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Transfert de chaleur par rayonnement

Mise en évidence du transport radiatif de chaleur

William HERSCHEL a pu mettre en évidence, en 1800, le phénomène de transfert radiatif de chaleur


par une expérience, simple dans son principe, mettant en jeu une source, un prisme, un écran
absorbant et des thermomètres.

T
Source

Prisme

Ecran absorbant

Le prisme permet de réaliser la dispersion en longueur d’onde de l’émission de la source. La présence


de thermomètres au contact de l’écran absorbant permet alors de montrer que celui-ci s’échauffe de
manière différente selon l’endroit auquel on se place. L’échauffement provoqué par le rayonnement
dépend de la longueur d’onde de celui-ci. En un endroit donné de l’écran absorbant, la température
caractérise l’énergie reçue par l’écran pour la longueur d’onde correspondante. La courbe
représentant l’évolution de la température en fonction de la longueur d’onde 𝑇 = 𝑇(𝜆) représente
alors la répartition spectrale de l’énergie rayonnée pour la température de la source et l’on remarque
alors deux choses:

- L’énergie émise est maximale pour une certaine longueur d’onde 𝜆𝑚 qui dépend de la
température de la source.
- L’énergie n’est émise que dans un certain domaine de longueurs d’onde que l’on appelle les
longueurs d’onde thermiques et qui s’étend de 10−7 à 10−4 m, ce qui englobe l’infrarouge (de
0,75 10−6 à 10−4 m), le visible (de 0,38 10−6 à 0,75 10−6 m ) et l’ultraviolet proche (de 10−7
à 0,38 10−6 m).
Définitions

Le transfert radiatif de chaleur regroupe plusieurs phénomènes :

- L’émission
- Le transport depuis l’objet émetteur vers l’objet récepteur
- L’absorption

Nous allons dans cette partie définir les grandeurs physiques qui vont nous permettre de décrire
quantitativement les phénomènes d’émission et d’absorption après avoir fait au préalable quelques
rappels sur les angles solides qui nous permettront de quantifier le transport depuis l’objet émetteur
vers l’objet récepteur.

Rappels sur l’angle solide

L’angle solide est à l’espace en trois dimensions ce que l’angle est au plan.

Ainsi, si l’angle 𝛼 ( en radians rd) est défini par le rapport entre la longueur 𝑙 de l’arc de cercle intercepté
et le rayon 𝑅 du cercle :
𝑙
𝛼=
𝑅 𝑅 𝑙
𝛼

L’angle solide Ω (en stéradians sr) est défini par le rapport entre l’aire 𝑆 de la surface interceptée sur
une sphère et le rayon 𝑅 de cette sphère au carré :
𝑆
Ω=
𝑅2
𝑅 𝑆 𝑆
𝑅
Ω Ω

L’angle solide élémentaire 𝑑Ω , en coordonnées sphériques, est défini par des variations élémentaires
de la longitude 𝜃 et de la colatitude 𝜑 .

La surface interceptée par la sphère est alors assimilable à un rectangle de côtés 𝑅𝑑𝜃 et 𝑅𝑠𝑖𝑛𝜃𝑑𝜑 .

On a donc :

𝑑Ω = 𝑠𝑖𝑛𝜃 𝑑𝜃 𝑑𝜑
Cercle de rayon
𝑅𝑠𝑖𝑛𝜃

𝑅 𝑑𝜃
𝜃
𝑅𝑑𝜃

O
Cercle de rayon
𝑑𝜑 𝑅𝑠𝑖𝑛𝜃
𝑅𝑠𝑖𝑛𝜃𝑑𝜑
𝑑𝜃

𝑅𝑑𝜃 𝑑𝜑

𝑅𝑠𝑖𝑛𝜃𝑑𝜑

Grandeurs relatives à la réception

L’éclairement

L’éclairement correspond au flux total incident (noté 𝜙 (𝑖) ) par unité de surface et s’exprime en W.m-2
.

𝑑𝜙 (𝑖)
𝐸=
𝑑𝑆
L’éclairement peut également être défini à toute longueur d’onde 𝜆 (éclairement monochromatique):
(𝑖)
𝑑𝜙𝜆
𝐸𝜆 =
𝑑𝑆
(𝑖)
𝜙𝜆 étant le flux incident à la longueur d’onde 𝜆 .

En arrivant sur une surface matérielle, le flux incident peut être réfléchi, absorbé (c'est cette partie qui
participe directement au transfert thermique) ou transmis.

On note ainsi 𝜌 la fraction du flux incident qui est réfléchie (c'est le coefficient de réflexion), 𝛼 la
fraction qui est absorbée (c'est le coefficient d'absorption) et 𝜏 la fraction transmise (coefficient de
transmission).

On a ainsi la relation :

𝜌+𝛼+𝜏 = 1
Chacun de ces coefficients dépend bien évidemment de la longueur d'onde, ce que l'on peut illustrer
pour le coefficient de transmission par exemple avec la figure ci-dessous qui représente l'évolution de
ce coefficient avec la longueur d'onde pour différents matériaux :

Grandeurs relatives à l’émission

Tous les corps émettent un rayonnement. Celui-ci est issu de la surface externe de l’objet et ses
caractéristiques dépendent à la fois de la température et des propriétés physiques de l’objet.
(𝑒)
Dans toute la suite, le flux de chaleur total émis est noté 𝜙 (𝑒) et on note 𝜙𝜆 le flux de chaleur émis
à la longueur d’onde 𝜆.

L’exitance (ou émittance)

L’exitance est définie comme étant le flux total émis par unité d’aire et s’exprime en W.m-2 :

𝑑𝜙 (𝑒)
𝑀=
𝑑𝑆
L’exitance peut également être définie pour toute longueur d’onde 𝜆 . On parle alors de l’exitance
monochromatique à la longueur d’onde 𝜆 (exitance monochromatique):
(𝑒)
𝑑𝜙𝜆
𝑀𝜆 =
𝑑𝑆

Et on a donc la propriété :

𝑀 = ∫ 𝑀𝜆 𝑑𝜆
0

𝑀𝜆 s’exprime donc en W.m-3 .

La radiosité

La radiosité représente le flux total par unité d’aire quittant une surface, c’est-à-dire la somme du flux
par unité d’aire émis par cette surface et de la fraction qui est réfléchie du flux incident sur cette
surface par unité d’aire.

𝐽 = 𝑀 + 𝜌𝐸

𝜌 étant la fraction réfléchie du flux incident.

On définit alors également la radiosité à la longueur d’onde 𝜆 (radiosité monochromatique):

𝐽𝜆 = 𝑀𝜆 + 𝜌𝐸𝜆

Si 𝜌 ne dépend pas de la longueur d'onde.

La luminance

La luminance énergétique est définie comme étant le flux de chaleur émis par unité de surface
perpendiculairement à la direction d’émission et par unité d’angle solide. Elle s’exprime en W.m-2.sr-
1

𝑑𝜙 (𝑒)
𝐿𝑒 =
𝑑𝑆 𝑐𝑜𝑠Θ 𝑑Ω

𝑑𝑆 𝑐𝑜𝑠Θ représente la projection de la surface d’émission sur un plan perpendiculaire à la direction


de l’émission.

𝑑𝑆 ′ = 𝑑𝑆 𝑐𝑜𝑠𝜃

𝜃
𝑑𝑆
La luminance peut également être définie pour une longueur d’onde 𝜆 (luminance monochromatique):
(𝑒)
𝑑𝜙𝜆
𝐿𝑒𝜆 =
𝑑𝑆 𝑐𝑜𝑠Θ 𝑑Ω

Si l’émission st isotrope, la luminance ne dépend pas de la direction de l’émission et on peut alors relier
l’exitance et la luminance.

L'exitance est exprimée par unité de surface émettrice et la luminance par unité d'angle solide et par
unité de surface perpendiculairement à la direction d'émission, il faut donc multiplier 𝐿𝑒 par 𝑐𝑜𝑠𝜃 et
intégrer sur l'ensemble des angles solides :

𝜋
𝜃= 𝜑=2𝜋
2
𝑀= ∫ 𝐿𝑒 𝑐𝑜𝑠𝜃 𝑑Ω = ∫ ∫ 𝐿𝑒 𝑠𝑖𝑛𝜃 𝑐𝑜𝑠𝜃 𝑑𝜃 𝑑𝜑
𝑑𝑒𝑚𝑖−𝑒𝑠𝑝𝑎𝑐𝑒 θ=0 𝜑=0

𝜋 𝜋
𝜃= 𝜃=
2 2
𝑀 = 2𝜋𝐿𝑒 ∫ 𝑠𝑖𝑛𝜃 𝑐𝑜𝑠𝜃 𝑑𝜃 = 𝜋𝐿𝑒 ∫ 𝑠𝑖𝑛2𝜃 𝑑𝜃
𝜃=0 𝜃=0

Et finalement :
𝜋
1 2
𝑀 = 𝜋𝐿𝑒 [− 𝑐𝑜𝑠2𝜃] = 𝜋𝐿𝑒
2 0

Ce résultat représente la loi de Lambert.


Outre les grandeurs qui viennent d’être définies, la description quantitative des phénomènes
d’émission et d’absorption va faire intervenir les propriétés intrinsèques des matériaux que l’on va
exprimer par référence au concept de corps noir.

Le corps noir

Le corps noir est un corps matériel qui absorbe l’intégralité du rayonnement électromagnétique qu’il
reçoit quel que soit le spectre de ce rayonnement. Il s’agit d’un corps idéal. Absorbeur parfait, le corps
noir est également l’émetteur parfait : à une température donnée, le corps noir, dont l’émission est
isotrope, présente l’émission par rayonnement dont le flux énergétique est maximal, et ceci pour toute
longueur d’onde 𝜆 .

Dans toute la suite du cours, les grandeurs relatives au corps noir seront identifiées à l’aide de
l’exposant °.

Pour quantifier l'absorption et l'émission d'un corps réel par rapport au corps noir, on utilise
l'absorptivité 𝑎𝜆 et l'émissivité 𝑒𝜆 .

Absorptivité d'un corps


L'absorptivité monochromatique à une longueur d'onde 𝜆 est définie comme le rapport entre le flux
absorbé à la longueur d'onde 𝜆 et le flux reçu toujours à la longueur d'onde 𝜆 (𝐸𝜆 ):
(𝑎)
𝜙 flux énergétique absorbé à 𝜆
𝑎𝜆 = 𝜆 =
𝐸𝜆 flux énergétique incident à 𝜆
L'absorptivité peut également être définie d'une manière globale sur tout le domaine de longueurs
d'onde :

𝜙 (𝑎) flux énergétique absorbé


𝑎= =
𝐸 flux énergétique incident
Pour le corps noir, 𝑎𝜆 = 1 ∀𝜆

L'absorptivité, globale ou monochromatique, dépend de la température et est donc définie à une


température donnée

Emissivité d'un corps


L'émissivité monochromatique 𝑒𝜆 à une longueur d'onde 𝜆 est définie comme le rapport entre le flux
émis à la longueur d'onde 𝜆 et le flux émis à la même longueur d'onde par le corps noir :
𝑀𝜆 flux énergétique émis à 𝜆
𝑒𝜆 = ° = flux énergétique émis à 𝜆 par le corps noir
𝑀𝜆

De la même manière, on définit également l'émissivité globale 𝑒 sur l'ensemble du spectre :


𝑀 flux énergétique émis
𝑒= °
=
𝑀 flux énergétique émis par le corps noir

Comme l'absorptivité, l'émissivité dépend de la température et est donc définie à une température
donnée, qu'elle soit globale ou monochromatique.

A une température donnée et à l'équilibre, on a, pour toute longueur d'onde 𝜆 :

𝑎𝜆 = 𝑒𝜆

C'est la loi de Kirchhoff

L’émission du corps noir

A partir de la théorie des quanta, Planck a montré en 1900 que la luminance du corps noir à une
longueur d’onde 𝜆 et à une température 𝑇 s’exprime de la manière suivante :
2ℎ𝑐 2 1
𝐿°𝑒𝜆 (𝑇) = ℎ𝑐
𝜆5
𝑒 𝜆𝑘𝐵 𝑇 −1
𝑐0
𝑐 représente la vitesse de la lumière dans le milieu considéré égale à 𝑐 = 𝑛
où n est l’indice de
réfraction du milieu et 𝑐0 la vitesse de la lumière dans le vide égale à 2,9979 109 m.s-1

ℎ est la constante de Planck égale à 6,626 10-34 J.s

𝑘𝐵 est la constante de Boltzmann égale à 1,38 10-23 J.K-1

𝑇 est la température en Kelvin

L’émission du corps noir étant isotrope, on peut appliquer la loi de Lambert, ce qui nous permet
d’exprimer l’exitance du corps noir :

2𝜋ℎ𝑐 2 1
𝑀𝜆° (𝑇) = ℎ𝑐
𝜆5
𝑒 𝜆𝑘𝐵 𝑇 −1

L’allure des courbes obtenues en fonction de la longueur d’onde est représentée sur la figure ci-
dessous pour plusieurs températures. 5780 K est la température moyenne à la surface du soleil.

On constate sur ce graphique que l’ensemble des courbes passent par un maximum obtenu pour une
longueur d’onde 𝜆𝑚𝑎𝑥 qui est d’autant plus petite que la température est élevée.

Il est possible d’obtenir la relation 𝜆𝑚𝑎𝑥 = 𝑓(𝑇) en annulant la dérivée de la loi de Planck par rapport
à𝜆.

On obtient alors la première loi de Wien qui exprime d’une manière très simple cette relation :
2880
𝜆𝑚𝑎𝑥 =
𝑇
avec 𝑇 en Kelvin et 𝜆𝑚𝑎𝑥 en µm.

𝑇 (𝐾) 𝜆𝑚𝑎𝑥 (µ𝑚) 𝑀𝜆° 𝑚𝑎𝑥 (𝑊. 𝑚 −3 )


293 9.83 2.772 107
500 5.76 4.01 108
1000 2.88 1.2836 1010
2000 1.44 4.108 1011
5000 0.576 4.011 1013
5780 0.498 8.281 1013

Le rayonnement des corps à la température ambiante se situe donc essentiellement dans l’infrarouge
alors que le maximum du rayonnement solaire se situe dans le visible (maximum d’émission pour le
jaune). Ce phénomène est en particulier à l’origine de l’effet de serre.
14
M°l (W.m-3)
10
1013 5780 K
1012 5000 K
1011
2000 K
1010
1000 K
109
108 500 K
7
10
293 K
106
105
104
103
102
101
l (µm)
100
0 2 4 6 8 10 12 14 16

L’exitance monochromatique maximale pour une température donnée est alors obtenue en donnant
à 𝜆 la valeur 𝜆𝑚𝑎𝑥 dans la loi de Planck :

2𝜋ℎ𝑐 2 1
𝑀𝜆°𝑚𝑎𝑥 = = 1,2836 10−5 𝑇 5
𝜆5𝑚𝑎𝑥 ℎ𝑐
𝑒 𝜆𝑚𝑎𝑥 𝑘𝐵 𝑇 −1
avec 𝑇 en Kelvin

Ceci constitue la deuxième loi de Wien.

D’autre part, il est possible d’obtenir l’exitance totale du corps noir en intégrant la loi de Planck sur
l‘ensemble des longueurs d’onde :

𝑀° = ∫ 𝑀𝜆° 𝑑𝜆
0

On obtient finalement :

𝑀° = 𝜎𝑇 4

avec 𝜎 = 5,68 10−8 W. m−2 K −4

C’est la loi de Stefan – Boltzmann, 𝜎 est appelée constante de Stefan – Boltzmann.


Les corps réels

Par définition du corps noir, les corps réels ont une émission moins importante que celui-ci. Afin de
caractériser l’émission de ces corps réels par référence au corps noir, on utilise l’émissivité qui
représente le rapport entre le flux émis par un élément de surface du corps réel et le flux émis par le
corps noir à la même température.
𝑀𝜆 (𝑇)
𝑒𝜆 (𝑇) =
𝑀𝜆° (𝑇)

L’émissivité dépend de la température 𝑇 et de la longueur d’onde 𝜆 mais peut aussi dépendre de la


direction de l’émission.

Aspect géométrique du transfert radiatif de chaleur entre deux corps noirs

Exprimons tout d'abord le flux de chaleur émis par un corps noir par unité de surface émettrice et par
unité d'angle solide :

°(𝑒) 𝑐𝑜𝑠𝜃 𝑐𝑜𝑠𝜃


𝜙𝜃 = 𝐿°𝑒 𝑐𝑜𝑠𝜃 = 𝑀° = 𝜎𝑇 4
𝜋 𝜋
Puisque, d'après la loi de Stefan-Boltzmann, l'exitance du corps noir est :

𝑀° = 𝜎𝑇 4
Si maintenant on définit un angle solide élémentaire 𝑑Ω tel que sur la figure ci-dessous, on peut alors
exprimer le flux énergétique (puissance) par unité de surface rayonné dans cet angle solide
élémentaire (élément hachuré):

°(𝑒) 𝑐𝑜𝑠𝜃
𝜙𝜃 𝑑𝛺 = 𝐿°𝑒 𝑐𝑜𝑠𝜃𝑠𝑖𝑛𝜃𝑑𝜃𝑑𝜑 = 𝑀° 𝑠𝑖𝑛𝜃𝑑𝜃𝑑𝜑
𝜋

𝜙
𝜃

Angle solide
𝑠𝑖𝑛𝜃𝑑𝜃𝑑𝜙

Surface noire

On considère maintenant deux corps noirs, l'un à la température 𝑇1 , l'autre à la température 𝑇2 .

On va s'intéresser au flux de chaleur transmis par rayonnement du corps 1 vers le corps 2


conformément à la figure représentée ci-dessous :
La puissance rayonnée par l'élément de surface 𝑑𝐴1 dans l'angle solide élémentaire 𝑑Ω1 =
𝑠𝑖𝑛𝜃1 𝑑𝜃1 𝑑𝜑1 est donnée par la relation suivante :

°(𝑒) 𝜎𝑇1 4
𝜙𝜃 𝑑𝐴1 𝑑𝛺1 = 𝑐𝑜𝑠𝜃1 𝑑𝐴1 sin𝜃1 𝑑𝜃1 𝑑𝜑1
𝜋
Au niveau de l'élément de surface 𝑑𝐴2 du corps 2 situé à la distance 𝑟12 de l'élément de surface 𝑑𝐴1 ,
l'angle solide élémentaire 𝑑Ω1 délimite une surface 𝑑Ω1 𝑟12 2 (par définition de l'angle solide) et la
normale à cette surface (qui contient le vecteur ⃗⃗⃗⃗⃗
𝑟12 ) fait un angle 𝜃2 avec la normale à la surface 𝑑𝐴2 .

La fraction de la puissance rayonnée par 𝑑𝐴1 dans l'angle solide élémentaire 𝑑Ω1 reçue par 𝑑𝐴2 est
donc donnée par le rapport entre l'aire de la projection de 𝑑𝐴2 sur le plan perpendiculaire à la direction
incidente (de vecteur ⃗⃗⃗⃗⃗
𝑟12 ), qui est donc égale à 𝑑𝐴2 𝑐𝑜𝑠𝜃2 , et l'aire délimitée par l'angle solide
élémentaire 𝑑Ω1 au niveau de la surface 𝑑𝐴2 qui est égale à 𝑟12 2 sin𝜃1 𝑑𝜃1 𝑑𝜑1 .

Cette fraction est donc égale à :


𝑑𝐴2 𝑐𝑜𝑠𝜃2
2
𝑟12 sin𝜃1 𝑑𝜃1 𝑑𝜑1
Ainsi, la puissance rayonnée par la surface 𝑑𝐴1 reçue par 𝑑𝐴2 est donc donnée par la relation suivante
:

𝜎𝑇1 4
𝑑𝜙1⟶2 = 𝑐𝑜𝑠𝜃1 𝑐𝑜𝑠𝜃2 𝑑𝐴1 𝑑𝐴2
𝜋𝑟12 2

On peut de la même manière déterminer la puissance rayonnée par la surface 𝑑𝐴2 reçue par 𝑑𝐴1 :

𝜎𝑇2 4
𝑑𝜙2⟶1 = 𝑐𝑜𝑠𝜃1 𝑐𝑜𝑠𝜃2 𝑑𝐴1 𝑑𝐴2
𝜋𝑟12 2

La puissance nette échangée entre 𝑑𝐴1 et 𝑑𝐴2 est donc:

𝜎(𝑇1 4 − 𝑇2 4 )
𝑑𝜙12 = 𝑑𝜙1⟶2 − 𝑑𝜙2⟶1 = 𝑐𝑜𝑠𝜃1 𝑐𝑜𝑠𝜃2 𝑑𝐴1 𝑑𝐴2
𝜋𝑟12 2
La puissance nette échangée entre les deux corps d'aires 𝐴1 et 𝐴2 respectivement est alors obtenue
par intégration sur les éléments en regard :

𝜎(𝑇1 4 − 𝑇2 4 ) 𝑐𝑜𝑠𝜃1 𝑐𝑜𝑠𝜃2


𝜙12 = ∫ ∫ 𝑑𝐴1 𝑑𝐴2
𝜋 𝐴1 𝐴2 𝑟12 2

En notant :

1 𝑐𝑜𝑠𝜃1 𝑐𝑜𝑠𝜃2
𝐹12 = ∬ 𝑑𝐴1 𝑑𝐴2
𝜋𝐴1 𝐴1,𝐴2 𝑟12 2

Et

1 𝑐𝑜𝑠𝜃1 𝑐𝑜𝑠𝜃2
𝐹21 = ∬ 𝑑𝐴1 𝑑𝐴2
𝜋𝐴2 𝐴1 ,𝐴2 𝑟12 2

On peut alors exprimer simplement la puissance nette échangée entre les corps 1 et 2 :

𝜙12 = 𝐴1 𝐹12 𝜎(𝑇1 4 − 𝑇2 4 ) = 𝐴2 𝐹21 𝜎(𝑇1 4 − 𝑇2 4 )

𝐹12 et 𝐹21 sont appelés facteurs de forme ou facteurs d'angle (view factors en anglais) et peuvent être
déterminés simplement par des formules ou des abaques que l'on peut trouver aisément dans la
littérature (techniques de l'ingénieur par exemple).

Cette approche peut être généralisée au cas d'une cavité comportant 𝑛 surfaces. La puissance
rayonnée par la surface 𝑖 vers les 𝑛 − 1 autres surfaces est donnée par la relation suivante :
𝑛 𝑛

𝜙𝑖𝑟𝑎𝑑 = 𝐴𝑖 𝜎 ∑ 𝐹𝑖𝑗 (𝑇𝑖 − 𝑇𝑗 ) = 𝐴𝑖 𝜎 (𝑇𝑖 − ∑ 𝐹𝑖𝑗 𝑇𝑗 4 )


4 4 4

𝑗=1 𝑗=1

Car
𝑛

∑ 𝐹𝑖𝑗 = 1
𝑗=1

Remarques :

1- Pour une surface n'émettant pas de rayonnement vers elle-même (surface convexe) 𝐹𝑖𝑖 = 0
2- Pour toute surface 𝑖 entourée par 𝑛 − 1 autres surfaces :
𝑛

∑ 𝐹𝑖𝑗 = 1
𝑗=1
C'est la relation d'additivité

3- Pour deux surfaces quelconques 𝑖 et 𝑗 d'aires respectives 𝐴𝑖 et 𝐴𝑗 :


𝐴𝑖 𝐹𝑖𝑗 = 𝐴𝑗 𝐹𝑗𝑖
C'est la relation de réciprocité

On peut illustrer l'utilisation de ces relations sur l'exemple d'un objet hémisphérique constitué de deux
surfaces, un disque 1 de rayon 𝑅 et une hémisphère 2 de même rayon 𝑅.
2

1
En appliquant les trois relations précédentes, nous obtenons donc :

𝐹11 = 0

𝐹11 + 𝐹12 = 1 et 𝐹21 + 𝐹22 = 1 (relations d'additivité)

𝐴1 𝐹12 = 𝐴2 𝐹21 (relation de réciprocité)

On en déduit donc :
𝐹12 = 1
𝐴 1
𝐹21 = 𝐴1 𝐹12 = 2
2

1
𝐹22 = 1 − 𝐹21 = 2

Transfert radiatif entre corps non noirs (corps gris)

Un corps gris est un corps pour lequel absorptivité et émissivité sont indépendantes de la longueur
d'onde.

Pour ces corps, on a égalité entre l'absorptivité globale et l'émissivité globale :

𝑎=𝑒
Pour le calcul des puissances nettes échangées entre corps gris, il est nécessaire de prendre en compte
l'émissivité des corps en présence. La puissance rayonnée par le corps réel est donc obtenue en
multipliant l'exitance du corps noir par l'émissivité du corps réel.

Deux cas particuliers importants :

- Pour une petite surface convexe 1 dans une large cavité 2 qui l'entoure, la puissance nette échangée
entre les deux surfaces s'exprime de la manière suivante :

𝜙12 = 𝐴1 𝜎(𝑒1 𝑇1 4 − 𝑎1 𝑇2 4 )

Le rayonnement incident sur la surface convexe 1 est très proche du rayonnement du corps noir
(rayonnement d'une cavité).

Ici, le facteur de forme 𝐹12 est égal à 1


𝑒1 = 𝑒(𝑇1 ) est calculé à la température 𝑇1 , 𝑎1 = 𝑒(𝑇2 ) est estimé comme étant la valeur de 𝑒 à la
température 𝑇2
D'une manière générale, quand l'un des deux corps est noir, il n'y a pas de phénomène de réflexions
multiples.

- Pour une cavité fermée par des parois adiabatiques à l'exception des surfaces 1 et 2 qui ne sont pas
des corps noirs, il est nécessaire de prendre en compte les réflexions multiples entre les surfaces. On
remplace alors le facteur de forme 𝐹12 de la relation vraie pour les corps noirs :

𝜙12 = 𝐴1 𝐹12 𝜎(𝑇1 4 − 𝑇2 4 )

par un facteur de forme corrigé ℱ12 tel que :


1 1 1 1 1 1
= + ( − 1) + ( − 1)
𝐴1 ℱ12 𝐴1 𝐹12 𝐴1 𝑒1 𝐴2 𝑒2
Et on a :

𝜙12 = 𝐴1 ℱ12 𝜎(𝑇1 4 − 𝑇2 4 )

On utilisera également une autre relation dans le cadre des exercices de TD.

Il est possible de démontrer cette relation à partir de la notion de radiosité, particulièrement


importante dans le cas des corps non noirs dans la mesure où celle-ci permet de prendre en compte
les phénomènes de réflexion.
La radiosité de la surface 𝑖 est la somme de l'émission propre de la surface 𝑖, représentée par l'exitance
de cette surface, et de la fraction de l'éclairement de la surface 𝑖 qui est réfléchie :
𝐽𝑖 = 𝑀𝑖 + 𝜌𝑖 𝐸𝑖

On peut exprimer l'exitance de la surface non noire 𝑖 à l'aide de l'expression de l'exitance du corps noir
et de l'émissivité 𝑒𝑖 :

𝑀𝑖 = 𝑒𝑖 𝑀° 𝑖
D'autre part, si la surface 𝑖 est opaque, on peut écrire :

𝑒𝑖 + 𝜌𝑖 = 1

Et ainsi:

𝐽𝑖 = 𝑒𝑖 𝑀° 𝑖 + (1 − 𝑒𝑖 )𝐸𝑖

D'où l'expression de 𝐸𝑖 en fonction de 𝐽𝑖 et 𝑀° 𝑖 :

𝐽𝑖 − 𝑒𝑖 𝑀° 𝑖
𝐸𝑖 =
1 − 𝑒𝑖
La puissance nette rayonnée par la surface 𝑖 vers les autres surfaces qui l'entourent est donc la
différence entre ce qu'elle rayonne ( la radiosité multipliée par l'aire de cette surface) et ce qu'elle
reçoit (l'éclairement multiplié par l'aire de la surface) :

𝑒𝑖 𝑀° 𝑖 − 𝑒𝑖 𝐽𝑖 𝑀° 𝑖 − 𝐽𝑖
𝜙𝑖 = 𝐴𝑖 (𝐽𝑖 − 𝐸𝑖 ) = 𝐴𝑖 ( )=
1 − 𝑒𝑖 1 − 𝑒𝑖
𝑒𝑖 𝐴𝑖
La puissance thermique reçue par la surface 𝑖 est la somme des puissances rayonnées par les autres
surfaces qu'elle reçoit :
𝑛 𝑛

𝐴𝑖 𝐸𝑖 = ∑ 𝐴𝑗 𝐹𝑗𝑖 𝐽𝑗 = ∑ 𝐴𝑖 𝐹𝑖𝑗 𝐽𝑗 (réciprocité)


𝑗=1 𝑗=1

La puissance nette rayonnée par la surface 𝑖 vers les autres surfaces qui l'entourent est donc :
𝑛 𝑛 𝑛

𝜙𝑖 = 𝐴𝑖 (𝐽𝑖 − 𝐸𝑖 ) = 𝐴𝑖 (𝐽𝑖 − ∑ 𝐹𝑖𝑗 𝐽𝑗 ) = 𝐴𝑖 (∑ 𝐹𝑖𝑗 𝐽𝑖 − ∑ 𝐹𝑖𝑗 𝐽𝑗 ) (additivité)


𝑗=1 𝑗=1 𝑗=1

Et ainsi :
𝑛
𝐽𝑖 − 𝐽𝑗
𝜙𝑖 = ∑
1
𝑗=1
𝐴𝑖 𝐹𝑖𝑗

On a donc :
𝑛
𝑀° 𝑖 − 𝐽𝑖 𝐽𝑖 − 𝐽𝑗
𝜙𝑖 = =∑
1 − 𝑒𝑖 1
𝑗=1
𝑒𝑖 𝐴𝑖 𝐴𝑖 𝐹𝑖𝑗

Relations que l'on peut appliquer au cas d'une cavité comportant deux surfaces (1) et (2) échangeant
de la chaleur par rayonnement.

𝜙1 = −𝜙2
Compte tenu des relations précédentes :

𝑀°1 − 𝐽1 𝐽1 − 𝐽2 𝐽2 − 𝐽1 𝐽2 − 𝑀° 2
𝜙1 = = = −𝜙2 = − =
1 − 𝑒1 1 1 1 − 𝑒2
𝑒1 𝐴1 𝐴1 𝐹12 𝐴2 𝐹21 𝑒2 𝐴2
La relation de réciprocité nous donne :

𝐴2 𝐹21 = 𝐴1 𝐹12

Et finalement :

𝑀° 1 − 𝐽1 𝐽1 − 𝐽2 𝐽2 − 𝑀° 2 𝑀° 1 − 𝑀° 2
𝜙12 = = = =
1 − 𝑒1 1 1 − 𝑒2 1 − 𝑒1 1 1 − 𝑒2
𝑒1 𝐴1 𝐴1 𝐹12 𝑒2 𝐴2 𝑒1 𝐴1 + 𝐴1 𝐹12 + 𝑒2 𝐴2

Ce qui fournit le résultat escompté.

Ce calcul peut être schématisé par une méthode appelée analogie électrique qui ne relève pas d'un
principe physique, comme ce que nous avions pour la résistance thermique, mais d'un simple principe
𝑎 𝑏 𝑎+𝑐
mathématique ( 𝑐 = 𝑑 = 𝑏+𝑑) :
𝑀°1 𝐽1 𝐽2 𝑀° 2

𝝓𝟏 𝝓𝟐
1 − 𝑒1 1 1 − 𝑒2
𝑒1 𝐴1 𝐴1 𝐹12 𝑒2 𝐴2

On additionne ainsi, comme s'il s'agissait de résistances, des grandeurs qui ne sont pas des résistances:

𝑀°1 − 𝐽1 𝐽1 − 𝐽2 𝐽2 − 𝑀° 2 𝑀 °1 − 𝑀 ° 2
= = =
1 − 𝑒1 1 1 − 𝑒2 1 − 𝑒1 1 1 − 𝑒2
𝑒1 𝐴1 𝐴1 𝐹12 𝑒2 𝐴2 𝑒1 𝐴1 + 𝐴1 𝐹12 + 𝑒2 𝐴2

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