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Chapitre 5 Spectre 1. Opérateurs dans les espaces de Banach On fixe ici un espace de Banach E sur K = B ou C et Von s'intéresse & alg de Banach (non commutative) L(E) des applications linéaires continues de E dans E (le produit interne étant la composition d’applications). On note par le mé symbole ||, || la norme sur E et la norme associée sur L(E), et l'on désigne I Vapplication identité de E. Ainsi, I est Pélément neutre de Valgtbre L{2), U élément T € L(E) est dit inversible s'il admet un inverse dans L(E), <'est-ledi s'il existe une application linéaire continue 5 telle que TS = ST = I, (Remaw que, par associativité du produit, Vexistenee d'un tel inverse $ est équivalente & existence d'un inverse a droite et dun inverse & gauche dans L(E), cest-adine existence de U,V € L() tels que VF =TU = I.) Clairement, si Test inversible, est bijectif et son inverse dans L(B) est unique et égal Aon application réciproque *, Ainsi, si T € L(B), les propriétés suivantes sont équivalentes= — T est inversible; — T est bijectif et T-! est continu ; — KerT = {0}, ln T = F et T~! est continu, En fait, 'application récipraque d'un opérateur linéaire bijectif et continu de E dans E est toujours continue. Ceci est une canséquence ditecte du théordme de! Vapplication ouverte, lui-méme conséquence du théoréme de Baire (ef. exereiew 6, p. 20). Nous ne ferons pas appel ici A ce résultat. Remarquons enfin que, si T et S sont des éléments inversibles de £(), alors TS est également inversible et (TS)! = S-'T-!, On eonviendra dans la suite que si T € £{E), alors 7° = I. Proposition 1.1 L’ensemble I des éléments inversibles de L(E) est un ouvert de L(E) qui contient I. De plus, l'application T+ T-!, de I dans FE, est continue. Plus précisément, si Ty € FE et si ||P —Th|| < ||Tg ‘+, alors T ET et ey F@-mer) a! Fm eee Démonstration, Soit Ty €Z. 1. Tout dabord, P= ToT = Peo = TH < Ze MIT - Fall et WW =TTG 4 = I= TITS s [IF — TolliTS Spectre 163 Done, si ||’ — To|| < || Te" ||-?, les séries zu. 1. pk n Yo (tape) yt Oe) = tb sont normalement convergentes et done convergentes. D'autre part, on voit aissment par récurrence sur x que, pour tout n € N. (f-m ry Rt = Ty (TH, En effet, la propriété est clairement vraie pour # = 0-et, sion la suppose vraie pour n €N, alors Car = U-Bry' (TT) =) (rT) tT -TTy) ee tae Ainsi, les deux séries sont égales. Notons S leur somme commune. 2. Vérifions que S est bien l'inverse de T. st = st [5'T- +1] sree +§(r-72)" 10 at =. (Le calcul est justifié par le fait que le produit est une application bilinéaire continue de L(£) x L() dans L(B) et par la convergence des séries.) De meme, gat -H+Nhs Se slusirsp oes beus can ==0 i =n Ainsi, si [7 — Tall < [Tq |[-*, alors T est inversible et T-! est bien égal & la somme des séries données dans |'énoncé. 8. En particulier, si [7 — Tol] < |[T ‘Il A = We -T ss STP Te Il WoW = Te" I 1-|f-T"7il [Zo PIT = Toll Wr = Toll Zo ce qui montre la continuité en Ty de l'application T ++ ee Remarque. La démonstration précédente montre que application T+ T, de E dans L(B), est localement développable en série, ce qui permettrait de démontrer que cette application est en fait de elasse C™. 164 Opérateurs: Définitions et notations Soit T € L(E). On appelle valeur spectrale de tout élément \ € K tel que Mf — T ne soit pas inversible, L’ensemble des spectrales de T est appelé le spectre de T et noté o(T). Un élément de K n'est pas valeur spectrale de T' est appelé valeur résolvante de T. L’ensemble valeurs résolvantes de T est noté p{T)) et appelé ensemble résolvant de T. Ait AT) =K\o(T) On appelle enfin valeur propre de T’ tout élément \ € K tel que Al —T ne pas injectif (c'est-d-dire tel que Ker(M — T) # {0}). Ainsi, toute valeur propre 7 est valeur spectrale de T,, la réciproque étant en général fausse (sauf bien siir E est de dimension finie ou, plus généralement, si T est de rang fini, cf, exercice ciedessous).. Si A est une valeur propre de T, l'espace Ker(J — T) sera appelé espace pro| associé & A. On notera enfin vp(T’) l'ensemble des valeurs propres de T. Soient £ = C({0,1]) et T Vopérateur associant f € E la fonction Tj Tye) = [see On voit immédiatement que KerT = {0} et ImT = {g € C¥X(0,1)) tq. (0) =O}, Ainsi, T est injectif et non surjectif; en d’autre termes, 0 ¢ vp(T) et 0 € o(T). Ni allons maintenant démontrer que 0 est 1a seule valeur spectrale de 7. Soient cela. # 0 et g €E. Si f€ E satisfait. Véquation (2) M-Tl=% alors la fonction h = Tf est un élément de C*([0, 1}) tel que (3) h(Q)=0 ct An’ —h=g. Réciproquement, si h € C7((0, 1]) satisfait (3), alors la fonction f = h’ est solution: de (2). Or il est aisé de vérifier que I’équation différentielle (3) a pour solution unigy i Ala) = S- i gltjeat Ainsi, 1 eh fe M-Ti=9 © s@)=} (oc +S athe*at) ; doit l'on déduit que A est une valeur résolvante de T et que -Ty! eo a yet [ar-7y'g @) = 5 (ster a If alte de Finalement, vp(F) = 0, o(T) = {0} et p(T) = K \ {0} Proposition 1.2 Soit T < E(E). La limite limys2o||I™l|"" existe et eaiee eee im ICY = ing Spectre 185 Ceite valeur commune est notée r(T). Dvautre part, le spectre o(T) est une partee ompacte de K et vaea(T) I 0 et soit np € Nt tel que ||7™||"" 0, cela démontre que lima 420 |[T™||!!" = @. 2. L'application A + (AZ — T), de K dans L{E), est clairement continue. Done, 'aprts la proposition 1.1, p(T) est ouvert et o(T) est fermé. Il ne reste done plus qu’a démontrer que a(T) est borné par r(T). 4. Soit 1 € K tel que |A| > r(7). Soit également r Elr(T), |All. Comme r > r(T), il existe un entier nq € N tel que Ween |lT™l r(T), cela achive la démonsteation. 0 Revenons a l'exemple de Vopérateur T défini sur B = C{(0,1)) par la relation (0), p. 164. 11 est clair que ||TI] = 1. D'autre part, un calcul aisé par récurrence montre que pour tout n N", T" f(x) eedone que |[T™|| < 1/n, ce qui entraine que r(T) = 0. On voit ici que r(7) < 7 |- __ WHEENOW YP F5ENO 1G ZosuaAia ih 166 Opérateurs SiT € L(E) et A€ p(T), on note R(T) =(M-T)7. Proposition 1.3 Soi T € L(B). Alors on a l’équation résolvante Awe AT) RAT)— Riu T) = (w= ARAPIRGT) (u= A)RHPIROKT). D’autre part, Vapplication A ++ R(A,T), de Vouvert p(T) de K dans L(E), dérivable et é ROT) = -[RO.T)] Démonstration. Tout d’abord, RAT) — RUT) = RAT )[(ul — T) — (AP — 7) R(T) = (#-)ROT)RW.T), ce qui démontre l'équation résolvante. En particulier, es ALT) — RAT) =—RAT)R(A +4,7), avec h € Kt et A, A+ h € p(T). D'aprés la continuité de application Ar R(T), conséquence immédiate de la proposition 1.1, et la continuité du produit dans L(E), on ebtient lint (RO + 4.7) — ROT) = — (RA, DP. ce qui achive 1a démonstration. 0 On sait que, si E est de dimension finie, le spectre de T peut etre vide si K =R mais qu’il ne Vest pas si K = C (le théoréme de D'Alembert assurant que le polynome caractéristique de T admet au moins une racine dans C). On va démontrer que ceei est aussi vrai si B est de dimension inf Théor’me 1.4 Soit T ¢ L(E). SiK =C, alors te spectre de T n'est pas ide et de plus, r(T) = max{|Al; € o(T)}. Le réel r(T) est appelé rayon spectral de T. Par contre, T peut ne pas avoir de valeurs propres, méme si K = C, comme le montre exemple p. 164. Démonstration 1. Notons, pour = € p{T), R. de la proposition 1.2, on s R(z,T). D’aprés la partie 3 de la démonstration que si [=| > F(T), alors Spectre 167 lasérie étant normalement convergente dans L(Z). On en déduit que, pour tout: ter(T), +00, os Rugs = Seeman #0 lasérie convergeant uniformément par rapport 46 € R dans L(2). En multi- pliant par (te!)P*1, avec p € N, et en intégeant le résultat obtenu entre 0 et 2, on obtient, d'aprés la continuité de l'intégrale de Riemann & valeurs dans T(E) (cf. par exemple l'exerciee 5, p. 18), oe te pe f (te® "Rad = > [ (tel P-*T"a0 = DT”. i n=! Ainsi, pour tout p € Net tout ¢> r(T), ape om i etl r=>f[ (tel PH Re. . Démontrons que Te spectre de T n'est pas vide. Supposons le contraire. Par Pégalité précécente dans le cas p = 0, re worl) 1 zh te! Ra, d8. Mais, si Yon suppose que p(T) = C, Ia fonction Jy définie par al fie: alt) = ge [tel Rondo est définie et continue sur [0, +00[ et de classe C” sur JO, +00[ et iy ee veo Sie) = xf 5 (te Ravn) d0 (on admet ici que, pour la dézivation sous le signe somme, Vintégrale de Rie- mann des fonctions & valeurs dans un espace de Banach se comporte comme Vintégrale des fonctions scalaires). Mais 5 (te Ries) = 68 {4 ero} . a (te! Ryn) = ite® {z Ce car on a vu dans la proposition 1.3 que la fonction > + R_ est dérivable (i.e. holomerphe) de p(Z’) dans L(2), Ainsi, doy Lp 8 ee, si woo Sa= rail yj [te ust] 00 = 0 On en déduit (théoréme cles accroissements finis pour les fonctions a valeurs dans les espaces de Banach) que Jo est constant sur [0, +o], c@ qui est faux car Jp(0)=0et, pour t> r(T), Jo(t) =z. Done o(T) n'est pas vide. = | 168. Opératenrs 3. Soit p= max{]Al; A € o(T)}. On sait (proposition 1.2) que p < r(T), Post pour n€ N’ et t > p, Lf seins Jt) = xl (tel)? Riedl. On voit comme précédemment que dJ,/at = 0 sur |p, +o0[. Donec, pour t # > p, Ja(t)=T". Notons maintenant M, = max{||Rie«|l, @ ¢ [0,2n]}. Alors YEN Ye>p [TI p, r(T) < t et donc finalement r(T) PAE o(P(T)), Cest-a-dire P(a(T)) C o(P(T)}. 2. Supposons que K = € et que P est de degeé supérieur ou égal & 1 (si P est constant, le résultat annoncé est éémentaire}. Soit. 1 € o(P(T)). Décomposons le polyndme P —j1 en un produit de facteurs de degré Pape C(X—A)}...(X— A), avec C #0. Alors P(T)— nl =C(T— Ml)... (Tal). ‘Comme par hypothese P(T) — 41 n'est pas inversible, l'un des facteurs T—dy1 ne Vest pas non plus. Mais alors, pour cette valeur de j, 4; € o(T) et, comme P(A;) =H, € Plo(T)). O arque, Dans la plus grande partie de cette section, nous n’avons pas réellement sé e fait que 'on consideérait des opérateurs mais seulement la structure d’algebre Banach unitaire de L(F). Et de fait, ces résultats s'étendent & des algebres de ach unitaires queleonques. ixercices “1, Soit T un opérateur continu sur un espace de Banach E. Démontrer que si [A] > [I], alors : A WTS Ba “2, Soit T un opérateur continu sur un espace de Banach E et soit (AnJnen une suite de p(T) qui converge vers 4 € 1K, Démontrer que sila suite (RU\q,T)) est bornée dans L(2), alors \ € p(T). Indication, Démontrer que la suite (R(As, T)) est convergente dans L(B). Soit Sa limite, Démontrer que S(Al ~ T) = (AI ~T)S= 1 %. Soient Xun espace métrique et L = G(X) et soit T un opérateur positif sur Elie ¥fek, f>0=>Tf > 0) a. Démontrer que, pour tout f € £, |Tf| r(1). Démontrer que ROTI] SHRUAL PIL Indication, Démontrer que, pour tout f € E, |B, T) |S ROALD) ¢. En déduire que r(T) € o(T). Indication. Soit, 1 € (T) tel que |A| = r(7). Considérer une suite (Aw)ncr qui converge vers telle que, pour tout n EN, |An| > r(Z) et utiliser Texercice 2. 4, Soient (AnJncw wne suite de nombres complexes et T lopérateur de (1

0, Démontrer que T est un opérateur continu de C((0, 1]) dans lui-méme et que ||| = =/2. Démontrer que tout point de Vintervalle |0, x/2] est valeur propre de T. En déduire le rayon spectral de T’ Soient p< [1,20] et $ lopérateur de L¥(J0, 1[) défini de la fagon suivante 3 op Site) = fav? sahdy. Reésoudre, en fonction de A € K* et g € L?(J0,1[), l’équation M—Sf Déterminer les valeurs propres et les valeurs spectrales de 5. Indication. Si Sf = Af, avec f € L7()0,1[) et A € C*, alors f est de la forme J(r) Sar’ Mémes questions avee lopérateur T défini sur £?(J0,1[) par 4 a! Tyla) = [zd - ev) fdd Speetre des opérateurs de rang fini. On considére un espace de Banach E et un Alément T € L(E) que Von suppose de rang fini, c'est-&-dire que la dimension de l'image de T est finie (voir par exemple les exercices 11 et 12). a. Soient F =ImT et Tp Vopérateur défini sur F par WreF Tpr=Tr. Glairement, Tp € L(F). Démontrer que T et Ty ont les mémes valeurs propres non nulles. b. Soit \ € KC et soit 5 = Mp — Tp € LF) (08 Ip désigne On suppose que S est inversible. Démontrer que A € p(T) Indication, Démontrer que AJ ~T est injectif;; calculer ensuite (AI —T)(I+ ST) et en déduire que AJ —T est bijectif et que son inverse est: continu. Démontrer que o(T) NK? = vp(T) NK’. Démontrer que, si E est de dimension infinie, alors 0 € vp(T). iii. Démontrer que o(T) = vp(T). Soient E un espace de Banach et T € L(E). On désigne par F l'adhérence de ImT. Si S € L(E) et S(F) ¢ F, on désigne par Sp élément de L(F) défini par Ve € F, Spa = Sz. ‘ay Soit \€ p(T). Démontrer que R(A,T)(F) C F et en déduire que A € (Tr) et ROA, Tp) = (RO, T))e. b. Soit A € p(Tr) \ {0}. Démontrer que (AI — T) est injectif et que (AT — T)(1 + R(A,Tp)T) = AI. En déduire que A € p(T) et que lentité de F). RQ,T) =U + ROTeID)

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