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LE JAZZ, UNE DÉMARCHE MAÇONNIQUE

Cyril Pattegay

Grand Orient de France | « Humanisme »

2010/4 N° 290 | pages 105 à 110


ISSN 0018-7364
DOI 10.3917/huma.290.0105
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-humanisme-2010-4-page-105.htm
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MUSIQUE

LE JAZZ,
UNE DÉMARCHE MAÇONNIQUE
Cyril PATTEGAY

Si nous évoquons Louis Armstrong trompettiste et interprète, Duke


Ellington, Cab Calloway, Oscar Peterson, Lionel Hampton, William
Christopher Handy « père du blues », Glenn Miller, Count Basie, ou
encore Nat King Cole, vous identifierez bien entendu un certain
nombre des plus grands artistes de jazz de leur époque, tous virtuoses
de leur instrument, héritiers d’une histoire riche et complexe, et
s’inscrivant dans une évolution musicale qui a marqué le XXe siècle.
Mais il s’agit également de frères, la plupart réunis au sein des loges afro-américaines
regroupées dans la Prince Hall Masonry, la puissante fédération de loges essaimées
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depuis 1775 et la première initiation de son fondateur, Prince Hall. Ce métis, esclave
affranchi, est initié par une loge militaire irlandaise de Boston, quasiment un siècle
avant l’abolition de l’esclavage aux États-Unis.

En 1778, une première loge noire est ainsi fondée, appelée African Lodge n°1, mais
cette nouvelle loge ne sera alors reconnue ni aux États-Unis, ni par la Grande Loge
Unifiée d’Angleterre auprès de laquelle plusieurs patentes seront pourtant
demandées. Les esclavagistes, hélas présents aussi parmi les frères de l’époque,
pèseront de tout leur poids, en soulignant notamment que « la franc-maçonnerie
accueillant des hommes libres et de bonnes mœurs, exclue de fait les esclaves, les
femmes et les handicapés ». Il faudra finalement attendre 1990 pour que la Grande
Loge de Washington reconnaisse enfin la Prince Hall Masonry.
Ainsi, le mouvement musical va-t-il épouser les mêmes évolutions que la franc-
maçonnerie afro-américaine qui possède cette particularité supplémentaire d’être
doublement secrète au monde profane et aux loges dites caucasiennes, c’est-à-dire les
loges blanches de l’époque. L’idéal maçonnique et le jazz, nous allons le voir, ont
ainsi construit à leur manière le nouveau monde.
Les premiers esclaves arrivés en 1619, en Virginie, sont dépouillés de tout repère. La
musique est alors un des rares liens qui leur permette de transcender leur réalité et
d’honorer leur histoire. Ils recréent clandestinement les banias, qui deviendront
banjos, ou encore les balafons qui donneront naissance au xylophone.
Les esclavagistes tolèrent alors la présence des noirs aux cultes protestants, dans
laquelle ils voient un moyen de soumission et d’intégration. Découvrant le principe

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des cantiques et des textes bibliques évoquant l’oppression du peuple juif, les noirs
américains s’approprient le lieu, les textes, comme transcendance spirituelle leur
permettant d’échapper à leur condition misérable.
Ils y créent alors une forme de syncrétisme spirituel à partir de leurs propres racines
africaines, fondées sur les échanges entre griot et assistance, et vont venir nourrir les
scall and responses, ce qui leur permet de donner naissance à une musique codée,
secrète, évoquant leur propre condition, compréhensible d’eux seuls alors, une
première source majeure du jazz : le Negro Spiritual qui deviendra par la suite
Gospel Song. Louis Armstrong en sera le plus illustre représentant.

Cette appropriation des textes bibliques, cette codification de la musique et de son


sens caché, vont s’accompagner, également, d’une fidélité à l’histoire qui fonde leur
condition sur le continent du nouveau-monde.

La Maçonnerie s’appuie notamment sur le mythe d’Hiram et des architectes du


temple de Salomon, et célèbre la vertu du travail. À l’instar de cette fidélité aux
opératifs, un autre style musical va émerger, à partir, là aussi d’une démarche
opérative, celle du travail dans les champs de plantation, les Works Songs ou Field
Holders.
Ces chants célébrant le labeur quotidien font écho tout à la fois à une condition,
reflètent une culture, et illustrent un état d’esprit. Ce style musical va naître dans le
sud des États-Unis avant de s’émanciper de ce lieu opératif, et à sa manière, va
devenir une démarche spéculative, notamment vers le nord, à Chicago : il s’agit du
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blues, deuxième source majeure du jazz. À ce titre, William Christopher Handy est
un des premiers à structurer le blues sous forme d’orchestre.
Si ses deux premières sources illustrent l’une, la recherche spirituelle et secrète
transcendant sa réalité, et l’autre la fidélité aux ancêtres et à leurs conditions de
labeur, une troisième source va également alimenter le lien entre jazz et franc-
maçonnerie.
La loge maçonnique Prince Hall Masonry joue alors tout son rôle dans
l’émancipation des noirs américains. Elle favorise, en particulier, la fuite des esclaves
vers le Canada, avec le chemin de fer clandestin, appelé the Underground Rail Road.
Notre frère Oscar Peterson, Canadien, et descendant d’esclave exilé, en est un parfait
exemple.
Mais elle créée également les premières universités noires, édite les premiers journaux
communautaires, finance des centres de soins, se fait le relais de la solidarité afro
américaine, toutes formes de reconnaissances ignorées par la société blanche et
ségrégationniste. Elle se bat également pour l’abolition de l’esclavage, première
grande victoire de l’émancipation noire aux États-Unis, prémices de la conquête des
droits civiques des années 60.
Cette émancipation se retrouve également avec une frange de la population noire
américaine, qui accède par la musique à un certain niveau de culture et de bien -être
économique. Un instrument, notamment, va symboliser cette émergence matérielle
et sociale : le piano.
Cette émancipation, donc, va se concrétiser avec la troisième source musicale du jazz,

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très appréciée des blancs américains en ce début de XXe siècle, le ragtime. Scott
Joplin, chef d’orchestre et compositeur majeur de l’époque, en est le plus illustre
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représentant.
Ces trois sources, negro spiritual, blues et ragtime, à l’origine du jazz, font écho à la
démarche maçonnique de la Prince Hall Masonry : musique secrète et codifiée, elle
est aussi source d’émancipation, fondée exclusivement, alors, sur l’oralité.
Quand l’émancipation s’est traduite en franc-maçonnerie par le développement de
nos démocraties occidentales, nées des Lumières, et par le développement des droits
civiques aux États-Unis avec la Prince Hall Masonry, le jazz lui, va être à l’origine de
changements musicaux sans précédents en Occident en seulement quelques
décennies : la soul, le funk, le rythm’n blues, le rock’n roll, ou encore la bossa nova,
tous ces genres y puisent leurs racines.
L’origine du mot jazz est difficile à cerner : du mot français jaser pour les uns, il est
au contraire un terme péjoratif à caractère sexuel « ass » pour d’autres. Duke
Ellington lui préférait d’ailleurs le terme de negro music. Ce dont nous sommes sûrs,
en revanche, c’est que cette musique nait dans une ville cosmopolite, avec un
caractère qui la rend universelle, la Nouvelle Orléans.
Le mélange de ragtime, de blues, de negro spirtitual va s’opérer avec la musique créole,
les chansons méditerranéennes, les marches militaires françaises, les tambours
haïtiens, pour donner naissance à des petits groupes musicaux mobiles, festifs et
rythmant la vie de cette cité composée alors de près de 200 000 habitants issus de
dizaines de nationalités différentes.
Cette Babylone moderne voit les groupes se structurer : une première section que
l’on appelle rythmique, s’appuie sur la guitare, le banjo, ou encore le piano, la
contrebasse, les percussions. Elle va accompagner la deuxième section, dite

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mélodique, appelé aussi thème. Ce sont principalement les instruments à vent qui
sont alors chargés de le faire vivre.
Autour de ce thème qui est permanent, que l’on appellera plus tard « standard »,
viennent se greffer des interprétations spécifiques, individuelles, qui le nourrissent
tout en respectant son équilibre. À ce titre les orchestrations de King Oliver sont
parmi les plus éminentes.
Le jazz de la Nouvelle Orléans s’appuie majoritairement sur un rythme qui lui
donne ce balancement – appelé swing, un rythme ternaire. Le thème est donc joué
sur un swing, qui s’enrichit des interprétations de ses musiciens, proposant
successivement, voire simultanément – propre au New Orleans Jazz Bands – des
interprétations et des variations individuelles.
Le parallèle avec les rituels rythmant nos travaux, les outils nous permettant de
travailler et les planches individuelles nourrissant nos loges peut être ainsi dressé, et
nourrit le lien que nous pouvons créer entre les deux univers.
Les jazz bands se défient dans la ville, sous forme de joutes musicales, appelées
cutting contests. Cette musique, née dans une ville multiculturelle, issue du secret et
des codes des esclaves émancipés, va connaître un essor majeur. Les musiciens blancs
commencent également à s’approprier cette musique, consacrée sous le nom de
Dixieland. À Chicago, dans le South Side, Louis Armstrong régale les amateurs,
pendant qu’à New York, Errol Gardner, Fats Weller ou Sidney Bechet animent
Harlem.
Ces groupes s’émancipent vers le nord et se regroupent en big bands, en raison
notamment de la crise économique des années 30, qui ne permet plus aux musiciens
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de subvenir seuls à leurs besoins. C’est aussi la fin de la prohibition, qui libère le jazz
d’une certaine clandestinité recherchée dans les clubs.
C’est surtout une rupture majeure, qui fait passer le jazz de l’oralité à l’écriture,
nécessaire au bon ordonnancement de groupe pouvant accueillir de nombreux
musiciens. Cette universalité devient alors lisible, avec l’arrivée des premiers grands
leaders et chefs d’orchestre pour structurer ces grands ensembles.
L’un des plus géniaux d’entre eux, Duke Ellington, va donner toute la mesure de
cette nouvelle forme de jazz : poursuivre le subtil équilibre des interprétations qui
deviennent alors des solos, de plus en plus complexes, au service de thèmes reconnus
et devenus standards, avec un swing nourri par le plus grand nombre.

The Blue Note


Cet égrégore musical va donner au jazz son âge d’or, avec des lieux mythiques,
comme le Cotton Club, où Duke Ellington officie pendant de nombreuses années.
Dans cette démarche alliant respect du standard, appui de la rythmique et liberté
donnée à la virtuosité à condition qu’elle nourrisse l’ensemble, un autre big band fait
référence, à la tête duquel un grand chef d’orchestre, notre frère Count Basie, fait
merveille.
Cette universalité et cette harmonie font le succès du jazz. Mais il est un point
fondamental qui en fait une musique unique : c’est l’interprétation qui en est
proposée, ces fameux solos successifs ou simultanés déjà évoqués, qui deviennent

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avec le temps et la maîtrise des musiciens, des improvisations, les fondements


constitutifs de cette musique.
Dans la musique classique, l’improvisation reste une exception : certaines cadences
autrefois improvisées dans les concertos, les lignes basses continues dans la musique
baroque ou encore les improvisations à l’orgue, notamment chez Bach en sont
quelques contre-exemples.
Dans le jazz, l’improvisation est au cœur même de la musique. Comme le dira le
grand saxophoniste Sonny Rollins, « ce n’est pas la composition qui est importante
dans le jazz, mais l’interprétation qu’on lui fait subir ».
À partir des thèmes qui structurent la base du morceau et qui sont composés de
succession d’accords que l’on appelle grille d’accords, soutenu par un swing que la
section rythmique propose, les lignes mélodiques vont venir donner libre cours à
l’invention, à l’improvisation.
Si ce sont essentiellement une gamme majeure et deux gammes mineures qui
structurent la musique classique – si l’on excepte la musique dodécaphonique - le
musicien qui improvise va faire appelle à une multitude de gammes en fonction des
accords entendus dans le thème. C’est pour cela qu’il va commencer par écouter les
successions d’accords et les mémoriser. Cette phase d’écoute préalable avant toute
improvisation personnelle, est propre au jazz, mais aussi, les apprentis le vivent
comme démarche préalable à leur évolution, à la Maçonnerie.
L’improvisation va se fonder sur un autre élément propre au jazz, qui le différencie
du classique dans l’expression de ses gammes : il s’agit de la note bleue, celle donnant
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la sonorité particulière au blues et au jazz. Il s’agit de la 7e note diminuée.
Ce chiffre 7, symbole de perfection et d’achèvement, l’âge de la maîtrise, les sept ans
employés par Salomon pour construire son temple, le nombre impair et premier. Ce
chiffre symbolique, union du quaternaire pythagoricien qui régit l’harmonie du
monde et du ternaire maçonnique.
Maîtres de leur art et de leurs instruments, fruit de longues années d’apprentissage,
les virtuoses s’engagent alors dans des improvisations, des Jam Sessions et
déstructurent les thèmes, désarticulent les harmoniques, dans des recherches les plus
personnelles.
Les plus importants, par exemple Charlie Parker ou Thélonious Monk, Miles Davis
ou encore John Coltrane, vont nourrir le jazz d’après guerre et remettre en cause le
style Big Bands qu’ils jugent embourgeoisé : le be bop, le cool jazz, le hard bop entre
autres en seront les nouvelles expressions. L’une des œuvres les plus audacieuses, en
matière d’improvisation, aura été celle de Miles Davis, créant en moins de 24 heures
et quasiment en une seule prise la musique originale du film « Ascenseur pour
l’échafaud ».
Tous les maîtres ont été, au départ, initiés par d’autres maîtres : il en est ainsi de
Louis Armstrong, accueilli en 1917 par King Oliver, jusqu’à Miles Davies, qui
accompagnera sur trente années de maîtrise l’émergence de John Coltrane, Bill
Evans, Herbie Hancock ou Ron Carter pour ne citer que ceux là.
Les plus grands improvisateurs, donc les plus grands jazzmen, évolueront à force de
travail et de maîtrise de leur instrument, avant de coopter d’autres musiciens, qui

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grandiront ainsi pour s’approprier progressivement l’art de l’improvisation, qui ne se


transmet pas mais se pratique.
John Coltrane, improvisateur parmi les plus aboutis, en quête de spiritualité, honore
la mémoire des esclaves évadés au Canada grâce au chemin de fer clandestin, dans
un rythme effréné nourri de bruit et de fureur, de peur et de chaos, intitulé
Underground Rail Road. Souvent perçue comme élitiste voire inaudible, ou au
contraire jugée d’une laxiste spontanéité, l’improvisation nécessite en réalité une
connaissance supérieure de son thème, en parfaite harmonie avec le swing proposé.
Cette démarche supérieure de virtuosité nous renvoie, encore une fois, à la démarche
maçonnique, au travail nécessaire et toujours renouvelé. Ce que l’interprétation et
les variations sont à la planche maçonnique, l’improvisation l’est à la prise de parole
sur les colonnes.
Le jazz, musique universelle née dans le secret et les codes, revendiquant l’intégrité
et la liberté des hommes, est devenu source d’émancipation de tout un peuple pour
ensuite rayonner sur le monde et inspirer toutes les musiques post classiques
occidentales depuis la fin du XIXe siècle.
Il est une harmonie, fondée sur une discipline collective et une maîtrise individuelle
favorisant l’expression de la virtuosité de chacun au bénéfice de tous. Il est
initiatique, avec de nombreux parrains prestigieux, et prend enfin, avec
l’improvisation, la forme d’une démarche individuelle absolue, d’une recherche
personnelle permanente, d’une vérité née d’une expression de l’instant, à force de
travail et de maîtrise.
En ce sens, il est aussi une démarche maçonnique.
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Cab Calloway à Minneapolis lors d’une cérémonie maçonnique.

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