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DÉCEMBRE 2005
AUTEURS
AVEC LA COLLABORATION DE
Ce document est disponible en version intégrale sur le site Web de l’Institut national de santé publique
du Québec : http://www.inspq.qc.ca. Reproduction autorisée à des fins non commerciales à la
condition d’en mentionner la source.
CONCEPTION GRAPHIQUE
MARIE PIER ROY
REMERCIEMENTS
COMITÉ CONSULTATIF
SECRÉTARIAT
RÉSUMÉ
Au terme de cette évaluation, il apparaît que les dépistages actuellement réalisés sont
pertinents mais il y aurait lieu de mieux documenter les résultats de santé obtenus suite au
traitement des enfants atteints de tyrosinémie en poursuivant la recherche. Pour l’essentiel,
la performance du programme est bonne car il permet d’identifier et de traiter rapidement
tous les enfants atteints tout en minimisant les effets négatifs du dépistage. Les
arrangements actuels n’assurent toutefois pas que cette bonne performance se maintiendra
et il y aurait des améliorations à apporter à certains éléments comme l’information aux
parents et le système d’information. La viabilité est l’élément le plus fragile de ce programme
et en particulier ses arrangements de gouvernance. Au moment où de nouvelles
connaissances et technologies forcent à examiner l’opportunité d’ouvrir le programme de
dépistage à d’autres maladies, il est prioritaire de définir les arrangements de gestion,
d’assurance qualité et d’imputabilité qui permettront d’assurer la pertinence et la qualité des
activités du programme.
1. Que le MSSS dote le programme d’un cadre de référence complet qui lui confère
officiellement le statut de programme de santé publique.
Ce cadre de référence doit préciser l’ensemble des paramètres du programme : but
et objectifs, population cible, maladies à dépister, lignes directrices et mécanismes de
contrôle concernant toutes les composantes et activités du programme, indicateurs
de résultats, cibles à atteindre, normes à rencontrer, modalités de financement, cadre
de gestion des ressources, environnement organisationnel et description des rôles et
responsabilités des instances créées, clarifiant l’imputabilité et la reddition de compte,
mécanismes d’évaluation et d’amélioration continues du programme, activités pour le
développement futur du programme et activités de recherche scientifique et
technologique.
2. Que le MSSS initie une démarche pour faire évaluer la pertinence d’ajouter d’autres
maladies à dépister chez le nouveau-né.
Nous formulons également des recommandations plus spécifiques qui pourraient servir à
l’élaboration du cadre de référence. Les recommandations de la Section A peuvent être
qualifiées de transitoires en ce sens qu’elles peuvent être appliquées au programme assez
rapidement et sans grands investissements supplémentaires de ressources.
SOMMAIRE ET RECOMMANDATIONS
des entretiens téléphoniques réalisés dans les centres d’accouchements et les centres de
référence, de l’analyse comparée de la situation québécoise avec d’autres situations
retrouvées ailleurs dans le monde, de même que de l’appréciation du programme québécois
à partir de critères et recommandations relatifs aux programmes de dépistage néonatal et
formulés par des organismes reconnus sur les plans national et international.
Pour ce qui est de la tyrosinémie, l’appréciation des critères de pertinence proposés par le
National Screening Committee amène à des conclusions plus nuancées. Il s’agit d’une
maladie métabolique à transmission autosomique récessive, fréquente au Québec (1:17 788
naissances) et plus particulièrement dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean (1:1 846
naissances). Selon l’évolution de la maladie, le nouveau-né atteint aura progressivement de
l’insuffisance hépatique et/ou rénale, un carcinome hépatocellulaire et des crises. La survie
des enfants atteints est réduite et dépend de l’âge d’apparition des symptômes. Le dépistage
de la tyrosinémie repose principalement sur le dosage biochimique de marqueurs contenus
dans un échantillon sanguin séché sur papier buvard. Le type et la combinaison des tests
utilisés pour le dépistage de la maladie ont évolué depuis le début de ces activités et la
méthode actuelle est très performante. Le dépistage de la maladie ayant été spécifique au
Québec pendant longtemps, aucun guide spécifique au diagnostic de la tyrosinémie n’est
publié par des organismes reconnus. Par contre, en raison d’une incidence plus élevée de
cette maladie dans la population, le Québec a développé une grande expertise concernant la
tyrosinémie et élaboré des guides concernant le diagnostic et les choix à offrir aux enfants
atteints. En matière de traitement, les résultats d’une étude pan-québécoise en cours sur
l’utilisation de NTBC suite au dépistage précoce sont très significatifs en ce qui a trait à la
réduction de la morbidité et de la mortalité des enfants tyrosinémiques. Le traitement au
NTBC a grandement amélioré la survie des patients atteints de tyrosinémie aiguë et a réduit
le besoin de transplantation hépatique et/ou rénale chez les jeunes enfants. Toutefois, les
données sont limitées pour les effets à long terme de ce traitement, de même que les
données relatives au rapport coûts/bénéfices d’un tel programme de dépistage, que ce soit
au Québec ou ailleurs dans le monde.
La performance des tests de dépistage est excellente, avec une sensibilité de 100 % pour
les trois maladies dans les cinq dernières années et une spécificité presque aussi parfaite.
Les activités de dépistage contribuent à minimiser le nombre de faux positifs pour les trois
maladies et les résultats se comparent avantageusement à ceux d’autres pays, malgré
l’absence de mécanismes de contrôle de qualité devant minimiser la nécessité de reprise
des prélèvements. Les traitements sont reconnus efficaces et leur instauration est précoce;
le délai global compris entre la naissance et l’identification des nouveau-nés atteints d’une
maladie, puis pris en charge et traités, est inférieur à 21 jours pour les enfants n’ayant
nécessité qu’un seul prélèvement; ce qui rejoint les délais recommandés. D’après les
médecins responsables des centres de référence, le succès thérapeutique est évident et
concerne pratiquement tous les enfants atteints de phénylcétonurie ou d’hypothyroïdie
congénitale. Toutefois, ces résultats ne reposent sur aucune donnée colligée de façon
systématique dans le système d’information du programme de dépistage.
Malgré ce qui précède, le programme de dépistage fait bonne figure en matière d’assurance
qualité, particulièrement en ce qui a trait à l’existence de lignes directrices et de mécanismes
de contrôle entourant l’analyse des échantillons reçus. Beaucoup reste à faire, cependant,
pour rendre explicites bien des éléments de directives déjà implicites au niveau de
l’ensemble des activités entourant le dépistage, la référence des enfants dépistés positifs et
la prise en charge des enfants atteints. Également, dans l’éventualité où le programme
québécois serait appelé à ajouter des maladies à dépister, toute la procédure actuelle
entourant les façons de faire au regard des trois maladies dépistées, incluant tout l’aspect
information du public, des parents concernés par le dépistage, des partenaires impliqués
dans l’une ou l’autre des étapes du programme, de même que l’obtention d’un consentement
résultant d’un choix éclairé et la reconnaissance du droit des parents de s’opposer à la
procédure est à bonifier. En effet, dans l’éventualité d’ajouter au programme des maladies à
dépister ou d’en modifier des composantes, tous ces éléments devront être réexaminés à la
lumière des enjeux légaux et éthiques de nouveau soulevés. À cet égard, la pertinence de
chacune des maladies à ajouter devra être évaluée en profondeur avant d’envisager toute
extension du programme.
Sans aucun doute, la recommandation la plus importante que nous pouvons faire pour le
programme de dépistage sanguin consiste à le doter d’un cadre de référence qui en précise
les grands paramètres. Également, l’absence de cadres de gestion et d’imputabilité pour le
programme nous amène à proposer un environnement organisationnel (voir la page
suivante) dans lequel sont identifiées des instances décisionnelles et où les rôles et
responsabilités des différentes parties impliquées dans le programme sont clarifiées
(chapitre 5, évaluation de viabilité). Enfin, plusieurs recommandations spécifiques
concernant des éléments du cadre de référence sont formulées en fonction de cet
environnement organisationnel proposé pour le programme.
2. Comité de direction
Équipe
1. Que le MSSS dote le programme d’un cadre de référence complet qui lui confère
officiellement le statut de programme de santé publique. Ce cadre de référence
devrait être développé en collaboration avec les parents, les professionnels de santé
et un comité aviseur composé d’experts de toutes les disciplines concernées.
2. Que le MSSS initie une démarche pour faire évaluer la pertinence d’ajouter d’autres
maladies à dépister chez le nouveau-né.
13. Que le responsable provincial du programme définisse les rôles et les responsabilités
de l’ensemble des organismes et comités impliqués dans le programme : MSSS,
établissement hôte, centres d’accouchements, centres de référence, comité de
direction, comité aviseur.
14. Que le comité de direction s’assure qu’une définition des rôles et des responsabilités
existe et représente la réalité pour l’ensemble des intervenants au programme, soit le
personnel du programme, de l’établissement hôte impliqué dans le programme, les
répondants des centres d’accouchements et des centres de référence, etc.
15. Que le comité de direction élabore les mécanismes nécessaires (responsabilité
établie, objectifs, suivi, appréciation, rétroaction) à la pratique de l’imputabilité, sans
trop alourdir ou bureaucratiser le programme pour le personnel et les répondants
régionaux dans les établissements.
À propos des mécanismes de financement et du cadre budgétaire
16. Que les responsabilités reliées au financement soient clairement déterminées par le
responsable provincial du programme, et ce, pour l’ensemble des intervenants
concernés par le programme.
17. Que le financement actuel soit révisé en fonction des nouveaux paramètres définis
pour le programme, qu’il soit dédié et acheminé directement au comité de
direction du programme.
18. Que le budget alloué au programme demeure suivi à l’intérieur d’un poste budgétaire
unique.
19. Que le comité de direction consulte le personnel du programme et les partenaires
impliqués sur les besoins réels et sur les améliorations à apporter au financement du
programme.
20. Que le comité de direction vérifie que les fonctions de travail et les responsabilités
soient clairement définies pour l’ensemble des intervenants impliqués dans le
programme, soit l’équipe du programme, les répondants des centres
d’accouchements et des centres de référence.
21. Que le comité de direction implante progressivement un mode de gestion axé sur les
résultats : établissement d’objectifs annuels, d’attentes signifiées, de mécanismes de
suivi et de mobilisation, d’une reddition de compte et d’une valorisation du personnel.
22. À l’étape du dépistage, que les opérations du programme demeurent centralisées
dans un établissement universitaire.
39. Que l’on révise les variables existantes de la banque de données en fonction des
besoins de suivi, de l’évaluation de la performance du programme et de l’information
nécessaire à l’élaboration d’indicateurs d’effets et d’impacts du programme.
40. Que la banque de données utilisée pour le traitement de l’information soit revue et
adaptée en fonction d’une plus grande convivialité technique de son utilisation.
À propos des prélèvements sanguins
41. Que le comité aviseur examine la possibilité d’élargir les critères d’utilisation
secondaire des échantillons sanguins à des fins de diagnostic, de recherche et/ou de
surveillance, le cas échéant.
42. Que le comité de direction révise la politique de conservation des échantillons (durée,
raisons et conditions de conservation), de même que l’utilisation secondaire des
informations en fonction des recommandations proposées par le comité aviseur.
43. Que le comité de direction rende explicite la directive du programme retenue et
entourant les modalités d’entreposage, de conservation et d’utilisation secondaire
des échantillons sanguins.
À propos des délais
Le comité de direction doit :
44. Établir des normes pour les délais pour lesquels il n’y a pas de directives et de
normes prévues.
45. Clarifier la directive à suivre pour l’âge au prélèvement, tant pour les prélèvements
faits en maison de naissances qu’en milieu hospitalier.
46. Revoir avec les différents établissements leur façon de procéder pour l’envoi des
prélèvements, de manière à mieux définir et à mettre en place des procédures qui
permettront de diminuer le temps entre la prise de l’échantillon et la réception au
laboratoire.
47. Identifier un répondant dans chacun des centres d’accouchements qui sera responsable
de transmettre l’information échangée avec l’équipe de dépistage du programme et qui
aura l’autorité nécessaire pour s’assurer du respect des directives et procédures émises
par le programme.
À propos du diagnostic, du suivi et du traitement des enfants atteints
48. Que le comité de direction assume la responsabilité, dans le cas des enfants dépistés
positivement, non seulement de référer l’enfant, mais également de vérifier que le
suivi effectué par les centres de référence produit les résultats escomptés.
49. Que le comité de direction s’assure de la mise en place d’une standardisation de la
procédure de diagnostic, de suivi et de traitement des enfants dépistés positifs, dans
les centres de référence, afin de permettre au programme de répondre, à partir
d’indicateurs d’effets et d’impacts, de sa raison d’être.
50. Que le comité de direction mette sur pied un mécanisme (ex. grille standardisée de
collecte de données) pour faire le suivi des enfants traités/pris en charge afin
d’évaluer l’observance des traitements et le succès thérapeutique.
51. Que le comité aviseur se penche sur la possibilité de déterminer les valeurs seuils de
diagnostic et les protocoles à suivre à l’endroit des femmes en âge de procréer avec
hyperphénylalaninémie.
52. Que le comité de direction mette sur pied un mécanisme pour s’assurer que les
femmes enceintes avec hyperphénylalaninémie sont effectivement suivies pour les
taux de PHE durant leur grossesse.
53. Que le comité de direction s’assure de l’identification, à l’intérieur des centres de
référence, d’un(e) répondant(e) responsable de l’application adéquate des éléments
du programme de dépistage.
59. Que le MSSS mette en place des mécanismes pour juger de la pertinence d’ajouter
d’autres maladies au programme de dépistage sanguin. Pour ce faire, un comité ad
hoc ou un organisme conseil pourrait être mandaté, et la réalisation de cette
évaluation devrait être basée sur une liste de critères acceptés par la communauté
scientifique tels que les critères utilisés dans la présente évaluation.