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DEUXIEME PARTIE

TIC ET
PROPRIETE
INTELLECTUELLE

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LA PROTECTION DES CREATIONS
INFORMATIQUES :
CAS DES LOGICIELS

INTRODUCTION
La protection des créations informatiques suppose l’étude de la propriété
intellectuelle. Le terme de propriété intellectuelle est présent dans le droit (le
Code de la propriété intellectuelle). Il est un calque direct de l'anglais,
« intellectual property ».

Dans son acception courante, il recouvre les droits d'utilisation d'une « création
intellectuelle » : invention, solution technique, œuvre littéraire ou artistique,
marque, dessins et modèles industriels, logiciels, circuits intégrés, etc. Précisons
tout de suite que les découvertes scientifiques sont exclues de toute protection
relevant de la propriété intellectuelle.
Bien entendu, les divers éléments qui composent la propriété intellectuelle ont un
régime juridique différent dû à leur nature même.
On inclut généralement sous l'expression "propriété intellectuelle" deux branches
principales : la propriété industrielle et la propriété littéraire et artistique.
- la propriété industrielle concerne, de manière générale, les marques, les
brevets, les inventions, les dessins et modèles industriels, les appellations
d'origine et les indications de provenance.
- la propriété littéraire et artistique s'explique d'elle-même ; toutefois, on peut
retenir qu’elle s'applique aux œuvres de l'esprit et fait appel aux notons de droit
d'auteur et des droits voisins.

Le logiciel occupe aujourd’hui une place importante de l’économie numérique, en


effet, celui-ci est embarqué dans de nombreuses machines et de ce fait est
devenu indispensable. C’est pourquoi il est apparu nécessaire de savoir quelle
protection doit être accordée au logiciel. La réponse à cette question n’était pas
évidente, puisque l'on pouvait hésiter entre une protection accordée via le droit
des brevets, le droit d’auteur, ou encore crée un régime propre au logiciel. C’est
finalement la protection par le droit d’auteur qui a été choisie.
Ces hésitations provenaient de la nature ambivalente du logiciel, celui-ci faisant
appel à des notions de brevets par son aspect technique, mais aussi au droit
d’auteur en ce qu’il constitue une œuvre du langage.

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En effet, en France, c’est en 1985 avec la loi Lang que « l’adoption » du logiciel
sous l’égide de la protection du droit d’auteur s’est faite. Pour compléter cette
affirmation, la Cour de cassation venait d’ailleurs appliquer rétroactivement cette
protection du droit d’auteur aux logiciels antérieurs par un arrêt rendu l’année
suivante (Cass plén., Arrêt « Pachot », 1986).

SECTION 1- NOTION DE DROIT D’AUTEUR

1- La définition du droit d’auteur

Le droit d'auteur en France est régi par la loi du 11 mars 1957 et la loi du 3 juillet
1985, codifiées dans le code de la propriété intellectuelle.
La loi reconnaît en tant qu'auteur toute personne physique qui crée une œuvre
de l'esprit quelle que soit son genre (littéraire, musical ou artistique), sa forme
d'expression (orale ou écrite), son mérite ou sa finalité (but artistique ou
utilitaire).
Le droit d'auteur couvre donc toute création de l'esprit, qu'elle soit une œuvre
littéraire (livres, journaux, pièces de théâtre, logiciels, site web, etc.), une œuvre
d'art (peinture, sculpture, photographie, image infographiée, architecture, etc.),
une œuvre musicale ou audiovisuelle, dès lors qu'elle est matérialisée, originale
et qu'elle est l'expression de la personnalité de l'auteur. Ainsi ne tombent pas
sous la protection du droit d'auteur les créations de l'esprit purement
conceptuelles telles qu'une idée, un concept, un mot du langage courant, ou une
méthode.
D'après le code de la propriété intellectuelle, l'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit
d'un droit de propriété exclusif dès sa création, sans nécessité
d'accomplissement de formalités (dépôt ou enregistrement), pour une durée
correspondant à l'année civile du décès de l'auteur et des soixante-dix années
qui suivent, au bénéfice de ses ayants-droits. Au-delà de cette période, les
œuvres entrent dans le domaine public. Toutefois, en cas de litige, il est
nécessaire de pouvoir apporter une preuve de l'existence de l'œuvre à une date
donnée, soit en ayant effectuée préalablement un dépôt auprès d'un organisme
habitilité, soit en ayant rendue l'œuvre publique et en étant en moyen de le
prouver.

2- Les composantes du droit d’auteur

Le code de la propriété intellectuelle distingue en réalité deux types de droits :


- le droit patrimonial s'exerçant pendant toute la vie de l'auteur et
transmissible à ses héritiers les 70 années suivantes ;
- le droit moral reconnaissant la paternité d'une œuvre à son auteur sans
limite de durée.

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Le droit moral permet à l'auteur de jouir du droit au respect de son nom, de sa
qualité et de son œuvre. Il s'agit d'un droit imprescriptible (c'est-à-dire d'une
durée illimitée), inaliénable (il ne peut être cédé à un tiers) et perpétuel (il est
transmissible aux héritiers) le droit moral.
Ainsi, lorsqu'une œuvre tombe dans le domaine public, il est impératif lors de son
utilisation de citer son nom et celui de son auteur ainsi que d'en respecter
l'intégrité, au risque sinon de se voir réclamé des dommages et intérêts par les
héritiers.

Le droit patrimonial est le droit exclusif d'exploitation accordé à l'auteur, lui


permettant éventuellement d'en tirer un profit. Il permet à l’auteur d’une œuvre
(par exemple un logiciel) de décider de sa commercialisation avec des modalités
et comporte :
- le droit de représentation, permettant d'autoriser ou non la diffusion
publique de l'œuvre. Sont notamment cités à titre d'exemple dans le code
de la propriété intellectuelle la récitation publique, la présentation publique,
la projection publique, la télédiffusion, mais la diffusion au travers de
réseau informatique rentre dans ce même cadre.

- le droit de reproduction, permettant d'autoriser ou non la reproduction de


l'œuvre. c’est-à-dire la copie de l’œuvre, permanente ou provisoire, par
quelque moyen et sur quelque support que ce soit.

Les droits de représentation et de reproduction sont cessibles par contrat écrit


rédigé par l'auteur précisant les conditions et la durée de la cession des droits.
La cession des droits sur une œuvre peut ainsi conduire à une rémunération
obligatoirement proportionnelle aux recettes de l'exploitation.

REMARQUE :

Des exceptions existent tout de même lorsque l'œuvre est divulguée, c'est-à-dire
que l'auteur ne peut s'opposer à :
- la représentation privée et gratuite dans un cercle de famille ;
- la copie ou reproduction réservée à un usage strictement privé du copiste ;
- la publication d'une citation ou d'une analyse de l'œuvre, dans la mesure
où celle-ci est brève et justifiée par le caractère critique, polémique,
pédagogique, scientifique ou d'information, de l'œuvre ;
- la parodie et la caricature.

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3- Les conditions d’applicabilité du droit d’auteur

Le droit d’auteur devient effectif du fait même de la création de l’œuvre, quelque


soit la forme d’expression, le genre, le mérite ou la destination de
l’œuvre. Aucunes démarches ne sont nécessaires pour acquérir ce droit.
Par ailleurs, le droit d’auteur ne s’applique que pour les œuvres « originales »,
c’est-à-dire pour les œuvres créatives qui portent la marque de la personnalité
de l’auteur.
En cas de conflits sur la paternité, l’auteur de l’œuvre doit être en mesure
d’apporter la preuve de la date de création de l’œuvre.
Le non-respect du droit d’auteur est un délit pénal pouvant être sanctionné par
une peine d’emprisonnement et une amende. L’auteur peut également réclamer
des dommages et intérêts en se constituant partie civile.

SECTION 2- ADAPTATION DU DROIT D’AUTEUR AU LOGICIEL

Depuis la loi du 3 juillet 1985 qui a étendu la notion d'œuvre de l'esprit aux
logiciels, le logiciel est protégé par le droit d'auteur. L'ensemble du dispositif
législatif applicable aux logiciels est aujourd'hui intégré dans le Code de la
propriété intellectuelle, parmi les dispositions relatives à la propriété littéraire et
artistique.

1- Les conditions de la protection

Seuls les logiciels présentant un caractère original sont protégés par le droit
d'auteur. Le critère d'originalité est la seule condition de fond nécessaire à la
protection du logiciel par le droit d'auteur. Ce critère d'originalité n'est pas défini
par la loi. Il convient de se référer à la jurisprudence PACHOT (Cass, Assemblée
plénière, 7 mars 1986) selon laquelle "l'originalité d'un logiciel consiste dans un
effort personnalisé allant au-delà de la simple mise en œuvre d'une logique
automatique et contraignante". Cela ramène la notion d'originalité à la "marque
d'un apport intellectuel".

2- L'objet de la protection

La protection du logiciel ne s'étend pas aux idées qui sont à la base du logiciel.
Seule la mise en forme de ces idées peut faire l'objet d'une protection par le droit
d'auteur.
a) Les éléments du logiciel non protégés :
- les fonctionnalités
- les algorithmes
- les interfaces
- les langages de programmation
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Tous ces éléments sont en effet considérés comme des éléments informatiques
à l'origine de la conception du logiciel ne présentant pas en tant que telle une
forme définie. Ils appartiennent au domaine de l'idée.

b) Les éléments du logiciel protégeables :


- l'architecture des programmes
- le code source
- l code objet
- les différentes versions
- les écrans et modalités d'interactivité s'ils sont originaux
- le matériel de conception préparatoire: les ébauches, les maquettes, les
dossiers d'analyses fonctionnelles, la documentation de conception
intégrée au logiciel, les prototypes.

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3- Les techniques de protection

a) Absence de formalités
Un logiciel original est protégé par le droit d'auteur, du seul fait de sa création.
Cette protection n'est soumise à aucune procédure particulière, l'apposition de la
mention Copyright, n’est donc pas nécessaire. Cependant, malgré son absence
de fondement légal, dans le cadre d’une exploitation large du logiciel, on ne peut
que recommander d’apposer la mention Copyright, car nombre de législations
étrangères exigent l'accomplissement de cette formalité pour les œuvres
publiées dont les logiciels exploités.

b) Intérêt du dépôt
Si aucune formalité de dépôt de l'œuvre n'est imposée, le dépôt du logiciel peut
néanmoins présenter un intérêt pour pré-constituer la preuve de la création et lui
donner date certaine, en cas notamment de contestation future. (Le dépôt peut
se faire à l’INPIT ou au BUTODRA).

SECTION 3- TITULAIRE DES DROITS D’AUTEUR SUR LE LOGICIEL

En principe, celui qui a créé le logiciel est titulaire des droits sur celui-ci.
Néanmoins, il n’est pas rare qu’un logiciel ait été développé par plusieurs
personnes ou dans le cadre de l’activité professionnelle de l’auteur. Plusieurs
cas de figure peuvent donc se présenter :
- le logiciel est une œuvre de collaboration entre divers auteurs ; ces
derniers seront alors co-titulaires des droits sur leur logiciel commun. Les
décisions concernant son exploitation devront donc être prises à
l’unanimité.
- le logiciel a été créé à l’initiative d’une personne physique ou morale qui
l’édite, le publie et le divulgue, alors cette personne sera considérée
comme étant propriétaire du logiciel.
- le logiciel est une œuvre de commande, l’auteur reste titulaire des droits
sur son logiciel sauf dans le cas où un contrat de licence ou de cession a
été signé.
- l’auteur du logiciel est un salarié qui opère dans le cadre de ses fonctions
ou sur instruction de l’employeur, ce dernier obtiendra automatiquement
les droits patrimoniaux sur le logiciel développé par son salarié.

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SECTION 4- DROITS DES UTILISATEURS SUR LE LOGICIEL

Tous les actes de reproduction nécessaires pour permettre l’utilisation du


logiciel, conformément à sa destination sont autorisés. La notion de destination
doit s’entendre de la destination contractuelle.
L’utilisateur peut intervenir sur le logiciel pour effectuer les corrections d’erreurs,
les actualisations (par exemple : changement d’un taux de TVA), les adaptations
(par exemple, suite à une modification de la configuration informatique)
nécessaires pour que le logiciel puisse toujours être exploité conformément à
l’usage pour lequel il a été acquis.

L’utilisateur peut donc assurer la maintenance de son logiciel.


En revanche, l’utilisateur ne peut pas améliorer le logiciel, l’adapter à des
besoins nouveaux, ajouter de nouvelles fonctionnalités.
Par ailleurs, le code de la propriété intellectuelle autorise l’utilisateur d’un logiciel
à:
- effectuer une copie de sauvegarde du logiciel. En effet, la personne ayant
le droit d’utiliser le logiciel peut faire une copie de sauvegarde lorsque
celle-ci est nécessaire pour préserver l’utilisation du logiciel. L’utilisateur du
logiciel est autorisé à en faire une copie de sauvegarde lorsqu’elle est
nécessaire pour préserver l’utilisation du logiciel et il ne peut pas y être
dérogé contractuellement. La copie de sauvegarde est comme son nom
l’indique une copie de secours et n’autorise pas la multiplication des copies
du logiciel.
- observer, tester ou étudier le fonctionnement du logiciel afin de déterminer
les idées et principes qui sont à la base des éléments du logiciel lorsqu’il
effectue une opération telle que le chargement, l’exécution ou le stockage
du logiciel qu’il est en droit d’effectuer.
- décompiler le logiciel pour obtenir des informations indispensables à son
interopérabilité avec d’autres logiciels.
- effectuer des corrections si l’auteur ne s’est pas réservé ce droit.

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