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Droit du contentieux administratif

Le droit du contentieux administratif correspond à l’étude d’une affaire de la naissance du


préjudice à la solution juridictionnelle du différend. C’est donc le fonctionnement de la justice
administrative. Autrement dit, on part d’un préjudice imputable à l’administration qui oppose une
personne à l’administration, on a tout un cheminement puis une fin. Les étapes sont les
suivantes :

- La première étape correspond donc à une hypothèse de départ, c’est-à-dire la naissance d’un
dommage imputable à l’Administration. Autrement dit, je subis un préjudice.

- Une fois avoir subit le préjudice, l’objectif est de le réparer, ainsi, la seconde étape consiste à
déterminer la juridiction compétente afin de la saisir d’une requête.

- Une fois la demande introduite, c’est le procès administratif qui va commencer. La toute
première phase du procès correspond à l’instruction (phase durant laquelle on va enquêter et
écouter les deux parties). C’est la phase la plus longue d’un procès.

- Une fois l’instruction terminée, on passe à la seconde phase du procès qui est le jugement.

- Quand le jugement est prononcé, tout n’est pas terminé, en effet, on peut exercer des voies de
recours (avec un délai de 2 mois pour contester). On estime donc que le jugement est définitif
au bout de deux mois.

- Si on utilise une voie de recours comme l’appel, le jugement est plus long, la solution définitive
du différend sera alors soit la réparation du dommage ou soit le rejet de la demande.

Ici, dans ce cours, il faudra toujours se placer dans le sens du citoyen et on va devoir repérer
l’erreur de l’administration.

On s’intéressera donc aux rapports entre l’administration et l’administré. Ceci est encadré par
deux lois assez récentes qui sont les suivantes :

- Loi 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d’une société de confiance.

- Loi 2018-2020 du 23 mars 2019 de programmation et de reforme pour la justice.

Bibliographie :

https://www.conseil-etat.fr

https://www.cnda.fr

https://www.legifrance.gouv.fr

https://www.vie-publique.fr

https://www.ladocumentationfrancaise.fr//

Partie I : De la naissance du litige à la saisine du juge compétent

Postulat de départ : Vous subissez un préjudice imputable à l’administration. Nous sommes donc
face à la naissance d’un préjudice/ d’un différend et il va falloir saisir le bon juge afin de réparer le
préjudice. Cela signifie donc d’abord de saisir la bonne justice (justice administrative ou justice
judiciaire).

L’objectif premier sera donc de déterminer l’instance juridictionnelle compétente, cela fera l’objet
du chapitre 1. Quand on parle de déterminer l’ordre juridictionnel compétent, cela signifie qu’il
faut s’assurer que l’on est bien devant la justice administrative et que l’on est pas dans un cas
exceptionnel et dérogatoire de compétence du juge judiciaire.

Une fois que l’on a identifié le tribunal de la juridiction à saisir, il faut savoir comment s’adresser à
elle. Ainsi, le second objectif sera de maîtriser les règles de saisines.

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Chapitre 1 : Nature du litige et détermination de la juridiction compétente (objectif n°1)

Section 1 : L’ordre juridictionnel compétent

1) De la séparation des pouvoirs à la dualité juridictionnelle

L’acte fondateur de la dualité juridictionnelle est la séparation des pouvoirs avec notamment
l’article 16 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Cet article 16 nous indique que
«  Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des
pouvoirs déterminée, n’a point de constitution ». Autrement dit, cet article nous dit qu’en France,
à compter de ce moment et pour l’avenir, il faut séparer les pouvoirs. Cela signifie que la justice
doit être indépendante du pouvoir politique et inversement et ainsi, la justice ne peut pas juger
l’administration.

En clair, si l’administration provoque des préjudices imputables à l’administration, alors elle ne


peut pas aller devant le juge judiciaire. Ainsi, c’est l’administration elle-même qui va se faire juger
et on se retrouve devant une situation ambiguë puisque nul ne peut être juge et parti en même
temps. La justice judiciaire ne peut pas juger une municipalité ou un ministre mais laisser la
justice se juger elle-même n’est pas démocratique donc on est devant une situation de non droit.
Il va donc falloir attendre 1799 pour qu’enfin, on se retrouve devant une situation assignée
puisqu’à cette date, il y a la création du Conseil d’Etat. Celui-ci est une double instance puisque
c’est à la fois une instance de conseil de l’état (le conseiller du gouvernement) et c’est également
le juge suprême de l’ordre administratif.

A partir cette date, 1799, on peut dire que c’est la naissance de la justice administrative incarnée
par ce Conseil d’Etat.

C’est ainsi que désormais on a un juge administratif et un juge judiciaire. On pourrait donc être
amené à penser que tout ce qui relève d’un préjudice imputable à l’administration serait porté
devant la juridiction administrative, c’est ce qui résulte de ce que l’on appelle le critère organique
et le critère matériel.

- Le critère organique : C’est ce qui vient donner une présomption de compétence à la justice
administrative dès lors que le dommage est imputable à une personne publique. Le critère
organique renvoie donc à la personne qui incarne et qui est titulaire d’un poste mais cela
renvoie également à l’institution (préfecture, municipalité etc). 

Donc à partir du moment où le préjudice est imputable à un organe de l’administration, il y a
une présomption qui nous fait aller automatiquement vers la justice administrative pour obtenir
réparation.

- Le critère matériel : Dès lors que le dommage nait d’une activité administrative et notamment
du service public, c’est le juge administratif qui a une présomption de compétence.

Le critère organique et le critère matériel sont des présomptions qui peuvent être renversées et il y
a des cas exceptionnels strictement limités pour lesquels, même si le préjudice vient d’une
activité de service public, même si le préjudice vient d’un arrêté du maire ou du ministre, même si
tout laisse penser que l’on doit s’adresser à la justice administrative, cette présomption n’est pas
irréfragable et elle peut donc être renversée.

Si on regarde de plus près à quoi correspondent le critère organique et le critère matériel qui nous
mènent devant la justice administrative, on peut mettre en avant l’ensemble des affaires
enregistrées par le Conseil d’Etat sur toute l’année 2019. On va donc voir les principaux
contentieux gérés par le Conseil d’Etat durant toute l’année 2019, les deux plus gros contentieux
en terme de nombre d’entrées sont le contentieux du droit des étrangers ainsi que le contentieux
fiscal.

- Ces dernières années, on retrouve surtout le contentieux des étrangers et la principale matière
qui nous mène devant le juge administratif aujourd’hui concerne surtout les refus de visa, les
refus de statuts de réfugiés ou encore les expulsions.

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- On retrouve en deuxième position le contentieux fiscal dans lequel on traite principalement le
contentieux de la taxe d’habitation, de la taxe foncière, des impôts locaux etc.

- On peut également souligner le contentieux électoral dans lequel on retrouve notamment des
violations du secret des votes, manipulation des électeurs, manque d’isoloir et donc atteinte au
secret du vote etc.

- Ensuite, il y a le contentieux du droit des personnes et des libertés publiques qui est un
contentieux assez important également. On verra ici tout ce qui relève des interdictions des
libertés d’exercer, restrictions des libertés, assignation à résidence etc.

- On retrouve également le contentieux de l’urbanisme et de l’aménagement, cela désigne


notamment tout ce qui concerne les contestations et les permis de construire.

- On retrouve aussi le contentieux de l’Aide sociale, c’est le fait de demander à bénéficier du


droit au logement opposable, de la couverture malade universelle, de l’aide au logement, du
RSA, de se voir retirer certains droits etc.

2) Les critères de compétences du juge administratif

En synthétisant un peu ce que l’on a vu au dessus, on peut dire que les 6 principaux domaines de
contentieux du critère matériel sur l’année 2019 sont :

- Le contentieux des étrangers dans un premier temps avec plus de 100 000 décisions sur
267 000, c’est un contentieux qui est en croissance permanente. Le contentieux des étrangers
est celui qui donne le plus de travail aux juridictions administratives (CE, CAA et TA).

- Le contentieux fiscal dans un second temps avec environ 24 000 décisions sur 267 000, c’est
un peu moins que l’année précédente puisqu’en 2018 il y en a eu 27 000. Ce contentieux
concerne surtout les contestations, les impôts locaux et d’autres taxes diverses et variées.

- Le troisième est le contentieux des agents de la fonction publique, c’est un contentieux qui
concerne 10% des affaires. Il s’agit d’un contentieux qui est en croissance, qui se développe
de plus en plus et il concerne les sanctions sur les fonctionnaires, les mutations forcées des
fonctionnaires, harcèlements dans la fonction publique etc.

- Le quatrième est le contentieux de l’urbanisme, il représente 6% des affaires avec 14 000 et il


concerne notamment les permis de construire, les plans d’occupation des sols etc.

- Le cinquième est le contentieux de l’aide sociale qui représente 5% des décisions avec 13 000
décisions en 2019.

- Le sixième et dernier est le contentieux des libertés qui représente 2% des décisions.

Il existe également tout de même d’autre domaines de contentieux, toutes juridictions


confondues et il s’agit :

- Du contentieux des élections qui concerne 1% des décisions, l’arrêt de principe de ce


contentieux est l’arrêt « Nicolo » de 1989.

- Du contentieux des contrats et des marchés publics avec 3% des décisions (CE, 1990 B.A.S
Blénod).

- Du contentieux des services publics administratifs (CE, 1910, Thérond).

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Dans le cas d’un renversement de présomption, on se retrouve non pas devant le juge
administratif mais devant le juge judiciaire. Les matières relevant du juge judiciaire sont les
suivantes :

- Le premier cas de figure concerne le contentieux de la nationalité et de l’état civil : Si un consul


à l’étranger ou un maire d’une commune au niveau local refuse d’inscrire une naissance, un
mariage, une déclaration de nationalité ou fait une erreur dans les registres, ce litige doit être
porté devant le juge judiciaire et non pas devant le juge administratif.

- Le second cas de figure concerne la voie de fait, ce sont des atteintes à la propriété privée ou
aux libertés fondamentales imputables aux personnes publiques. En effet, quand on porte
atteinte à la liberté fondamentale qui est droit de propriété, notamment par une expropriation,
cela relève du juge judiciaire. 

Pour le cas de l’atteinte à la vie privée c’est le cas très courant de l’expropriation, par exemple,
la commune ou le département veut créer une nouvelle route, une autoroute et pour cela, veut
démolir la maison parce qu’elle gêne. La contestation, soit de l’expropriation en elle-même ou
soit du montant de cette expropriation se fait devant le juge judiciaire.

Pour le cas de l’atteinte aux libertés fondamentales, on pense notamment au cas de la liberté
d’aller et venir. Par exemple, la contestation d’une garde à vue ou alors la contestation d’un
internement en psychiatrie contre son grès. Ce sont donc des situations où l’on perd sa liberté
d’aller et venir du fait d’une décision administrative.

- Le troisième cas de figure concerne les accidents nucléaires. En effet, lorsque l’état fait des
tests nucléaires sur son territoire et que cela provoque un incident nucléaire avec des préjudice
(atteinte à l’environnement, pathologie etc), l’état ne sera pas attaqué devant le juge
administratif mais devant le juge judiciaire.

- Le dernier cas de figure concerne celui des accidents corporels résultant d’une action
volontaire, par exemple, c’est le cas classique du policier qui est mis en cause pour avoir,
volontairement, porté atteinte à l’intégrité physique d’une personne (c’est-à-dire en dépassant
le cadre de sa mission). Dans ce cas, cet agent des forces de l’ordre sera mis en cause devant
le juge judiciaire et non pas devant le juge administratif.

Explication SPA/ SPIC :

Dans les deux cas il s’agit de services publics, c’est-à-dire un service qui va de l’administration
vers les administrés.

La jurisprudence « Blanco » de 1973 nous rappelle que, dès lors qu’un dommage est causé par
un service public, la compétence est celle des juridictions administratives. Pour confirmer cette
jurisprudence, on peut citer l’arrêt « Thérond » de 1910. Le principe est alors très clair et il s’agit
en réalité du critère matériel.

Tout cela c’est sans compter l’arrivée de la jurisprudence «  Société Bac d’Eloka  » quelques
années plus tard (années 1930). Ce BAC, qui est un bateau, est un service public de transport qui
s’occupe de transporter les habitants d’une rive à l’autre, on se pose la question de savoir s’il
s’agit réellement d’une mission de service public, on se demande si cela ne serait pas une activité
commerciale. On vient donc, ici, faire apparaître la différence entre le SPIC et le SPA.

On vient donc distinguer l’existence de deux services qui sont le SPIC et le SPA et c’est grâce à
la jurisprudence UNSA dans les années 1950 que l’on vient fixer les trois critères de distinctions
entre le SPA et le SPIC :

- Le premier critère est le financement de service : Si le service fonctionne par les impôts, c’est
un SPA alors que si le service fonctionne par les usagers, c’est un SPIC. Par exemple, un
centre hospitalier est financé par les impôts donc c’est un SPA tandis que le service public des
transport est financé par les usagers qui vont payer leur ticket de train ou de parking donc c’est
un SPIC.

- Le second critère est la modalité de fonctionnement et de travail des agents : On se demande


donc si les agents fonctionnent avec un contrat de droit privé ou s’ils ont un statut
fonctionnaire et apparenté.

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- Le dernier critère est l’objet du service public : On se demande si l’objet est de servir l’intérêt
général ou si c’est une finalité commerciale lucrative.

Lorsque l’on est face à un SPIC, on ira devant le juge judiciaire alors que si on est face à un SPA,
on ira devant le juge administratif.

Explication des cas de figure en droit des contrats :

- Lorsque l’on a un contrat entre deux personnes privées : Par logique, il s’agit d’une
présomption de nature privée donc en cas de litige on se retrouve devant le juge judiciaire.
Mais il existe des exceptions où l’on peut renverser la présomption. On peut donc renverser la
présomption soit quand un des deux contractants agit au nom et pour le compte de l’état ou
soit quand il y a la présence d’une clause exorbitante de droit commun dans le contrat. Dans le
cas de ces exceptions, on ira non pas devant le juge judiciaire mais devant le juge administratif.

- Lorsque l’on a un contrat entre un deux personnes publiques : Par logique, il s’agit d’une
présomption de nature public (contrat public) et donc en cas de litige, on va devant le juge
administratif. Il existe également des exceptions où l’on renverse la présomption, notamment
dans l’arrêt «  Bureau d’aide sociale Blénod  » dans lequel le contrat a un objet de droit privé
comme une location immobilière. Ainsi, comme il s’agit d’un contrat de droit privé, on va
devant le juge judiciaire et non pas devant le juge administratif.

- Lorsque l’on a un contrat mixte, c’est-à-dire un contrat conclu entre une personne privée et une
personne publique : Dans ce cas, il n’y a pas de présomption, c’est l’exemple de l’arrêt
« Thérond ». Pour savoir si le contrat mixte est qualifié de public ou privé, on regarde l’objet du
contrat, s’il s’agit d’un objet d’intérêt général, ce sera un contrat public et en cas de litige, on
ira devant le juge administratif alors que s’il s’agit d’un objet privé, ce sera un contrat privé et
en cas de litige, on ira devant le juge judiciaire.

Si l’on part de notre postulat de départ, on remarque qu’il ne s’agit pas d’une exception que l’on
vient de voir précédemment donc on va devant le juge administratif. Étant donné que nous avons
vérifié qu’il s’agissait bien du juge administratif qui était compétent pour ce litige, nous devons
maintenant voir lequel de ces juges administratifs nous devons saisir (Tribunal Administratif ?
Conseil d’État ? Juridiction Administrative Spécialisée ?).

Section 2 : La juridiction administrative compétente en raison de la matière - compétence


ratione matériae

1) Les juridictions administratives ordinaires : Des tribunaux administratifs au


conseil d’état.

1.1 Les tribunaux administratifs (TA)

Les Tribunaux Administratifs sont créés en 1953 pour remplacer l’activité qui était assurée par les
conseils de préfecture. On en dénombre 42 sur le territoire français dont 31 en métropole et 11 en
outre-mer. Le dernier tribunal administratif a été installé en 2009 pour désengorger celui de Paris.

Devant cette juridiction, on compte 231 000 affaires qui ont été déposées et enregistrées pour
l’année 2019 alors qu’ils n’ont traitées que 223 000. On remarque donc un décalage entre le
nombre de recours introduits et le nombre d’affaires traités, cela montre bien que les tribunaux
administratifs ont plus de travail qu’ils ne peuvent en assumer.

Le délai moyen de jugement est de 9 mois et 15 jours, c’est-à-dire que le délai entre le moment
où la requête est enregistrée et le moment où elle est jugée, il se passe 9 mois et 15 jours.

Entre 2015 et 2019, on constate une grosse augmentation des saisines de juridictions et cela
s’explique notamment par le fait que l’on a dématérialisé les procédures.

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Fonctionnement du tribunal administratif :

Au sein d’un Tribunal Administratif, on va repartir les magistrats en chambres avec un principe
d’un nombre impair (3 à 5 conseillers par chambres). Les chambres ont souvent des domaines de
contentieux, par exemple, il y a une chambre qui s’occupe du contentieux des étrangers, une qui
s’occupe du contentieux fiscal etc. Les conseillers des tribunaux administratifs sont souvent issus
de l’ENA (école nationale d’administration) ou alors ce sont des fonctionnaires.

Le tribunal administratif rend un jugement, c’est le nom d’une décision rendue par une instance
collégiale. La décision peut être rendue en chambre mixte (c’est-à-dire quand une décision est
rendue par plusieurs chambres réunies) ou en chambre plénière (c’est-à-dire quand ce sont
toutes les chambres qui participent au rendu de la décision).

Le président du Tribunal Administratif a la faculté de statuer seul en urgence dans le cadre des
référés, dans ce cas là, on parlera d’ordonnance rendue par le président.

Les compétences de principe :

La compétence de principe du Tribunal Administratif est le juge de droit commun de premier


ressort, c’est ce que l’on découvre dans le code de justice administrative à l’article L211-1
complété par l’article L311-1.

- Les tribunaux administratifs sont, en premier ressort et sous réserve des compétences
attribuées au Conseil d’Etat, juges de droit commun du contentieux administratif.

- Les tribunaux administratifs sont en premier ressort, juges de droit commun du contentieux
administratif, sous réserve des compétences que l’objet du litige ou l’intérêt d’une bonne
administration de la justice conduisent à attribuer à une autre juridiction administrative.

Donc en principe, lorsque l’on va devant le juge pour faire réparer un préjudice, on va devant le
tribunal administratif mais il y a des exceptions pour lesquelles ce sera le Conseil d’Etat qui sera
compétent.

Le Tribunal Administratif est également compétent en premier ressort pour les élections
municipales ainsi que les élections départementales.

1.2 Les Cours Administratives d’Appel (CAA)

Les Cours Administratives d’Appel sont créées en 1987 et on en compte 8 en métropole (Paris,
Lyon, Nancy, Nantes, Bordeaux, Marseille, Douai, Versailles). Au départ, en 1987, il n’y avait que 5
cours mais on s’est vite rendu compte que cela n’était pas suffisant donc on est venu créer de
nouvelles cours administratives d’appel notamment à Marseille en 1997, à Douai en 1999 et à
Versailles en 2004. Ce nombre reste insuffisant, il y a un projet d’une nouvelle cours à Toulouse
prévu pour 2021.

En Cour Administrative d’Appel, on comptabilise 35 684 affaires, ce chiffre est nettement inférieur
à celui des tribunaux administratifs. Cela signifie que le délai de 2 mois entre la date de jugement
et la date d’appel s’épuise sans que l’on est eu le temps de réagir ou que l’on est découragé par
une réponse négative en première instance.

Le délai d’instruction et de jugement devant cette juridiction est de 11 mois, c’est forcément plus
long puisqu’il y a très peu de cours en France.

On observe toujours un petit décalage à la baisse entre les affaires enregistrées et les affaires
jugées. Les Cours de Nantes et de Marseille sont celles qui ont le plus d’affaires.

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Le texte qui fonde les compétences des Cours Administratives d’Appel est l’article 211-2 «  Les
Cours Administratives d'Appel sont, sous réserve des compétences attribuées au Conseil d’Etat
en qualité de juge d’appel, des juridictions de principe d’appel ».

1.3 Le Conseil d’Etat (CE)

Le Conseil d’Etat, en plus d’être l’unique juge de cassation, il est également juge de premier et
dernier ressort. Il est une instance pluri-fonctionnelle :

- Il est conseiller du gouvernement

- Il est la juridiction suprême de l’ordre administratif

- Il est le juge unique de cassation

- Il est le juge d’appel de certaines décisions du tribunal administratif et juridictions spécialisées

- Il est le juge de premier et dernier ressort

- Il est enfin le juge d’urgence (juge des référés)

On remarque donc une grosse activité pour le Conseil d’Etat mais le plus gros de son travail est
d’être le juge de cassation puisque cela concerne 67% des saisines.

En 2019, le Conseil d’Etat compte 10 216 affaires enregistrées et 10 320 affaires traités et jugées
donc on remarque qu’il a traité plus d’affaires qu’il n’en a enregistré, cela signifie qu’il a réussi à
rattraper le retard sur les affaires enregistrées en 2018.

Il a un délai d’instruction et de jugement assez cours qui est de 6 mois puisqu’il est composé de
près de 10 chambres et cela permet donc de réduire les délais d’instructions et de jugement.

C’est l’article L-111-1 qui donne la compétence de principe du Conseil d’Etat comme étant
l’unique juge de cassation des juridictions administratives du territoire Français, cet article définit :
«  Le conseil d’état est la juridiction administrative suprême. Il statut souverainement sur les
recours en cassation dirigés contre les décisions rendues en dernier ressort par les diverses
juridictions administratives ».

Le Conseil d’Etat est également juge d’appel « Le conseil d’état est compétent pour statuer sur
les appels formés contre les jugements des tribunaux administratifs rendus sur les recours sur
renvoi de l’autorité judiciaire ainsi que sur les litiges relatifs aux élections municipales et
cantonales ».

Enfin, le Conseil d’Etat est compétent pour connaître en premier et en dernier ressort :

- Des recours dirigés contre les ordonnances du président de la république et les décrets.

- Des recours dirigés contres les actes réglementaires des ministres.

- Des litiges concernant le recrutement et la discipline des agents publics nommés par décret du
président de la république.

- Des recours dirigés contre les décisions prises par les autorités administratives indépendantes.

Le Conseil d’Etat est également compétent en premier et dernier ressort pour connaître les
protestations dirigées contre :

- L’élection des représentants au Parlement Européen

- Les élections au conseils régionaux et à l’Assemblée de Corse

1.4 Le tribunal administratif a une compétence ratione loci

Une fois que l’on a écarté la possibilité d’un recours devant le juge judiciaire, on va donc pouvoir
déposer une requête devant le tribunal administratif dans le ressort duquel est né le préjudice.
Cela signifie que c’est la localisation/ la survenue du dommage qui va déterminer le ressort
géographique, c’est ce que l’on appelle la compétence « Ratione loci » qui, en latin, signifie « en
raison du lieu ».

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On part donc du principe selon lequel un litige nait d’une activité administrative (critère matériel)
ou mettant en cause une personne publique (critère organique). Dans ce cas, il faut dans un
premier temps vérifier que le litige ne relève pas de la compétence exceptionnelle du juge
judiciaire.

Une fois que l’on a exclu la compétence du juge judiciaire, on doit vérifier que le litige ne donne
pas compétence exceptionnelle au Conseil d’Etat en premier ressort et dernier ressort.

Enfin, une fois que toutes ces conditions sont exclues, on saisit par principe le Tribunal
Administratif dans le ressort duquel est né le préjudice, c’est donc ce que l’on appelle la
compétence ratione loci (compétence en raison du lieu de naissance du préjudice). Il existe des
des exceptions, par exemple, si un texte reconnait une compétence spéciale (rationae materiae) à
un Tribunal Administratif particulier.

La compétence de principe du tribunal administratif ratione loci :

Lorsqu’il n’en est pas disposé autrement par les dispositions de la section 2 du présent chapitre
ou par un texte spécial, le tribunal administratif territorialement compétent est celui dans le
ressort duquel a légalement son siège l’autorité qui, soit en vertu de son pouvoir propre, soit la
délégation, a pris la décision attaquée.

- La première exception qui fait sauter ce critère de la compétence du tribunal administratif se


retrouve en matière contractuelle. On pense aussi bien à des marchés publics, à des délégations
de service public, à des contrats etc. La règle qui s’applique en matière de contentieux
contractuel sera alors qu’il y a une compétence du Tribunal administratif qui s’applique dans le
ressort duquel le contrat est exécuté. Mais s’il y a plusieurs lieux d’exécution, ce sera le Tribunal
administratif dans le ressort duquel se trouve la première autorité administrative ayant signé le
contrat. Évidemment, les parties peuvent anticiper les litiges en amont en mettant une clause
dans le contrat qui prévoie la compétence d’un autre tribunal administratif. Dans ce cas là, c’est
la clause qui prime sur la règle précédente.

- La seconde exception concerne la matière du contentieux des agents de la fonction publique


(dans ce contentieux, on retrouve les sanctions contre les fonctionnaires, les mesures de refus de
reclassement, les mesures qui imposent de nouvelles affectations, les mesures de harcèlement
etc). Le tribunal compétent dans cette matière sera le tribunal administratif dans le ressort duquel
se trouve l’affectation du fonctionnaire ou l’agent que la décision attaquée concerne, dans ce cas
là, le lieu de résidence ne nous importe pas. Il existe une exception à cette exception, en effet, en
matière de monition ou de changement d’affectation, on se retrouve devant le tribunal
administratif dans le ressort duquel se situe la nouvelle affectation.

- La troisième exception concerne la matière du contentieux des refus de visa. Dans ce cas
précis, les litiges relatifs au rejet des demandes de visa d’entrée sur le territoire de la République
Française relevant des autorités consulaires ressortissent à la compétence du tribunal
administratif de Nantes.

Il ne faut surtout pas confondre Visa et Asile.

Lorsque l’on demande un visa, on demande l’autorisation d’entrer sur le territoire Français et d’y
séjourner, ainsi, le demandeur se situe donc à l’étranger. Pour qualifier ce type de personne, on
parlera alors d’un étranger et dans le cas où cet étranger possède un visa de long séjour, on
parlera d’immigré.

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Lorsque l’on demande l’asile, on demande la possibilité de demeurer sur le territoire Français
mais également d’être protégé par la France, le demandeur est donc sur le territoire Français. On
parlera alors de demandeur d’asile, s’il parvient à obtenir sa demande d’asile, on parlera alors de
réfugié.

Le migrant n’est pas une personne qui demande l’asile ni le visa, c’est une personne, un étranger
qui est en train de transiter pour aller vers une destination finale.

Exemple pour la demande de Visa :

Monsieur Y est un étranger qui demande un visa au Consulat de France du pays où il réside. Le
consulat Français va donc examiner sa demande, soit il va délivrer le visa et il n’y a pas de
problème, soit il refuse parce qu’il estime que les raisons du voyage en France de monsieur Y
sont douteuses ou autre.

Dans le cas d’un refus, Monsieur Y peut contester en allant devant la Commission de Recours
contre les Refus de Visa (CRRV). Cette Commission correspond à une étape intermédiaire
administrative pour ne pas surcharger les demandes devant le tribunal administratif de Nantes.

Si le recours devant la CRRV n’aboutit pas, c’est-à-dire qu’elle maintient la position consulaire,
l’étranger pourra alors saisir le tribunal administratif de Nantes. Si le tribunal administratif
maintient également la position, on ira devant la cour administrative de Nantes et enfin devant le
conseil d’état.

2) Les juridictions administratives spécialisées

Il s’agit d’instances investies d’une compétence d’attribution par opposition à la compétence de


principe des tribunaux administratifs de l’article 312-1 CJA.

Il s’agit également d’instances qui sont investies d’un pouvoir juridictionnel en raison de la
spécificité d’un contentieux. Autrement dit, c’est l’asile, la discipline des professions libérales, le
sport, les travailleurs handicapés etc.

Il y a plusieurs exemples de ces juridictions spécialisées, d’abord, la Cour Nationale du Droit


d’Asile, il y a également des chambres disciplinaires, la cour des comptes, la commission centrale
de l’aide sociale, la commission départementale des travailleurs handicapés, la commission

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disciplinaires des fédérations sportives, la commission de contentieux du stationnement payant,
les conseils académiques etc.

Toutes ces juridictions administratives spécialisées se voient reconnaître un pouvoir spécialisé au


nom de l’état, c’est-à-dire qu’elles ne sont pas indépendantes, c’est une justice qui est
rapprochée à la justice ordinaire. Il s’agit d’une instance qui est soumise au contrôle final du
Conseil d’Etat par voie de cassation ou d’appel.

Il existe deux critères cumulatifs qui permettent de définir si une instance est bien une instance
spécialisée. Ces deux critères de reconnaissance d’une juridiction admirative spécialisée sont les
suivants :

- Il faut que ce soit une instance investie d’un pouvoir décisionnel

- Il faut que ce soit une instance collégiale

2.1 La Cour Nationale du Droit d’Asile (CNDA)

Cette CNDA juge le contentieux de l’asile, c’est-à-dire le droit reconnu à une personne dont la
sûreté est menacée dans son pays d’origine ou de résidence d’être accueillies et protégée dans
un Etat tiers au sein duquel elle devient « réfugié ».

Un demandeur d’asile est une personne qui prétend au statut de réfugié mais dont la demande
est en cours d’instruction.

En France, l’asile peut être reconnu à des étrangers selon deux fondements juridiques :

- Le premier fondement est constitutionnel, c’est le préambule de la constitution de la IV ème


république (1946) qui déclare que toute personne persécutée en raison de son action en faveur
de la liberté a droit à l’asile sur les territoires de la république. Donc cet asile constitutionnel va
pouvoir être réclamé par toutes les personnes qui agissent pour la liberté dans leurs états
d’origine et qui sont persécutés pour cela.

- Le second fondement est conventionnel, c’est celui qui est issu de la convention de Genève
(1951). Cette convention de Genève est appliqué par tous les états membres de l’ONU et elle
prévoit que toute personne qui est persécutée dans son état d’origine en raison de sa race, en
raison de son appartenance à un groupe minoritaire, en raison de ses convictions religieuses
etc, peut demander l’asile dans un état membre de la convention de Genève.

Qui s’occupe de gérer l’asile en France ? Une fois que la France a signé la convention de
Genève, il faut alors mettre en place des institutions qui vont permettre d’instruire les demandes
d’asile. En 1952, il y a donc la mise en place de l’Office Français de Protection des Réfugiés et
des Apatrides (OFPRA). Donc depuis cette date, lorsqu’un étranger demande l’asile aux autorités
Française, il doit présenter sa demande à l’OFPRA.

Parallèlement, on met en place une Commission de recours des réfugiés pour permettre à
l’étranger de contester un refus de l’OFPRA.

En 2007, cette commission de recours des réfugiés s’est transformée en juridiction administrative
et cela donne naissance à la CNDA qui siège à Paris.

Enfin, en 2015, nous avons réformé l’asile en France parce que nous étions dans un contexte
international où les demandes d’asile étaient tellement nombreuses qu’il a été nécessaire de
réformé l’asile et la CNDA.

L’OFPRA est une administration et non une juridiction alors que la CNDA est bien une juridiction.

Pour obtenir l’asile conventionnel, il faut que le réfugié doit démontrer à l’OFPRA qu’il est
persécuté (courriers, enregistrements téléphoniques etc). En effet, le terme de réfugié s’applique à
toute personne qui craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa
nationalité, de son appartenance à certains groupes sociaux ou de son opinion politique.

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L’étranger qui est persécuté dans son état d’origine se débrouille pour entrer sur le territoire
Français. Une fois qu’il est sur le territoire, c’est auprès de l’OFPRA qu’il effectue sa demande
d’asile. Si cette dernière refuse, il va présenter une requête devant la juridiction administrative
spécialisée qui est la CNDA. Il faut savoir que dans plus de 80% des cas, lorsqu’il y a un refus, on
part en procédure juridictionnelle.

Il y a environ 100 000 demandes d’asile par ans en France et c’est un chiffre qui tend à augmenter
de plus en plus. Sur ces 100 000 demandes d’asile, il n’y en a que 20 000 qui aboutissent.

Le parcours du demandeur d’asile Monsieur Y = Prétendant à l’asile

Ce schéma s’oppose à celui du demandeur de visa. Dans ce cas présent, l’étranger Moniteur Y
est sur le territoire Français (c’est l’une des conditions essentielles pour demander l’asile).

- Première étape : En général, cet étranger est accueilli par un réseau associatif de compatriotes
qui va l’aider à monter son dossier. Cet étranger va d’abord passer par un guichet unique en
préfecture, c’est-à-dire que dans chaque préfecture, il y a un Office Français de l’Intégration et
de l’Immigration (OFII) dans lequel l’étranger se déclare présent sur le territoire Français et
affirme qu’il va faire une demande d’asile. C’est ce qui lui permet d’être en situation régulière en
attendant l’instruction.

- Seconde étape : Une fois que l’étranger s’est déclaré en préfecture, il dispose d’un délais de 21
jours pour présenter sa demande à l’OFPRA, il doit obligatoirement se déplacer physiquement
dans les locaux de l’OFPRA pour présenter sa demande d’asile.

- Troisième étape : Ensuite, l’OFPRA va examiner la demande d’asile de l’étranger puis


convoquer ce dernier à un entretien obligatoire. L’OFPRA dispose alors de trois possibilités :
* Soit elle rejette la demande parce qu’elle estime qu’il n’y a pas de menace et que l’étranger
ne risque rien dans son pays d’origine par exemple. Dans ce cas de refus, l’étranger peut saisir
la CNDA et il rentre donc dans un parcours juridictionnel en contestant une décision
administrative devant la CNDA et il dispose d’1 mois pour cette contestation.


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Si la CNDA confirme la décision de l’OFPRA en ne donnant toujours pas l’asile, l’étranger peut
aller jusqu’à saisir le conseil d’état dans un délais de 2 mois.

Si le Conseil d’Etat confirme la position de la CNDA et de l’OFPRA, l’étranger se retrouve donc
en situation irrégulière et donc il est expulsable.

* Soit elle reconnait et lui accorde le statut de réfugié 

* Soit elle estime qu’il n’existe pas de menace réelle pour la vie de l’étranger mais que les
circonstances politiques (guerres, peine de mort existante etc) peuvent potentiellement être une
menace d’un point de vu du respect des droits de l’homme, alors l’OFPRA peut lui accorder
une protection subsidiaire, c’est-à-dire qu’elle donne la possibilité à l’étranger de demeurer en
France pendant 1 an (renouvelable) afin de voir si la situation de son pays d’origine se calme.

En 2019, la CNDA a enregistré 59 091 affaires, ce qui fait une augmentation de 0,9% par rapport
à l’année précédente (2018). Le délais d’instruction est de 7 mois et 5 jours.

De plus, on remarque que 66 460 affaires ont été traitées par la CNDA, c’est-à-dire qu’ils ont pu
traiter plus d’affaires qu’ils en ont enregistré, ils ont donc rattraper leur retard de l’année d’avant.

Si on regarde l’évolution du nombre de recours entre 2015 et 2019, on remarque qu’il y a 20 000
recours de plus. Cette augmentation s’explique d’une part par le contexte internationale des
années 2014/ 2016 lorsque l’on a aperçu un afflux massif de personnes qui fuyaient Daesh, qui
fuyaient le terrorisme en provenance de Syrie et d’Irak. Mais cela s’explique également avec la
réforme de l’asile qui a facilité le jugement à la CNDA en ouvrant, à coté de la procédure collégiale
ordinaire, une procédure à juge unique qui permet de statuer rapidement.

Normalement, la CNDA statut sous 7 mois mais parfois, elle doit statuer sous 5 mois dans une
affaire collégiale et en 5 semaines pour une décision à juge unique.

On précise également que pour l’outre mer, on met en place des vidéos audience devant la CNDA
pour les demandeurs à l’asile qui ont été refusé devant l’OFPRA. Il y en a une en Guyane, en
Martinique et à Mayotte. Cela permet d’éviter le déplacement de l’outre-mer jusqu’à la métropole.

Si on regarde la provenance des demandeurs d’asile, ils viennent de 100 pays donc cela signifie
que la moitié des états du monde produisent des demandeurs d’asile qui arrivent devant la
CNDA. Les 10 principaux pays qui sont demandeurs d’asile en 2019 sont :

- L’Albanie en n°1 avec 9%

- La Géorgie (9%)

- La Guinée (8%)

- Le Bangladesh (5%)

- L’Afghanistan (5%)

- La Côte d’Ivoire (4%)

- Haïti (4%)

- Mali (4%)

- Nigeria (4%)

- République Démocratique du Congo (4%)

2.2 Les Chambres Disciplinaires des Ordres Professionnelles

Il s’agit du contentieux des professions libérales. Les professions libérales sont des professions
dont on réglemente l’accès, c’est-à-dire qu’en plus du diplôme, il faut une certification pour être
reconnu comme faisant parti d’un corps professionnel (ordre des médecin par exemple).

Les professions libérales s’organisent en ordres professionnels et ces ordres professionnels ont
notamment pour mission de faire de la discipline, ils font ce que l’on appelle une justice interne
puisqu’elle ne concerne que les membres de ces disciplines.

Nous avons donc, en France, de nombreuses professions qui ont une justice interne que l’on
qualifie de justice administrative spécialisée. En effet, ce sont des professions qui participent à
des services publics et qui participent à l’intérêt général.

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Les personnes concernées par les ordres professionnels sont les suivantes :

Ordres représentant les Ordres organisant les Ordres organisant d’autres


professionnels de santé professions para-médicales professions libérales

Médecins Infirmiers Architectes

Chirurgiens-dentistes Orthophonistes Expert-comptable

Sages-femmes Orthopédistes Géomètres-experts

Pharmaciens Masseurs-kinésithérapeutes Avocats

Vétérinaires Pédicures-podologues

Leurs missions :

- Mission corporative : Les ordres professionnels rassemblent obligatoirement tous les membres
d’une profession pour exercer une activité pour laquelle on a un diplôme et une inscription à
l’ordre professionnel. L’ordre professionnel permet donc de filtrer l’accès à une profession et
vérifier que les personnes qui entrent dans cette profession ont éthique irréprochable puisque
cela relève de la santé publique.

L’ordre national des médecins, celui des chirurgiens-dentistes et celui des sages-femmes
groupent obligatoirement tous les médecins, les chirurgiens dentistes ou les sages-femmes
habilités à exercer.

- Mission préventive et de contrôle de l’éthique et de la déontologie : Toutes les professions


médicales et paramédicales prêtent serment de respecter un code déontologique (soigner sans
penser à l’argent par exemple). L’ordre des médecins, celui des chirurgiens-dentistes et celui
des sages-femmes veillent au maintient des principes de moralité, de probité, de compétence
et de dévouement indispensables à l’exercice de la médecine, de l’art dentaire, ou de la
profession de sage-femme et à l’observation par tous leurs membres, des devoirs
professionnels ainsi que les règles édictées par le code de déontologie prévu à l’article L.
4127-1. Ils assurent la défense de l’honneur et de l’indépendance de la profession médicale, de
la profession de chirurgien-dentiste ou de celle de sage-femme.


Les professions libérales sont organisées en trois échelons : Les conseils régionaux, les conseils
départementaux et les conseils nationaux.

Au niveau des conseils régionaux et nationaux, il va y avoir une chambre disciplinaire qui est la
juridiction spécialisée.

Les chambres disciplinaires des ordres professionnels :

Ordre Conseil régional qui élit Conseil national qui Cassation


Juridiction disciplinaire constitue une
de premier degré Juridiction disciplinaire
d’appel

Médecins Chambre disciplinaire de Chambre disciplinaire Conseil d’Etat


première instance au nationale au sein de
niveau régional au sein laquelle siège un
de laquelle siège un président de cour
président TA administrative d’appel

Chirurgiens dentistes Chambre disciplinaire de Chambre disciplinaire Conseil d’Etat


première instance au nationale au sein de
niveau régional au sein laquelle siège un
de laquelle siège un président de cour
président TA administrative d’appel
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Sages femmes Chambre disciplinaire de Chambre disciplinaire Conseil d’Etat
première instance inter- nationale avec un
régionale et sans conseiller d’Etat comme
magistrat administratif président
Pharmaciens Chambre nationale de Conseil d’Etat
discipline avec un
conseiller d’Etat avec
voie délibérative

Chambre disciplinaire Conseil d’Etat


d’appel avec 5 sections
et un conseiller d’Etat
président

Dans chaque instance, il y a un magistrat professionnel, soit un magistrat administratif, soit un


magistrat judiciaire pour les pharmaciens. En effet, les pharmaciens sont particuliers puisqu’ils
ont un magistrat judiciaire et non administratif, cela s’explique par le fait que les pharmacies sont
des établissements hybrides de santé et le pharmacien a donc la possibilité de vendre des
produits dérivés, de faire du chiffre d’affaire et de s’enrichir.

Exemple :

Faits : Abus de faiblesse sur patient vulnérable/ médecin

Un médecin est mis en cause pour avoir prétendument abusé de la faiblesse d’une personne
vulnérable (personne âgée, personne handicapée etc). Ce médecin est d’une part en train de
fauter parce qu’il viole le code pénal en tant qu’individu et d’autre part, il est en train de fauter
parce qu’il viole les obligations déontologiques en tant que professionnel de santé.

Ainsi, il va être mis en cause au pénal et jugé en tant qu’individu au pénal mais il va également
être mis en cause en tant que professionnel qui a violé le code déontologique et donc il est mis en
cause par la chambre disciplinaire de l’ordre qui incarne la justice administrative.

Au pénal, le médecin peut être sanctionné par de la prison ou un procès mais il ne pourra pas être
radié de l’ordre des médecins au pénal. En revanche, la chambre disciplinaire de l’ordre ne peut
pas fixer de procès mais elle peut fixer des interdictions temporaires d’exercice, des suspensions.
Ce sont donc des justices parallèles et complémentaires.

D’un côté, il y a une procédure pénale classique qui peut conduire à une sanction pénale (procès,
emprisonnement), on envoie donc la personne devant le tribunal correctionnel.

De l’autre côté, parallèlement, il y a une procédure disciplinaire (justice administrative spécialisée)


en allant devant la chambre disciplinaire de premier degré au niveau régional, éventuellement
devant la chambre disciplinaire d’appel de Paris et éventuellement un pourvoi en cassation
devant le Conseil d’Etat.

Mais il peut y avoir une procédure et pas l’autre, c’est-à-dire qu’il est possible qu’il y ait la
procédure pénale et pas celle disciplinaire ou inversement.

Le médecin donc peut se retrouver devant le juge :

- Soit par une plainte de la victime

- Soit par une plainte ou un signalement de la part de son confrère

- Soit par un signalement de l’ordre des médecins directement

- Soit par un signalement du procureur de la république

Le conseil régional de l’ordre va donc instruire l’affaire à travers sa chambre disciplinaire de


première instance au niveau local.

Sur instruction de l’affaire, on rend une décision de première instance qui peut conduire à mettre
à pied le professionnel, le suspendre ou encore le radier. Ici, on peut éventuellement se retrouver
en appel et celui-ci peut venir de l’ordre, de la victime, du professionnel ou encore du procureur.

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L’appel va s’effectuer en chambre disciplinaire nationale puis une décision en appel sera donc
rendue. La dernière étape pourrait être un pourvoi en cassation de la part du professionnel, de
l’ordre ou encore de la victime. Cela passe donc par le Conseil d’Etat qui pourra soit, casser et
annuler la décision en renvoyant devant une chambre disciplinaire nationale ou soit rejeter le
pourvoi.

2.3 Les Commissions Spéciales des Fédérations Sportives

Toutes les fédérations sportives ont des compétences ordinaires sur leurs membres, en effet,
selon l’article L.131-1 du code du sport, « Les fédérations sportives ont pour objet l’organisation
de la pratique d’une ou de plusieurs disciplines sportives. Elles exercent leur activé en toute
indépendance ».

De plus, selon l’article 131-8-1 du code du sport, « Chaque fédération sportive agréée établit une
charte éthique et veille à son application. Le contenu, les modalités d’entrée en vigueur et les
conditions d’application de cette charte sont définis par décret pris après avis du Comité national
olympique et le sportif Français ».

A partir du moment où l’on fixe des règles de comportement, on a forcément des sanctions qui
sont donnés par la fédération à travers ses organes disciplinaires. En gros, les fédérations
sportives fonctionnent comme des ordres professionnels des médecins, c’est-à-dire qu’elles
créent un code éthique à leur niveau et ce code éthique doit être respecter parce qu’en cas de
violation, il y aura des sanctions disciplinaires avec plusieurs degrés.

Si une personne sportive triche ou ne respecte pas les codes, on lui implante une procédure
disciplinaire pour violation de la charte éthique devant l’organe dit disciplinaire de première
instance. Cet organe disciplinaire de première instance va rendre une décision, cette décision
peut être une sanction, un blâme, une interdiction de compétition, une interdiction de se réinscrire
à la fédération pendant un certain temps, une interdiction définitive etc. Cette décision peut être
contestée devant une instance disciplinaire d’appel.

Cette instance disciplinaire d’appel va confirmer ou infirmer la décision de première instance et


elle va le faire en rendant une décision qui peut être une sanction ou une interdiction quelconque.

Si la cour d’appel confirme la décision précédente, le demandeur ne peut pas former un pourvoi
en cassation, en effet, il s’agit d’un système hybride donc il va devoir réintégrer un circuit de
juridiction administrative classique et ainsi, il va devoir retourner devant le tribunal administratif en
première instance, en cour administrative d’appel puis au conseil d’état.

On considère alors que les organes organes disciplinaires des fédérations sportives sont des
juridictions administratives spécialisées au même titre que la CNDA, que les juridictions
disciplinaires des ordres professionnels mais en cas de contestation on doit repartir devant le
cheminement classique (TA/ CAA/ CE).

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Exemple :

Monsieur A a fait l’objet, le 27 janvier 2007, d’un contrôle anti-dopage lors des championnats de
France militaires de cross country à Urines et ce contrôle révèle qu’il s’est dopé. Donc ici, le
sportif a violé le code d’éthique, il a violé les règles de fratrie sportive imposées par la fédération
de cross country.

Il va donc être mis en cause dans un premier temps par l’organe disciplinaire de première
instance de lutte contre le dopage de la fédération française d’athlétisme.

La fédération Française d’athlétisme, en première instance, va prononcer une sanction de


suspension de 3 ans de toute compétition sportive.

Suite à cette sanction, Monsieur A décide de faire appel devant la chambre disciplinaire d’appel
de lutte contre le dopage et cette chambre va confirmer la sanction par décision du 7 juin 2007.

Monsieur A décide de contester denouveau cette décision et il doit se présenter devant le tribunal
administratif de Montpellier qui rejette sa demande le 19 mai 2009 en confirmant la sanction de
trois ans de suspension pour toute compétition sportive.

Ensuite, Monsieur A conteste devant la cour administrative d’appel de Marseille qui annule le
jugement du tribunal administratif de Montpellier et la décision de la Fédération Française
d’athlétisme. Ici, alors que nous avions trois premières étapes qui allaient vers la condamnation,
on a une nouvelle décision et suspend la suspension de 3 ans.

La fédération peut donc décider de se pourvoir en cassation contre cet arrêt et le Conseil d’Etat
annule la relaxe de la cour administrative d’appel.

Pendant les 5 ans de cette procédure, il n’y a pas eu d’effet suspensif du recours, c’est-à-dire
que durant les 3 années de suspension normalement prévues, Monsieur A n’a pas pu participer à
des compétitions sportives.

Exemple où l’on agit en référé :

Monsieur Leonardo de Araujo, ancien directeur sportif du club Paris-Saint-Germain, a fait l’objet
d’une décision de la commission disciplinaire d’appel de la Fédération Française de football du 3
juillet 2013 le suspendant de toute activité sportive dans la discipline de football de France
jusqu’au 30 juin 2014 et demandant que cette suspension soit également appliquée par toutes les
associations membres de la Fédération internationale de football association.

On se trouve ici directement devant la commission disciplinaire d’appel, on imagine donc qu’en
première instance, il y a déjà eu une condamnation.

Une fois que la Commission disciplinaire a statué, Monsieur Leonardo Araujo peut saisir le
tribunal administratif de Paris par recours des référés parce que c’est un cas assez urgent. Le
tribunal administratif accepte de suspendre la décision de l’organe disciplinaire donc le TA donne
raison au plaignant, à savoir Monsieur Leonardo de Araujo.

Suite à cette décision, il y a un appel de la fédération Française de football devant le Conseil


d’Etat en référé.

Le Conseil d’Etat rejette la demande donc Monsieur Leonardo de Araujo peut retourner travailler
au Paris-Saint-Germain comme entraineur.

Les juridictions spécialisées en voie de disparition :

Il existe des juridictions spécialisées en voie de disparition. En effet, il s’agit notamment des
commissions départementales d’aide sociale et des commissions centrales de l’aide sociale. Il
s’agit de juridictions administratives spécialisées qui s’occupaient des contentieux concernant la
couverture malade universel, concernant l’aide médicale d’état, concernant le droit au logement
opposable etc.

Il s’agissait d’une juridiction très active parce que dès lors qu’il est question de prestations
sociales en France, il y a un contentieux très abonnant. Mais en 2016, par la loi de modernisation
de la justice, on a ordonné la suppression de ces juridictions spécialisées pour les rapprocher à la
juridiction classique. En effet, on a voulu que l’aide sociale soit un contentieux ordinaire et non
plus un contentieux spécialisé.

La suppression s’est faite progressivement et c’est depuis le 1er janvier 2019 que les tribunaux
administratifs en premier ressort sont compétents pour l’aide sociale.

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Cette suppression ne se fait absolument pas dans le but de supprimer des juridictions inutiles, en
effet, on peut observer la naissance de nouvelles juridictions administratives spécialisées ces
dernières années. Au 1er janvier 2019, les commissions d’aides sociales disparaissent et au
même moment, on voit naître la commission du contentieux du stationnement payant comme
étant une nouvelle juridiction spécialisée. C’est la loi de métropolisation qui l’a créé, la loi de 2014
et la loi est entrée en exercice au 1er janvier 2018.

Cette juridiction spécialisée pour le stationnement payant n’a qu’une seule compétence et il s’agit
de gérer le contentieux des contraventions de stationnement.

La procédure est simple, en effet, si une personne ne paye pas son stationnement, elle se voit
transmettre une contravention. Dans ce cas, avant de contester devant le juge, il doit contester sa
contravention en faisant un Recours Administratif Préalable Obligatoire (RAPO) à la collectivité ou
la société responsable, ce recours est une sorte de recours à l’amiable et il dispose d’un mois
pour contester.

Une fois avoir tenté d’éviter de payer la contravention à l’amiable, et que cela n’a rien donné, on
peut saisir la commission du contentieux du stationnement payant dans un délais d’un mois. Si
celle-ci ne donne pas gain de cause, on peut saisir le conseil d’état dans un délais de 2 mois.

Ce contentieux est très important puisqu’il a enregistré 69 000 affaires dès la première année et il
n’a pu traiter seulement 4000 affaires.

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