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Sujets Bacs Lettres

Sujet 1 :
Texte :
( Intrigué par la disparition mystérieuse de son grand-père Paol, déporté pendant la deuxième
guerre mondiale , Jean-Luc Coatalem entreprend dans son roman La part du fils des
recherches et émet des hypothèses à ce sujet .)

A plusieurs reprises, Pierre me l’avait demandé ou fait savoir, les proches penchant de
son côté, mieux valait l’amertume d’un seul qu’une brouille1 générale : non , inutile de
chercher quoi que ce soit, tu n’en diras rien, tu feras ce que tu voudras après, quand je ne
serai plus là, inutile de remuer le passé, la guerre, ce paquet de larmes et de sang, pas
question de «  faire du fric avec les morts », il n’ y a pas de réponse à donner. Enfin,
comprenant que quelque chose de plus impérieux me débordait – la perte, l’absence, une
incomplétude – il m’opposait la herse2 de sa douleur. Je refluai.
Mais qui allait dire ce qui m’étouffait, à soixante- dix ans de distance ? Et pourquoi me
fallait-il en tant que fils, depuis que je m’étais décidé à écrire là-dessus, raconter à mon père,
contre sa volonté, le destin broyé du sien ? Paradoxalement, ce manque originel de récit
familial, ce trou généalogique, aura fait de moi un écrivain. A tout, si j’y réfléchis, j’allais
préférer les histoires exotiques, les personnages et les décors tropicaux, comme si j’avais à
multiplier les hypothèses.
( … ) Paol n’a pas été un milicien3, un collaborationniste, un trafiquant, un profiteur ou
un indic4. Nous n’avons dénoncé personne, nous n’avons pas livré tel ou tel vichystes5,
récupéré des biens ou des œuvres d’art, racheté une pièce de terre, un immeuble à vil prix.
Au contraire, nous avons tout perdu, les nôtres, l’appartement de Brest, le canot à voile de
Kergat, le sommeil, le fil tissé des jours. Mais nous avons gardé foi et honneur. Paol a relevé
la tête, a combattu, il a été pris…
Pour autant, son cas n’est pas exceptionnel. C’était une guerre mondiale. La terreur
totale. Une destruction à grande échelle. Comme des milliers d’autres, il a obtenu la mention
de « Mort pour la France ». Comme des dizaines de milliers d’autres, il s’est épuisé à creuser
le massif du Harz, en Allemagne, à Dora, pour l’usine aux fusées. Comme des centaines de
milliers d’autres, il est devenu une bête de somme pour le Reich. Comme des millions
d’autres en Europe, il a été déporté, sélectionné pour le travail, pliant sous la charge… Cela
ne lui enlève rien, au contraire, et c’est suffisant pour qu’on puisse en être fier. Il reste le
père de mon père. Un pater familias que, depuis, nous avons dépassé en âge et qui est
devenu un cadet dès lors que nous sommes plus vieux que lui. En quelque sorte, un frère
perdu que seuls des mots exacts peuvent ranimer.

Jean-Luc Coatalem, La part du fils , Août 2019.

Vocabulaire :
1) Brouille : Mésentente, désaccord.
2) Herse : Machine agricole à dents qui sert à travailler la terre.
3) Milicien : Ici, soldat collaborant avec l’ennemi allemand.
4) Indic : Abréviation d’indicateur, personne qui renseigne la police en échange d’une
rémunération, délateur, mouchard.
5) Vichyste : Partisan du gouvernement de Vichy qui a collaboré avec l’Allemagne sous
l’occupation nazie.

I) Etude de texte : ( 10 points )


A) Compréhension de texte : ( 6 points )
1) Pourquoi Pierre, le père de l’auteur, refuse-t-il que son fils écrive l’histoire de son grand-
père ? Justifiez votre réponse par un indice textuel. ( 1,5 pts )

2) Qu’est-ce qui pousse l’auteur à entreprendre ce travail malgré l’opposition de son père ?
Donnez deux motifs. ( 2 pts )

3) L’auteur présente certaines qualités de son grand-père Paol, citez-en deux. Relevez et
expliquez un procédé d’écriture qui en rend compte. ( 2,5 pts )

B) Langue : ( 4 points )
1) En quelque sorte, un frère perdu que seuls des mots exacts peuvent ranimer.
a) Réécrivez la phrase ci-dessus en remplaçant le verbe souligné par un autre verbe de
sens équivalent.
b) Construisez une phrase personnelle où le verbe ranimer aura un sens différent.
( 2 pts )
2) Transposez les énoncés suivants au discours indirect.
a) Pierre disait à son fils : « Tu n’en diras rien, tu feras ce que tu voudras après, quand je
ne serai plus là. »
b) L’auteur se demanda : « Pourquoi me fallait-il en tant que fils, depuis que je m’étais
décidé à écrire là-dessus, raconter à mon père, contre sa volonté, le destin broyé du sien ? »
( 2 pts )

II) Essai : ( 10 points )

Jean- Luc Coatalem s’est inspiré de la disparition mystérieuse de son grand-père pour
écrire son roman La part du fils.
Pensez-vous que la vie privée soit la seule source d’inspiration pour un écrivain ?
Vous exprimerez votre point de vue sur la question en vous appuyant sur des arguments et
des exemples précis.
Eléments de réponse
I) Etude de texte :
A) Compréhension de texte :
1) Le père s’oppose catégoriquement à ce que son fils écrive la vie de son grand-père car il
pense qu’il est inutile de ressasser, de remuer le passé, de réveiller les douleurs en rouvrant
les anciennes plaies. Et surtout, il ne veut pas que son fils se serve de l’histoire familiale pour
gagner de l’argent, comme l’attestent les indices suivants : « inutile de remuer le passé, la
guerre, ce paquet de larmes et de sang » ; «  pas question de «  faire du fric avec les
morts » ; « il m’opposait la herse de sa douleur. »
1,5 pts : Réponse : 1 pt  ; justification : 0,50.

2) Malgré la vive opposition de son père, l’auteur a tenu à consacrer ce roman à l’histoire de
son grand-père, poussé par le désir impérieux de percer le mystère de cette disparition
énigmatique et parce qu’il ressent le besoin de combler le vide que cette disparition a
occasionné , à recouvrir « ce trou généalogique », «  ce manque originel de récit familial ».
L’auteur cherche aussi à réhabiliter son grand-père, à lui rendre hommage en ressuscitant
son souvenir.
2 pts : 1 pt par motif.

3) D’après le récit de son petit-fils, le grand-père semble un homme honnête, intègre, probe,
direct, droit, battant, militant, patriote, courageux, un homme qui fait la fierté des siens.
Pour vanter les qualités de son grand-père, l’auteur s’est servi des procédés d’écriture
suivants :
- L’accumulation : « Paol n’a pas été un milicien, un collaborationniste, un trafiquant,
un profiteur ou un indic. » Par le biais de cette accumulation, l’auteur a voulu
mettre en valeur la probité, l’intégrité de son grand-père.
- La gradation : «  Paol a relevé la tête, a combattu, il a été pris… ». L’auteur a
recours à cette figure de style pour mettre en valeur le caractère combatif, battant
et courageux de Paol.
- La comparaison / le parallélisme / l’anaphore : « Comme des milliers d’autres, il a
obtenu la mention de « Mort pour la France ». Comme des dizaines de milliers
d’autres, il s’est épuisé à creuser le massif du Harz, en Allemagne, à Dora, pour
l’usine aux fusées. Comme des centaines de milliers d’autres, il est devenu une bête
de somme pour le Reich. Comme des millions d’autres en Europe, il a été déporté,
sélectionné pour le travail, pliant sous la charge. »
L’auteur veut ici témoigner du sort commun des détenus de guerre dont fait partie
Paol et honorer leur courage et leur patriotisme.

N.B : Accepter tout autre procédé jugé pertinent.

2,5 pts : 1,5 pts pour les deux qualités de Paol ( en raison de 0,75 par qualité ) ;
1 pt pour le procédé identifié et expliqué.
B) Langue :
1) a) En quelque sorte, un frère perdu que seuls des mots exacts peuvent
ressusciter / faire revenir à la vie / faire renaitre / ramener à la vie. ( 1 pt )
b) Accepter toute phrase personnelle où le verbe ranimer aura le sens de :
vivifier, aiguiser, attiser, rallumer, encourager, dégourdir, exalter, réchauffer,
raffermir, …
( 1 pt )
2) a) Pierre disait à son fils qu’il n’en dirait rien et qu’il ferait ce qu’il voudrait après
quand il ne serait plus là. ( 1 pt )

b) L’auteur se demanda pourquoi il lui fallait en tant que fils, depuis qu’ il s’était
décidé à écrire là-dessus, raconter à son père, contre sa volonté, le destin broyé
du sien.  ( 1 pt )

II) Essai :
L’essai sera évalué selon les critères suivants :
- Compréhension de sujet et cohérence d’idées : 4 pts
- Correction linguistique : 4 pts
- originalité d’idées et richesse de vocabulaire : 2 pts
Sujet 2 :
Texte :
( Les événements se déroulent pendant la guerre franco- prussienne (1870/1871).
Schnaffs, soldat prussien, se trouve seul en Normandie. A l’arrivée des Résistants français, il
se
cache dans un ravin, un fossé. )

La nuit venait, emplissant d’ombre le ravin. Et le soldat se mit à songer. Qu’allait-il


faire ? Qu’allait-il devenir ? Rejoindre son armée ?... Mais comment ? Mais par où ? Et il lui
faudrait recommencer l’horrible vie d’angoisses, d’épouvantes, de fatigues et de souffrances
qu’il menait depuis le commencement de la guerre ! Non ! Il ne se sentait plus ce courage ! Il
n’aurait plus l’énergie qu’il fallait pour supporter les marches et affronter les dangers de
toutes les minutes.
( … ) Et il se trouvait ainsi tout seul, en armes, en uniforme, sur le territoire ennemi,
loin de ceux qui le pouvaient défendre. Des frissons lui couraient sur la peau.
Soudain il pensa : « Si seulement j’étais prisonnier ! » et son cœur frémit de désir, d’un
désir violent, immodéré, d’être prisonnier des Français. Prisonnier ! Il serait sauvé, nourri,
logé, à l’abri des balles et des sabres, sans appréhension possible, dans une bonne prison bien
gardée. Prisonnier ! Quel rêve !
Et sa résolution fut prise immédiatement :
— Je vais me constituer prisonnier.
Il se leva, résolu à exécuter ce projet sans tarder d’une minute. Mais il demeura immobile,
assailli soudain par des réflexions fâcheuses et par des terreurs nouvelles.
Où allait-il se constituer prisonnier ? Comment ? De quel côté ? Et des images affreuses,
des images de mort, se précipitèrent dans son âme.
Il allait courir des dangers terribles en s’aventurant seul avec son casque à pointe, par la
campagne.
S’il rencontrait des paysans ? Ces paysans, voyant un Prussien perdu, un Prussien sans
défense, le tueraient comme un chien errant ! Ils le massacreraient avec leurs fourches, leurs
pioches, leurs faux, leurs pelles ! Ils en feraient une bouillie, une pâtée, avec l’acharnement
des vaincus exaspérés.
S’il rencontrait des francs-tireurs ? Ces francs-tireurs, des enragés sans loi ni discipline, le
fusilleraient pour s’amuser, pour passer une heure, histoire de rire en voyant sa tête. Et il se
croyait déjà appuyé contre un mur en face de douze canons de fusils, dont les petits trous
ronds et noirs semblaient le regarder.
S’il rencontrait l’armée française elle-même ? Les hommes d’avant-garde le prendraient
pour un éclaireur, pour quelque hardi et malin troupier parti seul en reconnaissance, et ils lui
tireraient dessus. Et il entendait déjà les détonations irrégulières des soldats couchés dans les
broussailles, tandis que lui, debout au milieu d’un champ, s’affaissait, troué comme une
écumoire par les balles qu’il sentait entrer dans sa chair.
Il se rassit, désespéré. Sa situation lui paraissait sans issue.

Guy de Maupassant, L’aventure de Walter Schnaffs, 1883.

I) Etude de texte : ( 10 points )


A) Compréhension de texte : ( 6 pts )
1) a) Schnaffs est en proie à différents sentiments. Lesquels ? Citez-en deux.
b) Relevez et expliquez deux procédés d’écriture traduisant le mieux ces sentiments.
( 3 pts )
2) Quel souhait s’empare de Schnaffs dans le troisième paragraphe ? Pourquoi ? ( 1, 5 pts )
3) Pourquoi le soldat pense-t-il que sa situation est sans issue ? Justifiez votre réponse par un
indice textuel. ( 1,5 pts )

B) Langue : ( 4 pts )
1) Les hommes d’avant-garde le prendraient pour un éclaireur.
a) Réécrivez la phrase ci-dessus en remplaçant le verbe souligné par un autre de même
sens.
b) Construisez une phrase personnelle où le verbe prendre aura un autre sens. ( 2 pts )

2) a) Prisonnier ! Il serait sauvé, nourri, logé, à l’abri des balles et des sabres.
b) S’il rencontrait des paysans (…) ils le massacreraient avec leurs fourches.
Précisez le mode des verbes soulignés dans les deux phrases ci-dessus puis justifiez son
emploi. ( 2 pts )

II) Essai : ( 10 points )

« Ils le massacreraient avec leurs fourches, leurs pioches, leurs faux, leurs pelles ! »

Pensez-vous qu’une éducation à la culture du partage, de la paix et de la tolérance puisse


mettre fin aux atrocités de la guerre ?
Vous développerez votre point de vue à l’aide d’arguments et d’exemples précis.
Eléments de réponse
I) Etude de texte :
A) Compréhension de texte :
1) a) Schnaffs se trouve sous l’emprise de divers sentiments : Il se sent angoissé, anxieux,
inquiet, tiraillé entre son désir de rejoindre son armée et celui de se rendre à l’ennemi. Il est
épouvanté, lassé des horreurs de la guerre. Il est également saisi de sentiment de solitude
et d’abandon.
b) Pour traduire ces sentiments, l’auteur a recours aux procédés d’écriture suivants :
- les phrases interrogatives : « Qu’allait-il faire ? Qu’allait-il devenir ? Rejoindre son
armée ?... Mais comment ? Mais par où ? » qui rendent compte du désarroi et de l’inquiétude
du personnage.
- le parallélisme : « Qu’allait-il faire ? Qu’allait-il devenir ? » qui témoigne du trouble du
soldat.
- l’accumulation : « Et il lui faudrait recommencer l’horrible vie d’angoisses, d’épouvantes,
de fatigues et de souffrances qu’il menait depuis le commencement de la guerre ! »
L’auteur s’est servi de cette accumulation pour mettre l’accent sur les tourments dont souffre
Schnaffs.
- La forme négative des phrases : « Il n’aurait plus l’énergie qu’il fallait pour supporter les
marches et affronter les dangers de toutes les minutes. » La négation absolue révèle l’état
d’épuisement et d’abattement dans lequel se trouve le soldat.

N.B : Accepter tout autre procédé jugé pertinent.


3pts : a) 1 pt en raison de 0,5 par sentiment. b) 2 pts : 1 pt pour chaque procédé identifié
et
expliqué.

2) Dans le troisième paragraphe, le soldat prussien exprime son souhait de se faire


emprisonner par les Français pour échapper aux atrocités de la guerre, se mettre à l’abri ,
être nourri et surtout survivre.
1,5 pts : le souhait : 0,5 pt ; la justification du souhait : 1 pt.

3) A la fin du texte, Schnaffs a réalisé que sa situation est sans issue car plusieurs dangers le
guettent : Il risque d’être pris par l’ennemi et d’être férocement torturé, cruellement
exécuté, comme en témoignent les phrases suivantes :
« S’il rencontrait des paysans (…) ils le massacreraient avec leurs fourches, leurs pioches,
leurs faux, leurs pelles !
« S’il rencontrait des francs-tireurs ? Ces francs-tireurs, des enragés sans loi ni discipline, le
fusilleraient. »

II) Langue :
1) a) Les hommes d’avant-garde le considèreraient comme un éclaireur.
le traiteraient d’éclaireur. ( 1 pt )
b) Accepter toute phrase personnelle correctement construite où le verbe prendre aura le
sens de fixer, admettre, aller, accaparer, écoper, accueillir, affecter, utiliser, reprendre,
emporter, piéger… ( 1 pt )
2) a) Serait : Mode conditionnel. Le conditionnel exprime une action imaginaire souhaitée,
(un souhait) , un désir, une volonté. ( 1 pt : 0,5 pour l’identification du mode et 0,5 pour la
valeur d’emploi.)
b) Massacreraient : Mode conditionnel. Il exprime une hypothèse, une action éventuelle.
( 1 pt : 0,5 pour l’identification du mode et 0,5 pour la valeur d’emploi.)
II) Essai :
L’évaluation de l’essai se fera sur la base des critères suivants :
- Compréhension de sujet et cohérence d’idées : 4 pts
- Correction linguistique : 4 pts
- Richesse d’idées et de vocabulaire : 2 pts

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