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LE NOM DES FEMMES ET SA TRANSMISSION

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Virginie Descoutures

La Découverte | « Mouvements »
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2015/2 n° 82 | pages 43 à 48
ISSN 1291-6412
ISBN 9782707186201
Article disponible en ligne à l'adresse :
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http://www.cairn.info/revue-mouvements-2015-2-page-43.htm
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Pour citer cet article :


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Virginie Descoutures, « Le nom des femmes et sa transmission », Mouvements
2015/2 (n° 82), p. 43-48.
DOI 10.3917/mouv.082.0043
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Le nom des femmes
et sa transmission

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En France et ailleurs, on pense souvent que les femmes « perdent » P ar V irginie


leur nom de naissance lorsqu’elles se marient ou encore qu’elles D escoutures *
ne peuvent pas transmettre leur nom à leur enfant. En revanche
on sait moins que les hommes mariés peuvent aussi porter le nom
de leur épouse ou que les deux membres du couple, mariés ou
non, peuvent transmettre chacun.e leur nom à leur(s) enfant(s). Le
« nom des femmes » (et sa transmission) est une bonne illustration
des décalages qui existent entre ce que permet le droit et les
usages sociaux qu’en font les individus. Ceci s’explique par la
longue histoire patriarcale des sociétés – littéralement dirigées
par les pères –, gouvernement remis en cause par une série de
politiques publiques qui visent à établir concrètement une plus
grande égalité entre les femmes et les hommes depuis la fin des
années 1960. En matière de nom, ces « politiques du genre »,
impulsées par les recommandations de l’Union européenne, sont
plus récentes.

•L’attribution
•La pratiqueetdeladévolution du nom n’a pas toujours existé
transmission du nom sont des pratiques qui ont été
tardivement inscrites dans le droit. Loin d’être naturelle et immuable, la loi
s’inscrit dans l’évolution des sociétés, c’est donc une construction sociale
et politique dont rend compte la diversité des législations et des pra-
tiques. C’est entre le IXe et le XVe siècle qu’émerge, se met en place et
s’impose en Occident le système anthroponymique que l’on utilise encore
aujourd’hui et qui associe un prénom, considéré comme une identifica-
tion individuelle et intime (appelée « nom » – name en anglais – dans
de nombreux pays), et un nom de famille qui identifie une personne en
référence à sa famille ou sa lignée et constitue à cet égard un élément
inaliénable de son identité (surname en anglais). En France, la transmis-
* Membre du comité de
sion du nom de famille se généralise au XVIe siècle par l’enregistrement rédaction de la revue
sur les registres de baptême devenus registres d’état civil à la Révolution Mouvements.

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Famille pour tous ?

française. La loi du 6 fructidor an II (23 août 1794), toujours en vigueur,


stipule que tout citoyen ou citoyenne ne peut porter d’autres noms que
celui qui résulte de son acte de naissance. Ce dernier établit la filiation de
l’enfant à l’égard de ses parents, leur profession et son lieu de naissance.

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Depuis lors, c’était le nom patronymique (nom du père) qui était trans-
mis de génération en génération, évacuant systématiquement le matro-
nyme (nom de la mère). Ce n’est plus le cas en France depuis 10 ans (loi
du 4 mars 2002 entrée en vigueur le 1er janvier 2005, cf. Focus sur la loi
française, en fin d’article).
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•Dans
•Mariage et nom des femmes en France et en Europe
la plupart des pays européens – sauf en Espagne où près de 80 %
des femmes mariées portent leur nom de naissance – les épouses utilisent
le nom de leur mari ou les deux noms accolés. Pourtant, contrairement
aux idées reçues, le mariage n’a aucune incidence légale sur le nom des
épouses, qui sont toujours connues officiellement et administrativement
(état civil) sous leur nom de naissance. « Aucune loi n’oblige les femmes
à prendre le nom de leur mari. Ce sont les pratiques administratives qui
ont occulté le droit et qui, en exerçant un rôle contraignant, ont entre-
tenu l’ambiguïté. 1 » L’expression « nom de jeune fille » est donc impropre,
d’une part, parce que le mariage ne modifie pas le nom des femmes et,
d’autre part, parce que toutes les femmes ne se marient pas. De la même
1. M.-F. Valetas, manière, la suppression du terme français Mademoiselle dans les formu-
« La subordination laires administratifs a été validée en 2012 par le Conseil d’État qui préco-
patronymique de la
femme », in Travail, nise l’emploi du terme Madame comme l’équivalent de Monsieur qui ne
genre et sociétés, 7, préjuge pas du statut marital pour les hommes.
2002, p. 180-184. Cependant, dans certains pays, chaque époux (cela vaut pour les
hommes mariés aussi) acquiert par le mariage un droit d’usage du nom
de son/sa conjoint.e, soit en l’ajoutant, soit en le substituant au sien (cf.
Focus sur le nom d’usage en France, ci-dessous). Cette utilisation d’un
nom d’usage est facultative et n’a aucun caractère automatique : c’est à
la demande de l’époux, quel que
soit son sexe, que le titre d’iden-
« Aucune loi n’oblige les tité (passeport, carte d’identité,
femmes à prendre le nom de carte de séjour) pourra mention-
ner, outre son nom patronymique
leur mari. Ce sont les pratiques inaliénable, le statut matrimo-
administratives qui (...) ont nial et son nom d’usage. À titre
d’exemple, si l’intéressé.e souhaite
entretenu l’ambiguïté. » voir apparaître sur son passeport
sa qualité d’époux ou d’épouse, le
nom d’usage apparaîtra sous la forme « Nom : X époux Y » ; sinon, le nom
d’usage apparaîtra sous la forme « Nom : X usage Y » ou « Nom : X usage
X-Y » ou encore « Nom : X usage Y-X ».
Pourtant porter le nom de son mari est une pratique ordinaire et cou-
rante, coutume à laquelle la plupart des femmes mariées se conforment
dans de nombreux pays, même en Allemagne où le Code civil permet

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Le nom des femmes et sa transmission

le choix d’un nom de famille conjugal au moment du mariage (indif-


féremment celui du mari ou de l’épouse). Cet usage s’explique moins
par une volonté des femmes de porter le nom de leur mari que par
leur souhait de porter le même nom que leurs enfants, qui eux portent

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celui de leur père… Les enquêtes ont montré notamment que pour
les femmes divorcées le souci de conserver le nom de leur ex-mari
se confond souvent avec le désir de continuer d’avoir le même nom
que leurs enfants 2. C’est la raison pour laquelle la première étape de 2. M.-F. Valetas,
la réforme du nom en France a permis aux enfants de porter en nom « Le nom des femmes
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mariées en Europe »,
d’usage le nom de leur mère : droit de porter mais non de transmettre Grande Europe, 4,
(loi du 23 décembre 1985). 2009, p. 23-29.

Focus sur le nom d’usage en France

Toute personne possède un nom de famille (auparavant appelé « patronyme »


ou nom patronymique). Ce nom figure sur l’acte de naissance (et est men-
tionné sur les autres actes d’état civil : mariage, acte de décès), il est inalié-
nable. Il peut s’agir du nom du père ou du nom de la mère (ou du double nom
depuis 2005). Depuis 1986 il est néanmoins possible d’utiliser dans tous les
actes de la vie privée, familiale, sociale ou professionnelle un autre nom appelé
nom d’usage : 1) soit le nom de son époux uniquement, soit un nom double
composé de son nom propre et de celui de son époux/se dans l’ordre souhaité.
Cette possibilité appartient indifféremment aux hommes et aux femmes ainsi
donc qu’aux couples mariés de personnes de sexe différent ou de même sexe.
Il n’est pas possible d’utiliser comme nom d’usage le nom du concubin ou du
partenaire de Pacs. 2) On peut aussi porter en nom d’usage le nom du parent
qui ne nous a pas été transmis, le sien ou bien le nom de ses deux parents acco-
lés dans l’ordre choisi. Cette demande se fait très facilement auprès du service
d’état civil. Cependant, aucun cumul ou combinaison entre différents noms
d’usage n’est possible. On peut renoncer à tout moment à un nom d’usage, ce
qui n’est pas le cas de son nom de famille.

••Transmission du nom des femmes :


une mesure d’égalité entre les sexes
La question de la transmission du nom de famille aux enfants est
intrinsèquement liée à la nomination des femmes mariées. « Jusqu’à pré-
sent les choses semblaient aller de soi puisque les femmes se croyaient
tenues d’abandonner leur identité de naissance pour adopter celle de
leur conjoint. La brutalité de l’éviction du nom de la mère a été masquée
par le fait que la femme mariée [pouvait] adopter le nom de son époux
et porter ainsi le même nom que ses enfants. 3 » En 2004, la Cour euro- 3. M.-F. Valetas, 2002,
péenne des droits de l’homme a jugé contraire aux articles 8 et 14 de la op. cit.
convention européenne des droits de l’homme, portant respectivement
droit au respect de sa vie privée et familiale, d’une part, et prohibant
toute discrimination fondée sur le sexe, d’autre part, la disposition du
droit civil turc qui imposait aux femmes mariées, comme nom de famille,
celui de leur époux : « L’objectif de traduire l’unité de la famille par un
nom de famille commun ne saurait justifier la différence de traitement

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Famille pour tous ?

fondée sur le sexe ». En 2014, la même Cour a, en vertu des mêmes


articles, établi que la transmission exclusive du nom du père en Italie
s’opère sur la base d’une discrimination fondée sur le sexe des parents…
en contradiction avec le principe de non-discrimination. Cette jurispru-

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dence signale un mouvement général en Europe de suppression des pri-
vilèges du patronyme et d’égalité entre les père et mère qui ne date pas
d’hier : dès 1978 le conseil de l’Europe recommandait aux pays membres
d’adopter une législation assurant l’égalité stricte en matière de transmis-
sion du nom de famille.
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Les avancées législatives, concernant les règles de dévolution du nom


de famille en Europe ces dix dernières années (France 2005, Luxem-
bourg 2006, Suisse 2013, Belgique 2014), marquent la fin progressive
de la subordination patronymique
en offrant la liberté du choix aux
Les avancées législatives, couples et en permettant notam-
concernant les règles de ment aux femmes de transmettre
leur nom. Ce n’est pas le cas de
dévolution du nom de famille en
tous les pays européens qui, pour
Europe ces dix dernières années, certains, avaient déjà cette pos-
marquent la fin progressive de la sibilité (Allemagne, Autriche,
Danemark, Finlande par exemple)
subordination patronymique. ou à l’inverse n’en disposent tou-
jours pas comme l’Italie – même si
dans ce pays aussi une évolution rapide est à prévoir puisque diverses
propositions de lois sont actuellement en discussion. La multiplicité des
législations nationales rend compte de traditions juridiques distinctes
entre les États mais elle s’explique également par l’évolution récente de
certaines législations visant à accorder aux deux parents un statut égal
dans la transmission de leur nom de famille à leurs enfants.
Jusqu’à récemment – à l’orée des années 2000 – on avait affaire en
Europe à un modèle de transmission unilatérale (un seul nom) qui selon
les pays était au choix celui de la mère ou celui du père (système alter-
natif), ou exclusivement celui du père (système exclusif). Les exceptions
étaient l’Espagne et le Portugal, où l’exclusivité portait sur la transmission
d’un double nom (système bilatéral) mais avec la prééminence du nom
du père jusqu’en 2010 pour l’Espagne.
Aujourd’hui, on peut dessiner en Europe quatre modèles de transmis-
sion du nom de famille aux enfants : du modèle le plus libéral qui per-
met aux individus une liberté totale en matière de dévolution du nom
(Royaume-Uni), au modèle d’encadrement le plus strict (transmission
exclusive du patronyme) réduisant à néant la marge de liberté des indi-
vidus (Italie). Entre ces deux positions extrêmes, un modèle permet de
transmettre les noms des deux parents au choix comme en France (coexis-
tence du système alternatif et bilatéral), enfin un dernier modèle permet
de transmettre l’un ou l’autre nom, mais uniquement un seul comme en
Allemagne (système alternatif).

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Le nom des femmes et sa transmission

––Le système libéral : au Royaume-Uni, lorsque la responsabilité légale


de l’enfant revient aux deux parents, l’un ou l’autre peut indifféremment
procéder à la déclaration de naissance de l’enfant et préciser quel est son
nom. Il peut s’agir indifféremment du nom de la mère ou du père mais

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également, et c’est la singularité de ce pays en Europe, de tout autre nom
de son choix.
––Le système alternatif : la transmission du nom des femmes a toujours
été possible dans certains pays mais seul l’un des deux noms (paternel
ou maternel) est transmis. L’Allemagne, la Finlande et la Suède donnent
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la possibilité aux époux de choisir un nom matrimonial (ou nom conju-


gal commun), indifféremment celui de l’épouse ou de l’époux. Ils ne
peuvent par contre pas choisir de nom matrimonial double (comme
c’est le cas en France avec la possibilité de porter en nom d’usage le
nom de son époux/se). Du coup, si les parents sont mariés, l’enfant
reçoit le nom matrimonial de ses parents. Si les parents ne sont pas
mariés les parents doivent s’entendre sur le nom porté par leur enfant,
indifféremment celui du père ou de la mère. À noter qu’en Finlande
et en Suède, à défaut d’accord entre les parents, l’enfant prend le nom
de sa mère ou, si la garde de l’enfant est revenue à un seul parent, le
nom de celui-ci. En Allemagne, l’enfant né hors mariage prend le nom
de la mère.
––Coexistence des systèmes alternatifs et bilatéral : en Espagne la trans-
mission du double nom était la règle avec la prééminence du nom
paternel en première position (système bilatéral), qui éliminait de fait
le nom maternel lorsqu’il était à son tour transmis. Or en 2010, la loi sur
l’état civil a modifié cet usage en
permettant aux parents de choisir
l’ordre des noms de leur enfant. Au Portugal, l’enfant légitime
Au Portugal le système de trans- peut se voir attribuer jusqu’à
mission du nom de famille se dis-
tingue par l’étendue du choix des quatre noms de famille, choisis
noms que les parents peuvent parmi ceux de ses parents,
attribuer à leurs enfants. L’enfant
légitime peut se voir attribuer
grands-parents, arrières grands-
jusqu’à quatre noms de famille, parents, dans l’ordre choisi
choisis parmi ceux de ses parents, par le couple.
grands-parents, arrières grands-
parents, dans l’ordre choisi par le
couple. Enfin en France, jusqu’en 2005, c’est le nom du père qui était
obligatoirement transmis (dans le cadre d’une filiation établie à l’égard
des deux parents…). La loi permet dorénavant la transmission de l’un
ou l’autre ou des deux dans l’ordre choisi par les parents (cf. Focus sur
la loi française, page suivante).
––Système patriarcal : en Italie, par exemple, prédomine encore le sys-
tème du nom patronymique en vertu duquel les enfants prennent en nais-
sant le nom de leur père.

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Famille pour tous ?

Focus sur la loi française

La loi du 4 mars 2002 relative au nom de famille, entrée en vigueur le 1er janvier


2005, a réformé en profondeur le régime de dévolution du nom aux enfants
et a substitué à la notion usitée de nom patronymique celle de nom de famille.

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« Lorsque la filiation d’un enfant est établie à l’égard de ses deux parents au
plus tard le jour de la déclaration de sa naissance ou par la suite mais simul-
tanément, ces derniers choisissent le nom de famille qui lui est dévolu : soit le
nom du père, soit le nom de la mère, soit leurs deux noms accolés dans l’ordre
choisi par eux dans la limite d’un nom de famille pour chacun d’eux. En l’ab-
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sence de déclaration conjointe à l’officier de l’état civil mentionnant le choix du


nom de l’enfant, celui-ci prend le nom de celui de ses parents à l’égard duquel
sa filiation est établie en premier lieu et le nom de son père si sa filiation est
établie simultanément à l’égard de l’un et de l’autre. En cas de désaccord entre
les parents, […] l’enfant prend leurs deux noms, dans la limite du premier nom
de famille pour chacun d’eux, accolés selon l’ordre alphabétique », (Code civil,
Art. 311-21).
Le choix s’effectue par déclaration conjointe écrite des deux parents remise à
l’officier d’état civil au moment de la déclaration de naissance de l’enfant. Il est
irrévocable et s’impose dans l’ordre choisi à tous les enfants de la fratrie. À la
génération suivante, si les parents portent tous les deux un double nom, qua-
torze possibilités s’offrent à eux dans la transmission du nom à leur enfant. Si
les parents n’exercent pas leur faculté de choix, la solution est différente selon
que la filiation est ou non établie simultanément à l’égard des deux parents. Si
elle ne l’est pas, l’enfant prend le nom de celui de ses parents à l’égard duquel
sa filiation est établie en premier lieu. Si elle l’est, il prend le nom du père.

En vertu de la coutume dans certains pays, de la loi dans d’autres, la


transmission du nom du père aux enfants demeure un usage ancré dans
les familles en Europe. Ainsi en dépit de la loi de 2002 en France, dans
la très grande majorité des cas, les parents choisissent volontairement ou
s’accommodent sans difficulté de la transmission à l’enfant du seul nom
du père (83 % des enfants nés en 2012) quand 9 % transmettent le double
nom. Cependant, il ne faut pas en conclure trop rapidement que la loi
modifie peu les usages en matière de transmission du nom de famille : en
effet, malgré l’ouverture à la double transmission, la loi conserve le prin-
cipe général de la transmission du nom du père en l’absence de manifes-
tation contraire des parents. Par ailleurs aucune publicité n’en est faite, ce
qui a pour conséquence de la maintenir peu connue du grand public. La
valeur symbolique du nom en fait un lieu de lutte essentiel à l’avancée
de l’égalité entre les sexes ; quand le droit anticipe sur les pratiques, il ne
tient qu’à nous de nous en saisir et de donner l’exemple. •

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