Die große Masse der Geistigen - vor allem der Schöngeistigen -
ist in trostloser Lage. Schuld ist an dieser Lage aber nicht Cha- rakter, Stolz und Unzugänglichkeit. Die Journalisten, Roman- ciers und Literaten sind meistens zu jedem Kompromiß bereit. Nur wissen sie das nicht, und eben dies ist der Grund ihrer Mißerfolge. Denn weil sie es nicht wissen oder wissen wollen, daß sie käuflich sind, darum verstehen sie nicht, von ihren Meinungen, Erfahrungen, Verhaltungsweisen die Teile, die für den Markt Interesse haben, abzulösen. Sie suchen vielmehr ihre Ehre darin, in jeder Sache ganz sie selbst zu sein. Weil sie sich nur »im Stück« verkaufen wollen, werden sie ganz genau so unverwertbar wie ein Kalb, welches der Schlächter seiner Kundin nur im ganzen würde überlassen wollen.
(SUR SCHEERBART)
Paul Scheerbart avait deja publie une vingtaine de volumes
lorsque, un beau matin d'aoßt 1914, on put lire de lui un article dans le Zeit echo - hebdomadaire que les artistes et les ecrivains allemands s'etaient empresses de fonder pour agrementer de l'elan de leur plume ou de leur pinceau les assauts des soldats allemands. Cet article qui allait a l'encontre du courant etait toutefois de tournure assez savante pour echapper a la censure. En voici le debut tel qu'il s'est grave dans ma memoire: »Et que je proteste d'abörd contre l'expression >guerre mondiale<. Je suis certain qu'aucun astre, si proche soit-il, n'ira se mHer de l'affaire OU nous sommes impliques. Tout porte a croire qu'une paix pro- fonde ne cesse de planer sur l'univers stellaire.« Les livres de Scheerbart n'ont guere plus retenu l'attention du public que cette phrase celle de la censure. 11 n'y a a cela rien que de nature!. L'reuvre de ce poete est tout empreinte d'une idee qui etait on ne peut plus etrangere aux idees qui prevalaient. Cette idee - cette image, plut8t - etait celle d'une humanite qui se serait mise au diapason de sa technique, qui s'en serait servie humainement. A un tel etat de choses Scheerbart crut voir deux Käuflich doch unverwertbar . Sur Scheerbart
conditions essentielles, a savoir: que les hommes sortent de
a l'opinion basse et grossiere qu'ils sont appeles >exploiter< les forces de la nature; que, par contre, ils demeurent convaincus que la technique, tout en liberant les humains, libererait frater- nellement par eux la creation entiere. Voyons le plus important de ses romans, intitule Lesabendio. L'action se passe sur un asteroide nomme Pallas. Les hres qui le peuplent n'ont pas de sexe. Les Pallasiens >nouveaux-nes< se trouvent, enfermes en des coquilles de noix, dans les entrailles de leur astre. Les premiers sons qu'ils laisseront echapper a l'apparition de la lu miere formeront leurs noms propres; tels Biba, Bombimba, Labu, Sofanti, Lesabendio. Le Pallas est petit; deux vastes entonnoirs se trouvent sur son c6te nord et son c6te sud. Cest aleur interieur que s'abritent les quelques centai- nes de milliers d'habitants. Les PalI asiens s'attachent aembellir leur astre; ils en modulent les surfaces, le dotant pour ainsi dire de >sites< en formes cristallines ou autres. Vient Lesabendio qui a l'idee d'elever une tour au-dessus de l'entonnoir septentrional (qui communique par un tunnel avec l'entonnoir du sud). A l'origine cette construction n'a pas de destination precise. On ne s'apercevra que bien plus tard a quoi elle devra servir. (Ainsi la tour d'Eiffel a trouve son affectation actuelle une trentaine d'annees apres son erection.) La tour de Lesabendio devra reunir le torse de l'asterolde a sa partie capitale qui plane, sous forme d'un nuage lumineux, au-dessus de lui. Mais cette restitutio in integrum du Pallas ne pourra reussir qu'au prix que Lesabendio accepte de se dissoudre dans le corps de son astre m&me. Tandis qu'auparavant les gens du Pallas ont connu une mort exempte de douleur en se dissolvant dans le corps d'un de leurs cadets, ils vont, desormais, epouser la douleur gdce a Lesabendio qui, par sa fin, devra &tre le premier a l'eprouver. La tour, augmen- tant en hauteur de jour en jour par le zele des Pallasiens, appor- te ra des changements dans l'ordre stellaire. En m&me temps, la dissolution de son architecte dans son astre commencera a chan ger le rythme de celui-ci. Il se reveillera aune vie nouvelle, toute tournee vers ses astres-freres. Il ne r&vera plus que de former, uni a eux, un charnon dans l'anneau des asteroides qui devra, un jour, ceindre le Sol eil. La grande trouvaille de Scheerbart aura ete de faire plaider par 632 Ästhetische Fragmente
les astres aupres des humains la cause de la cft!ation. On l'avait
deja entendu plaider par la voix des b&tes. Mais qu'un pohe fasse des astres les porte-paroles de la creation, cela temoigne d'un sentiment tres puissant. Cela prouve du reste a quel point a cet auteur avait reussi se depouiller des scories de la sentimen- talite. Son style en fait foi. 11 a la fratcheur des joues de nourris- son. 11 est, en m&me temps, d'une transparence teIle qu'on a comprend que Scheerbart ait ete le premier saluer l'architecture en verre qu'on devait, apres sa mort, bannir, comme subversive, de son pays. La serenite doucement emerveillee avec laquelle l'auteur relate les etranges lois naturelles des autres mondes, les grands travaux cosmiques qu'on y entreprend, les entretiens noblement naifs de leurs habitants font de lui un de ces humoristes qui, tel Lich- tenberg ou Jean Paul, ne semblent jamais oublier que la terre est un astre. En relatant les hauts-faits de la creation il paratt parfois un frere jumeau de Fourier. 11 y a dans les fantaisies extravagantes sur le monde des Harmoniens autant de raillerie a l'adresse de l'humanite actuelle que de foi en une humanite future. Gest, chez le poete allemand, le meme dosage. Il est peu vraisemblable que l'utopiste allemand ait connu l'ceuvre de l'utopiste frans:ais. Mais l'image de la planhe Mercure enseignant leur langue natale aux Harmoniens efrt ete bien faite pour ravir Paul Scheerbart.