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PARTIE V

ETHIPIE ET AUTRES PAYS AFRICAINS EMMERGENTS

Je continue mon étude comparative entre la constitution Algérienne aux autres constitutions
au regard de la place de la religion et de la liberté du culte dans le texte constitutionnelle. J’ai
entamé une étude comparative avec les pays africains émergents et je l’ai commencé avec
l’Afrique du sud. Aujourd’hui, en cinquième partie, l’étude concernera un pays africain
émergent très particulier, c’est l’Ethiopie. Pays jadis touché par la faim et la sécheresse,
l’Éthiopie a su grâce a un système démocratique de plus en plus ancrée dans la société et ce
grâce à une équipe jeune de citoyens. La constitution est justement le reflet de ce progrès
époustouflant. Cette comparaison avec les pays africains émergents comme l’Ethiopie est
d’autant plus importante que l’Algérie y jouait, il n’y a pas longtemps, un rôle important en
Afrique

Dès le préambule déjà le texte Ethiopian met en garde contre l’inégalité fondée sur
l’appartenance religieuse (…Firmly convinced that the fulfillment of this objective requires
full respect of individual and people's fundamental freedoms and rights, to live together on the
basis of equality and without any sexual, religious or cultural discrimination…). Et du point
de vue symbolique même l’hymne national et le drapeau national doivent refléter l’espoir
qu’ont les nationalités, les peuples et les communautés religieuse de l’Ethiopie de vivre
ensemble dans l’égalité et l’unité (Article 3, 2° alinéa : 2. The national emblem on the flag shall
reflect the hope of the Nations, Nationalities, Peoples as well as religious communities of Ethiopia to
live together in equality and unity). Mais c’est l’article 11 qui est le plus manifestement expressif
concernant la place de la religion dans le texte constitutionnel. Le titre même de l’article annonce la
couleur; “séparation de l’état et de la religion“. Ainsi le premier alinéa stipule clairement la séparation
de l’état et de la religion (Article 11: 1. State and religion are separate.). Encore plus explicite le
deuxième alinéa interdit l’établissement d’une religion d’état (Article 11: 2. There shall be no state
religion). Enfin le troisième alinéa condamne sans équivoque toute ingérence de l‘état dans les
affaires religieuse et prohibe toute interférence de la religion dans les affaires de l’état. (Article 11: 3.
The state shall not interfere in religious matters and religion shall not interfere in state affairs). On est
vraiment loin du texte algérien qui est en total contradiction aux trois alinéas de ce puissant article. En
effet dans le préambule de la constitution algérienne déjà l’Algérie est terre d’islam. Et l’islam est
religion d’état ! De plus l’article 25 de la constitution éthiopienne dit d’égalité universelle définit l’égalité
entre tous les hommes en interdisant toute discrimination, entre autres celle basée sur l’appartenance
religieuse (Article 25: All persons are equal before the law and are entitled without any discrimination
to the equal protection of the law. In this respect, the law shall guarantee to all persons equal and
effective protection without discrimination on grounds of race, nation, nationality, or other social origin,
colour, sex, language, religion, political or other opinion, property, birth or other status). Le texte
algérien parle d’égalité des citoyens et non pas d’égalité des hommes et omet d’interdire la
discrimination basée sur la religion). L’article 27 précise l’étendue de la liberté du culte dans ce pays.
Je le citerai en entier dans sa version originale et sa traduction en français :
(Article 27: Freedom of religion, Belief and Opinion
1. Everyone has the right to freedom of thought, conscience and religion. This right shall include the
freedom to hold or to adopt a religion or belief of his choice, and the freedom, either individually or in
community with others, and in public or private, to manifest his religion or belief in worship,
observance, practice and teaching.
2. Without prejudice to the provisions of sub-Article 2 of Article 90, believers may establish institutions
of religious education and administration in order to propagate and organize their religion.
3. No one shall be subject to coercion or other means which would restrict or prevent his freedom to
hold a belief of his choice.
4. Parents and legal guardians have the right to bring up their children ensuring their religious and
moral education in conformity with their own convictions.
Article 27: Liberté de religion, de croyance et d'opinion
1. Chacun a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ce droit comprend la liberté de
détenir ou d'adopter une religion ou une croyance de son choix, et la liberté, individuellement ou en

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communauté avec d'autres, et en public ou en privé, de manifester sa religion ou sa croyance en
l'adoration, l'observance, la pratique et l’enseignement.
2. Sans préjudice des dispositions du sous-article 2 de l'article 90, les croyants peuvent créer des
institutions d'éducation et d'administration religieuses afin de propager et d'organiser leur religion.
3. Nul ne sera soumis à la contrainte ou à d'autres moyens qui restreindraient ou empêcheraient sa
liberté d’adopter une croyance de son choix.
4. Les parents et les tuteurs légaux ont le droit d'élever leurs enfants en leur assurant une éducation
RELIGIEUSE et morale conforme à leurs propres convictions.

Ce texte à lui seul peut faire l’objet d’une étude assez longue et la comparaison avec le texte de la
constitution algérienne rendrait cette dernière en retrait nette de la tendance mondiale sur l’égalité des
religions. Il devient même ridicule de défendre un texte qui omet d’interdire la distinction fondée sur
l’appartenance à une communauté religieuse. En fait le texte constitutionnel algérien permet cette
distinction déjà pour la candidature au poste de président de la république qui ne peut être occupé
que par un musulman. Mais ce faisant, le constituant ouvre une brèche importante en légalisant des
distinctions en cascades. De la distinction basée sur l’appartenance religieuse il admet aussi la
distinction fondée sur le sexe, de sorte que tout l’édifice du principe égalitaire universelle est battu en
brèche pour ne rien valoir en Algérie in fine. Ainsi en omettant de prohiber la distinction fondée sur la
religion et en établissant une religion d’état (plutôt qu’une autre), les religions et les croyances ne sont
plus égales aux yeux de la loi. L’appartenance d’une personne à une religion lui permet d’accéder à
des fonctions interdites aux personnes ayant une autre religion. De plus le législateur, croyant bien
faire, s’inspire de la religion pour voter des lois basées sur la distinction entre les sexes que la religion
prône. En effet, malgré que la distinction fondée sur le sexe soit prohibée par la constitution, le
parlement adopte un code la famille inique, inégalitaire et anticonstitutionnel. Inique parce qu’une
personne non musulmane ne peut hériter d’un de cujus musulman alors que toute personne
musulmane peut en hériter, le droit de succession se faisant dans la seule lignée musulmane ; c'est-à-
dire qu’il n’y a vocation successorale qu’entre musulmans. On fera observer qu’on ne peut même pas
prouver l’appartenance religieuse, celle-ci ne figurant dans aucun document officiel ! Inégalitaire
parce que la femme hérite une part fixée à la moitié de ce qu’hérite l’homme. Ce qui est
anticonstitutionnel du fait que cela constitue une distinction fondée sur le sexe. Il y a bien d’autres
pépites dans le seul code de la famille.
Pour revenir à l’article 27 de la constitution éthiopienne, il y a lieu de noter qu’il offre plus de garanties
que son équivalent sud-africain et il est loin de son équivalent algérien. La différence avec le texte
algérien réside dans le fait que l’article 27 de la constitution éthiopienne stipule que " Chacun a droit à
la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ce droit comprend la liberté de détenir ou d'adopter
une religion ou une croyance de son choix, et la liberté, individuellement ou en communauté avec
d'autres, et en public ou en privé, de manifester sa religion ou sa croyance en l'adoration,
l'observance, la pratique et enseignement" (Article 27 - 1. Everyone has the right to freedom of
thought, conscience and religion. This right shall include the freedom to hold or to adopt a religion or
belief of his choice, and the freedom, either individually or in community with others, and in public or
private, to manifest his religion or belief in worship, observance, practice and teaching). La constitution
demande de glorifier la religion musulmane et au vu de la répression de ceux qui ont adopté d’autres
religions que celle dominante par la fermeture de leurs églises, par les poursuites judiciaire contre les
nouveaux adeptes on peut sans craindre dire qu’il reste beaucoup de chemin pour parachever la
liberté du culte. Ce même article donne aux croyants la possibilité de créer des institutions d'éducation
et d'administration religieuses afin de propager et d'organiser leur religion (Article 27 - 2. Without
prejudice to the provisions of sub-Article 2 of Article 90, believers may establish institutions of
religious education and administration in order to propagate and organize their religion). Alors qu’en
Algérie cela est inexistant et l’état veille à empêcher cela par la fermeture des lieux de culte que des
croyants contrôlent ou organisent eux-mêmes.
De plus la constitution éthiopienne donne aux parents le droit d’élever leurs enfants en assurant leur
éducation religieuse et morale conformément à propres convictions (Article 27 - 4. Parents and legal
guardians have the right to bring up their children ensuring their religious and moral education in
conformity with their own convictions). En Algérie parce que sans doute l’état est de confession
musulman (art.2 de la constitution), il pourvoit lui-même une éducation religieuse islamique (et pas
une autre) et ce à l’ensemble des enfants scolarisés en Algérie (musulmans ou non musulmans). Le
défaut de tolérance est donc flagrant en Algérie.

Il y a lieu de signaler que l’équivalent de ces articles (d’égalité des religions et de non discrimination
sur la base religieuse et de liberté du culte) existe dans toutes constitutions des pays africains
émergents comme le Ghana, le Kenya, la Tanzanie, le Rwanda, l’Ouganda et le Mozambique. Je ne
vais citer que les articles de leurs constitutions qui confortent le principe du bannissement de la
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discrimination fondée sur l’appartenance religieuse ou principe égalitaire, les articles stipulant la liberté
du culte et les articles relatif à la séparation de la religion et de l’état:

LE GHANA

Art12 - 2. Every person in Ghana, whatever his race, place of origin, political opinion, colour, religion,
creed or gender shall be entitled to the fundamental human rights and freedoms of the individual
contained in this Chapter but subject to respect for the rights and freedoms of others and for the public
interest.

Art. 17 - 1. All persons shall be equal before the law.--- 2. A person shall not be discriminated against
on grounds of gender, race, colour, ethnic origin, religion, creed or social or economic status.

Art 21 - 1. All persons shall have the right to



b. freedom of thought, conscience and belief, which shall include academic freedom;
c. freedom to practice any religion and to manifest such practice;……

Art 26 - 1. Every person is entitled to enjoy, practice, profess, maintain and promote any culture,
language, tradition or religion subject to the provisions of this Constitution.

LE KENYA
Art 8 : There shall be no State religion.

Art 21 - 3. All State organs and all public officers have the duty to address the needs of vulnerable
groups within society, including women, older members of society, persons with disabilities, children,
youth, members of minority or marginalized communities, and members of particular ethnic, religious
or cultural COMMUNITIES.

Art 27 :
3. Women and men have the right to equal treatment, including the right to equal opportunities in
political, economic, cultural and social spheres.
4. The State shall not discriminate directly or indirectly against any person on any ground, including
race, sex, pregnancy, marital status, health status, ethnic or social origin, colour, age, disability,
religion, conscience, belief, culture, dress, language or birth.

Art 32 :
1. Every person has the right to freedom of conscience, religion, thought, belief and opinion.
2. Every person has the right, either individually or in community with others, in public or in private, to
manifest any religion or belief through worship, practice, teaching or observance, including observance
of a day of worship.
3. A person may not be denied access to any institution, employment or facility, or the enjoyment of
any right, because of the person's belief or religion.
4. A person shall not be compelled to act, or engage in any act, that is contrary to the person's belief
or religion.

LA TANZANIE

Art.9 :
f. that human dignity is preserved and upheld in accordance with the spirit of the Universal Declaration
of Human Rights;
g. that the Government and all its agencies provide equal opportunities to all citizens, men and women
alike without regard to their colour, tribe, religion, or station in life

Art.13 - 5. For the purposes of this Article the expression “discriminate” means to satisfy the needs,
rights or other requirements of different persons on the basis of their nationality, tribe, place of origin,
political opinion, colour, religion, sex or station in life such that certain categories of people are
regarded as weak or inferior and are subjected to restrictions or conditions whereas persons of other
categories are treated differently or are accorded opportunities or advantage outside the specified
conditions or the prescribed necessary qualifications except that the word "discrimination" shall not be
construed in a manner that will prohibit the Government from taking purposeful steps aimed at
rectifying disabilities in the society.
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Art 19 –
1. Every person has the right to the freedom to have conscience, or faith, and choice in matters of
religion, including the freedom to change his religion or faith.
3. In this Article reference to the word “religion” shall be construed as including reference to religious
denominations, and cognate expressions shall be construed accordingly.

LE RWANDA
Article 11 : Tous les Rwandais naissent et demeurent libres et égaux en droits et en devoirs.
Toute discrimination fondée notamment sur la race, l'ethnie, le clan, la tribu, la couleur de la peau, le
sexe, la région, l'origine sociale, la religion ou croyance, l'opinion, la fortune, la différence de culture,
de langue, la situation sociale, la déficience physique ou mentale ou sur toute autre forme de
discrimination est prohibée et punie par la loi.

Article 33 : La liberté de pensée, d'opinion, de conscience, de religion, de culte et de leur


manifestation publique est garantie par l'État dans les conditions définies par la loi.
Toute propagande à caractère ethnique, régionaliste, raciste ou basée sur toute autre forme de
division est punie par la loi.

L’OUGANDA
Art. 7 : Uganda shall not adopt a State religion.

Art. 21 - 1. All persons are equal before and under the law in all spheres of political, economic, social
and cultural life and in every other respect and shall enjoy equal protection of the law.
2. Without prejudice to clause (1) of this article, a person shall not be discriminated against on the
ground of sex, race, colour, ethnic origin, tribe, birth, creed or religion, or social or economic standing,
political opinion or disability.
3. For the purposes of this article, "discriminate" means to give different treatment to different persons
attributable only or mainly to their respective descriptions by sex, race, colour, ethnic origin, tribe, birth,
creed or religion, or social or economic standing, political opinion or disability.

Art. 29:
1. Every person shall have the right to
a. freedom of speech and expression, which shall include freedom of the press and other media;
b. freedom of thought, conscience and belief which shall include academic freedom in institutions of
learning;
c. freedom to practise any religion and manifest such practice which shall include the right to belong to
and participate in the practices of any religious body or organisation in a manner consistent with this
Constitution

Art. 37 : Every person has a right as applicable, to belong to, enjoy, practise, profess, maintain and
promote any culture, cultural institution, language, tradition, creed or religion in community with
others.

LE MOZAMBIQUE
Art. 12: - 1. The Republic of Mozambique shall be a lay State.
2. The lay nature of the State rests on the separation between the State and religious denominations.
3. Religious denominations shall have organisational freedom, freedom to carry out their functions and
freedom of worship, and they shall conform to the laws of the State.
4. The State shall recognise and esteem the activities of religious denominations in order to promote a
climate of understanding, tolerance and peace, the strengthening of national unity, the material and
spiritual wellbeing of citizens, and economic and social development.

Dans aucune des constitutions ce ces pays africains émergents il ne s’est trouvé des articles posant
des conditions discriminatoires excluant des personnes à occuper des postes gouvernementaux pour
cause d’appartenance à une tribu ou a une religion contrairement à celle d’Algérie pour les candidats
postulant au poste du président de la république qui doit être de confession musulmane ! Alors qu’on
pouvait laisser faire par le seul jeu démocratique, la confession musulmane étant majoritaire à hauteur
de 99% de la population.
Il parait nettement que s’il y a un domaine ou l’intelligentsia a failli à construire une société moderne,
cela transparait explicitement dans la constitution algérienne et plus généralement dans les
4
constitutions maghrébines qui toutes refusent l’égalité des religions et toutes omettent la
discrimination fondée sur l’appartenance religieuse. On peut sans crainte dire que ces constitutions
encouragent le racisme sur la base religieuse. Se soumettant ainsi à une volonté ambiante inculte
rétrograde et réactionnaire.

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