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DECRYPTAGE - Un chercheur a passé trois systèmes d’enseignement supérieur à la loupe et c’est éloquent !

En Suède, les étudiants composent eux-mêmes leur cursus tandis que les Anglais évaluent le mérite des élèves
au cas par cas. En France, l’obsession du diplôme prédomine. 

Sur un campus suédois, l’étudiant français serait largué. Il devrait choisir lui-même ses matières pour composer
un cursus hétérogène, pouvant mêler physique et littérature. Tremblant d’avoir une responsabilité dans des
choix si cruciaux, il s’étonnerait en plus que ses camarades aient 28 ans et ne vivent plus au crochet de leurs
parents depuis leur bac. Car d’un pays à l’autre, les modèles d’éducation varient en fonction des représentations
sociales et de politiques réglées sur des logiques bien différentes. Nicolas Charles, sociologue au Centre Emile
Durkheim (Université Bordeaux Segalen), a comparé à la loupe les systèmes d’enseignement supérieur de la
Suède, la France et l’Angleterre dans sa thèse .À chaque étape majeure de la vie d’un étudiant, ils témoignent
de conceptions opposées. Et face à ses voisins, le système français s’avère le plus rigide.

EVALUER LA MÉRITOCRATIE SELON LES NOTES OU LE CONTEXTE FAMILIAL?


A chacun sa conception de la méritocratie. En France, elle ne se définit qu’à travers les résultats scolaires: la
moyenne générale reste l’unique prisme de sélection. Vos notes du bac et votre mention vous enverront en IUT
ou prépa, et celles de prépa dans les meilleures grandes écoles.Parce que la société considère que
l’enseignement secondaire républicain offre à chaque jeune le même socle et les mêmes outils de savoir, c’est là
le seul moyen objectif de distinguer la «valeur» de l’élève. Comme si l’école avait éradiqué tout déterminisme
social .«Lors des concours, tout le monde passe la même épreuve au même moment. Avec l’idée que si l’égalité
parfaite règne entre eux, alors que le meilleur gagne!», développe Nicolas Charles.
En Suède, on sait qu’aucune mesure de la méritocratie parfaite n’existe. Les universités se fient alors à deux
systèmes d’évaluation complémentaires: la moyenne générale au bac et un test d’aptitude national. Surtout
destiné à favoriser les élèves «non-scolaires» mais pourtant très capables, ce dernier comporte des tests psycho-
techniques, un test d’anglais, de connaissances et de vocabulaire. «On peut avoir quelqu’un qui n’a jamais
réussi à l’école mais qui peut reprendre ses études grâce au test. Souvent, il y a une grande différence entre les
résultats de ce test et les notes scolaires», explique Nicolas Charles.
En Angleterre, c’est la politique du cas par cas. Chaque dossier de candidat est passé au peigne fin pour rendre
compte du mérite de l’élève. Les bulletins scolaires sont regardés à la lumière du contexte social dans lequel a
grandi l’élève: famille, nombre de frères et soeurs, origines ethnique et territoriale. «Les Anglais cherchent à
prendre en compte l’idée de potentiel», note Nicolas Charles. Ainsi, un élève de milieu défavorisé qui aura
11/20 de moyenne en terminale aura de meilleures chances d’être admis dans une bonne université qu’un enfant
de famille bourgeoise avec un 12/20 de moyenne.

COMPOSER SON CURSUS COMME UN MENU


Une fois étudiants, les Français n’ont qu’à choisir un cursus déjà pensé pour eux, en adéquation avec les
attentes des professionnels. «On s’appuie surtout sur les compétences professionnelles pour se former à un
métier, avec une spécialité. L’important, c’est d’aller dans la filière qui compte, tout de suite après le bac, sans
retard ni reprise future. Impossible de s’arrêter en route, on aurait trop peur de ne jamais avoir le courage de
reprendre. C’est presque de l’auto-censure», commente Nicolas Charles.
« Après 13 ans au collège et au lycée, les Suédois se disent qu’ils peuvent faire autre chose qu’étudier tout de
suite après leur bac » Nicolas Charles, chercheur en sociologie.
Plus flexibles, les deux pays voisins ne font pas un drame d’une réorientation ou d’une année sabbatique,
appelée «Gap Year ».«À 18 ans, les étudiants suédois sont empreints de la “skoltrött ”, la lassitude de l’école.
L’idée est qu’après 13 ans de scolarité, ils peuvent faire autre chose. Certains s’arrêtent un an, d’autres trois,
puis reprennent le cours de leurs études ensuite». La scolarité ne se fait pas en continu: les Suédois articulent
sur six ans environ leurs activités personnelles et professionnelles, entre semestres d’études, voyages et emplois
divers .Ils composent leur cursus comme un collier de perles très différentes, en enfilant des semestres des
matières de leur choix, les uns après les autres. Tandis qu’en France, il faut respecter un cursus cohérent dans
une même matière, chaque semestre validé est un acquis définitif. L’étudiant suédois peut obtenir sa licence
avec un semestre de physique, deux d’histoire et trois de sociologie. Il devra juste choisir 3 semestres d’une
même matière pour définir sa spécialité.
L’Angleterre est entre deux eaux. Certains parcours sont déjà pré-établis et d’autres proposent des cursus bi-
disciplinaires dont l’étudiant choisira librement les deux composantes. En France, ces parcours hybrides
existent, timidement, mais avec des couples de matières déjà conçus par l’université.

EN FRANCE, L’ÉTUDIANT EST AU CROCHET DE SA FAMILLE


D’un pays à l’autre, l’étudiant n’a pas la même autonomie financière. Les Suédois jouissent d’une scolarité
gratuite. Ils disposent de 200 euros par mois de subvention de l’Etat pour 12 semestres d’études, soit six ans,
valables jusqu’à leurs 54 ans! Ils peuvent également contracter un prêt étudiant d’environ 500 euros par mois à
faible taux d’intérêt, remboursable jusqu’à leurs 45 ans! Un prêt qu’ils remboursent au fur et à mesure des petits
boulots qu’ils effectuent lors de leurs pauses académiques. «Pour les Suédois, l’étudiant est un individu
autonome. Sa famille n’a pas forcément l’obligation de le soutenir, contrairement à la conception des pays du
Sud de l’Europe», explique Nicolas Charles. La France ne lâche pas son système familiariste: les bourses sont
calculées sur les revenus des parents et le reste des aides comme les APL restent faibles. Après 28 ans,
impossible de toucher des aides pour ses études.
En Angleterre, les étudiants font face à un coût de la vie étudiante  très élevé en faisant appel au système de prêt
public étudiant, qui encourage toutes les catégories sociales à se ruer à l’université. Pour cela, le futur diplômé
ne doit rembourser son prêt seulement s’il gagne plus de 20.000 euros par an. Et s’il reste dans une situation
précaire, au bout de 25 ans, il n’a plus à rembourser sa dette... les contribuables s’en chargeront!

LE DIPLÔME COMME SEULE VALEUR FACE AU RECRUTEUR FRANÇAIS


Formation et insertion professionnelle étant étroitement imbriquées, là encore les approches divergent. Face au
recruteur français, l’originalité ne paie pas. «La France garde un système assez conservateur. Le recruteur va
principalement regarder quelle école a fait le candidat, sa spécialité, ses stages et voilà», illustre le chercheur en
sociologie. Alors que le Français n’a rien d’autre à valoriser que son diplôme, le Suédois et l’Anglais vont aussi
mettre leurs expériences non-scolaires sur la table du recruteur, disposé aux compétences transversales. «En
Angleterre, on demandera la mention de la licence puis on va s’intéresser aux autres activités extra-scolaires
qu’a fait le jeune. En Suède, on va aussi vendre sa gap year, ses petits boulots, son activité associative... Car on
est perçu comme un individu et non un “diplômé”».
 
Commentaire:
les meilleures grandes écoles : Le Times Higher Education a publié son palmarès des écoles qui ont formé les plus grands
chefs d’entreprise en exercice, actuellement dans le monde. Polytechnique, HEC et l’ENA se classent dans les 6
premières places.
déterminisme social: INFOGRAPHIE - Un prénom, un destin. Une nouvelle étude montre la surreprésentation de certains
prénoms dans les différentes séries du bac. Et atteste ainsi d’un déterminisme social persistant dans l’éducation.
«Gap Year »: De plus en plus de jeunes Français interrompent leurs études pendant un an pour voyager et réfléchir. Cette
gap year, commune aux USA, effraie toujours les parents ; Mais elle gagne doucement ses galons auprès des recruteurs.
emplois divers: Pour financer leurs études, leur loyer, leurs sorties, près d’un tiers des étudiants cherchent un job qui
puisse se combiner harmonieusement avec leurs horaires de cours. 
prêt étudiant: Pour les jeunes qui peinent à trouver un emploi à la sortie de leurs études, cet investissement qu’ils
pensaient rentable pour l’avenir peut rapidement devenir un boulet qui les entraîne vers la précarité.
stages: Près de 7700 jeunes ont contribué à attribuer le label Stage Advisor aux entreprises qui choient le plus leurs
stagiaires. McDonald’s, Nestlé, Danone, Coca-Cola, Kronenbourg, Heineken, L’Oréal et Ubisoft font partie des heureux
élus.
EXERCICES
1. Expliquez les mots suivants et donnez des synonymes:
Décryptage se fier à
à la loupe passer au peigne fin pour
larguer en adéquation avec
vivre au crochet de qqn ne pas se faire en continu
crucial articuler
s’avérer être entre deux eaux
éradiquer
2. Interprétez les notions suivantes selon le contexte:
cursus se former à un métier
thèse "gap year"
IUT faible taux d’intérêt
prépa APL
socle les contribuables
la moyenne générale au bac recruteur
milieu défavorisé insertion professionnelle

3. Commentez:
A chacun sa conception de la méritocratie.
On peut avoir quelqu’un qui n’a jamais réussi à l’école mais qui peut reprendre ses études grâce au test.
En Angleterre, c’est la politique du cas par cas.
Impossible de s’arrêter en route, on aurait trop peur de ne jamais avoir le courage de reprendre.
Plus flexibles, les deux pays voisins ne font pas un drame d’une réorientation ou d’une année sabbatique,
appelée «Gap Year ».
L’Angleterre est entre deux eaux.
Ils peuvent également contracter un prêt étudiant
... les contribuables s’en chargeront!
4. Traduisez en utilisant le lexique du texte:
1. У швецькому університетському містечку французький студент розгубився б. 2. Шведи дозволяють,
аби їх студенти розподіляли приблизно на шість років свою особисту і професій активність поміж
семестрами, подорожами і різноманітними роботами. 3. Тремтячи від відповідальності за такий
важливий вибір, французький студент здивований, що його шведському товаришу вже 28 років та до
того ж він не живе за рахунок батьків з часу отримання бакалавра. 4. Очевидним залишався той факт,
що вони утворюють всій особистий розклад курсів, ніби кольє з різноманітних перлин, нанизуючи
семестри предметів на свій розсуд, поступово, один за одним. 5. Університети розраховують на дві
системи оцінювання: загальний бал з іспиту на бакалавра та бал з державного тесту. 6. У англійців
предмети у деяких навчальних напрямках завчасно встановлені, тоді як існують бідисциплінарні
напрямки, де студент має право обрати відразу два його складових. 6. Він визнає, що англійці
вишукують потенційність. 7. Позику студенти повертали поступово завдяки усіляким підробіткам, на
яких вони працювали під час академічної відпустки. 8. Ставши студентом, французи мали б обрати курс
вже продуманий для них у відповідності до вимог роботодавців. 9. Якщо студент залишається до 25
років у скрутному фінансовому становищі, він не мусить більше сплачувати позику, нею
опікуватимуться платники податків. 10. Врахуйте обов’язково професіональні вміння, перед тим як ви
визначитесь з майбутньої справою, вашою спеціальністю. 11. Не дивно, що освіта і працевлаштування
щільно пов’язані. 12. Він був здивований, що швецька система розрахована заохочувати «нешкільних»
учнів, проте дуже здібних. 13. Роботодавець принципово розглядатиме, яку школу ви відвідували, вашу
спеціальність і стажування. 14. Нерідко буває, що учень з неблагополучного середовища з середнім
балом у атестаті має більше шансів бути прийнятим у престижний університет ніж учень буржуазного
походження. 15. В той час як француз не цінує нічого більше за свій диплом, шведи і англійці ще
пропонують роботодавцям свій нешкільний досвід, який відповідає загальноприйнятим компетенціям.
16. Шкільний атестат розглядається у світлі соціального контексту, тобто того середовища, в якому
виріс учень.

5. Remplissez un tableau:
France Suède Angleterre
prisme de
selection à
l’université
composer son
cursus

autonomie
financière

les valeurs pour


les recruteurs

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