Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
net/publication/332530508
CITATIONS READS
0 55
4 authors, including:
Chouvel Jean-Marc
Sorbonne Université
19 PUBLICATIONS 27 CITATIONS
SEE PROFILE
Some of the authors of this publication are also working on these related projects:
All content following this page was uploaded by Zaher Belghith on 19 April 2019.
Zaher Belghith
Marie Tahon
IReMus - Paris Sorbonne Université
LIUM - Le Mans Université
GREAM - Université de Strasbourg
marie.tahon@univ-lemans.fr
zaher.belghith@paris-sorbonne.fr
Jean-Marc Chouvel
Pierre Michel
IReMus - Paris Sorbonne Université
GREAM - Université de Strasbourg
jeanmarc.chouvel@free.fr
spsm@unistra.fr
L’extraction des pulsations (beat detection) est lar- Le choix du nombre de clusters est déterminant
gement utilisée dans le domaine du Music Informa- sur la structure finale obtenue. Selon la durée du si-
tion Retrieval où les corpus musicaux contiennent gnal et le niveau de structure souhaitée, le nombre de
une large quantité de musique à temps forts mar- clusters optimal diffère. Deux approches ont été rete-
qués (rock, variété, etc.). L’extraction de pulsations nues pour définir le nombre de clusters K : manuelle
sur ce type de musique est fiable et robuste. Ainsi ou automatique.
les récurrences locales sont-elles étudiées entre deux
temps consécutifs (noires consécutives) a priori tous
de même durée. 4.1. K fixé par l’utilisateur
produit scalaire et kXk est la norme de X. le contenu musical (complexité rythmique, matériau
mélodico-harmoique) généré par le processus d’in-
X·Y
cos θ = (6) teraction entre les musiciens, ce qui nous amène à
kXk · kYk mener des recherches poussées au niveau de la ma-
Plus les vecteurs sont orthogonaux, plus la similarité tière acoustique.
cosinus tend vers 0, plus les vecteurs ont des orienta- Ce travail de recherche inter-disciplinaire tente de
tions proches, plus la similarité cosinus tend vers 1. mettre en lumière le processus de composition ainsi
Par exemple, sur la figure 4, on peut noter la courbe que le processus d’interaction entre les musiciens sur
en noire représentant la similarité cosinus du cluster les deux premières minutes de l’extrait.
courant par rapport à la référence (début du morceau
ici). On peut remarquer que les clusters c0 et c1 (cor-
7.2. Segmentation initiale
respondant aux motifs a et b) sont très proches, alors
que les motifs centraux (c2 à c5 ) sont éloignés des Une première analyse des résultats avec l’approche
clusters c0 et c1 . Cela s’interprête facilement si l’on originale de McFee and Ellis a montré que l’extrac-
regarde les différences harmoniques entre les parties tion de beats ou d’onsets n’était pas du tout per-
A et B. tinente pour ce type de musique improvisée, mais
qu’une temporalité fixe apportait des résultats satis-
7. APPLICATION AU FREE JAZZ faisants. Une approche manuelle a l’avantage 1) de
permettre à l’analyste de définir lui-même implicite-
L’année 1966 a marqué la naissance du premier ment le niveau de structure qu’il cherche ; 2) d’orien-
orchestre de Free Jazz Européen Globe Unity, faisant ter fortement la recherche de similarité ; et donc ap-
appel à des musiciens venant de plusieurs collectifs porte des résultats plus pertinents qu’un fenêtrage
ayant contribué au développement de cette musique fixe. Ainsi, l’extraction du rythme en fonction du tac-
comme le quintet de Manfred Schoof et le quartet de tus suggéré par les phrases jouées collectivement par
Gunter Hampel. Le concert de cet orchestre en 1966, les musiciens, a été faite manuellement.
au festival “Donaueschingen Tage fur Neue Musik” Nous constatons une certaine régularité au niveau
a donné lieu à l’enregistrement du disque Globe Unity des segments manuels. Ceci s’explique par la cohé-
67/70 (édité en 1967). Nous avons fait le choix d’analy- sion au sein du collectif et l’importance du tactus
ser ce disque suite à la présence d’un support musical qui reste fixe et partagé par tous les musiciens. On
(partitions) fourni par le compositeur. En se référant à notera cependant une augmentation de la durée des
la partition du morceau Globe Unity, les 2 premières segments lors des transitions due aux notes tenues.
minutes montrent une mise en place de l’orchestre
sous forme de groupes instrumentaux homogènes
7.3. Analyse mélodico-harmonique (chroma et ∆)
interagissant en créant des textures différentes. Il est
à noter que la structure de Globe Unity, est fondée sur En choisissant une représentation fréquentielle sur
une série de 23 notes, précisée figure 2. La série peut 12 chroma (correspondant aux 12 demi-tons de la
se décomposer en tétracordes structurés en tierces gamme tempérée), nous pouvons tracer l’évolution
mineures, et formant, à leur tour, des patterns. temporelle de ces descripteurs ainsi que leur dyna-
mique (o transformée différentielle). L’analyse conjointe
7.1. Travail préliminaire de l’évolution des chroma et respectivement, des ∆
chroma (fig 3 en haut, resp. en bas) permet de déga-
Les premières recherches 4 réalisées sur le mor- ger une forme caractérisée par deux grands moments
ceau Globe Unity du disque de même nom se sont formels.
d’abord focalisées autour des sources primaires concer- Exposition du matériau (1’00 - 1’10). L’analyse
nant le processus de création collectif. Ces recherches des chroma révéle la saillance des hauteurs du té-
ont permis de découvrir quelques partitions trans- tracorde 1 (do#, ré, mi, fa), première couleur harmo-
crites à la main sous forme de graphiques par le nique issue de la série utilisée dans ce morceau ; puis
compositeur. Ces partitions apportent des informa- des hauteurs du tétracorde 2 (do, ré, mib, fa#), se-
tions précieuses sur l’orchestration ou l’interpréta- conde couleur harmonique.
tion, cependant elles n’apportent aucun détail sur
Phase de transition (1’10 - 1’15. L’analyse des
4 . Travaux musicologiques menés par Zaher Belgith chroma montre une stabilité harmonique et dyna-
Figure 3. Représentation des chroma (haut) et des ∆ chroma (bas) de l’extrait Globe Unity.
mique. Nous verrons plus loin qu’il s’agit d’un cres- prolifération en quatre sous sections. La caractérisa-
cendo qui ne peut pas être visualisé sur ce type de tion mélodico-harmonique de ces sections se faisant
représentation. grâce aux chroma directement.
Prolifération du matériau (après 1’15). Le maté-
riau musical est développé et retravaillé en variant
les modes de jeu (trilles, glissandi, accelerando) et 7.4. Partitionnement final
en accentuant certaines notes. L’ajout successif de Après avoir proposé un niveau de structuration à
nouvelles notes au pattern initial par un jeu de che- l’aide de la représentation des chroma, nous souhai-
vauchement des tétracordes permet d’augmenter la tons mettre en évidence un autre niveau de structu-
densité harmonique et donne l’illusion d’un chroma- ration en mélangeant plusieurs descripteurs audio.
tisme total (comme indiqué fig. 3 en haut). Ainsi, le Dans la mesure où les musiciens de ce répertoire
compositeur crée un brouillage de la perception chez cherchent à exprimer, pendant le processus de l’in-
l’auditeur et renforce l’aspect atonal de la pièce. teraction, un contraste en modifiant le registre ou la
Cette analyse montre que le morceau a été com- texture sonore, le choix de combiner des descripteurs
posé autour de tétracordes juxtaposés dans le temps spectraux comme le centroid spectral ou le roll-off et
qui se fondent ensuite en un chromatisme qui ren- des chroma, s’impose. Le nombre de clusters K dé-
force l’aspect atonal de la pièce. D’après la transfor- terminé automatiquement est très élevé et implique
mée différentielle (fig. 3 en bas), le second moment une segmentation beaucoup trop fine par rapport aux
formel – prolifération – peut se subdiviser en 4 sec- attendus de l’expert. Ainsi, après plusieurs essais,
tions : rappel du tétracorde 1 (1’15 - 1’24), ajout du celui-ci a fixé manuellement à K = 6, 8. La segmen-
tétracorde 2 (1’24 - 1’35), ajout d’un troisième tétra- tation obtenue est reportée figure 4 et les regroupe-
corde (fa, sol, lab, sib) (1’35 - 1’45) puis ajout du der- ments des clusters suivant les moments musicaux
nier tétracorde (fa#, sol#, la, si) (1’45 - 1’57). Ces der- identifiés à la section précédente sont précisés dans
niers tétracordes s’inscrivent dans la continuité des le tableau 1.
premiers selon la même logique de tierces mineures. Dans la configuration K = 6, l’algorithme de spec-
Alors que la représentation des chroma permet tral clustering identifie correctement les moments d’in-
une analyse mélodico-rythmique basée sur la saillance troduction, d’exposition et de transition. Ce cluster se
de certaines hauteurs, le transformée différentielle caractérise par un crescendo dynamique (succession
(i.e. les ∆) permet de confirmer l’évolution dyna- d’instruments, gardant le principe de séparation de
mique entre les différents patterns (ici des tétracordes). couleurs instrumentales où les timbres ne seront pas
La dynamique nous indiques “les transferts d’éner- mélangés) suivi d’un petit crescendo d’intensité ex-
gie en jeu dans les transitions harmoniques” [6]. En primé par les trompettes pour annoncer le début d’un
particulier la transformée différentielle permet de autre moment. Par contre, les trois dernières sections
confirmer la segmentation temporelle du moment de du moment de prolifération ne correspondent qu’à
Figure 4. Partitionnement final obtenu sur l’extrait de Globe Unity avec utilisation des chroma+spectraux et une
segmentation temporelle initiale manuelle. En haut la représentation fréquentielle à Q-constant synchronisée
sur les segments manuels, au milieu, la structure obtenue avec K = 6 clusters, en bas avec K = 8 clusters. La
courbe en escalier représente la distance cosinus entre le cluster courant et la référence. Les barres verticales
blanches rappellent la segmentation obtenue avec la représentation des chroma.