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UNIVERSITE CATHOLIQUE D’AFRIQUE CENTRALE

Institut Catholique de Yaoundé


FACULTE DE THEOLOGIE
ANNEE ACADEMIQUE 2019-2020

Cours de Catéchèse et homilétique


Professeur : Abbé Antoine ESSOMBA FOUDA

PLAN GENERAL DU COURS

Il est divisé en trois parties

A. Cours magistral

But du cours
Introduction générale
1. Préalables pour une bonne réception de la catéchèse dans la vie chrétienne
- Approche définitionnelle
- Méthode de transmission de l’Evangile aujourd’hui
2. Etude des sources de la catéchèse pour une réception efficiente des vérités de la
foi.
- Le Catéchisme National de la Conférence Episcopale Nationale du Cameroun comme
terminus ad quem du Catéchisme de l’Eglise Catholique.
- Les formes de la catéchèse liturgique :
- la catéchèse comme initiation à la liturgie,
- la liturgie catéchèse en acte,
- la liturgie source de la catéchèse.
- Les récits des apparitions du Christ comme modèle d’une ecclésiologie pastorale au
service de la catéchèse pour l’approfondissement de la foi et l’enrichissement spirituel.
3. La place et l’importance de l’homélie dans la célébration du mystère de la foi.
- L’homélie une des missions du sacerdoce ministériel
- Etude du Directoire sur l’homélie
- L’homélie et le contexte liturgique
- L’ars praedicandi
- L’homélie et les défis de l’inculturation

B. Interactivité du cours
Dans le cadre du système LMD (Licence, Master, Doctorat), le cours sera enrichi
d’exposés et des travaux dirigés par groupe d’étudiants à partir des documents
conciliaires (GS, LG), magistériels (Evangelii Nuntiandi du pape Paul VI;
L’Exhortation apostolique Catechesi Tradendae, du pape Jean Paul II, Verbum
Domini du pape Benoît XVI ; Evangelii Gaudium du Pape François …etc) et des
auteurs M. Jourion, catéchèse et liturgie chez les pères in LM n° 140 (1979), 41-49
Cfr. J. Daniélou-R du Charlat, la catéchèse des premiers siècles.

C. Conclusion générale
Elle sera le récapitulatif du cours magistral et des exposés et travaux dirigés.
Introduction générale

«Allez dans le monde entier. Proclamez l’Evangile à toute la création» (Mc 16,
15). Telle est la mission évangélisatrice universelle que les apôtres ont reçu du
Christ après sa résurrection. C’est la même que continue l’Eglise aujourd’hui
sous formes d’expressions kérygmatiques à travers la pastorale, la catéchèse, la
liturgie etc. Ce toujours dans « un renouveau de pensée, d’activité, de mœurs, de
forces morale de joie et d’espérance1 », tel que le stipulait le Saint Pape Paul VI.
Il s’agit en fait de susciter, de transmettre et de raviver en chaque fidèle chrétien,
le mystère du Christ qui s’exprime dans la foi (mysterium fidei ou depositum
fidei). La méthode utilisée est celle de la lex credendi. Ce mystère est appelé à
être célébré pour la vie d’où la lex orandi qui doit se transformer chez le fidèle
chrétien en une vie de culte spirituel devenant ainsi la lex vivendi ou ars vivendi.
On comprend pourquoi parmi les « tria munera » dont est investi le pasteur
d’âme, l’annonce de l’Evangile occupe la première place. Ce d’autant plus que
comme le souligne fort bien le Pape Jean Paul II, «il y a l’évangélisation et la
catéchèse qui prennent une nouvelle vigueur précisément lorsqu’on est attentif à
la parole de Dieu2».
Mais comment enseigner le Christ, Verbe incarné et Fils de Dieu pour un
enracinement en profondeur de son Evangile sans entrer en dialogue avec les
cultures ? Si à vrai-dire, les enseignants ne sont que les transmetteurs et porte-
paroles du Christ qui est le Vrai Enseignant; quel langage faut-il utiliser
aujourd’hui pour le monde rural ? Par ailleurs, la mission évangélisatrice
universelle de l’Eglise se passe dans un monde de plus en plus sécularisé. Ses
repères se cherchent dans l’univers de la technique mieux du numérique donc du
calculable, du « faisable » que de l’expérience vécue de la foi dans une Eglise
vivante. C’est pourquoi comme le souligne fort bien Joseph Ratzinger, pape
Benoît XVI « la question du salut ne se pose pas en fonction de Dieu, qui ne
parait nulle part, mais en fonction du pouvoir de l’homme qui veut devenir son
propre constructeur et celui de son histoire. Les critères de sa morale, il ne les
cherche donc plus dans un discours sur la création ou le Créateur, qui lui sont
devenus inconnus3.» Dans ce monde sans repère sûr et qui draine avec lui des
problématiques sociétales nouvelles d’ordre anthropologique, culturel, cultuel et
éthique, force est de reconnaître que la quête de la transcendance ne peut pas
être occultée et requiert un éclairage de la lumière de la foi sur le sens à donner à
la vie. D’où l’importance de sa conceptualisation catéchétique doctrinale.

1
Paul VI, Discours de clôture du Concile œcuménique Vatican II, 8 décembre 1965 ; AAS 58 (1966), pp. 7-8
2
Jean Paul II, Lettre apostolique Novo Millennio Ineute, Libreria Editrice Vaticana, Città del Vaticano 2001, n.
39.
3
AAVV., Transmettre la foi aujourd’hui, in Cardinal J. RATZINGER, Transmission de la foi et sources de la
foi, Edition Tégui, Paris 1983, p. 36.
Et comme le souligne fort à propos le saint Pape Jean Paul II dans l’Exhortation
Apostolique, Catechesi Tradendae : « le but définitif de la catéchèse est de
mettre quelqu’un non seulement en contact mais en communion, en intimité
avec Jésus-Christ: lui seul peut conduire à l’amour du Père dans l’Esprit et nous
faire participer à la vie de la Trinité4.» Tout cela n’appelle-t-il pas, à une
nouvelle vision et à des méthodes adaptées pour la nouvelle évangélisation ?

Par ailleurs, si la foi a besoin d’être célébrée, l’Eucharistie qui est «fons et
culmen» de la liturgie permet aux chrétiens de participer de façon active et
consciente au mystère de la foi. L’homélie joue à ce titre un rôle très important.
En effet comme le dit le Pape François, «l’homélie a une valeur spéciale qui
provient de son contexte eucharistique, qui dépasse toutes les catéchèses parce
qu’elle est le moment le plus élevé du dialogue entre Dieu et son peuple, avant
la communion sacramentelle5». C’est pourquoi le pape Benoît XVI à la suite de
l’Exhortation apostolique Verbum Domini6, fera publier par le biais de la
Congrégation pour le culte divin et la Discipline des Sacrements, un Directoire
sur l’homélie7 pour justement aider le prêtre à s’outiller des instruments et des
moyens appropriés pour son ministère.

De ce qui précède, il revient à l’Eglise de former des pasteurs capables de


transmettre de façon fidèle et efficace l’Evangile. Le cours abordera donc deux
grands thèmes connexes: la catéchèse et l’homilétique. Il s’appuiera
principalement sur trois sources : la Bible, la Tradition patristique et le
Magistère. Pour une bonne intelligence de ce qui précède, notre cours va
s’articuler en trois parties : le cours magistral, la partie interactive et la
conclusion générale.

Le volet magistériel va s’élaborer comme suit:


a) dans un premier temps, nous allons présenter les préalables pour une
bonne réception de la catéchèse dans la vie chrétienne. Ainsi à partir de sa
définition, nous poserons aussi le problème de la méthode de transmission
de la catéchèse aujourd’hui.
b) Dans un deuxième temps, nous ferons l’étude des sources de la catéchèse
pour une réception efficiente des vérités de la foi. Puisque la foi se célèbre
à travers la liturgie, les formes de la catéchèse liturgique feront l’objet de
notre attention telle que : la catéchèse comme initiation à la liturgie, la
liturgie catéchèse en acte, la liturgie source de la catéchèse.

4
Jean Paul II, Exhortation Apostolique: Catechesi Tradendae, Libreria Editrice Vaticana, Città del Vaticano
1979, n°5.
5
François, Evangelii Gaudium, Libreria Editrice Vaticana, Città del Vaticano 2013, n. 137.
6
Cf. Pape Benoît XVI, Exhortation Apostolique post-synodale, Verbum Domini, Libreria Editrice Vaticana,
Città del Vaticano 2010, n° 60.
7
Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements, Directoire sur l’Homélie, Edition Bayard/
Cerf/ Fleurus-Mame, Paris 2015.
c) Cette partie nous servira aussi de transition pour aborder le troisième volet
du cours qui va porter sur la place et l’importance de l’homélie dans la
célébration du mystère de la foi. En plus du catéchisme de l’Eglise
catholique et d’autres documents magistériels tels que Catechesi
Tradendae,  Verbum Domini, Evangelii Gaudium, le Catéchisme National
de la Conférence Episcopale Nationale du Cameroun nous servira aussi de
paradigme pour comprendre l’exigence de l’inventivité dans la
transmission de la foi chrétienne qui s’accompagne d’un dialogue
permanent et dynamique entre l’Evangile et la culture.
d) Nous ne manquerons pas de parler des défis de l’inculturation aujourd’hui
et ouvrir des perspectives pour voir dans la catéchèse une source
permanente d’approfondissement de l’Evangile et d’enrichissement
spirituel.

I. PREALABLES POUR UNE BONNE RECEPTION DE LA


CATECHESE DANS LA VIE CHRETIENNE
I.1. Approche définitionnelle

Le catéchisme comme le définit fort bien le saint pape Jean Paul II, « est un
exposé de la foi de l’Eglise et de la doctrine catholique, attestées ou éclairées par
l’Ecriture sainte, la Tradition apostolique et le Magistère ecclésiastique 8.»
L’Eglise Mater et Magistra garante du dépôt révélé et en communion totale avec
la réforme conciliaire de Vatican II a mis de ce fait, à la disposition des chrétiens
et ceci selon le vœu des pères synodaux9, «un catéchisme ou un compendium de
toute la doctrine catholique tant sur la foi que sur la morale, […] un texte de
référence pour les catéchismes ou compendiums qui sont composés dans les
divers pays10.»  Ce document très riche dans l’enseignement de la foi s’appuie
sur quatre piliers qui sont des normes sûres exprimées dans : la profession de la
foi baptismale (symbole), les sacrements de la foi, la vie de la foi (les
commandements), la prière du croyant (le Notre Père). Mais si le Dieu qui se
fait proche de l’homme « L’appelle, L’aide à Le chercher, à Le connaître et à
L’aimer de toutes ses forces 11», il appert que la transmission de ce dépôt de la
foi ne va pas sans problème au niveau de la méthodologie.

I.2. Méthode de transmission de l’Evangile aujourd’hui.


8
Jean Paul II, Constitution Apostolique Fidei depositum pour la publication du Catéchisme de l’Eglise
Catholique, Libreria Editrice Vaticana, Città del Vaticano, 1992, p. 8.
9
Le 25 janvier 1985, le saint pape Jean Paul II, avait convoqué une assemblée extraordinaire du Synode des
évêques à l’occasion du vingtième anniversaire de la clôture du Concile. De ces assises est née l’idée de
l’élaboration d’un catéchisme de l’Eglise catholique.
10
Rapport final, du Synode extraordinaire ; voir aussi : Jean Paul II, Constitution Apostolique…op cit. p. 6.
11
Ibidem, n° 1.
Avec la réforme de Vatican II, des méthodes nouvelles de transmission de la foi
ont vu le jour par rapport au Catéchisme de saint Pie V. C’est ainsi que certains
ont supprimé le catéchisme traditionnel dont ils trouvaient le genre dépassé
parce que d’après eux, il privilégiait la mémoire qu’ils utilisaient de façon
excessive. Questions et réponses apprises par cœur n’exigeaient que peu ou pas
de compréhension. Beaucoup supprimèrent carrément la mémorisation. On alla
jusqu’à encourager les enfants à composer eux-mêmes leurs prières, sous
prétexte que les formules traditionnelles semblaient trop difficiles et impossibles
à comprendre pour de jeunes esprits.

Mais les conséquences furent graves sur l’identité de l’Eglise et au plan de


l’éducation en général ; d’où cette exhortation opportune du saint Pape Jean Paul
II qui dit ce qui suit :

« Alors que dans l’enseignement profane de certains pays, des plaintes s’élèvent
de plus en plus nombreuses sur les fâcheuses conséquences du mépris de cette
faculté humaine qu’est la mémoire, pourquoi ne chercherions-nous pas à la
remettre en valeur de manière intelligente et même original dans la catéchèse,
d’autant plus que la célébration ou « mémoire » des grands faits de l’histoire du
salut exige qu’on en possède une connaissance précise? Une certaine
mémorisation des paroles de Jésus, de passages bibliques importants, des dix
commandements, des formules de profession de foi, des textes liturgiques, des
prières essentielles, des notions clefs de la doctrine…. loin d’être contraire à la
dignité des jeunes chrétiens, ou de constituer un obstacle au dialogue personnel
avec le Seigneur, est une véritable nécessité, comme l’ont rappelé avec vigueur
les Pères synodaux12.»

De toute évidence, la compréhension des formules de foi revêt une importance


considérable. Mais il ne faut pas insister trop sur le principe admis de cette
compréhension. Qui donc comprend pleinement et de façon exhaustive le Notre
Père, le Je vous salue Marie ou les dix commandements ? Pourtant le chrétien
qui accepte d’apprendre ces formules dans sa jeunesse, les saisit et les apprécie
de mieux en mieux à mesure qu’il s’efforce de vivre plus profondément sa vie
spirituelle à partir de la pratique religieuse et de l’exercice des vertus morales.

En outre on peut noter combien les très jeunes enfants aiment – en dépit de leur
maladresse – pouvoir se joindre à leurs parents pour réciter le Notre Père à la
messe. C’est de la sorte que les jeunes deviennent adultes dans le Christ au sein
de la communauté ecclésiale, et qu’ils deviennent héritiers de la Tradition.

Inutile d’ajouter que cette terminologie de la foi doit dès le départ être
explicitée. Les vérités essentielles exprimées par elles ne peuvent pas toujours

12
Jean Paul II, Catechesi….op cit. n° 55.
être saisies immédiatement, peut-être même ne le seront-elles jamais tout à fait.
Il y a certains éléments de nos prières, du culte et de la doctrine qui toujours
demeureront mal compris et en partie cachés: «nous les voyons dans un miroir,
d’une manière confuse. » (Co 13, 12). Cela ne signifie pas que nous sommes
dispensés de les apprendre et de les enseigner aux nouvelles générations. Car
cela s’impose pour assurer la continuité et l’identité de la Foi, par conséquent de
l’Eglise.

Du reste, dire que le vocabulaire de la foi semble trop technique aux jeunes pour
qu’ils puissent l’apprendre et donc qu’on leur enseigne, c’est ignorer l’aisance
avec laquelle ils maîtrisent la terminologie de la technique scientifique. La
navigation spatiale, les guerres interstellaires, ils connaissent quantité de jeux
modernes de la plus extrême complexité, ils en raffolent. Ce n’est pas pour rien
qu’on les appelle aujourd’hui, la génération androïde

Et puis, au cours du temps, cette terminologie de la foi acquise dans la jeunesse


prendra peu à peu davantage de sens. En effet, une conscience religieuse plus
évoluée et une compréhension meilleure conséquente y pourvoiront. Bien plus,
ces mots parfois si étranges au commencement, n’acquièrent une signification
personnelle qu’au cours même des hauts et des bas de la vie religieuse.

Ces formules de la prière, de la doctrine, et de la vie chrétienne qu’il convient


d’apprendre apparaissent ainsi extrêmement importantes du point de vue de la
catéchèse. Elles constituent le cœur du savoir partagé par tous les fidèles qu’un
même engagement avec le Christ réunit. Elles présentent un grand intérêt pour la
propagation et le développement de l’instruction qu’elles appellent.

Lorsqu’on connaît bien les prières Eucharistiques officielles, celles-ci peuvent


faire l’objet d’explications et de développements. Par-là, les fidèles se rendent
compte de la richesse de leur tradition, de la profondeur de leur foi, lesquelles
consistent en connaissance de Dieu et la manière chrétienne de vivre sa vie (Ex.
l’invite à la profession de foi avec l’exclamation anamnétique du célébrant
principal : Il est grand le mystère de la foi !)

Un autre problème qui se pose est celui des différentes méthodes catéchétiques
qui malheureusement ne permettent plus de présenter la foi comme un tout
organique en soi, mais seulement comme des reflets choisis d’expériences
anthropologiques partielles.

A la méthode apologétique, on a préféré d’autres approches telles que :


l’approche kérygmatique, anthropologique, personnaliste ou expérientielle. Il
faut l’avouer, cela a créé une certaine confusion dans les esprits au point que
l’essentiel de la Foi arrive à ne plus être vu. La conséquence en est qu’il n’y a
plus de continuité de l’enseignement de la foi ni davantage d’unité dans son
expression. Ainsi beaucoup d’élèves qui deviennent comme des cobayes de ces
différentes méthodes catéchétiques en sortent sans une connaissance vraie de la
foi, des principes de la vie chrétienne, de l’Eglise et de la liturgie, qu’on serait
en droit d’attendre d’eux ; car le cœur de la doctrine n’as pas été correctement
présenté avec clarté, une insistance et une intelligence suffisante. A-t-on bien
entrepris de faire apprendre aux élèves cette base minimum dont ils pourront
user plus tard lorsqu’ils affronteront les problèmes d’adultes en chrétien ? Bref
la doctrine n’a pas été correctement enseignée. Les jeunes ont besoin d’être
pourvus de ce que l’on pourrait appeler les repères principaux du paysage de la
Foi.

Par ailleurs, peu après le Concile Vatican II, il s’est produit quelque confusion
entre le rôle des catéchistes et celui des théologiens. Des personnes qualifiées
dans la catéchèse crurent qu’elles l’étaient aussi en théologie et qu’elles
pourraient se lancer dans les controverses. Le danger de l’inclusion dans la
catéchèse d’hypothèses théologiques exploratoires ou expérimentales est que
catéchistes et élèves versent par la suite dans la confusion et ne savent plus où
ils en sont.

Concernant la responsabilité des parents dans la transmission de la foi de leurs


enfants, le psaume 77, 3-4 est fort éclairant à ce sujet :

« Nous avons entendu et nous savons

ce que nos pères nous ont raconté ;

nous le redirons à l’âge qui vient,

sans rien cacher à nos descendants :

les titres de gloire du Seigneur,

sa puissance et les merveilles qu’il a faites »

C’est pourquoi, il est important qu’il y ait une étroite collaboration entre parents,
catéchistes, prêtres et apprenants pour mieux vivre la foi. En effet, le
christianisme ne se réduit pas à une formule à apprendre, à des coutumes
culturelles, il est aussi plus profondément une vie intérieure. Dès l’Eglise
primitive, cette vérité essentielle fut mise en valeur: les Actes des Apôtres
appellent le christianisme « la voie » (Ac 24,22). Ceci correspondrait avec la
compréhension dans l’AT de ce qu’était la Révélation offerte au peuple de Dieu.
Ce dernier ne cesse d’être exhorté à garder les commandements parce que c’était
la réponse adéquate à l’amour que Dieu lui portait. Et il fallait passer de l’écoute
des commandements à leur mise en pratique au quotidien. Il faut aussi
développer la capacité de réfléchir sur sa foi afin de pouvoir en donner raison
(Cf. 1P 3, 15). Le chrétien en effet, a besoin d’affermir les fondements
intellectuels de sa foi. Il importe donc que les laïcs possèdent une formation qui
les affermit. Une fois clarifié ce premier point, essayons de voir comment
l’Evangile doit entrer en dialogue avec la culture pour une appropriation des
vérités de la foi.

2. ETUDE DES SOURCES DE LA CATECHESE POUR UNE RECEPTION


EFFICIENTE DES VERITES DE LA FOI.

2.1. Présentation du Catéchisme National de l’église catholique au


Cameroun

Ce Catéchisme National obéit à l’intention du saint Pape Jean Paul II dans sa


Constitution Apostolique, Fidei Depositum qui tout en mettant à la disposition
de l’Eglise universelle un Catéchisme prévoit néanmoins la «composition des
catéchismes nationaux ». Le Directoire Général pour la Catéchèse publié en
1997 précise encore mieux le projet du Souverain Pontife quand il déclare  que
« le Catéchisme de l’Eglise Catholique est destiné à encourager et à aider à la
rédaction de nouveaux catéchismes locaux qui tiennent compte de diverses
situations et cultures, mais qui gardent avec soin l’unité de la foi et la fidélité à
la doctrine catholique13 ».

Nous avons là en écho, les paroles du même pape qui dit dans l’Exhortation
Apostolique Post synodale : Ecclesia in Africa : « une foi qui ne devient pas
culture est une foi qui n’est pas pleinement accueillie, entièrement pensée et
fidèlement reçue14 ». La Conférence Episcopale Nationale du Cameroun a donc
voulu traduire dans les faits l’adaptation voire l’inculturation du Catéchisme. En
effet, comme continue Ecclesia in Africa l’inculturation est non seulement une
« priorité », mais aussi « une urgence dans la vie des églises particulières pour
un enracinement réel de l’Evangile en Afrique15 ».
Nous allons donc essayer de découvrir comment les évêques de la CENC s’y
sont pris pour introduire dans les cultures les vérités révélées tout en restant unis
et fidèles à la foi catholique. Cette partie de notre intervention se divise en trois
volets : la structure externe, la structure interne et un regard critique de l’œuvre.

2.1.2. La structure externe du catéchisme national

C’est un document de 631 pages divisé en cinq thématiques.

13
DGC 131§1b.
14
EA n° 78.
15
Ididem n° 59.
La première thématique est le status questionis et débute par la note pastorale
qui explique les raisons ecclésiologiques et pastorales de la publication de ce
document magistériel local. Nous y trouvons l’introduction, la présentation du
document;  la méthode de travail et le Nihil obstat du Président de la CENC.
La deuxième thématique qui correspond à la première partie du document est
intitulée : La foi proclamée. Cette partie comprend deux sections subdivisées en
29 chapitres.
La troisième thématique qui correspond à la deuxième partie est intitulée : La foi
célébrée. Cette deuxième partie comprend aussi deux sections subdivisées en
chapitres (du chapitre 30 au chapitre 44).
La quatrième thématique qui correspond à la troisième partie a pour titre : La foi
vécue. Elle comprend également deux sections subdivisées en chapitres (du
chapitre 45 au chapitre 70).
La cinquième thématique qui correspond à la quatrième partie est intitulée : La
foi Priée. Elle comprend aussi deux sections subdivisées en chapitres (du
chapitre 71 au chapitre 77). Nous avons enfin les annexes, les sigles et la table
des matières.

2.1.3. La structure interne du Catéchisme National

En lisant attentivement ce document magistériel local, nous constatons que les


évêques sont habités par une double intention :
Premièrement, réceptionner fidèlement dans ses contenus l’Editio typica ; c’est
à dire le Catéchisme universel de l’Église Catholique (document source) et dans
un second moment se l’approprier à partir de l’univers culturel du peuple
chrétien Camerounais. D’où le triple souci qui transparait à la lecture attentive
de ce document. Il s’agit pour eux de susciter le mystère de la foi (mysterium
fidei ou depositum fidei) par l’annonce de l’Evangile; de le transmettre et de le
raviver en chaque fidèle chrétien. La méthode utilisée est celle de la lex
credendi. Ce mystère est appelé à être célébré dans les sacrements et les
sacramentaux pour la vie ; d’où la lex orandi qui doit se transformer chez le
fidèle chrétien en une vie de culte spirituel bien enracinée dans la culture
purifiée par la Parole de Dieu devenant ainsi la lex vivendi ou ars vivendi. C’est
donc la virtus Dei ou la puissance de Dieu qui se révèle dans toute sa dimension
dans ce Catéchisme National.

2.1.4. La Première partie : la Foi proclamée


Une belle image de la collection de peinture inculturée « Jésus Mafa16 »
illustrant l’appel des deux premiers disciples par le Christ ouvre cette partie. Les
évêques en effet, commencent par une étude anthropologique qui les plonge
dans l’univers culturel et religieux de l’homme camerounais sans pour autant
occulter les temps modernes. Cette approche méthodologique qui est le fil rouge
de tout le document leur permet de montrer non seulement le désir de
transcendance de tout homme mais aussi comment ce désir et cette relation à
Dieu se manifestent et se traduisent à travers la médiation des ancêtres. Ce n’est
qu’après, que le Document aborde la révélation divine, les Saintes Ecritures et la
réponse de l’homme illustrée par le père de la foi : Abraham qui permet de
comprendre aussi l’attente messianique du peuple d’Israël et l’adhésion du fidèle
au Christ.

Un autre point important à relever est que dans l’enseignement de la catéchèse,


le document met en valeur et de manière intelligente et originale dans chacune
de ses parties, la mémorisation à travers des questions et réponses en vue d’une
connaissance précise des grands faits de l’histoire du salut à travers les paroles
de Jésus, les passages bibliques importants, les dix commandements, les
formules de profession de foi, les textes liturgiques, les prières essentielles, les
notions clefs de la doctrine tel que le recommande le saint pape Jean Paul II
dans l’Exhortation Apostolique, Catechesi Tradendae susmentionné.

La deuxième section de cette première partie est donc non seulement le Credo
expliqué mais aussi professé en ce Dieu trine : le Père créateur, le Fils qui réalise
le dessein du salut et l’Esprit Saint qui continue à actualiser dans l’Eglise cette
Economie du salut. L’iconographie du regretté père Engelbert  Mveng illustrant
la présentation par les africains des oblats au Seigneur ainsi que sa résurrection
du séjour des morts vient donner encore plus d’éclat à la belle image de la
collection de peinture inculturée «Jésus Mafa» représentant elle aussi, la
résurrection du Christ au début de cette section.

2.1.5. La deuxième partie : La Foi célébrée


Une foi professée doit déboucher sur la célébration pour la louange de Dieu et la
sanctification. Ce qui permet aux évêques de revisiter la sacramentaire dans la
célébration du mémorial de la mort et la résurrection du Christ. Ces sacrements
sont divisés en trois catégories : les sacrements de l’initiation chrétienne
16
La collection « Jésus Mafa » représente les grands moments de l'Évangile dans la culture
africaine, accompagnées d'un texte simple d'explication pour petits et grands. La collection de
peintures « Jésus Mafa » a pour origine un prêtre missionnaire qui a voulu pour l'Afrique un
outil d'inculturation permettant aux adultes comme aux enfants de (re)découvrir et méditer la
vie de Jésus sous un jour nouveau, universel. Les 60 illustrations représentent les grands
moments de l'Évangile et sont accompagnées d'un texte simple qui raconte la scène et en
explique le sens.
(Baptême ; Confirmation et Eucharistie) ; les sacrements de service (Mariage et
sacrement de l’Ordre) ; les sacrements de guérison (Pénitence réconciliation et
Onction des malades) qui nous immergent tous pour la vie dans le mystère
pascal. Dans cette démarche les évêques n’omettent pas une fois de plus, de
solliciter la culture afin que le mystère de Dieu puisse se couler dans ses thèmes,
ses modèles et ses institutions illuminés et purifiés par l’Evangile. D’où le thème
de l’inculturation très récurrent dans chaque partie de ce document magistériel.
Les évêques abordent aussi les autres célébrations liturgiques telles que les
sacramentaux et les funérailles chrétiennes. Les belles images de la collection de
peinture inculturée « Jésus Mafa » représentant tour à tour le lavement des pieds
par Jésus pendant la sainte cène; le baptême de Jésus et sa multiplication des
pains soutiennent cette partie.

2.1.6. La troisième partie : La foi vécue


Toute liturgie célébrée de façon participative; active et consciente doit en toute
logique voire nécessairement, déboucher sur le témoignage authentique de vie
chrétienne. C’est la spiritualité. C'est-à-dire l’imitation et l’assimilation au
Christ à travers l’écoute attentive de sa parole ; sa mise en pratique et la
célébration des sacrements. C’est pourquoi le Catéchisme National prend
l’homme dans sa triple dimension humaine, spirituelle et sociale. Son agir doit
être imprégné de sa nature d’être crée à l’image et à la ressemblance de Dieu. Sa
mission étant de transformer le monde par la justice sociale, la loi morale, il va
s’appuyer sur la loi du Christ manifestée à travers les vertus théologales, les dix
commandements de Dieu et les six commandements de l’Eglise. L’imagerie
tirée toujours de la collection de peinture inculturée «Jésus Mafa» qui illustre
cette partie s’inspire de la flagellation du Christ et des béatitudes.

2.1.7. La quatrième partie : Foi priée.


Soulignant avec force la nécessité de la prière dans la vie de l’homme (homo
liturgicus), le document montre depuis l’Ancien jusqu’au Nouveau Testament,
la place et le rôle prépondérant de la prière dans la vie du croyant. L’Eglise
Epouse du Christ qui, par l’opération de l’Esprit Saint, loue son Maître et élève
des prières pour l’intercession et la sanctification des hommes et de l’univers est
une vraie école de prières. Parmi le patrimoine orant de l’Eglise se trouve en
bonne place la prière des enfants de Dieu : le Pater Noster enseigné par le Christ
Lui-même et la prière du je vous salue Marie. A y regarder de près le
Catéchisme National convie les chrétiens à entrer à l’école des moines avec la
Lectio Divina. Logiques avec eux-mêmes, les évêques convoquent dans cette
partie deux images de la collection de peinture inculturée «Jésus Mafa»
représentant la prière de Jésus au jardin de Gethsémani et le fils prodigue.

Il est à souligner que les Evêques dans la dynamique de la missiologie selon


Vatican II; s’effacent pour réserver la première page de couverture à monsieur
l’abbé Simon Mpeke ; connu surtout sous le nom de Baba Simon; pasteur très
célèbre de nos frères les kirdi du Nord Cameroun. C’est pourquoi on le voit sur
cette photo entouré des jeunes soulignant ainsi l’avenir de l’Eglise au Cameroun
qui compte sur la jeunesse chrétienne. C’est à la quatrième de couverture que
nous avons une belle photo du collège épiscopal du Cameroun entouré de ses
collaborateurs dans sa mission évangélisatrice d’Eglise-famille.
Apres cette présentation de ce catéchisme national dans sa structure externe et
interne y aurait-il des points à améliorer dans le sens d’un enrichissement si oui
à quel niveau ?

2.1.8. Approche évaluative de l’œuvre

Disons que si ce Catéchisme National est un bel exemple d’inculturation de la


parole de Dieu, il appelle aussi à un enrichissement de part et d’autre qui
n’enlèvent évidemment rien à sa valeur.

- Sur le plan méthodologique

Une œuvre monumentale de cette envergure devrait avoir des pages


bibliographiques. Ce qui n’est malheureusement pas le cas. Par ailleurs, la
numérotation de la table des matières ne correspond pas du tout aux parties ou
aux chapitres auxquels elle renvoie. On a donc du mal à concilier la
numérotation de la table des matières avec le nombre de pages proprement dites
du document ; c'est-à-dire 631. Voilà aussi un point à améliorer.

De plus, l’Histoire chronologique de l’Eglise Catholique au Cameroun est plus


ou moins approximative pour ne pas dire incomplète. Elle appelle donc à une
mise à jour (aggiornamento).

Au niveau de la structure interne, la quatrième partie pouvait bien s’articuler


avec la lex orandi (foi célébrée).

Par ailleurs, si le Catéchisme National s’ouvre par une belle photo de Baba
Simon, illustration du père de la Foi chrétienne chez nos frères les Kirdi du Nord
Cameroun, il serait cohérent au même titre que les images de la collection de
peinture inculturée « Jésus Mafa » d’y mettre une légende.

En outre ; dans son effort d’inculturation de ce document magistériel local, il


est bon que des concepts tels que l’ancêtre, l’inculturation soient bien définis et
expliqués avant leur mise en dialogue avec les vérités de la foi. Ce qui n’est pas
le cas. Ce catéchisme National inculturé si précieux appelle donc à une
deuxième édition revue et corrigée. Etudions maintenant le lien entre catéchèse
et liturgie dans certaines de ses formes.
2.2. Les formes de la catéchèse et liturgie

De prime à bord, il faut noter qu’il existe un lien harmonieux et intrinsèque entre
la catéchèse et la liturgie. Le saint Pape Jean Paul II l’exprime à suffisance dans
son exhortation à l’Eglise de Rome d’actualiser la réforme conciliaire en ces
termes : « dans cette optique, il faudra travailler encore pour instaurer un rapport
plus harmonieux entre catéchèse et liturgie, de manière à « lire » à la lumière de
la Parole de Dieu, les signes qui révèlent et actualisent le mystère du salut, de
façon à en expliquer toutes les conséquences dans la vie de foi et l’engagement
missionnaire». Le rapport donc entre catéchèse et liturgie est toujours à
comprendre du point de vue de l’effort de l’intelligibilité de la foi reçue,
célébrée et vécue.

2.2.1. La catéchèse comme initiation à la liturgie,

La catéchèse à cet effet, aide à une participation active et consciente du peuple


de Dieu dans la liturgie. Non seulement elle donne la signification des rites mais
elle permet d’éduquer les fidèles à l’oraison, au remerciement, à la patience, à la
demande de foi, au sens communautaire, au langage symbolique. A travers les
signes visibles, la catéchèse éduque les fidèles à la connaissance des invisibles
mystères salvifiques de Dieu. Voilà pourquoi le contenu de la catéchèse est
célébré dans la liturgie. La catéchèse est toujours en référence aux sacrements.
Car c’est elle qui prépare aux sacrements et aboutit aux sacrements de la foi.
D’autre part, une pratique authentique des sacrements a nécessairement un
aspect catéchétique. En d’autres termes, « la vie sacramentelle s’appauvrit et
devient très vite un ritualisme creux, si elle n’est pas fondée sur une
connaissance sérieuse de la signification des sacrements. Et la catéchèse
s’intellectualise, si elle ne prend pas vie dans une pratique sacramentelle 17 ». Et
la catéchèse s’installe dans l’intellectualisme, si elle ne prend pas vie dans la
pratique sacramentelle. La catéchèse doit donc préparer les fidèles à la
participation liturgique.

Elle initie les chrétiens à accueillir la valeur des signes liturgiques à travers
lesquels Dieu se révèle et se communique ; les habilite à la profession de foi, qui
s’expriment surtout dans l’Eucharistie et les disposent à accomplir avec le Christ
l’offrande qui plait au Père. Ainsi l’expérience liturgique qui touche de manière
singulière tout l’homme, conforte l’action catéchétique. Les fidèles grandissent
dans l’intelligence du mystère chrétien, nourris par les sacrements pascal. La
liturgie est donc source inépuisable de la catéchèse parce qu’elle est l’expression
vive du mystère du Christ. La liturgie devient par conséquent une précieuse
catéchèse en acte. De ce qui précède nous pouvons retenir trois points :
17
Jean Paul II, Catechesi…op cit n° 23.
- La liturgie, comme catéchèse en acte ;
- L’apport de la catéchèse à la liturgie ;
- La contribution de la liturgie à la catéchèse.

Mais quelles implications pastorales pouvons-nous en tirer ?

2.2.2. La catéchèse liturgique et les implications pastorales

Il faut noter que l’analyse de la situation, la globalité du projet pastorale ont mis
en lumière, par exemple qu’il n’est plus possible de n’aborder que le thème de la
catéchèse et de la liturgie sans tenir compte de toutes les implications pastorales
telles que la charité, le témoignage, la mission. C’est pourquoi il faut toujours
rechercher certes l’unité entre catéchèse et liturgie, mais aussi au-delà, y allier la
charité et la communauté. En outre, les problèmes de la catéchèse et de la
liturgie doivent être résolus dans la prospective de la mission évangélisatrice de
l’Eglise dans cette exigence urgente «de l’engagement renouvelé de
l’évangélisation» de nos communautés (nouvelle évangélisation). Catéchèse et
liturgie sont des manières de s’exprimer de la communauté ecclésiale et des
modes de vivre l’expérience chrétienne. L’étude du rapport entre catéchèse et
liturgie ne peut donc pas se limiter à une comparaison méthodologique entre
deux disciplines théologiques, mais elle demande de faire une relecture du
problème dans l’interaction de toute l’action ecclésiale. Le rapport entre
catéchèse et liturgie se pose ainsi dans une nouvelle optique :
- L’unique sujet : l’Eglise ;
- La mission du sujet : l’évangélisation ;
- La globalité de l’action : parole, célébration et charité ;
- La pluralité des réalisations : les itinéraires.

De ce qui précède, essayons d’en faire une application à partir de l’Evangile de


saint Luc 24, 13-35 qui est un modèle ecclésiologique et pastoral.

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