir vivre nos enfants, leur apprendre par l’amour que je porte à
leur père et celui qu’il me porte que dans la vie TOUT EST POSSIBLE.
Leur apprendre qu’il ne faut jamais perdre espoir, qu’il n’y a pas d’élus,
que le bonheur est accessible à tout le monde et n’appartient à
personne…
Je veux les éduquer dans nos valeurs, les couver tout en leur donnant
des ailes, puis les laisser quitter le nid et prendre leur envol.
Et alors, je pourrais retourner dans le nid, la main de l’homme qui
représente tout pour moi dans la mienne. Et là, nous attendrons,
ensemble, que la vie se fasse…
En sortant de mes pensées, je me lève et me mets devant la terrasse
pour appeler Kader, toujours en train de jouer au foot. Il se retourne et
court vers moi, me rejoignant devant la cuisine. Je lui prends la main et
l’attire à l’intérieur, passant devant les filles plongées dans leur
conversation.
Je lui souris en lui répondant : « Très bien. J’ai juste une nouvelle à
t’annoncer. Je ne peux plus attendre. »
Plus la peine d’attendre « un bon moment ». Il est temps que je lui dise
que Mouhamed, mon « petit-papa », ne sera bientôt plus notre seul
enfant.
En montant les escaliers avec lui, j’ai une image de nous deux, assis
quelque part l’un à côté de l’autre, alors que la vieillesse nous aura
rattrapés.
Une image qui fait naître une prière dans mon cœur. A la toute fin de la
première étape que représente cette vie sur terre, je voudrais mourir au
service du Seigneur, dévouée à ma famille, mes amis, mes enfants et
dans les bras de l’homme que j’aime.
Pour l’éternité.
[Aminata Hann